• Le texte de Kaypakkaya en (quasi) intégralité, traduit de l'anglais ; absolument FONDAMENTAL car en définitive tous ces régimes "laïcs"/"progressistes" des pays musulmans, encensés par la gauche occidentale contre les "islamiiiiistes" (y compris, on peut maintenant le dire, celui qui aura régné quelques années au Nord de la Syrie sous le nom de "Rojava"), sont en dernière analyse des kémalismes déclinés à l'infini (Mao y comparait aussi en son temps le Kuomintang de Tchang Kaï-chek, qui d'ailleurs s'y comparait volontiers lui-même) ; et donc des ennemis de la révolution démocratique anti-impérialiste authentique, qui dans la grande "région intermédiaire" qui court de l'Afrique du Nord jusqu'à l'Asie centrale, jouent dans le dispositif de domination impérialiste un rôle aussi fondamental que l'Entité sioniste... Et quelque part aussi, sachant que le kémalisme (et les Jeunes Turcs avant lui) se sont énormément inspiré du "modèle" français, une illustration magistrale et récente du concept "du jacobinisme à Thermidor" :

    http://ekladata.com/Kaypakkaya-sur-la-nature-du-kemalisme.pdf


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  • Cliquer sur l’image pour lire l’article de l’Organisation communiste Futur Rouge [remplacé par un article du Parti communiste maoïste de mai 2017, de meilleure qualité - bien plus riche d'enseignements quoi] :

    Kaypakkaya

    http://www.pcmaoiste.org/communique/hommage-a-ibrahim-kaypakkaya/


    Aujourd'hui
    , l’État turc est traversé par des puissantes contradictions : une fraction (de nouvelles couches) de la bourgeoisie, revendiquant l’héritage ottoman et musulman du pays et cherchant à ‘diversifier’ les tutelles impérialistes ou expansionnistes (comme le Qatar), se voulant elle-même expansionniste, ‘regarde vers l’Orient’ - en particulier vers le Machrek arabe - dans une démarche ‘néo-ottomane’ (‘crime’ pour lequel le Premier ministre Menderes, par ailleurs totalement pro-occidental et europhile, avait été destitué et pendu en 1960, ouvrant l’ère sinistre de l’État sous supervision militaire sous laquelle mourra affreusement torturé le camarade Ibo) ; tandis qu'une autre, la fraction ‘kémalo-militaire’, veut que la ‘Turquie’ reste un ‘poste avancé de l’Occident’ – hier contre le ‘péril rouge’, le nationalisme arabe et le social-impérialisme soviétique, aujourd’hui contre les ‘nouvelles menaces’ de l’Iran (derrière lequel se tiennent le ‘redressement’ russe et l’‘émergence’ chinoise), du national-islamisme arabe ‘djihadiste’ etc. En raison de cela, l’Occident impérialiste et en particulier les impérialistes européens, qui faisaient hier encore du pays leur ‘premier de la classe’, lui ferment aujourd’hui la porte au nez pour entrer dans l’UE. La crise syrienne, dans laquelle l’État turc est profondément impliqué, va certainement pousser ces contradictions à un degré d’acuité intenable [1] tandis que pour la classe ouvrière, la paysannerie pauvre, le Peuple kurde et les forces révolutionnaires (guérilla kurde, MKP, TKP/ML, MLKP, DHKP-C), il n’est toujours pas question d’‘indulgence’ de la part ni de l’une ni de l'autre fraction oligarchique.

    Ibrahim Kaypakkaya, fraternellement appelé ‘Ibo’ par les communistes de là-bas, est le théoricien révolutionnaire qui a rendu vie au mouvement communiste révolutionnaire dans l’État turc, en révélant correctement - pour la première fois - la nature du kémalisme : un régime bourgeois antipopulaire, assassin, fasciste et à la solde de l’impérialisme. Le kémalisme n’a rien été d’autre, en réalité, que le parachèvement de la ‘révolution bourgeoise’ des Jeunes-Turcs (1908) : une ‘révolution’ visant 1310812-Mustafa Kemal Pasasimplement - pour la bourgeoisie et autres grands possédants turcs - à éliminer la bourgeoisie compradore d’alors, intermédiaire depuis des siècles (dans les ‘échelles du Levant’) du Capital européen et qui était principalement non-turque (grecque, ‘judéo-espagnole’ ladino, arménienne, arabe chrétienne ‘syriaque’ etc.), pour prendre sa place. Elle ne visait NULLEMENT à briser le fond féodal de la société (par une révolution agraire) ni à une quelconque libération nationale. Dans ce but, les Jeunes-Turcs se lièrent à l’impérialisme allemand, qui cherchait à étendre son influence vers le Golfe arabo-persique (où ‘fleurait’ déjà l’odeur du pétrole) ; les Alliés franco-anglo-russes soutinrent alors les mouvements nationaux arabe (avec ‘Lawrence d’Arabie’), grec, arménien (qui subiront alors le premier génocide du 20e siècle) etc. et l’Empire ottoman fut entraîné par l’Allemagne dans sa défaite et démembré par le terrible Traité de Sèvres (1920). Mustafa Kemal (bientôt surnommé ‘Atatürk’, le ‘père de tous les Turcs’) fut simplement le ‘dernier des Jeunes-Turcs’, qui mena contre les Alliés vainqueurs de 1918 une guerre nationaliste pour finalement aboutir à un nouveau traité (de Lausanne, 1923) moins inique, fondant l’État turc tel que nous le connaissons. Dans le contexte des traités iniques d’après-Première Guerre mondiale, cette lutte nationale pouvait éventuellement revêtir un certain caractère objectivement progressiste et fut saluée comme telle par l’Internationale communiste, mais cela s’arrête là et ne signifie nullement une nature ‘progressiste’ en soi du kémalisme – ce qui fut pourtant l’erreur du mouvement communiste turc, dès le début (coûtant la vie à ses fondateurs, dont Mustafa Suphi) et jusqu’à Kaypakkaya. Le kémalisme, héritier des Jeunes-Turcs, tenta de garder le ‘lien fondamental’ avec l’impérialisme allemand, y compris sous le nazisme (Istanbul devint alors la ‘plaque tournante’ de la diplomatie et de l’espionnage nazis pour tout l’Orient), puis à partir de 1943-44 il se rangera résolument dans le camp occidental - alors que se dessine la Guerre froide. Il réprime avec une extrême brutalité les nationalités non-turques, notamment les Kurdes qui ont 'entrevu' l'indépendance en 1920 et se soulèvent dès 1924 avec Cheikh Saïd (... à l'époque sur une ligne conservatrice religieuse et anti-républicaine), ainsi que les Alévis (pour la plupart Kurdes ou Zazas) et - dit-on - des rescapés du génocide arménien lors des massacres du Dersim (1937-38).

    Free-KurdistanSur ce point, Kaypakkaya a beaucoup parlé de la question kurde et de la question des nationalités en ‘Turquie’ en général ; en fait, pour nous qui nous voulons également des révolutionnaires de libération occitane, il est absolument fondamental : il a en effet expliqué que les réalités nationales apparaissent avec l’aube du capitalisme, soit en Europe au ‘Bas Moyen-Âge’ (11e-15e siècle), et non à l’apogée de celui-ci, contrairement aux élucubrations thorézo-trotskoïdes à la ‘Voie Lactée’ sur de prétendues ‘nations en formation’ – comme en… Afghanistan, quelques jours avant que leurs compères de l’OOA (MLM-pM) ne sortent leur texte… parlant d’État regroupant plusieurs nationalités, ce qui est la thèse juste et celle du grand maoïste afghan (hazara) Akram Yari. Il ne s’agit pas pour nous de nier la communauté de destin historique qui nous unit depuis plus de 220 ans (d’abord derrière la bourgeoisie la plus avancée et démocratique, puis ‘à notre propre compte’), contre un État donc un ennemi commun et parfois contre des envahisseurs réactionnaires étrangers (1792-93, 1870-71, 1940-44), aux autres masses populaires de l’Hexagone - que ce soit des corons du Nord, des landes de Bretagne ou des quartiers populaires d’Île-de-France ; et qui nous unira encore dans la lutte révolutionnaire à venir pour le socialisme ; mais cela ne veut pas dire accepter que l’on nous nie comme réalité nationale alors qu’au milieu du 19e siècle un Jules Michelet ou un procureur impérial (de Napoléon III) dans le Var nous considéraient encore comme ‘pas la vraie France’, comme des ‘sauvages’ devant être ‘civilisés’ par le Nord, et qu’en 1942 le ‘bon docteur’ Céline nous qualifiait encore d’‘infect métissage négrifié’. Une négation qui est pourtant - et malheureusement - omniprésente dans le ‘marxisme’ hexagonal, y compris chez des ‘maoïstes’ comme les sus-cités…

    Le modernisme’ (‘progressisme’ pour certains...) dont fit preuve le kémalisme est en réalité un ‘pilier’ de son idéologie, qui considère que la ‘Turquie’ est un pays européen, occidental, et assimile le rejet de son ‘orientalité’ au rejet de l’arriération qui a selon lui conduit à l’effondrement de l’Empire [on qualifie parfois les couches sociales aisées et occidentalisées porteuses de cette idéologie de... "Turcs blancs" (beyaz türkler), par opposition aux (terme moins employé) "culs terreux" anatoliens "Turcs noirs" - kara türkler]. Il correspondait, d'autre part, à la mise en place en Anatolie du capitalisme bureaucratique - 'stade suprême' de la domination impérialiste sur un pays semi-colonial. Le Premier ministre ‘démocrate’ Adnan Menderes (1950-60) était ainsi par exemple un pro-occidental forcené, faisant entrer l’État turc dans l’OTAN, le Conseil de l’Europe etc., mais il critiquait également ce rejet de l’orientalité, de l’islamité de la Turquie ; il noua des liens directs avec son voisinage arabe et iranien, etc. : eh bien ce seul ‘péché capital’ contre l’idéologie kémaliste suffit à entraîner son renversement, et son exécution par pendaison l’année suivante. Ce coup d’État, suivi du retour au pouvoir de l'ex-successeur de Kemal à la présidence (et ami d’Hitler) Ismet Inönü, marqua le début de l’État sous supervision militaire, régime fasciste où les gouvernements civils sont ‘supervisés’ par un ‘Conseil de Sécurité Nationale’ des Forces armées et régulièrement entrecoupés de pronunciamientos militaires suivis de plusieurs années de loi martiale, de gouvernement militaire direct. Ibrahim Kaypakkaya a lutté et péri durant l’une de ces périodes (1971-74). Après un dernier coup d’État en 1997 (contre l’ancêtre de l’actuel parti ‘islamiste’ au pouvoir, suivi d’une nouvelle période ultra-répressive contre les forces populaires et révolutionnaires, les Kurdes, les ‘islamistes’ etc.), cette politique a commencé à être un peu remise en cause depuis 2002 avec l’arrivée au pouvoir de la fraction bourgeoise AKP : liée à l’origine à la petite et moyenne-bourgeoisie turque d’Allemagne et d’‘Europe médiane’ (de la Suède à l'Autriche), et donc à ces pays impérialistes, celle-ci s'est lancée - après une tentative infructueuse de ‘forcing’ à la porte de l’UE - dans une politique ‘néo-ottomane’ renouant le lien avec le voisinage arabo-musulman (car l'AKP c'est aussi le parti de l'hinterland, des "Turcs noirs", de l'Anatolie profonde qui se sent beaucoup plus proche-orientale qu'européenne), se rapprochant de l''axe' Iran-Syrie (plus maintenant) puis s’alignant sur le Qatar (historiquement lié aux Frères musulmans, dont l'AKP est proche), rejetant l’invasion US de l'Irak, critiquant la politique d’apartheid sioniste en Palestine (sans précédent pour la ‘Turquie’ depuis la création de l’État d’Israël), etc. etc. … Mais jusqu’à quand ? Les menaces de ‘reprise en main’ militaire ont émaillé toute la fin des années 2000, et restent latentes…

    http://servirlepeupleservirlepeuple.eklablog.com/qu-est-ce-que-l-akp-a134714962

    Ces ‘pragmatiques’ issus de l’‘islamisme’, c'est-à-dire de l’expression du ‘capitalisme d’en bas’ (émergeant des ‘entrailles’ de la vie sociale, où les gens produisent et vendent, bref font du bizness et certains deviennent riches et d'autres pas...) contre le capitalisme bureaucratique ‘d’en haut’, sont en fait les véritables ‘nouveaux Menderes’ ; entre libéralisme économique, ‘ouverture’ politique par rapport aux ‘vaches sacrées’ du kémalisme, charité ‘sociale’ islamique, néo-ottomanisme tourné vers l’Orient et europhilie frustrée ; tandis que les partis de la ‘Juste Voie’ et de la ‘Mère Patrie’ (les héritiers ‘officiels’, fusionnés en 2007 dans un nouveau Parti démocrate’) sont en réalité plutôt ‘kémalo-libéraux’ (ce sont en fait les ‘partis’ des coups d’État militaires des années 1970 et 80, qui visaient aussi l’aile ‘sociale’/‘dirigiste’ du kémalisme afin d'instaurer le ‘néolibéralisme’ [2]). L'on observe d'ailleurs très nettement que ces forces 'semi-kémalistes semi-menderistes' özalo-demireliennes ont tendu ces dernières années à purement et simplement disparaître de la scène politique [aucun élu aux élections législatives de 2011 et encore - MàJ - à celles de 2015], qu'elles ont pourtant dominée entre les épisodes putschistes des années 1970 à 1990. Disparaître... phagocytées par l'AKP, ce représentant de la nouvelle bourgeoisie - petite, moyenne voire grande - de l'intérieur du pays (c'est très net sur les cartes électorales), hier déshérité par rapport aux régions de la Mer Égée et d'Istanbul (Turquie "moderne", "utile", économiquement avancée) et qui a connu au cours des dernières décennies un développement économique conséquent ("tigres anatoliens") : une nouvelle bourgeoisie qui a produit des militaires (y compris hauts gradés) permettant de contrecarrer les menaces latentes de coup d’État de l'aile "dure" kémaliste laïciste [les services secrets, le MİT, sont ainsi réputés totalement sous contrôle de l'AKP qui a interdit en 2012 toute poursuite judiciaire contre eux, et n'ont subi aucune purge après le coup d’État "güleniste" - "islamiste" modéré pro-occidental et kémaliste "turco-islamique" de droite - de 2016] ; peuplé la capitale économique stambouliote à la faveur de l'exode rural (Erdoğan devenant maire de la ville dès 1994) et petit à petit imposé l'hégémonie intellectuelle d'une sorte de "kémalisme islamisé" plus indépendant (voire hostile : "idéologie Vallée des Loups") vis-à-vis de l'Occident et "ottomanisant" (comprendre, tourné économiquement et diplomatiquement vers les pays arabes voisins), mais tout aussi réactionnaire ; une sorte (finalement) de nouvelle idéologie jeune-turque (l'idéologie du génocide arménien...) prête à toutes les malfaisances. C'est peut-être là, dans cette mutation de l'idéologie dominante de l’État, qu'il faut voir malgré les menaces la raison du succès et de la longévité de l'AKP - exceptionnelle pour un gouvernement civil issu des urnes depuis le milieu du 20e siècle.

    Pour les masses populaires, quoi qu'il en soit, l’oppression ne change guère : les communistes peuvent et doivent jouer de ces contradictions au sein de la classe dominante, mais cela ne fait pas de l'une ou de l'autre fraction une 'alliée'.

    tikbmayLe mouvement communiste anatolien (Turquie et Kurdistan du Nord sous occupation turque) est aujourd'hui actif et héroïque mais hélas profondément divisé, divisions qui ont parfois pu aller jusqu’à l’affrontement sanglant. Peut-être la situation a-t-elle quelque peu évolué depuis la mort de Kaypakkaya, il y a maintenant 40 ans, et lui manque-t-il alors une analyse de la société, des classes en présence et des rapports de force adaptée à notre époque... Il appartient à lui et à lui seul d'élaborer cette 'pensée' pour mener victorieusement la lutte révolutionnaire au 21e siècle. Souhaitons de tout cœur qu’il puisse bientôt s’unir sous la bannière du maoïsme et unir toute les forces populaires révolutionnaire, pour ABATTRE ENFIN cet État fasciste assassin de centaines de milliers de personnes du Peuple !

    De notre côté nous ne perdons pas de vue que l’État fasciste turc, s’il mène parfois sa propre ‘petite partition’ régionale (‘ottomaniste’ et/ou ‘panturquiste’), n’en reste pas moins un État LAQUAIS du Grand Capital impérialiste et notamment de l’impérialisme bleu-blanc-rouge et de son comparse allemand : à nous de mener sans relâche notre lutte révolutionnaire au cœur du monstre, au cœur des métropoles impérialistes ; telle est NOTRE TÂCHE dans la gigantesque, grandiose œuvre révolutionnaire de libération de l’humanité !

    « Le camarade Ibrahim vit toujours dans le cœur de millions d’opprimés, et le jour viendra où nous le vengerons ! »


    guerillatikko


    Hommage a Ibrahim Kaypakkaya
    par Socialisme44

     


    [1] Nous ne croyions pas si bien dire... puisqu’à peine deux semaines après la publication de cet article débutait le mouvement de Gezi/Taksim contre la destruction d'un espace vert historique d'Istanbul pour y construire un centre commercial ; mouvement de type Indigné-e-s/Occupy/'Printemps arabe' rassemblant pêle-mêle toute la 'Turquie non-AKP' : révisionnistes du TKP et des grands syndicats, écologistes et 'gauches radicales' diverses, trotskystes, anarchistes, jeunesse 'cyber-démocratique' de type 'Printemps arabe', marxistes-léninistes et maoïstes avec de grands portraits... de Kaypakkaya, Kurdes et autres minorités, mais aussi... des kémalistes 'de gauche' (CHP et DSP) et il n'est même pas improbable que des Loups Gris (MHP) d'extrême-droite aient pointé le bout de leur nez [ils le pointent de toute façon partout et, laïcistes (bien que plus 'ouverts' que les kémalistes sur la question), foncièrement hostiles à toute concession aux minorités et viscéralement anti-arabes (panturquistes, anti-ottomanistes), ils ne portent pas spécialement l'AKP dans leur cœur - ils participaient à la dernière coalition 'laïque' (1999-2002) battue par ce dernier en 2002]. Toutes les contradictions du pays ont alors jailli au grand jour ; la politique du gouvernement en Syrie voisine, et plus largement son alignement constant sur le Qatar et le Golfe, ont notamment été mis en cause. Comme tous les camarades maoïstes (1 - 2), Servir le Peuple salue le mouvement dans ses composantes progressistes/démocratiques et ses potentialités pour le développement de la conscience et de l'organisation de classe sur les rives du Bosphore, dans une perspective de longue durée pour construire l'antagonisme populaire. Nous restons toutefois prudents quant à sa récupération au profit d'un 'retour en force' kémaliste [y compris 'de gauche' : cela ne veut rien dire, rappelons qu'en 1999-2002 (sous le régime du 'coup d'État postmoderne' de 1997) les kémalistes 'de gauche' de Bülent Ecevit étaient en coalition... avec la droite kémalo-mendero-thatchérienne (ANAP) et le MHP/Loups Gris ultra-fasciste !]. Les tentatives n'ont pas manqué depuis bientôt 11 ans que l'AKP est au pouvoir, et la présence massive des révisionnistes (TKP et syndicats DISK et KESK) kémalo-complaisants dans le mouvement tend largement en ce sens. La dernière période (1997-2002) de 'tout sauf l'AKP' (à l'époque le Refah de Necmettin Erbakan), pilotée par les militaires du Conseil de Sécurité Nationale, n'a pas spécialement été une période de libertés démocratiques florissantes... mais au contraire de répression brutale et tous azimuts ! Le 'printemps' stambouliote pourrait alors se refermer sur un 'hiver' bien pire encore que celui infligé par les amis de l'AKP aux masses populaires de Tunisie, d'Égypte, de Libye etc. [MàJ 26/06 : menace confirmée par un militant marxiste local dans cette interview sur laquelle nous avons finalement mis la main... des éléments kémalistes CHP et d'extrême-droite nationaliste ont infiltré le mouvement 'Taksim/Tahrir' d'Istanbul et tentent d'en faire le déclencheur d'une 'reprise en main' militaire.]

    [2] Les années 1970 (après le coup d’État de 1971 et le "gouvernement d'union nationale" jusqu'en 1974) sont dominée par une alternance entre Demirel (Parti de la Justice, héritier 'prudent' de Menderes) et Ecevit (Parti républicain du Peuple, kémaliste). Dans une situation politique et sociale de plus en plus tendue, les militaires essayent de faire travailler ces deux grands partis de la bourgeoisie ensemble mais les antagonismes d'ambitions et de personnes (ainsi que le souvenir de l'exécution de Menderes) rendent la chose impossible, ce qui conduit au coup d’État de 1980. Celui-ci (qui rendra le pouvoir aux civils au bout de 3 ans, après avoir fait promulguer une nouvelle constitution) met durablement Demirel sur la touche en ouvre l'ère Özal (Parti de la Mère Patrie, très 'néolibéral') jusqu'en 1991, ensuite de quoi Demirel et son héritière Tansu Çiller feront un bref retour jusqu'à la victoire électorale des 'islamistes' en 1996.

     


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  • Le 'FLNP' (Front de Libération Nationale de la Provence) a encore frappé… Après une première action, en janvier, contre une agence immobilière à Garéut ('Garéoult') dans le Val d'Issole (l'engin explosif n'avait pas explosé) ; puis une autre en mars contre une autre agence immobilière à Sant Nàri ('Sanary'), faisant des dégâts matériels légers ; c'est le 6 mai dernier un établissement bancaire de la BNP Paribas (l'un des 'géants' financiers BBR) à Draguignan, la 'capitale' administrative du Var, qui a été visé (la bombe de faible puissance a été désamorcée par les forces de l'ordre bourgeois). Mais surtout, pour la première fois, des tracts de revendications ont été retrouvés sur les lieux de l'attaque, permettant enfin (peut-être) d'en savoir un peu plus sur ce 'mystérieux' groupe. L'un de ces tracts, le jour même des évènements, a été reproduit sur le site de la presse régionale de régime, le 'petit empire' Nice/Corse/Var-Matin. Mais voilà : le texte du tract en question était... flouté ! Comme c'est étrange... Se pourrait-il que ce tract dise quelques vérités qui dérangent, dont le système voudrait 'préserver' des masses populaires 'tellement influençables' ? Le 'petit souci' c'est que sans besoin d'être un grand hacker, il est très facile de déflouter légèrement un floutage informatique (du coup ils ont carrément supprimé la photo du tract... mais trop tard, nous l'avions téléchargée ! ).

    pro.jpgVoici ce que nous avons pu en décrypter :

    « ESPECULAIRE ET TOUT (…) DEFORS ! [Spéculateurs et tous (…) dehors !]

    Notre terre est devenue la colonie des spéculateurs et des nantis en tout genre, colonisation encouragée par l’État français, ses élus et subalternes, (qui ?) nous (…) de notre pays.

    La Provence est la terre des Provençaux, nous n’en revendiquons aucune autre, nous entendons bien la défendre par tous les moyens que nous jugerons nécessaires à la libération de notre pays. Tout Provençal doit passer en priorité sur sa terre, dans tous les domaines, acquérir son logement (…) assurer le bien-être de sa famille et de ses enfants.

    QUICONQUE SE CONDUIT EN PAYS CONQUIS CHEZ NOUS SUBIRA LES CONSÉQUENCES DE SES ACTES, TOUS CEUX QUI N’ONT PAS VOCATION À (rester ?) EN PAYS PROVENÇAL DOIVENT QUITTER SANS DÉLAI NOTRE TERRITOIRE, LES TRAÎTRES ET LES VENDUS À L’ÉTAT FRANÇAIS SERONT PLUS DUREMENT FRAPPÉS. TOUS SONT DÉSORMAIS PRÉVENUS.

    PATRIOTE, rejoins la lutte, rejoins le FLNP, rejoins-nous par tes actions contre l’envahisseur, tu regagneras ta liberté.

    LIBERTA PER NOSTRE POBLE, PER NOSTRO TERRA, PER NOSTRO NACIOUN [Liberté pour notre Peuple, pour notre terre, pour notre Nation]

    AVEN UNO LENGO, UNO CULTURO, UN DRAPEU, UNO IDENTITA, UNO TERRA, UN PAIS, PROUVENÇO TERRA NOSTRO. [Nous avons une langue, une culture, un drapeau, une identité, une terre, un pays ; Provence notre terre]

    OSCO PROUVENÇO – FLNP   [VIVE LA PROVENCE – FLNP] »


    En fin de compte... le communiqué ne dit rien de bien 'spécial'. Il ne permet toujours pas de rattacher les auteurs à une idéologie précise. En fait, le groupe semble sur la ligne du nationalisme corse dont il s'inspire manifestement (ne serait-ce que déjà pour le nom...) ; il se veut sans doute, comme celui-ci, 'rassembleur' en évitant les propos ‘idéologiquement tranchés' – ce qui, à notre sens, est peut-être 'payant' dans l'immédiat mais une erreur à long terme. Pour autant, rien que cela semble déjà intolérable pour le système bourgeois bleu-blanc-rouge et sa presse aux ordres… Quant à l’‘occitanisme de régime’, ces ‘bouffons de la République’ comme il y avait jadis des bouffons du roi (phénomène bien abordé ici), il dit ‘comprendre et partager totalement’ les revendications du FLNP sur la question immobilière (qui, en même temps, affirmerait sérieusement être ‘pour’ la crise du logement ??) mais condamne la ‘violence’, pourtant jusqu’ici ‘zéro morts/zéro blessés’ mais qui ‘pourrait’ en faire selon eux. Comme si la première violence n’était pas celle subie par les familles populaires incapables de trouver un logement décent… et de toute manière, tout révolutionnaire conséquent sait bien qu’il n’y a pas de plus grands terroristes que les États qui nous dirigent (et dirigent le monde).

    Le ‘FLNP’ considère peut-être qu'il faut d'abord 'libérer' la Provence, se séparer de l’État français et ensuite... il y aura une 'démocratie' (bourgeoise) avec une 'droite' et une 'gauche', des élections et des alternances ; simplement, un ‘gouvernement des Provençaux par les Provençaux’ (comment les définit-on d’ailleurs, qui est provençal et qui ne l’est pas ?) serait 'naturellement' plus conforme à 'l'intérêt général' des habitants de la Provence... C'est là une conception fondamentalement erronée, démentie par des dizaines de néo-colonies à travers le monde : si l'on ne pose pas la QUESTION DU POUVOIR, de QUELLE CLASSE DIRIGE (prolétariat à la tête des classes populaires – petits employés, paysans pauvres etc.  ou petite minorité de bourgeois), on ne résout rien comme le disait déjà dans les années 1910 le héros révolutionnaire irlandais James Connolly : "Si dès demain vous chassiez l’Armée anglaise et hissiez le drapeau vert sur le Château de Dublin, à moins que vous ne proclamiez la République socialiste, vos efforts auraient été vains. L’Angleterre continuerait à vous dominer. Elle vous dominerait par l’intermédiaire de ses capitalistes, de ses propriétaires fonciers, de ses financiers, de toutes les institutions commerciales et individualistes qu’elle a plantées dans ce pays et arrosées des larmes de nos mères et du sang de nos martyrs".

    cote_d_azur_ferienhaus.jpgPar 'spéculateurs' il faut très certainement entendre les spéculateurs IMMOBILIERS, et par 'nantis' les grands bourgeois héliotropes ('cherche-soleils') qui infestent la région de leurs résidences secondaires : la 'campagne' actuelle du groupe est en effet essentiellement dirigée contre la PRESSION IMMOBILIÈRE, comme l'attestent les deux premières cibles ; une pression (prix du mètre carré) devenue, dans ce département de Provença, absolument intolérable pour les classes populaires. Ce point avait déjà été abordé, après l'action de Sant Nàri, dans un article du blog 'frère' Sheisau Sorelh à ce sujet.

    Mais, et c'est sans doute là le plus important à souligner, le communiqué de revendication s'en prend clairement à l’État français, 'ses élus et ses subalternes' ('caciques' locaux qui sont un élément structurel de l'organisation sociale occitane sous domination BBR et cadres administratifs, policiers, judiciaires et militaires) et les ‘traîtres et vendus’ à lui, qui sont 'désormais prévenus'. L’État semble ici bien identifié comme l’ENNEMI PRINCIPAL, création et arme de l’oppresseur bourgeois (comme les 'spéculateurs et nantis' en question) ; et non comme un simple 'complice' d'un autre phénomène déplaisant, que l'on pourrait réussir à 'détacher' de celui-ci : pression immobilière, ravages environnementaux ou 'mondialisation marchande' si l'on est sur une ligne 'altermondialiste' ; 'mort du petit commerce', 'racket' du fisc et des radars routiers ou 'immigration incontrôlée' si l'on est sur une ligne poujadiste fascistoïde. C'est là un antagonisme assumé qui est, pour nous, hautement positif ; un antagonisme pour lequel, déjà, une grande majorité de la 'gauche radicale' hexagonale n'a pas de leçons à donner au 'FLNP'. Généralement l'extrême-droite (profondément implantée dans la région, tant le FN que les Identitaires) est profondément respectueuse de l’État, certes ‘corrompu’ par une 'élite mondialiste' mais restant intrinsèquement 'sain' et même 'l'ultime recours' de 'ceux qui n'ont plus rien'. Plus largement, l'extrême-droite rejette les attaques et les dégradations tant contre les 'biens publics' (que l'on 'paye avec nos impôts'), à l'exception peut-être des radars routiers, des agences du fisc ou de l’URSSAF (les 'racketteurs') que surtout  contre la 'propriété privée' – sauf bien sûr lorsqu'elle est 'allogène' : épiceries arabes, kebabs, mosquées voire cimetières musulmans etc., là ‘on peut dévaster’ sans problème ! Et si pour dénoncer la ‘finance mondialisée’ et ‘apatride’ il y a toujours ‘du monde’, l’on trouvera rarement des attaques contre la spéculation immobilière… et pour cause : les cadres politiques d’extrême-droite sont souvent, comme tous bons bourgeois BBR, de ‘jolis’ ‘petits’ propriétaires de ‘parcs’ fonciers !

    Une autre chose qui mérite d'être soulignée, sur ce point, c'est que le communiqué n'évoque à aucun moment des thématiques réactionnaires comme 'l'immigration', 'les étrangers', 'les Arabes' (même comme 'instruments' de l'État français dénoncé), forcément ‘délinquants’ et ‘parasites’, sur un territoire où la question est pourtant 'bien présente' et les propos xénophobes à ce sujet font partie pour ainsi dire du 'fond de l'air'... C'est plutôt positif, car cela serait totalement incompatible avec une démarche de libération révolutionnaire occitane telle que nous la concevons : dans notre Occitanie conçue comme projet révolutionnaire nous affirmons être un Peuple du Nord de la Méditerranée, un 'pont' entre l'Europe et l'Afrique, entre l''Occident' et l''Orient' ; et de toute manière, l'immigration (dont les immigré-e-s et les 'colonies intérieures' eux/elles-mêmes sont les premières victimes) comme le racisme envers celle-ci ne sont que les conséquences de l'impérialisme français dont nous-mêmes, Occitans, avons été les premières victimes sacrificielles et fondatrices voilà 8 siècles. Être raciste fut-ce sur un mode paternaliste  envers les ‘extra-européens’, c’est un ‘reflet dans la pensée’ de l’histoire (et du présent !) impérialiste de la ‘France’ : ÊTRE RACISTE C’EST ÊTRE (idéologiquement) ‘FRANÇAIS’, ce que le FLNP affirme vouloir rejeter.

    En Hexagone l'extrême-droite est généralement tout au plus 'régionaliste' ; l'on ne peut guère citer comme extrême-droite réellement 'séparatiste' (qui attaquerait l'appartenance à l'État français dans ses tracts) qu'Adsav en Bretagne et sans doute quelques courants néo-nazis alsaciens... ces forces ne manquant jamais de pointer du doigt "l'immigration-colonisation" comme "arme de l'État français jacobino-mondialiste". Mais ces thèses d'"ethnocide immigrationniste" développées par ces groupes (ainsi que parfois par certains courants en Corse) sont absurdes et ne tiennent pas la route : pourquoi l’État français voudrait-il remplacer les Provençaux (et les Occitans en général), les Bretons ou les Corses par une population réputée encore moins gérable, dont on sait pertinemment (et l'on voit tous les jours) qu'elle nécessite une mobilisation policière permanente, et non (tout simplement) par de bonnes petites classes moyennes du Bassin parisien qui ne demandent que cela vivre et travailler (ou passer leur retraite) au soleil ? Ce qui est d'ailleurs le cas et que (précisément) combat le FLNP – mais ce n'est pas non plus véritablement une "politique de peuplement" pour "faire disparaître" la population locale ; plutôt une logique capitaliste d'exploitation d'un marché (celui de "l'immobilier au soleil") au détriment des besoins populaires locaux et que l’État (instrument de domination du Capital) protège comme tous les "marchés" capitalistes... La vérité c'est qu'entre 1945 et les années 1980 a été "importée" de la force de travail des anciennes colonies françaises (ou des 'DOM-TOM') pour les besoins du capitalisme français, phénomène concernant tout l'Hexagone, parce que la force de travail hexagonale n'était pas suffisante et/ou pas assez facilement exploitable par rapport à ces besoins. De fil en aiguille, ces travailleurs ont fait souche dans des quartiers transformés en ghettos ("quartiers sensibles") où ils ont eu des enfants et maintenant des petits-enfants, qui sont maintenant l'essentiel des "Arabes" et des "Noirs" présents en Occitanie comme ailleurs. Aujourd'hui il y a toujours des personnes qui veulent immigrer sur le territoire de l’État français, certaines y parviennent mais la position de l’État est qu'elles ne sont pas les bienvenues "étrange" : pourquoi n'en "remplirait"-il pas ces territoires dont il veut supposément voire "disparaître" la population autochtone, au lieu de leur donner la chasse avec des moyens policiers impressionnants ? Il n'y a pas de "politique" française visant à faire "coloniser" nos pays par des extra-européens ; et les immigrés-et-descendants sont tout ce que l'on voudra sauf la cause des problèmes de nos Peuples. Aller sur ce terrain-là c'est déjà avoir rendu les armes face à l’État français et au capitalisme bleu-blanc-rouge sous direction parisienne (dont il est l'instrument de domination).

    provence_libre.jpgNous en sommes encore (nous aussi !) au stade de l'enquête, sans laquelle pas de droit à la parole ; mais pour l'instant les premiers éléments sur le 'FLNP' semblent plutôt positifs - en tout cas pas rédhibitoires, pas de 'carton rouge' a priori. Peut-être que le FLNP – là encore sur une ‘ligne corse’ – prône pour une ‘communauté de destin’ : ‘indigènes métropolitains’, Maghrébins et autres Comoriens, soyez ‘provençaux de cœur’ et il n’y aura pas de problème ! Malheureusement c’est là une vision totalement idéaliste des choses, qui sont beaucoup plus compliquées : les ‘immigrés’ et leurs descendants, en Hexagone, sont les ‘ambassadeurs’ d’un autre cercle de l’Empire BBR ; les ‘Méridionaux’ plus anciennement ‘avalés’ par la construction étatique et impériale, plus ‘proches du Centre’, sont ‘au-dessus’ des immigrés-et-descendants dans l’‘échelle des valeurs sociales’ ; et cela ne peut pas plus être résolu par un simple ‘appel’ à ‘se sentir provençaux’… que par un simple ‘appel’ à ‘se sentir français’ !

    Le gros 'point noir' du communiqué, pour terminer, c'est son côté 'provençaliste' : écrit (pour les passages en occitan provençal) dans la graphie de Mistral, affichant en en-tête les couleurs sang et or de la région (sans aucun symbole idéologique distinctif), il ne fait nulle part mention de l'occitanité de la Provence, encore moins de sa méditerranéité ; il n'inscrit aucunement les problématiques strictement provençales (voire strictement varoises) dans la vaste question méridionale de l'Hexagone en général ; il n'évoque à aucun moment les grandes luttes populaires radicales en 'Espagne' proche ou en Italie pourtant voisine, ni au Maghreb dont les ports de Marseille et Toulon sont la 'porte'. Il n'intègre pas la dimension occitane qui seule, selon nous, est potentiellement révolutionnaire (sans l'être automatiquement). Il n'est pas question pour nous (c'est évident) d'imposer un quelconque 'jacobinisme occitan', de 'dupliquer' sur notre terre le 'rouleau égalisateur' que nous a imposé l'État français depuis 3 ou 4 siècles ; nous respectons et respecterons toujours les différentes variantes dialectales et les cultures populaires régionales de nostra Occitània. Mais historiquement, les courants qui cherchent à 'démembrer' régionalement l'Occitanie en ‘insistant’ sur sa diversité régionale (Provence, Auvergne, Béarn etc.) sont plutôt du côté de la réaction, ou alors finissent par y tomber tôt ou tard…

    De même la référence à 'l'identité', sans plus de précisions, peut être inquiétante... Pour nous, l''identité' en soi, cela ne veut rien dire sinon semer le plus grand confusionnisme de classe et idéologique. 'Identité', de la même racine latine que ‘identique’, n'a de sens qu'entendu comme ensemble d'êtres humains unis par 1°/ un même cadre POLITIQUE, 2°/ un même cadre ÉCONOMIQUE (communauté de vie productive, avec un mode de production principal), 3°/ un même cadre CULTUREL et IDÉOLOGIQUE : langue commune, culture commune (en tout cas commune au niveau de chaque classe de l'organisation sociale), 'sentiment' de commune appartenance, 4°/ éventuellement un projet historique commun. En Provence, le cadre politique a été le comté de Provence, catalan (puis aragonais) à partir du 11e siècle, puis passant aux ducs d'Anjou (frères cadets des rois capétiens de 'France') au 13e siècle avant d'être définitivement rattaché à la couronne en 1480. Le mode de production principal était alors FÉODAL, 'chapeautant' une économie 'holiste' communautaire-patriarcale dans les campagnes tandis que dans les centres urbains le capitalisme était déjà en développement assez avancé. La Provence a gardé une certaine 'identité' politique comme province (généralité, gouvernement militaire et ressort de parlement) sous l'absolutisme, tandis que le capitalisme se développait et 'balayait' petit à petit la féodalité. Puis, pour les Provençaux comme pour les autres 'Hexagonaux', la 'France', la 'Patrie française' avec son drapeau bleu-blanc-rouge, a été de 1789 jusqu'en 1871 (environ) le 'cadre' politique et idéologique de la révolution bourgeoise (comme projet historique) jusque dans sa plus extrême radicalité démocratique (1793-94, 1848, 1870-71), mais 'butant' et 'trébuchant' toujours au seuil de la révolution prolétarienne ; ainsi que le 'cadre' économique de la révolution industrielle ; et du coup... 'naturellement' le 'cadre' de la contre-révolution, des tentatives de barrer la route à cela : c'est ainsi que le poète-écrivain Frédéric Mistral, 'père' du provençalisme et plutôt du côté de la contre-révolution [1], pouvait dire "nous les Provençaux sommes de la grande France, franchement et loyalement" ("li Provençau, flamo unanimo, sian de la grande Franço, e ni court ni coustié"). Charles Maurras de Martegue (‘Martigues’), ‘fils spirituel’ de Mistral sur le plan culturel, ne dira pas autre chose quelques années plus tard. Culturellement et idéologiquement, les classes ‘supérieures’ ont à travers ces siècles globalement ‘fusionné’ avec leurs homologues hexagonales pour former les ‘honnêtes gens’, les ‘bons français’. La culture provençale a subsisté au niveau populaire, dans la 'ruralité' et dans la classe ouvrière naissante que celle-ci ira alimenter tout au long des 18e et 19e siècles (chant emblématique de l'Occitanie révolutionnaire, la Libertat verra le jour lors de la Commune de Marseille en 1871) ; puis, à partir de la fin du 19e siècle, elle subira elle aussi le 'rouleau compresseur' d'une idéologie BBR au stade des monopoles - l'on apprit alors à 'parler français et être propres'... Lorsque par trois fois (aux dates ci-dessus) la bourgeoisie eût écrasé la plus petite tentative d’affirmation autonome du Peuple travailleur, et qu’elle fût entrée concomitamment dans la première crise générale du capitalisme, alors la Provence (‘Midi rouge’ à l’époque), l’Hexagone et l’humanité entière entrèrent dans l’ère de la révolution prolétarienne ; et il n’y eut plus aucun ‘projet historique commun’, donc plus aucune ‘identité’ entre les masses populaires et leurs exploiteurs : la ‘croisade’ du FLNP contre la spéculation immobilière n’exprime pas autre chose que cet antagonisme d’intérêts inconciliables. Aujourd'hui, donc, l''identité' provençale/occitane est (en soi et encore plus pour soi, ‘consciemment’) bien mal en point : elle ne peut être que RESSUSCITÉE et cela n'est possible qu'à travers 1°/ un État révolutionnaire socialiste, fédération de Communes populaires, comme cadre politique, 2°/ une économie socialiste, collectiviste, mettant les travailleurs au poste de commandement et pavant la voie vers le communisme, comme cadre économique, 3°/ la transition révolutionnaire socialiste vers le communisme, la Révolution prolétarienne mondiale comme projet historique commun (relié à l’humanité entière !), 4°/ une culture populaire révolutionnaire provençale/occitane de type nouveau, mettant 'l'ancien au service du nouveau' (notamment la fonction de pont sur la Méditerranée qu'avait l'Occitanie indépendante du Moyen-Âge !) mais tournée vers l'avenir communiste, et non vers un 'folklore' du passé. Bref, cela n’est possible qu’à travers un projet révolutionnaire. Faute de saisir cela, le FLNP reste encore très largement sur une ligne nationaliste petite-bourgeoise ‘à la corse’, ligne qui a précisément conduit dans l’ornière la LLN de ce pays, dont il semble manifestement s’inspirer[2].

    Il est évident que si le 'FLNP' se révélait finalement être un groupe nauséabond, d'idéologie identitaire réactionnaire/fasciste, peut-être des 'dissidents' du Bloc identitaire local (forcément des dissidents, car le BI lui-même ne commettrait jamais de tels actes contre la sacro-sainte 'propriété privée'… ‘blanche et européenne’), toute l''extrême-gauche' BBR jacobinarde se ferait un plaisir de nous tomber dessus à bras raccourcis, 'coupables' que nous serions d'avoir 'pactisé' avec la 'bête immonde'... SAUF QUE nous serions les SEULS à avoir ENQUÊTÉ, à avoir cherché à savoir et à comprendre au lieu d'attendre bien sagement que... LES FLICS, les gardiens du Capital, fassent leur boulot pour se livrer ensuite à la curée sur les 'régionalistes fascisants'. Et sauf que (peut-être), lorsque des millions de personnes ayant les toutes les raisons du monde de faire la révolution (comme la pression immobilière par exemple !) 'préfèrent' tomber dans les bras idéologiques de l'extrême-droite... l''extrême-gauche' hexagonale ferait bien de commencer par se poser des questions sur elle-même ! À bon entendeur...

    Si, au contraire, le FLNP s’alimente d’une conception du monde ‘progressiste-révolutionnaire’, c’est alors la critique ‘classique’ du militarisme, de l’ultra-avant-gardisme armé qui doit s’exprimer : le FLNP doit parvenir à soulever, à se lier avec et à diriger un grand mouvement de masse contre (ne serait-ce que) cette pression immobilière dont il fait le cœur de son combat et qui ravage effectivement la Provence littorale ; sans quoi il restera une petite ‘minorité agissante’ coupée des grandes masses – qui seules font l’histoire. Rappelons-nous que même un mouvement aussi formidable que le mouvement socialiste-révolutionnaire de libération basque a connu cette dérive tragique pour son volet armé ; tandis que le volet ‘légal’ (illégalisé en 2002, mais bon...) se diluait dans une ‘gauche abertzale’ aux vagues contours ‘national-altermondialistes’…

    Pour le moment, wait and see...


    big provence flag

    [1] La réalité de la pensée politique mistralienne serait cependant beaucoup plus complexe... et le conservatisme catholique-royaliste anti-1789 ou le nationalisme réactionnaire avec ses 'petites patries' (comme la Provence) dans la 'Grande' (française) seraient plus le fait de ses 'continuateurs' comme Maurras ou Léon Daudet que de l'intéressé lui-même. Une complexité de parcours politique qui expliquerait la présence dans le Félibrige (dont Mistral revendiquait farouchement l'apolitisme) d'autant sinon plus de 'rouges' (républicains 'radicaux', socialistes ou socialisants et anticléricaux mais hostiles aux centralisme 'français' de Paris) que de 'blancs' nostalgiques (opportunistes) de l'Ancien Régime et des ses 'libres' provinces...

    [2] Rien d’étonnant, en fait, à cela ; car le Var a une ‘morphologie sociale’ et des ‘problématiques’ très comparables à celles de la Corse.

     

    À lire aussi (sans que cela ne veuille dire que nous partageons tout le propos) :

    http://7seizh.info/2013/05/13/front-de-liberation-nationale-de-la-provence-flnp-le-point-de-vue-diniciativa-per-occitania/

     

    Une série d’actions armées, qui n’ont fait aucune victime, vient d’un nouveau groupe clandestin: le Front de Libération Nationale de la Provence ou FLNP. Cette organisation a attaqué deux agences immobilières (Garéoult, 21.1.2013; Sanary-sur-mer, 23.3.2013) et une banque (Draguignan, 6.5.2013). Elle a laissé sur place des tags et des tracts qui revendiquent une “Provence libre” et qui dénoncent la spéculation immobilière.

    Iniciativa per Occitània, le laboratoire politique, prend les positions suivantes :

    1. En Provence comme dans le reste de l’Occitanie, il est légitime de se révolter contre la spéculation immobilière parce qu’elle prive les classes populaires de l’accès au logement et parce qu’elle dévaste l’environnement.

    2. La spéculation immobilière est encouragée par l’État français basé à Paris, par certains patrons sans scrupules et par l’absence d’un pouvoir politique proche des citoyens, en Occitanie en général et en Provence en particulier.

    3. Il est légitime de faire obstacle sur le terrain aux spéculateurs immobiliers et à l’État français centraliste. Pour ce faire, Iniciativa per Occitània préconise l’action politique ouverte, aux yeux de tous, non agressive, dans l’espace public.

    4. Iniciativa per Occitània ne croit pas en l’action armée clandestine, essentiellement parce qu’elle risque de provoquer des blessures chez des personnes innocentes. Les passants, les clients et les travailleurs salariés qui se trouvent dans les banques et les agences immobilières ne sont pas les responsables de la spéculation immobilière. Il faut garantir leur intégrité physique.

    5. Iniciativa per Occitània, sans approuver la méthode, comprend le sentiment de révolte et de désespoir qui a pu conduire à la création du FLNP. Et nous insistons sur le fait que les responsables ultimes du problème qui se pose, en tout cas, restent les spéculateurs immobiliers et l’État français centraliste.

    6. Iniciativa per Occitània dénonce les médias en langue française qui ont retenu l’information à propos du FLNP : ils ont cité le sigle “FLNP” sans expliquer ce qu’il signifie, ou bien ont publié une photo brouillée d’un tract du FLNP qui empêche de le lire en entier. Les citoyens d’Occitanie, et de Provence en particulier, ont le droit de savoir tout ce qui se passe pour se forger leur propre opinion.

    7. Nous souhaitons savoir exactement quelles sont les motivations politiques et idéologiques du FLNP, qui demeurent, à l’heure actuelle, peu connues.

    8. Iniciativa per Occitània rappelle, en tout cas, qu’une lutte de libération nationale doit se mener en cherchant une large adhésion populaire, à l’échelle de toute l’Occitanie, et que la Provence est une partie de la Nation occitane.

    Occitània liura!
    Free Occitània!

    Lo 12 de mai de 2013
    INICIATIVA PER OCCITÀNIA

     


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  • Lu sur le site du Monde (passages surlignés par nous) :06f84e5e-f1b6-11e1-ad05-94c6c3ae2c22-493x328

    "La France a besoin d'un nouveau 1958."Telle est la conviction de Jean-François Copé, exprimée dans une tribune publiée samedi 4 mai dans Le Figaro. "En 1958, certains pensaient que (l'Hexagone) était condamné à l'écrasement, prise entre deux blocs et trahie par des élites à bout de souffle. Le général de Gaulle a montré que la France avait toujours les ressorts pour repartir à l'offensive", écrit le président de l'UMP.

    À en croire ce dernier, le pays "a besoin d'une reprise en main, d'un sursaut national. Comme en 1958, ce sursaut ne viendra pas de la gauche, incapable de s'élever au-dessus de ses intérêts clientélistes". "Le pouvoir est faible, sans ressort, ni vision pour la France. Bringuebalé par le cours des événements, il fait honte aux Français. (...) Les dirigeants, dignes héritiers de la SFIO finissante, ne comprennent rien au nouveau monde en train de naître". ajoute-t-il.

    discours-1958-1969.jpg

    "Tous les grands engagements de François Hollande ont tourné au fiasco", estime Jean-François Copé, qui veut lancer "quatre grandes batailles". "Lançons la bataille de l'économie en renforçant le couple école-entreprise au lieu de les opposer", avance-t-il, tout comme "la bataille de l'autorité", celle des "institutions, pour réformer en urgence, sur la base d'un contrat clair avec les Français", et enfin, "la bataille de l'Europe, une Europe qui protège, une Europe des solutions". 

    ... CQFD 

    1958, pour rappel, c'est d'abord un coup d'État militaire et une insurrection réactionnaire de la (grande, moyenne et petite) bourgeoisie coloniale d'Algérie 'française', suivis d'un 'rappel en ALG-58-226-R128sauveur' (minutieusement orchestré par ses partisans) du général De Gaulle (qui avait dirigé, jusqu'en 1955, le RPF, formation de 'droite radicale' d'après-guerre "la moins éloignée de ce que l'on avait pris l'habitude, en France, de désigner comme le fascisme" dixit René Rémond), et de l'instauration au forceps d'une 'monarchie républicaine' qui, pour ne pas être strictement fasciste (n'étant pas dans un contexte de crise générale capitaliste, mais au contraire de prospérité), en présentait néanmoins bien des caractères...

     '1958', c'est donc un signifiant de 'reprise en main' et de 'remise en ordre' brutale de l’État et de la société hexagonale, signifiant que Copé ne peut évidemment pas ignorer et qu'il oppose, naturellement, à '1968', le grand mouvement populaire contre le régime gaulliste (précisément), à composante révolutionnaire mais avant tout ultra-démocratique et 'libertaire', synonyme pour lui de 'début de la décadence', une décadence qui s'est prolongée jusqu'à nos jours à page10atravers les honnies 'années Mitterrand'... il n'est nul besoin, à vrai dire, de parler de 'Mai 68 de droite' pour décrire l’époque que nous vivons : '1958' suffit ! Régime et 'classe' politique considérés comme en agonie terminale, avec une direction de ‘centre-gauche’ bourgeoise incompétente, pays en guerre (hier Algérie ou Cameroun, au lendemain du camouflet de Diên Biên Phu ; aujourd’hui Afghanistan, Mali etc.), ‘menace terroriste’ et ‘ennemi intérieur’ omniprésents, etc. etc. La 'révolution conservatrice' (déjà bien entamée ces dix dernières années) est résolument dans l'air du temps...

    Quant à Marine Le Pen, elle partage (évidemment) le même objectif et, à vrai dire, peu ou prou le même programme (Copé peut-être plus 'libéral-thatchérien', elle plus 'dirigiste-colbertiste' et ‘souverainiste’ sur la question européenne)... ils sont, tout simplement, deux sur la ligne pour un seul et unique fauteuil de Führer suprême ; d'où leur 'haine' de façade (vouée, de plus en plus, à s'estomper sous la 'pression de la base' des petits élus UMP) ! Selon les derniers - et terrifiants - sondages, si la présidentielle avait eu lieu ce dimanche, Sarkozy (mais ce pourrait être Copé) et Marine Le Pen (avec respectivement 34% et... 23% !) auraient éliminé Hollande dès le premier tour ; et au second, Sarkozy l'emporterait par environ 2/3 des voix (contre 82% pour Chirac face à Le Pen en 2002...). Nous assistons exactement à ce que nous avions annoncé dès avant l'élection présidentielle, mais encore plus rapidement que prévu : après à peine un an 11666 bigde pouvoir 'socialiste', de trahison social-libérale absolue des espoirs populaires, le 'peuple de gauche' est écœuré et désabusé, et la droite et l'extrême-droite ont conquis définitivement l'hégémonie intellectuelle en Hexagone. Autant dire que les 'jumeaux' de la réaction sur toute la ligne, Copé (Patrick Buisson en arrière plan…) et Le Pen, flairent le 'moment propice'... pour ne même pas attendre 2017 ! Et les appels démagogiques du sieur Mélenchon (et de ses suiveurs opportunistes NPA ou Verts) à une 'VIe République' bourgeoise, loin d'ouvrir la moindre perspective révolutionnaire, ne font qu'alimenter encore un peu plus cet 'air du temps' sinistre.algerie-de Gaulle1958

    On remarquera, aussi, que "l'Europe" est parfaitement saisie par Copé comme la seule voie praticable pour la bourgeoisie monopoliste BBR et ses comparses européennes ; ce qu'ont d'ailleurs compris toutes les 'droites radicales'/'populistes' et extrême-droites du continent, sauf la britannique (qui n'en a pas besoin, ayant l'alliance US et le Commonwealth)... et le FN, raison pour laquelle il reste encore 'marginalisé' malgré des scores électoraux de plus en plus importants. "L'Europe", donc, mais une Europe qui, face à sa crise actuelle, peut être 'repensée', par exemple vers une Europe 'à géométrie variable', ou 'resserrée' sur un 'noyau dur'... Lorsque l'intellectuel organique de la 'droite radicale' Éric Zemmour eric_zemmour_i.jpgdit que "la seule Europe qui eut été viable, c'est l'Europe de 1957, l'Europe carolingienne et napoléonienne, l'Europe des Six", il ne fait que dire tout haut ce que les bourgeoisies monopolistes des 'Six' en question (si l'on considère l'Italie dans sa seule moitié Nord) pensent tout bas : pourquoi avoir intégré, avec les mêmes droits et avantages, une représentation dans les institutions communes et un arrosage permanent d'argent public, des pays qui étaient censés être le 'premier cercle' de semi-colonies de la 'Banane bleue' France-Allemagne-Italie (du Nord)-Bénélux ? La Grèce, la Roumanie, le Portugal ou encore l'Irlande étaient 'faits' pour être des terrains d'investissements juteux, nom de nom, pas des 'partenaires' dont les technocrates et les élus au Parlement strasbourgeois sont sur un strict pied d'égalité avec les nôtres ! Et, 'pire que tout', pourquoi avoir accueilli, en 1973, une guillaume-peltier-secretaire-national-ump.jpgAngleterre (avec sa néo-colonie irlandaise et son proche vassal danois) qui veut tous les avantages sans aucune des contraintes, et n'agit en toutes circonstances que comme 'cheval de Troie' de Washington ? Parmi les soutiens de Copé, l'on trouve une 'Droite populaire' (Mariani, Luca etc.) ou encore une 'Droite forte' (Guillaume Peltier, Geoffroy Didier) qui sont, globalement, sur cette ligne : celle de la fraction ultra-réactionnaire mais réaliste des monopoles bleu-blanc-rouges...

    "Come un vecchio discende il fascismo / Succhia la vita ad ogni gioventù / Ma non sentite il grido, la sulla barricata / LA CLASSE OPERAIA L’ATTENDERA ARMATA !" (Luna rossa, chanson révolutionnaire italienne des années 1970)

      Anni di piombo2

     


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  • maocVoici un texte polémique/critique d’un militant progressiste/marxiste marocain – Abdellatif Zeroual [nom d'un martyr du mouvement ML des années 1970, peut-être un pseudo...] est membre du Secrétariat national de la Voie démocratique, organisation ‘marxiste-léniniste’ assez fortement critiquée (comme révisio/opportuniste) par les camarades MLM de là-bas, et désormais assez proche de la 'gauche radicale' hexagonale (PCF/FdG, NPA surtout, LO etc.). Cependant, bien que bourré de références 'curieuses' voire... trotskystes [‘stalinisme’/’staliniens’ pour parler aussi bien des limites du marxisme-léninisme ‘kominternien’ que des dogmatiques qui n’ont toujours rien compris 70 ans après, ou du révisionnisme postérieur ‘à la Brejnev’ ; références idéologiques comme Poulantzas, Löwy, Daniel Bensaïd bien sûr, etc. ; mais enfin, de 'bonnes' références aussi comme l’organisation marxiste-léniniste Ilal Amam, Mariátegui, Gramsci…] et d'affirmations 'surprenantes' avec lesquelles nous ne pouvons être qu'en désaccord total ["En fait, le socialisme n’est nullement une nécessité historique mais un possible parmi d’autres"... !!!], ce texte est néanmoins d’un grand intérêt par rapport à la théorie des Centres et des Périphéries qui est la nôtre. Servir le Peuple a toujours affirmé, en effet, que l’universalité de la Guerre populaire consistait, dans le monde entier comme sur chaque km² de celui-ci, en un encerclement (politique, militaire, idéologique/culturel) du/des Centre(s) par la/les Périphérie(s), entendu non pas comme ‘substitut’ à la lutte des classes, mais comme sens de déploiement de celle-ci.

    Le capitalisme s’est déployé, depuis le Moyen-Âge jusqu’au siècle dernier, tout à fait logiquement depuis les ‘centres’, là où la concentration du Capital était la plus importante et avancée, en direction des territoires plus arriérés où les autres modes de production, en particulier l’’ennemi principal’ féodal, avaient leur siège. Il s’est déployé depuis villes vers les campagnes dans chaque province d’Europe et de la planète ; en Europe il s’est déployé (après la ‘fusion’ des pouvoirs politique -monarchique- et économique grand-bourgeois, entre le 13e et le 16e siècle) depuis le Nord-Ouest du continent vers le Sud et l’Est (la Russie par exemple, ou encore les Balkans et la Grèce, ou de très nombreuses régions d’Italie ou de la péninsule ibérique, étaient encore très arriérées et peu touchées par le capitalisme au moment de la Révolution d’Octobre 1917) ; et dans le monde, il s’est déployé depuis l’Europe occidentale, puis une ‘Triade’ Europe occidentale/côte Est de l’Amérique du Nord/Japon, vers le reste… Ainsi s’est déroulé le processus de négation de la féodalité (et des autres modes de production/organisations sociales archaïques) par le capitalisme.

    maoist naxal 20091026-eMais à présent, le processus de négation du capitalisme par le communisme va, selon tous les constats matériels, se déployer depuis les territoires, les régions, les pays touchés en dernier par le développement capitaliste, vers les Centres où, depuis des siècles, le pouvoir capitaliste (géo)politique, économique et culturel s’est concentré [1]. Cela est tout à fait logique si l’on prend, par exemple (‘au hasard’), la théorie de l’hégémonie de Gramsci : c’est bel et bien, forcément, dans les territoires et les populations touchés le plus récemment et (donc) superficiellement par le capitalisme, que l’hégémonie bourgeoise capitaliste, ‘coercitive’ (politico-militaire) comme intellectuelle/culturelle, va être la moins forte ; et donc, que le NIVEAU D’ANTAGONISME de la lutte de classe des exploité-e-s contre l’exploitation capitaliste (et, ici où là, ses ‘béquilles’ féodales, cléricales etc.) va être le plus élevé… Cela se constate aujourd’hui, chaque jour, en Inde, aux Philippines, dans les pays arabes et en Anatolie ‘turque’, en Amérique latine et même dans certaines régions d’Afrique,redblock italia et en Europe même lorsque l’on voit le niveau de conscience, de mobilisation et de lutte en Grèce, en Italie, en ‘Espagne’ et au Portugal, en Irlande et même dans les ‘pays de l’Est’ : telle est la valeur universelle de l’’encerclement des villes par les campagnes’ prôné par Mao.

    Cela est valable dans les pays de ce que l’on appelle communément le ‘tiers-monde’ (comme le Maroc), mais aussi à l’intérieur même des grands États impérialistes, dans les ‘campagnes’ de la Guerre populaire que sont essentiellement, en Europe, les NATIONS absorbées et niées par la construction de ces grands États, et les populations ‘ambassadrices’ du ‘tiers-monde’ dans les grands ghettos métropolitains (les ‘immigrés’ et leurs descendants) – en Amérique du Nord, ‘continent volé’, ce sont évidemment, d’abord et avant tout, les communautés ‘noires’ (afro-descendants), hispaniques et bien sûr primo-habitantes (‘Indiens’) qui forment les ‘périphéries intérieures’ où l’on trouve le plus haut degré de conscience, de mobilisation et de lutte révolutionnaire.

    big provence flagMais ATTENTION : comme nous l’avons dit, l’encerclement des Centres par les Périphéries ne ‘remplace’ pas la lutte des classes, il ne se ‘substitue’ pas aux termes de la grande contradiction motrice de notre époque qui sont le caractère (de plus en plus) social et international de la production (tendance au communisme) et l’appropriation privée et (de plus en plus) inégalitaire des moyens de production et du produit (capitalisme). Et le capitalisme (monopoliste, impérialiste, ‘mondialisé’) ne peut être nié que par un mode de production et une organisation sociale supérieure : le COMMUNISME. Il n’est pas question, en niant le capitalisme, de revenir à un ‘avant’ idéalisé, que serait la société califale au Maroc ou l’époque des comtes de Toulouse et des ducs d’Aquitaine pour nous Occitans ; il n’y a pas des Centres (ou un ‘Occident’) qui seraient organiquement mauvais, pures entreprises de domination, d’exploitation et de crime (aucune classe dominante n’a jamais pu régner par la seule contrainte, sans ‘contrepartie’ aux nuisances de sa domination), et des ‘Périphéries’ qui auraient été (avant leurs soumission et leur ‘corruption’) organiquement bonnes : elles ont pu être soumises précisément en raison de leurs défauts, des ARCHAÏSMES de leur organisation sociale. Il y a un mode de production (le capitalisme) qui, se déployant de ses Centres (de concentration du Capital et – donc – du pouvoir) vers les Périphéries, non sans casser des breizh gwenhadu komunourœufs, tout en étant et restant un système inégalitaire et d’exploitation du travail (donc en infligeant d’innombrables sévices à l’humanité), a été pour le processus historique humain une nécessaire et incontournable étape d’incontestables progrès ; mais qui a aujourd’hui épuisé son rôle positif historique et, pour permettre à l’humanité de ‘poursuivre son chemin’, doit maintenant disparaître, être renversé par un mouvement révolutionnaire se déployant depuis les Périphéries vers les Centres.

    Vouloir ‘revenir’ à une organisation sociale passée idéalisée comme ‘pure’, et ‘salie’ par la ‘modernité’ capitaliste, est de l’OBSCURANTISME, et l’obscurantisme finit TOUJOURS au service du fascisme et de la réaction la plus noire – comme l’on peut le voir en ce moment même, dans les pays arabes, avec le rôle des ‘salafistes’ idéalisant l’époque des ‘4 premiers califes’ successeurs du prophète Mohamed, au 7e siècle… Cela est d’une grande importance, aussi, pour nous qui faisons partie du Mouvement révolutionnaire de libération occitan, car combien de fois n’avons-nous pas entendu l’accusation de vouloir 'faire tourner la roue de l'Histoire à l'envers', de vouloir ‘revenir au Moyen-Âge’, aux ‘duchés féodaux’ etc. ? Tel est l’objet et l’intérêt de cet article (bien que d’idéologie ‘trotskysante’, donc ‘pas la nôtre’), que nous vous laissons maintenant lire...

    Source

    L’eurocentrisme inversé ou les pièges du culturalisme. Réponse à   إبن إدريس


    par Abdellatif Zeroual

     

    Je suis heureux de constater que le débat sur le mouvement du 20 février continue, enrichi qu’il est par d’autres contributions. Ainsi après deux points de vue réformiste puis radical, nous avons eu l’heureuse chance de connaître un autre point de vue aux relents culturalistes [1]. Pour résumer la critique de l’auteur envers moi et Benmoumen : la gauche a comme socle commun un eurocentrisme viscéral dont elle ne peut se détacher, conduisant en fait à un élitisme méprisant envers le peuple. En plus que ce constat est faux pour moi au moins (premier point), cette critique porte un projet obscurantiste (deuxième point) et une vision essentialiste du monde (troisième point) n’apportant aucune alternative réelle (quatrième point) au mouvement de lutte pour la démocratie au Maroc.

    Une vision caricaturale du marxisme

    Ibn Driss nous présente une version appauvrie du marxisme pour ensuite nous convaincre de son eurocentrisme congénital et consubstantiel. Pour cela, il nous présente d’abord un Marx viscéralement eurocentrique qui aurait légué ses tares à des marxistes dogmatiques [2]. Or il paraît que notre cher Ibn Driss n’a qu’une connaissance superficielle de son objet de critique. Nous essaierons d’y remédier en deux points :

    1- La compréhension de Marx des sociétés « non occidentales » n’a pas été figée [3]. Elle a évolué d’une croyance eurocentrique (largement partagée dans son siècle d’ailleurs, le 19ème siècle) dans le progrès à une vision non linéaire et anti-évolutionniste de l’histoire [4]. Ainsi, dans une lettre écrite en 1881 à une révolutionnaire russe (Vera Zassoulitch) [5] [NDLR : ici le texte original en français], Marx reconnaissait la possibilité du passage de la commune rurale russe au communisme sans passer par les « crises », les « conflits » et les « désastres » du développement du capitalisme en « Occident ». La commune russe serait donc le point de départ d’ « une évolution communiste ». Il exprime ainsi l’avis que son « esquisse historique de la genèse du capitalisme dans l’Europe occidentale » (dans le chapitre sur « L’Accumulation primitive » au premier livre du Capital) ne saurait être changée en « une théorie Che guevara dans une manifestation a Khenifrahistorico-philosophique de la marche générale, fatalement imposée à tous les peuples, quelles que soient les circonstances historiques où ils se trouvent placés » [6]. Il critiqua d’ailleurs justement l’application de concepts liés au contexte européen (comme féodalisme) pour appréhender la réalité dans des sociétés non européennes (critique de Kovaleski sur l’Inde).

    2- « Être marxiste c’est faire de Marx le point de départ et non d’arrivée », comme disait Samir Amin. C’est ainsi que de nombreux marxistes ont articulé à la fois une critique des aspects datés de l’œuvre de Marx et d’Engels, une vision non linéaire et non eurocentrique de l’histoire et du projet communiste et une lutte virulente et sans répit contre la domination coloniale et l’assujettissement des peuples. Il est ainsi de la théorie de l’impérialisme chez Rosa et Lénine, de l’appel d’un marxiste péruvien Mariatégui (à la fin des années 20) à faire « des communautés indigènes le point de départ d’une voie socialiste propre aux pays indo-américains » [7] en s’appuyant sur les survivances des pratiques collectivistes du « communisme inca », de la critique qu’a faite Walter Benjamin dans les années 40 de la philosophie linéaire de l’histoire [8], de la critique de l’économisme chez Gramsci, de la vision téléologique de l’histoire chez Althusser et Balibar, du colonialisme chez Fanon, de l’idéologie du progrès chez Wallerstein [9] et de l’eurocentrisme chez Samir Amin, jusqu’aux écrits de Michel Löwy, Daniel Bensaïd... Samir Amin n’a-t-il pas avancé (à l’encontre du schéma canonisé par le stalinisme des 5 modes de production) l’idée que le monde d'avant le capitalisme était organisé selon un mode de production tributaire dont l’Europe n’était que la périphérie, ce qui y a facilité l’émergence du capitalisme, et qu’ainsi le socialisme pourrait naitre des périphéries « non européennes » du système-monde capitaliste ?

    [Lire par exemple ici un de ces textes d'Amin, absolument passionnant pour remettre en cause certaines lectures marxistes trop "schématiques" et "simplistes" de l'histoire : Samir-Amin-developpement-inegal-et-question-nationale.pdf]

    N’est-ce pas une « provincialisation » de l’Europe ? En fait, le socialisme n’est nullement une nécessité historique mais un possible parmi d’autres. Seule la lutte tranche. Or notre cher Ibn Driss méconnait cette tradition communiste hérétique prônant une voie « non linéaire » et « non eurocentrée » au socialisme conçu comme un projet d’émancipation de toutes les formes de domination. Il méconnait aussi les apports politiques importants (inspirés des travaux de Paul Pascon et de Magali Morsy) de la gauche marxiste marocaine (qu’il fustige) et surtout d’Ilal Amam dans les années 70-80 [10] : appui à la lutte pour la reconnaissance de la langue et la culture amazighe, critique du nationalisme jacobin et ethnocentré bourgeois (représenté intellectuellement par Laroui), articulation de l’émancipation démocratique et sociale et de l’épanouissement culturel des communautés marginalisées ... Il ne connaît peut-être que le « marxisme » des manuels « soviétiques » des Éditions du Progrès et des Partis staliniens.

    L’anti-lumière : une dérive obscurantiste ?

    1537958_3_88d4_manifestation-organisee-par-le-mouvement-du-.jpgLa critique du marxisme « imaginaire » qui m’est attribué et du « libéralisme colonial » a comme socle commun une référence aux anti-lumières commune aux post-modernistes, aux obscurantistes de tout genre et aux conservateurs nostalgiques de la noble chevalerie féodale... Comment notre cher Ibn Driss conçoit-il la modernité ? Elle se réduit pour lui aux boucheries du colonialisme, au racisme et à la guerre. C’est une vision unilatérale et a-historique [11]. La modernité est un projet contradictoire où la régression (guerre, colonialisme, exploitation, misère...) côtoie le progrès (surtout technique). Ce progrès régressif (ou plutôt régression progressive), selon l’expression de Michael Löwy, illustre la conception dialectique du mouvement de l’histoire contemporaine. La modernité comporte des avancées sociales et politiques indéniables pour l’humanité (droits humains, lutte pour la libération des femmes, libertés indivduelles...). Les méconnaitre conduit inévitablement à l’obscurantisme surtout que ces avancées ont souvent été arrachées par le combat des opprimés eux-mêmes et qu’elles sont continuellement menacées par la bourgeoisie. En effet, ces avancées ne lui appartiennent pas mais bien à l’humanité tout entière. Tout l’enjeu est donc de les conserver, de les approfondir, et de les dépasser tout en extirpant de la racine les aspects régressifs (misère, colonialisme...). Bien évidemment, le progrès n’est pas inéluctable mais un possible parmi d’autres [12]. Il s’agit de développer une « vision de la modernité comme étant un processus toujours inachevé, qui ne pourra franchir l’étape de sa crise mortelle en cours qu’en allant de l’avant, par la réinvention de valeurs universelles porteuses d’une reconstruction économique, sociale et politique de toutes les sociétés de la planète. » [13] C’est çelà, en fait, l’essence du projet communiste : un projet d’émancipation de tous les opprimés. Pour paraphraser Poulantzas, le socialisme sera démocratique, féministe, écologiste et pour l’émancipation culturelle et nationale ou ne sera pas.

    Le relativisme culturel ou comment essentialiser l’autre

    Que nous propose notre cher Ibn Driss comme alternative à l’universalisme des lumières ? La réponse n’est pas assez loin : le culturalisme. Le culturalisme est une « théorie constituée quelconque, d’apparence cohérente et de portée qui se voudrait holistique, fondée sur l’hypothèse d’invariants qualifiés de « culturels », lesquels auraient le pouvoir de persister au-delà des transformations que les systèmes économiques, sociaux et politiques peuvent avoir apporté. La spécificité culturelle devient alors le moteur principal de parcours historiques forcément différents. » [14] L’hypothèse culturaliste nie l’existence d’universels. Pour elle, l’universalisme n’est qu’un produit de la domination. Elle ne peut concevoir un universalisme des dominés. Elle essentialise l’autre, n’y voit que le porteur d’un ADN culturel incompatible. Cette essence culturelle a-historique est la base de son « schème de vision et de division » du monde (pour reprendre Bourdieu). Ainsi le monde est constitué autour d’une seule opposition (selon notre cher Ibn Driss), l’Occident/le reste du monde. C’est le clash de « projets civilisationnels ». L’Occident est pour notre cher Ibn Driss un ensemble homogène dénué de contradictions. Ni classes, ni nationalités opprimées ni rien. Un ensemble simple non complexe constitué pour exploiter et opprimer le reste du monde. Cette position escamote les contradictions au sein de chaque « ensemble » et sert plutôt à relégitimer le système capitaliste en crise. La critique de l’eurocentrisme conduit à un eurocentrisme inversé. « L’idéologie 7101322215230.jpgbourgeoise, qui nourrissait à l’origine une ambition universaliste, y a renoncé pour lui substituer le discours post-moderniste des « spécificités culturelles » irréductibles (et, dans sa forme vulgaire, le choc inévitable des cultures). » [15] Elle sert, en fait, à l’embrigadement des peuples derrière les classes dirigeantes pour les soutenir dans la concurrence mondiale effrénée. Elle ne nous apporte aucune alternative réelle à l’oppression et à l’exploitation que nous vivons.

    Le degré zéro de la politique

    Quelle alternative politique apporte notre cher Ibn Driss pour faire avancer le mouvement par rapport à la voie réformiste et radicale ? Rien si ce n’est une apologie plus que douteuse de ce que Ibn Driss appelle « la politique informelle » [16] calquée sur l’économie informelle dont Hassan Zaoual (l’une des « références » de l’auteur) a aussi fait l’apologie avant de louer ensuite les vertus de la « grandiose INDH » en la présentant comme une rupture avec le « développement » tel qu’il était pratiqué avant. N’est-ce pas Hassan Zaoual qui a dit que « l’orientation théorique du paradigme des sites est convergente avec la perspective opérationnelle de l’INDH. En effet, ce projet de portée nationale donne sens et direction à un ensemble de mesures concrètes visant à réhabiliter sur une échelle la participation des acteurs à leur devenir. » [17] ? C’est dire le bien piètre sort qu’a réservé le regretté Hassan Zaoual à sa « salvatrice » critique du marxisme. En fait, embourbé qu’il est dans le piège culturaliste, Ibn Driss ne peut concevoir une politique profane (pour reprendre les mots de Daniel Bansaid), une politique par et pour les opprimés et non une quelconque élite éclairée, une politique délivrée des fatalismes religieux, culturalistes et économistes [18], une politique qui chez nous ne peut faire l’économie d’une double critique (de la « tradition » et de la « modernité ») pour nous frayer notre propre chemin vers l’émancipation politique, économique, sociale et culturelle, vers une modernité socialiste qui s’appuierait premièrement sur les pratiques collectivistes de la Jmaa marocaine et les acquis les plus lumineux de notre histoire particulière tout en contribuant à la construction d’une nouvelle civilisation humaine.


    [1] http://eplume.wordpress.com/2011/09/01/le-temps-mort-propos-sur-l’obscurantisme-de-gauche/#note01

    [2] Sans parler de la reprise de dogme stalinien et les présenter comme du marxisme. Je renvoie ici à son évocation du matérialisme dialectique comme système clos de lois éternelles. Marx emploie le terme de méthode dialectique.

    [3] Pour comprendre cette évolution voir LINDNER K., « L’eurocentrisme de Marx : pour un dialogue du débat marxien avec les études postcoloniales », Actuel Marx, 2010/2 n° 48, p. 106-128

    [4] BALIBAR E., La philosophie de Marx, 3ème édition la Découverte, coll. Repères, Paris, 2010 p : 105

    [5] http://www.marxists.org/archive/marx/works/1881/03/zasulich1.htm

    [6] LINDNER K., « L’eurocentrisme de Marx : pour un dialogue du débat marxien avec les études postcoloniales », op. cit. p : 122

    [7] DUMENIL G, LÖWY M, RENAULT E., Lire Marx. Presses universitaires de France, Paris, 2009 p : 90

    [8] Voir le texte de Benjamin « sur le concept de l’histoire ».

    [9] WALLERSTEIN I., Le capitalisme historique, La Découverte, Paris, 1985

    [10]MAJDI M, Les luttes de classes au Maroc depuis l’indépendance, Hiwar, Amsterdam, 1987 et SERFATY A., Dans les Prisons du Roi - Écrits de Kénitra sur le Maroc, Éditions Messidor, Paris, 1992

    [11] Il est d’ailleurs anecdotique de voir notre cher Ibn Driss critiquer la modernité en utilisant ses acquis (les acquis des sciences sociales).

    [12] WALLERSTEIN I., Le capitalisme historique op.cit.

    [13] AMIN S., modernité, religion et démocratie, critique de l’eurocentrisme, critiques des culturalismes, éditions Parangon, Lyon, 2008

    [14] Ibid

    [15] Ibid

    [16] En fait une sacralisation du sens commun populaire

    [17] ZAOUAL H., Management situé et développement local, Collection Horizon Pluriel, Rabat, 2006 p : 13-14

    [18] Il n’y a pas d’alternatives aux marchés.

     


    [1] Il est très difficile de faire la révolution et de construire le socialisme dans les pays occidentaux, car dans ces pays l'influence pernicieuse de la bourgeoisie est très profonde et s'est déjà infiltrée partout. En Chine, la bourgeoisie n'existe que depuis trois générations tandis que dans les pays comme l'Angleterre ou la France, elle existe depuis des dizaines de générations. Dans ces pays la bourgeoisie a une histoire vieille de 250 à 260 ans, voire de plus de 300 ans ; l'idéologie et le style de travail bourgeois ont des influences partout et dans toutes les couches sociales. C'est pourquoi la classe ouvrière anglaise ne suit pas le Parti communiste, mais le Parti travailliste.
    Lénine a dit : "Plus un pays est arriéré, plus difficile est son passage du capitalisme au socialisme". Vue d'aujourd'hui, cette thèse n'est pas correcte. En réalité, plus un pays est arriéré économiquement plus son passage du capitalisme au socialisme est facile, et non difficile. Plus un homme est pauvre, plus il veut la révolution. Dans les pays capitalistes occidentaux, le niveau de l'emploi et les salaires sont plus élevés et l'influence de la bourgeoisie sur les travailleurs est plus profonde. Dans ces pays, la transformation socialiste est moins facile qu'on ne le croit.
    Mao Zedong, "Notes de lecture sur le Manuel d'économie politique de l'Union soviétique" (1960). Le même raisonnement peut évidemment s'appliquer entre les différentes régions - les Centres et les Périphéries - d'un même État...

     


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    Voici un article publié il y a un peu moins d'un an sur la page Facebook de Servir le Peuple :

    Face aux ravages du capitalisme, les masses du Peuple SE MOBILISENT ; TOUJOURS. Il n'y a pas d'oppression, d'exploitation, qui ne suscite pas de résistance ; de même qu'il n'y a pas de coup sur la rotule qui ne suscite pas de réflexe d'extension de la jambe.

    Toute la question, est de savoir QUELLE IDÉOLOGIE et donc, derrière l'idéologie, QUELLE CLASSE va capter et canaliser cette mobilisation dans les buts qui sont les siens. partisansGlobalement, en période de crise capitaliste, il n'existe que 3 options ; et même, en réalité, seulement deux :  

    - la mobilisation dans l'idéologie révolutionnaire du prolétariat, le COMMUNISME, derrière la classe ouvrière, pour mener la GUERRE POPULAIRE et accomplir la Révolution prolétarienne ; 

    - la mobilisation RÉACTIONNAIRE derrière la frange la plus agressive, contre-révolutionnaire, antipopulaire et impérialiste de la classe dominante ; pour ÉCRASER la résistance des 1043515.jpgmasses à la crise, et résoudre celle-ci par la guerre de repartage impérialiste : le FASCISME.

    - la mobilisation derrière la social-démocratie, le réformisme plus ou moins "radical", c'est à dire derrière les "couches moyennes du salariat" (inférieures et supérieures) et, derrière elles, la frange "humaniste-réformiste-modernisatrice" de la classe dominante. Mais c'est là l'option perdante en période de crise : elle n'est réellement viable que lorsque la valorisation du capital reprend (ou a une réelle possibilité de reprendre). Durant la précédente crise générale du capitalisme, le "phare" de cette option était l'Amérique de Roosevelt, agrégeant à elle toutes les forces social-démocrates et travaillistes, et les "conservateurs antinazis" (De Gaulle, Churchill) de la planète ; mais elle dut elle aussi recourir à la GUERRE pour Photo-Tous-ensemble-21.pngsortir les pays concernés de la crise ; avec tous les crimes, n'ayant rien à envier au fascisme, que cela implique : camps de concentration pour les ressortissants japonais, bombardements incendiaires de Dresde et Tokyo, puis atomiques d'Hiroshima et Nagasaki, etc. Elle dut s'appuyer sur les forces réactionnaires de la société : beaucoup de "Français libres" venaient de la droite et de l'extrême-droite (De Gaulle lui-même, Leclerc, etc.) ; les généraux Eisenhower et Mac Arthur étaient (pour ne pas dire plus) "très à droite", et le général LeMay (du bombardement de Tokyo) sera candidat d'extrême-droite à la vice-présidence en 1968...

    TOUTE AUTRE OPTION N'EST QUE VAINE RÊVASSERIE. La question est donc de savoir dans laquelle de ces options va principalement se mobiliser la résistance des masses. Au premier tour de l'élection présidentielle 2012, si l'on regarde le vote "ouvrier" (cette catégorie statistique inclut l'ARISTOCRATIE ouvrière), c'est la mobilisation réactionnaire qui l'emporte (30% pour Marine Le Pen, 18% pour Sarkozy), suivie de la mobilisation social-démocrate (27% pour Hollande, 12% pour Mélenchon, les candidats NPA et LO étant sans doute légèrement sur-représentés). Il n'y avait pas de véritable candidature communiste révolutionnaire, et les candidatures (Poutou et Arthaud) pouvant passer pour telles donnent une idée de la faiblesse de la mobilisation dans ce sens. 

    De là, toute l'importance de construire le CENTRE D’AGRÉGATION qui fédérera, en direction de la Révolution prolétarienne, toutes les résistances des masses populaires à l'oppression capitaliste : le PARTI. Le Parti révolutionnaire agit en quelque sorte comme un noyau dur qui, en mouvement, exerce une FORCE D'ATTRACTION autour de lui, constituant ce que l'on appelle un FRONT UNI. Mais "le mouvement n'est pas tout" : il faut que ce Parti soit en mouvement DANS LE BON SENS, sans quoi, il exerce au contraire une force CENTRIFUGE (il fait le vide autour de lui !). Cela a été le cas, au cours du dernier demi-siècle, de dizaines et de dizaines de petites organisations "marxistes révolutionnaires" trotskystes, marxistes-léninistes et même maoïstes. C'est encore le cas aujourd'hui (mais là n'est pas le lieu pour nommer quiconque).

    nouveaux_partisans.JPGDurant la situation révolutionnaire en développement de 1965-75, seules deux organisations, dans l'entité "France", ont "tourné dans le bon sens" et réussi à agréger autour d'elles certains des éléments les plus progressistes, combattifs et généreux des masses en résistance : la GAUCHE PROLÉTARIENNE (maoïste) et la Ligue communiste ("trotsko-guévariste"). Malheureusement, la première a explosé en vol (trahie par sa direction bourgeoise intellectuelle) en 1973, tandis que l'autre s'est repliée sur les "fondamentaux" du trotskysme, c'est à dire une social-démocratie radicale, pour conduire au NPA actuel. Ces organisations n'ont pas su dépasser les limites de leur CONCEPTION DU MONDE, et n'ont donc pas réussi à contrer la mobilisation réactionnaire de masse (illustrée par le "triomphe" de la droite aux élections législatives de 1968 et aux présidentielles l'année suivante, suivi des "années Marcellin"), ni la mobilisation social-démocrate réformiste, qui débouchera sur le 10 Mai 1981.

    Ceci nous enseigne l'importance de la CONCEPTION COMMUNISTE DU MONDE, qui seule garantit que le Parti, centre d'agrégation des résistances au capitalisme, "tourne dans le bon sens" et puisse un jour prochain passer de la résistance à l'offensive. D'elle et d'elle seule découle la STRATÉGIE RÉVOLUTIONNAIRE du Parti, dont découlent les tactiques et les méthodes de travail adaptées à l'analyse concrète de la situation concrète, et la correction efficace des tactiques et des méthodes qui se révèlent erronées.

    La conception communiste du monde se construit dans une DIALECTIQUE entre la théorie (lorsque le Parti se crée, il part de l'expérience passée du mouvement communiste dans son pays) et la PRATIQUE. La théorie se forge et s'enrichit dans la pratique, elle se développe et revient sur le terrain, dans la pratique, pour se forger et s'enrichir à nouveau, et ainsi de suite. Le dialectique théorie/pratique est comme une roue à aubes plongée dans un cours d'eau ; l'eau représentant la pratique, le mouvement réel de la résistance des masses au capitalisme, tandis que l'air libre représente l'analyse, la réflexion théorique, le synthèse de l'expérience. Ainsi, dans tous les cas, la pratique dans le mouvement réel est L’ÉLÉMENT MOTEUR de cette dialectique qui développe la conception communiste du monde.


    communisme


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  • 1. Depuis désormais plusieurs mois, la grande ‘question de société’ (démocratique) du mariage pour les couples homosexuels secoue la société (les masses populaires) d’Hexagone, et permet le développement de GRANDES MOBILISATIONS RÉACTIONNAIRES DE MASSE – mais ce pourrait être, à vrai dire, n’importe quelle autre question (comme la peine de mort ou l’école privée au début des années 1980), l’’important’, l’aspect déterminant, étant que la ‘gauche’ de la bourgeoisie ait ‘atterri’ par accident au pouvoir et que cette ‘parenthèse politique’ ouvre, comme toujours dans l’histoire, à une recomposition, une/de ‘nouvelle(s) synthèse(s)’ idéologique(s) et une remobilisation de la réaction la plus noire.

    Printemps-Francais-LOLLa droite bourgeoise, dans toutes ses composantes depuis la libéral-démocratie ou la démocratie-chrétienne jusqu’aux semi-fascistes en passant par les ‘reagano-thatchériens’, a en effet dirigé l’État pendant 10 ans (2002-2012), et largement hégémonisé intellectuellement la ‘société civile’ hexagonale pendant cette période. Mais, face à la crise mondiale terminale du capitalisme, la tentative de ‘synthèse’ sarkozyste, la tentative de rassemblement ‘grand écart’ entre la chèvre semi-lepéniste ‘Droite populaire’ et le chou ‘républicain, humaniste et social’ à la Borloo, s’est avérée trop fragile et n’a pas résisté, tandis que de son côté, le ‘peuple militant’ d’extrême-droite, fascisant, déployait des stratégies (toutes) fort fructueuses, mais contradictoires entre elles : infiltration ‘classique’ de la droite ‘républicaine’ ‘dure’ (le plus éminent étant Patrick Buisson, conseiller de campagne de Sarkozy en 2006-2007 et 2011-12, passé depuis au service de... Copé) ; ‘réseautage métapolitique’ à base de ‘coups d’éclat’ médiatiques, de ‘maillage associatif’, d’élections locales et de ‘touchage’ de notables (Identitaires, UDN, national-catholiques) ; ‘dépassement’ de la traditionnelle haine anti-‘pas-blancs’ par la recherche de ‘valeurs communes’ avec les masses colonisées-intérieures les plus arriérées (Soral avec Dieudonné, Thomas Werlet avec Kemi Seba) ; ‘monolithisme oppositionnel’ FN sur une ligne souverainiste anti-‘Bruxelles’, ‘républicaine’ et social-populiste anti-‘système’, anti-‘UMPS’ etc. ; tout cela sans parler des contradictions dans la recherche d’alignement géopolitique de l’impérialisme BBR (ancrage occidentaliste ‘sans être les toutous des Américains’, ou anti-américanisme pro-russe quitte à se faire ‘tiers-mondiste’). Tout cela a donc finalement ouvert la voie à un retour aux ‘affaires’ de l’aile ‘libérale-démocrate de gauche’, ‘social-libérale’ de la bourgeoisie monopoliste, le PS ; mais avec une emprise idéologique de masse ridicule par rapport à 1981 ou même 1997 ; et, on l’a dit, à une profonde réorganisation et remobilisation du ‘peuple de droite’ le plus dur, à la préparation d’une CONTRE-OFFENSIVE qui, soyons-en sûrs, si la droite revient au pouvoir (ce qui est à peu près acquis) en 2017 avec un FN à 20 ou 25%, sera TERRIBLE.

    Dans le contexte, donc, du débat autour du ‘mariage pour tous’, a émergé par exemple la mouvance informelle du ‘Printemps français’, dont ont parlé récemment les camarades d’Alternative libertaire Montpellier : reprenant l’appellation médiatico-bourgeoise du ‘Printemps arabe’ (les grands révoltes populaires qui ont secoué le Maghreb et le Proche-Orient depuis 2011), ce mouvement dans lequel convergent aussi bien des éléments FN, villiéristes, national-catholiques ou identitaires que des ‘radicaux’ de l’UMP, prône une action ‘non-violente, mais pas forcément légale’, et ne fait finalement que reprendre un classique de l’hégémonie intellectuelle de droite depuis plus de 20 ans (depuis, en gros, les ‘années Mitterrand’) : nous vivrions en ‘dictature’, une dictature imposée par la ‘bien-pensance de gauche’, les ‘lobbys communautaires’ (LGBT, musulmans, afro-descendants et ‘immigrés’ en général, parfois juif), la ‘racaille raciste anti-blancs’ que la ‘bien-pensance’ et les ‘lobbys’ font prospérer, sans oublier les ‘syndicats de fonctionnaires et autres payés-à-rien-foutre qui nous prennent en otage’ ; et il faudrait ‘organiser la résistance’… Mais tout cela n’est encore pas grand-chose par rapport à une mouvance qui a émergé récemment parmi les plus réactionnaires des décérébrés-francisés d’Occitanie, là où l’idéologie OAS importée par les ‘rats-pas-triés’ colonialistes d’Algérie est la plus fortement implantée : le Front de Défense des Français (ce qui, en Occitanie, ne manque pas de sel…), des ‘déçus’ du virage ‘respectable’ de Marine Le Pen (qui a, notamment, refusé de se joindre aux ‘manifs pour tous’ et serait ‘prisonnière d’un lobby gay’ au FN) qui appellent (et se préparent) d’ores et déjà à la GUERRE CIVILE, vers laquelle la crise terminale du capitalisme nous conduit inexorablement. L'on notera ici l'aspect 'nébuleux', protéiforme de cette mobilisation ultra-réactionnaire de masse, CARACTÉRISTIQUE du fascisme 'français' qui est historiquement plus une affaire de squadrisme musclé et (surtout) de 'chaudron d'idées' et de 'lobbying' en faveur d'un 'pouvoir fort', d'un 'homme providentiel' qui surgira tôt ou tard pour 'remettre les choses en ordre' (comme Pétain en 1940), que d'un parti structuré autour d'un chef en vue de la prise directe du pouvoir (ceci n'a guère connu que trois exemples : le PSF du colonel La Rocque ; le RPF de De Gaulle - qui a finalement pris le pouvoir, mais n'a pas mis en place un véritable fascisme, et a 'trahi' dans une large mesure sa base sur la question de l'Algérie ; et le FN sous la direction de Marine Le Pen - son père ne voulait pas réellement accéder au pouvoir).

    Du côté de la ‘gauche radicale’, il ne faut pas oublier que la question démocratique des personnes homosexuelles et transgenre (et, à vrai dire, les questions démocratiques ‘de société’ en général) a longtemps été plus qu’un gros problème : pour le PCF de Thorez et Duclos, ‘la classe ouvrière (était) saine’, l’homosexualité (ou même simplement la liberté sexuelle) était un ‘vice petit-bourgeois’, et les homosexuel-le-s des ‘malades’ auxquel-le-s ‘le Parti ne veut pas de mal : nous allons les soigner’, car ‘les communistes sont de vrais hommes qui aiment de vraies femmes’… et du côté trotskyste, le PCI de Lambert (largement hégémonique jusqu’en Mai 68), ou même son clone de Frank et Raptis ne raisonnaient guère autrement (aujourd’hui, cela va se traduire, chez beaucoup d’organisations, non par une homophobie affirmée mais par – effectivement – un silence gêné sur la question, ou par l’affirmation qu’il y a là une ‘diversion’ par rapport aux 'vrais problèmes', un ‘débat de société indifférent à la classe ouvrière’, qu'il y a 'd'autres priorités', etc.).

    printemps-françaisIl y a là une conséquence directe de l’IDÉOLOGIE RÉPUBLICAINE ‘française’, directement ‘décalquée’ sur le mouvement ouvrier : ‘staliniens’ comme trotskystes recherchaient une ‘identité républicaine et socialiste organique’ du peuple ‘français’, identité de laquelle ‘rien ne (devait) dépasser’. Et il faut dire que ni le marxisme-léninisme ‘kominternien’ (y compris le PC chinois de Mao et, plus tard, le PC cubain du Che…), ni le vieux barbichu depuis son exil mexicain, ne poussaient spécialement dans une autre sens (au milieu des années 1930, l’URSS rétablissait pratiquement toutes les conceptions les plus bourgeoises des relations sociales à caractère sentimental et sexuel : pénalisation de l’homosexualité, interdiction du divorce et de l’avortement qu’avaient autorisés la Révolution d’Octobre, etc.). Seul le mouvement libertaire mettait en avant ces ‘droits’, dans une conception idéaliste petite-bourgeoise ‘radicale’ de la ‘liberté individuelle’. Selon le marxisme, ‘l’humanité ne peut répondre qu’à des questions qui se posent à elle’, mais cela n’est pas un argument ici, puisque l’homosexualité existe (et ‘pose question’) depuis aussi longtemps qu’existe l’espèce humaine elle-même : répandue et socialement acceptée dans l’Antiquité esclavagiste, mais sous une forme élitiste et violemment patriarcale (mode de domination des hommes mûrs sur les jeunes), elle s’est ainsi trouvée rejetée (comme la libre sexualité en général) par les ‘religions révélées’ du Ier millénaire (christianisme, islam, judaïsme talmudique), idéologies 'révolutionnaires' du passage à la féodalité, car associée à la ‘dépravation institutionnalisée’ et à l’esclavagisme sexuel qui prévalait dans l’esclavagisme en crise générale de l’Empire romain ; puis, le processus (parallèle à l’émergence du capitalisme) de construction de l’État moderne, à partir des 12e-13e siècles, a ouvert une ère de répression institutionnalisée et atroce (personnes brûlées vives, etc.), tout comme elle a donné naissance à l’antisémitisme et à la xénophobie ‘existentiels’, au suprématisme ‘blanc’ et chrétien etc., dans une logique où tout ce qui était ‘différent’ du modèle défini comme dominant (la famille bourgeoise ou laboureuse européenne-chrétienne) était potentiellement ‘subversif’ (pour le compte des exploité-e-s, ou pour le compte d’un pouvoir capitaliste concurrent), et devait donc être soit soumis, soit éliminé. L’accusation de ‘sodomie’ (qui pouvait désigner l’homosexualité en particulier, ou le libertinage sexuel en général) était ainsi fréquemment employée contre les ‘dissidents’, par exemple les Templiers ou encore les Cathares, et le terme de ‘bougre’/’bougrerie’, longtemps synonyme avant de perdre sa signification, vient d’ailleurs de ‘bulgare’ qui désignait les Bogomiles, parents balkaniques des Cathares. Il n’y a donc, pour le mouvement marxiste (‘stalinien’ ou trotskyste) du 20e siècle, pas vraiment d’’excuse matérialiste historique’ quant à ses positions sur cette question, mais plutôt un dégagement insuffisant de l’idéologie bourgeoise, elle-même pas encore tout à fait dégagée des conceptions féodales dans lesquelles a ‘baigné’ l’accumulation primitive du capital...

    C’est dans le contexte de Mai 68 qu’enfin, des forces marxistes (comme la Gauche prolétarienne et, plus encore, les ‘maoïstes libertaires’ de ‘Vive la Révolution’ (VLR), ou des courants trotskystes notamment dans et autour de la LCR) ont mis en avant cette question démocratique, et LES questionS démocratiqueS en général, rappelant au mouvement prolétarien qu’il n’avait pas vocation à n’émanciper que le prolétariat lui-même, mais aussi les masses populaires humaines dans leur totalité. Cependant, avec le grand recul connu par le mouvement communiste international depuis cette époque, ces conceptions ont tendu en effet à ‘régresser’ vers un ‘libéralisme-libertaire’ idéaliste et à s’aligner sur la gauche bourgeoise ‘moderniste’, perdant la capacité de compréhension du lien entre le modèle de société bourgeois (rejetant l’homosexualité, la liberté sentimentale et sexuelle etc.) et le mode de production lui-même (cf. ci-dessus). Aujourd’hui, cette hégémonie petite voire moyenne-bourgeoise (couches sociales urbaines, éduquées et aisées), ‘social-libérale-libertaire’, sur les mouvements d’émancipation féminine et homosexuelle, est une problématique réelle sur laquelle le mouvement communiste renaissant doit se pencher, problématique traduite notamment par la réaction des Indigènes au débat sur le ‘mariage pour tous’, réaction plus que critiquable, mais révélant bien l’état d’esprit ‘moyen’ du colonisé intérieur (et même du prolétaire ‘blanc’) des ‘quartiers’. Reste aussi en suspens, depuis longtemps, la question d’un mouvement d’affirmation lesbien autonome ; car, la ‘nature humaine’ léguée par des millénaires de société de classe étant ce qu’elle est, les ‘bonnes intentions’ ne suffisent pas et, souvent, les mouvements féministes sont ‘trustés’ par les femmes hétérosexuelles, et les mouvements homosexuels, par les homosexuels masculins… Les militantes lesbiennes se ‘réfugient’ alors, souvent, dans un ‘féminisme ultra-radical’ violemment gauchiste, anti-constructif et repoussoir pour les masses ‘lambda’ (tous sexes et genres confondus).

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    2. Cette question permet aussi, encore une fois, de démasquer la pratique au service éternel de la réaction des ultra-gauchistes. Car, une fois constaté ce que tout le monde est tout à fait capable de constater (qu’un nombre considérable de personnes réactionnaires sont capables de se mobiliser en masse contre les droits démocratiques des personnes homosexuelles), le ‘p’’c’’mlm’ concentre encore une fois, comme à son habitude, ses attaques sur l’’extrême-gauche’ (le mouvement révolutionnaire ou ‘radical’ – potentiellement révolutionnaire – d’Hexagone), et en particulier sur ce qui a vocation à devenir sa ‘locomotive’, les véritables maoïstes qu’ils qualifient (dans un grand sac avec les pires débris du révisionnisme thorézien) de ‘marxistes-léninistes’. Ceux-ci seraient coupables de ‘ne jamais parler’ de la question ; tandis que de son côté le mouvement trotskyste, ‘main dans la main’ avec la social-démocratie, mettrait en avant un discours ‘libéral-libertaire’, avec des éléments ‘dissidents’ (comme l’électron libre Ilan Simon, ex d’ARS Combat) qui rejoindraient la mobilisation homophobe (cela, par contre, est vrai et plonge ses racines dans le lourd passif du mouvement ouvrier hexagonal, cf. ci-dessus).

    arton982-715ebSauf que cette affirmation est tout d’abord FAUSSE, puisqu’ont défendu les droits des personnes homosexuelles et combattu les mobilisations réactionnaires des organisations aussi variées que l’OCML-VP, l’Organisation communiste ‘Futur Rouge’ (ici et ici) – qui a précisément rompu avec le ROCML sur la question de ces ‘débats sociétaux qui n’intéressent pas le mouvement ouvrier’ ou le média communiste ‘Front pour la Libération de Classe’ (mais pas, en effet, le PCmF, sans doute très pris par son implication dans les luttes ouvrières concrètes de région parisienne) ; et ensuite, si position est prise, elle est de toute manière qualifiée de ‘libérale-libertaire’, ‘rejetant la social-démocratie mais ne la critiquant pas’ (???), etc. etc.

    D’une manière générale, le ‘p’’c’’mlm’ pourfend le ‘silence’ (totalement imaginaire) de l’’extrême-gauche’ sur cette question, mais, lorsqu’une organisation ou un média, ou même un individu isolé, prend position, si ce n’est pas homophobe (en tout cas, refusant l’égalité des droits) comme l’électron libre Ilan Simon, c’est alors ‘libéral-libertaire’… Nous avons là une méthode très subtile d’argumentation et de ‘démolition’ de l’’extrême-gauche’ au service de la réaction, méthode dont le ‘p’’c’’mlm’ est vraiment devenu un spécialiste émérite.

    Enfin, n’ayons pas peur de le dire, il y a tout de même du GRAND COMIQUE à s’ériger en donneurs de leçons absolus sur cette question, lorsque l’on se réclame de (et vénère à grandes prosternations) l’URSS de Staline et ‘le PCF des années 1930-40’, et que l’on connaît les positions de ces forces politiques sur l’homosexualité et les ‘questions morales’ à cette époque… (de même que lorsque l’on se pose en grands donneurs de leçons sur l’antisémitisme, et que l’on connaît les discours et pratiques de la direction ‘stalinienne’ sur cette question à la fin des années 1940/ début 1950). D’une manière générale, leur position vis-à-vis des personnes homosexuelles ou ‘transgenre’ est profondément ‘professorale’ et imprégnée de paternalisme.

    anti-homophobie3. La position réellement communiste révolutionnaire, sur la question démocratique LGBTI, est que la bourgeoisie capitaliste ‘de gauche’, par sa nature même de classe, est incapable d’assumer jusqu’au bout son propre libéralisme démocratique [1] : à ce stade du processus révolutionnaire et DONC de la conception communiste du monde, il n’y a fondamentalement pas grand-chose à redire à la conception bourgeoise libérale sur ces questions (l’État et les lois n’ont rien à faire dans les chambres à coucher des masses populaires) ; les arguments basés sur le prétendu ‘équilibre de l’enfant’ sont des fumisteries obscurantistes sans aucun fondement scientifique (si les couples homosexuels devaient élever ‘automatiquement’ des enfants homosexuels ou ‘perturbés’, alors ‘automatiquement’ les couples hétérosexuels devraient élever des enfants hétérosexuels et/ou ‘équilibrés’ : cette seule affirmation suffit à démontrer le ridicule de l’argument) ; en revanche, refusant que le marché capitaliste subsume (absorbe) une autre activité humaine, les communistes s’opposent au marché de la procréation pour autrui.

    En instaurant le ‘mariage pour tous’, la bourgeoisie capitaliste libérale ‘de gauche’ joue un rôle positif en faveur de l’égalité démocratique des personnes homosexuelles ; mais, dans le même temps, outre de valoriser et renforcer l’institution bourgeoise du mariage (au demeurant, tant les sociaux-démocrates que les ‘staliniens’ et les trotskystes n’ont jamais été très ‘avant-gardistes’ sur ce point au siècle dernier…) et de chercher (nature de classe oblige !), à chaque reconnaissance d’une liberté démocratique, à créer un marché pour le capital (comme cela s’est fait avec l’émancipation féminine dans les années 1960-80, la reconnaissance de ‘l’enfant/adolescent comme personne’, la ‘tolérance antiraciste’ des minorités etc. etc.), elle est incapable d’assumer de manière conséquente, à travers une véritable mobilisation progressiste de masse, ce petit bout de révolution démocratique véritable… pour la bonne et simple raison qu’aujourd’hui, au stade de l’impérialisme, seul le prolétariat révolutionnaire à la tête des masses populaires le peut !

    Les droits démocratiques LGBTI et la mobilisation réactionnaire de masse


    [1] Si l’on voulait résumer 800 ou 900 ans d’histoire du capitalisme en quelques mots, l’on pourrait dire les choses, présenter sa contradiction ‘existentielle’, ainsi : d’un côté il est un ‘centre d’impulsion’ d’humanisme, puisqu’il met en avant l’individu dans son individualité, contre l’individu ‘simple petit rouage’ de la société, ou simple chose que l’on peut s’approprier, utiliser et même détruire à volonté (conception esclavagiste qu’avaient déjà commencé à contester les grandes religions comme le christianisme, l’islam ou le bouddhisme) ; mais de l’autre, par ses contradictions mêmes et l’obligation de ‘gérer’ celles-ci, et même pour ‘forcer’ le développement de ses forces productives, il est obligé de s’appuyer sur un appareil politico-militaire et idéologique qui reprend, ‘rénovées’, les conceptions les plus barbares des temps médiévaux et antiques. Le capitalisme est apparu, aux 11e-12e siècles, dans des sociétés aux forces productives avancées où il a impulsé des modèles de société relativement ‘libéraux’ et humanistes (Italie, régions rhénanes, Espagne ‘maure’, Occitanie…) ; mais il n’a pu prendre réellement son essor qu’à partir du moment où il s’est/a été ‘recouvert’ de l’appareil politico-militaire et idéologique (d’encadrement des masses) qu’est l’État moderne, qui, lui, provient des terres les plus ‘moyennâgeuses’, aux forces productives les moins avancées : Nord de l’Hexagone ‘française’, Nord de la Meseta ibérique, Angleterre, Autriche des Habsbourg puis Prusse en Allemagne, etc. Pour réaliser sa véritable grande accumulation primitive, il a dû rétablir, pour les pays d’Europe de l’Est, un servage digne d’avant l’An 1000 qui avait pratiquement disparu et, dans les colonies des pays d’Europe de l’Ouest, l’institution antique de l’esclavage, qui le christianisme avait beaucoup fait reculer depuis la fin de l’Empire romain, mais en la limitant aux ‘nègres’ africains et aux indigènes d’Amérique, en arguant que ceux-ci n’étaient ‘pas tout à fait humains’ (ou en tout cas ‘païens’, ce qui peut justifier l’esclavage selon certains textes ‘sacrés’)… etc. etc. Là est, au niveau de la superstructure idéologique, la contradiction qui traverse toute l’histoire du capitalisme depuis la ‘renaissance médiévale’.

     


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  • C’est le printemps et, comme chacun et chacune le sait et le vit au quotidien, après des mois de grisaille hivernale, les sens s’éveillent : les températures clémentes favorisent la production, par l’organisme, de phérormones, l’’hormone du désir’ ; l’on met plus volontiers ‘le nez dehors’ et c’est le moment des rencontres… Mais les révolutionnaires ont-ils une position sur ce qu’il est convenu d’appeler le ‘désir’ et le ‘sentiment amoureux’ ? Ces pensées sont-elles ‘détachables’ de la réalité matérielle, de la vie sociale et de ses rapports/contradictions de classe ? Voyons les choses de plus près.

    Voici un article de Zones subversives [proche des (bons) camarades ‘marxistes libertaires’ d’AL Montpellier et repris sur leur site] sur l'amour. A-t-il toujours existé? Comment fonctionne-t-il sous le capitalisme?

    Cet article, pour ne pas être strictement de notre 'chapelle' politique (et se baser au demeurant, comme le souligne l'auteur, sur les travaux d'une sociologue petite-bourgeoise 'de gauche'), n'en expose pas moins bon nombre de vérités... pas toujours 'bonnes à dire' !

     

    eros-erosion--miss-ticLe thème de la souffrance amoureuse traverse la littérature. Pourtant, la réflexion politique et sociale sur ce problème de la vie quotidienne semble inexistante. La sociologue Eva Illouz se penche sur les mutations des relations amoureuses et sexuelles à l’ère de la modernité marchande. Elle insiste sur les aspects les plus récents. En revanche elle a tendance à éluder la répression sexuelle ainsi que les contraintes sociales qui perdurent malgré l’émergence de nouvelles formes d’aliénations. Les manuels de développement personnel ne sont pas plus émancipateurs que la morale religieuse.

     Une sociologie de l’amour moderne

    Eva Illouz évoque les différentes formes de souffrances. Trouver l’amour et les difficultés pour rencontrer une nouvelle personne alimente la souffrance, surtout avec la multiplication d’échecs. Lorsque la relation s’instaure, la souffrance prend « la forme de l’ennui, de l’angoisse ou de la colère, de disputes et de conflits douloureux, et aboutissent à la déconfiture, au doute sur soi-même, à la dépression engendrée par les ruptures ou les divorces », constate Eva Illouz. La psychologie insiste sur la responsabilité personnelle de chacun dans l’échec amoureux, considéré comme inévitable. Au contraire, « les vicissitudes et les malheurs de nos vies amoureuses sont le produit de nos institutions », souligne Eva Illouz. Les féministes estiment que la conception romantique de l’amour permet d’imposer une oppression patriarcale. Mais le féminisme postmoderne estime que le pouvoir devient le socle des relations humaines et amoureuses. Pourtant, l’amour renvoie également au désir et au plaisir, et pas uniquement au pouvoir. 

    La réflexion critique ne doit pas se limiter à la sphère économique et sociale. Les problèmes de la vie quotidienne doivent également faire l’objet d’une analyse. « Mon but est de traiter l’amour comme Marx traita des marchandises: il s’agira de montrer que l’amour est produit par des rapports sociaux concrets ; que l’amour circule sur un marché fait d’acteurs en situation de concurrence, et inégaux ; et de soutenir que certaines personnes disposent d’une plus grande capacité à définir les conditions dans lesquelles elles sont aimés que d’autres », présente Eva Illouz. 

    La sociologue montre bien l’analogie entre l’amour et la logique marchande dans la modernité néolibérale. L’émotionnel s’articule avec l’économique. En revanche, l’auteur occulte les normes morales qui évoluent mais perdurent. 

    Progressivement, le mariage avec une personne n’est plus une décision imposée, mais devient un choix individuel. Pourtant « cette forme culturelle occidentale de modernité a provoqué des formes de misère affective, de destructions sans précédents des univers de vie traditionnel », souligne Eva Illouz. 

    L’individu moderne semble tiraillé entre des injonctions contradictoires. L’institution du couple et du mariage s’opposent à l’amour romantique et passionné pourtant présenté comme un idéal. La colère, la frustration et la désillusion proviennent des ses contradictions sociales. Les expériences et les souffrances individuelles semblent en réalité collectives car liées aux normes et aux contraintes sociales.            

    L’évolution historique de la morale et de l’amour  

    L’amour n’est pas uniquement un sentiment désintéressé, irrépressible et passionné. Dans l’époque moderne, l’amour apparaît surtout comme un choix. Le partenaire est évalué et choisit selon des critères rationnels. Mais ce choix semble surtout déterminé par un environnement culturel et par les représentations dominantes. Les romans de Jane Austen permettent d’observer les déterminants du choix amoureux dans les sociétés du XIXème siècle. La conformité du partenaire avec ses propres valeurs morales prime sur le désir sexuel. La femme doit se soumettre à un code moral et à un contrôle patriarcal. L’amour semble alors lié à l’attachement et à l’habitude, et non pas à l’attirance instantanée. « L’amour n’est pas ici vécu comme une rupture ou un bouleversement dans la vie quotidienne. Il se développe plutôt avec le temps, l’intimité, la connaissance progressive et l’étroite fréquentation des familles de chacun, au quotidien », précise Eva Illouz. La dimension morale organise la vie affective. La séduction provient de la capacité à se conformer à des codes et à des normes. Cet aspect moral se traduit par l’intériorisation de valeurs mais surtout par des pratiques sociales. Le processus de séduction s’inscrit dans le cadre précis de la famille et du voisinage. Le jugement des proches et le contrôle de l’environnement social semblent déterminant. Des règles et des rituels sociaux encadrent la séduction. Les sentiments amoureux se conforment aux intérêts économiques et l’endogamie sociale doit être préservée. Le respect des promesses et l’engagement semblent déterminants. 

    Dans la modernité, le marché des rencontres devient dérégulé. L’amour est désencastré des codes sociaux pour devenir un choix individuel. Le sex-appeal codifie l’attractivité sexuelle. La séduction s’apparente alors à l’intériorisation d’un « ensemble de codes corporels, linguistiques et vestimentaires très consciemment manipulés et adaptés dans le but de susciter le désir sexuel de l’autre », résume Eva Illouz. L’amour se conforme à la logique consumériste. Le cinéma, les magazines, la publicité diffusent des normes érotiques. La jeunesse et la beauté façonnent l’imaginaire érotique de la société de consommation. En revanche, Eva Illouz exagère fortement la rupture de la modernité. La sociologue estime que le plaisir sexuel devient central. Mais, dans le monde réel, les valeurs morales et les contraintes sociales évoluent sans pour autant disparaître. Peu de femmes osent affirmer qu’elles aiment le plaisir sexuel. En revanche, la sociologue souligne à juste titre l’importance croissante de l’attrait physique dans le sentiment amoureux. Une standardisation du look caractérise la séduction. Le marché de la rencontre amoureuse semble désormais régi par la compétition. Mais la sociologue considère que la valorisation du plaisir sexuel dans les médias organise désormais la vie sociale. En réalité, ses représentations médiatiques alimentent la frustration. La misère sexuelle prime sur la jouissance dans la vie quotidienne. Mais l’amour s’apparente désormais à un grand marché rythmé par la concurrence. « La rencontre avec des partenaires potentiels est donc structurées dans et par un marché ouvert au sein duquel les gens se rencontrent et s’unissent en fonction de leur « goût », et rivalisent les uns avec les autres pour accéder aux partenaires les plus désirables », résume Eva Illouz. Une hiérarchie sexuelle se construit à partir de l’attrait physique et du capital érotique des individus. Des « capitalistes sexuels » tirent une fierté du grand nombre de leurs conquêtes. Le capital sexuel peut ensuite être réinvestit dans le champ professionnel puisqu’il révèle la bonne présentation de soi et la capacité à se mettre en valeur.    

    Le patriarcat et le marché amoureux  

    La liberté amoureuse se développe mais reste dans le cadre du patriarcat. La morale traditionnelle impose l’abstinence et le contrôle sexuel. L’engagement et le mariage déterminent la vie sociale. Les obligations familiales doivent être respectées. 

    Dans les sociétés traditionnelles, le nombre de conquêtes féminines reflète le statut social de l’homme. Dans la modernité, la multiplication des partenaires est une condition pour accéder à un statut social élevé. Ils expriment leur capacité à triompher de la concurrence sur le marché sexuel. « Les hommes affirment leur pouvoir social sur les femmes et sur d’autres hommes en exerçant une domination sexuelle sur de nombreuses femmes », explique Eva Illouz. 

    Les femmes restent attachées à une relation exclusive et monogame, conforme à la famille patriarcale. Les femmes subissent la contrainte normative et biologique de la grossesse. Les femmes doivent choisir des hommes plus âgés, plus cultivés et plus aisés pour se conformer à l’ordre social. Le marché de l’amour se rétrécit pour les femmes qui, de leur côté, deviennent plus cultivées et autonomes financièrement. Le choix d’hommes semble alors très limité. La phobie de l’engagement semble alors liée aux limites dans le choix amoureux. 

    Le désir sexuel se conforme à la logique marchande. La rareté devient plus attirante. Une femme distante et désintéressée devient alors plus attirante qu’une femme amoureuse. 

    Dans le choix amoureux, la rationalisation, l’évaluation, le calcul prime sur les sentiments et l’émotion. La  décision de l’engagement amoureux n’est plus intuitive mais repose sur un calcul rationnel. Cette évaluation diminue alors le désir de l’engagement par rapport au choix intuitif. 

    Pourtant, l’analyse d’Eva Illouz repose sur un postulat largement erroné. Pour la sociologue, les difficultés de l’engagement proviennent d’une abondance de partenaires amoureux. En réalité, la misère affective et sexuelle semble plus largement répandue que l’abondance. Les choix amoureux, pour la plupart des gens, ne sont pas aussi importants que le prétend la sociologue. Surtout, la phobie de l’engagement peut provenir d’une crainte légitime face à l’embrigadement du couple. Cette conception de l’amour semble sclérosée dans ce carcan de la monogamie. Mais l’attachement des hommes à une « sexualité de rencontres » n’est pas tant lié au désir et au plaisir. Au contraire, les hommes acceptent plus facilement les relations sexuelles car elles renforcent leur statut social de séducteur. Mais la phobie de l’engagement devient alors plus importante chez les hommes qui peuvent ainsi bénéficier d’une domination affective sur les femmes.                

    L’amour et la reconnaissance sociale  

    L’amour participe à une demande de reconnaissance. « L’amour romantique rehausse l’image de soi à travers le regard de l’autre », décrit Eva Illouz. L’amour permet d’affirmer sa singularité et sa propre valeur. Cette demande de reconnaissance fonde l’identité personnelle.

    Le désir de rencontre repose sur l’affirmation du moi. « Le fait de « se sentir bien avec soi-même » est devenu à la fois la cause et l’objectif de la rencontre amoureuse », explique Eva Illouz. L’assurance devient indispensable à la rencontre, et la rencontre renforce l’assurance. Les compliments ne correspondent pas à l’intensité de l’amour mais à une évaluation de la valeur sociale. Les femmes aiment les compliments pour obtenir une reconnaissance sociale. Selon le philosophe Axel Honneth, « l’image de soi […] dépend de la possibilité d’être continuellement validée par les autres ». La valeur sociale d’un individu s’établit à travers ses relations avec les autres. 
    Le désir « est évalué à l’aune de critères multiples et fluctuants, tels que l’attrait physique, l’alchimie émotionnelle, la « compatibilité » des goûts et le caractère », décrit Eva Illouz. Le choix amoureux ne correspond plus à des codes sociaux. La « désirabilité » dépende de choix subjectifs et individuels. L’amour devient plus incertain. « La conséquence est que les hommes et les femmes peuvent difficilement prédire s’ils attireront un partenaire potentiel et/ou entretiendront son désir », souligne Eva Illouz. La reconnaissance en amour n’est jamais acquise. Les différents signaux envoyés pour renforcer la valeur du moi sont souvent contradictoires. La « peur du rejet » explique souvent la timidité et menace l’édifice de la valeur personnelle. Contrairement au contexte des sociétés traditionnelles, la souffrance amoureuse ne renforce pas la valeur individuelle, mais affaiblit l’estime de soi. 

    Le modèle du couple et de l’engagement, valorisé par Eva Illouz, impose l’amour comme une relation de pouvoir. Un équilibre affectif doit être trouvé et la femme qui déclare son amour devient inférieure. Dans le cadre de la propriété sexuelle, les relations amoureuses sont régies par la logique du calcul économique. 

    L’amour de soi remplace prime sur l’amour des autres pour se conformer à la norme de l’autonomie. Le besoin de reconnaissance, notamment chez les femmes, est considéré comme lié à cet amour de soi. Les échecs amoureux ne sont pas considérés comme le résultat de logiques sociales, mais de défaillances psychologiques. 

    La sécurité, l’engagement et la ritualisation de la recherche du partenaire disparaissent dans la modernité. 

    L’amour face à la rationalité marchande  

    Le sociologue Max Weber oppose la rationalité moderne aux émotions. Pourtant, les deux ne s’opposent pas. Au contraire, la rationalité restructure nos émotions. Le désir amoureux n’est alors plus porté par la passion et l’érotisme.

    L’amour enchanté fait irruption dans le quotidien pour le bouleverser. Il est inexplicable, irrationnel et se produit dès la première rencontre. La spontanéité du désir prime sur le calcul et le savoir rationnel. Le désenchantement amoureux est détruit par l’action rationnelle, routinière et méthodique, qui prédomine dans la modernité. Toute forme d’intensité émotionnelle disparaît. L’abandon de soi et le ravissement sont remplacés par la science, le contractualisme et la technologie.

    La science et la psychologie contribuent à une rationalisation de l’amour. Le désir devient alors un sentiment excessif. « Le modèle de santé mentale qui pénétra massivement les relations intimes exigeait que l’amour soit aligné sur des définitions du bien être et du bonheur qui rejetaient en définitive la souffrance, et commandaient que l’on maximise ses intérêts », résume Eva Illouz. Ses intérêts personnels priment sur le désir de l’autre. La souffrance ne correspond plus à la norme émotionnelle. Les scientifiques vont même jusqu’à réduire l’amour à une chimie cérébrale. Selon Max Weber les explications scientifiques ne permettent pas de mieux comprendre le réel, La science semble même éloigner de l’expérience directement vécue. 

    Le féminisme impose une conception contractuelle et libérale de l’amour. « Parce que le féminisme, aux côtés de la psychologie clinique et de la culture de consommation, a été l’agent culturel le plus puissant de la formation et du changement des relations hommes/femmes, il peut et doit être analysé comme ses deux autres formations culturelles », explique Eva Illouz. Pour des féministes, le désir érotique doit être encadré par des règles procédurales neutres et par des normes dans le discours et la conduite. La symétrie doit primer sur la liberté de sentiment au nom des nouvelles normes d’un équilibre du pouvoir. Les féministes s’attachent à encadrer et réguler le désir sexuel selon ses nouvelles normes. Dans les règlements des universités et des entreprises, « le lieu de travail prévaut sur les relations érotiques » observe Eva Illouz. Le consentement est exigé à chaque étape, pour la moindre caresse. Les rencontres érotiques sont codifiées comme une décision politique. La spontanéité et le désir sont alors éradiqués. Les sentiments sont évalués, quantifiés et comparés. « La norme d’équité introduit de nouvelles manières d’évaluer, de mesurer et de comparer les actes de chaque membre du couple dans la vie quotidienne », souligne Eva Illouz. Même les émotions font l’objet de calculs mesquins. Cette logique rationnelle et contractuelle transforme alors la nature du désir.

    Internet impose une technologie du choix inspirée par la logique du marché. Les critères de sélection du partenaire se multiplient. La rationalisation prime sur l’émotion. « De tels critères ne sont pas seulement liés au statut social et à l’éducation, mais aussi à l’apparence physique, à la sexualité et, peut-être avant tout, au style émotionnel de l’autre », observe Eva Illouz. La psychologie impose que les deux personnes du couple partagent les mêmes goûts et le même mode de vie. Les sites de rencontres promettent des émotions amoureuses, mais à travers des méthodes rationnelles dans la sélection du partenaire. Un profil précis doit être définit. Le flux de rencontre doit être géré, car il est beaucoup plus important que dans la « vrai vie ». Les utilisateurs peuvent voir l’ensemble de leurs partenaires potentiels. Ses sites permettent donc de visualiser précisément l’offre et la demande. Une comparaison consciente est régie par des règles précises. Les partenaires potentiels deviennent mesurables, comparables, quantifiables. La compétition prime sur l’instinct. Le consumérisme permet de développer l’esprit de calcul et la maximisation des résultats devient un objectif. « Internet s’est de plus en plus organisé comme un marché, où il est possible de comparer les "valeurs" attachées aux personnes et d’opter pour la "meilleure affaire" » », résume Eva Illouz.

    Cette rationalisation de l’amour détruit l’érotisme, le désir sexuel et la passion amoureuse. Des normes comme « le procéduralisme, la réflexivité scientifique, le contractualisme et la rationalité consumériste ont interférés avec les modalités traditionnelles d’érotisation des relations hétérosexuelles », souligne Eva Illouz. L’expérience érotique et sexuelle devrait au contraire apparaitre comme une activité épanouissante avec des sensations très agréables. Le désir, le plaisir et la jouissance s’opposent à la froide logique rationnelle. L’amour, plutôt qu’un contrôle permanent, suppose un abandon au plaisir et à la sensualité.                       

    Un imaginaire amoureux atrophié

    2999666579 1 3 tizLkbLfAdorno observe que l’imagination devient un moteur du capitalisme, mais demeure cantonnée à une sphère délimitée. « La diffamation, ou plutôt la relégation de l’imagination dans un domaine spécialisé délimité par la division du travail, est un phénomène originaire de la régression de l’esprit bourgeois », souligne Adorno. Les imaginaires fabriqués par la culture de masse déterminent le désir amoureux.

    Dans le domaine de l’amour, l’imagination et la créativité peuvent permettre d’intensifier l’expérience vécue. Les médias diffusent une certaine conception de la vie et du bonheur personnel. La société de consommation impose des émotions et des fantasmes. Le capitalisme contrôle et oriente les désirs. Dans ce contexte, un nouvel imaginaire amoureux émerge. « L’imagination est donc une pratique sociale et culturelle qui constitue une partie significative de ce que nous appelons la subjectivité - le désir et l’acte de volonté. Elle façonne la vie émotionnelle et a un impact sur la perception qu’a le sujet de la vie quotidienne », souligne Eva Illouz. 

    Les médias et la fiction diffusent un imaginaire et des émotions auxquelles s’identifier. Cet imaginaire impose une certaine conception de l’amour. Selon Eva Illouz, « la forme narrative de nos émotions, et notamment de nos émotions amoureuses, est fournie par les histoires que diffusent les médias et la société de consommation ». L’amour, dans la modernité, se caractérise par une distance très forte entre la réalité et des attentes. L’imagination et les fantasmes alimentent alors la désillusion. 

    Cette déception provient de l’échec dans la vie quotidienne. Dans le couple la sécurité prime sur l’aventure et la passion. Le couple repose sur la rationalisation et sur la routinisation de la vie quotidienne. « Les vies familiales modernes sont prévisibles à l’extrême, et leur prévisibilité est agencée par un vaste ensemble d’institutions organisant la vie quotidienne : les livraisons à domiciles (nourriture, journaux, shopping sur catalogue) ; la télévision et ses programmes à heures fixes ; la sociabilité, pour l’essentiel planifiée à l’avance ; le loisir standardisé et les heures de repos », décrit Eva Illouz. 

    Les sites de rencontres sur internet diffusent un nouvel imaginaire. L’amour est associé au tchat et à la webcam. La relation affective se construit à distance, par écran interposé. « L’intimité n’est pas fondée sur l’expérience ou centrée sur le corps, mais découle d’un savoir psychologique et des modalités de la mise en relation avec l’autre », analyse Eva Illouz. L’intuition et les gestes du corps ne sont plus le moteur du désir. L’évaluation d’autrui repose sur une accumulation d’attributs. 

    Eva Illouz se contente d’une analyse, d’un constat certes éclairant, mais sans dessiner la moindre perspective révolutionnaire. Loin d’une libération sexuelle, la sociologue apparaît comme une social-démocrate de l’amour. Les relations affectives doivent être encadrées, régulées, pour éviter le moindre débordement affectif et sexuel. « L’une des principales thèses de ce livre est d’une grande simplicité : les hommes disposent aujourd’hui d’un choix sexuel et émotionnel bien plus grand que les femmes, et c’est-ce déséquilibre qui crée une domination affective », affirme Eva Illouz. Évidemment, dans la réalité, c’est le constat d’une généralisation de la misère affective et sexuelle qui s’impose. 

    La sociologue décrit bien les nouvelles règles de la séduction et la généralisation de l’évaluation marchande dans la sphère amoureuse. Elle souligne également le triomphe de la rationalité qui détruit toute forme de passion. Mais Eva Illouz s’enferme dans la défense de l’engagement amoureux et du couple bourgeois étriqué. Elle ne remet surtout pas en cause la répression sexuelle et la cause fondamentale du désastre amoureux : la propriété sexuelle à travers le couple.  Contre la grisaille marchande et la morale sexuelle, son constat devrait au contraire plaider en faveur d’une révolution poétique et orgastique.

    L'article nous montre bien, en substance, que ce que l'on peut appeler les 'relations sociales de séduction' sont en réalité un vaste MARCHÉ, régi par une LOI DE LA VALEUR, valeur dont les 'référentiels' varient, bien évidemment, selon les sociétés (époque, mode de production et 'stade' de celui-ci, culture sous-tendue) et, aussi... selon les classes sociales. L''Amour' comme notion abstraite, détachée de la réalité matérielle et du temps, n'a aucun début de commencement d'existence.

    L'on sait par exemple que la minceur féminine n'est un 'culte' que depuis quelques décennies, que le bronzage n'est devenu à la mode, dans les classes 'supérieures', que dans l'entre-deux-guerres (avant, c'était une marque des 'culs-terreux'), qu'un homme 'costaud' était il y a encore un siècle un critère dans le monde ouvrier et paysan, mais pas nécessairement dans le monde bourgeois où c'était l''élégance' vestimentaire qui primait (aujourd'hui, les deux critères ont tendance à être devenus interclassistes, mais sans la moindre 'logique' puisque le travail - condition de reproduction de l'existence - dans les sociétés occidentales est de moins en moins physique et le vestimentaire perd quant à lui, du coup, sa symbolique de classe) ; quant à ce qui est des critères 'non-physiques' (activités, talents, culture et 'conversation', etc.), ils ont, évidemment, énormément varié à travers les époques et varient, à une même époque, d'un pays à l'autre...

    Ce qui est certain, c'est que dans la société capitaliste pourrissante qui nous entoure, les relations humaines en général (pas seulement 'de séduction') tendent à devenir de plus en plus 'superficielles', 'intéressées', 'comptables' ; et que le processus révolutionnaire de négation du capitalisme par le communisme débouchera sur des rapports sociaux, y compris ceux-là, radicalement différents de ceux que nous connaissons aujourd'hui.

     


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  • Le 5 mai prochain (anniversaire de l’élection du social-démocrate Hollande), face au scandale de l’affaire Cahuzac, Jean-Luc Mélenchon appelle à manifester en masse pour un ‘grand coup de balai’, une ‘révolution citoyenne’ et une ‘VIe République’ (appel rallié par Eva Joly d'EELV, représentante typique du courant 'girondin idéaliste' de l'idéologie républicaine, mais ce ralliement est contesté dans son parti).

    Mais qu’y a-t-il donc derrière ces slogans ? Quelle doit être la position des communistes révolutionnaires authentiques face à cet appel, quand bien même (comme cela est probable) il ne serait pas massivement suivi ? Voyons cela de plus près avec quelques citations du ‘tribun du peuple’ :

    1821740 3 e074 jean-luc-melenchon-en-meeting-a-metz-mercred"Un impôt n'est pas destiné à punir, il est destiné à partager. Il ne s'agit pas d'humilier les gens qui ont de l'argent, il s'agit de leur dire 'les amis ça va mal, la société toute entière doit participer à l'effort commun'." [Récemment, au sujet de la taxe à 75% sur les hauts revenus : les grands bourgeois sont donc les 'amis' du ‘camarade’ Méluche et il ne s'agit 'pas (de les) humilier' (les pauvres choux !), encore moins (on suppose) de les exproprier de leurs privilèges... au moins cela a le mérite d'être clair !]

    sardou temps-béni"La France, la France de la VIe République que nous voulons construire, la France n'est pas une nation occidentale, elle ne l'est ni du fait de son peuple bigarré, ni du fait qu'elle est présente dans tous les océans du monde, du fait qu'elle existe, vit et rayonne à proximité des cinq continents, de la Nouvelle Calédonie, la Polynésie, la Réunion, Mayotte, les Caraïbes, la Guyanesardou musulmanes française qui a la plus longue frontière de France, 800 kilomètres avec le Brésil." (Discours de campagne place du Capitole à Tolosa, 5 avril 2012)

    Sur l'interdiction du foulard aux élèves musulmanes dans les 'écoles de la République' (2004) : "On ne porte pas le foulard à l'école, parce que c'est comme ça chez les Français !"

            temps-des-colonies

    "Non, ce n'est pas la jeunesse qui est en cause ! Ce sont quelques personnes. Et je vais dire à ceux qui foutent le feu à un gymnase ou à une bibliothèque : ce sont des crétins. (...) Nous les rejetons, ils n'ont rien à voir avec la contestation de la société capitaliste. C'est le contraire ! Ils en sont les larbins, les fourriers, les bouffons, ils nous jettent la honte à tous" [au sujet des émeutiers d'Amiens, août 2012]


    Débat au Sénat sur la Charte européenne des langues régionales, 13 mai 2008 : 

    (L’association Diwan) "C'est une secte !"

    "Je suis persuadé que tous ici vous vous sentez aussi patriotes que moi, aussi attaché que moi à l'unité et l'indivisibilité de la République française, et dignes continuateurs de l'ordonnance de Villers-Cotterêts, qui a établi le français comme langue du royaume, permettant à chacun de se défendre, de témoigner et d'attaquer en justice en étant entendu par les autres. Pour moi, fier d'être jacobin, ne parlant que la langue française - et l'espagnol, langue de mes grands-parents - et qui, si je devais apprendre une nouvelle langue, choisirais l'arabe, langue minoritaire la plus parlée dans ma région, il ne s'agit pas de savoir si l'on est pour ou contre les langues régionales, pour ou contre la diversité culturelle, mais si le cadre légal existant est adapté et si la France a besoin de ratifier la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires."

    400px-SpeakFrenchBeClean"Si le nombre de locuteurs diminue et que leur âge moyen s'élève, il faut en chercher la cause ailleurs que du côté de la République et de la loi."

    "Je ne dis pas que les langues et les cultures régionales conduisent nécessairement à la sécession et au communautarisme, mais le risque existe. On ne crée pas de droits particuliers pour une catégorie particulière de citoyens du fait d'une situation particulière. Le fait de parler une langue différente ne peut pas instituer des droits particuliers pour ses locuteurs."

    "La langue bretonne est celle qui résulte du dictionnaire dit unifié de 1942, qui se substitue aux cinq langues bretonnes existantes. Je n'évoquerai pas son auteur, collaborateur qui fut condamné à mort par contumace, ni les conditions dans lesquelles ce dictionnaire fut rédigé et financé à l'époque..." [réponse cinglante de l'historien Philippe Martel ici]

    "La France américanisée..."


              mélenchon 6e répsuper dupont 


    ‘Espoir du peuple de gauche’ pour un nombre conséquent (dans les 10%...) d’esprits… désespérés, Jean-Luc Mélenchon nous offre en réalité, dans ses discours et dans sa conception de la ‘VIe République’ qu’il appelle de ses vœux, une ILLUSTRATION PARFAITE de l’idéologie ‘française’ dans sa version ‘social-républicaine’ au service du Grand Capital impérialiste !

    Son intention de ne pas toucher à la bourgeoisie en tant que classe (ni même de l’’humilier’, comme le ferait la taxe à 75% sur les hauts revenus de Hollande), mais simplement de l’appeler à plus de ‘solidarité nationale’, est affirmée noir sur blanc.

    Les autres propos illustrent parfaitement la manière dont l’État français, instrument politico-militaire de la grande bourgeoisie (devenue depuis monopoliste), s’est déployé depuis le Moyen-Âge jusqu’au 20e siècle en conquérant d’abord au fil de l'épée nos Peuples ‘hexagonaux’ (notre Peuple occitan, le Peuple breton, le Peuple basque etc.) puis, par la poudre à canon et les rafles négrières, les Peuples d’outre-mer (Caraïbes, Guyane, Corse, Kanaky, Polynésie sans compter les peuples du Maghreb et d’Afrique, aujourd’hui pseudo-‘indépendants’) ‘grâce’ auxquels, selon notre Méluche ‘national’, il ‘rayonne sur les cinq continents’… un déploiement politico-militaire et idéologique qu’il s’agit maintenant précisément, pour les révolutionnaires, de nier, dans le sens inverse, au moyen de la Guerre populaire !

    Voilà la CONCEPTION DU MONDE que propose, aux masses indignées par l’affaire Cahuzac, l'appel mélenchoniste à la mobilisation du 5 mai prochain !

    NOUS, COMMUNISTES RÉVOLUTIONNAIRES POUR LA LIBÉRATION DU PEUPLE OCCITAN, DISONS CLAIREMENT :

    Il n’y a pas de porte de sortie à la crise terminale du capitalisme dans une ‘refonte’ de l’État des monopoles !

    Le Pouvoir aux travailleur-euse-s, aux exploité-e-s, aux opprimé-e-s !

    Que mille Communes révolutionnaires (re)fleurissent d’un bout à l’autre de l’Hexagone, des corons ch’tis aux montagnes basques, catalanes ou corses, en passant par les ‘quartiers’ du 9-3, de Lyon, de Marselha et Tolosa !

    big provence flag


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  • Nous nous contenterons d'une rapide réponse à la thèse, soutenue par le 'p''c''mlm', d'une (curieuse) "Nation autrichienne" qui aurait commencé à apparaître vers le début du 20e siècle (!) et encore été "en formation" à l'époque du communiste autrichien Alfred Klahr (années 1930).

    En réalité, ceci n'est pas faux ; mais mal formulé (y compris peut-être chez Klahr lui-même ; n'étant pas germanophones, nous n'avons pas suffisamment étudié ses thèses pour pouvoir nous prononcer).

    Car en réalité, ce qu'il y a ce sont DES PeupleS allemandS, comme nous pouvons le voir sur cette carte des dialectes (l'allemand dit "standard" étant une création récente et, de fait, pas vraiment la langue en famille et entre amis de la majorité de la population) :

    Elle en recense au total pas moins de 32 ; mais enfin il y a tout de même des grands groupes d'intercompréhension à peu près totale, qui sont au nombre de 7.

    Et l'on voit donc bien qu'il y a effectivement, à l'exception notable du Voralberg qui parle un dialecte alémanique plutôt proche de ceux de Suisse, une Autriche ; ou plutôt, pour être absolument exacts, un groupe austro-bavarois... aux côtés de 6 autres, comme par exemple le groupe alémanique qui englobe l'Alsace, le Bade-Wurtemberg et la Suisse germanophone, ou encore celui englobant les Pays-Bas et la Flandre belge.

    Ce qu'il s'est passé en réalité, c'est que dans le processus national-démocratique (bourgeois) qui court de l'occupation napoléonienne jusqu'en 1871, soit la majeure partie du 19e siècle, ces Peuples ou plutôt les bourgeoisies de ces Peuples (classe qui faisait l'histoire à l'époque) ont appelé à l'unité entre eux (généralement et sauf une petite minorité, sous une forme confédérale...) ; afin de permettre d'une part le développement du capitalisme industriel (intérêt de classe suprême des bourgeoisies des différents centres urbains) en faisant "sauter" les barrières douanières, différences de législation etc. ; et d'autre part d'être plus forts (l'union fait la force) face aux tentatives d'hégémonie et de grignotage territorial des grands voisins, en particulier... d'une certaine France (le souvenir de l'occupation et de la vassalisation par l'Empire français de Napoléon a été pour ainsi dire le fil conducteur de tout le processus).

    Ce processus a finalement abouti, en 1871, sous la direction de la Prusse et dans la solution de la "Petite Allemagne", c'est à dire sans les populations germaniques qui étaient sous l'autorité de l'Empire austro-hongrois, ainsi que sans (bien sûr) la Suisse alémanique, le Luxembourg, et le groupe hollando-flamand... Et les choses, malgré l'éclatement de l'Empire austro-hongrois en 1918-19, sont globalement restées ainsi depuis ; à l'exception des territoires les plus orientaux, la "Prusse historique" où les germanophones étaient (concrètement) des propriétaires terriens et des colons installés depuis le Moyen Âge et opprimant les Slaves, territoires rattachés à la Pologne ou directement à la Russie soviétique (Königsberg/Kaliningrad) en 1945* ; et des deux retours (novembre 1918 et fin 1944) de l'Alsace-Moselle à l’État français.

    L'Empire allemand de 1871-1918 était une confédération de royaumes, principautés et autres duchés (avec simplement annexion par la Prusse, en 1866, de quelques États confettis qui avaient choisi le camp de l'Autriche et dont les sociétés civiles n'avaient globalement plus grand-chose à foutre), et la République de 1918-33 d'"États libres" (Freistaaten) ; et après la tentative centraliste du régime nazi (Reichsgaue) a vu le jour une République fédérale de 10 puis (réunification de 1990) 16 Länder conçus pour être plus "rationnels" dans leur géographie ; tandis que l'Autriche était elle aussi organisée sur un modèle similaire (9 Länder). L'organisation économique en centres et périphéries est (au diapason) polycentrique : Munich, Stuttgart, Francfort, Cologne non loin de la Ruhr, Hambourg et Brême au Nord, et bien sûr Berlin capitale fédérale depuis la réunification de 1990 ; aucune de ces villes jouissant d'une réelle prééminence sur les autres (en Autriche en revanche, Vienne écrase de loin le reste avec plus de 20% de la population et un bon tiers du PIB).

    En termes nationaux réels (langue mais aussi culture, "ciment historique" etc.) il y a donc bel et bien effectivement, et certainement pas que depuis le début du siècle dernier, une Autriche ou plutôt une "Austro-Bavière" (expliquant entre autres la capacité qu'a eue le natif autrichien Hitler de devenir bavarois et donc allemand...), distincte non pas de "l'Allemagne" mais de 6 autres groupes dialectaux et culturels répartis sur... 8 États (République fédérale d'Allemagne, Autriche, État français avec l'Alsace-Moselle et la Flandre dunkerquoise, Suisse, Luxembourg de langue francique, Pays-Bas, Belgique, Italie avec le Sud-Tyrol et les Wälser du Val d'Aoste, et une petite minorité au Danemark).

    Ce qu'il n'y a pas, c'est de QUESTION NATIONALE à ce niveau ; suivant notre conception marxiste et léniniste que l'on pourrait résumer par "séparatisme avec ce qui est réactionnaire et opprime, fédération avec ce qui est progressiste/révolutionnaire et émancipe".

    Clairement pas, déjà, en et entre Allemagne et Autriche : personne dans ces deux États, sinon une minorité très réactionnaire pour ne pas dire d'inspiration nazie, ne vit comme une "oppression nationale" leur non-unité (l'existence de la République démocratique allemande, de 1949 à 1990, faisait l'objet d'un consensus hostile plus large du fait de l'anticommunisme, avec notamment en Allemagne de l'Ouest plusieurs millions de "Pieds Noirs" allemands chassés d'Europe de l'Est par l'Armée rouge* ; et donc en 1990, la réunification aussi) ; ni celle avec les autres populations germanophones en dehors ; et il n'y avait déjà pas grand-monde de progressiste dans ce cas au début du 20e siècle ou dans l'entre-deux-guerre, sauf peut-être les socedems "austro-marxistes" autrichiens contre lesquels polémiquait justement Klahr et qui auraient voulu rejoindre la République de Weimar (et se seraient ainsi retrouvés sous la botte nazie avec 5 ans d'avance, en 1933 au lieu de 1938).

    Et d'autre part, "dans l'autre sens", du fait de la structure politique fédérale, même en Autriche très hégémonisée économiquement par Vienne, il n'existe là encore pas vraiment d'aspiration à la séparation d'avec ces États en dehors de quelques courants globalement bourgeois et réactionnaires (en Bavière notamment). Une petite minorité slave (sorabe) en Allemagne (ex-RDA), et slovène en Autriche (Carinthie), lutte pour ses droits culturels et fait éventuellement face à l'hostilité de fascistes locaux.

    Ne pas être allemands n'est évidemment pas plus vécu comme une "oppression" aux Pays-Bas, en Flandre belge ou au Luxembourg. Les autres populations de langue germanique défendent leurs droits culturels nationaux et l'autonomie politique qu'elles peuvent, parfois contre un centralisme étouffant comme en Alsace "française", mais personne ou presque en leur sein ne souhaite le rattachement à l'Allemagne ou à l'Autriche ou à un grand État germanique commun ; surtout pas en Alsace au vu des deux expériences historiques (1871-1918 et 1940-44) en ce sens (certains courants bourgeois prônant à la rigueur de rejoindre... la Suisse).

    Presque personne... et clairement personne de progressiste, dans la mesure où les seuls qui pourraient le souhaiter de l'autre côté, dans l'Allemagne ou l'Autriche "d'accueil", sont des réactionnaires finis : séparation avec ce qui est réactionnaire, fédération avec ce qui est révolutionnaire/progressiste ; donc des gens et y compris (contrairement aux idées reçues) des gens aux idées progressistes et même révolutionnaires combattent le centralisme parisien en Alsace, mais ces personnes ne souhaitent évidemment pas le rattachement à une Allemagne toute aussi bourgeoise et qui ne vaut pas mieux, et où les seuls qui pourraient le souhaiter (car il faut aussi ce souhait) sont carrément des fascistes. Il en va (très certainement) de même au Sud-Tyrol "italien", dans le Benelux... et en Autriche (les Suisses ne se posent même pas la question, dans aucune classe ni aucun courant politique de la société).

    C'est-à-dire que, concrètement, il y a eu au 19e siècle un processus de fédération-unification BOURGEOIS, des bourgeoisies au service de leurs intérêts ; qui (rencontrant à un moment donné les intérêts de la monarchie et de l'aristocratie prussienne) a donné ce qu'il a donné, et qui n'a pas été la fédération intégrale des 32 aires dialectales germanique dans un même État ; mais aujourd'hui, dans un contexte bourgeois capitaliste et à l'ère de la révolution prolétarienne à l'ordre du jour, cette aspiration ne fait plus aucun sens. Le "cœur" des nations (nées historiquement, en Europe, à "l'aube du capitalisme" au Moyen Âge), le moteur de leur devenir historique, est aujourd'hui les masses populaires travailleuses ; qui ont de tout autres objectifs politiques que de construire pour le Capital la plus large base d'accumulation possible.

    Tel est ce que disait peut-être, mais exprimait sûrement (même inconsciemment) la position d'Alfred Klahr.

    Cela dit, bien entendu, toujours dans la même perspective de fédération avec ce qui est révolutionnaire, une situation révolutionnaire en développement pourrait changer la donne. C'est à vrai dire déjà arrivé : en novembre 1918, les ouvriers, paysans et soldats révolutionnaires d'Alsace et Moselle, qui avaient combattu (et leurs parents avant eux) durant quatre décennies l'autorité réactionnaire de Berlin, proclamaient la République des Conseils et souhaitaient rester... "allemands", dans la mesure où le reste de l'Allemagne était engagé dans un processus similaire (bien sûr, lorsque quelques mois plus tard la Révolution allemande était complètement écrasée, la même chose n'aurait plus eu de sens) ; et c'est ainsi que la "libération" de l'Alsace, c'est-à-dire l'entrée des troupes françaises et son rattachement à la France, a en réalité été une contre-révolution (farouchement appelée par la bourgeoisie et les sociaux-traîtres locaux). La même chose aujourd'hui serait tout à fait compréhensible, et défendue par nous.

    Il va également de soi que si l'Allemagne (ou une grande partie de celle-ci) entrait en révolution tandis que l'Autriche restait fermement un État bourgeois conservateur, le sentiment de vouloir rejoindre (sous une forme fédérative, très probablement) l'Allemagne révolutionnaire pourrait prendre sens (et de même en Alsace, au Luxembourg, en Suisse même, etc.), et peut-être même que des bases rouges autrichiennes relativement frontalières le feraient. Tandis que "dans l'autre sens", la minorité slovène, confrontée aux attaques d'éléments fascistes, pourrait entrer dans une démarche séparatiste d'autodéfense et peut-être constituer une autre base rouge, de même que les zones urbaines de concentration immigrée.

    Il y a fort à parier que, rencontrant une telle situation à son époque, Klahr aurait été du même avis ; mais à son époque les choses n'étaient pas ainsi et la volonté d'unifier les deux pays s'inscrivait dans un monstrueux projet bourgeois réactionnaire ; tandis que les "austro-marxistes" voulaient rejoindre la République de Weimar, c'est-à-dire des sociaux-démocrates égorgeurs de la Révolution de 1918-19...

    Pour que des questions nationales se posent de manière brûlante en Europe germanique, il faudrait que nous ayons... la Grande Allemagne d'Hitler justement ; que ce monstrueux projet réactionnaire ait finalement réussi à voir le jour : centraliste napoléonien et non fédéraliste, et surtout incluant (donc) l'Autriche et la Tchéquie, l'Alsace-Moselle et le Benelux, la majeure partie de la Pologne voire des Pays baltes, le Nord de la Yougoslavie voire des parties du Nord-Est de l'Italie, et peut-être une partie ou la totalité de la Scandinavie (sans compter la colonisation de toute l'Europe slave jusqu'à l'Oural). Là oui, en l'occurrence dans le sens de la séparation avec ce qui est réactionnaire et opprime, de telles questions se poseraient sans aucun doute. Mais voilà : ce monstrueux projet, contrairement à l'Empire parisien "France", a été un grand vaincu de l'histoire ; et de ses décombres a jailli une situation actuelle dans laquelle les choses ne sont pas ainsi (bien qu'il ait un peu repris du poil de la bête depuis 1990, avec une forme de néocolonialisme sur l'Europe de l'Est et une hégémonie croissante dans le cadre de l'UE).

    Il y a dans ces pays de multiples contradictions, de classe avec le développement d'un modèle de "faible chômage" passant par une exploitation féroce des travailleurs, coloniales intérieures avec des millions de travailleurs immigrés exclus de la citoyenneté par le droit du sang, une société démographiquement vieillissante etc. ; contradictions qui trouveront comme ailleurs leur solution dans la révolution ; mais les questions nationales n'y jouent qu'un rôle très accessoire.

     

    [* Il y a des gens, il faut vraiment qu'ils arrêtent avec les 14 millions d'Allemands expulsés d'Europe de l'Est en 1945 expulsion-allemands-europe-est. On peut sans doute reprocher bien des choses à l'URSS de Staline, mais pas ça. Ces gens étaient des COLONS et voir des libertaires parler de "châtiment collectif de prolétaires pacifiques sans défenses" est proprement à mourir de rire. Autant dire la même chose des sionistes de Cisjordanie ou des Pieds Noirs d'Algérie ! D'ailleurs l'un des nanars en question estime ouvertement qu'il faudrait (concrètement) autant tuer les "staliniens" et les maoïstes comme les camarades de Kansas City que les hordes du Ku Klux Klan et autres agitateurs de drapeaux confédérés...

    1945 a en réalité été l'épilogue apocalyptique d'un affrontement titanesque et d'un monde pluri-séculaire : celui de la colonisation allemande de l'Europe de l'Est. Un monde qui avait déjà commencé à vaciller à partir de 1918 avec la fin de l'Empire autrichien, la perte (déjà) de beaucoup de territoires polonais par l'Allemagne, la Révolution russe et l'indépendance des Pays baltes.

    Une situation qui avait fait de ces communautés de Volksdeutsche vksdth.png vksdth2.png de véritables BASTIONS du nazisme (en fait, c'est même là qu'il est né...) ; qui dans le même temps, en conditions d'élections libres ou même pas tout à fait libres comme en mars 1933, peinait à atteindre 30% dans la Ruhr ouvrière par exemple NSDAP-1933.png.

    Une histoire, celle du Drang nach Osten ("Poussée vers l'Est"), qui remonte au Moyen Âge, aux 13e-14e siècles avec les Chevaliers teutoniques s'emparant de vastes territoires du Nord de l'actuelle Pologne et des Pays Baltes État-chevaliers-teutoniques en y évangélisant-exterminant les populations alors païennes qui y vivaient. L'une d'entre elles portait le nom de Borusses... qui sera contracté en Prusse ; territoire qui (les colons allemands devenus luthériens) reviendra finalement à l'Électorat de Brandebourg (capitale Berlin) lequel, devenant royaume, prendra son nom et réalisera finalement au 19e siècle l'unité allemande sous sa coupe. La Prusse n'est donc pas la région de Berlin, mais le nom d'une COLONIE allemande aujourd'hui partagée entre Pologne et Russie (enclave de Kaliningrad), donné à l'État qui réalisera l'Unité... C'est dire combien cette histoire est absolument motrice pour celle de l'État moderne, du capitalisme et de l'impérialisme allemands.

    Les Pays Baltes seront, à partir de la même époque, sous la coupe de la propriété foncière de barons germaniques ; que par la suite les souverainetés suédoise puis russe maintiendront jusqu'en 1918.

    Au 18e siècle, la Prusse et l'Autriche participent au partage de la Pologne (Silésie, Posnanie etc.). L'Autriche est un Empire qui s'étend jusqu'aux Carpates, du Sud de la Pologne au Nord de la Yougoslavie, et implante dans tous ces territoires de colons autrichiens, bavarois ou saxons.

    La Russie de la même époque est entrée dans un processus de conquête de la steppe sur les populations tatares, et aussi d'"auto-colonisation" : pour "tenir son rang" face à l'Europe de l'Ouest colonialiste, une aristocratie européanisée, mariée à du sang bleu européen et écrivant son histoire comme descendante des Vikings, réduit plus de la moitié de la population à une condition de serfs proche de l'esclavage servage-russie. Catherine II, princesse allemande devenue tsarine, fait venir des compatriotes pour "mettre en valeur" les nouvelles terres, notamment dans la région de la Volga.

    Dans tous ces pays tous ces gens étaient soit des landlords, des grands propriétaires fonciers, soit des koulaks (paysans riches exploitant les pauvres) ou des bourgeois ; dans tous et même le "pire" des cas une population INTÉGRALEMENT SUPÉRIEURE aux autochtones : s'il y avait par exemple, sur un territoire, 80% d'Allemands et 20% de Slaves, Baltes ou autres, ces 20% se recoupaient quasi systématiquement avec les couches les plus pauvres et exploitées de la société. Et fermement, viscéralement attachés au culte de cette supériorité sur les "barbares".

    Comme on l'a dit, lorsque leur monde commença à s'effondrer en 1918 ils adoptèrent massivement les idéologies pangermanistes et notamment le nazisme, dont la politique expansionniste Generalplan-Ost sera totalement sous-tendue par faire la "jonction" avec ces Volksdeutsche... et en amener d'autres.

    Il est peut-être possible, dans un esprit démocratique "idéal", de préférer que les choses se soient terminées autrement ; mais il n'est pas possible de pleurer sur le sort de ces populations en effaçant de l'Histoire tout ce contexte, et en perdant de vue l'immense LIBÉRATION de siècles d'oppression qu'ont été les choses en 1945, que les populations concernées soient par ailleurs très enthousiastes à l'arrivée de l'Armée Rouge ou beaucoup moins...

    Et rappelons que depuis la chute des "socialismes réels" révisionnistes, la Réunification et la fin de l'occupation militaire quadripartite, l'impérialisme allemand, certes pas sous une forme coloniale de peuplement et militaire, mais bien sous celle de la domination des monopoles, est redevenu une réalité en Europe de l'Est.]


    1 commentaire

  • Il ne sera pas question, ici, de grands développements théoriques, les différents thèmes ayant déjà été abordés cent fois – et la ligne de SLP, toujours été claire et ferme en la matière ; mais simplement de s’en payer une bonne tranche avec le nouvel étalage de ridicule de nos ‘copains’/détracteurs ultra-gauchistes… et de mettre quelques petites choses au clair en passant. 

    conrad1Après avoir insulté et dressé le ‘procès’ de Servir le Peuple sur des faits ‘de forum’ allant (grosso modo) de janvier 2010 au printemps 2011 (à se demander si ces gens-là ont, accessoirement, une vie), le ‘centre’ (de quoi ?) ‘mlm’ de Belgique, devenu (malgré des travaux de qualité, comme sur la Guerre populaire en pays impérialiste et avancé) un pitoyable appendice du ‘p’’c’’mlm’/’Voie lactée’ (comme, de toute manière, la Belgique universitaire n’est qu’un appendice grotesque de la ‘France’ intello-parisienne), nous a promis de ‘régler’ prochainement ‘leur compte’ à ‘nos amis’ italiens du (n)PCI, et à leur ‘électoralisme putride’. Comme si le fait qu’ils soient des SATELLITES du ‘p’’c’’mlm’ impliquait que Servir le Peuple, pour avoir traduit un certain nombre de documents (jugés intéressants) du (n)PCI ainsi que leur Manifeste Programme, soit un ‘satellite’ de celui-ci – hélas, nos chers bons cons, il n’en est nullement ainsi et SLP n’a jamais hésité non seulement à avoir des désaccords avec le (n)PCI, mais encore à les assumer publiquement.

    Nous attendons donc avec impatience (et non sans une certaine jubilation) leur ‘brillant’ article… sauf que lorsque celui-ci paraîtra, cela fera longtemps que le (n)PCI aura (par avance) répondu : c’est le deuxième article du (n)PCI (extrait de La Voce n°37) traduit et reproduit ici. La position des camarades y est expliquée clairement et, disons le tout net : pour nous, la THÉORIE de ‘l’intervention dans le petit théâtre de la politique bourgeoise’, de ‘l’irruption’ dans le ‘moment électoral’, est foncièrement JUSTE ; par opposition à l’’abstentionnisme de principe’ non seulement d’ennemis politiques comme le ‘p’’c’’mlm’ ou son satellite bruxellois, mais aussi d’organisations amies comme le PCm d’Italie, le PCmF, le PCR du Canada etc., position consistant à ‘appeler’ les masses à l’abstention, puis à se féliciter du taux élevé (éventuellement en progression, ce qui est classique dans un capitalisme en crise générale) de celle-ci. L’abstention en tant que telle ne signifie nullement un début de ‘prise de conscience’ révolutionnaire ; elle peut tout aussi bien signifier une tendance à la résignation, à l’indifférence et à l’apathie, ou encore une évolution vers des positions fascistes. L’appel à l’abstention s’inspire du slogan ‘No Votar !’ de la Guerre populaire péruvienne, mais nous ne sommes justement pas au Pérou, pays (en tout cas dans la 'campagne profonde') pratiquement sans 'société civile', où les élections consistent en la collecte des bulletins de vote par les caciques locaux en faveur de tel ou tel candidat de l'oligarchie, et où refuser de voter, au mépris des menaces et des violences, est un acte de classe hautement antagonique. Dans les pays, au contraire, impérialistes ou de manière générale capitalistes très gramsciavancés, à façade ‘démocratique libérale’, le ‘moment électoral’ récurrent (rarement plus de 3 ans sans ‘échéances’) est au contraire un élément essentiel de la ‘société civile’ (selon Gramsci ; du ‘spectacle’ diraient les situationnistes), comme instrument de contrôle des masses ; et il n’est pas possible pour les révolutionnaires de lui tourner simplement le dos en se pinçant les narines. Le ‘moment’ électoral est un ‘moment’ où, durant quelques mois, éventuellement 6 mois en cas d’échéance ‘nationale’ (présidentielle/législatives), voire presque un an aux États-Unis pour la présidentielle fédérale, la politique (bourgeoise) fait ‘irruption’ (par les médias, les affiches dans la rue etc.) dans la vie quotidienne des masses populaires. Les communistes doivent mettre à profit ce moment, y ‘intervenir’ pour en faire un ‘moment’ particulier d’agitation et de propagande. Affirmer cela est JUSTE. C’est au niveau de la mise en pratique de cette théorie que ce que font le (n)PCI et les CARC (‘organisation générée’ du (n)PCI pour le travail ‘au grand jour’) peut être critiqué – et SLP le critique sans hésitations. Il y a quelques années (c’est décrit dans l’article en lien), les CARC pouvaient encore présenter leurs propres listes à des élections locales et cela permettait un travail conséquent d’agitation et de propagande. Mais depuis, la situation en Italie s’est compliquée, il faut un (grand) nombre minimum de signatures ‘citoyennes’ pour pouvoir présenter une liste et les CARC/(n)PCI ont commencé à appeler à voter pour des représentants de la ‘gauche’ bourgeoise (comme le juge ‘anti-corruption’ De Magistris à Naples ou l’ex-avocat d’Öçalan, Giuliano Pisapia, à Milan), voire carrément des populistes aux relents nauséabonds comme le comique Beppe Grillo : une ‘tactique’ électorale aux forts relents de ‘moins pire’ ou en affirmant voter pour le candidat qui ‘foutra le bordel’ dans la mécanique institutionnelle bien huilée de la ‘République pontificale’… Mais là, pour le coup, le (n)PCI contredit 110605---vivanPCIlui-même sa propre position de La Voce de mars 2011 : il se fait électoraliste ; car si ‘bordéliser le système’ peut être une forme tout à fait respectable de lutte, la ‘bordélisation’ des assemblées représentatives ou de l’appareil administratif local est conçue ici comme une véritable ‘attaque au cœur de l’État’ susceptible de déclencher une crise révolutionnaire ; autrement dit, il serait possible d'instaurer le socialisme par la voie électorale et parlementaire’  - ce qui n'est évidemment pas le cas. L’Histoire regorge [et le (n)PCI le rappelle lui-même dans son article en lien ci-dessus] d’exemples où considérer les instances légiférantes électives comme le ‘cœur’ (à ‘attaquer’) du pouvoir d’État capitaliste a conduit d’authentiques Partis révolutionnaires à ‘s’institutionnaliser’ et à devenir réformistes, voire carrément des auxiliaires ‘de gauche’ de la classe dominante : si tel était le cas, ce serait évidemment déplorable de la part des auteurs de tant de textes qui ont (littéralement) forgé la conscience politique de SLP, et du magnifique Manifeste Programme – mais cela n’impliquerait nullement qu’il faille mettre ces textes au pilon, car alors, il faudrait aller au bout de la logique : la dérive du PCF de Thorez impliquerait de rejeter aux ‘poubelles de l’histoire’ Politzer, et même le Komintern de 1919, les écrits de Lénine et Staline, qui ont ‘engendré’ la SFIC ; le révisionnisme de Togliatti et Berlinguer impliquerait de brûler l’œuvre de Gramsci, etc.

    Pour Servir le Peuple, si l’on veut ‘intervenir’ dans le ‘moment électoral’ de la ‘démocratie’ bourgeoise, d’autres pistes peuvent être explorées ; comme, par exemple, puisque ce qui compte n’est pas d’avoir des élu-e-s, mais l’agitation-propagande déployée au cours de la campagne, distribuer et appeler à déposer dans les urnes des bulletins au nom du Parti (un vote NUL, donc), comme cela a déjà pu être fait en Euskadi-Sud face aux ‘illégalisations’ de l’État franquistoïde, ou comme l’a préconisé (vote blanc ou nul) aux dernières élections le PC d’Équateur ‘Comité de Reconstruction’ (dans ce pays, ne pas voter entraîne une amende de 34 dollars, ce qui est énorme et impossible à demander aux masses populaires pauvres).

    solidarietà gaddafiConcernant le ‘campisme’ ‘anti-impérialiste’ du (n)PCI, qui l’amène à soutenir aveuglément le ‘bolivarisme’ de Chavez, mais aussi les Kadhafi et autres Assad ou l’Iran d’Ahmadinejad ‘résistant à l’impérialisme’ (sans voir l’autre côté des choses, leur caractère bourgeois voire féodaliste, leurs contradictions avec les masses populaires, leurs liens avec d’autres puissances que les impérialismes de la ‘Triade’ ouest-européenne/nord-américaine/japonaise), c’est un autre problème, un autre ‘défaut de fabrication’, en réalité très commun dans le mouvement révolutionnaire transalpin (pays 'impérialiste faible', historiquement 'vassalisé' par les impérialismes plus puissants, aujourd'hui US et 'UE' franco-allemand), et qui n’a rien à voir avec un quelconque ‘électoralisme’ – puisque de par le monde, des organisations ‘anti-électoralistes’ peuvent être exactement sur les mêmes positions, et des organisations ‘électoralistes’ (trotskystes, notamment) peuvent être ‘anti-campistes’. Pour le coup, il faut reconnaître aux antécesseurs de l’actuel ‘Voie lactée’ (‘Front social’, ‘Étoile rouge’, ‘Contre-informations’ première formule) le mérite d’avoir, en ‘francophonie’, ‘assaini’ un petit peu le ‘campisme’ qui régnait en maître, dans les Forces subjectives de la Révolution prolétarienne (FSRP), encore autour de l’an 2000 (avec la question du Kosovo et de Milosevic, de l’Irak de Saddam Hussein, etc.).

    20080808182943-simon-bolivar.jpgBref ! En attendant leur ‘brillant’ article qui devrait ‘en finir’ avec les ‘électoralistes putrides’ du (n)PCI (des gens qui, mes petits clowns, en ont vu d’autres, vous pouvez nous croire !), le ‘centre’ ‘mlm’ de Belgique nous gratifie du bon vieil article de Marx sur Simón Bolívar – article de commande, ‘alimentaire’, pour la Nouvelle Encyclopédie Américaine de 1858 ; sans doute le plus mauvais, pour ne pas dire pathétique article du vieux Karl, dénué de tout matérialisme : la faillite du projet politique de Bolívar n’y repose ni plus ni moins que sur la seule personnalité et les faits et gestes de celui-ci ( !), et non sur les conditions matérielles, le niveau des forces productives de l’Amérique latine au 19e siècle, la puissance des féodalités locales etc. ('ce qui est certain', pourrait-on dire en paraphrasant la 'maître', 'c'est que ce texte n'est pas marxiste'...) ; et puis… d’une traduction d’un texte du PC d’Inde (ML) ‘People’s War’ (qui a fusionné en 2004 dans le PC d’Inde maoïste), lequel vient… contredire totalement l’affirmation de leur ‘grands frères’ intello-parisiens, selon laquelle le ‘néocolonialisme’ serait un concept ‘révisionniste’ et ‘anti-maoïste’ (il y est ainsi expliqué qu’en 1963, pour le PC chinois de Mao, Après la Seconde Guerre mondiale, les impérialistes n'ont certainement pas renoncé au colonialisme, mais ils en ont simplement adopté une nouvelle forme, le néocolonialisme. Une caractéristique importante de ce néocolonialisme est que les impérialistes ont été forcés de modifier leur ancien style de domination coloniale directe dans certaines régions et d'adopter un nouveau style de domination et d'exploitation coloniale en s'appuyant sur les agents qu'ils ont sélectionnés et formés’). CQFD… [Le néocolonialisme n’a strictement rien d’un concept ‘révisionniste’ : il s’agit tout simplement des formes particulières (présence militaire, ‘traités inégaux’, dette délirante, contrôle de la monnaie et de quasiment toute l’économie, ambassade et ‘expatriés’ tout-puissants) que revêt la domination d’un pays impérialiste (souvent d’un seul, hégémonique) sur une ancienne colonie directe devenue ‘indépendante’ – exemple type : la ‘Françafrique’. En Amérique latine (pays semi-coloniaux selon Lénine), avec et après les grandes dictatures meurtrières des années 1960-70-80, la domination impérialiste principalement US a pris des traits néocoloniaux particulièrement marqués, sous le nom local de ‘néolibéralisme’ : des pays comme l’Équateur, par exemple, ou encore le Salvador ou le Panama, n’ont plus de monnaie nationale (c’est le dollar US qui a cours), dans d’autres elle existe toujours, mais elle est de fait tombée en désuétude au profit du dollar, ou est indexée sur celui-ci ('dollarisation', comme dans les Caraïbes anglophones ou en Argentine avant la crise de décembre 2001) ; ce qui rapproche leur situation des pays africains de la ‘zone CFA’, monnaie ‘fantoche’ totalement sous contrôle de la Banque de France. Nier une telle chose, pour un 'marxiste', c'est déjà soutenir...]

    chaveznodNul n’a jamais remis en cause la ‘position maoïste classique’ sur le capitalisme bureaucratique. Il y a, dans les pays semi-coloniaux dominés par l’impérialisme, une oligarchie bureaucratique, telle qu’effectivement décrite par Mao et Gonzalo : celle-ci est en réalité une forme spécifique de compradorisme, correspondant à un stade ‘particulièrement avancé’ de la domination impérialiste (pas avant la première moitié du 20e siècle en Amérique latine, pas avant 1945 en Asie et dans les pays arabes, et pas avant les années 1960 en Afrique) ; ‘étatique’ car il faut bien jouer les apparences de l’’indépendance nationale’, et ‘monopoliste’ tout simplement parce que les pays dominés, dans le cadre de la division internationale impérialiste du travail, sont généralement mono- ou oligo-productifs (une seule, ou deux ou trois productions hypertrophiées, comme par exemple la monoculture sucrière à Cuba, maintenue par Castro contre l’avis de Guevara, entraînant le passage de la domination US à la domination soviétique). En Chine, où il a été identifié pour la première fois par Mao, l’on peut dire que le régime de Tchang Kaï-chek (1927-49) commençait à mettre en place un tel capitalisme bureaucratique. Au Pérou, c’est à travers un processus allant des années 1930 à 1970, avec l’épisode particulier du régime militaire ‘pogressiste’ de Velasco Alvarado (1968-75), qui tenta de tourner ce capitalisme bureaucratique ‘vers l’Est’. En Iran, c’est typiquement sous la dynastie Pahlavi (1925-79), capitalisme bureaucratique repris ensuite par le régime des mollahs à travers les Gardiens de la Révolution (gigantesque consortium militaro-bureaucratique). Au Venezuela, l’on peut considérer qu’il se met en place sous le bref gouvernement AD de 1945-48, puis la dictature militaire de Marcos Jimenez Pérez (1948-58) et enfin, se consolide sous le régime puntofijiste (‘pacte’ de Punto Fijo entre les deux partis grands-bourgeois AD ‘social-démocrate’ et COPEI démocrate-chrétien), régime régnant de 1958 à 1999.

    bananeroMais RIEN DE TOUT CELA ne signifie que cette bourgeoisie/oligarchie bureaucratique, pas plus que la classe compradore (les ‘vend-patrie’ concurrentiels et privés, premiers interlocuteurs de l’impérialisme dans tout pays colonisé ou semi-colonisé), ni même les grands propriétaires terriens (latifundistes, semi-féodalité), n'agissent systématiquement EN BLOC, qu’il n’y ait pas de contradictions non seulement entre ces trois classes, mais également au sein de celles-ci, et que puisse y émerger une ‘gauche’ réformiste, une frange prête à ‘tout changer en espérant que rien ne change’, à faire des concessions, face à l’agitation des masses populaires, pour tenter de sauver l’essentiel – sa position de classe, ses privilèges. Et les pays dominés, comme chacun (enfin, chaque – véritable – maoïste ou même léniniste) le sait, se caractérisent par l’existence d’une bourgeoisie nationale, une bourgeoisie (entrepreneuriale ou ‘à capital intellectuel’) dont la domination impérialiste entrave le développement, et qui salive à l’idée d’accéder aux ‘hautes sphères’ – une partie, cependant, authentiquement progressiste, pouvant rejoindre la classe ouvrière et la paysannerie affamée dans le Front uni du Parti du prolétariat. Si un mouvement de masse permet de porter une partie de cette bourgeoisie nationale (qui le ‘chevauche’) vers les centres du pouvoir, et qu’une frange réformiste suffisante de la haute bourgeoisie bureaucratique (et compradore, et latifundiste) lui ‘ouvre la porte’ pour sauver sa position – ou ‘rétrocède tactiquement’ pour préparer un ‘retour en force’ golpiste, ou tout simplement un retour électoral si les bourgeois nationaux ‘foirent’ et s’empêtrent dans leurs contradictions… nous avons TOUT SIMPLEMENT ce qu’il s’est produit au Venezuela en 1998 – et ce qui a tenté de se produire en avril 2002, dont il est d’ailleurs curieux, en passant, que les dénonciateurs gauchistes de ‘Chavez-le-fasciste’ ne parlent JAMAIS.

    Vladimir-Poutine-et-Hugo-Chavez.jpgÀ cela s’ajoutent, effectivement, les contradictions inter-impérialistes : pour ‘chevaucher’ et ‘canaliser’ le ‘mouvement social’ populaire, les bourgeois nationaux (futurs nouveaux bourgeois bureaucratiques) et les franges réformistes-pragmatiques de l’oligarchie bureaucratique (et compradore, et latifundiste) vont devoir rééquilibrer la contradiction entre caractère national de la production et appropriation impérialiste du produit. Lorsqu’un pays est historiquement sous la domination quasi exclusive d’une puissance ou d’un bloc impérialiste, comme le Venezuela de 1999 vis-à-vis des États-Unis ou la Côte d’Ivoire de Laurent Gbagbo vis-à-vis de l’impérialisme BBR, forte va être la tentation de se tourner vers les puissances ou les blocs impérialistes concurrents, lesquels vont parfois être enclins à des concessions importantes, sur les contrats, les prêts etc., pour nuire à leurs rivaux ["Ce qui est l’essence même de l’impérialisme, c’est la rivalité de plusieurs grandes puissances tendant à l’hégémonie, c’est-à-dire à la conquête de territoires - non pas tant pour elles-mêmes que pour affaiblir l’adversaire et saper son hégémonie" - Lénine, L'impérialisme, stade suprême du capitalisme]. Le nationalisme bourgeois incapable, à l'ère et dans le cadre du système impérialiste mondial, de conquérir pour ces pays une véritable 'indépendance nationale', est ainsi systématiquement voué à se 'raccrocher aux branches' des rivalités entre grandes puissances...

    preview-manifeste-programme-du-nuovo-pci-1Rien de tout cela n’a jamais été remis en cause par Servir le Peuple, la problématique ne s’est jamais située ici – nous y reviendrons. Et SLP n'a jamais eu aucun problème à critiquer les positions 'borgnes' d'organisations comme le PC des Philippines ou le (n)PCI, positions qui ne voient que le 'bon côté' du phénomène 'bolivarien' – les améliorations sociales (immédiates et indéniables) pour les masses ; la 'rupture' avec la servilité des gouvernements précédents vis-à-vis des impérialistes ouest-européens, nord-américains et japonais (la 'Triade'), du FMI, de la Banque mondiale ; etc. Le (n)PCI tombe ici, encore une fois, dans un 'travers' qu'il dénonce lui-même (si l'on considère le nationaliste bourgeois Chavez comme un représentant de la 'gauche bourgeoise' mondiale, ou en tout cas, quelque chose d'assimilable) dans son lumineux Manifeste Programme : "Les réformistes et la gauche bourgeoise sont les propagateurs de l'influence de la bourgeoisie dans les rangs du mouvement communiste. Ils ne sont un danger pour notre cause que dans la seule mesure où ils réussissent à influencer la conduite du Parti communiste, à alimenter dans nos rangs l'opportunisme et le révisionnisme par émulation, timidité idéologique ou corruption, ou le sectarisme et le dogmatisme par réaction défensive : en somme, dans la mesure où ils parviennent à agir sur nos contradictions internes" - les tenants dogmato-gauchistes de 'Chavez-le-fasciste' représentant l'autre travers ; travers qui sont TOUS DEUX des stigmates de la 'Fin de l'Histoire', des reflets du grand 'creux de la vague' stratégique traversé par le mouvement communiste international entre les années 1980 et 2000, dont nous commençons tout juste à sortir (il est d'ailleurs significatif que cette période ait connu deux grandes Guerres populaires - Pérou et Népal - et que l'une ait péri du second travers, l'autre du premier).

    Il y a des personnes dont, quelles que puissent être les divergences que l'on peut avoir avec elles, l’on n’aimerait pas être à la place ; et SLP n'aimerait vraiment pas être à la place du collectif cantabre Odio de Clase en ce moment... Après s'être mis à dos (à grand renfort d'insultes politiques et d'invectives rageuses) toutes les organisations marxistes-léninistes et maoïstes de l'État espagnol sur la question du Népal (rejoignant là la ligne internationale gauchiste, dogmatique et anti-dialectique), sauf l'OCBR de Castille qui s'est récemment... dissoute, et Reconstruction Communiste qui est hoxhiste ; ainsi que les 'centristes' (VRAIS maoïstes) de tous les pays, notamment le PCm d'Italie ; les voilà désormais 'lâchés' par leurs 'amis' internationaux de la 'croisade anti-centriste' (surtout après avoir traité les Équatoriens de 'trotskystes', ce qui n'a certainement pas été apprécié...), pour avoir pris une position (pour une fois) JUSTE, léniniste, sur la nature nationaliste bourgeoise réformiste de Chavez, contre la position noire de 'Chavez = fasciste', au service objectif de l'ultradroite oligarchique, de l'impérialisme US et de ses alliés... En revanche, SLP ne partage évidemment pas leur position du collectif sur la Syrie ou (hier) la Libye... mais là, par contre, il y a du cocasse à voir le 'p''c''mlm' critiquer OdC ! Car, pour le coup, tels des… Chavez, ce n’est pas seulement aux satrapes roulant des mécaniques ‘anti-impérialistes’ (Kadhafi, Assad) que ces derniers avaient apporté leur soutien ‘contre des mouvements totalement pilotés par l’impérialisme’, mais à TOUS les despotes arabes, déniant toute légitimité aux révoltes populaires de 2011 à nos jours…

    L’on se demande, réellement, ce qu'il y a de si compliqué (pour de prétendus communistes) à se placer systématiquement DANS LE CAMP DU PEUPLE. Effectivement, l'on peut dire que tout ce qu'a fait Chavez en 14 ans de pouvoir, c'est de permettre à un certain nombre de bourgeois nationaux de se 'placer' en lieu et place de l'oligarchie bureaucratique (type PDVSA) de 1998, la vieille oligarchie bureaucratique puntofijiste AD-COPEI, qu'il a balayée ; ceci en se tournant vers de nouveaux partenaires impérialistes et 'émergents' (‘BRICS’, Iran etc.) : c’est la fameuse boli-bourgeoisie, que personne, au Venezuela, n’a attendu le ‘p’’c’’mlm’ et ses amis internationaux pour dénoncer.

    Relatives-of-victims-of-General-Augusto-Pinochets-military-Mais le 'problème', pour nous, n'a jamais été de contester cela. Le problème, c'est ce que le RETOUR, en force, de la vieille bourgeoisie bureaucratique (celle liée aux USA), promettait aux masses populaires vénézuéliennes : le pinochétisme. Que Chavez lui-même soit emprisonné, exilé, fusillé ou pendu par les couilles, on s'en tape ! C’est AU NOM DU PEUPLE que Servir le Peuple a défini et toujours suivi sa ligne de ‘soutenir’ (refuser le renversement) les régimes ‘bolivariens’ contre les menées d’ultra-droite ‘pinochétistes’, au Venezuela (où cela s’était ‘calmé’ lors de la naissance du site, en octobre 2009) comme en Bolivie (où il y avait encore des menées d’extrême-droite) ou encore au Honduras avec le coup d’État de juin 2009, dont l’oligarchie réactionnaire commanditaire est aujourd’hui au pouvoir (‘Pepe’ Lobo). Or une telle position est impossible si l’on qualifie Chavez de ‘fasciste’, car ‘fasciste’ a une signification léniniste : cela signifie que TOUTE AUTRE FORME de gouvernement de la classe dominante est, ‘à tout prendre’, ‘moins pire’ pour les masses populaires que le régime de Chavez. Cela signifie, clairement, que la réussite du coup d’État d’avril 2002 aurait été un ‘moindre mal’ pour les ouvriers, les paysans et toutes les classes laborieuses exploitées du Venezuela. Il faut avoir l’honnêteté intellectuelle de le dire en ces termes. Les PC d’Équateur CR et ‘Sol Rojo’ ont pu, ces dernières années, adopter des positions plus léninistes (donc maoïstes) et moins délirantes que d’autres groupuscules de leur ‘internationale ligne rouge’ de pieds-nickelés ; mais nous serions curieux de voir ce qu’ils expliqueront aux masses le jour (si tel est le cas) où le ‘fasciste’ Correa, ne ‘tenant’ plus celles-ci, sera éjecté et remplacé par le VRAI fascisme d’un Pinochet/Videla équatorien… C'est là une position GRAVE, DANGEREUSE, servant OBJECTIVEMENT les plans de la réaction la plus noire, et désarmant les classes populaires d'Amérique latine face à leur pire ennemi. Et affirmer, comme le fait ‘Voie lactée’, que ‘les pays opprimés sont  (tous sans exception, sous-entendu) des pays fascistes - un fascisme bien sûr très différent de la version qui peut exister dans les pays impérialistes’, même s’il est vrai que ces pays sont souvent, par nature, beaucoup plus répressifs que les métropoles impérialistes (l’appareil politico-militaire étatique est principal dans le contrôle des masses, la ‘société civile’ est très secondaire), c’est interdire par avance tout ‘jeu’ tactique mettant à profit les contradictions au sein des classes dominantes de ces pays ; ‘jeu’ qui est ‘riche’ en potentialités révisionnistes, certes (lorsque la direction des classes opprimées se met à la remorque d’une fraction ‘libérale’ ou ‘réformiste’ des classes dominantes, comme au Népal), mais sans lequel aucune lutte révolutionnaire de longue durée ne peut avancer et espérer – un jour – triompher. C’est, peut-être, une telle ‘souplesse’ tactique qui a fait défaut à la Guerre populaire du Pérou et l’a conduite à la défaite, dans les années 1990, après des progrès fulgurants entre 1985 et 1992.

    Assad-l-assassin.jpgAssad, lui, est peut-être de la même engeance bureaucratique que Chavez, d’où leur amitié : l’on peut dire en effet, dans un sens, que son père a pris le contrôle du capitalisme bureaucratique en Syrie, en 1970 – et l’a alors arrimé à l’URSS et à la ‘politique arabe’ BBR gaulliste, tout en ‘rectifiant’ par la droite le ‘processus national-progressiste’ de Salah Jedid, au pouvoir les années précédentes, qui voulait notamment accueillir la résistance palestinienne chassée de Jordanie, ce qu’Assad père refusait ('meilleur ennemi' d'Israël jusqu'au bout des ongles...). Et il est tout aussi vrai que les courants majoritaires de la rébellion (CNS, ASL, salafistes) ne promettent guère un avenir plus radieux aux masses populaires syriennes. Mais à la base, il y a une légitime révolte populaire contre le régime, l'oligarchie bureaucratique en place depuis plus de 40 ans, et ce 'paramètre' ne peut pas être ignoré dans un raisonnement communiste conséquent – quand bien même, ensuite, faute de direction révolutionnaire conséquente, les différentes fractions de la bourgeoisie anti-Assad auraient pris la tête du mouvement et se seraient vendues aux impérialistes (US, ouest-européen) et aux puissances locales (Turquie, Arabie saoudite, Qatar) les plus 'offrantes' pour prendre la place du despotisme baathiste, historiquement lié à la Russie et plus récemment à la Chine, à l’Iran etc.

    En niant cette contradiction entre régimes et masses, contradiction devenue d’un antagonisme irréversible – l’on voit mal comment le régime syrien, par exemple, s’il venait à se sortir de la situation actuelle (ce qui est totalement utopique), pourrait reprendre son ‘cours normal’ des dernières décennies ; l’’internationale ligne rouge’ du ‘p’’c’’mlm’ fait montre d’un ‘campisme’ qu’elle rejette lorsqu’il s’agit des ‘bolivarismes’ et autres ‘gauches’ bourgeoises latino-américaines, lesquelles ne sont pourtant pas en train de massacrer leur population comme le faisaient Kadhafi mais aussi Ben Ali et Moubarak (puisqu’ils dénient là aussi toute légitimité à la révolte), et continue à la faire Assad, même si ses adversaires ASL et salafistes ne valent sans doute guère mieux… on n’y comprend plus grand-chose ! À l’heure où le nouveau ‘souverain pontife’ fait face à une virulente polémique quand à son rôle sous la dictature argentine de 1976-83, l’on se demande à grand-peine où sont les milliers de morts et de ‘disparus’ des tumblr_mjmfzvwDKC1rzsrldo1_500.jpg‘fascistes’ Chavez, Morales, Correa ou Ortega, torturés à mort, abattus et enterrés dans les bois ou jetés d’hélicoptère dans la mer ; les villages entiers atrocement massacrés (comme par les 'autodéfenses unies' paramilitaires colombiennes ou les 'kaibiles' du Guatemala), etc. : c'est CELA, le fascisme en Amérique latine (comme d'ailleurs dans les États réactionnaires arabes) !

    On n’y comprend plus grand-chose… sinon, non sans un certain frisson dans le dos, qu’entre les ‘gauches populistes’ latino-américaines, les ‘islamistes’ qui profitent de l’’appel d’air’ provoqué par la chute des autocrates arabes (seule explication que l’on voit à la position ‘surprise’ du 'p''c''mlm' sur Kadhafi et Assad), les maoïstes du Népal et maintenant (sans guère plus de retenue) d’Inde, nos tenants de la ‘ligne rouge internationale’ semblent en fait totalement partager leur ‘pandémonium’ avec… la ‘droite radicale’ de type ‘néocon-occidentaliste’, de type Dreuz.info, Euro-reconquista etc. Ceci, en s’appuyant prétendument sur le ‘maoïsme classique’ d’organisations affrontant – avec dogmatisme selon nous – les forces politiques ‘bolivariennes’ ou ‘islamistes’ dans leurs pays respectifs, ce qui, pour le coup, ne manque pas de sel ‘cosmopolite’. Sur les pays arabes, leur position est en fait un classique du gauchisme (trotskyste, par exemple) : lancer un mot d’ordre ‘ultra-puriste’ – révolution démocratique arabe – en niant à quelque évènement, quelque lutte que ce soit, le caractère d’étape (ou de possible étape) vers ce but ultime, le vidant ainsi de tout contenu concret, de toute réalisabilité, pour en faire un slogan creux. Ainsi, le 'p''c''mlm' est 'évidemment antisioniste', mais la ‘seule solution’ à l’occupation sioniste de la Palestine est la ‘révolution démocratique arabe’, et en attendant c’est sur les (rares dernières) forces combattant concrètement le sionisme que le ‘p’’c’’mlm’ déverse régulièrement sa bile – puisqu'aucune de ces organisations n'est 'purement' maoïste, voire même simplement marxiste. arab-revolution-2303Quant aux justes révoltes populaires contre les satrapes de tout poil (et de tout 'bord' géopolitique), n'étant pas la pure ‘révolution démocratique arabe’ tant escomptée, dirigée par un Parti maoïste ('sans le Parti, il n'y a rien !'), elles n'ont bien sûr aucune chance de trouver grâce à leurs yeux : autant dire qu'avec des 'Partis de la science MLM' comme cela, les despotes valets de l'impérialisme peuvent dormir tranquille... Voilà bien une méthode fort subtile pour défendre, objectivement, le statu quo dans les pays arabes et musulmans qui, du Sahara occidental à l'Iran, sont la ceinture de feu de la 'forteresse' impérialiste Europe ! [Sur l’État turc et le PKK, il est 'intéressant' de les voir aujourd'hui reprendre dans les grandes lignes l'analyse de Servir le Peuple datant de juin 2010 ; en revanche, il est totalement ridicule d'affirmer que le MLN kurde se résume au PKK et encore moins à Öçalan, qui ne contrôle même pas toutes les factions du PKK : le MLNK existe depuis la fin de l'Empire ottoman, en 1920, et le PKK d'Öçalan n'a été que son expression particulière dans les années 1980-2000.]

    Mais bon… rien de bien étonnant, lorsque l’on connaît le passé pour le moins sioniste de droite (et l’absence totale d’autocritique à ce sujet) du ‘génie éclairé’ qui prétend diriger le ‘Parti de la science MLM’. 

    Quoi qu’il en soit, comme l’on peut encore le voir avec la dernière publication du ‘centre mlm’ sur le néocolonialisme, la pseudo petite ‘internationale-plus-rouge-que-moi-tu-meurs’ du ‘p’’c’’mlm’ et consorts, comme TOUJOURS le gauchisme à travers toute l’histoire du mouvement communiste, est en train d’exploser inexorablement sous ses contradictions, en un véritable panier de crabes. De leur côté, les maoïstes authentiques et conséquents, impliqués dans le mouvement réel des luttes de classe (‘syndicalisme révolutionnaire’ selon nos super-ultra-rouges-de-la-galaxie) et les Guerres populaires (ou le soutien internationaliste – ‘cosmopolite’ – à celles-ci) à travers le monde, construisent patiemment le mouvement communiste international du 21e siècle qui saura faire face aux immenses tâches de la Nouvelle Vague Révolutionnaire Mondiale.

     

    portada de Revolución Obrerra 344PS : l'UOC-MLM de Colombie a 'rendu sa copie', et c'est non sans une certaine surprise que nous trouvons leur position éminemment CORRECTE. Chavez y est correctement qualifié de RÉFORMISTE, la critique de sa politique, non sans une pointe de gauchisme, est la critique léniniste classique du réformisme (que l'on retrouve aussi bien chez les ML et les maoïstes que chez les trotskystes) ; le 'chavisme', SURTOUT, est reconnu comme un PHÉNOMÈNE POLITIQUE DE MASSE que des communistes ne peuvent ignorer et, dans l'avant dernier paragraphe, il est même dit une chose très intéressante : "Le réformisme bourgeois bolivarien au Venezuela, tout en détournant le peuple d'une véritable révolution, ne pouvait pas supprimer la nécessité d'une telle révolution. Il a de fait servi à affiner davantage la lutte des classes, à amener davantage le Peuple aux problèmes de la politique, du pouvoir et de l’État, ce qui a contribué à fertiliser le terrain pour le travail des révolutionnaires authentiques, pour l'activité politique portant les véritables idées du socialisme au Peuple vénézuélien, pour guider le processus qui doit inévitablement abattre le pouvoir des classes réactionnaires et construire un nouvel État des ouvriers et des paysans vers le vrai socialisme dirigé par le prolétariat"... !!! Nous n'aurions pas dit mieux, ni autrement : si les 14 années de 'chavisme' ont eu d'indéniables aspects de 'frein' à l'émancipation révolutionnaires des masses, elles auront aussi été, pour celles-ci, une ÉCOLE DE RÉVOLUTION - si le (n)PCI disait les choses ainsi, nous serions totalement d'accord. Abstraction faite d'une certaine 'tonalité gauchiste générale' du texte (notamment le renvoi dos à dos avec le régime colombien qui, lui, est typiquement 'fasciste du 21e siècle'), SLP peut dire qu'il partage cette analyse dans les grandes lignes...


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  • jpg Ange Diawara2-300x258Servir le Peuple vous offre aujourd'hui un nouveau document historique, portant sur des faits largement méconnus de cette Françafrique qui, pourrait-on dire en paraphrasant Marx (au sujet de l'Irlande et du prolétariat anglais), est réellement le secret de l'impuissance du prolétariat d'Hexagone métropolitain.

    Il y a 40 ans, en avril 1973, au Congo-Brazzaville, était assassiné dans des conditions particulièrement sordides Ange DIAWARA, héroïque fils du peuple et révolutionnaire marxiste, qui avait pris la tête d'une lutte armée contre le pouvoir en place. Contrairement au cas de Pierre MULELE (lui aussi affreusement assassiné, 5 années plus tôt), au Congo-Kinshasa voisin, ce régime avait la particularité de se vouloir "marxiste", "république populaire", "sur la voie du socialisme", et c'est justement ce qu'il est intéressant d'étudier.

    Retraçons donc rapidement l'histoire de cette néocolonie de l'Empire BBR. Lorsqu'il se voit, en 1960, octroyer sa pseudo 'indépendance' par la métropole impérialiste, le Congo voit placée à sa tête l'une des plus grotesques satrapies néocoloniales de la 'Françafrique' : celle de l'abbé Fulbert YOULOU, anticommuniste rabique, vouant (on ne sait trop pourquoi) une haine toute particulière à la République populaire de Chine ("Le péril qui menace l'Afrique aujourd'hui est teinté du jaune communiste de Pékin (...) C'est la race noire tout entière qui est menacée d'extermination sous l'occupation massive des vagues chinoises"), défenseur de "l'Occident chrétien", ami de Moïse Tschombé au Congo ex-belge voisin, etc. etc. Mais, en août 1963, un soulèvement populaire éclate et en trois jours Youlou est renversé : ce sont les 'Trois Glorieuses', qui donneront leur nom à l'hymne officiel du pays. C'est un enseignant 'de gauche', Alphonse MASSAMBA-DÉBAT, qui assume alors la présidence de l'État congolais. Le régime de Massamba est typiquement le genre de régimes que soutient à cette époque la Chine de Liu Shaoqi : un régime nationaliste bourgeois 'progressiste' et 'non-aligné', refusant aussi bien le néocolonialisme de l'ancienne métropole et des ses alliés occidentaux que l'alignement sur Moscou - pour le coup, les pires cauchemars de l'abbé Youlou semblent se réaliser. Des liens sont également noués avec Cuba : le Che rend visite à Massamba en janvier 1965 et dans la foulée (tandis que lui-même rejoint la Tanzanie puis l'Est du Congo-Léopoldville, futur 'Zaïre'), une brigade internationaliste cubaine baptisée 'Patrice Lumumba' (~ 200 hommes) et commandée par Jorge Risquet vient entraîner et appuyer les forces de Massamba ainsi que les divers mouvements de libération du continent, dont Brazzaville est devenue une 'Mecque' : MPLA angolais, ANC sud-africain et SWAPO namibienne, ZAPU et ZANU du ngouabi.jpgZimbabwe, maquis du Kwilu de Pierre Mulele etc. Mais l'expérience 'progressiste' de Massamba-Débat se révèle instable, traversée par le clivage Nord/Sud du pays (sur lequel nous reviendrons), menacée par la droite youliste (Bernard Kolelas, Pierre Kinganga) et contestée par de jeunes officiers 'marxistes' de l'armée, emmenés par le capitaine Marien NGOUABI. Le pays va vers la guerre civile et, entre août et décembre 1968, Ngouabi démet progressivement Massamba de ses fonctions et prend la direction du pays, à la tête d'un Conseil National de la Révolution. À la toute fin de 1969 celui-ci deviendra le Parti congolais du Travail (PCT), 'parti unique d’avant-garde, d’idéologie marxiste-léniniste', et le Congo sera proclamé 'République populaire'. Alors que les amitiés internationales de Massamba étaient plutôt chinoises et cubaines, le pouvoir de Ngouabi est clairement tourné vers l'URSS et le COMECON (en gardant des liens avec Cuba, qui a entre temps choisi l'orbite soviétique), mais aussi... vers l'ancienne métropole BBR, et notamment son monopole pétrolier ELF Aquitaine qui a ses 'hommes' dans l'aile 'droite' du PCT (Ngouabi lui-même représentant plutôt le 'centre'), en particulier dans la clique autour de Denis SASSOU-NGUESSO. C'est ainsi que, dès octobre 1968, le Congo-Brazzaville ngouabiste livre ignominieusement à son voisin Mobutu le héros révolutionnaire marxiste-léniniste Pierre Mulele, qui est massacré dans des conditions atroces... De fait, Ngouabi restait peut-être dans une certaine mesure un progressiste sincère, mais au fil du temps il se révèle de plus en plus l'otage de la clique Sassou. Quelques années plus tard, en 1977, ce dernier 'bouclera' définitivement la boucle en le faisant assassiner puis en accusant du crime Massamba et ses partisans, qui seront condamnés à mort et exécutés. Il règnera sur le Congo-Brazzaville jusqu'en 1992, puis reprendra le pouvoir en 1997 (son successeur Pascal Lissouba s'étant trop rapproché des Anglo-Saxons) au terme d'une guerre civile qui fera encore des centaines de milliers de victimes (on parle généralement de 400.000...). Il y est toujours. Tout cela au service commandé et au plus grand bénéfice d'ELF Aquitaine devenu TOTAL, ce que résumera parfaitement Albin Denis Sassou NguessoChalandon, PDG de la compagnie entre 1977 et 1983 (avant de devenir ministre RPR de la Justice, puis mentor d'une certaine Rachida Dati...), dans un fameux documentaire : "Il vaut mieux avoir un régime... comment dire... 'communisant', mais stable, que des régimes comme on a eu après... républicains, calqués sur notre République, nos mauvaises méthodes politiques et qui étaient tout le temps renversés. C’est pire que tout pour les industriels...". CQFD. 

    C'est donc dans ce contexte troublé qu'émerge, au début des années 1970, la figure lumineuse d'Ange Diawara. Marxiste conséquent, homme intègre, il dirige sous Massamba la Jeunesse du Mouvement national révolutionnaire (MNR, le Parti dirigeant) ainsi que la Défense civile, milice populaire formant la garde rapprochée du président progressiste. C'est lui qui, finalement, 'tranche' en 1968 le conflit entre Massamba et Ngouabi en faisant pencher la Défense civile en faveur de ce dernier : elle sera alors intégrée dans l'armée, où Diawara reçoit le grade de lieutenant. Il intègre également le PCT, dont il devient rapidement un chef de file de l'aile gauche.

    Il avait aussi, comme Massamba-Débat et ses partisans, la particularité d'être originaire du Sud du pays ('Pool' autour de Brazzaville et région atlantique de Pointe-Noire), alors que Ngouabi, Sassou et leurs 'jeunes officiers progressistes' prosoviétiques étaient plutôt originaires du Nord (région de la 'Cuvette'). C'est là une autre caractéristique absolue du colonialisme et du néocolonialisme en Afrique : l'hinterland arriéré est le siège de la féodalité tribale, qui engendre la bourgeoisie bureaucratique et la caste militaire garde-chiourme de l'impérialisme ; tandis que les régions côtières, aux forces productives plus avancées, sont le siège de la bourgeoisie nationale (entrepreneuriale, commerçante et intellectuelle), de la classe ouvrière et des classes populaires semi-prolétariennes, donc des forces qui vont contester la domination impérialiste. Nous avons pu voir, dans la dernière décennie, exactement le même schéma en Côte d'Ivoire, avec Ouattara l'aristocrate dioula du Nord et ses 'Forces nouvelles' nordistes, formées en fait... des meilleures troupes de l'armée ivoirienne d'avant-guerre civile (l'armée étant souvent le seul 'ascenseur social' des jeunes hommes de ces régions déshéritées), tandis que Gbagbo 'l'indocile' était typiquement le prof de lycée (petit-bourgeois intellectuel) d'Abidjan, originaire de la 'boucle du cacao' bété (Sud-Ouest, terre de prolétariat agricole produisant le cacao, première richesse du pays), le bourgeois national par excellence qui voulait desserrer l'étau françafricain sur son pays en se tournant vers les impérialismes concurrents, d'abord US/Anglo-saxons et Israël puis Russie/ChineFlag_of_the_Congo_Army_-1970-1992-.png/'émergents' (BRICS). Ou encore, de la même manière, l'une des premières mesures révolutionnaires de Thomas Sankara au Burkina a été d'abolir la chefferie coutumière... et l'une des premières de son assassin Compaoré fut de la rétablir.

    Diawara conceptualisera brillamment cela à travers le terme d'OBUMITRI : oligarchie bureaucratique militaro-tribale ; éventuellement (comme dans le cas congolais) 'socialiste' (voire 'marxiste') et 'anti-impérialiste' en parole, mais toujours et systématiquement garde-chiourme des monopoles impérialistes dans les faits (analyse totalement valable, par ailleurs, dans des pays arabes comme la Syrie ou hier la Libye). Il sera d'ailleurs, pour cela, dénoncé non seulement (on s'en serait douté...) comme un 'agent de la CIA', mais aussi comme un homme de la 'revanche du Sud' massambiste contre les populations du Nord ; alors qu'il voulait au contraire en finir avec cette 'ethno-féodalité', cette 'division régionale et tribale des tâches' au service de l'impérialisme, pour forger, sur le découpage colonial dénommé 'Congo', une base rouge de la révolution anti-impérialiste en Afrique...

    À partir de 1971, donc, Ange Diawara, avec l'aile gauche du PCT, va de plus en plus fustiger l'embourgeoisement, la corruption et les tendances au népotisme 'nordiste' du régime de Ngouabi ; ce qui lui vaudra d'être écarté de tout poste à responsabilité à la fin de l'année. Il tente alors un coup de force le 22 février 1972, qui échoue, et suite à celui-ci (sans doute était-ce prévu), il déclenche une guérilla révolutionnaire dans le 'Pool' autour de Brazzaville, à la tête du M22 (Mouvement du 22-Février). Celle-ci se battra vaillamment pendant un peu plus d'un an, mais, en avril 1973, Ange Diawara et 13 de ses camarades seront capturés et abattus ; sous la pression de Sassou-Nguesso, Ngouabi devra se livrer à la sinistre mise en scène de l'exposition publique des corps, affreusement profanés, dans le Stade de la Révolution à Brazzaville (au moins étaient-ils déjà morts, contrairement à Mulele quatre ans et demi plus tôt !). Il semblerait, en réalité, qu'ils aient été arrêtés au 'Zaïre' par les forces de sécurité de Mobutu, alors qu'ils tentaient d'y fuir après leurs revers militaires ; ce qui serait alors un joli 'renvoi d'ascenseur' de la part du sinistre satrape de Kinshasa, après la traîtreuse livraison de Pierre Mulele par Ngouabi en 1968...

    jpg mobutuL'on pourra bien sûr dire, bien que Diawara ait été (d'après tous les témoignages) un marxiste 'solide', que tout cela est fort éloigné des 'canons' du marxisme-léninisme-maoïsme [et comme le signale un commentaire sous l'article, la Chine du 'retour à la normale' post-Révolution culturelle et pétage de plombs de Lin Piao n'apportera aucun soutien à la tentative de Diawara, qualifiée par elle et ses affidés (PCMLF etc.) d''aventurisme', de 'guérillerisme romantique' etc... il faut bien dire que paradoxalement, malgré les premières prémisses tortueuses de la "théorie des trois mondes" (appel aux prochinois hexagonaux à soutenir De Gaulle en 1965 par exemple), la politique internationale chinoise du milieu des années 1960 était beaucoup plus intéressante et positive que celle des années 1970 !]. Mais SLP a, d'une part, toujours eu pour ligne de témoigner le plus grand respect à ceux et celles qui sont tombé-e-s, sacrifiant leur vie avec abnégation, pour la cause de l'émancipation des travailleurs et des peuples contre les oppresseurs et les exploiteurs. Et d'autre part, dans un Congo-Brazza mis en coupe réglée, devenu la véritable propriété privée du monopole BBR TOTAL et de son contremaître Sassou-Nguesso, la figure héroïque d'Ange Diawara revêt une signification toute particulière, celle d'une lueur d'espoir sur un continent dévasté par la Françafrique, que celle-ci soit ouvertement bourgeoise et garde-chiourme ou peinturlurée de 'rouge'.

    C'est donc d'un sincère élan internationaliste que Servir le Peuple, média communiste révolutionnaire marxiste-léniniste-maoïste, rend un vibrant et rouge hommage prolétarien au héros révolutionnaire Ange DIAWARA, combattant et martyr de la Libération africaine !


    En 2009, l'intellectuel progressiste congolais Pierre EBOUNDIT a rendu hommage, dans un livre, à Ange DIAWARA et à la guérilla du M22 - dont il a, de fait, été un soutien "civil" (dans le milieu lycéen) à l'époque ; avant de présider aujourd'hui la Ligue panafricaine UMOJA.

    Voici la présentation de celui-ci :


    Le M22, une expérience au Congo, devoir de mémoire


    L’histoire contemporaine du Congo Brazzaville, dès l’aube des indépendances, est une histoire effervescente. A l’événement politique brutal, explosif, massif qui détruit les complexités sociales et psychologiques, s’ajoute le diptyque terrible suivant : Violence et Exclusion.

    La Violence qui transforme l’événement politique en événement-traumatisme d’une part ; l’Exclusion, produit d’exclusivismes identitaires centrifuges (tribal, ethnique ou régional), menaçant en permanence l’altérité et le vivre-ensemble d’autre part, sont les deux faces de ce diptyque qui impose à la société congolaise, et plus particulièrement à son élite, des silences et des peurs, parfois, coupables. C’est ainsi qu’à la suite des différents épisodes douloureux qui jalonnent l’histoire du Congo Brazzaville, il n’y a presque pas de témoignages directs des protagonistes, pour la plupart encore en vie, laissant volontiers la place aux légendes et autres mystifications.

    Le « M22 » (le mouvement du 22 février 1972), n’échappe pas à la règle. Le mouvement d’Ange Diawara traîne ainsi son lot de légendes, de mythes, de fantasmagories dans l’imaginaire des congolais, mais aussi, de mensonges nourris souvent par le discours officiel. C’est pourquoi le témoignage de Pierre Eboundit, l’un des acteurs du réseau urbain qui faisait jonction avec le maquis de Goma Tsé-tsé, rompt avec les conséquences du diptyque Violence/Exclusion, mais aussi servira d’aiguillon, nous l’espérons en tout cas, tel un pionnier, à d’autres acteurs encore en vie du « M22 » afin que toutes les facettes de cette histoire soient connues, au nom de la vérité historique.

    Les mensonges du pouvoir d’alors

    Groupe d’aventuriers hirsutes, tribalistes assoiffés de pouvoir, agents à la solde de la CIA (Central Intelligence Agency) donc contre la révolution… tels sont les arguments du régime d’alors pour justifier la répression aveugle contre les dirigeants du « M22 ». Evidemment, le résultat est éloquent : car dès l’échec de l’action du 22 février 1972, le pouvoir opère près de 1600 arrestations [1] sur tout le territoire national, trois camarades, compagnons de Ange Diawara, sont arrêtés et froidement assassinés : Prosper Mantoumpa-Mpollo à Pointe-Noire, Elie Théophile Itsouhou et Franklin Boukaka [2] à Brazzaville. Ensuite, un an plus tard après le lancement du « M22 », Ange Diawara et ses compagnons seront assassinés sans procès, respectivement le 16 mars 1973 pour Jean-Pierre Olouka, le 21 avril 1973 pour Ikoko Jean-Baptiste et Jean-Claude Bakékolo, et enfin le 23 avril 1973 pour Ange Diawara, suivie d’une scène macabre puisque son cadavre sera exposé devant le public au Stade de la Révolution, puis sillonnera par la suite dans les rues de la capitale congolaise.

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    Or, à la lecture du témoignage de Pierre Eboundit, on apprend que ceux que l’on a présentés comme étant un groupe d’aventuriers hirsutes, dès l’échec de leur action le 22 février 1972, avec les conséquences que l’on sait en termes de répression, sans en être impressionnés, se sont retirés dans la campagne au sud de Brazzaville, principalement à Goma Tsé-tsé. Leur première réaction est de publier une brochure pour expliquer aux populations le sens de leur combat.

    C’est ainsi qu’un document intitulé « L’Autocritique du M22 », va circuler sous le manteau à Brazzaville et à l’intérieur du pays. Les groupes de discussion se forment clandestinement autour de ce document, preuve de sa puissance d’analyse. Si la verve est révolutionnaire, fruit du discours de l’époque, à savoir : « la destruction de l’appareil d’état bourgeois bureaucratique et néocolonial, instrument de domination et d’exploitation des masses populaires, au service de l’impérialisme et des classes dominantes », on y découvre surtout une dénonciation lucide des contraintes de servages économiques et les infirmités culturelles qui pèsent sur nos « pays nains » affectant ainsi son métabolisme de base. Par conséquent, si l’on peut discuter des moyens choisis par les dirigeants du « M22 » pour arriver à leur fin, on ne saurait par contre honnêtement nier la réalité des problèmes posés par ceux-ci.

    L’autre accusation mensongère du pouvoir d’alors est de traiter les dirigeants du « M22 » de tribalistes assoiffés de pouvoir. Evidemment, dans un pays où 13 ans plus tôt, avait éclaté une guerre civile opposant Youlou le sudiste à Opangault le nordiste, événement que d’aucuns ont qualifié de « déterminisme historique », quand on sait que le président de la république d’alors, Marien Ngouabi était du Nord et Ange Diawara, leader du « M22 », originaire du Sud, les esprits simplistes se laissent naturellement abusés par une telle propagande.

    Cependant, on y voyant de très près, on s’aperçoit que le « M22 » fut un mouvement basé réellement sur des idées, dépassant le cadre ethnique car comment expliquer la présence de nombreux compagnons de Ange Diawara tels que Ikoko et Olouka, assassinés comme lui et originaires de la région de la Cuvette, donc de la même région que le Président de la République ? Et plus particulièrement, le cas de Pierre Eboundit, jugé et condamné, qui n’avait que 21 ans et lycéen encore, neveu du Colonel Yhombi Opango, chef d’État Major Général des armées d’alors, et de surcroit cousin du Président de la République, le Commandant Marien Ngouabi ?

    Par ailleurs, cette instrumentalisation du tribalisme par le pouvoir pour cacher les véritables revendications des insurgés était de bonne guerre d’autant que dans la brochure « l’Autocritique du M22 », Diawara et ces compagnons avaient magistralement mis à nu le tribalisme au sommet de l’Etat qui régnait comme dans une organisation scientifique de travail, à travers le slogan : O.BU.MI.TRI. (Oligarchie Bureaucratique Militaire et Tribale).

    Enfin, agents à la solde de la CIA (Central Intelligence Agency) donc contre la révolution est un autre argument développé par les autorités d’alors pour discréditer le « M22 ». Or, dans un texte intitulé "Lettre du Zaïre", [3] et repris par Pierre Eboundit dans ce livre, on peut lire : (…) Diawara et ses amis s’étaient repliés sur le territoire zaïrois où ils disposaient de « complicités », semble-t-il pour des questions de ravitaillement (les contacts Brazzavillois étaient « grillés »). Ils sont tombés dans un piège sans aucune possibilité de retraite. Pour Mobutu et Ngouabi il ne restait qu’à négocier la livraison du groupe Diawara contre celle du groupe des douze militaires (dont deux généraux et un colonel) qui avaient tenté de renverser Mobutu pendant son voyage en Chine et s’étaient enfuis à Brazzaville à la suite de l’échec de leur tentative.

    Comment alors traiter les dirigeants du « M22 » d’agents à la solde de la CIA, quand on sait qu’ils ont été livrés par Mobutu, élément notoirement reconnu comme étant l’allié des Américains en Afrique centrale, à un pouvoir se réclamant lui-même anti-impérialiste ? La ficelle, n’est-elle pas trop grosse ?

    Le « M22 », vue de l’intérieur et le procès

    A travers le témoignage de Pierre Eboundit, on découvre pour la première fois, l’organisation interne du « M22 », du maquis de Goma Tsé-tsé au réseau urbain avec différents tentacules dans toutes les couches sociales.

    Autant, on est pris d’admiration devant le dévouement et la foi dans l’idéal qui anime les fugitifs dans le dénuement total, ce qui humanise ce combat ; autant, on y découvre aussi des amateurismes criards dus à l’inexpérience des dirigeants du « M22 ». Or, l’existence du maquis dépendant de la capacité du mouvement à trouver un fonctionnement quasiment clandestin, si les héroïsmes et la fidélité des compagnons ne manquent pas, comme le REMO (Réseau Moundélé, essentiellement constitué de ressortissants étrangers, blancs pour la plupart, dont Paule Fioux, Paule Deville, Kempf ou Mathis, Arthur ou Elico, Bernard Boissay ...), on relève aussi malheureusement l’existence de la traitrise, de la lâcheté, des agents doubles…

    Enfin, arrive le procès. L’avant procès est caractérisé par les tortures d’une cruauté inimaginable sur les cadres du réseau urbain décapité. Ce qui donnera lieu, pour certains d’entre eux, aux aveux ; et pour d’autres, au reniement de leur appartenance au « M22 » ou d’une quelconque relation avec Ange Diawara.

    Nous découvrons aussi les tractations entre le président de la Cour, Henri Lopès, représentant d’un pouvoir prétendument progressiste et anti-impérialiste, et l’avocate Gisèle Halimi, chargée de la défense des expatriés, associés au « M22 ». C’est ainsi qu’il y avait une différence dans le traitement des détenus. Les uns "épargnés" parce que ressortissants de la puissance coloniale, les autres (congolais) abandonnés à la merci des agents de la répression locale.

    Hommage internationaliste à Ange DIAWARA, héros révolutionnaire africain méconnu

    Pierre Eboundit, pionnier à contre courant

    Les guerres civiles à répétition subies par les congolais ces dernières décennies ont, non seulement rendu vermoulue une conscience nationale, déjà bien tenue, en la minant avec les larves d’insectes, de plus, elles ont développé une espèce de mentalité conditionnée ethniquement où les faits socio-politiques du passé comme ceux du présent, avec leur lot de déformation, viennent valider. C’est pourquoi, il faut un sacré courage aujourd’hui pour ramer à contre courant tel un pionnier.

    Lucien Febvre, grand historien français, disait, je cite : Le sort du pionnier est décevant : ou bien sa génération lui donne presque aussitôt raison et absorbe dans un grand effort collectif son effort isolé (…) ; ou bien elle résiste et laisse à la génération d’après le soin de faire germer la semence prématurément lancée sur les sillons. (…).

    Dans ce rôle du pionnier contre les conséquences du diptyque Violence/Exclusion, l’hostilité à cette initiative de Pierre Eboundit pourrait d’ailleurs venir des siens propres. Car l’affaire « M22 », à l’instar des autres épisodes douloureux du Congo Brazzaville, a été conscientisée comme une validation d’une mentalité collective conditionnée ethniquement.

    Mais « pionnier hérétique » déjà hier sous la « révolution » en rejoignant le « M22 », pionnier encore aujourd’hui en allant à contre courant d’une société dont la conscience nationale est en lambeau, c’est un nouveau défi à relever pour Pierre Eboundit.

    Car l’Histoire vraie, assumée, peut servir de ciment social en faisant d’une population un Peuple, Uni et Solidaire dans la construction du présent et de l’avenir.

    Panafricainement !

    [1] Gisèle Halimi, “Avocate irrespectueuse”, éd. Plon, février 2002, p.164

    [2] Prosper Mantoumpa-Mpollo est Lieutenant de l’armée - Elie Théophile Itsouhou est membre du Comité Central, ancien Ministre - Franklin Boukaka, Chanteur très populaire dans son pays et à travers l’Afrique pour ses chansons engagées.

    [3] Publié dans l’ouvrage de Woungly-Massaga, « La Révolution au Congo », p.155 - p.157, Ed. François Maspero - Janvier 1974

     

    Autres liens sur le thème :

    http://www.mampouya.com/article-le-m-22-l-assassinat-de-ange-diawara-53368945.html

    http://pierreboundit.unblog.fr/tag/ange-diawara/

    http://fr.wikipedia.org/wiki/Ange_Diawara

    22 février 1972 – 22 février 2012 : Il y a 40 ans éclata la rupture au sein du P.C.T : récit de l’événement

    22 février 1972, le M22 a 40 ans!

     

    "La question de l'appareil d'État compte incontestablement parmi celles qui se posent communément à tous les pays désireux de lutter contre l'impérialisme. Lorsque nous analysons l’échec de N'Krumah au Ghana, nous constatons que l'erreur la plus importante que commit ce grand militant africain fut de ne pas s'être attaqué radicalement à l'appareil d'État." (Extrait de l'Autocritique du M22, L'Harmattan, p.60)

    AfricaFistZm


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  • Le texte d’Engels : http://sheisausorelh.e-monsite.com/blog/politique/engel-et-l-occitania-fr-oc.html


    Nous voyons donc clairement, ici, un ‘phare’ de la pensée marxiste (au moins aussi important que Marx lui-même), Friedrich Engels, reconnaître explicitement que le ‘Sud’ ou ‘Midi de la France’1 abritait – et rien ne dit d’ailleurs, dans son texte, que cela soit terminé – une nationalité, une nation moderne post-An 1000 (‘Elle fut la première, de toutes les nations modernes, à avoir une langue littéraire’), et une brillante civilisation à la pointe de la ‘renaissance médiévale’, ‘reflet de l’ancienne civilisation hellène’, lorsque les rois capétiens (Philippe Auguste et ses successeurs) la soumirent à leur couronne. Et que même lorsque le processus fut achevé, sous Louis XI, ‘pendant plus de trois siècles’, ‘les Français du Sud luttèrent contre leurs oppresseurs’ (l’État parisien), soit jusqu’à la Révolution bourgeoise de 1789… date à laquelle le père d’Engels était sans doute déjà de ce monde, donc ‘hier’ pour l’auteur.

    Voilà qui devrait faire ravaler leur caquet à une flopée de ‘marxistes’ prétendant que notre lutte révolutionnaire de libération occitane est ‘petite-bourgeoise’, ‘réactionnaire’, résultant d’un ‘mythe’ inventé au siècle dernier par des ‘pétainistes’…

    Quelques observations s’imposent toutefois :

    - L’affirmation selon laquelle, au moment (1848) où écrit Engels, le ‘Midi’ occitan serait devenu ‘le soutien principal du féodalisme’ et ‘la force de la contre-révolution en France’, est factuellement FAUSSE : à cette époque, la ‘forteresse blanche’ (des propriétaires fonciers monarchistes, du cléricalisme réactionnaire) est plutôt l’Ouest de l’Hexagone, le bassin de la Loire en aval d’Orléans, l’espace géographique entre le sud de la Normandie, la Touraine, la Haute-Bretagne gallo et la fameuse Vendée.

    Aux élections de la 2e République, en 1848-49 (au moment donc où Engels écrit ces lignes), le ‘Midi’ est tout au contraire un bastion ‘démocrate-socialiste’ et ‘républicain avancé’, frappé de plein fouet par la modernité industrielle et la prolétarisation. Sa ‘morphologie sociale’, contrairement à celle de l’Ouest, se prête très bien à une ‘conscience populaire’ républicaine et socialisante ; déjà, dans les années 1790, le ‘Midi’ était peut-être ‘girondin’, hostile au centralisme parisien des ‘Montagnards’, mais pas ‘chouan’. C’est là l’acte de naissance du célèbre ‘Midi rouge’, le ‘Midi’ de Jaurès et de l’insurrection paysanne de 1907, du syndicalisme révolutionnaire donnant naissance à la CGT à Limoges ; tendance politique qui ne s’inversera qu’à partir des années 1960-70 – et tout cela en lenga nostra, évidemment : il était aussi absurde de s’adresser aux masses en français académique à l’époque, qu’en anglais aujourd’hui. Dans les années 1890, la magnifique chanson La Libertat, hommage à une grève ouvrière à Marseille, sera encore écrite dans la lenga, de même que les proclamations insurrectionnelles de 1907.

    Déjà, pendant les Guerres de Religion, au 16e siècle, le ‘Midi’ n’avait-il pas été le ‘bastion’ de la Réforme protestante – Réforme considérée par tous les marxistes comme un phénomène progressiste pour l’époque, même si le Paris de la Ligue (contemporain et farouchement opposé) avait lui aussi des traits révolutionnaires bourgeois préfigurant le Paris ‘montagnard’ – ? La ‘république’ aristocratique et patricienne urbaine des ‘Provinces de l’Union’ peut bel et bien être vue comme une ‘résurrection’, à un niveau supérieur, de la ‘république aristocratique’ d’avant la Conquista dont parle Engels. Ce ‘Midi’ huguenot verra ensuite, face à la politique antiprotestante de Louis XIV, se lever l’une des toutes premières ‘guerres populaires avant l’heure’, la Guerre des Camisards ; et ces huguenots deviendront bien évidemment, en 1789, les chefs de file de l’idée monarchique parlementaire ou carrément républicaine. L’histoire de nostra Occitània dément donc dans une très large mesure l’affirmation d’Engels.

    - La Révolution bourgeoise ‘française’ a effectivement ‘achevé’ la destruction de l’Occitanie comme réalité politique, en mettant fin aux ‘provinces réputées étrangères’, aux institutions provinciales autonomes etc.2 Mais affirmer qu’elle a ‘fait des habitants du Sud de la France des Français’, c’est aller un peu vite en besogne. Il s’agit là d’une vision typique du marxisme des débuts, du milieu du 19e siècle : une vision ‘subjectiviste’, ‘volontariste’, ‘superstructurelle’ de ce qu’est une nation ; vision qui était effectivement celle de la bourgeoisie révolutionnaire de l’époque (adhérer à sa révolution bourgeoise, dans un cadre géographique défini, signifiait former une nation). Mais le léninisme (et, dans sa continuité, le maoïsme) nous a ensuite enseigné que les nations sont des réalités infrastructurelles, reposant sur une communauté de vie productive et sociale générant un ‘sentiment de commune appartenance’. Or, si la Révolution bourgeoise a effectivement ‘anéanti les derniers restes de l’indépendance médiévale’, et fait des Occitans des ‘citoyens français’, au niveau de la réalité sociale, malgré les suppliques de l’abbé Grégoire, cela est encore resté très largement sur le papier : à l’époque où écrit Engels, la vie sociale de tous les jours, dans le ‘Midi’, se mène encore massivement dans la langue et la culture ‘régionale’.

    La tentative d’anéantissement de cela n’interviendra qu’encore plus tard, au stade MONOPOLISTE du capitalisme, dans les dernières décennies du 19e siècle et au 20e, tentative apparemment ‘réussie’ dans la seconde moitié de celui-ci… Il est donc un peu rapide d’affirmer que la Révolution bourgeoise a (pour faire court) retiré aux ‘Français du Sud’ ce qu’il leur restait de leur indépendance médiévale, leur a donné ‘la démocratie en échange et en a fait des Français tout court’.

    - ‘Après une lutte de trois cents ans, leur belle langue était ramenée au rang de patois, et ils étaient eux-mêmes devenus des Français’ : en réalité, l’élite sociale (aristocratie, patriciat urbain) maniant la ‘belle langue’ des troubadours aux 12e-13e siècles avait effectivement, 4 ou 5 siècles plus tard, largement adopté le français ‘officiel’ de la Cour de France y compris dans sa vie quotidienne, sauf pour s’adresser à ses ‘gueux’ ; enterrant de ce fait un occitan littéraire qui commençait tout juste à voir le jour. Mais le ‘patois’ dont parle Engels, ce n’est rien d’autre que la langue populaire, avec ses petites variantes régionales, qui n’a jamais cessé d’exister et d’évoluer de son côté, tout comme évoluait le ‘français’ de l’élite entre le Moyen-Âge et la Révolution ! Cela rejoint ce qui a été dit précédemment : l’Occitanie a disparu comme réalité politique, et il est logique que son élite ait cherché à s’’assimiler’ à l’élite ‘du Nord’, en adoptant sa ‘graaande cultuuure’ et sa langue académique (définitivement fixée au 18e siècle). Mais elle a persisté, dans les ‘provinces réputées étrangères’ du ‘Midi’, comme réalité sociale et donc dans la langue de communication de tous les jours, la langue (et la culture) POPULAIRE ; ce qu’Engels nomme ‘patois’ – dans l’esprit d’un homme d’extraction aisée de son époque, qu’il était (‘il n’existe aucune pensée qui ne porte une empreinte de classe’).

    - Pour Engels (et c’est là un argument ‘phare’ de nos détracteurs ‘marxistes’), la réalité qu’il décrit semble ‘irréversible’, dans une vision linéaire des processus historiques, et vouloir revenir dessus, c’est vouloir ‘faire tourner la roue de l’histoire à l’envers’. Il ne semble pas se placer dans une perspective de négation de la négation, concept qu’il défendra brillamment quelques décennies plus tard contre Dühring, et qui est l’une des trois ‘lois fondamentales’ du matérialisme dialectique. C'est-à-dire, dans une perspective où ‘pour les besoins du progrès de l’humanité’, la nationalité ‘de France méridionale’ (occitane) a été niée par l’État moderne (monarchie absolue) ‘français’ (comme d’autres nations, par le même ou par d’autres États modernes), la Révolution bourgeoise venant ‘achever’ cette négation ; mais où ensuite, toujours ‘pour le progrès de l’humanité’, cette Occitanie niée à travers les siècles (sans jamais cesser de résister, nous dit clairement Engels) renaîtrait à un niveau supérieur, dans le cadre de la révolution prolétarienne mondiale, pour nier à son tour l’État français, appareil politico-militaire du capitalisme donc de l’oppression – bien évidemment, les personnes y compris ‘marxistes’ qui ne veulent pas réellement en finir avec cet appareil d’oppression – donc l’oppression elle-même – ne peuvent ni ne veulent comprendre cela.

    Engels semble ‘condamner’ arbitrairement le ‘Midi’ à ne mener que des combats d’arrière-garde… ce qui est déjà erroné à son époque (voir les résultats ‘démocrates-socialistes’ de 1849, ou la résistance de décembre 1851 au coup d’État bonapartiste), mais ignore de surcroît la transformation d’une chose en son contraire, magnifiquement illustrée par l’exemple de la réaffirmation nationale basque (traditionaliste, conservatrice, cléricale au 19e siècle et aujourd’hui progressiste, socialiste, voire révolutionnaire marxiste ou libertaire). D’une manière générale, lorsqu’une nation est soumise par une autre – forcément – plus avancée d’un point de vue capitaliste (ce qui n’était pas le cas de la ‘France du Nord’ au moment de la Conquista, mais l’est devenu par la suite), que ce soit dans un ‘rapport de voisinage’ ou outre-mer, la résistance initiale tend toujours à se tourner vers le passé, idéalisé. C’est seulement lorsque, en quelque sorte, la conscience de masse s’approprie le développement des forces productives induit par la conquête que la résistance nationale devient une force révolutionnaire et de progrès. Cette vision ‘linéaire’ du matérialisme historique, par Marx et Engels dans leurs premières œuvres, a déjà été pointée par Servir le Peuple dans l’article sur la Question nationale au 21e siècle.

    Dès lors que la réaffirmation de cette civilisation occitane que décrit Engels, écrasée par 5 siècle d’absolutisme puis 2 siècle d’État bourgeois ‘pour les besoins’ du progrès de l’humanité, convergera dans le grand mouvement de la révolution mondiale, et deviendra ainsi force matérielle, nous l’avons déjà dit : IL EN SERA FINI de l’État français comme appareil politico-militaire au service de l’exploitation et de l’oppression des masses populaires d’Hexagone, et de dizaines de pays y compris ‘indépendants’ à travers le monde ; car cet État français est précisément de la Conquista de notre Occitània, moment où le ‘roi des Francs’ devient ‘roi de France’, et ne peut pas continuer à exister sans elle !


    1/ Engels n’emploie effectivement pas le terme ‘Occitanie’, comme cela a pu être ‘relevé’, sur un forum marxiste, par un AGENT CONSCIENT de l’ordre ‘républicain’ bourgeois. Mais ce terme, issu de la contraction de la particule ‘Òc’ (‘oui’) et d’Aquitania, d’usage courant au 13e siècle (lors de la Conquista) et jusqu’au 15e, était ensuite tombé en désuétude et presque plus du tout utilisé en 1848, lorsqu’écrit Engels : à partir du 16e siècle s’était généralisé le terme de ‘Midi’, difficilement traduisible - en allemand - autrement que par ‘Sud’. Le terme d’Occitanie ne sera ressorti des ‘tiroirs’ que sous la 3e République bourgeoise ‘française’.

    2/ Le ‘morcellement’ féodal, en une multitude de duchés, comtés et autres fiefs, auquel aurait mis fin l’État moderne puis la Révolution bourgeoise, est un autre mythe bourgeois franc-maçon et ‘libre-penseur’, dont l’influence infeste le mouvement ouvrier hexagonal depuis l’origine. Au Moyen-Âge, si ‘atomisation féodale’ de l’autorité politique il y a, elle concerne justement… le Bassin parisien, et c’est le premier ‘défi’ que doivent relever les Capétiens au 12e siècle : affirmer leur souveraineté sur la ‘France du Nord’. Vers 1200 (au seuil de la Conquista par Philippe Auguste, qui devient par la même occasion ‘roi de France’, et les croisés de Montfort), l’Occitanie n’est partagée réellement qu’entre deux États : le duché d’Aquitaine-Gascogne (de la fameuse Aliénor) au Nord et à l’Ouest (Aquitaine, Limousin, Auvergne), relevant de la lointaine couronne d’Angleterre (Plantagenêt) ; et une sorte de ‘confédération’ de possessions catalanes (Provence, Montpellier etc.) et toulousaines et de ‘républiques’ patriciennes urbaines au Centre et à l’Est (Languedoc, Provence, Drôme-Ardèche), relevant en dernière instance de la couronne d’Aragon.


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  • Article originellement publié sur le site frère Sheisau Sorelh : http://sheisausorelh.e-monsite.com/blog/politique/retour-sur-f-engels-et-l-occitania.html


    Nous publions ici quelques mises au point du blog Servir Le Peuple sur le texte d'Engels sur l'Occitanie (ici) :

    Nous voyons donc clairement, ici, un ‘phare’ de la pensée marxiste (au moins aussi important que Marx lui-même), Friedrich Engels, reconnaître explicitement que le ‘Sud’ ou ‘Midi de la France’1 abritait – et rien ne dit d’ailleurs, dans son texte, que cela soit terminé – une nationalité, une nation moderne post-An 1000 (‘Elle fut la première, de toutes les nations modernes, à avoir une langue littéraire’), et une brillante civilisation à la pointe de la ‘Renaissance médiévale’, ‘reflet de l’ancienne civilisation hellène’, lorsque les rois capétiens (Philippe Auguste et ses successeurs) la soumirent à leur Couronne. Et que même lorsque le processus fut achevé (grosso modo sous Louis XI), ‘pendant plus de trois siècles’, ‘les Français du Sud luttèrent contre leurs oppresseurs’ (l’État parisien)... soit jusqu’à la Révolution bourgeoise de 1789, date à laquelle le père d’Engels était sans doute déjà de ce monde, donc ‘hier’ pour l’auteur. Voilà qui devrait faire ravaler leur caquet à une flopée de ‘marxistes’ prétendant que notre lutte révolutionnaire de libération occitane est ‘petite-bourgeoise’, ‘réactionnaire’, résultant d’un ‘mythe’ inventé au siècle dernier par des ‘pétainistes’, etc. etc.

    Quelques observations s’imposent toutefois :

    - L’affirmation selon laquelle, au moment (1848) où écrit Engels, le ‘Midi’ occitan est devenu ‘le soutien principal du féodalisme’ et ‘la force de la contre-révolution en France’, est factuellement FAUSSE : à cette époque, la ‘forteresse blanche’ (des propriétaires fonciers monarchistes, du cléricalisme réactionnaire) est plutôt l’Ouest de l’Hexagone, le bassin de la Loire en aval d’Orléans, l’espace géographique entre le sud de la Normandie, la Touraine, la Haute-Bretagne gallo et la fameuse Vendée. Aux élections de la 2e République, en 1848-49 (au moment donc où Engels écrit ces lignes), le ‘Midi’ est tout au contraire un bastion ‘démocrate-socialiste’ et ‘républicain avancé’, frappé de plein fouet par la modernité industrielle et la prolétarisation. Sa ‘morphologie sociale’, contrairement à celle de l’Ouest, se prête très bien à une ‘conscience populaire’ républicaine et socialisante ; déjà, dans les années 1790, le ‘Midi’ était peut-être ‘girondin’, hostile au centralisme parisien des ‘Montagnards’, mais pas ‘chouan’. C’est là l’acte de naissance du célèbre ‘Midi rouge’, le ‘Midi’ de Jaurès et de l’insurrection paysanne de 1907, du syndicalisme révolutionnaire donnant naissance à la CGT à Limoges ; tendance politique qui ne s’inversera qu’à partir des années 1960-70 – et tout cela en lenga nostra, évidemment : il était aussi absurde de s’adresser aux masses en français académique à l’époque qu’en anglais aujourd’hui. Dans les années 1890, la magnifique chanson La Libertat, hommage à une grève ouvrière à Marseille, sera encore écrite dans la lenga ; de même que les proclamations insurrectionnelles de 1907. Déjà pendant les Guerres de Religion, au 16e siècle, le ‘Midi’ n’avait-il pas été le ‘bastion’ de la Réforme protestante – Réforme considérée par tous les marxistes comme un phénomène progressiste pour l’époque, même si le Paris de la Ligue (contemporain et farouchement opposé) avait lui aussi des traits révolutionnaires bourgeois préfigurant le Paris ‘montagnard’ ? La ‘république’ aristocratique et patricienne urbaine des ‘Provinces de l’Union’ peut bel et bien être vue comme une ‘résurrection’, à un niveau supérieur, de la ‘république aristocratique’ d’avant la Conquista dont parle Engels. Ce ‘Midi’ huguenot verra ensuite, face à la politique antiprotestante de Louis XIV, se lever l’une des toutes premières ‘guerres populaires avant l’heure’, la Guerre des Camisards ; et ces huguenots deviendront bien évidemment, en 1789, les chefs de file de l’idée monarchique parlementaire ou carrément républicaine. L’histoire de nostre Occitània dément donc dans une très large mesure l’affirmation d’Engels.

    - La Révolution bourgeoise ‘française’ a effectivement ‘achevé’ la destruction de l’Occitanie comme réalité politique, en mettant fin aux ‘provinces réputées étrangères’, aux institutions provinciales autonomes etc.2 Mais affirmer qu’elle a ‘fait des habitants du Sud de la France des Français’, c’est aller un peu vite en besogne. Il s’agit là d’une vision typique du marxisme des débuts, du milieu du 19e siècle : une vision ‘subjectiviste’, ‘volontariste’, ‘superstructurelle’ de ce qu’est une nation ; vision qui était effectivement celle de la bourgeoisie révolutionnaire de l’époque (adhérer à sa révolution bourgeoise, dans un cadre géographique défini, signifiait former une nation). Mais le léninisme (et, dans sa continuité, le maoïsme) nous a ensuite enseigné que les nations sont des réalités infrastructurelles, reposant sur une communauté de vie productive et sociale engendrant un ‘sentiment de commune appartenance’ [et Kaypakkaya d'ajouter, vers 1970, qu'elles voient le jour ‘aux premières lueurs de l'aube du capitalisme’, donc vers l'An 1000 en Europe]. Or, si la Révolution bourgeoise a effectivement ‘anéanti les derniers restes de l’indépendance médiévale’ et fait des Occitans des ‘citoyens français’, au niveau de la réalité sociale, malgré les suppliques de l’abbé Grégoire, cela est encore resté très largement sur le papier : à l’époque où écrit Engels la vie sociale de tous les jours, dans le ‘Midi’, se mène encore massivement dans la langue et dans la culture ‘régionale’. La tentative d’anéantissement de cela n’interviendra qu’encore plus tard, au stade MONOPOLISTE du capitalisme, dans les dernières décennies du 19e siècle et au 20e, tentative en apparence ‘réussie’ (en apparence seulement !) dans la seconde moitié de celui-ci… [le grrrrrand argument des jacobinards de tout poil à ce sujet étant que "le français nous unit" ("sinon comment ferait-on pour se comprendre d'une région ou même d'un patelin à l'autre !!?" blablabla) mais c'est éminemment FAUX, puisqu'en réalité le triomphe du français au 20e siècle aura aussi été celui de l'isolement individuel et de la 'juxtaposition des solitudes' dans les grands centres urbains ou les 'bassins d'emploi' périurbains (plus-ou-moins sinistrés...) de la production capitaliste - la Cité des Spectres...]. Il est donc un peu rapide d’affirmer que la Révolution bourgeoise a (pour faire court) ‘‘retiré aux ‘Français du Sud’ ce qu’il restait de leur indépendance médiévale, leur a donné la démocratie en échange et en a fait des Français tout court’’.

    - ‘Après une lutte de trois cents ans, leur belle langue était ramenée au rang de patois, et ils étaient eux-mêmes devenus des Français’ : en réalité, l’élite sociale (aristocratie, patriciat urbain) maniant la ‘belle langue’ des troubadours aux 12e-13e siècles avait effectivement, 4 ou 5 siècles plus tard, largement adopté le français ‘officiel’ de la Cour de France y compris dans sa vie quotidienne, sauf pour s’adresser à ses ‘gueux’ ; enterrant de ce fait un occitan littéraire qui commençait tout juste à voir le jour. Mais le ‘patois’ dont parle Engels ce n’est rien d’autre que la langue populaire, avec ses petites variantes régionales, qui n’a jamais cessé d’exister et d’évoluer de son côté, tout comme évoluait le ‘français’ de l’élite entre le Moyen-Âge et la Révolution ! Cela rejoint ce qui a été dit précédemment : l’Occitanie a disparu comme réalité politique, et il est logique que son élite ait cherché à s’assimiler’ à l’élite ‘du Nord’, en adoptant sa ‘graaande cultuuure’ et sa langue académique (définitivement fixée au 18e siècle) ; mais elle a persisté, dans les ‘provinces réputées étrangères’ du ‘Midi’, comme réalité sociale et donc dans la langue de communication de tous les jours, la langue (et la culture) POPULAIRE ; ce qu’Engels nomme ‘patois’ – dans l’esprit d’un homme d’extraction aisée de son époque, qu’il était (‘il n’existe aucune pensée qui ne porte une empreinte de classe’).

    - Pour Engels (et c’est là un argument ‘phare’ de nos détracteurs ‘marxistes’), la réalité qu’il décrit semble ‘irréversible’, dans une vision linéaire des processus historiques, et vouloir revenir dessus c’est vouloir ‘faire tourner la roue de l’histoire à l’envers’. Il ne semble pas se placer dans une perspective de négation de la négation, concept qu’il défendra brillamment quelques décennies plus tard contre Dühring et qui est l’une des trois ‘lois fondamentales’ du matérialisme dialectique. C'est-à-dire dans une perspective où ‘pour les besoins du progrès de l’humanité’ la nationalité ‘de France méridionale’ (occitane) aurait été niée par l’État moderne (monarchie absolue) ‘français’ (comme d’autres nations, par le même ou par d’autres États modernes), la Révolution bourgeoise venant ‘achever’ cette négation ; mais où ensuite, toujours ‘pour le progrès de l’humanité’, cette Occitanie niée à travers les siècles (sans jamais cesser de résister, nous dit clairement Engels) renaîtrait à un niveau supérieur, dans le cadre de la révolution prolétarienne mondiale, pour nier à son tour l’État français, appareil politico-militaire du capitalisme donc de l’oppression – bien évidemment, les personnes y compris ‘marxistes’ qui ne veulent pas réellement en finir avec cet appareil d’oppression (donc avec l’oppression elle-même) ne peuvent ni ne veulent comprendre cela. Engels semble ‘condamner’ arbitrairement le ‘Midi’ à ne mener que des combats d’arrière-garde… ce qui est déjà erroné à son époque (voir les résultats ‘démocrates-socialistes’ de 1849, ou la résistance au coup d’État bonapartiste de décembre 1851), mais ignore de surcroît la transformation d’une chose en son contraire, magnifiquement illustrée par l’exemple de la réaffirmation nationale basque (traditionaliste, conservatrice, cléricale au 19e siècle et aujourd’hui progressiste, socialiste voire révolutionnaire marxiste ou libertaire). D’une manière générale, lorsqu’une nation est soumise par une autre forcément – plus avancée d’un point de vue capitaliste (ce qui n’était pas le cas de la ‘France du Nord’ au moment de la Conquista, mais l’est devenu par la suite), que ce soit dans un ‘rapport de voisinage’ ou outre-mer, la résistance initiale tend toujours à se tourner vers le passé, idéalisé. C’est seulement lorsque, en quelque sorte, la conscience de masse s’approprie le développement des forces productives induit par la conquête que la résistance nationale devient une force révolutionnaire et de progrès. Cette vision ‘linéaire’ du matérialisme historique, par Marx et Engels dans leurs premières œuvres, a déjà été pointée par Servir le Peuple dans l’article sur la Question nationale au 21e siècle.

    Dès lors que la réaffirmation de cette civilisation occitane que décrit Engels, écrasée par 5 siècles d’absolutisme puis 2 siècles d’État bourgeois ‘pour les besoins’ du progrès de l’humanité, convergera dans le grand mouvement de la révolution mondiale et deviendra ainsi force matérielle, nous l’avons déjà dit : IL EN SERA FINI de l’État français comme appareil politico-militaire au service de l’exploitation et de l’oppression des masses populaires d’Hexagone et de dizaines de pays y compris ‘indépendants’ à travers le monde ; car cet État français est précisément de la Conquista de notre Occitània, moment où le ‘roi des Francs’ devient ‘roi de France’, et ne peut pas continuer à exister sans elle !


    NB :

    1 - Il n’emploie pas le terme ‘Occitanie’, comme cela a pu être ‘relevé’ sur un forum marxiste par un AGENT CONSCIENT de l’ordre ‘républicain’ bourgeois. Mais ce terme issu de la contraction de la particule ‘Òc’ (‘oui’, qui donne son nom à la langue d'òc) et d’Aquitania ('Aquitaine', nom haut-médiéval d'une grande partie du pays), d’usage courant au 13e siècle (lors de la Conquista) et jusqu’au 15e, était ensuite tombé en désuétude et presque plus du tout utilisé en 1848, lorsqu’écrit Engels : à partir du 16e siècle s’était généralisé le terme de ‘Midi’, difficilement traduisible autrement - en allemand - que par ‘Sud’. Le terme d’Occitanie ne sera ressorti des ‘tiroirs’ que sous la 3e République bourgeoise ‘française’.

    2 - Le ‘morcellement’ féodal en une multitude de duchés, comtés et autres fiefs, auquel aurait mis fin l’État moderne puis la Révolution bourgeoise, est un autre mythe bourgeois franc-maçon et ‘libre-penseur’ dont l’influence infeste le mouvement ouvrier hexagonal depuis l’origine. Au Moyen-Âge, si ‘atomisation féodale’ de l’autorité politique il y a, elle concerne justement… le Bassin parisien, et c’est le premier ‘défi’ que doivent relever les Capétiens au 12e siècle : affirmer leur souveraineté sur la ‘France du Nord’. Vers 1200 (au seuil de la Conquista par Philippe Auguste, qui devient par la même occasion ‘roi de France’, et par les croisés de Montfort), l’Occitanie n’est partagée réellement qu’entre deux États : le duché d’Aquitaine-Gascogne (de la fameuse Aliénor) au Nord et à l’Ouest (Aquitaine, Limousin, Auvergne), relevant de la lointaine Couronne d’Angleterre (Plantagenêt) qui lui laisse en pratique une autonomie totale ; et une sorte de ‘confédération’ de possessions catalanes (Provence, Montpellier etc.) et toulousaines et de ‘républiques’ patriciennes urbaines au Centre et à l’Est (Languedoc, Provence, Drôme-Ardèche), relevant en dernière instance de la Couronne d’Aragon.

    Retour sur F. Engels et l'Occitània


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    chaveznodHugo Chávez Frías, président ‘bolivarien’ et ‘socialiste’ du Venezuela, s’est donc éteint ce mardi 5 mars à Caracas, des suites d’une longue maladie diagnostiquée en 2011.

    Servir le Peuple ne s’étendra pas 'kilométriquement' sur l'évènement, sinon pour dire que comme nous l’annoncions il y a quelques semaines en conclusion d’un article, sa disparition comme ‘clé de voûte’ d’un édifice politique aussi interclassiste et contradictoire que le ‘bolivarisme’ devrait rapidement amener celui-ci à exploser, et de grands bouleversements des rapports de force sont à prévoir.

    Notre position sur le personnage et – surtout, car ce ne sont pas les ‘grands hommes’ qui font l’histoire – la réalité politique latino-américaine qu’il représentait a déjà été largement exposée ici : il vous suffira de taper ‘Chavez’, ‘bolivarien’ ou ‘bolivarisme’ dans le moteur de recherche du blog, d’aller consulter la catégorie ‘Amérique latine’, etc.

    Schématiquement, la position de SLP pourrait se résumer ainsi : le ‘bolivarisme’ de Chávez et consorts était un nationalisme bourgeois social-réformiste, teinté de populisme et de dénonciation de l’hégémonie historique nord-américaine sur le continent, chose assez typique (historiquement, au cours des 60 ou 70 dernières années) en Amérique latine ; et découlant de la conjonction, du ‘frottement’ contradictoire de deux phénomènes :

    1/ depuis les années 1970, la crise générale frappant le monde impérialiste a amené une grande partie de la production à se délocaliser vers les pays d’Amérique latine, ou encore d’Asie-Pacifique, les pays arabes voire certaines régions d’Afrique subsaharienne, entraînant une notable modernisation de la vie sociale et l’émergence de nouvelles couches petites et moyennes-bourgeoises, de classes ‘moyennes’ éduquées ; ce à quoi l’on peut ajouter, dès les années 1970 mais aussi 1990 et 2000, une nette augmentation des cours des hydrocarbures, dont les principaux pays concernés (Venezuela, Bolivie, Équateur) sont de gros producteurs, amenant des fractions de la grande bourgeoisie à désirer une ‘plus grosse part du gâteau’ (en renégociant les contrats, en se tournant vers d’autres clients ‘émergents’ - Chine, Russie, Brésil, Iran - etc.) ;

    2/ face au ‘néolibéralisme’, ainsi qu’est appelée là-bas la domination semi-coloniale (principalement nord-américaine) féroce mise en place après (ou directement pendant) les dictatures fascistes des années 1960-80 (qui ont anéanti les forces révolutionnaires et progressistes), des mouvements de contestation sociale de grande ampleur ont rendu les principaux pays concernés ingouvernables par les ‘méthodes’ et la ‘classe politique’ traditionnelle. Une ingouvernabilité, démontrant une fois de plus que ce sont les masses qui font l’histoire, qui a amené les partis ‘traditionnels’ de l’oligarchie dominante à rétrocéder tactiquement, ouvrant la porte à des ‘créatures politiques’ atypiques : un ancien militaire putschiste à l’idéologie hétéroclite se voulant ‘progressiste’ (‘entre communisme impossible et capitalisme inhumain’) au Venezuela, un syndicaliste paysan ‘musclé’ défendant les cultivateurs de coca en Bolivie ; ou encore, d’anciens partis guérilleros ‘socialistes’ (sandinistes au Nicaragua, FMLN au Salvador) que l’on croyait enterrés aux oubliettes de la ‘Fin de l’Histoire’ (ayant même droit à leur chapitre dans le Livre noir du communisme) en Amérique centrale ; l’économiste ‘catho de gauche’ équatorien Correa étant quant à lui plus proche d'un ‘homme du sérail’, tout comme l'éphémère libéral-réformiste hondurien Zelaya. Une aile de l’oligarchie pensait, sans doute, parvenir avec le temps à les ‘responsabiliser’ (embourgeoiser), scénario qui se s’est finalement réalisé ; une autre qu’ils seraient nuls et perdraient les élections suivantes face aux partis traditionnels ; une autre, enfin, pensait les liquider militairement ou par un mouvement de la ‘société civile’ au moment propice – ce qui a été tenté partout, et a réussi au Honduras.

    Une rupture du front de la ‘Fin de l’Histoire’, voilà finalement la (seule) véritable signification historique qu’il faut retenir de ces phénomènes politiques qui ont dominé la dernière décennie : une démonstration, presque 10 ans avant les évènements des pays arabes (comme cela semble loin !), que les masses se levant selon le principe ‘là où il y a oppression, il y a résistance’ peuvent faire tomber un ordre politique que l’on croyait immuable ; que toute idée de ‘changement pour de bon’ n’est pas irrémédiablement vouée au 'musée des horreurs' du ‘siècle des totalitarismes’… Mais nullement, en aucun cas, le début d’un commencement de révolution au sens marxiste (accession de la classe révolutionnaire, le prolétariat, au pouvoir à la tête des masses populaires).

    Telle est la position qui nous a semblé, à tout le moins, la plus léniniste possible ; léniniste... car il n’y a PAS, au niveau international, de position ‘maoïste’ unifiée sur la question.

    Parmi les Partis, organisations ou simples groupes de personnes qui se réclament du maoïsme, le (nouveau) PC italien vient ainsi de rendre un vibrant hommage au comandante disparu ; le PC des Philippines, qui mène la Guerre populaire dans ce pays, avait un point de vue également assez bienveillant sur le ‘processus’, tout comme les PCR d’Argentine ou d’Uruguay (mais le PCR d’Argentine avait un point de vue positif sur le péronisme, alors…) qui font partie de la même Conférence internationale (ICMLPO ‘International newsletter’) ; mais l’OCML-VP (membre de la même) était beaucoup moins enthousiaste ; le blog cantabre (État espagnol) Odio de Clase relaie quant à lui l’hypothèse d’un empoisonnement du comandante ‘comme Yasser Arafat’ (impossible, peut-être pas, mais dans tous les cas cela ne change pas grand-chose...), etc. etc. En revanche, les maoïstes qui se placent dans la lignée du Parti communiste du Pérou et de Gonzalo étaient et restent FAROUCHEMENT HOSTILES à Chávez et à son ‘processus’ (comme aux ‘processus’ apparentés sur le continent), carrément définis comme… FASCISTES ; ce qui, pour SLP, relève de ce que Dimitrov qualifiait en 1935 (au sujet du New Deal et de certaines positions communistes à son sujet) de pire schématisme :  « N'est-ce pas une manifestation de cette attitude schématique que l'affirmation de certains communistes assurant que l'’ère nouvelle’ de Roosevelt représente une forme encore plus nette, plus aiguë de l'évolution de la bourgeoisie vers le fascisme que, par exemple, le ‘gouvernement national’ d'Angleterre ? Il faut être aveuglé par une dose considérable de schématisme pour ne pas voir que ce sont justement les cercles les plus réactionnaires du Capital financier américain en train d'attaquer Roosevelt, qui représentent, avant tout, la force qui stimule et organise le mouvement fasciste aux Etats-Unis. Ne pas voir le fascisme réel prendre naissance aux Etats-Unis sous les phrases hypocrites de ces cercles en faveur de la ‘défense des droits démocratiques des citoyens américains’, c'est désorienter la classe ouvrière dans la lutte contre son pire ennemi » (exemple d’un pays impérialiste, mais exemple intéressant car il ne faut pas oublier que c’est l’impérialisme US, avec sa ‘tradition’ réactionnaire spécifique, qui pilote principalement la droite radicale anti-bolivariste en Amérique du Sud). Le site ‘Voie Lactée’ du ‘p’’c’’mlm’ a réagi tellement promptement (l’information n’étant parvenue que ce matin en Hexagone) que de toute évidence, l’article ‘enfonçant le mort’ était rédigé de longue date, probablement dès l’annonce de la grave maladie du comandante*.

    Des positions diverses et variées, donc, mais généralement accompagnées des mêmes épithètes les unes à l’encontre des autres, et notamment, bien sûr… ‘trotskyste’ (évidemment !) ; car le mouvement se réclamant de Léon Trotsky et de son Programme de Transition était tout aussi divers dans ses analyses, allant de l’hostilité farouche (ici Lutte ouvrière, ou la tendance ‘CLAIRE’ du NPA) au soutien critique-mais-bon-pas-vraiment (majorité du NPA, la Riposte etc.) : il était donc, quelle que soit la position adoptée, facile de trouver des trotskystes défendant la position inverse…(1) Ou encore l’épithète de ‘révisionniste’, tout aussi ridicule, puisque pour les marxistes-léninistes-maoïstes, sont révisionnistes aussi bien les ‘cubanistes’ et autres ‘brejnéviens’ (comme les FARC-EP, le PC vénézuélien, le KKE, le PTB, en ‘France’ l’URCF, le PRCF ou le RCC), qui étaient farouchement pro-Chávez, que les ‘pensée maozedong’ comme le PCR d’Argentine, qui étaient sur les mêmes positions, mais aussi… les hoxhistes (les marxistes-léninistes ‘albanais’), qui eux, étaient nettement plus hostiles, le PCML d’Équateur étant clairement dans l’opposition au gouvernement Correa, tandis que le petit groupe vénézuélien ‘Bandera Roja’ était allé tellement loin… qu’il s’était fait exclure de l’autre ICMLPO, l’ICMLPO ‘Unité et Lutte’ hoxhiste : il avait soutenu explicitement la tentative de coup d’État (ratée) de la droite ultra vénézuélienne en avril 2002 ! Tout cela semble bien, en fait, relever du plaquage abstrait de vieux schémas (schématisme !) de la première vague de la révolution mondiale, dans toutes leurs limites qui ont conduit à l'épuisement de celle-ci, sur un phénomène de notre époque qui n'a, dans toutes ses spécificités, pas d'antécédent historique...

    La réalité, devant ces positions extrêmement atomisées, que ce soit du mouvement marxiste-léniniste, du mouvement maoïste ou du mouvement trotskyste, c’est que tous ont en fait partiellement raison, tous détiennent une partie de la vérité – mais ne voient, justement, qu’une partie, qu’un aspect du phénomène ‘bolivarien’, et non sa totalité contradictoire, en ‘unité et lutte’. Les forces plutôt ‘avant-gardistes’ (sacralisant le rôle de l’avant-garde, du Parti, ‘centre’ de la ‘vérité’ révolutionnaire et cadres du socialisme de demain) étaient globalement hostiles à Chávez et consorts, ne tolérant pas une autre direction sur les masses que la leur. Les organisations plutôt ‘massistes’, mettant en avant le rôle des masses en mouvement, en lutte pour le progrès démocratique et social, que le Parti doit simplement ‘accompagner’, en avaient au contraire une vision plus positive, sauf peut-être (en Hexagone) VP (maoïste) et certains courants du NPA (trotskyste). Le ‘bolivarisme’ était clairement un ‘rempart’ des classes dominantes face aux mouvements de lutte populaires, empêchant ceux-ci (qui l’ont porté au pouvoir…) d’effectuer un ‘saut’ qualitatif et de devenir révolutionnaires, avec l’émergence d’un Parti. Mais, pour ce faire, il a dû offrir de très réelles et concrètes avancées démocratiques et sociales aux masses du peuple. Dans les pays impérialistes, de telles avancées reposent sur quelque chose que de véritables communistes ne peuvent ignorer : le pillage des pays dominés par l’impérialisme. L’Occidental de 2013 après Jésus-Christ est un Athénien antique, dont la ‘démocratie’ (de façade) et le 'niveau de vie' reposent sur le dos d’une masse dix fois plus nombreuse d’esclaves affamés (phénomène que pouvait déjà entrevoir Lénine dans L'Impérialisme en 1916)… Mais dans des pays dominés, comme le Venezuela ou la Bolivie, des avancées de ce type reposent au contraire sur une réappropriation partielle du produit national, soit, en définitive, sur une réaffirmation du caractère national de la production face à l’appropriation impérialiste de la richesse produite. Cela, le léninisme nous enseigne que c’est toujours (objectivement) positif. Le ‘bolivarisme’ était un phénomène politique à dominante bourgeoise, ne pouvant pas ne pas avoir de contradictions, y compris violentes, avec les masses laborieuses et leur volonté d’émancipation ; et ne représentait en rien une ‘première étape’ d’un processus ininterrompu vers le socialisme et le communisme. Mais un phénomène bourgeois qui nécessitait de chevaucher, qui nécessitait comme appui et comme ‘carburant’ les luttes sociales ; et pouvait, par conséquent, créer par là des conditions favorables au développement d’une conscience révolutionnaire dans les classes opprimées, et d’un mouvement communiste, à condition bien sûr qu’un PARTI révolutionnaire conséquent se saisisse de ces tâches (le régime ‘socialiste’ bourgeois crée simplement les conditions, il ne s’en charge pas). Dans les différentes positions marxistes ayant émergé depuis 15 ans sur le phénomène, jamais la totalité de ces aspects n’a – hélas – été entièrement saisie. Soit Chávez pavait la voie au socialisme et au communisme, soit il représentait la contre-révolution la plus noire… il n'y avait pas d'autre 'subtilité' possible. Et entre le ‘maoïsme’ (ou le trotskysme) virant Libé, grand pourfendeur du ‘populisme fascisant’, et le ‘marxisme-léninisme’ (ou d'autres trotskystes) virant Monde Diplo ou Michel Collon (admirateur béat des régimes et des forces de réaffirmation nationale type bolivarisme, Hezbollah, Frères musulmans ou mollahs iraniens), le prolétariat révolutionnaire avait-il une chance de retrouver ses 'petits', c'est-à-dire sa conception du monde ?

    Quoi qu’il en soit, la position de Servir le Peuple a toujours été claire : quelles que soient ses spécificités, le ‘chavisme’/’bolivarisme’ est un phénomène politique à apparenter au réformisme bourgeois (position partagée, d’ailleurs, par les MLM de Bolivie quant au MAS d’Evo Morales dans ce pays), version social-populiste ; tentant en tant que tel de nier la contradiction fondamentale Capital/Travail (derrière une contradiction ‘Amérique latine surexploitée/impérialisme yankee’), tout réformisme bourgeois cherchant de toute manière à placer un supposé ‘intérêt général’ au-dessus de la lutte des classes ; mais en rien apparentable au fascisme, qui est une forme de gouvernement réactionnaire terroriste, visant l’annihilation de toute force révolutionnaire (même aux théories erronées), mais aussi simplement… réformiste, ‘progressiste’ : régime de Pinochet, junte argentine de 1976-83, régime militaire du Guatemala au début des années 1980, régime de Fujimori au Pérou (1990-2000) ou d’Uribe en Colombie (2002-2010) en sont les exemples type en Amérique latine. Le 'bolivarisme' était un phénomène politique bourgeois, à ne défendre en aucun cas dans ses éventuelles contradictions avec les masses populaires en lutte ou les forces subjectives de la révolution mondiale (ce que SLP n'a jamais fait), mais à défendre tactiquement, oui, comme une certaine République espagnole en 1936 ou une certaine Unité populaire chilienne en 1973, face à une éventuelle contre-offensive de la réaction la plus noire (à la Pinochet), de l'aile réactionnaire la plus terroriste de la classe dominante et des monopoles impérialistes (principalement US).

    Il était un assemblage hétéroclite d’intérêts de classe très variés, ne pouvant pas coïncider au-delà du très court terme – de fait, les contradictions éclataient déjà au grand jour depuis plusieurs années (2) ; et il volera inévitablement en éclat avec la disparition de sa ‘clé de voûte’ (vitale non seulement au Venezuela, mais dans toute l’Amérique latine, les autres dirigeants ne lui arrivant pas à la cheville). Il appartient désormais, de fait, à l’histoire.

    Une nouvelle page de l’histoire populaire révolutionnaire d’Amérique latine s’ouvre. Espérons vivement qu’une analyse marxiste de notre époque, maoïste, correcte du phénomène ‘bolivarien’ saura rapidement voir le jour, afin que les classes exploitées puissent écrire victorieusement leur histoire dans les prochaines décennies.


    (1)
    De fait, si les positions "gauchistes réactionnaires" que nous dénonçons dans cet article sont classiquement qualifiées de "trotskystes" par les marxistes-léninistes et les maoïstes, Trotsky lui-même a pu tenir parfois des propos extrêmement proches... de notre position, et notamment au sujet d'un régime beaucoup plus clairement fasciste (l'Italie de Mussolini était sa référence explicite) que ceux de l'ALBA aujourd'hui : « Il règne aujourd’hui au Brésil un régime semi-fasciste qu’aucun révolutionnaire ne peut considérer sans haine. Supposons cependant que, demain, l’Angleterre entre dans un conflit militaire avec le Brésil. Je vous le demande : de quel côté serait la classe ouvrière ? Je répondrai pour ma part que, dans ce cas, je serais du côté du Brésil "fasciste" contre l’Angleterre "démocratique". Pourquoi ? Parce que, dans le conflit qui les opposerait, ce n’est pas de démocratie ou de fascisme qu’il s’agirait. Si l’Angleterre gagnait, elle installerait à Rio de Janeiro un autre fasciste, et enchaînerait doublement le Brésil. Si au contraire le Brésil l’emportait, cela pourrait donner un élan considérable à la conscience démocratique et nationale de ce pays et conduire au renversement de la dictature de Vargas. La défaite de l’Angleterre porterait en même temps un coup à l’impérialisme britannique et donnerait un élan au mouvement révolutionnaire du prolétariat anglais. Réellement, il faut n’avoir rien dans la tête pour réduire les antagonismes mondiaux et les conflits militaires à la lutte entre fascisme et démocratie. Il faut apprendre à distinguer sous tous leurs masques les exploiteurs, les esclavagistes et les voleurs ! » (La lutte anti-impérialiste, entretien avec le syndicaliste argentin Fossa, 1938) [ceci sans toutefois perdre de vue, comme on peut le voir, son idée de primauté des grands centres capitalistes-impérialistes dans le "déploiement" de la vague révolutionnaire mondiale (il est bien clair que ce sont les possibilités révolutionnaires en Angleterre qui l'intéressent en premier lieu dans son exemple) ; conception qui fait partie de ce que nous récusons fermement dans le trotskysme].

    (2) Notamment avec les extraditions, depuis début 2009, de militant-e-s basques et colombien-ne-s vers leurs États réactionnaires répressifs d’origine. Un ‘tournant’, au cours de ces 14 années de présidence, semble bien avoir été l’opération Phénix de l’armée colombienne (en territoire équatorien), le 1er mars 2008, se soldant par la mort du dirigeant FARC Raúl Reyes et la saisie de l’ordinateur de ce dernier, révélant des liens entre la guérilla colombienne et le Venezuela de Chávez (ainsi que l’Équateur de Correa). Évidemment, les ‘fana-chavistes’ de tout poil déployèrent alors toute leur ‘armada’ de dénégations, pour affirmer que ces documents étaient des faux, une provocation du régime fascisant d’Uribe etc., mais leur authenticité semble en réalité bel et bien avérée. Face à ce que, dans une ‘guerre par procuration’, il faut bien appeler une défaite militaire, Chávez semble alors avoir fait brutalement machine arrière et adopté ‘profil bas’, se repliant sur un anti-impérialisme ‘qui ne mange pas de pain’ (dénonciations tonitruantes de la superpuissance US, ou des crimes sionistes au Machrek arabe), et commençant à extrader les militant-e-s réfugié-e-s sur son territoire pour éviter l’étiquette infâmante d’’État terroriste’, jusqu’à l’arrestation et l’extradition d’un journaliste ‘radical’ colombien qui, pour être pro-FARC, n’en était pas moins retiré de toute activité ‘terroriste’ depuis les années 1980 : le ‘bolivarisme’ révélait ici on-ne-peut-plus clairement ses limites de classe, de nationalisme réformiste bourgeois.


    chavez chronique 3Venezuela-Caracas-Bidonville-1-5


    * Le ‘p’’c’mlm’-‘Voie lactée’ en remet une et même deux couches (attaquant une nouvelle fois le PCm d’Italie) : décidément, ils savent se faire ‘cosmopolites’ (aborder des thèmes non-hexagonaux) lorsque cela les arrange, ou plutôt, lorsqu’ils ont leurs ‘petites obsessions’ – Chávez en l’occurrence, ou le PCmI qui a sûrement dû, à une époque indéterminée, les renvoyer aux petits intellectuels prétentieux qu’ils sont, ou encore les z’horribles z’islamiiiiistes en mettant en avant les textes de leur groupuscule-frère du Bangladesh (pays où l’islam est idéologie d’État, et non la cible première de la mobilisation réactionnaire de masse comme ici ; difficile pour le coup de faire plus ‘cosmopolite’). Ils nous présentent donc, Mao et Gonzalo à l’appui, la ‘position maoïste classique’ concernant le capitalisme bureaucratique dans les pays dominés par l’impérialisme (semi-coloniaux semi-féodaux) : impeccable, jusque-là rien à redire… Sauf que TOUT repose sur un seul et unique postulat : il est AFFIRMÉ et jamais, en aucun cas, DÉMONTRÉ que Chávez représente ledit capitalisme bureaucratique, ni à fortiori qu’il en représente la TOTALITÉ – et non, précisément, une fraction… réformiste. Car que nous dit le ‘p’’c’’mlm’ sur le capitalisme bureaucratique dans les pays dominés ? Si l’on suit leur ‘brillant’ exposé (un vieux document du groupuscule), « Ce capitalisme bureaucratique est le capitalisme que l'impérialisme développe dans les pays arriérés et qui comprend les capitaux des grands propriétaires terriens, des grands banquiers et des magnats de la grande bourgeoisie ; Il passe par un processus qui fait que le capitalisme bureaucratique se combine avec le pouvoir de l’État et devient capitalisme monopoliste étatique, compradore et féodal ; il en découle qu'en un premier moment il se développe comme grand capital monopoliste non étatique, et en un deuxième moment - quand il se combine avec le pouvoir de l’État - il se développe comme capitalisme étatique »… Or cela, au Venezuela… cela s’appelle typiquement (notamment) PDVSA, le gigantesque monopole ‘national’ (soi-disant ‘public’) du secteur hydrocarbure hypertrophié caractéristique de ce pays. À la fin des années 1990, lors de l’élection de Chávez, celui-ci était effectivement aux mains d’une oligarchie bureaucratique, qui vivait dans une opulence indescriptible tout en bradant la principale richesse du pays aux monopoles pétroliers US et européens. Et c’est précisément cette oligarchie qui, dans la première moitié des années 2000 et même au-delà (jusqu’en 2007 voire 2008), a été à la POINTE de la mobilisation réactionnaire anti-Chávez, avec notamment le coup d’État raté d’avril 2002, puis la ‘grève générale’ de décembre 2002-janvier 2003, appuyée sur les syndicats jaunes de cadres et d’aristocrates-salariés. Depuis, Chávez a prétendu ‘renationaliser’ la compagnie, renégocier les contrats avec les monopoles euro-US acheteurs et ‘diversifier’ sa clientèle (avec les fameux ‘BRICS’ et autres ‘émergents’) ; et il a éliminé cette oligarchie en la remplaçant par des partisans à lui… qui ont formé ce que l’on appelle là-bas la ‘boli-bourgeoisie’, la nouvelle bourgeoisie ‘en chemise rouge’, qui est tout le problème, qui démontre sans ambigüité le caractère non-révolutionnaire du chavisme et est dénoncée par tous les révolutionnaires – y compris certains ‘fascinés’ par le ‘processus’ au début. Mais l’oligarchie bureaucratique PDVSA de 1999 a combattu Chávez, et Chávez l’a combattue. Toute la démonstration et les attaques sournoises du ‘p’’c’’mlm’ et des ses amis internationaux reposent, donc, sur une première contre-vérité absolue.

    Les positions d’organisations se réclamant du maoïsme (PC des Philippines, (n)PCI), que ‘Voie lactée’ met en avant, ont été critiquées par SLP comme positions ‘borgnes’ – ne voyant que les aspects positifs du phénomène politique Chávez, et non les très nombreux aspects négatifs. La position du PCm d’Italie, elle, conclut justement (bien que de manière sectaire envers le (n)PCI, le ‘chauvinisme d’organisation’ – plaie du mouvement communiste – ayant encore de beaux restes), mais est beaucoup trop élogieuse au début, donnant au final l’impression de dire ‘tout et son contraire’.

    Mais que penser de la position du PC d’Équateur ‘Comité de Reconstruction’ (un ‘ami’ international de ‘Voie lactée’, bien que des tensions aient éclaté ces derniers temps) ? Pour SLP, cela tient en deux phrases :

    - pire schématisme (cf. Dimitrov) en qualifiant Chávez et le PSUV de ‘fascistes’ ; refusant de voir que c’était précisément les secteurs attaquant son ‘populisme’ et son ‘castro-socialisme’ au nom des ‘libertés’ qui représentaient la réaction la plus noire, terroriste, ‘pinochétiste’ au Venezuela ; et désarmant ainsi les classes populaires vénézuéliennes contre leur pire ennemi et se coupant d’elle (en qualifiant de ‘fasciste’ un homme perçu par elles comme un ‘révolutionnaire’ et un ‘patriote’, ‘phénomène social de masse’ que des communistes authentiques ne peuvent ignorer) ;

    - y-a-qu’à-faut-qu’on dès lors que l’on aborde la question de ‘Que faire ?’ : les tâches exposées sont des tâches pour après la prise de pouvoir par le prolétariat et son alliance révolutionnaire de classes ; mais en dehors de ‘la Guerre populaire’, on ne voit pas l’embryon d’une stratégie pour PRENDRE le pouvoir… Cela alors que cette organisation maoïste évolue dans un pays proche et très semblable au Venezuela : ‘morphologie sociale’ et histoire comparables, secteur hydrocarbure hypertrophié, gouvernement ‘populiste de gauche’ allié à Chávez (Rafael Correa) etc.

    Les anarchistes et les marxistes ‘conseillistes’ (gauchistes), ou encore certains trotskystes, se caractérisent historiquement par leur refus de reconnaître différents types de gouvernement bourgeois, et donc différentes stratégies adaptées à chacun. Mais là, c’est encore pire : il y a carrément, et délibérément, caractérisation erronée d’un gouvernement réformiste ‘populiste’ (c’est-à-dire mobilisant les masses dans son projet réformiste, pour les empêcher de devenir révolutionnaires et sauver ainsi une partie des possédants en en sacrifiant une autre, la plus ‘pourrie’) en gouvernement ‘fasciste’, dont le mouvement communiste international a fixé la définition une fois pour toutes en 1935 : « dictature terroriste ouverte des éléments les plus réactionnaires, les plus chauvins, les plus impérialistes du Capital financier » - et, cela va de soi, de leurs représentants dans les pays semi-coloniaux non-impérialistes. En l’occurrence, les représentants des éléments les plus réactionnaires et impérialistes du Capital financier nord-américain et européen étaient les putschistes ratés d’avril 2002, les agitateurs cambas racistes de la Media Luna bolivienne (2007-2010), ou encore les putschistes couronnés de succès du Honduras en juin 2009. Le régime fasciste typique actuellement en Amérique latine, c’est celui mis en place en Colombie par Uribe et son ‘Parti de la U’, et poursuivi en version plus ‘libérale’ par son successeur Santos.

    Décidément, le ‘p’’c’’mlm’ et ses amis internationaux partagent beaucoup, beaucoup de ‘têtes de turcs’ (‘bolivariens’, ‘islamistes’ etc.) avec la pensée mainstream des monopoles impérialistes, et cela en devient préoccupant…

    Voir aussi la position du PC d’Équateur ‘Sol Rojo’, particulièrement alambiquée : réformisme bourgeois (comme le posaient en 2008 les maoïstes boliviens au sujet d’Evo Morales) ou fascisme ? On n’y comprend plus grand-chose… Ce n’est pourtant pas du tout la même chose, et pas du tout la même stratégie d’action pour les communistes : il faudrait choisir camarades ! Il y a également la position de l’’Organisation des Ouvriers d’Afghanistan MLM’, totalement calquée sur celle du ‘p’’c’’mlm’ : cette organisation paraît totalement ‘générée’ (comme les mystérieux ‘Arab maoists’) par le courant ultra-gauchiste dogmato-sectaire du maoïsme international, certainement à partir d’Afghans de l’exil, peut-être d’anciens éléments du courant ‘communiste-ouvrier’ historiquement fort dans ce pays, dont les positions sont proches… L’amitié de Chávez avec des régimes particulièrement réactionnaires du Proche et Moyen-Orient (Iran, mais aussi Syrie, Libye etc.) est en revanche dénoncée à juste titre – amitié parfaitement conforme aux intérêts de classe de la ‘boli-bourgeoisie’ qui s’est constituée depuis 1999, en ‘occupant les niches’ de la bourgeoisie bureaucratique puntofijiste balayée par Chávez.

    Bien que SLP ne partage pas les louanges du (n)PCI envers la ‘révolution bolivarienne’, il est intéressant de lire l’article suivant, reprenant… la position maoïste classique justement, sur l’attitude qui doit être celle des communistes vis-à-vis de formes de gouvernement réformistes de ce type, et des ‘forces sociales intermédiaires’ qui sont leur base sociale : Les communistes et la ‘gauche’ bourgeoise.

    Un fait historique incontournable est qu’un régime fasciste, même lorsqu’il dénie cette appellation (à peu près tous la dénient depuis 1945), est identifié comme tel par un bon 25% ou 30% des masses populaires, ce que l’on peut appeler le ‘peuple de gauche incompressible’ : tel était le cas en Italie mussolinienne (où socialistes, démocrates sociaux et communistes avaient récolté 34% des suffrages en 1921, et encore presque 15% aux élections frauduleuses de 1924), en Allemagne (SPD+KPD = 30,6% aux élections de mars 1933, donc déjà sous la botte hitlérienne), dans l’État espagnol (les gauches avaient réuni près de 50% en février 1936), au Portugal salazariste, au Chili sous Pinochet, etc. etc. De même, aux États-Unis sous la présidence Bush-Cheney, en Hexagone sous la présidence de Sarkozy et déjà lorsqu’il était ministre de l’Intérieur, et même en Israël-Palestine sous les gouvernements du Likoud et de ses alliés d’extrême-droite, une part significative de la population s’accordait et s'accorde encore à reconnaître au gouvernement des ‘traits fascisants’, une ‘(mauvaise) pente de sinistre mémoire’, etc. Au Venezuela, il n’y avait pas 1% de la population (dont peut-être quelques centaines de ‘maoïstes’ sur la ligne internationale du ‘p’’c’’mlm’) pour qualifier Chávez de ‘fasciste’ : pour ses plus fervents supporters comme pour ses adversaires les plus acharnés, il était un ‘socialiste’ (un réformiste bourgeois ‘radical’), et ceci était précisément l’objet de la ferveur comme de la haine. Et ici ? Et bien, lorsque l’on entre ‘Chavez fasciste’ sur Google, l’on trouve, pour associer cet épithète au dirigeant ‘bolivarien’, les documents de ‘Voie Lactée’ (ou de leurs amis internationaux traduits par eux), et… des sites très-à-droite de type ‘néoconservateurs’ (‘droite radicale’ particulièrement pro-US, pro-Israël etc.), tels que ‘La Pensée néoconservatrice’ ou Dreuz.info (et encore, ces sites parlent-ils de ‘fascisme’… ‘rouge’ !). À méditer...

    Une autre caractéristique du fascisme au sens strict (Hitler, Mussolini, Franco, Pinochet etc., à distinguer du ‘pourrissement réactionnaire généralisé’ de la politique bourgeoise - 'fascisme moderne' - que nous connaissons actuellement en Occident), du choix du fascisme (et non du réformisme) par la classe dominante face à l’ingouvernabilité galopante, c’est le développement d’une intense activité squadriste  (paramilitaire anticommuniste, anti-progressiste) avant même la prise de pouvoir (laquelle est rarement le fruit d’un net résultat des urnes, mais plutôt d’un coup de force, fut-il ‘institutionnel’) : Chemises noires en Italie, SA en Allemagne, Phalange en ‘Espagne’, ‘ligues’ et ‘Cagoule’ en ‘France’, Rex en Belgique, 'Garde de Fer' en Roumanie, Patria y Libertad au Chili, Triple A en Argentine, AUC en Colombie, etc. Rien de tout cela au Venezuela de la fin des années 1990, pas plus qu’en Équateur ou en Bolivie dans la première moitié des années 2000…

    Ah ! Et puis un dernier fait intéressant, un de ces petits ‘buzz’ politiques révélateurs, ce sont les propos de l’ex-président régional de Gwadloup et oncle Tom des dernières colonies ministre de l’Outre-mer, Victorin Lurel, représentant la France aux obsèques du défunt, qui a comparé Chávez à De Gaulle (certes) et Léon Blum (le genre de point de vue très répandu dans la ‘gauche’ bourgeoise et le ‘peuple de gauche’ des Antilles) : ces propos ont été non seulement critiqués par les courants les plus ‘euro-atlantistes’ du PS (Cambadélis etc.), mais aussi vivement dénoncés comme ‘hallucinants’, ‘choquants’, ‘fadaises’ par Jean-François Copé lui-même et la droite copéiste, dont le sinistre Lionnel Luca, chef de file de la Garde de Fer de Sarkozy ‘Droite populaire’ (voir aussi la réaction de Luca ici), bref, la droite dans laquelle le ‘p’’c’’mlm’ voit jour après jour ‘renaître le RPR’ et fleurir le ‘néogaullisme’. Chez les fascistes, Marine Le Pen juge la polémique ‘stérile’ et estime que Chávez "a fait des choses positives, notamment faire profiter son peuple de la manne du pétrole, d'autres dirigeants en Afrique qui avaient des ressources très importantes n'ont pas fait cela" (elle ménage là le fort courant ‘NR’ de son parti, en faisant preuve au passage d’une hypocrisie totale sur les peuples africains pillés par la Françafrique), mais qu'il "avait un exercice un peu personnel du pouvoir et une manière d'envisager la liberté des médias qui n'était pas évidemment la nôtre" (la ‘liberté d’expression’ contre la ‘pensée unique’ - 'de gauche' évidemment - est devenue une rengaine récurrente de l’extrême-droite fasciste depuis une trentaine d’années, à rapprocher de l'UMPiste ex-FN Guillaume Peltier exigeant un 'quota de journalistes de droite', etc.) : bref, elle reste assez ‘neutre’ et ‘garde ses distances’. Son grand rival dans le parti d'extrême-droite, Bruno Gollnisch, en dresse un portrait plus élogieux – et largement fantasmé ; mais s’en sert surtout pour ‘aligner’ Mélenchon, avant de digresser sur les ‘chrétiens de Syrie’, sa grande marotte du moment. Le 'bras droit' de MLP, Florian Philippot (énarque venu du chevènementisme), a certes affirmé (sur Twitter) que Chávez "c'était d'abord une volonté, un courage"... mais il n'est lui-même plus vraiment en odeur de sainteté au sein du FN, qu'il est accusé de 'gauchiser', et encore moins à la droite de celui-ci (le spectre des 'années Soral' flotte encore sur la vieille garde frontiste). Novopress (Bloc identitaire) est en revanche extrêmement critique (critiques rejoignant, d’ailleurs, en partie celles des anti-chavistes d’extrême-gauche…) ; tandis que le site ‘occidentaliste’ et islamophobe Euro-reconquista n’a pas réagi au décès (ni aux propos du Lurel), mais a déjà eu l’occasion de critiquer très violemment le comandante ‘bolivarien’ (la ligne de ce site reflète, très largement, la pensée de l’immense majorité du ‘peuple d’extrême-droite’ hexagonal). Bernard Antony (Chrétienté-Solidarité, extrême-droite nationale-catholique) ironise sur la 'pratique marxiste des momifications' (Chávez devrait être embaumé...), ce qui ne laisse pas supposer (si Chávez est un 'révolutionnaire marxiste' selon lui) une grande sympathie. Ni l'Union de la Droite Nationale, ni ses composantes (NDP, MNR et Parti de la France, dissidences du FN nettement plus maurassiennes et 'occidentalistes') n'ont réagi à la nouvelle. Synthèse Nationale (proche de l'UDN) présente deux analyses, l'une 'NR' (évidemment) fana-chaviste, l'autre d'un membre de la NDP, beaucoup plus critique. Comme chacun-e peut le constater, Chávez était donc loin de faire l’unanimité dans la mouvance fasciste, la ‘droite radicale’ et autres ‘néogaullistes’ de tout poil (la quasi-totalité de la 'droite radicale' et de l’extrême-droite se réfère aujourd'hui plus ou moins à De Gaulle, même si certains lui reprochent encore la ‘trahison algérienne’)... contrairement à ce que prétendent le ‘p’c’mlm’ et ses satellites gauchistes internationaux. Voilà une autre contre-vérité factuelle absolue...

    Et voilà... ça ne devait pas être 'kilométrique'... et ça a fini encore une fois par l'être !

     


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  • communisme.jpgUn nouvel article du site 'Voie Lactée' présente, encore une fois (c'est bien là le mérite essentiel, pour ne pas dire le seul, de ce groupe), une 'matière à débat' extrêmement intéressante pour la construction de la conception communiste du monde à laquelle nous voulons contribuer. La question posée est, synthétiquement : le rôle des communistes, avant-garde la plus consciente et organisée du prolétariat révolutionnaire, est-elle d'impulser, d'animer, de diriger le 'mouvement historique réel' de l'humanité vers le communisme - mouvement qui sans cette direction risque fort de rester emprisonné dans les 'vieux murs' de l'ordre existant, de se limiter au réformisme, voire de tomber dans la réaction ; ou (position de 'Voie Lactée') simplement d'y 'correspondre', de l''accompagner' en s'efforçant d'être toujours du côté du 'nouveau' (ce qui vu leur position sur les questions 'nationales', les 'libérations populaires révolutionnaires' d'Hexagone, n'est pas gagné d'avance...), sachant que pour eux (ce qui n'est pas tout à fait faux, au demeurant) le mouvement de l'humanité vers le communisme s'inscrit dans le mouvement général de la matière universelle vers ce même horizon. Disons-le clairement : TOUT N'EST PAS FAUX, tout n'est pas à rejeter dans les conceptions développées. Mais, néanmoins, sont exprimés des points de vues qu'une conception marxiste du monde, au regard de plus de 160 ans de mouvement socialiste/communiste, ne peut que rejeter catégoriquement - ils admettent eux-mêmes l'hétérodoxie de leur position, essayant de prendre appui sur Gonzalo du PC du Pérou, mais vont (ce qui n'est pas dans leurs habitudes) jusqu'à critiquer Staline.

    L'affirmation - selon nous erronée - est donc que, finalement, le mouvement réel de l'histoire humaine vers le communisme, lui même petite partie du 'mouvement universel de la matière', n'a 'pas besoin' des révolutionnaires, de l'avant-garde de la classe révolutionnaire 'jusqu'au bout' (aujourd'hui les communistes, avant-garde du prolétariat), pour exister et se développer jusqu'à une nouvelle étape, un nouveau mode de production et une nouvelle société du processus historique : il 'suit son cours' naturellement, le rôle des révolutionnaires est de l''accompagner' en se plaçant toujours 'du bon côté de la barricade'. Ils n'ont pas de rôle d'animation (mise en mouvement), d'impulsion, de dynamisation et de direction dans le processus qui conduit, d'étape en étape, vers le mode de production et le niveau de civilisation supérieur : en ce qui nous concerne, d'étape en étape vers la conquête du pouvoir par le prolétariat à la tête des masses populaires puis, d'étape en étape 'socialiste', de cette prise de pouvoir vers le communisme. Cela, selon eux, parce que 'l'être humain ne pense pas', sa pensée n'est que le 'reflet' d'une étape donnée du processus historique qui 'suit son cours' par lui-même (expression dans la société humaine du mouvement général de l'Univers).

    Cela est selon nous gravement erroné ; c'est une 'pente savonneuse' pouvant conduire aux pires dérives, la moins grave desquelles (peut-être) étant l'attentisme le plus complet ; et nous allons en expliquer les raisons.

    La pensée, certes, procède de la réalité matérielle ; elle est un REFLET de la réalité matérielle et de ses contradictions, et notamment de la contradiction MOTRICE de l'époque considérée : nous avons ainsi la pensée progressiste, porteuse et au service du nouveau ; la pensée révolutionnaire (organisée pour agir au service du nouveau dans un 'changement radical', sans attendre les alternances électorales) ; et puis la pensée COMMUNISTE marxiste (organisée pour agir sur la base d'une compréhension scientifique, matérialiste du monde qui nous entoure), avec sa 'pointe avancée' maoïste ; qui toutes sont en dernière analyse le reflet, plongent leur plus profonde racine dans le caractère de plus en plus social et universel de la production. Et puis de l'autre nous avons la pensée conservatrice ou carrément réactionnaire, défendant l'ancien ; ou la pensée individualiste, 'amorphe' ou 'je-m'en-foutiste', 'pense-qu'à-ma-gueule', dans tous les cas totalement inféodée à l'ordre établi et à l'idéologie dominante ou vautrée dans la 'sous-culture' à destination des masses produite par celle-ci : tout ceci est en dernière analyse le reflet, l'expression de la propriété privée des moyens de production et de l'appropriation privée (inégalitaire) du produit.

    Mais ensuite ? Pour transformer (en bien ou en mal, en victoire du nouveau ou en victoire - temporaire - de l'ancien) la réalité sociale (société humaine) dans laquelle nous vivons, toutes ces pensées doivent s'organiser pour agir et devenir FORCE MATÉRIELLE : "La théorie se change [...] en force matérielle dès qu'elle saisit les masses" (K. Marx ; Critique de la philosophie du droit de Hegel, 1843), sous-entendu les masses conscientes et organisées, décidées à agir. Dans la 'matière non-humaine', les cellules, les molécules, les atomes, bref toutes les composantes diverses et variées (aux 'pôles' de la contradiction motrice) de ladite matière 'utilisent' différents instruments physiques et chimiques pour la transformer. Dans la 'matière (sociale) humaine', l'instrument de la transformation dialectique est la pensée organisée dans l'action... Tout simplement.

    envencible guerra populara 3 montanas'Voie Lactée' nous expose '4 conceptions différentes du maoïsme', la dernière (celle de Gonzalo du Pérou) se subdivisant elle-même en deux interprétations possibles. Mais à chaque fois, nous disent-ils, les personnes décrites (militant-e-s politiques, y compris eux-mêmes) ont 'choisi' ou 'voulu' ceci, 'décidé' ou 'cru pouvoir' cela ('gérer la réalité' ou simplement l''accompagner', 'reconstruire le vieux MRI' ou 'correspondre à la réalité' en soutenant la Guerre populaire en Inde, 'saluant' celle du Pérou, rejetant la trahison au Népal et appelant à une nouvelle conférence MLM, etc. etc.). C'est donc, dans leur raisonnement et dans leurs mots mêmes, qu'il y a bien à un moment donné une 'décision', un 'choix', une 'volonté' de dire et faire ceci ou cela... non ? Les maoïstes du Pérou, d'Inde, des Philippines ou du Népal ont bien, à un moment donné, après analyse concrète de la situation concrète, décidé de lancer la Guerre populaire sous sa forme armée de masse...

    Si l'on voulait toujours 'accompagner la réalité', que de choses ne ferait-on pas ! À vrai dire on ne ferait carrément rien du tout... puisque la 'réalité' que l'on 'accompagne', dans le cas de la société humaine qui nous intéresse, c'est et ce serait toujours l'action des autres. Que le marxisme nous ait toujours enseigné qu'il faut savoir agir 'ni trop tôt, ni trop tard', c'est une chose ; dire qu'il faut tranquillement regarder passer le fleuve du mouvement réel de l'histoire depuis la rive... c'en est une autre !

    À la question "et pourquoi donc, dans la vie politique en général mais même parmi des gens se réclamant en principe de la même chose (le maoïsme), y a-t-il autant de positions différentes et s'opposant ?" ; la réponse est tout simplement que, dans la contradiction motrice de la société humaine, les 'pôles' ne se posent pas 'basiquement', 'monolithiquement' comme 'ancien' et 'nouveau', 'bourgeoisie' et 'prolétariat', 'capitalisme' et 'socialisme-communisme'. La société, surtout une société capitaliste relativement avancée, est beaucoup plus complexe que cela ; les conceptions du monde émises par chaque 'pôle' (caractère social/universel de la production et propriété privée des moyens/appropriation privée inégalitaire du produit) s'entrechoquent et s'interpénètrent, il y a des milliers de petites positions différentes dans l'organisation sociale... Or la pensée n'est pas 'le reflet de la réalité' de manière absolue : elle est le reflet de la réalité telle que perçue depuis une certaine position donnée dans l'organisation sociale. Il y a même, à vrai dire, dans la pensée de chaque individu-e une part de 'nouveau' et une part d''ancien', dans des proportions variables et (bien sûr) luttant entre elles, au sein même de chaque petit cerveau... Si par exemple les avakianistes, qui se prétendent (évidemment) 'maoïstes', mettent en réalité en avant un 'démocratisme radical' petit-bourgeois intellectuel, c'est parce qu'ils/elles sont (les 'têtes pensantes' en tout cas)... des petits-bourgeois intellectuels au sein de l'organisation sociale 'États-Unis d'Amérique' ; en particulier des personnes incrustées dans l'appareil scolaire-universitaire du système ... tout simplement !

    zita 391C'est bien en ayant saisi cette complexité que les marxistes ont toujours expliqué qu'il y a, au milieu des masses populaires (l'ensemble de la population, sauf la classe qui dirige la production et gouverne/exploite la société), une 'classe révolutionnaire jusqu'au bout', le prolétariat qui est la classe totalement plongée dans le caractère social de la production ; mais que, au sein même de cette classe, tout le monde n'a pas le même niveau de conscience, de compréhension du problème-capitalisme et de sa solution révolutionnaire ; tout le monde n'a pas la même VOLONTÉ (eh oui !) de s'organiser et combattre, encore moins de consacrer voire sacrifier sa vie à ce combat ; et donc, cela donne lieu à une AVANT-GARDE RÉVOLUTIONNAIRE que l'on nomme 'Parti' (les éléments les plus conscients, décidés et organisés pour agir de la classe révolutionnaire jusqu'au bout, qui peuvent éventuellement, lorsqu'ils ont longtemps été maintenus dans l'ignorance, 'recruter' des éléments d'autres classes subalternes plus 'instruits').

    Cette volonté résulte de mille et un facteurs ne relevant pas seulement, d'ailleurs, de la 'place dans les rapports de production' (sans quoi tout-e ouvrier/ouvrière ou 'subalterne' au salaire minimum serait communiste...) ni de la 'place dans l'organisation sociale/rapports sociaux' (qui ne se limitent pas aux rapports de production) mais aussi - par bien des aspects - du parcours individuel, du vécu personnel de chaque personne... tout cela constituant le point du vue depuis lequel la personne perçoit la réalité, que sa pensée va refléter. Il en va de même pour les personnes des classes 'intermédiaires' que l'avant-garde prolétarienne va 'recruter' pour l'aider dans son combat : des milliers de facteurs de vécu personnel amèneront ces personnes à se ranger sous la bannière du prolétariat, et non de la bourgeoisie ('de droite' ou 'de gauche'). Évidemment, la 'pensée' au sens où l'entend 'Voie Lactée' - c'est à dire la CONCEPTION/COMPRÉHENSION COMMUNISTE de la réalité dans un pays donné - qui va guider l'action du Parti révolutionnaire dans ce pays n'est pas l’œuvre d'un seul individu : elle est l’œuvre de l'avant-garde, du Parti comme 'intellectuel collectif', ce qui va permettre (à travers la lutte interne idées justes/idées fausses) de 'lisser', d''épurer' cette pensée des imperfections qu'il y a inévitablement dans la pensée d'un individu isolé.

    solidarietàgramigna2Voilà pourquoi, selon nous, les thèses émises dans cet article de 'Voie Lactée' sont TRÈS DANGEREUSES, amenant les forces révolutionnaires vers un rôle 'attentiste critique' et 'contemplatif', à moins que le 'mouvement universel de la matière' dans un pays donné n'atteigne (tout seul, comme un grand ?) une étape où il se 'reflète' dans une 'pensée' qui déclencherait la Guerre populaire... ce que l'on peut, à notre humble avis, attendre longtemps ! On rejoint là, finalement, la critique que font les camarades du (nouveau) Parti communiste italien, dans leur 'bilan-synthèse' de la première vague de la révolution prolétarienne (1917-92), aux Partis communistes 'kominterniens' des pays occidentaux : ces Partis ont généralement attendu (en ce qui les concerne dans le travail politique légal, syndicaliste, électoraliste, d''agitation' par la presse etc.) que 'les conditions soient réunies' pour que la révolution 'éclate'. C'est cela qui les a amenés, toujours selon le (n)PCI, à passer sous la coupe de la 'gauche' bourgeoise, à s''institutionnaliser' et à s''enkyster' dans l'ordre social qu'ils prétendaient (au départ) combattre et abolir ; et ceci a été la base matérielle (pour ces Partis qui n'étaient pas au pouvoir) de l'émergence des idées révisionnistes (anti-marxistes mais habillées de marxisme 'repensé', un beau 'reflet dans la pensée' pour le coup !), émergence qui bien souvent a précédé de beaucoup la prise de pouvoir de Khrouchtchev en URSS.

    Ce que nous enseignent tant l'histoire du marxisme que la lecture marxiste de l'histoire, c'est que - certes - 'là où il y a oppression, il y a résistance' : il y a un mouvement 'mécanique', 'automatique', 'humain' de résistance et de révolte (même si minoritaire dans le groupe considéré) lorsque, dans une organisation sociale donnée, un groupe humain est opprimé par un autre (dans la partie proprement productive de l'organisation sociale, le mode de production, on dira qu'il est exploité). De même, le 'nouveau', les 'idées nouvelles', émergent aussi dans un premier temps 'spontanément' : elles naissent de la 'friction' entre le niveau des forces productives et l'organisation sociale, les rapports de productions, l'ensemble des rapports sociaux et les superstructures idéologiques liées qui systématiquement retardent sur celui-ci. C'est-à-dire, en définitive, de la 'friction' contradictoire des deux 'pôles' de la contradiction motrice de la société d'une époque. Mais voilà ! Pour amener, un jour, ces exploité-e-s/opprimé-e-s à briser définitivement leurs chaînes, pour mettre les 'idées nouvelles' définitivement au pouvoir, ce qui veut dire en définitive changer d'organisation sociale et donc de mode de production, il faut un 'saut' qui ne peut résulter que de l'action CONSCIENTE, volontaire, déterminée, organisée pour agir d'un groupe d'individus, l'avant-garde de la classe révolutionnaire de l'époque.

    Prenons l'exemple de la société féodale : les deux 'pôles' de sa contradiction motrice sont la propriété utile (paysanne ou bourgeoise) des moyens de production et la propriété éminente (seigneuriale, ecclésiastique) sur ces mêmes moyens de production et les producteurs, s'exprimant par toute une ribambelle de taxes, redevances, péages, 'travail volé' par la corvée etc. Au sein même de la société féodale va émerger et se développer le capitalisme, urbain et rural, sur la base de la propriété utile des moyens de production, ceci dès le 11e siècle et jusqu'au 18e. Ce nouveau mode de production 'enfermé' dans le mode de production féodal, et le niveau des forces productives qu'il développe comme jamais auparavant dans l'histoire, vont se heurter à la propriété éminente seigneuriale et à l'organisation sociale, à l'ensemble des rapports sociaux qu'elle sous-tend. Ceci va engendrer des Assassinat Etienne Marcel'idées nouvelles' en trois vagues : 1/ communalisme et monarchisme : le bourgeoisie des villes va chercher à arracher sa 'franchise' (liberté) à l'autorité seigneuriale, les paysans un minimum aisés vont aussi essayer de s'en affranchir ; les uns et les autres vont appuyer une dynastie, suzeraine 'lointaine', dans sa lutte contre ses vassaux féodaux (ducs, comtes et autres princes-évêques), 'suzerains immédiats' qui les oppriment. Ceci débouchera sur le 'premier absolutisme' (de Philippe Auguste à Louis XI) et les États modernes. Les nations font leur apparition dans ce contexte, le monarque en réunit généralement plusieurs sous son autorité : d'un point de vue populaire il les opprime toutes ; mais d'un point de vue bourgeois et paysan aisé il en soumet et opprime certaines mais en 'libère' beaucoup du 'suzerain immédiat' ou d'un autre 'suzerain lointain' dont ces classes ne voulaient pas (ou plus). L'avant-garde est constituée par les 'jurandes', les assemblées bourgeoises qui se mettent en place dans les villes, et les 'bourgeois de Cour' qui ont 'l'oreille' du souverain (les paysans sont moins organisés). 2/ Réforme protestante et humanisme non-protestant (16e siècle, première moitié du 17e), expression d'un nouveau 'bond' des forces productives capitalistes ; Guerres de Religion et (tentative de) Contre-réforme débouchant sur (déjà) un certain nombre de républiques ou des monarchies parlementaires bourgeoises (Angleterre, Hollande, cantons suisses), et ailleurs sur le 'second absolutisme', l''Ancien régime' des livres d'histoire. L'avant-garde est ici sous le drapeau religieux de la Réforme, ou rangée ME0000065074 3derrière les intellectuels humanistes. 3/ Lumières et révolutions bourgeoises proprement dites, qui généralisent à l'Europe et à l'Amérique du Nord les républiques et les monarchies parlementaires bourgeoises (1750-1850). Les dernières survivances féodales sont balayées avec l'absolutisme devenu inutile et obsolète. Les forces cléricales sont plus ou moins maintenues selon les besoins d'encadrement des masses, mais dans tous les cas amoindries. L'avant-garde est ici les philosophes 'éclairés', puis les 'sociétés' telles que la franc-maçonnerie et enfin les 'clubs' de révolutionnaires bourgeois (de Mirabeau à La Fayette, de Robespierre à Danton).

    À chaque étape, en tout cas, nous voyons bien que la résistance (des propriétaires 'utiles' contre les propriétaires 'éminents') et les 'idées nouvelles' n'auraient pas pu s'imposer,  imposer une nouvelle organisation sociale, sans l'action consciente et décidée d'une avant-garde de classe, 'analysant concrètement la situation concrète' mais ne se contentant pas de 'refléter' et d''accompagner' passivement le 'mouvement de la matière' (des forces productives avancées contre les rapports sociaux arriérés).

    Il en va exactement de même, aujourd'hui, pour le processus de la révolution prolétarienne mondiale. La 'marche au communisme' n'est effectivement pas un 'choix' purement subjectif (comme le prétendent les avakianistes) : elle est le sens 'naturel' (matérialiste) de l'histoire, le débouché 'obligé' de toute l'histoire humaine depuis la sortie de la préhistoire, la seule autre alternative étant (peut-être) la destruction de l'humanité – en tout cas de la civilisation (le ‘scénario Mad Max’). Mais elle a 'besoin', pour exister, d'une pensée humaine consciente, systématisée et organisée en intellectuel collectif, 'reflétant' la réalité et ses contradictions (devenues insoutenables) d'un point de vue de classe mais ensuite s'organisant pour agir, sans quoi aucune transformation de la réalité n'est possible. Et cet intellectuel collectif est constitué de pensées individuelles qui n'ont, certes, pas 'choisi' au sens idéaliste de penser ainsi ('touchées par le Saint-Esprit', 'éclairées par les Lumières de la Raison' etc.) mais ont vécu dans la réalité matérielle et ses contradictions, analysé cette réalité et ensuite synthétisé ('reflété') cela, en s'affranchissant (par mille et un facteurs) des 'vieux murs' de l'idéologie dominante, dans une théorie révolutionnaire.

    L’histoire humaine ‘marche’ objectivement vers le communisme (l’alternative ‘retombée dans la barbarie’ est en ‘éternel’ débat dans le mouvement communiste, nous ne lancerons pas ce débat ici) ; la pensée humaine (avancée ou arriérée, révolutionnaire ou réactionnaire) ‘reflète’ les différentes étapes de ce processus historique et les contradictions qui les animent… mais pour avancer et notamment pour effectuer les ‘grands sauts’ historiques (changement radical de classe dominante, de mode de production, d’organisation sociale et de civilisation) le processus a besoin d’une pensée humaine ACTIVE et agissante, convergence organisée d’une multitude de pensées individuelles (progressistes et révolutionnaires bien sûr) ‘reflétant’ la réalité historique concrète chacune de son point de vue et à sa manière ; et non d’une ‘pensée’ contemplative ‘accompagnant’ et ‘reflétant’ passivement l’époque, le moment historique – qui serait quoi… sinon l’organisation et l’action des autres ?

    C'est tout le 'paradoxe' de la chose, (presque) digne d'un 'mystère' du dogme chrétien : la pensée n'est que le 'reflet' de la réalité matérielle (sociale) d'une époque et de sa ou ses contradiction(s) fondamentale(s), mais cette réalité a besoin de cette pensée, de ce 'reflet' organisé et agissant (pensée politique et militante) pour se transformer ; ce sont, en quelque sorte, les 'enzymes' de sa transformation. Il en a toujours été ainsi, de tout temps et dans tous les coins du monde.

    [En gros si on veut synthétiser à l'extrême :

    - La barricade est là, ça c'est intangible et indépendant de notre volonté. Le Nouveau d'un côté, l'Ancien de l'autre.

    - Le résultat de la bataille peut être 1000 fois la défaite du Nouveau, mais sera toujours sa victoire à la 1001e, ça aussi c'est intangible ; la variable humaine qui dépend de nous c'est le nombre de défaites d'ici là.

    - Le "libre arbitre" relatif consiste en notre relative "liberté" de choix quant au côté de la barricade où nous nous plaçons (+ nous placer du bon côté, mais caguer le truc et conduire par nos erreurs à sa défaite temporaire). En fait ce n'est pas totalement "libre", c'est juste que ce n'est pas "déterministe grossier" (prolétaire = révolutionnaire par exemple) ; ça dépend de 1000 facteurs du vécu de chacun et dans la majorité des cas ça va être impossible à "expliquer", même par la personne elle-même, autrement que par son "choix" (on perdrait un temps précieux - euphémisme - à essayer d'expliquer au cas par cas les "choix" en ce sens de 7 milliards de personnes, une par une).

    - MAIS à un moment donné aussi, parmi ces facteurs intervient celui de (de la rencontre avec)... l'avant-garde révolutionnaire la plus consciente et son activité ; ensemble d'individus que leurs 1000 facteurs personnels à chacun ont conduits à militer, en avant-garde militante, du bon côté. C'est-à-dire qu'à un moment donné, un ensemble de "choix" mille-factorisés réunis et organisés pour agir ensemble vont eux-mêmes devenir... facteurs de "choix", chez les autres, de les rejoindre du bon côté.

    Ce qui est vrai par contre, c'est qu'il n'y a pas de "libre pensée" (dixit un camarade "les libres penseurs n'ont que trop régné sur le monde, ça commence avec Voltaire, ça finit avec Florent Pagny" LOL !) : il n'y a pas de "liberté" de penser ce que bon nous semble (ou à partir d'un prétendu "libre examen", ou - nouveauté du 21e siècle - en vertu d'un "point de vue de premier concerné" par une oppression, réputé incontestable), il y a la reconnaissance et l'OBÉISSANCE, la soumission à des IDÉES JUSTES (estampillées "justes", certes, après étude du sujet et débat collectif), en principe (dans le cas contraire il faut le détecter et prendre les mesures) incarnées dans une DIRECTION POLITIQUE (une "jefatura", oui, quelque part) à laquelle donc on obéit tant qu'elle est porteuse de ces idées justes ; et effectivement à certaines époques historiques, cette direction a pu consister en un Être Suprême appelé Dieu, et ses "ministres" sur terre (lire notre position sur la question des religions : reflexions-sur-les-religions).]

    stalineConcernant la critique émise à l'encontre de Staline, elle rejoint globalement le point de vue de Servir le Peuple sur la direction soviétique de cette époque-là : les plus graves dérives n'ont pas été des dérives 'thermidoriennes', de droite, contrairement à ce qu'affirment les trotskystes ; mais au contraire des dérives 'de gauche', ultra-volontaristes et subjectivistes, cherchant à faire rentrer ('au forceps' si besoin) la réalité matérielle ('Voie Lactée' prend l'exemple de la nature, mais la société soviétique n'était pas en reste) dans la conception que la direction du PCbUS avait de la société socialiste en marche vers le communisme. Il suffit d'avoir étudié, même superficiellement, les thèses de Trotsky pour s'apercevoir qu'elles étaient ENCORE PLUS subjectivistes, ultra-volontaristes et irréalistes : mépris du caractère encore très majoritairement rural et arriéré de l'URSS ; négation du fait (et controverse avec Lénine sur ce point) que le jeune État révolutionnaire 'populaire' ne soit pas 'parfait' et puisse entrer en contradiction avec le prolétariat ouvrier proprement dit, celui-ci ayant donc besoin de ses 'conseils' et de ses syndicats pour se défendre, au besoin contre l’État et les cadres de la production eux-mêmes (Trotsky voulait faire des syndicats des outils d'encadrement militaro-bureaucratique de la production) ; refus de comprendre la 'lenteur objective' d'un processus révolutionnaire prolétarien, qui ne peut certainement pas embraser le monde, ni même un continent entier, en quelques années, etc. etc. Et lorsque l'on voit la 'social-démocratie radicale' qu'est devenu le trotskysme aujourd'hui, cela rejoint totalement l'affirmation de 'Voie Lactée' (mais qu'ils feraient bien de méditer pour eux-mêmes...) : la 'phrase d'ultra-gauche', l''ultra-radicalité', le 'super-révolutionnarisme' finissent toujours, face au 'mur du réel', par aller s'échouer dans le marécage de l'opportunisme réformiste.

    Cependant, 'Voie LURSS-LENINE_et_STALINE_1933_Gramota-total.jpgactée' ne va pas au fond de la critique de ces erreurs de Staline : le fond c'est-à-dire la conception, nullement 'stalinienne' d'ailleurs, mais généralisée dans le marxisme-léninisme 'kominternien', selon laquelle sous le socialisme (la transition du capitalisme au communisme) la contradiction principale de la société est entre le caractère très avancé du système politique mis en place par le Parti, et le caractère encore très arriéré des forces productives et (donc) de tous les rapports sociaux, des conceptions, de la culture populaire etc. liés à ce niveau des forces productives. 'Donc', la tâche principale que l’État révolutionnaire doit confier à la société est de 'produire, produire et encore produire' et, 's'il vous plaît', faire suivre au pas de course les rapports sociaux, conceptions etc... Sauf que (l'on s'en aperçoit très vite), ceux et celles-ci ne 'suivent' pas ; au contraire, se développent et se renforcent des rapports sociaux qui, jour après jour, préparent le terrain à la prise de pouvoir révisionniste (restauratrice du capitalisme à travers un processus plus ou moins long). Tout simplement parce qu'en dernière analyse les rapports sociaux d'une société dérivent (fut-ce en 'retardant' un peu) des RAPPORTS DE PRODUCTION, et, si la production augmentait effectivement dans des proportions considérables (équivalentes sur 20 ans aux révolutions industrielle 'françaises' ou 'britanniques' sur trois quarts de siècle), les rapports de production restaient... profondément arriérés.

    L'usine ou le sovkhoze pouvaient bien être propriétés de l’État, lui-même (officiellement) 'propriété' de la classe ouvrière et des paysans, mais il y avait toujours des chefs, des cadres et des exécutants, des dirigeants et des dirigés, des 'qui savent' et des 'qui écoutent (et font ce qu'on leur dit)', des intellectuels et des manuels, des villes et des campagnes, des centres et des périphéries, une nation majoritaire et dominante (les Russes) et des nations minoritaires et dominées (Ukrainiens, Baltes, Caucasiens, Sibériens, Centre-asiatiques), etc. etc. ; tout cela agrémenté, évidemment, d'avantages matériels faisant se dire, aux 'avantagé-e-s', "et pourquoi pas le capitalisme... tout simplement ?" (ou un 'socialisme' plus 'souple', mettant moins de limites à leurs privilèges...).

    Ainsi fut, à travers un processus allant de la mort de Staline au 'baisser de drapeau' final de 1991, rétabli le capitalisme en URSS ; et c'est précisément ce que Mao, avec la Révolution culturelle, et les maoïstes après lui ont compris et combattu, portant le marxisme-léninisme à un niveau supérieur : le marxisme-léninisme-maoïsme. Servir le Peuple, et d'autres camarades comme Sheisau Sorelh, font globalement leur l'affirmation du TKP/ML (maoïstes de l’État turc), dans un document du milieu des années 1990, repris à l'époque par la revue 'Front social' (ancêtre de 'Voie Lactée') : "Si une ligne n'amène pas une société au communisme, si elle n'amène pas à avoir la capacité de résoudre les contradictions existantes en faveur des travailleurs, si elle ne minimise pas le besoin de l’État et du Parti afin que les travailleurs deviennent les maîtres, et si elle n'est pas capable de distribuer le pouvoir dans la société sur la route vers le communisme, alors il y a un problème. Être au pouvoir est un instrument pour Tikkomobiliser les masses travailleuses vers le communisme. Ici, l'importance de la question de la "révolution socialiste" devient plus apparente. Le pouvoir prolétaire n'est pas le monopole du Parti, il est la force guidant par la gestion de la direction du Parti, et c'est le soutien de ce pouvoir par les masses travailleuses. Les travailleurs ne peuvent pas être privés du contrôle de la société, du droit à se révolter contre l'injustice, quel qu'en soit le prétexte ; ils ne peuvent pas être privés de leur droit à la continuation de la révolution".

    Voilà donc les critiques que nous émettrons quant aux conceptions développées dans cet article. D'autant plus que, concernant 'Voie Lactée', il nous semble percevoir en quoi consiste leur 'correspondance à la réalité' : le monde, nous disent-ils, et les sociétés occidentales en particulier, sous l'effet de la crise générale terminale du capitalisme, s'enfoncent inexorablement dans la barbarie... une situation proche, finalement, de la décadence du Bas-Empire romain, préfigurant les ‘invasions barbares’ ; et eux font leur site, se posent dans 'l'attente critique' et finalement en 'petits gardiens de la civilisation', soit finalement… dans la position de l’Église à cette époque, dans les siècles précédant et suivant la chute de l’Empire.

    otan-strasbourg-anti09Disons-le clairement : telle n'est pas notre conception de l'engagement communiste. Nous voulons élever au plus haut possible notre compréhension communiste du monde, nous organiser sur cette base et AGIR ; nous voulons être une FORCE MATÉRIELLE de transformation de cette réalité pourrissante qui nous entoure. Le capitalisme, oui, est désormais condamné à sombrer jour après jour dans toujours plus de barbarie et de souffrances atroces pour l'humanité ; l'époque (de la fin du Moyen-Âge jusqu'au milieu du 19e siècle) où ses exactions s'accompagnaient encore de réels progrès de bien-être et de civilisation pour les masses est définitivement révolue. Mais nous VOULONS, et nous CROYONS POUVOIR réduire et abréger au maximum ces souffrances pour le genre humain (et l'écosystème terrestre en général). Telle est la 'fibre', la 'palpitation' de notre engagement révolutionnaire auquel nous sommes prêt-e-s à consacrer toute notre existence.

    Sur la sacralisation métaphysique de telle ou telle 'pensée' de grand révolutionnaire historique (qu'elle ait acquis une portée universelle et soit devenue un '-isme', ou qu'elle ne soit valable que pour un pays donné), il est intéressant de lire ceci (traduction d'un article MLM nord-américain) :

    http://servirlepeupleservirlepeuple.eklablog.com/marxisme-au-dela-de-marx-leninisme-au-dela-de-lenine-maoisme-au-dela-d-a117830876


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  • Ces réflexions ont été émises dans le cadre d’un débat sur l’intervention impérialiste BBR au Mali, sur le Forum communiste. Un débat d’un grand intérêt pour la conception et la compréhension communiste du monde qui nous entoure, car, depuis le début de cette ‘actualité’, l’on voit le mouvement communiste et les progressistes, en particulier d’Hexagone, ‘perturbés’ par la nature de l’’ennemi’ djihadiste (ils ne l’étaient et ne le sont toujours pas du tout, en revanche, par la nature des régimes de Kadhafi et Assad…), sans pouvoir en même temps, idéologiquement, soutenir l’intervention de l’impérialisme BBR (le ‘nôtre’, pour nous communistes d’Hexagone), bien que certains éléments – comme Samir Amin – ‘sautent le pas’ du soutien ‘sans illusions’ à l’intervention… Tout cela amène une grande confusion, des tentatives alambiquées d’explication de la situation ; des thèses conspirationnistes servant le fascisme (les ‘islamistes’ seraient ‘mis là’ par l’impérialisme pour ensuite ‘justifier’ une intervention, comme si l’impérialisme BBR avait besoin d’une intervention dans un pays qui est sa néo-colonie totale depuis sa pseudo ‘indépendance’ en 1960 ; ou alors, ils seraient ‘mis là’ par l’impérialisme US et ses ‘valets’ du Golfe et, dans ce sens, l’intervention BBR serait ‘progressiste’ – position d’Amin) ; ou des thèses ‘droit-internationalistes’ servant le libéral-démocratisme ou le social-libéralisme bourgeois (‘il faut faire intervenir l’ONU’ ou ‘une force régionale africaine’, comme si les pays africains étaient autre chose que des protectorats de l’impérialisme BBR ou du bloc impérialiste anglo-saxon, et comme si l’ONU était autre chose qu’un ‘cache-sexe’ pour les interventions d’un bloc impérialiste contre un autre ou contre un régime ‘voyou’ généralement du bloc impérialiste anglo-saxon/US, d’où les frictions, en 1994 au Rwanda, entre les ‘ONUsiens’ pilotés par l’impérialisme US donc ‘pro-tutsis’ et la force BBR ‘Turquoise’ pro-hutu…) : toutes choses dont n’a absolument pas besoin le mouvement communiste et le camp progressiste par les temps qui courent. Il faut donc enfiler nos ‘lunettes marxistes’ et, à travers elle, offrir aux masses avancées une lecture scientifique (matérialiste dialectique/historique, marxiste) de la situation. 

    Mali.gifCe qu'il se passe tout simplement, au Nord-Mali comme ailleurs dans le monde, c'est que quand des devises, et donc le capitalisme (c’est-à-dire le mécanisme argent -> marchandise -> + d'argent) font massivement et brutalement irruption dans une contrée donnée... l’on se retrouve, finalement, dans une situation comparable à celle de l'Europe lorsque cela lui est arrivé ; avec, notamment, le surgissement de 'mystiques religieuses' de type 'puritaines' (expression du petit capitalisme naissant), comme l’est typiquement le salafisme/ wahhabisme, ou alors de type 'niveleuses' ou ‘luddites’  – réactions ‘anti-modernes’, passéistes de la société traditionnelle, 'immémoriale' et 'holiste' contre la déstructuration du 'choc de la modernité'. Nous avons nous-mêmes connu plusieurs fois, en Europe, ce type de 'choc de modernité' : avec l'affirmation du capitalisme et l'entrée dans l'époque (justement) moderne (14e-17e siècles grosso modo), avec d’un côté le calvinisme ou le puritanisme d’un Cromwell (ou d’un Savonarole, avant même la Réforme), expression des nouvelles couches (petites et moyennes) capitalistes émergentes, et de l’autre des courants ‘mystiques’, égalitaristes et ‘anti-modernes’ tels les hussites de Tchéquie, les anabaptistes de la ‘guerre des paysans’ en Allemagne (Thomas Münzer), les lollards anglais du 14e siècle ou les niveleurs et les diggers du 17e (la liste serait longue) ;  puis, entre 1750 et 1850, avec les révolutions bourgeoises et (conséquence) la révolution industrielle (avec tous les 'socialismes féodaux', le luddisme et autres proudhonneries antisémites) ; et même, peut-on dire, depuis le milieu du siècle dernier, avec les Trente Glorieuses (qui ont atténué la chose par des progrès palpables de bien-être et de civilisation) et la 'mondialisation' – et d’ailleurs, comme l'antisémitisme lors du 'choc' précédent, l'arabo/islamophobie est l'une des multiples expressions (avec la crainte du ‘péril jaune’ chinois/asiatique, etc. etc.) de la réaction ‘passéiste’ des masses peu avancées face à ce 'choc', face à l'importance prise par les pays arabes/musulmans dans l'économie et l'actualité politique mondiale – ensuite de quoi, ces idées 'spontanées' du ‘milieu de la société’ vont être reprises par la propagande impérialiste pour mobiliser dans ses guerres, car les vieux impérialismes ‘installés’ non plus n’apprécient guère ces ‘émergences’ de nouveaux centres capitalistes dans l’arène internationale.

    Le problème (pour revenir au Nord-Mali, mais ce pourrait être l'Afghanistan, la Somalie etc.), c'est qu'à l'époque de l'impérialisme et (donc) de la révolution prolétarienne, il est possible de 'sauter l'étape'... mais pour cela, il faut un Parti révolutionnaire prolétarien et dans ces pays, il n'y en a pas. Donc, 'mécaniquement', il va se passer ce qui est expliqué plus haut : ce sont les forces ‘puritaines’ petites-capitalistes ou les forces ‘luddites’ anti-modernes qui vont émerger en première ligne. 

    ansaru.jpegLa problématique est donc, bel et bien, celle de l’absence d’un mouvement communiste et même d’un simple camp progressiste ‘solide’, audible et ancré dans les masses de ces parties du monde (pas seulement quelques cercles d’intellectuels urbains, cela il y en a dans tous les pays) ; ce qu’explique fort bien l’article du (n)PCI La révolution démocratique anti-impérialiste des pays arabes et musulmans.

    Quant aux 'kadhafisteries' et autres 'assaderies', aux nationalismes bourgeois 'progressistes', ce sont des mascarades dont se revêtent des gangs militaro-tribaux de 'bas étage' (clan Kadhafi, clans Assad et Tlass, 'officiers libres' de Nasser et Neguib etc.), pour mener la pseudo 'révolution' dont ils ont besoin pour se hisser en haut de l'’échelle’ (jusque-là bloquée) de l’appareil oligarchique d’État. Ce sont des foutaises et leur seul effet, sauf s'il y a une véritable opposition progressiste et marxiste, mais généralement il n'y en que trop peu (c'est l'opportunisme qui règne, dans les PC 'officiels' en tout cas), c'est d'engendrer plus d''islamisme' en réaction (car les masses sont peut-être dupes un moment, mais pas sur des générations). Quelque part, si l'on part de la thèse maoïste du capitalisme bureaucratique, l'on peut dire que les régimes des pays musulmans (qu'ils soient monarchiques ou républicains 'laïcs', pro-occidentaux ou 'anti-impérialistes' tournés vers la Russie et la Chine) représentent le capitalisme bureaucratique, le capitalisme 'par en haut', impulsé par et au service des monopoles impérialistes (de l'Ouest comme du 'nouvel Est') ; tandis que l''islamisme' avec son éthique 'calviniste' représente le 'capitalisme par en bas', le capitalisme qui émerge spontanément de la vie sociale des masses (avec les afflux de devises etc.), mais sans l'humanisme qui a pu accompagner (encore que très relativement) cette émergence en Europe, entre la 'Renaissance médiévale' (11e-12e siècles) et le 17e siècle. Un capitalisme 'spontané' 'd'en bas' qui, contrairement au capitalisme bureaucratique-comprador 'd'en haut', ne va pas permettre au surproduit (plus-value 'sur-accaparée') de 'remonter' correctement jusqu'aux monopoles impérialistes - qui le combattent donc en conséquence, dans leur perspective de domination totale des économies du 'Sud'.

    De la même manière, les interventions impérialistes, lorsqu’elles ne sont pas carrément les ALLIÉES (de circonstance) des forces islamistes, comme en Libye ou en Syrie (ou dans les années 1980 en Afghanistan), vont dans tous les cas renforcer l’’islamisme’ en réaction, puisque pour le coup l’irruption ‘occidentale’ et ‘moderne’ va se faire particulièrement brutale.

    ansar-dine-combattantsDonc voilà... D'un point de vue idéologique, nous devons rejeter le confusionnisme et donc, nous ne pouvons absolument pas coller une étiquette 'progressiste' sur ces forces (une force progressiste, d'un point de vue marxiste, ce serait 1°/ des progrès de bien-être/civilisation réels pour les masses et 2°/ une force qui reconnaît quelque valeur au marxisme, et dans tous les cas ne persécute pas, voire même favorise objectivement le développement du mouvement communiste). Elles ne le sont nullement… comme ne le sont pas plus, par ailleurs, les régimes de gangs tribaux militaro-bureaucratiques à la Kadhafi ou Assad. Mais, toujours d'un point de vue idéologique, on ne peut pas souhaiter la victoire de l'impérialisme, SURTOUT PAS du nôtre... donc ni-ni.

    Et alors ? Cela veut-il dire qu'il n'y a 'rien à faire' ? BIEN SÛR QUE NON ; bien sûr qu'il y a quelque chose à faire : il y a à EXPLIQUER, au maximum de nos capacités, tout cela aux masses ; car LA VÉRITÉ SEULE EST TOUJOURS RÉVOLUTIONNAIRE (la vérité du monde compris à travers la seule ‘grille de lecture’ scientifique qui soit, la ‘grille de lecture’ marxiste) ; et la version des médias de l'impérialisme comme de la propagande islamiste (beaucoup plus lue qu’on ne le croit), ou encore des ‘complotistes’ fascisants, est très loin de la vérité. Le rôle d’un média communiste, face à chaque ‘actualité’ servie par les médias dominants, devrait d’ailleurs être en premier lieu celui-là : offrir aux masses une lecture marxiste de l’évènement en question.

    Telle est notre tâche face à une situation comme celle du Sahel aujourd'hui, et elle n'est pas mince.

    ****************************************************

    Lire aussi (analyse très proche de la nôtre, par Mohamed Tahar Bensaada de l'Institut Frantz Fanon) :

    https://www.investigaction.net/fr/Les-mensonges-de-la-propagande-de/

    Télécharger « Les mensonges de la propagande de guerre française au Mali _ Investig’Action.pdf »


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    165192 144270088959492 100001295066667 207790 6371168 nNous sommes en 2013. Il y a 40 ans, de l'autre côté de l'Atlantique et de l'Équateur terrestre, le continent sud-américain était le théâtre d’événements aussi glorieux - héroïques luttes populaires révolutionnaires - que tragiques - leur extermination par les fascistes à la solde de l'impérialisme. Le 11 mars 1973, sous la pressions des mouvements populaires, la junte fasciste national-catholique de la (sans rire) "Révolution argentine" (1966-73) avait fini par opérer un 'repli stratégique' ou ouvrir la 'soupape de sécurité' en organisant des élections bourgeoises libres. Celles-ci virent la victoire d'un représentant de l'aile gauche du mouvement péroniste (Front justicialiste de Libération, FREJULI), Hector Cámpora. À peine élu, celui-ci libère les prisonniers politiques (près de 500), rétablit les relations diplomatiques et commerciales avec Cuba et autorise immédiatement le retour de l'ultra-populaire général Perón (point clé de sa campagne) et de son entourage, exilés en Espagne, dans une atmosphère de grand espoir et de liesse populaire : ce fut le printemps camporiste. Un "printemps en automne" (puisque l'Argentine est dans l'hémisphère sud) qui devait s'achever tragiquement sur un long hiver, dès le retour de Perón le 20 juin sur l'aéroport d'Ezeiza, lorsque les escadrons péronistes de droite de López Rega firent feu sur les jeunes 'péronistes de gauche' : l'hiver du 'second péronisme', ouvertement réactionnaire et antipopulaire, qui ouvrira un boulevard au nouveau coup d'État militaire national-catholique de 1976 et à l'une des plus terribles dictatures fascistes du continent [1976-83 ; 30 000 « disparus » (desaparecidos), 15 000 fusillés, 9 000 prisonniers politiques et 1,5 million d'exilés pour 30 millions d'habitants].

    Quelques mois plus tard encore, le 11 septembre, au Chili voisin, c'est le printemps austral qui devenait à son tour hiver, avec le coup d'État fasciste d'Augusto Pinochet et ses milliers d'assassiné-e-s et de disparu-e-s, tandis que dès le 27 juin, en Uruguay, les militaires plaçaient le gouvernement civil (de droite) sous la tutelle d'un 'Conseil d'État', pour un 'processus de reconstruction nationale' luttant contre la 'subversion' : il y aura des centaines de 'disparu-e-s' et un prisonnier politique pour 450 habitant-e-s... Depuis de nombreuses années déjà, le Brésil (1964), la Bolivie (1964 aussi, avec une parenthèse 'progressiste' en 1970-71) et le Paraguay (1954) vivaient sous de similaires régimes militaro-fascistes au service de l'impérialisme US ; au Venezuela et en Colombie, les ailes gauche et droite de la politicaille civile s'étaient partagées le pouvoir pour écraser pareillement les guérillas révolutionnaires et les mouvements sociaux ; tandis qu'au Pérou et en Équateur, des juntes militaires 'de gauche' trahissaient les luttes du peuple. Le héros sublime, le 'Christ rouge' continental Ernesto 'Che' Guevara, était lui même tombé au combat révolutionnaire, en Bolivie, le 9 octobre 1967. 

    2013 est donc l'occasion, pour Servir le Peuple, de publier ce document d'une inestimable valeur historique ; jamais traduit en français à ce jour : la déclaration "Aux peuples d'Amérique latine" (1er novembre 1974) de la Junte de Coordination Révolutionnaire, 'petite internationale' formée par les forces révolutionnaires avancées d'Argentine (PRT-ERP), du Chili (MIR), d'Uruguay (Tupamaros) et de Bolivie (ELN fondé par le Che lui-même) pour coordonner la lutte révolutionnaire anti-oligarchique et anti-impérialiste dans le 'cône Sud' du continent, au moment où les dictatures fascistes pro-impérialistes coordonnaient elles-mêmes leurs efforts dans le sinistre 'Plan Condor'.

    Une déclaration, bien sûr, et c'est AUSSI sa valeur historique, pétrie de toutes les limites de conception révolutionnaire du monde de la première vague mondiale des révolutions prolétariennes (1917-92) ; notamment - bien sûr - celles du guévarisme. Le PRT-ERP prônait même de dépasser ces limites par un 'plein retour au léninisme', à travers la fusion des apports théoriques de Mao Zedong et de... Trotsky, ainsi que du Che, d'Hô Chi Minh, de Mariátegui ou encore Gramsci, à la lumière de l'expérience 'des révolutions chinoise, vietnamienne et cubaine'. Il n'était, bien sûr, et n'est pas plus aujourd'hui question d'un 'plein retour au léninisme', puisque c'est bel et bien dans les limites de la science marxiste à 'l'étape Lénine' (1900-1950) que résident les causes des échecs subis par le mouvement communiste international au siècle dernier ; mais bien de porter le marxisme-léninisme, lui-même développement supérieur du marxisme, à un niveau ENCORE SUPÉRIEUR ; et ce développement supérieur du marxisme-léninisme, nous en disposons aujourd'hui : c'est le marxisme-léninisme-maoïsme (le PRT avait donc partiellement vu juste). Dans ces limites résident aussi, hélas, bel et bien les causes de la défaite et de l'extermination de ces révolutionnaires par les juntes fascistes.

    Mais tout cela, il va de soi, n'enlève rien à l'héroïsme de ces camarades tombé-e-s (pour la plupart) en combattant vaillamment les ennemis du peuple ; et, d'autre part, c'est aussi et seulement en nous APPROPRIANT LE PASSÉ, sans honte ni tiédeur révisio-réformiste, mais aussi sans sectarisme dogmato-gauchiste, que nous pouvons CONSTRUIRE L'AVENIR : défendre, renforcer, arborer, appliquer mais aussi développer (car il n'est pas, selon nous, 'parfait', 'fini') ce maoïsme qui est notre arme de destruction massive contre la dictature du Capital.

    Il faut bien comprendre que le grand reflux stratégique mondial du mouvement révolutionnaire (1975-92) a été aussi rapide que BRUTAL, que la chute a été de très haut. Car à l'inverse, entre 1950 et 1975, la première vague de la révolution mondiale, malgré que l'URSS et ses 'pays frères' d'Europe de l'Est aient déjà entamé leur dégénérescence révisionniste, était à son APOGÉE : 'le fond de l'air était rouge' ; c'est là le fameux 'totalitarisme intellectuel de gauche' contre lequel ferraille la bourgeoisie réactionnaire depuis plus de 30 ans. En revanche, après 1975, tant la gigantesque Guerre populaire du Pérou, guidée par le marxisme-léninisme-maoïsme, que les guérillas marxistes-léninistes ou 'socialistes révolutionnaires' d'Amérique centrale, tant les organisations communistes combattantes italiennes que les petit-e-s GRAPO de l'État espagnol ou les CCC de Belgique, tant les mouvements révolutionnaires de libération du Pays Basque ou d'Irlande que la résistance armée et l'Intifada palestinienne ou encore les luttes du peuple d'Azanie contre le régime fasciste d'apartheid, n'ont malheureusement fait que lutter désespérément contre le courant inexorable qui poussait l'humanité vers l'autoproclamée 'Fin de l'Histoire', vers le triomphe à la romaine du Grand Capital sur les forces qui, durant trois quarts de siècle, avaient ébranlé son ordre établi. Ce n'est que dans les dernières années du siècle, au Népal, aux Philippines, en Colombie (mais là, dans les profondes limites idéologiques du 'révisionnisme armé'), puis dans la décennie suivante en Inde, qu'a pu commencer à se lever l'étendard de la DEUXIÈME VAGUE révolutionnaire mondiale, qui, cette fois-ci, conduira les peuples de la Terre à leur émancipation définitive. Il est donc très important pour nous, communistes révolutionnaires du 21e siècle, maoïstes, sans nous emmurer dans le sectarisme et les a priori du 'chauvinisme d'idéologie', d'étudier, de nous approprier et d'APPRENDRE de ce 'pic' de la révolution mondiale passée, pour faire se lever la nouvelle vague à un niveau - de très loin - supérieur à la première, en espérant que, dans les années 2050 ou 2060, nous redeviendrons poussière avec le sentiment d'une formidable œuvre accomplie.

    Depuis les années 1980, la guerre contre-révolutionnaire déchaînée 30 ans plus tôt par l'impérialisme, avec ses Pinochet, ses Videla, ses Stroessner, ses Banzer, ses Rios Montt et ses D'Aubuisson, a réussi à ramener l'Amérique latine, sacrée au cœur des révolutionnaires du monde entier, à un état de semi-colonialisme effroyable et sans pitié, appelé là-bas 'néolibéralisme', que seuls contestent, dans toutes les limites du réformisme bourgeois, quelques gouvernements depuis la fin des années 1990-début des années 2000 (Brésil, Venezuela, Argentine, Équateur, Bolivie, Uruguay etc.). Si l'impérialisme US a été militairement le maître d’œuvre de cette guerre d'extermination, et le principal bénéficiaire du 'néolibéralisme' qui l'a suivie, TOUS les impérialismes de la planète profitent du pillage et s'engraissent tels des charognards sur le cadavre du continent, Y COMPRIS (très largement) les impérialismes de l'UE, qui profitent, même, des gouvernements 'contestataires' de l'hégémonie US, et Y COMPRIS notre impérialisme BBR. Il est donc de notre DEVOIR INTERNATIONALISTE ('cosmopolite' pour certain-e-s...) d'accorder une grande attention au mouvement révolutionnaire sur le continent latino-américain. Un rôle de l'impérialisme BBR encore aggravé, de sinistre manière, par le fait que la guerre d'extermination contre-révolutionnaire déchaînée contre les peuples et les révolutionnaires des Amériques, entre les années 1960 et 1980, s'est largement appuyée sur l'école française des méthodes 'antisubversives' développées, pendant la guerre de libération algérienne, par les bouchers de l'impérialisme Trinquier, Massu, Bigeard et autres Aussaresses...

    Voici donc la Déclaration de la Junte de Coordination Révolutionnaire du 'cône Sud', du 1er novembre 1974 :  

     

    AUX PEUPLES D'AMÉRIQUE LATINE

    Source

    "C'est la voie du Vietnam qui est la voie que doivent suivre les peuples ; c'est la voie que suivra l'Amérique, avec la caractéristique particulière que les groupes en armes pourront former quelque chose comme des Juntes de Coordination pour rendre plus difficile la tâche répressive de l'impérialisme yankee et faciliter leur propre cause."

    Che Guevara, "Message à la Tricontinentale"

    Le Mouvement de Libération Nationale (Tupamaros) d'Uruguay, le Mouvement de la Gauche Révolutionnaire (MIR) du Chili, l'Armée de Libération Nationale (ELN) de Bolivie et l'Armée Révolutionnaire du Peuple (ERP) d'Argentine cosignent la présente déclaration pour faire connaître aux ouvriers, aux paysans pauvres, aux pauvres de villes, aux étudiants et aux intellectuels, aux peuples indigènes, aux millions de travailleurs exploités de notre souffrante patrie latino-américaine, leur décision de s'unir en un Junte de Coordination Révolutionnaire. Cet important pas en avant est le produit d'une nécessité ressentie ; la nécessité de donner une cohésion à nos peuples dans le domaine de l'organisation, d'unifier les forces révolutionnaires face à l'ennemi impérialiste, de livrer avec plus d'efficacité la lutte politique et idéologique contre le nationalisme bourgeois et le réformisme. Ce pas en avant important est la concrétisation de l'une des principales idées stratégiques du commandant Che Guevara, héros, symbole et précurseur de la Révolution socialiste continentale. C'est aussi un pas significatif qui tend à reprendre la tradition fraternelle de nos peuples, qui surent fraterniser et lutter comme un seul homme contre les oppresseurs du siècle passé, les colonisateurs espagnols.

    NOTRE LUTTE EST ANTI-IMPÉRIALISTE

    combattants-erpLes peuples du monde vivent sous la menace permanente de l'impérialisme le plus agressif, le plus rapace à avoir jamais existé dans l'histoire. Ils ont été témoins, et non avec indifférence, du génocide organisé et dirigé par l'impérialisme yankee contre l'héroïque peuple vietnamien. Dans cette guerre inégale, dont la clameur ne s'est pas encore éteinte, s'est montré sans masque le caractère militariste et sournois de l'impérialisme du Nord. Mais, dans cette guerre, encore une fois et en contrepartie, s'est démontrée la faiblesse de son système et de toute sa puissance militaire, face à un peuple disposé à lutter et décidé à être libre quel qu'en soit le prix. Les peuples latino-américains, depuis le siècle dernier jusqu'à nos jours, ont supporté lourdement le joug colonial ou néocolonial des impérialistes, ils ont subi l'une après l'autre interventions militaires et guerre injustes exécutées ou fomentées, tant par l'armée nord-américaine que par les monopoles supranationaux. Nous avons là la spoliation du Mexique, l'occupation de Puerto Rico, l'intervention de Saint-Domingue, et cette Baie des Cochons et beaucoup d'autres actes belliqueux que notre Amérique n'oubliera ni ne pardonnera jamais. Et nous avons là Shell, Esso ou la Standard Oil, la United Fruit, la ITT, les dollars de M. Rockefeller et de M. Ford. Nous avons là la CIA, qui avec Papy Shelton, Mitrione, Siracusa, a laissé des traces indélébiles de la politique dominatrice et arrogante des États-Unis contre le Mouvement populaire et Amérique latine.

    L'AMÉRIQUE LATINE EST EN MARCHE VERS LE SOCIALISME

    418390 1Le 1er janvier 1959, avec la victoire de la Révolution cubaine, commençait la marche finale des peuples latino-américains vers le socialisme, vers la véritable indépendance nationale, vers le bonheur collectif des peuples. La juste et ouverte rébellion des exploitées d'Amérique latine contre un système barbare, néocolonial, capitaliste, imposé depuis la fin du siècle dernier par les impérialismes yankee et européens, qui par la force, la tromperie et la corruption se sont appropriés notre continent. Les lâches bourgeoisies criollas (élites descendant des colons espagnols, NDLR) et leurs armées ne surent pas faire honneur au legs révolutionnaire libérationiste de la glorieuse lutte anticoloniale de nos peuples, qui, conduits par des héros comme Bolívar, San Martín, Artigas et tant d'autres, conquirent leur indépendance, l'égalité et la liberté. Les classes dominantes, défendant de mesquins intérêts de groupe,s 'unirent aux impérialistes, collaborant avec eux, facilitant leur pénétration économique, livrant progressivement le contrôle de notre économie à la voracité insatiable du capitalisme étranger. La domination économique a engendré le contrôle et la subordination politique et culturelle. Ainsi vit le jour le système capitaliste néocolonial qui exploite, opprime et acculture depuis un siècle les classes laborieuses de notre continent. Depuis le début du siècle, la classe ouvrière a commencé à se lever contre ce système, déployant la peu connue alors bannière du socialisme, unie indissociablement à la bannière de l'indépendance nationale, favorisant le réveil des paysans, des étudiants, de tout ce qu'il y a de sain et de révolutionnaire dans nos peuples.

    mir3L'anarchisme, le socialisme et le communisme, comme mouvements organisés de la classe ouvrière, prirent la tête avec énergie et héroïsme de larges mobilisations de masse, jalons ineffaçables de la lutte révolutionnaire. Le légendaire leader nicaraguayen Augusto César Sandino, ouvrier métallurgiste, dirigea dans son petit pays l'une des plus héroïques de ces batailles, quand son armée de guérilla mit en échec et défit les troupes interventionnistes nord-américaines en 1932. Ce fut dans cette décennie 1930 que nos peuples déclenchèrent dans tout le continent une formidable poussée de masse qui bouscula la domination néocoloniale homogénéisée par l'impérialisme yankee, ennemi n°1 de tous les peuples du monde. Mais cette formidable mobilisation révolutionnaire de masse ne fut pas couronnée de victoire. L'intervention active, politique et militaire, directe et indirecte de l'impérialisme yankee, ajoutée aux déficiences de l'anarchisme, des courants socialistes et des Partis communistes, furent les causes d'une défaite temporaire.

    José Carlos MariáteguiLa majorité des Partis communistes, les plus conscients, conséquents et organisés de cette époque, tombèrent dans le réformisme. Certains d'entre eux, comme l'héroïque et aguerri Parti communiste salvadorien, subirent de cruelles défaites avec des dizaines de milliers de martyrs. Pour cette raison, la poussée impétueuse des masses dévia de son chemin révolutionnaire et tomba sous l'influence et la direction du nationalisme bourgeois, voie de garage de la révolution, ressort intelligent et démagogique que trouvent les classes dominantes pour prolonger par la tromperie l'existence du système capitaliste néocolonial. À partir de la formidable victoire du peuple cubain, qui, sous la conduite habile et clairvoyante de Fidel Castro et d'un groupe de dirigeants marxistes-léninistes, parvint à défaire l'armée de Batista et à établir dans l'île de Cuba, sous le nez même de l'impérialisme, le premier État socialiste latino-américain, les peuples du continent se virent renforcés dans leur foi révolutionnaire, et débutèrent une nouvelle et profonde mobilisation collective. Avec réussites et erreurs, nos peuples et leurs avant-gardes se lancèrent avec décision dans la lutte anti-impérialiste pour le socialisme. Le décennie 1960 vit se succéder de manière ininterrompue de grandes luttes populaires, de violents combats guérilleros, de puissantes insurrections de masse. La Guerre d'Avril (1965), insurrection générale du peuple dominicain, obligea à l'intervention directe de l'impérialisme yankee qui dut envoyer 30.000 soldats pour écraser dans le sang ce magnifique soulèvement.

    aniv-che03La figure légendaire du commandant Ernesto Guevara personnifia, symbolisa toute cette époque de luttes et sa mort héroïque, comme sa vie exemplaire et sa claire conception stratégique marxiste-léniniste, ouvre et éclaire la voie de la nouvelle vague révolutionnaire de nos peuples, qui grandit jour après jour en puissance et en consistance, jaillissant des usines, des villages, des campagnes et des villes, et se déploie irrésistiblement sur tout le continent. C'est le réveil définitif de nos peuples qui fait se lever des millions de travailleurs et prend inexorablement le chemin de la seconde indépendance, de la libération nationale et sociale définitive, de la définitive élimination de l'injuste système capitaliste et de l'établissement du socialisme révolutionnaire.

    LA LUTTE POUR LA DIRECTION DU MOUVEMENT DE MASSE

    pueblo-bandera-mirMais la voie révolutionnaire n'est ni facile ni simple. Nous ne devons pas seulement affronter la force économique et militaire barbare de l'impérialisme. Des ennemis et des dangers plus subtils guettent à chaque instant les forces révolutionnaires, dans leurs efforts de livrer effectivement, victorieusement, la lutte anti-impérialiste. Aujourd'hui, étant donnée la situation particulière du processus révolutionnaire continental, nous devons nous référer spécifiquement à deux courants de pensée et d'action, qui conspirent puissamment contre les efforts révolutionnaires des peuples latino-américains. Ce sont : un ennemi, le nationalisme bourgeois ; et une conception erronée dans le camp du peuple, le réformisme. Chacun d'entre eux, parfois étroitement liés, tentent de chevaucher la poussée révolutionnaire de nos peuples, d'en prendre la direction et d'imposer leurs conceptions erronées et intéressées, qui indéfectiblement finiront par contenir et mutiler l'élan révolutionnaire. Pour cette raison, revêt une dimension stratégique la lutte idéologique et politique intransigeante que les révolutionnaires doivent livrer contre ces courants, pour s'imposer à eux, pour gagner ainsi la direction des plus larges masses, pour doter nos peuples d'une direction révolutionnaire conséquente qui nous conduise avec constance, intelligence et effectivité jusqu'à la victoire finale.

    peron12Le nationalisme bourgeois est un courant parrainé par l'impérialisme qui s'appuie sur lui comme diversion démagogique pour détourner et dévier la lutte des peuples, lorsque la violence révolutionnaire perd en efficacité. Son noyau social est constitué par la bourgeoisie pro-impérialiste ou un secteur de celle-ci, qui prétend s'enrichir sans aucune mesure, disputant à l'oligarchie et à la bourgeoisie traditionnelle les faveurs de l'impérialisme, grâce au 'truc' de se présenter comme les pompiers de l'incendie révolutionnaire, par leur influence populaire et leur capacité de négociation face à la mobilisation de masse. Dans sa politique de tromperie, elle endosse un anti-impérialisme verbal et tente de confondre les masses avec sa thèse nationaliste préférée : la troisième voie. Mais en réalité, ils ne sont nullement anti-impérialistes ; ils se soumettent au contraire à de nouvelles et plus subtiles formes de pénétration économique étrangère.

    allendeLe réformisme est, au contraire, un courant qui germe au sein même du peuple travailleur, reflétant la crainte de l'affrontement de la part de secteurs petits-bourgeois ou de l'aristocratie ouvrière. Il se caractérise par refuser fermement en pratique la juste et nécessaire violence révolutionnaire comme méthode fondamentale de lutte pour le pouvoir, abandonnant ainsi la conception marxiste de la lutte des classes. Le réformisme diffuse dans les masses de nocives idées pacifistes et libérales, enjolive la bourgeoisie nationale et les forces armées contre-révolutionnaires avec lesquelles il cherche constamment à s'allier, exagère l'importance de la légalité et du parlementarisme. L'un de ses argumentas favoris, celui de la nécessité d'éviter la violence et de s'allier avec la bourgeoisie et les militaires 'patriotes', en quête d'une voie pacifique qui épargne aux masses des effusions de sang sur le chemin vers le socialisme, est catégoriquement et douloureusement réfuté par les faits. Là où le réformisme a imposé sa politique conciliatrice et pacifiste, les classes ennemies du peuple et leurs forces armées ont exécuté les plus grands massacres contre le peuple. La récente expérience chilienne, avec plus de 20.000 hommes et femmes assassiné-e-s, nous dispense de plus de commentaires.

    santuchoFace au nationalisme bourgeois, au réformisme et à d'autres courants de moindre importance, en lutte idéologique et politique constante avec eux, se dresse le pôle armé, le pôle révolutionnaire qui jour après jour se consolide au sein des masses, accroissant son influence, améliorant sa capacité politique et militaire, devenant toujours plus une option concrète vers l'indépendance nationale et le socialisme. C'est précisément pour contribuer au renforcement de ce pôle révolution à l'échelle continentale, que les quatre organisations signataires de cette déclaration ont décidé de constituer la présente Junte de Coordination Révolutionnaire, autour de laquelle et de chacune de ses organisations nationales, nous appelons à s'organiser et à combattre unie tout l'avant-garde révolutionnaire, ouvrière et populaire, d'Amérique latine. Ceci signifie naturellement que les portes de cette Junte de Coordination Révolutionnaire sont ouvertes aux organisations révolutionnaires des différents pays latino-américains.

    L'EXPÉRIENCE DE NOS ORGANISATIONS

    ADELANTE-TUPAMAROS20120216Le MLN Tupamaros, le Mouvement de la Gauche révolutionnaire (MIR), l'Armée de libération nationale (ELN) et l'Armée révolutionnaire du Peuple (ERP), au cours de leur lutte patriotique et révolutionnaire, ont peu à peu compris la nécessité de s'unir, ont peu à peu affirmé par leur propre expérience leur conception internationaliste, comprenant que contre l'ennemi impérialiste uni et organisé nous devons opposer la plus solide et étroite unité de nos peuples. Liées par la similitude de nos luttes et de nos lignes, nos quatre organisations ont d'abord établi des liens fraternels, et à travers tout un processus nous sommes passés à un échange d'expériences, à une collaboration mutuelle chaque jour plus active, jusqu'à accomplir aujourd'hui ce pas décisif qui accélère la coordination et la collaboration qui sans le moindre doute fera bénéficier d'une meilleure effectivité pratique la lutte acharnée que livrent nos peuples contre le féroce ennemi commun.

    MIR-victor-toro-80-004Le développement de nos organisations, le renforcement de leur conception et pratique internationaliste, permettra de mieux mettre à profit les potentialités de nos peuples, jusqu'à ériger une puissante force révolutionnaire capable de vaincre définitivement la réaction impérialiste et capitaliste, d'annihiler les forces armées contre-révolutionnaires, d'expulser l'impérialisme yankee et européen du sol latino-américain, pays après pays, et d'initier la construction du socialisme dans chacun de nos pays, pour arriver un jour prochain à la plus complète unité latino-américaine. Atteindre cet objectif sacré ne sera pas facile, la cruauté et la force de l'impérialisme rendra nécessaire, comme l'entrevoyait le commandant Che Guevara, de mener une cruelle et prolongée guerre révolutionnaire qui fera du continent latino-américain le deuxième ou troisième Vietnam du monde. Mais, suivant le glorieux exemple de l'héroïque peuple vietnamien, les travailleurs latino-américains sauront combattre sans relâche, avec toujours plus d'efficacité, déployant dans toute leur intensité les invincibles énergies des masses, et écraser l'impérialisme yankee et ses agents, conquérant ainsi notre félicité et contribuant puissamment à la destruction définitive de l'ennemi principal de la classe ouvrière internationale, du socialisme, et de tous les peuples du monde.

    NOTRE PROGRAMME

    tupamarosNous sommes unis par la compréhension du fait qu'il n'y a pas d'autre stratégie viable en Amérique latine que la stratégie de la guerre révolutionnaire. Que cette guerre révolutionnaire est un processus complexe de lutte de masses, armé et non armé, pacifique et violent, où toutes les formes de lutte se développent harmonieusement en convergeant autour de l'axe directeur de la lutte armée. Que pour le développement victorieux de tout le processus de guerre révolutionnaire, il est nécessaire de mobiliser toutes les masses du peuple sous la direction du prolétariat révolutionnaire. Que la direction prolétarienne de la guerre s'exerce à travers un Parti de combat marxiste-léniniste, de caractère prolétarien, capable de centraliser et diriger, unissant en un seul et puissant faisceau tous les aspects de la lutte populaire, garantissant une direction stratégique juste. Que sous la direction du Parti prolétarien, il est nécessaire de structurer une puissante Armée populaire, cœur d'acier des forces révolutionnaires qui, en se développant du petit vers le grand, intimement unie aux masses et alimentée par elles, s'érige en un mur infranchissable où se briseront tous les assauts militaires réactionnaires, et soit en condition matérielle d'assurer l'annihilation totale des forces armées contre-révolutionnaires. Qu'il est nécessaire de construire pareillement un large Front ouvrier et populaire de masse, qui mobilise tout le peuple progressiste et révolutionnaire, les différents partis populaires, les MIR-Chilesyndicats et d'autres organisations similaires, en un mot, qui mobilise les plus larges masses dont la lutte se déroule actuellement en parallèle, convergeant à tout moment, stratégiquement, avec l'activité militaire de l'Armée populaire et l'activité populaire clandestine du Parti prolétarien.

    La réponse doit être claire, et nulle autre que la lutte armée comme principal facteur de polarisation, d'agitation et, en définitive, de défaite de l'ennemi, l'unique possibilité de victoire. Cela ne veut pas dire que ne sont pas utilisées toutes les formes d'organisation et de lutte possible : la légale et la clandestine, la pacifique et la violente, l'économique et la politique, convergeant toutes avec la meilleure efficacité dans la lutte armée, en accord avec les particularités de chaque région et pays. Le caractère continental de la lutte est déterminé, fondamentalement, par la présence d'un ennemi commun. L'impérialisme nord-américain mène une stratégie internationale pour contenir la Révolution socialiste en Amérique latine.

    graff de l'erpCe n'est pas fortuitement que sont imposés des régimes fascistes dans les pays où le mouvement de masse en expansion menace la stabilité du pouvoir oligarchique. À la stratégie internationale de l'impérialisme doit répondre la stratégie internationale des révolutionnaires. Le chemin à parcourir dans cette lutte n'est pas court. La bourgeoisie internationale est prête à empêcher, par tous les moyens, la Révolution, dès qu'elle sera à l'ordre du jour dans un seul pays. Elle détient tous les moyens officiels et officieux, militaires et de communication, pour les utiliser contre le peuple. Pour cela notre guerre révolutionnaire une guerre d'usure de l'ennemi dans ses premières phases, jusqu'à former une Armée populaire qui surpasse en force celle de l'ennemi. Ce processus est lent, mais il est, paradoxalement, le chemin le plus court et le moins coûteux pour atteindre les objectifs des classes opprimées.

    PEUPLES D'AMÉRIQUE LATINE : AUX ARMES !

    bolivia-elnNous vivons des moments décisifs de notre histoire. Conscients de cela, le MLN Tupamaros, le MIR, l'ELN et l'ERP appellent tous les travailleurs exploités latino-américains, la classe ouvrière, les paysans pauvres, les pauvres des villes, les étudiants et intellectuels, les chrétiens révolutionnaires et tous les éléments provenant des classes exploiteuses disposés à collaborer avec la juste cause populaire, à prendre les armes avec décision, à rejoindre activement la lutte révolutionnaire anti-impérialiste et pour le socialisme qui se livre actuellement sur notre continent, derrière la bannière et l'exemple du commandant Guevara.

     

    JCR - JUNTE DE COORDINATION RÉVOLUTIONNAIRE

    LA VICTOIRE OU LA MORT ! - ELN

    LA PATRIE OU LA MORT, NOUS VAINCRONS ! - MIR

    VAINCRE OU MOURIR POUR L'ARGENTINE ! - ERP

    LA LIBERTÉ OU LA MORT ! - TUPAMAROS


    Note SLP : à la lumière de ce document, et en particulier de son paragraphe 'La lutte pour la direction du mouvement de masse', que pouvons-nous et devons-nous penser des gouvernements dits 'bolivariens', au Venezuela ou (impulsés par celui-ci) en Bolivie, en Équateur, au Nicaragua etc. (si l'on laisse de côté les autres, en premier lieu le Brésil et l'Argentine, qui, si leurs capitaux 'émergents' sont un paramètre important sur le continent, sont plus classiquement réformistes 'modérés', sociaux-libéraux) ? Question que SLP a largement traité et sur laquelle il a (il faut le reconnaître) pas mal évolué... Alors, nationalisme bourgeois, réformisme ou processus révolutionnaire ? [Pour mémoire, lire : Les Etats "bolivariens" : notre position ; Retour sur la situation en Amérique latine ; Retour sur la situation en Amérique du Sud ; Discussion sur la "gauche" en Amérique latine et la bourgeoisie bureaucratique ; ou encore, sur des actualités ponctuelles : HAUTE TRAHISON : la bourgeoisie nationale réformiste de Chavez est passée à la Réaction ; Équateur : le lent mais sûr glissement réactionnaire de la "révolution citoyenne" ; À propos de la dite « Loi de révolution productive, communautaire et agricole » d'Evo Morales ; Bolivie : Marche indigène réprimée]

    chaveznodEt bien, la réalité, c'est que dans le contexte du 'néolibéralisme', oppression semi-coloniale d'une férocité sans précédent, d'où a surgi le mouvement bolivarien, devenu PSUV en 2008 (avec ses petits satellites PCV, courants trotskystes, 'marxistes' divers), il y a sans doute... LES TROIS (Chavez lui-même représentant une synthèse des trois, ce pourquoi il a été choisi comme "clé de voûte" de l'édifice) : des secteurs oligarchiques et grands-bourgeois qui veulent s''affirmer' face à l'impérialisme US et/ou se poser en 'pompiers' du mouvement social devenu incontrôlable (ce que les maoïstes du continent appellent la 'bourgeoisie bureaucratique', mais c'est schématique), des (sans doute la grande majorité) secteurs réformistes des classes populaires et de la petite et moyenne bourgeoisie (la bourgeoisie 'nationale'), et des forces (ou des personnes non-organisées) révolutionnaires, ou en tout cas pour un 'changement radical' (il faut bien prendre en compte que l''idée' révolutionnaire communiste, conscientisée comme telle, a beaucoup reculé par rapport aux années 1970), qui ont soutenu et parfois soutiennent encore 'avec des critiques', comme 'un premier pas', 'faute de mieux'... Et, depuis que l'offensive impérialiste US a été contrecarrée au milieu des années 2000, l'on voit effectivement les contradictions s'aiguiser chaque jour un peu plus entre ces trois composantes. Si Chavez venait à passer de vie à trépas, ces contradictions viendraient très certainement et très rapidement à exploser. Il en va de même pour les autres pays où Chavez a exporté son 'modèle' à partir du milieu des années 2000...


    Document historique : Déclaration "Aux Peuples d'Amérique latine" de la Junte de Coordination Révolutionnaire (Tupamaros-MIR-ELN-ERP) - 1er novembre 1974


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  • Le 2 février 1943, après des mois de combats acharnés qui laisseront sur le champ de bataille plus de 400.000 héros soviétiques et autant d'envahisseurs allemands et alliés (italiens, hongrois, roumains, croates, slovaques etc.), le glas était sonné pour le "Reich de mille ans" d'Adolf Hitler et de ses complices. L'armée nazie du maréchal Friedrich Paulus capitulait devant la glorieuse Armée rouge des Peuples d'URSS.

    À compter de ce jour et jusqu'à aujourd'hui, où que ce soit dans le monde, la barbarie fasciste et militaro-impérialiste saura que toujours, tôt ou tard, elle trouvera sur son chemin un nom, un slogan, une clameur, un symbole de lumière pour la réduire à néant : STALINGRAD !

    Entre 1935 et 1945, les guerres et les génocides déclenchés par l'impérialisme nazi et ses alliés auront causé la mort de près de 40 millions de personnes en Europe, Méditerranée et Afrique (dont 6 millions de Juifs victimes de la Shoah) et plus de 20 millions en Asie-Pacifique. Parmi ceux et celles-ci, plus de 25 millions de martyr-e-s soviétiques. Dans la perspective du Lebensraum ("espace vital") de l'impérialisme allemand (sa "quête suprême" depuis l'unification de 1871), concomitamment à l'anéantissement mondial de l'Internationale communiste, le Generalplan Ost ("plan général pour l'Est") prévoyait la réduction en esclavage des "races inférieures" et la déportation ou l'extermination d'environ 60 millions de personnes (Slaves, Juifs, Rroms) en Europe orientale...

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    VICTOIRE !!!

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    Fame e macerie sotto i mortai                             (Faim et gravats sous les mortiers)
    Come l'acciaio resiste la citta'                                     (Telle l'acier, résiste la ville)
    Strade di Stalingrado, di sangue siete lastricate ;      (Rues de Stalingrad, de sang vous êtes pavées ;)
    ride una donna di granito su mille barricate.              (une dame de granit rit sur mille barricades)

    Refrain :
    Sulla sua strada gelata la croce uncinata lo sa        (Sur sa route glacée, la croix gammée le sait)
    D'ora in poi trovera' Stalingrado in ogni citta'.            (Désormais, elle trouvera Stalingrad dans chaque ville.)

    L'orchestra fa ballare gli ufficiali nei caffe',     (L'orchestre fait danser les officiers dans les cafés)
    l'inverno mette il gelo nelle ossa,                     (l'hiver fait geler jusque dans les os,)
    ma dentro le prigioni l'aria brucia come se    (mais dans les prisons, l'air brûle comme si)
    cantasse il coro dell'Armata Rossa.                (chantait le chœur de l'Armée rouge.)

    La radio al buio e sette operai                         (La radio dans l'obscurité et sept ouvriers,)
    sette bicchieri che brindano a Lenin !                     (sept verres qui trinquent à Lénine !)
    e Stalingrado arriva nella cascina e nel fienile,                 (et Stalingrad arrive dans la ferme et dans le grenier,)
    vola un berretto, un uomo ride e prepara il suo fucile.       (une casquette vole, un homme rit et prépare son fusil.)

    (Refrain)

     

     


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  • Marx Lenin EngelsDepuis les origines du marxisme et de l’époque de la révolution prolétarienne, et – en tout cas – clairement depuis le stade léniniste du développement de la science marxiste, il est communément admis que la révolution émancipatrice du prolétariat et des masses populaires a, en plus de l’ennemi de classe (la bourgeoisie capitaliste et son État, les forces contre-révolutionnaires), deux ‘ennemis internes’ qui entravent son avancée vers la victoire : l’opportunisme et le gauchisme. Lénine a, littéralement, forgé le léninisme et le Parti bolchevik dans la lutte contre l’opportunisme (réformiste, social-chauvin etc.) qui rongeait à son époque la 2e Internationale. Concernant le gauchisme, son ouvrage de référence (la Maladie infantile du communisme, 1920) aborde surtout la question des ‘communistes de conseil’ qui, au nom du ‘pouvoir ouvrier’, rejettent le rôle du Parti (l’avant-garde la plus consciente et organisée des classes exploitées) dans la mobilisation révolutionnaire des masses vers le communisme ; mais aussi celle du refus ('puéril'), par certains éléments du mouvement communiste (en Allemagne, Hollande, Grande-Bretagne etc.), au nom de la 'pureté des principes', de participer aux élections bourgeoises et aux syndicats réformistes, alors même que les masses croient encore largement en ces instruments d'encadrement de leurs luttes par la bourgeoisie. Il est possible, en réalité, d’élargir cette analyse à toutes les forces agissantes qui ont une compréhension dogmatique de la science marxiste, persuadées d’en détenir la meilleure compréhension et d’en être les ‘gardiennes absolues’ ; et une attitude sectaire (‘chauvinisme d’organisation’) et 'puriste' ('nous et nous seuls possédons la juste compréhension du socialisme scientifique') vis-à-vis des autres forces du mouvement révolutionnaire et du mouvement social organisé en général, et vis-à-vis des masses populaires ‘en marche’ vers la conscience révolutionnaire de leurs intérêts de classe : nous appellerons ces forces les ‘dogmato-sectaires’, ou simplement, les ‘sectaires’. D'une manière générale, l'on pourrait élargir l'analyse léniniste à la dichotomie suivante : opportunisme = tout ce qui, au lieu de guider le mouvement réel de la lutte de classe vers la révolution et le communisme, se place à sa remorque en le maintient dans les limites de l''acceptable' pour la classe dominante ; gauchisme = tout ce qui, par aventurisme, ultra-radicalisme 'plus révolutionnaire que moi tu meurs', dogmatisme, sectarisme, et dans tous les cas compréhension erronée du monde, des contradictions motrices et du mouvement réel (en version "on est les seul-e-s vrai-e-s de vrai-e-s"), agit comme une force 'stérile', voire de répulsion vis-à-vis des masses exploitées en lutte, et non comme une force d'attraction et de direction sur le chemin de la révolution.

    Une autre (dure) loi historique est que, dans les périodes où le mouvement émancipateur du prolétariat et des masses populaires est sur la défensive, en reflux stratégique, comme c’est le cas depuis 25 ou 30 ans, ces deux forces (opportunisme et gauchisme dogmato-sectaire) qui prennent en tenaille le mouvement tendent à l’hypertrophie, car elles sont perçues dans les franges les plus avancées des masses, l’une comme un ‘mieux que rien’, l’autre comme un réflexe de défense (c’est, nous y reviendrons, la conception erronée selon laquelle, lorsqu’un mouvement révolutionnaire et l’idéologie pce - cartellqui le guide subissent une défaite, la cause principale en est dans les assauts de l’ennemi et – surtout – dans les ‘traîtres’, les ‘cinquième colonnes’ en son sein, et non dans les faiblesses et les limites de l’idéologie-guide elle-même).

    La Commune de Paris fut écrasée au bout de 73 jours, enterrant du même coup le ‘rêve’ que la phase avancée, démocratique de la révolution bourgeoise puisse ‘embrayer’ immédiatement sur la révolution socialiste du prolétariat organisé ; tandis que 60 années séparent la Révolution d’Octobre 1917 de la contre-révolution denguiste en Chine et de la ‘Constitution du Peuple tout entier’ en URSS (triomphe à la romaine du révisionnisme), début d’un processus de reflux stratégique mondial conduisant à la capture de Gonzalo et à la défaite de la Guerre populaire au Pérou, au baisser du drapeau rouge sur le Kremlin, au triomphe des ‘accords de paix’ en Afrique australe, en Amérique centrale, au Proche-Orient etc., et à la proclamation de la ‘Fin de l’Histoire’ par le ‘néolibéral’ Fukuyama. Mais nous vivons, à vrai dire, une époque assez similaire à celle (la ‘Belle époque’) qui a suivi, dans le ‘monde civilisé’, les fusillades de la Semaine sanglante : un capitalisme en crise générale, structurelle, de son mode de fonctionnement même (1873-1945, et depuis le début des années 1970), et plongé dans une fuite en avant militariste et une ‘guerre civile non-déclarée’ contre les masses laborieuses ; et en face… En face, il est possible de paraphraser ce que disait Lénine au sujet des attentats anarchistes individualistes qui, à son époque, frappaient régulièrement présidents, ministres et autres têtes couronnées (ces anarchistes avaient cependant, au moins, le mérite de traduire leurs idées en actes…) : le gauchisme (dans sa composante dogmato-sectaire comme dans sa composante aventuriste insurrectionnaliste) est la RANÇON de l’opportunisme et de la trahison des réformistes qui se sont mis à la tête des masses en lutte pour leur émancipation. Là est la racine historique de l’étau qui enserre le mouvement révolutionnaire du prolétariat et des classes populaires, et que celui-ci doit parvenir à briser.

    pcf bbrÀ cela s’ajoutent des facteurs liés à l’histoire et à la ‘formation psychique’ de chaque pays du monde. Par exemple, dans l’État bourgeois où nous nous trouvons, la ‘République française’ (‘une et indivisible’), il y a le facteur historique de la confusion entre la ‘pointe’ démocratique radicale de la révolution bourgeoise (été 1793 - été 1794) et le début d’une révolution prolétarienne ; d’où la vision, répandue, de la révolution socialiste en Hexagone comme ‘point final’ au processus commencé par la 1ère République, le poison du jacobinisme, du social-républicanisme, du social-patriotisme, de la posture ‘social-cocardière’ qui nourrit en abondance les courants opportunistes (comme les ‘communistes’ du Front de Gauche, les 'orthodoxes' marchaisiens à la André Gerin, ou les ultra-chauvins du PRCF, qui n'hésitent pas à frayer avec des 'souverainistes' réactionnaires dans le 'Comité Valmy'). Ou encore, si l’on ne perd pas de vue que la ‘France’ ‘laïque’ a été le berceau du catholicisme démocratique et social (avec Lammenais), la vision du marxisme comme un ‘humanisme radical’ (et non comme un dépassement, par la scientificité matérialiste, de l’humanisme démocratique idéaliste des révolutions bourgeoises), vision idéaliste qui a pu conduire assez loin un certain Roger Garaudy, par exemple : 'communiste' se définissant comme un 'humaniste radical' avant de revenir à une vision religieuse du monde (catholicisme, puis islam), incapable de comprendre que ce sont les conditions matérielles qui ont fait des Juifs persécutés d’Europe, une fois installés comme colons en Palestine, FRANCE---PRCF-30-Septembre-2012des oppresseurs, il n’a pu trouver de porte de sortie à cette quadrature du cercle que dans la négation du génocide des Juifs par les nazis, qui aurait été une ‘invention’ des impérialistes vainqueurs et des sionistes pour 'justifier la création d’Israël'. Il y a aussi les lignes contradictoires de la bourgeoisie impérialiste sur les ‘questions internationales’, liées à la situation spécifique de l’impérialisme BBR : un ‘impérialisme Poulidor’, ‘éternel second’ depuis qu’il est impérialisme (depuis le Second Empire), jamais première puissance mondiale (jusqu’en 1940, c’était l’Empire britannique, depuis 1945, c’est l’impérialisme US) ; et donc, ‘écartelé’ entre sa position d’impérialisme face aux ‘émergents’ aujourd’hui et au bloc social-impérialiste soviétique hier, aux nationalismes bourgeois, sans même parler des mouvements révolutionnaires de libération ; et son rapport tourmenté au ‘n°1 mondial’… Une ambivalence dans le positionnement international qui permet, du coup, à des révisionnistes et des ‘radicaux’ de tout poil (parfois rejoints par des ‘marxistes-léninistes’ voire des ‘maoïstes’…), de se faire passer pour ‘anti-impérialistes’ alors qu’ils se font en réalité, en soutenant tel ou tel régime ‘victime de l’Empire’ (= de l’impérialisme US), les porte-voix des courants ‘anti-atlantistes’ des monopoles BBR, hostiles à l’hégémonie mondiale US et aux courants impérialistes hexagonaux 'alignés' sur l'Oncle Sam.

    Jean Paul SartreVoilà (globalement) pour l’opportunisme, le révisionnisme, le social-républicanisme et le social-chauvinisme ; mais le gauchisme dogmato-sectaire a lui aussi ses racines, profondes, dans les spécificités culturelles ‘françaises’ : tout ce qui précède a, en effet, profondément imprégné les dirigeants issus de la classe ouvrière (en fait, plutôt de son aristocratie), les maintenant, au bout du compte, dans les limites d’un social-républicanisme et d’un trade-unionisme ‘radical’, et laissant, de ce fait, le champ libre de la ‘radicalité révolutionnaire’ aux intellectuels, au ‘monde universitaire’, enseignant, 'lettré’ etc. qui est, il ne faut pas l’oublier, une ‘institution-pilier’ de l’édifice idéologique BBR, mais aussi un ‘vivarium de sécurité’ dans lequel la classe dominante maintient les drôles de bêtes (potentiellement) venimeuses de la ‘radicalité critique’, qui peut ainsi s’exprimer (‘on est en démocratie, tout de même !’) sans trop menacer l'ordre social existant. Bien sûr, lorsqu’ils sont ‘connus’, lorsqu’ils rencontrent succès et écho de masse (en plus de l’ascension professionnelle, des chaires universitaires, des conférences grassement rémunérées etc.), ces intellectuels passent presque sans exception dans le champ de l’opportunisme (généralement, version ‘humanisme radical’, ‘ultra-démocrate’). Mais les ‘pas connus’, les ‘obscurs’, comme nous y reviendrons ci-après, forment réellement la base sociale du dogmato-sectarisme.

    Cela, en tout cas, fait que le gauchisme et, en particulier, le gauchisme dogmato-sectaire, est réellement (historiquement) un fléau en ‘France’ plus qu’ailleurs, pour ces raisons d’héritage historique précises : la prépondérance, l’hypertrophie du rôle des intellectuels dans l’histoire en mouvement, déjà à l’époque de la révolution bourgeoise (1750-1870), avec l’importance des ‘philosophes’, juristes et ‘hommes de lettres’ par rapport à la classe révolutionnaire bourgeoise proprement dite (entrepreneurs, paysans aisés, capitalistes urbains et ruraux), si l’on compare par exemple avec les révolutions benny-levy.1195736004anglaises ou la révolution américaine (avant tout menées par des chefs d’entreprises, des négociants, des ‘planteurs’ agro-capitalistes), et, par la suite, à l’époque de la révolution prolétarienne, dès l’émergence (années 1830-40) de la ‘question sociale’. Une prépondérance liée à la fonction sociale quasi sacralisée du ‘monde des idées’, des 'lettrés’, des 'ouvriers de la pensée’ (comme certains allèrent jusqu’à se définir eux-mêmes...) au pays de Descartes (cogito ergo sum, ‘je pense, donc je suis’).

    C’est dans cette perspective qu’est rédigé l’article qui suit ; lequel permettra en même temps (la critique communiste se devant d’être constructive) d’aborder quelques points essentiels du matérialisme dialectique. C’est là, encore une fois, une bataille de CONCEPTION et de COMPRÉHENSION (communiste) DU MONDE – en l’occurrence, plus particulièrement, du phénomène ‘révolution prolétarienne’, ‘négation du capitalisme par le communisme’. Ceci est le rôle d’un média révolutionnaire ; ce qu’est Servir le Peuple.

    En finir avec le dogmato-sectarisme est une tâche essentielle pour la renaissance du mouvement communiste ! 

    1. L’ignorance dogmato-sectaire de la concentricité des forces populaires en lutte contre le capitalisme.

    Un trait caractéristique du sectarisme, c’est que son activité consiste, en fin de compte, à tirer à ‘boulets rouges’ sur… TOUTES les forces révolutionnaires et progressistes qui ne relèvent pas de sa petite chapelle ; bien plus que sur l’ennemi de classe – les dominants, exploiteurs et oppresseurs des classes populaires travailleuses. C’est une attitude absolument lamentable et, sans doute, l'un des principaux facteurs qui détourne les larges masses du peuple de s’engager dans le chemin de la révolution. Pour se comporter ainsi, déjà faudrait-il (c’est bien la moindre des choses) avoir une conception correcte de la société future que nous voulons et du chemin pour y parvenir, et une compréhension correcte du monde qui nous entoure et de son histoire – ce qui n’est pour ainsi dire jamais le cas. Mais même, en admettant, qu’une quelconque organisation ait la compréhension et la conception du monde et de la révolution la plus parfaite que permette la science marxiste à ce jour... est-ce là une attitude correcte ? NON, cela ne l’est pas, et nous allons voir pourquoi.

    Ce que ne comprennent pas les sectaires, en réalité, c’est la CONCENTRICITÉ du ‘niveau de conscience’ révolutionnaire, dans les forces organisées du prolétariat et des masses populaires qui cherchent une porte de sortie à l’enfer quotidien imposé par un capitalisme en pourrissement généralisé. Voilà bien un élément, dont une caractéristique du sectarisme est de ne tenir aucun compte : dans le mouvement réel de la classe ouvrière et des autres classes laborieuses exploitées/opprimées, mouvement réel guidé en dernière analyse, comme nous l’enseigne Marx, par le souci de la reproduction des conditions matérielles d’existence, il y a en quelque sorte des cercles concentriques, sur la base d’un principe fondamental du marxisme : la loi du développement inégal – ici, développement inégal de la conscience de classe et de la compréhension matérialiste-dialectique du monde.

    class ouvrière noussommeslepouvIl y a ce que l’on appelle classiquement, en langage marxiste, le mouvement ouvrier organisé (qui va, en réalité, au-delà de la classe ouvrière au sens strict, concernant toutes les classes populaires laborieuses et exploitées, et même, dans une certaine mesure, des éléments de classes non-salariées frappés par la prolétarisation). Dans sa grande majorité, et aujourd’hui plus que jamais, ce mouvement est de nature réformiste : c’est-à-dire qu’il ne voit pas d’horizon au-delà du capitalisme, pas d’autre société possible, mais souhaite simplement une société capitaliste plus humaine (‘l’humain d’abord !’, comme le clamait le slogan de campagne du Front de Gauche). Ce mouvement réformiste est souvent sous une direction petite-bourgeoise (petits fonctionnaires, aristocrates-ouvriers, travailleurs intellectuels divers etc.), mais nous ne sommes pas des trotskystes pour penser que tout se résume à ‘un problème de direction’ : au contraire, ce serait plutôt la faiblesse (réformiste) de la conscience de classe qui permet à ces éléments (qui ne veulent pas, de par leurs intérêts de classe, vraiment rompre avec le capitalisme, mais seulement l’’humaniser’) de prendre la tête du mouvement, dont ils sont jugés ‘plus aptes’ (avec leur ‘capital intellectuel’) à porter les revendications.

    Et puis, au milieu de tout cela, il y a les révolutionnaires : ceux et celles qui veulent réellement abattre le capitalisme et instaurer un nouveau type de société. Mais, parmi ces révolutionnaires, tous ne sont pas marxistes : il y a des libertaires, il y a ce que d’aucuns appelleraient des ‘syndicalistes révolutionnaires’ ; bref, appelons-les des ‘anticapitalistes divers’. D’une manière générale, les révisionnistes (les personnes qui militent dans les PC ‘historiques’, comme le PCF, ou dans des scissions de celui-ci postérieure à 1990), ou encore, les vieilles organisations se réclamant du trotskysme (cela ne veut plus dire grand-chose aujourd'hui), type NPA ou LO, se situent en quelque sorte à cheval entre un réformisme radical et un ‘anticapitalisme’ de type syndicaliste-révolutionnaire.

    Et puis, encore au milieu de cela, il y a les marxistes… mais tous les marxistes ne sont pas maoïstes. Il y en a qui se réclament des thèses de Léon Trotsky ; il y en a qui se réclament essentiellement de l’expérience soviétique, certains jusqu’à la perestroïka de Gorbatchev (1986-90), d’autres seulement jusqu’à la ‘déstalinisation’ de Khrouchtchev (1956-58), d’autres encore considérant qu’il y a un lent processus de dégénérescence entre les deux ; il y en a qui se réclament exclusivement de la direction de Joseph Staline en URSS et d’Enver Hoxha en Albanie ; d’autres qui ne jurent que par le ‘modèle cubain’ ; d’autres qui se réfèrent à Lénine et rejettent tout ce qu’il y a eu après sa mort, sans pour autant adopter les thèses de Trotsky ; d’autres qui ont une approche critique de Lénine lui-même en se basant sur Rosa Luxemburg et les ‘spartakistes’ allemands, sur Bordiga etc. Il y en a qui se réclament de Mao Zedong, mais qui n’ont pas intégré la critique maoïste de l’expérience soviétique sous la direction de Joseph Staline : ils rejettent la ligne révisionniste qui a dirigé l’URSS à partir des années 1950, mais ils ne voient pas, ou refusent de voir, les racines de celle-ci dans la période qui a précédé… Bref.

    IndianMaoistsC’est donc seulement tout au milieu de tout cela qu’il y a nous, les marxistes-léninistes-maoïstes : la pointe la plus avancée du ‘mouvement ouvrier’ révolutionnaire, dotée de la conscience la plus avancée, de la meilleure compréhension du monde qui nous entoure, sur la base du développement le plus élevé du matérialisme dialectique et du socialisme scientifique marxiste, qu’est le maoïsme.

    Et donc… que doivent faire ces maoïstes ? Doivent-ils rejeter en bloc tou-te-s ceux et celles qui ne le sont pas ? La réponse est évidemment NON. Leur rôle de pointe la plus avancée du mouvement ouvrier/populaire révolutionnaire marxiste est, au contraire, par leur agitation et leur propagande, par la diffusion de leur conception du monde (Weltanschauung), par leur implication dans le mouvement réel des luttes du prolétariat et des classes laborieuses, de devenir le CENTRE D’AGRÉGATION de toutes ces forces révolutionnaires ou (réformistes) ‘radicales’, ce que l’on peut appeler les Forces subjectives (y compris encore potentielles) de la Révolution socialiste (FSRS). Ils le doivent et le PEUVENT, à travers la PRATIQUE dont Marx et Engels ont expliqué voilà 160 ans qu’elle est à la fois la seule source et la seule vérification de toute théorie ; une pratique qui elle-même peut et doit encore enrichir leur compréhension du monde, qui, pour être la plus avancée, n’en est pas pour autant parfaite… Il se peut en effet (a toujours considéré SLP) que des forces, des éléments non-maoïstes (voir non-léninistes, voire non-marxistes), pour avoir une conception/compréhension globale du monde et de la lutte de classe de moindre niveau, possèdent ici et là des réponses ou des éléments de réponse à des questions que nous n’avons pas encore résolues…

    Il faut bien souligner, ici, que le sectarisme n’est pas seulement l’apanage de (certains) maoïstes : il est également (très) présent dans les forces qui se réclament seulement de Lénine et Staline, ou de Lénine-Staline et Hoxha, dans les forces qui se réclament de Trotsky, sans parler de celles qui se réclament de Luxemburg et Liebknecht, Pannekoek ou Bordiga… Cela, ajouté aux limites idéologiques de leur compréhension du monde, empêche évidemment totalement ces forces de prendre la tête de franges significatives du ‘mouvement ouvrier’ et populaire contre les méfaits du capitalisme.

    Jobbiks-Hungarian-Guard-a-001Il y a enfin l’argument, développé par un certain ‘antifascisme’, selon lequel toutes ces forces populaires réformistes ou anticapitalistes, à l’exception d’eux-mêmes (de leur compréhension du maoïsme) et de ‘certains anarchistes’, seraient ‘syndicalistes révolutionnaires’ et, en tant que telles, ‘matrices’ de la tendance au fascisme… Le fait que des ‘pans’, parfois importants, du ‘mouvement ouvrier’ réformiste ou anticapitaliste non-marxiste (voire même marxiste ! mais 'insuffisamment'...) puissent se ‘détacher’ et confluer dans la mobilisation réactionnaire de masse du fascisme, est un fait historique indiscutable, étayé par une multitude d’exemples. Mais, ce que ne comprennent pas ces ‘antifascistes’, c’est que ces forces ne sont (justement) pas la ‘matrice’, pas le centre d’agrégation de la mobilisation réactionnaire fasciste ; lequel se trouve dans les plus hautes sphères du Grand Capital. Ce faisant, ils tournent leurs ‘fusils’ idéologiques dans la mauvaise direction, vers des forces qui ne sont pas déterminantes pour la tendance au fascisme. Et du coup, si l’on peut considérer, en dernière analyse, que tout travailleur, tout individu du peuple réformiste ou anticapitaliste non-maoïste est potentiellement révolutionnaire comme il peut être potentiellement fasciste (à des degrés divers), ils ne favorisent pas, en les rejetant, le  potentiel révolutionnaire de ces personnes, et les poussent au contraire dans la ‘force d’attraction’ du fascisme (ou, en tout cas, dans le marécage du réformisme bourgeois). Le rôle de communistes authentiques est, au contraire, de développer et d’exercer, en direction des masses, une force d’attraction (vers notre conception du monde) capable de contrer celle du fascisme (dont ‘l’intellectuel organique collectif’ est tapi dans des hôtels particuliers, bien plus que dans des usines ou même des bureaux d’entreprises ou d’administrations).

    À côté de tout cela, dans tous les pays du monde et jusqu’au cœur même des métropoles impérialistes, il y a les QUESTIONS NATIONALES. Celles-ci résultent, là encore, de la loi du développement inégal (du capitalisme, cette fois-ci) qui a amené des Centres à se subordonner des Périphéries dans la construction de leurs appareils politiques de domination (États, Empires coloniaux et protectoraux, constructions supra-étatiques comme l’UE ex-CEE, l’ALENA ou le MERCOSUR, l’OTAN, le FMI, etc.) et (surtout) de leur territoires ‘nationaux’ puis impériaux à comprendre comme bases d'accumulation, ‘terrains’ d'investissement et de valorisation du Capital de la bourgeoisie du Centre ; bases d'accumulation  qui dans le capitalisme sont vouées à l'expansion permanente (au détriment des rivaux capitalistes d'autres Centres comme du ‘sauvage’ ou du ‘barbare’ pré-capitaliste). Ceci est vrai aussi bien au niveau de chaque État d’une certaine taille (à moins qu’il ne soit très petit, et encore…) que de chaque continent (comme l’Europe avec sa ‘Banane bleue’, ses ‘centres secondaires’ et ses ‘régions périphériques’ ; ou l’Amérique du Nord avec ses côtes Est et Ouest, son axe Saint-Laurent-Grands Lacs et son ‘hinterland’) et du monde entier, avec ses pays impérialistes et ses pays dominés par l’impérialisme.

    breizh gwenhadu komunourAu cœur même, donc, de notre Hexagone (notre État bourgeois, notre ‘République française une et indivisible’), il y a des questions nationales et donc des mouvements nationaux. Au sein de ces mouvements nationaux, il y a des courants bourgeois, pour lesquels la ‘question sociale’ est totalement secondaire voire inexistante (par exemple, en Occitanie, le PNO – finalement proche de Bayrou – et les courants ‘culturalistes’ de tout poil, voire des éléments ‘occitanistes’ très à droite dans la lignée de Mistral et Maurras). Il y a des courants qui prennent en compte la ‘question sociale’ (et diverses questions démocratiques, ‘de société’), mais d’un point de vue réformiste, petit-bourgeois (comme le Parti occitan, proche des Verts et des courants ‘girondins’ du PS). Et puis (nous allons y venir), il y a des courants nettement plus avancés… À côté de cela, il y a le mouvement ouvrier, le ‘mouvement social’, dont une large part (en 'France') ne tient que peu – voire pas du tout – compte de la question des nationalités réelles enfermées dans l'État et de leur nécessaire affirmation, ce qui revient en dernière analyse à du réformisme puisque la construction politique et idéologique bourgeoise ‘République française’ n’est pas remise en question, et acceptée telle quelle comme un ‘fait accompli’ indépassable. Mais il existe des points de contact entre ce ‘mouvement social’ et les mouvements nationaux ; certains dans le champ réformiste (c’est ce que l’on a évoqué plus haut, la proximité du PO avec la gauche bourgeoise et petite-bourgeoise hexagonale) et d’autres dans le champ révolutionnaire : là, nous avons les éléments les plus avancés de l’un et l’autre mouvement. Cette ‘zone de contact’ entre question nationale et question sociale (envisagées l’une et l’autre d’un point de vue révolutionnaire) est ce que l’on appellera le courant libérationiste-révolutionnaire, le MRLP (Mouvement révolutionnaire de Libération du Peuple). Là encore, au sein de ce MRLP, tout le monde n’est pas marxiste, loin de là : il y a des libertaires, des syndicalistes-révolutionnaires comme les ‘Redskins Limoges’, des ‘anticapitalistes’ divers etc. ; et, parmi les marxistes, tout le monde n’est pas maoïste – maoïsme qui, compris correctement, permet pourtant la meilleure compréhension de la problématique nationale et de son inscription dans la contradiction Centre/périphéries. En ce qui le concerne, SLP se définit lui-même comme marxiste-léniniste-maoïste au sein du MRLP occitan.

    big provence flagEn revanche, les courants qui manient un discours ‘marxiste’ (comme les lambertistes du POI, la ‘Gauche communiste’ et d’autres) ou ‘anarchiste’ (CNT-AIT), voire ‘marxiste-léniniste’ voire ‘maoïste’ d’une grande radicalité, mais qui rejettent cette question de la Libération révolutionnaire des Peuples niés (LRP) comme un ‘truc de petits bourgeois’, se placent de fait à la marge du camp révolutionnaire et non en son centre, à sa pointe la plus avancée. Ils ne comprennent pas que les masses populaires des nations absorbées par la construction de l’État bourgeois actuel, et les masses populaires ‘périphérisées’ en général, au même titre que les masses des quartiers populaires de ‘banlieue’ où s’entassent – notamment – les ‘colonies intérieures’ issues de l’Empire néocolonial, sont les ‘campagnes’ que doit mobiliser l’avant-garde révolutionnaire dans sa Guerre populaire contre la classe dominante et son État. Enfin, ils ne le 'comprennent pas'... ou parfois, au contraire, ils le comprennent (ou du moins le 'ressentent' instinctivement) très bien, et ils ne veulent pas en entendre parler. Car dans le fond – ce qui qui renvoie encore à la même question de la nature de classe, ou du moins de l''esprit' petit-bourgeois – 'la France' (comme État-appareil capitaliste et système impérialiste) est pour eux comme pour des millions de personnes le râtelier auquel ils bouffent (et éventuellement espèrent bouffer plus !), sentiment qui est purement et simplement ce qui fait tenir le système debout depuis des siècles ; et que cela soit conscient ou pas, assumé ou pas comme tel, ils ne veulent pas voir ce râtelier disparaître – et donc le défendent comme 'résultat du progrès historique' (que remettre en question serait 'vouloir faire tourner la roue de l'histoire à l'envers'), prétendant éventuellement (hypocritement) vouloir l'abolir, immédiatement pour les anarchistes ou après un temps plus ou moins long pour les marxistes, au profit d'un confortablement lointain et hypothétique 'communisme universel'... Ce qu'ils montrent là en réalité, c'est qu'ils ne veulent pas réellement la révolution pour laquelle ils prétendent militer.

    De ce fait, dans les mouvements d'affirmation des nationalités réelles comme dans celui des ‘indigènes métropolitains’, ils favorisent objectivement les courants réformistes, ‘démocratiques radicaux’ voire ‘identitaires’ réactionnaires – les courants anticommunistes, car ils donnent du communisme cette lamentable image-là. Au point que l’on peut parfois se demander s’ils valent réellement mieux que ces derniers… Ils agitent comme un hochet le mythe d'une révolution ‘purement ouvrière’, basée sur une classe ouvrière tellement pure qu’elle n’existe pas et à laquelle a donc vocation à se substituer une ‘avant-garde’ (c'est-à-dire eux-mêmes)… largement constituée de petits bourgeois intellectuels (profs etc.) qui, si leur 'révolution' devait triompher, prendraient la place de l'actuelle classe dominante à la tête de l’État et de la production (cela n'a bien sûr aucune chance d'arriver ; en revanche ce genre de personnes peut 'squatter' une révolution 'bien menée' et donc 'qui marche', et de là l'utiliser pour se constituer en nouvelle bourgeoisie - ce qui s'est hélas produit un peu partout au siècle dernier).

    Il s’agit là, hélas, d’une tradition politique profondément ancrée dans le mouvement réel de la lutte de classe en 'France', terre du 'jacobinisme' ou plus exactement du centralisme napoléonien confondu avec celui-ci (qui lui sert de 'vernis de gauche'), de la confusion entre révolution prolétarienne et 'An II' révolutionnaire bourgeois 'radical', et sans doute du râtelier centraliste-étatique le plus solidement forgé et ancré dans la conscience collective ; et qui est historiquement – perpétuellement – vouée au fiasco (car le système 'France' pour se maintenir tel qu'il est a certes besoin de réformes/modernisations régulières, mais pas d'une 'révolution' de ce type).

    Face à cette engeance, encore et toujours, les ‘campagnes’ nationales-réelles comme colonisées intérieures de la Guerre populaire entendue comme négation de l'ordre capitaliste bleu-blanc-rouge doivent plus que jamais crier haut et fort : ‘Nique la France’  !!!

    À cette loi objective de la concentricité dans le développement de la conscience révolutionnaire de classe, il faut aujourd’hui ajouter un autre phénomène : la tendance, depuis la désintégration du mouvement communiste international dans les années 1975-1990, à l’éparpillement façon puzzle de la ‘vérité révolutionnaire’ (la juste compréhension prolétarienne du monde). Le fait est qu’au jour d’aujourd’hui, les étiquettes que l’on se colle (‘communiste’, ‘marxiste’, ‘anarchiste’, ‘trotskyste’, ‘marxiste-léniniste’ ou même ‘maoïste’) ne veulent en elles-mêmes plus dire grand-chose : il faut ‘juger sur pièce’ chaque force organisée, au-delà de l’étiquette. Des organisations (pour ne nommer volontairement personne) se réclamant de Léon Trotsky ou du communisme libertaire peuvent tout à fait, ponctuellement ou sur un ensemble de sujets, avoir des positions plus correctes que d'autres organisations se réclamant quant à elles du marxisme-léninisme voire du maoïsme ; même si Servir le Peuple ('prêchant', certes, 'pour sa paroisse') défend l’idée qu’une organisation arborant, défendant et appliquant correctement le maoïsme a nécessairement une vision globale des choses plus juste qu’une organisation s’arrêtant à Lénine-Staline ou se revendiquant de Trotsky, Bakounine ou Rosa Luxemburg : une vision globale plus juste, certes, mais qui ne veut pas dire ‘réponse à tout’ ; cela ne veut pas dire (comme nous l’avons déjà évoqué plus haut) que des éléments de réponse ne peuvent pas se trouver dans les positions d’organisations (ou de personnes) qui ne se réclament pas du maoïsme. Cela a d’ailleurs toujours existé, même avant 1975 : si combattants-erpl’on prend, par exemple, l’Argentine de la période 1968-76, le PCR qui se réclamait du marxisme-léninisme, de Marx-Engels-Lénine-Staline-Mao, n’en avait pas moins une ligne, une pratique concrète, une compréhension du monde et une analyse de la situation (notamment du péronisme) infiniment moins justes que le PRT-ERP qui, lui, se réclamait ‘éclectiquement’ des ‘révolutions bolchévique, cubaine, vietnamienne et chinoise’, du Che, de Mao Zedong... et de Trotsky. CQFD, les faits sont là.

    Depuis plus de 20 ans, un constat de fait s’impose : TOUS les gouvernements (‘socialistes’, ‘démocratiques populaires’, ‘progressistes anti-impérialistes’) issus de la première vague de la révolution mondiale prolétarienne (1917-92) ont, à un moment ou à un autre, terminé leur course dans la nuit révisionniste et ont été soit balayés par le triomphe de l’indépassable’ démocratie bourgeoise occidentale (comme les ‘pays de l’Est’ du Pacte de Varsovie, la Yougoslavie de Milosevic, l’Éthiopie de Mengistu, l’Albanie pourtant ‘anti-révisionniste’ d’Enver Hoxha etc. etc.), soit ont 'tombé' les 'derniers masques' et intégré gentiment le système impérialiste mondial post-1990 (comme la Libye de Kadhafi ou la Syrie du clan Assad jusqu’à leurs récentes ‘démêlées’, l’Angola du MPLA ou le Mozambique du FRELIMO, le Vietnam, la Chine etc. ; avec des situations ‘moins pires’ comme Cuba ; tandis que des pays comme la Corée du Nord ou la Birmanie - sous la tutelle de la Chine, la Biélorussie ou les républiques d’Asie centrale - sous celle de la Russie - ont basculé dans un autocratisme policier délirant). Cela démontre bien (loi du primat des contradictions internes dans tout phénomène, sur les contradictions avec l’’extérieur’) que, dans la conception du monde du mouvement communiste et révolutionnaire en général, lors de cette première vague de la révolution mondiale, il y avait de profondes baisser redflag kremlinlimites – que le maoïsme consiste justement à essayer de dépasser. Il n’est donc plus possible, à moins de faire preuve d’une malhonnêteté intellectuelle totale, de balayer d’un revers de main les éléments et les courants (marxistes, libertaires, 'marxistes libertaires', ‘communistes de conseil’, ‘socialistes révolutionnaires’ divers etc.) qui ont, au cours de cette période, abordé ces expériences avec un regard critique ; comme il était encore possible de le faire lorsque ces gouvernements étaient aux prises avec le réel, tandis que les critiques, eux, ne l’étaient pas, dans aucun pays du monde. Accepter la critique, fut-ce pour (dans les grandes lignes) la réfuter, c’est ce qui permet au mouvement communiste d’avancer. Affirmer que "l'idéologie prolétarienne (celle dont se réclame sa petite chapelle) est scientifique, elle ne souffre ni le doute ni la critique" est absolument contraire à toute identité communiste. Aucune critique (progressiste, anticapitaliste, bien sûr) des expériences socialistes et révolutionnaires du siècle passé ne ‘tombe du ciel’ : elle vient des masses, elle exprime (même si c’est à travers des intellectuels, des ‘petits bourgeois’) des questionnements des masses (de la frange avancée, progressiste des masses) envers ceux qui se prétendent leur ‘avant-garde’, et une authentique avant-garde révolutionnaire doit accepter d’être questionnée par les masses, et non s’y soustraire en prenant un ton menaçant. 

    2. Les racines de classe du sectarisme

    C’est une question qui a déjà, très largement, été abordée ici-même ; néanmoins, il n’est jamais inutile de répéter les choses et, si possible, l’on essaiera de synthétiser.

    Nous avons donc le mouvement réel des masses prolétaires et populaires qui, poussées par la reproduction de leurs conditions d’existence, cherchent une issue, une ‘porte de sortie’ au ‘monde tel qu’il est’, c’est-à-dire à l’organisation sociale (ensemble des rapports de production et des rapports sociaux, juridiques - écrits - et non-écrits) dans laquelle nous évoluons chaque jour ; organisation sociale sous-tendue par un mode de production : le capitalisme. Laissons de côté les masses ‘statiques’ (elles existent), résignées au quotidien et/ou trouvant des portes de sorties individualistes/apolitiques à celui-ci (boîte de nuit hebdomadaire, hobbies divers de la mode au tuning en passant par le foot, alcool ou drogues, délinquance etc.) ; et laissons de côté les masses en mouvement qui sont ‘captées’ par la mobilisation réactionnaire de la classe dominante (dans sa fraction la plus ‘dure’) derrière ses plans et ses intérêts, autrement dit les fascistes. Limitons-nous aux masses en mouvement dans une mobilisation de nature progressiste voire révolutionnaire. Ce mouvement existe toujours tant qu’existe l’oppression capitaliste, a fortiori lorsque cette oppression est renforcée par une crise profonde du mode de production, et même lorsqu’elle est inférieure (quantitativement) à la mobilisation réactionnaire impulsée par les secteurs les plus ‘radicaux’ de la bourgeoisie (c’est le cas aujourd’hui : le FN mobilise largement plus que la gauche ‘radicale’ et révolutionnaire réunie ; et ‘toute la droite’ – UMP, FN et autres – plus que ‘toute la gauche’ en incluant le PS et les Verts, sans même parler des personnes votant encore à gauche mais de plus en plus gagnées par des idées de droite voire d’extrême-droite).

    besancenot-mc3a9lenchonÀ partir de là, en ‘première ligne’, en ‘tête de file’ de cette mobilisation, l’on va voir apparaître deux types d’individus : 1°/ des personnes sincères, issues des masses et mues par l’objectif sincère de servir celles-ci, même si c’est avec des conceptions politiques (encore) très limitées, voire totalement réformistes ; et 2°/ des personnes issues des masses mais que l’on peut qualifier de ‘déclassées’, dans le sens où ce n’est pas l’intérêt de leur classe (fut-ce une classe ‘intermédiaire inférieure’) qui les guide… mais leur propre intérêt et leurs ambitions personnelles, ‘frustrées’ par l’organisation sociale capitaliste ‘telle qu’elle est’, n’y trouvant pas la place qu’elles estiment leur revenir, voyant bien (car pas idiotes) que ‘ça va péter’ et donc ‘chevauchant’ la mobilisation de masse pour essayer de rester, dans le torrent impétueux de l’histoire, ‘debout dans la barque’, ‘sur le haut du panier’. Appelons ces personnes les ‘arrivistes militants’ (un troisième type de personnes, que l’on pourrait rattacher au deuxième, sont celles qui ‘défendent leur bifteck’, leur ‘gagne-pain’, sans réelle perspective de classe ni encore moins d’émancipation sociale générale – mais généralement elles ne se situent pas en ‘première ligne’, en ‘tête de file’, elles forment plutôt les troupes de la frange réformiste du deuxième type, que nous allons voir).

    44569466 prachanda body apEt encore de là, un se divisant toujours en deux, ce deuxième type de personnes va à son tour se scinder : d’un côté, celles et ceux que leurs éventuelles aptitudes et les circonstances (en ‘chevauchant’ la mobilisation ouvrière et populaire) vont amener à rencontrer l’opportunité (étymologie même d’opportuniste’) de se faire une ‘niche écologique’, une ‘petite place’, de ‘s’intégrer’ dans l’organisation sociale telle qu’elle est, sans la balayer de fond en comble mais simplement en la réformant… voire même pas : certain-e-s peuvent même se faire des ‘professionnels du militantisme’ ou de la politique. Ayant trouvé là leur ‘planche de salut’, ils/elles vont évidemment abandonner le chemin de la révolution, parfois totalement, lorsqu’ils/elles n’en ont plus du tout besoin (cf. les innombrables ‘reconvertis’ du mouvement ‘gauchiste’ de 1968, dans le journalisme et les médias en général, le monde universitaire, l’intellectualisme’ médiatique ou carrément l’entrepreneuriat, etc. etc.) ; mais parfois, leur ‘place au soleil’ va résulter de leur ‘militantisme’ même et ils/elles vont donc le poursuivre, mais dans un sens réformiste et social-traître, car tel est le rôle que leur a confié la bourgeoisie en les ‘cooptant’ : CONTENIR dans les ‘limites de l’acceptable’ (pour la pérennité du système) les luttes des masses contre les méfaits du capitalisme. Leurs troupes vont être composées, on l’a dit, des travailleurs/euses resté-e-s dans les limites du réformisme (et que les communistes n’ont pas réussi à extraire de celles-ci), sans même parler, on l’a dit, de ceux et celles resté-e-s dans les limites de la défense ‘corporatiste’ du ‘bifteck’.

    Mais de l’autre il y a ceux et celles, ‘arrivistes militant-e-s’, aspirant-e-s ‘cadres révolutionnaires’ et ‘guides éclairé-e-s’ des rouges lendemains, qui vont perpétuellement rester sur la touche. Parmi ceux et celles-là, il va y avoir celles et ceux qui vont ‘lâcher prise’, se replier sur la ‘défense du bifteck’ et se ranger derrière les leaders réformistes ‘radicaux’. Et puis il y a celles et ceux qui vont persévérer, car seule une ‘rupture radicale’ avec l’organisation sociale telle qu’elle est peut (éventuellement, en tout cas, c’est ainsi qu’ils/elles l’imaginent) leur permettre de trouver dans la lenine-la-maladie-infantile-du-communisme-le-gauchisme-livrsociété la place qu’ils/elles estiment leur revenir. Ceux et celles là forment la base sociale du sectarisme politique. Encore au-delà (mais en ‘France’, c’est rare : ‘pas folles les guêpes !’), il va y avoir ceux et celles qui vont ‘craquer’, ‘péter un plomb’ et ‘passer à l’action’ concrète – de manière totalement coupée, déconnectée, des masses et de leur mouvement réel : ce sont les aventuristes.

    Derrière eux et elles, il va y avoir, encore une fois… celles et ceux que la faiblesse du mouvement communiste authentique les laisse capter dans leur orbite : des prolétaires et des personnes du peuple désorientées, rendues amères par l’accumulation de trahisons des dirigeant-e-s réformistes et par les injustices et les désillusions en série vécues dans la société capitaliste (c’est, on l’a déjà dit, un réflexe défensif de certain-e-s prolétaires avancé-e-s vis-à-vis de l’hégémonie révisio-réformiste et des social-traître) ; et aussi, des personnes du peuple qui dans le sinistre quotidien de l'existence capitaliste, pour dire - peut-être - les choses un peu brutalement, se 'cherchent une vie', une 'raison d'être', une 'importance sociale' qu'elles ne trouvent pas dans le cadre du capitalisme et vont donc chercher dans l'engagement révolutionnaire malheureusement, ce n'est pas la bonne manière d'aborder celui-ci. Au sujet de Lénine, le progressiste anglais Bertrand Russell disait que : "Dans les révolutions, on relève habituellement trois types de personnes : celles qui animent la révolution parce qu'elles ont un tempérament anarchique et turbulent, celles que les souffrances personnelles ont rendues amères, et puis il y a celles qui ont une conception définie d'une société différente de celle qui existe, ce qui, si la révolution triomphe, leur permet de travailler à la création d'un monde stable, en accord avec leurs conceptions. Lénine appartenait à ce troisième type de personnes, le plus rare, mais aussi, de loin, le plus utile". Il est frappant de voir à quel point les deux premiers types décrits ressemblent aux troupes (voire aux cadres !) du gauchisme... En dernière analyse, le gaucho-sectarisme, ce sont les opportunistes ratés et aigris.

    Il n’est pas difficile, car les indices en sont légion, de saisir la nature de classe des dogmato-sectaires à travers leur pratique, fut-elle purement ‘journalistique’ ou – aujourd’hui – ‘internétique’ :

    - Le sectarisme, le rejet vis-à-vis des autres forces luttant contre le capitalisme, au lieu de chercher à en prendre la tête, à en devenir le centre d’agrégation et à les conduire sur le chemin de la révolution, parle on ne peut plus clairement : la révolution, c’est ‘bien’... si c’est dirigé par eux/elles, et pas autrement. Ils/elles ne peuvent concevoir une révolution dont ils/elles ne seraient pas les cadres dirigeant-e-s. Les autres qui, en fin de compte, veulent leur ‘piquer leur place’ à la tête de la révolution ne peuvent être que de sombres agents  déguisés de la contre-révolution, des sociaux-traîtres quand ce ne sont pas carrément des fascistes (des ‘SA’) en puissance[NDLR-MÀJ le vocabulaire s'est encore enrichi depuis la rédaction de cet article : populistes’, ‘post-modernes’, dernièrement ‘maximalistes’ etc. etc.]. Ce sont des ‘concurrents’ à combattre sur un ‘marché’ : le ‘marché’ de la ‘proposition révolutionnaire’, qu’il s’agit de ‘vendre’ aux masses. Alors que les communistes authentiques, eux/elles, considèreront que dans toute organisation (y compris la leur, au sein de laquelle il faut lutter fermement) il y a certes des ‘arrivistes’, des personnes faisant la révolution (ou militant, en tout cas) pour elles-mêmes et non pour servir le peuple ; mais il y a aussi – et surtout – des personnes dont la conception/compréhension du monde, la conscience révolutionnaire, est imparfaite et limitée et qu’il s’agit de ‘tirer vers le haut’, vers sa conception du monde – lorsque l’on croit réellement en elle, ce qui est la moindre des choses.

    Considérations diverses : Sur la question du SECTARISME - Spécificité ‘française’, la défense de la ‘République française une et indivisible’ (l’organisation sociale et l’appareil politico-militaire et idéologique qu’il s’agit précisément... de détruire), dont la révolution prolétarienne ne serait que le ‘prolongement’ vers la mythique ‘Commune universelle’ (rejoignant en cela les ‘sociaux-républicains’ opportunistes et révisionnistes). C’est là, réellement, un marqueur quasi-unanime et quasi-infaillible des dogmato-sectaires (en particulier, bien sûr, de ceux et celles gravitant autour des universités et du ‘monde des idées’ parisien, mais pas seulement, pour ne pas nommer une certaine organisation ‘anarchiste’ toulousaine). De ‘grands’ intellectuels, reconnus (et ayant donc, généralement, versé dans l’humanisme-démocratique-radical), comme un Sartre ou un Badiou, peuvent éventuellement se permettre de prendre la défense (démocratique) des ‘minorités’ (nations périphériques ou ‘colonies intérieures’) : leur position est assise, consolidée, et ils n’ont pas grand chose à y perdre. En revanche, l’organisation sociale ‘République française une et indivisible’ sous-tend l’existence sociale même de la petite bourgeoisie intellectualoïde qui forme le gros des cadres – et parfois l’armée mexicaine (cadres sans troupes) – des organisations sectaires ; en sous-tendant ce ‘monde universitaire’, ce ‘monde des idées’ qui est sa niche écologique. C’est (donc) un indice imparable de la nature de classe du sectarisme. Dans les constructions étatiques qui n’excluent pas (mais au contraire intègrent) la reconnaissance des nations constitutives et des ‘minorités’, comme l’État espagnol post-1978 ou le Royaume-Uni britannique, on rencontre beaucoup moins (bien qu'on le rencontre) ce phénomène (à l‘extrême-gauche’ s'entend).

    - Le côté ‘perfectionniste’, ‘puriste’ idéologique, ‘tout doit être parfait’ dès le départ, ‘la moindre erreur dans le logiciel idéologique, et tout est fini à court ou moyen terme’, etc. etc. ; qui pue à plein nez le prof, l’universitaire cartésien (en tout cas l’intellectuel ayant aspiré à l’être et n’ayant pas pu). Le prolétaire, ne serait-ce que dans sa vie productive, ne raisonne pas ainsi : il essaye, il se plante, il réessaye, et ainsi de suite jusqu’à ce que ‘ça marche’, et ce faisant, il apprend. Manière de fonctionner que l’on retrouve lorsque le prolétariat est en mouvement pourconrad1 son émancipation, et raison pour laquelle le b-a-ba du marxisme est que le processus révolutionnaire d’émancipation se déroule ainsi : situation matérielle (exploitation, oppression) -> idée (de se révolter) -> pratique (on passe à l’action) -> théorie (on a généralement échoué, on tire les leçons et on les synthétise dans une théorie révolutionnaire) -> pratique qualitativement supérieure etc. etc. Il est tout de même hallucinant que l’on puisse se réclamer du maoïsme et exiger que ‘tout soit parfait dès le départ’, lorsque l’on sait le nombre d’erreurs commises et de terribles revers subis par le PC de Chine avant de devenir ce qu’il est devenu...

    Le dogmato-sectarisme, tant qu’il ne devient pas aventurisme (il ‘faut’ alors le réprimer, d’un point de vue d’‘ordre public’), joue objectivement un grand rôle au service de la classe dominante : en effet, s'il est certes beaucoup moins important quantitativement que l’opportunisme réformiste, il n’en est pas moins une voie de garage pour les forces qu’il capte à lui et, au lieu d’être un centre d’agrégation et une force d’impulsion pour une dynamique révolutionnaire, il est au contraire une force stérile, un ‘corps mort’ quand ce n’est pas carrément un centre de répulsion (un repoussoir pour les masses) vis-à-vis de l’’idée communiste’ et de l’engagement révolutionnaire.

    3. Conclusions

    Il faut donc retenir, de ce qui précède, principalement que :

    e-lutte-des-mineurs- Dans le prolétariat et dans chaque classe populaire (au stade impérialiste, toutes les classes populaires, soit 90% de la population, ont objectivement intérêt à abattre le capitalisme ; voire 100% de la population si l’on prend en compte la question de l’apocalypse environnementale), la conscience de classe, la compréhension du monde qui nous entoure et de ses enjeux, le rejet du capitalisme et la mise en pratique de ce rejet dans le mouvement réel, se développent en cercles concentriques : un ‘noyau’, une ‘pointe’ plus avancée qui maîtrise la science marxiste la plus avancée de notre époque, le marxisme-léninisme-maoïsme ; un ‘premier’ cercle qui maîtrise (à tout le moins) les bases du marxisme ; un autre cercle qui est, tout du moins, anticapitaliste révolutionnaire (qui veut en finir avec le capitalisme et le remplacer par une autre société, égalitaire, sans oppression ni exploitation) ; un autre cercle encore qui ne croit pas que l’on puisse en finir avec le capitalisme, mais que l’on peut le réguler et l’humaniser (les réformistes, plus ou moins ‘radicaux’) ; enfin, les personnes qui demeurent totalement prisonnières de l’idéologie dominante (le ‘peuple de droite’, dont de très nombreux-ses prolétaires) ou pire, qui tombent dans les filets du discours ‘antisystème’ et ‘révolutionnaire’ du fascisme.

    La pensée humaine – c’est-à-dire la conscience (perception) et la compréhension du monde qui nous entoure, et les théories que l’on en tire – est un reflet de la réalité matérielle, et de la contradiction principale qui met cette réalité en mouvement. Ainsi, les cercles concentriques d’avancement de la conscience de classe, de la conscience d’opprimé-e, plus ou moins développée en théorie révolutionnaire solide ou, au contraire, encore engluée dans le réformisme/possibilisme ou la réaction, ne sont en dernière analyse qu’un reflet de la contradiction entre le caractère de plus en plus social et international de la production (matrice du nouveau, de toutes les ‘idées nouvelles’, révolutionnaires, progressistes) et la propriété privée des moyens de production et  l’appropriation privée (inégalitaire) du produit, avec tous les rapports sociaux sous-tendus, qui sont la base matérielle de l’ancien, des idées, des comportements sociaux, des habitudes réactionnaires. L’un est en quelque sorte (pour ceux et celles qui ont fait de la physique-chimie) le Partigiani thumb[3] ‘pôle’ du nouveau, du progrès, de la conscience politique révolutionnaire voulant le communisme ; l’autre est le ‘pôle’ de l’ancien, de la réaction, de la conscience politique réactionnaire voulant le statu quo ou une ‘révolution’ réactionnaire fasciste. Et entre ces deux pôles, les ‘particules’, les 'ions' que sont les individus des masses populaires, se répartissent en fonction de la force d’attraction exercée par chaque ‘pôle’.

    - Le rôle d’un Parti communiste révolutionnaire authentique est donc d’’animer’ ce pôle du nouveau, de lui donner vie et de lui permettre d’être le centre d’agrégation des masses en mouvement objectif contre le quotidien que leur impose le capitalisme. Le ‘nouveau’ en question étant, à notre époque, le stade ultime du processus de l’histoire humaine, le communisme qui, à partir de la société capitaliste actuelle, se rejoint à travers en processus en deux temps : la Guerre populaire et la transition socialiste, entre les deux se trouvant la prise de pouvoir par le prolétariat et son avant-garde politique organisée. La base pour que le Parti devienne ce centre d’agrégation est d’abord et avant tout sa conception (révolutionnaire, prolétarienne) du monde, la qualité de cette conception du monde. Le premier problème des opportunistes/possibilistes et des gauchistes (dogmato-sectaires ou aventuristes) est là : leur conception du monde est limitée, arriérée, erronée. Les un-e-s suivent les masses au lieu de les otan-strasbourg-anti09entraîner, ils se contiennent et, donc, contiennent les masses dans leur niveau de conscience présent, ultra-majoritairement réformiste/possibiliste ; et là-dessus vont venir prospérer certain-e-s, dirigeant-e-s politiques ou syndicaux qui entretiendront activement cette état de fait dont ils tirent leur ‘importance sociale’. Les gauchistes, les ‘ultra-avant-gardistes’ (c’est là, finalement, le trait essentiel du gauchisme), eux/elles, ne croient pas en les masses et en leurs possibilités, ils ne comprennent pas le lent processus dialectique d’émergence d’une conscience révolutionnaire de masse ; les masses, le prolétariat, même leurs éléments les plus avancés sont donc ‘nuls’, ne ‘comprennent rien à rien’ et le ‘Parti’ (c’est-à-dire nos singes savants) doit donc se substituer à eux : c’est ce qui s’appelle la théorie de la suppléance, qui a notamment gangréné le mouvement révolutionnaire européen et occidental dans les années 1970-80 (sauf en Italie, en tout cas avant la grande défaite de 1977). La conception correcte (d’un point de vue révolutionnaire) du monde et de ses phénomènes (à commencer par celui que l’on prétend diriger : la révolution prolétarienne) se construit à travers la pratique, la ligne de masse (l’implication concrète et la prise de position de chaque instant dans le mouvement réel de la société qui nous entoure) et la lutte de lignes permanente au sein de l’organisation révolutionnaire, qui permet de ‘séparer le bon grain de l’ivraie’, les conceptions révolutionnaires prolétariennes des conceptions influencées par l’hégémonie intellectuelle bourgeoise, le nouveau de l’ancien, les idées justes des idées fausses – conceptions bourgeoises et petites bourgeoises, ancien et idées fausses étant le terreau sur lequel prospèrent les arrivistes de tout poil, les opportunistes et le gauchisme. Elle se diffuse par l’agitation et la propagande en direction des masses ; et, au final, elle débouche sur les ‘trois épées magiques’ : Autonomi3Parti (conséquent, ne se réduisant plus à un petit cercle de quelques individus), Armée et Front uni révolutionnaire, qui marquent l’entrée dans la Guerre populaire révolutionnaire proprement dite. À ce moment-là, l’organisation révolutionnaire (les ‘trois épées’) devient l’élément principal du processus révolutionnaire ; mais d’abord, pour en arriver là, la conception du monde est l’aspect principal, ce que Lénine résumait par : ‘sans théorie révolutionnaire, pas de mouvement révolutionnaire’. Les opportunistes ne peuvent devenir un tel centre d’agrégation, les ‘locomotives’, les ‘premiers de cordée’ conduisant les masses vers le communisme, car ils/elles se maintiennent dans le niveau de conscience présent de la majorité des masses et, en retour, maintiennent les masses dans celui-ci, finissant par se faire objectivement (du moins) les agents de la classe dominante pour les y maintenir. Les gauchistes, les dogmato-sectaires, ne peuvent quant à eux/elles devenir un tel centre d’agrégation car ils/elles ne se lient pas aux masses (croyant détenir ‘LA vérité’, ils/elles sont conscient-e-s que s’impliquer dans le réel remettrait cette certitude en cause), ils/elles les rejettent lorsqu’elles ne correspondent pas à leur idée ‘perfectionniste’ de la ‘classe ouvrière révolutionnaire’, conçue comme tellement parfaite qu’elle n’existe pas et qu'en fin de compte, le ‘Parti’ (eux/elles) doit s’y substituer. Ils finissent par devenir, même, un facteur de répulsion pour les masses envers les beaux mots de ‘communisme’, ‘révolution prolétarienne’, ‘marxisme’, ‘léninisme’ ou ‘maoïsme’.

    manifestation-barcelone pics 809- Les questions nationales (ou plutôt la Libération révolutionnaire des Peuples niés - LRP) en Hexagone, la question des colonies intérieures, la question d’un anti-impérialisme sans faille outre-mer, ont déjà été largement rebattues en long, en large et en travers sur SLP – et nous aurons encore, sans doute, l’occasion d’y revenir. Dans l’incompréhension, ou la mauvaise compréhension de ces questions, réside le secret de l’impuissance du prolétariat hexagonal dans sa lutte pour le pouvoir. Le mouvement révolutionnaire du prolétariat de ‘France’ est l’un des plus anciens au monde (années 1840). Un Parti communiste s’est formé immédiatement après la Révolution russe d’Octobre 1917, en 1920. Si le prolétariat révolutionnaire de l’Hexagone ‘français’ n’a pas réussi, depuis tout ce temps, à conquérir le pouvoir (le PCF reculant au moment – 1944-46 – où il pouvait commencer à l’envisager), c’est parce qu’il n'a pas pris la juste mesure de l’ennemi, qu’il l’a très largement sous-estimé : la ‘République française’, avec sa divinité ‘Marianne’ et son ‘coq gaulois’ tutélaire, trône en réalité au sommet d’une montagne de cadavres, au sommet d’une pyramide de 800 ans de crimes.

    Lorsqu’une quelconque organisation ne croule pas sous une prétention sans bornes, passe encore, mais voir des personnes se prétendant (à l’exclusion de toutes autres…) l'‘avant-garde’ de la révolution prolétarienne défendre la construction politico-militaire et idéologique monarcho-bourgeoise ‘France’, ennemi principal et absolu de tous les prolétaires de son territoire et des peuples d’un nombre considérable de pays pseudo-‘indépendants’ ; défendre son caractère ‘progressiste’ des siècles après la disparition de toute trace de celui-ci ; défendre la culture de sa classe dominante (élément essentiel du dispositif d’encadrement des masses), la culture des ‘Siècles’ en prenant des poses de chargé-e-s de TD en fac de lettres[1] ; défendre le mensonge historique (certes ‘utile’ en son temps, dans la perspective de progrès représentée par le développement du capitalisme) qu’elle est une ‘nation’ et même aller jusqu’à pourfendre l’internationalisme comme du ‘cosmopolitisme’ ou les revendications démocratiques des colonies intérieures comme du ‘communautarisme’ et du ‘racisme anti-blancs’ ; c'est inadmissible mais en même temps totalement révélateur de leur nature de classe et idéologique de petits bourgeois, qui ne font pas la révolution par et pour le peuple mais par et pour eux-mêmes, pour en être les cadres. 

    euskal herria drapeaurougeLà encore, à la conscience et à la compréhension de ces questions s’applique un phénomène de concentricité, ou plutôt de double concentricité : conscience/compréhension de ces questions en tant que telles (des personnes qui en ont une compréhension correcte, jusqu’à celles qui, bien que parfois très impliquées dans les ‘luttes sociales’, en ont une compréhension faible voire inexistante) et conscience/compréhension plus ou moins prolétarienne de celles-ci, ou au contraire petite-bourgeoise, voire totalement bourgeoise et réactionnaire (‘régionalisme’ maurrassien, obscurantisme religieux, ‘communautarisme’ xénophobe etc.). Une des tâches essentielles des communistes révolutionnaires authentiques au sein des différents MLN est de réussir à articuler correctement ces deux concentricités, en tissant leurs alliances dans une direction ou dans l'autre en fonction des sujets à l'ordre du jour, et en ayant toujours en ligne de mire la fusion de la 'question sociale', des questions 'démocratiques générales' et de la question nationale dans un grand (pour le moment, il est 'petit') Mouvement révolutionnaire de Libération des Peuples (MRLP). Dans le cas contraire, si l'on n'adressait la parole ni à ceux et celles qui ont une compréhension avancée et combattive de la lutte de classe, mais sont 'léger-e-s' sur la question nationale, ni à ceux et celles qui militent sur la question nationale mais sont ou seraient 'petits bourgeois', le MRLP s'isolerait des masses et de leur mouvement réel et sombrerait dans le sectarisme qu'il s'agit justement de dénoncer ici.

    maoist-nepal-revolution-pla-militia-guerrilla-freedom-liber- En définitive, l’opportunisme et le gauchisme dogmato-sectaire (ainsi que son ‘cousin’ plus ‘anti-théorique’ et ‘actionniste’, l’aventurisme, mais celui-ci est beaucoup plus rare en Hexagone) sont l’un et l’autre objectivement au service de la classe dominante. Le premier parce que, s’appuyant sur l’immédiatisme des revendications ouvrières et populaires (qu’est ce que je mange ce soir ? comment je boucle le mois ? mon usine ferme et je vais être licencié : qu’est-ce qu’on me propose ?) et sur une satisfaction (très) partielle mais immédiate de celles-ci, il enferme le mouvement réel du prolétariat et des masses dans les limites de l’’acceptable’ pour les exploiteurs et leur système. Le second parce qu’il capte à lui dans une voie de garage, sans issue, des éléments populaires particulièrement ‘radicaux’ et combattifs qui pourraient, dans une organisation révolutionnaire avec une ligne correcte, être extrêmement efficaces et utiles à la lutte révolutionnaire ; parce que du point de vue idéologique (de la science marxiste) il est stérile – il ne fait pas vivre le marxisme dans la pratique de la lutte, puisqu’il n’en a pas ou très peu, et cette stérilité renforce le dogmatisme qui lui-même renforce l’absence de pratique et donc la stérilité, etc. ; enfin, parce qu’il n’agit pas comme centre d’agrégation et même parfois, au contraire, il agit comme centre de répulsion (envers le marxisme) vis-à-vis du prolétariat et des masses en mouvement qui cherchent une issue à la condition quotidienne que leur impose le capitalisme.

    - Tout cela tient, encore une fois, tout simplement à la nature de classe (ou, en tout cas, à l’influence de classe reçue dans leur existence sociale) de ces individus, qui ne font pas la révolution pour servir le peuple (le prolétariat et les masses populaires en général), ni même leur classe (le cas échéant) non-prolétarienne, mais eux-mêmes, leurs ambitions personnelles qui ne peuvent être satisfaites dans le capitalisme tel qu’il est : les opportunistes sont celles et ceux qui peuvent trouver leur ‘place au soleil’ dans un capitalisme réformé ou qui, simplement, rencontrent sur leur parcours une opportunité de cooptation par la classe dominante, pour (par exemple) encadrer dans des limites réformistes ‘acceptables’ black-panthers-breakfast-for-children-programle mouvement de masse ; les gauchistes sont celles et ceux qui… tout simplement ne rencontrent pas de telles opportunités, et épanchent donc leur aigreur dans l’ultra-‘radicalité’, le ‘plus-rouge-que-moi-tu-meurs’ (le capitalisme ne leur offrant aucune opportunité d’être ‘quelqu’un’, il doit donc disparaître, mais l’intérêt qui les meut dans cet objectif n’est pas prolétarien : si par le plus grand des hasards ils devaient parvenir au pouvoir, ils n’instaureraient rien d'autre qu’un capitalisme d’État, un système inégalitaire d’exploitation ‘emmailloté de rouge’).

    Opportunistes et dogmato-sectaires sont des ‘chancres’, des ‘parasites’ du mouvement révolutionnaire contre le capitalisme ; mouvement dont la faiblesse organisationnelle et idéologique est leur terreau. Lorsque le mouvement révolutionnaire, avec un authentique et conséquent centre d’agrégation communiste, reprend de la vigueur, leurs positions tendent à se disloquer : soit ils/elles essayent (pour certain-e-s) de ‘prendre le train en marche’ et deviennent - ainsi - partie du mouvement mais aussi, par leurs conceptions et leurs motivations égocentriques, des freins à celui-ci, ce à quoi il faut rester vigilant-e-s ; soit ils/elles se ‘neutralisent’ et disparaissent de la circulation ; soit ils/elles ‘tombent le masque’ et se font les ennemis ouverts de la révolution en marche... En revanche, toutes les personnes militant-e-s sincères, fussent-elles (à l’heure actuelle) totalement réformistes, sont vouées au final à subir d’une manière ou d’une autre la force d’attraction du ‘noyau dirigeant’ révolutionnaire communiste, dans ce que l’on peut appeler un processus de décantation.

         

    À lire également :  Sur le processus révolutionnaire  et  Sur le processus révolutionnaire (2)

    Thèses fondamentales pour la construction partidaire

    Considérations diverses : Le TROTSKISME DE NOTRE ÉPOQUE

    Récapitulatif des "grandes thèses" de Servir le Peuple

    Sur l'antifascisme : 2011 : un point indispensable sur le fascisme et l'antifascisme pour les années à venir

    Sur les questions nationales dans les grandes métropoles impérialistes et leur 'articulation' avec la 'question sociale' : La Question nationale au 21e siècle ; Considérations diverses : un (gros) pavé sur la Question nationale et Clarification sur l'encerclement du 'Centre' par la 'Périphérie' ; les études sur l'État 'France' (1 - 2 - 3), l'État espagnol et l'État 'Royaume-Uni' (1 - 2).

    Voir aussi la brochure du PCmF : Pour l'Unité des communistes, qui aborde la question de la 'décantation' des forces révolutionnaires et offre un 'tour d'horizon' assez intéressant des organisations se réclamant (en Hexagone) du marxisme-léninisme ou du maoïsme.

     

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    [1] Alors que nous, communistes révolutionnaires, chantons avec Pino Masi : ‘‘la scuola dei padroni non funziona più, ma solo come base rossa ; la cultura dei borghesi, non ci frega più, l’abbiamo messa nella fossa’’ (l’école des patrons ne fonctionne plus, sinon comme base rouge ; la culture des bourgeois, nous n’en avons plus rien à faire, nous l’avons mise à la fosse)

     

     


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