• (Conception du monde) Le Parti révolutionnaire : ARTISAN conscient... ou 'accompagnateur contemplatif' du mouvement historique ?


    communisme.jpgUn nouvel article du site 'Voie Lactée' présente, encore une fois (c'est bien là le mérite essentiel, pour ne pas dire le seul, de ce groupe), une 'matière à débat' extrêmement intéressante pour la construction de la conception communiste du monde à laquelle nous voulons contribuer. La question posée est, synthétiquement : le rôle des communistes, avant-garde la plus consciente et organisée du prolétariat révolutionnaire, est-elle d'impulser, d'animer, de diriger le 'mouvement historique réel' de l'humanité vers le communisme - mouvement qui sans cette direction risque fort de rester emprisonné dans les 'vieux murs' de l'ordre existant, de se limiter au réformisme, voire de tomber dans la réaction ; ou (position de 'Voie Lactée') simplement d'y 'correspondre', de l''accompagner' en s'efforçant d'être toujours du côté du 'nouveau' (ce qui vu leur position sur les questions 'nationales', les 'libérations populaires révolutionnaires' d'Hexagone, n'est pas gagné d'avance...), sachant que pour eux (ce qui n'est pas tout à fait faux, au demeurant) le mouvement de l'humanité vers le communisme s'inscrit dans le mouvement général de la matière universelle vers ce même horizon. Disons-le clairement : TOUT N'EST PAS FAUX, tout n'est pas à rejeter dans les conceptions développées. Mais, néanmoins, sont exprimés des points de vues qu'une conception marxiste du monde, au regard de plus de 160 ans de mouvement socialiste/communiste, ne peut que rejeter catégoriquement - ils admettent eux-mêmes l'hétérodoxie de leur position, essayant de prendre appui sur Gonzalo du PC du Pérou, mais vont (ce qui n'est pas dans leurs habitudes) jusqu'à critiquer Staline.

    L'affirmation - selon nous erronée - est donc que, finalement, le mouvement réel de l'histoire humaine vers le communisme, lui même petite partie du 'mouvement universel de la matière', n'a 'pas besoin' des révolutionnaires, de l'avant-garde de la classe révolutionnaire 'jusqu'au bout' (aujourd'hui les communistes, avant-garde du prolétariat), pour exister et se développer jusqu'à une nouvelle étape, un nouveau mode de production et une nouvelle société du processus historique : il 'suit son cours' naturellement, le rôle des révolutionnaires est de l''accompagner' en se plaçant toujours 'du bon côté de la barricade'. Ils n'ont pas de rôle d'animation (mise en mouvement), d'impulsion, de dynamisation et de direction dans le processus qui conduit, d'étape en étape, vers le mode de production et le niveau de civilisation supérieur : en ce qui nous concerne, d'étape en étape vers la conquête du pouvoir par le prolétariat à la tête des masses populaires puis, d'étape en étape 'socialiste', de cette prise de pouvoir vers le communisme. Cela, selon eux, parce que 'l'être humain ne pense pas', sa pensée n'est que le 'reflet' d'une étape donnée du processus historique qui 'suit son cours' par lui-même (expression dans la société humaine du mouvement général de l'Univers).

    Cela est selon nous gravement erroné ; c'est une 'pente savonneuse' pouvant conduire aux pires dérives, la moins grave desquelles (peut-être) étant l'attentisme le plus complet ; et nous allons en expliquer les raisons.

    La pensée, certes, procède de la réalité matérielle ; elle est un REFLET de la réalité matérielle et de ses contradictions, et notamment de la contradiction MOTRICE de l'époque considérée : nous avons ainsi la pensée progressiste, porteuse et au service du nouveau ; la pensée révolutionnaire (organisée pour agir au service du nouveau dans un 'changement radical', sans attendre les alternances électorales) ; et puis la pensée COMMUNISTE marxiste (organisée pour agir sur la base d'une compréhension scientifique, matérialiste du monde qui nous entoure), avec sa 'pointe avancée' maoïste ; qui toutes sont en dernière analyse le reflet, plongent leur plus profonde racine dans le caractère de plus en plus social et universel de la production. Et puis de l'autre nous avons la pensée conservatrice ou carrément réactionnaire, défendant l'ancien ; ou la pensée individualiste, 'amorphe' ou 'je-m'en-foutiste', 'pense-qu'à-ma-gueule', dans tous les cas totalement inféodée à l'ordre établi et à l'idéologie dominante ou vautrée dans la 'sous-culture' à destination des masses produite par celle-ci : tout ceci est en dernière analyse le reflet, l'expression de la propriété privée des moyens de production et de l'appropriation privée (inégalitaire) du produit.

    Mais ensuite ? Pour transformer (en bien ou en mal, en victoire du nouveau ou en victoire - temporaire - de l'ancien) la réalité sociale (société humaine) dans laquelle nous vivons, toutes ces pensées doivent s'organiser pour agir et devenir FORCE MATÉRIELLE : "La théorie se change [...] en force matérielle dès qu'elle saisit les masses" (K. Marx ; Critique de la philosophie du droit de Hegel, 1843), sous-entendu les masses conscientes et organisées, décidées à agir. Dans la 'matière non-humaine', les cellules, les molécules, les atomes, bref toutes les composantes diverses et variées (aux 'pôles' de la contradiction motrice) de ladite matière 'utilisent' différents instruments physiques et chimiques pour la transformer. Dans la 'matière (sociale) humaine', l'instrument de la transformation dialectique est la pensée organisée dans l'action... Tout simplement.

    envencible guerra populara 3 montanas'Voie Lactée' nous expose '4 conceptions différentes du maoïsme', la dernière (celle de Gonzalo du Pérou) se subdivisant elle-même en deux interprétations possibles. Mais à chaque fois, nous disent-ils, les personnes décrites (militant-e-s politiques, y compris eux-mêmes) ont 'choisi' ou 'voulu' ceci, 'décidé' ou 'cru pouvoir' cela ('gérer la réalité' ou simplement l''accompagner', 'reconstruire le vieux MRI' ou 'correspondre à la réalité' en soutenant la Guerre populaire en Inde, 'saluant' celle du Pérou, rejetant la trahison au Népal et appelant à une nouvelle conférence MLM, etc. etc.). C'est donc, dans leur raisonnement et dans leurs mots mêmes, qu'il y a bien à un moment donné une 'décision', un 'choix', une 'volonté' de dire et faire ceci ou cela... non ? Les maoïstes du Pérou, d'Inde, des Philippines ou du Népal ont bien, à un moment donné, après analyse concrète de la situation concrète, décidé de lancer la Guerre populaire sous sa forme armée de masse...

    Si l'on voulait toujours 'accompagner la réalité', que de choses ne ferait-on pas ! À vrai dire on ne ferait carrément rien du tout... puisque la 'réalité' que l'on 'accompagne', dans le cas de la société humaine qui nous intéresse, c'est et ce serait toujours l'action des autres. Que le marxisme nous ait toujours enseigné qu'il faut savoir agir 'ni trop tôt, ni trop tard', c'est une chose ; dire qu'il faut tranquillement regarder passer le fleuve du mouvement réel de l'histoire depuis la rive... c'en est une autre !

    À la question "et pourquoi donc, dans la vie politique en général mais même parmi des gens se réclamant en principe de la même chose (le maoïsme), y a-t-il autant de positions différentes et s'opposant ?" ; la réponse est tout simplement que, dans la contradiction motrice de la société humaine, les 'pôles' ne se posent pas 'basiquement', 'monolithiquement' comme 'ancien' et 'nouveau', 'bourgeoisie' et 'prolétariat', 'capitalisme' et 'socialisme-communisme'. La société, surtout une société capitaliste relativement avancée, est beaucoup plus complexe que cela ; les conceptions du monde émises par chaque 'pôle' (caractère social/universel de la production et propriété privée des moyens/appropriation privée inégalitaire du produit) s'entrechoquent et s'interpénètrent, il y a des milliers de petites positions différentes dans l'organisation sociale... Or la pensée n'est pas 'le reflet de la réalité' de manière absolue : elle est le reflet de la réalité telle que perçue depuis une certaine position donnée dans l'organisation sociale. Il y a même, à vrai dire, dans la pensée de chaque individu-e une part de 'nouveau' et une part d''ancien', dans des proportions variables et (bien sûr) luttant entre elles, au sein même de chaque petit cerveau... Si par exemple les avakianistes, qui se prétendent (évidemment) 'maoïstes', mettent en réalité en avant un 'démocratisme radical' petit-bourgeois intellectuel, c'est parce qu'ils/elles sont (les 'têtes pensantes' en tout cas)... des petits-bourgeois intellectuels au sein de l'organisation sociale 'États-Unis d'Amérique' ; en particulier des personnes incrustées dans l'appareil scolaire-universitaire du système ... tout simplement !

    zita 391C'est bien en ayant saisi cette complexité que les marxistes ont toujours expliqué qu'il y a, au milieu des masses populaires (l'ensemble de la population, sauf la classe qui dirige la production et gouverne/exploite la société), une 'classe révolutionnaire jusqu'au bout', le prolétariat qui est la classe totalement plongée dans le caractère social de la production ; mais que, au sein même de cette classe, tout le monde n'a pas le même niveau de conscience, de compréhension du problème-capitalisme et de sa solution révolutionnaire ; tout le monde n'a pas la même VOLONTÉ (eh oui !) de s'organiser et combattre, encore moins de consacrer voire sacrifier sa vie à ce combat ; et donc, cela donne lieu à une AVANT-GARDE RÉVOLUTIONNAIRE que l'on nomme 'Parti' (les éléments les plus conscients, décidés et organisés pour agir de la classe révolutionnaire jusqu'au bout, qui peuvent éventuellement, lorsqu'ils ont longtemps été maintenus dans l'ignorance, 'recruter' des éléments d'autres classes subalternes plus 'instruits').

    Cette volonté résulte de mille et un facteurs ne relevant pas seulement, d'ailleurs, de la 'place dans les rapports de production' (sans quoi tout-e ouvrier/ouvrière ou 'subalterne' au salaire minimum serait communiste...) ni de la 'place dans l'organisation sociale/rapports sociaux' (qui ne se limitent pas aux rapports de production) mais aussi - par bien des aspects - du parcours individuel, du vécu personnel de chaque personne... tout cela constituant le point du vue depuis lequel la personne perçoit la réalité, que sa pensée va refléter. Il en va de même pour les personnes des classes 'intermédiaires' que l'avant-garde prolétarienne va 'recruter' pour l'aider dans son combat : des milliers de facteurs de vécu personnel amèneront ces personnes à se ranger sous la bannière du prolétariat, et non de la bourgeoisie ('de droite' ou 'de gauche'). Évidemment, la 'pensée' au sens où l'entend 'Voie Lactée' - c'est à dire la CONCEPTION/COMPRÉHENSION COMMUNISTE de la réalité dans un pays donné - qui va guider l'action du Parti révolutionnaire dans ce pays n'est pas l’œuvre d'un seul individu : elle est l’œuvre de l'avant-garde, du Parti comme 'intellectuel collectif', ce qui va permettre (à travers la lutte interne idées justes/idées fausses) de 'lisser', d''épurer' cette pensée des imperfections qu'il y a inévitablement dans la pensée d'un individu isolé.

    solidarietàgramigna2Voilà pourquoi, selon nous, les thèses émises dans cet article de 'Voie Lactée' sont TRÈS DANGEREUSES, amenant les forces révolutionnaires vers un rôle 'attentiste critique' et 'contemplatif', à moins que le 'mouvement universel de la matière' dans un pays donné n'atteigne (tout seul, comme un grand ?) une étape où il se 'reflète' dans une 'pensée' qui déclencherait la Guerre populaire... ce que l'on peut, à notre humble avis, attendre longtemps ! On rejoint là, finalement, la critique que font les camarades du (nouveau) Parti communiste italien, dans leur 'bilan-synthèse' de la première vague de la révolution prolétarienne (1917-92), aux Partis communistes 'kominterniens' des pays occidentaux : ces Partis ont généralement attendu (en ce qui les concerne dans le travail politique légal, syndicaliste, électoraliste, d''agitation' par la presse etc.) que 'les conditions soient réunies' pour que la révolution 'éclate'. C'est cela qui les a amenés, toujours selon le (n)PCI, à passer sous la coupe de la 'gauche' bourgeoise, à s''institutionnaliser' et à s''enkyster' dans l'ordre social qu'ils prétendaient (au départ) combattre et abolir ; et ceci a été la base matérielle (pour ces Partis qui n'étaient pas au pouvoir) de l'émergence des idées révisionnistes (anti-marxistes mais habillées de marxisme 'repensé', un beau 'reflet dans la pensée' pour le coup !), émergence qui bien souvent a précédé de beaucoup la prise de pouvoir de Khrouchtchev en URSS.

    Ce que nous enseignent tant l'histoire du marxisme que la lecture marxiste de l'histoire, c'est que - certes - 'là où il y a oppression, il y a résistance' : il y a un mouvement 'mécanique', 'automatique', 'humain' de résistance et de révolte (même si minoritaire dans le groupe considéré) lorsque, dans une organisation sociale donnée, un groupe humain est opprimé par un autre (dans la partie proprement productive de l'organisation sociale, le mode de production, on dira qu'il est exploité). De même, le 'nouveau', les 'idées nouvelles', émergent aussi dans un premier temps 'spontanément' : elles naissent de la 'friction' entre le niveau des forces productives et l'organisation sociale, les rapports de productions, l'ensemble des rapports sociaux et les superstructures idéologiques liées qui systématiquement retardent sur celui-ci. C'est-à-dire, en définitive, de la 'friction' contradictoire des deux 'pôles' de la contradiction motrice de la société d'une époque. Mais voilà ! Pour amener, un jour, ces exploité-e-s/opprimé-e-s à briser définitivement leurs chaînes, pour mettre les 'idées nouvelles' définitivement au pouvoir, ce qui veut dire en définitive changer d'organisation sociale et donc de mode de production, il faut un 'saut' qui ne peut résulter que de l'action CONSCIENTE, volontaire, déterminée, organisée pour agir d'un groupe d'individus, l'avant-garde de la classe révolutionnaire de l'époque.

    Prenons l'exemple de la société féodale : les deux 'pôles' de sa contradiction motrice sont la propriété utile (paysanne ou bourgeoise) des moyens de production et la propriété éminente (seigneuriale, ecclésiastique) sur ces mêmes moyens de production et les producteurs, s'exprimant par toute une ribambelle de taxes, redevances, péages, 'travail volé' par la corvée etc. Au sein même de la société féodale va émerger et se développer le capitalisme, urbain et rural, sur la base de la propriété utile des moyens de production, ceci dès le 11e siècle et jusqu'au 18e. Ce nouveau mode de production 'enfermé' dans le mode de production féodal, et le niveau des forces productives qu'il développe comme jamais auparavant dans l'histoire, vont se heurter à la propriété éminente seigneuriale et à l'organisation sociale, à l'ensemble des rapports sociaux qu'elle sous-tend. Ceci va engendrer des Assassinat Etienne Marcel'idées nouvelles' en trois vagues : 1/ communalisme et monarchisme : le bourgeoisie des villes va chercher à arracher sa 'franchise' (liberté) à l'autorité seigneuriale, les paysans un minimum aisés vont aussi essayer de s'en affranchir ; les uns et les autres vont appuyer une dynastie, suzeraine 'lointaine', dans sa lutte contre ses vassaux féodaux (ducs, comtes et autres princes-évêques), 'suzerains immédiats' qui les oppriment. Ceci débouchera sur le 'premier absolutisme' (de Philippe Auguste à Louis XI) et les États modernes. Les nations font leur apparition dans ce contexte, le monarque en réunit généralement plusieurs sous son autorité : d'un point de vue populaire il les opprime toutes ; mais d'un point de vue bourgeois et paysan aisé il en soumet et opprime certaines mais en 'libère' beaucoup du 'suzerain immédiat' ou d'un autre 'suzerain lointain' dont ces classes ne voulaient pas (ou plus). L'avant-garde est constituée par les 'jurandes', les assemblées bourgeoises qui se mettent en place dans les villes, et les 'bourgeois de Cour' qui ont 'l'oreille' du souverain (les paysans sont moins organisés). 2/ Réforme protestante et humanisme non-protestant (16e siècle, première moitié du 17e), expression d'un nouveau 'bond' des forces productives capitalistes ; Guerres de Religion et (tentative de) Contre-réforme débouchant sur (déjà) un certain nombre de républiques ou des monarchies parlementaires bourgeoises (Angleterre, Hollande, cantons suisses), et ailleurs sur le 'second absolutisme', l''Ancien régime' des livres d'histoire. L'avant-garde est ici sous le drapeau religieux de la Réforme, ou rangée ME0000065074 3derrière les intellectuels humanistes. 3/ Lumières et révolutions bourgeoises proprement dites, qui généralisent à l'Europe et à l'Amérique du Nord les républiques et les monarchies parlementaires bourgeoises (1750-1850). Les dernières survivances féodales sont balayées avec l'absolutisme devenu inutile et obsolète. Les forces cléricales sont plus ou moins maintenues selon les besoins d'encadrement des masses, mais dans tous les cas amoindries. L'avant-garde est ici les philosophes 'éclairés', puis les 'sociétés' telles que la franc-maçonnerie et enfin les 'clubs' de révolutionnaires bourgeois (de Mirabeau à La Fayette, de Robespierre à Danton).

    À chaque étape, en tout cas, nous voyons bien que la résistance (des propriétaires 'utiles' contre les propriétaires 'éminents') et les 'idées nouvelles' n'auraient pas pu s'imposer,  imposer une nouvelle organisation sociale, sans l'action consciente et décidée d'une avant-garde de classe, 'analysant concrètement la situation concrète' mais ne se contentant pas de 'refléter' et d''accompagner' passivement le 'mouvement de la matière' (des forces productives avancées contre les rapports sociaux arriérés).

    Il en va exactement de même, aujourd'hui, pour le processus de la révolution prolétarienne mondiale. La 'marche au communisme' n'est effectivement pas un 'choix' purement subjectif (comme le prétendent les avakianistes) : elle est le sens 'naturel' (matérialiste) de l'histoire, le débouché 'obligé' de toute l'histoire humaine depuis la sortie de la préhistoire, la seule autre alternative étant (peut-être) la destruction de l'humanité – en tout cas de la civilisation (le ‘scénario Mad Max’). Mais elle a 'besoin', pour exister, d'une pensée humaine consciente, systématisée et organisée en intellectuel collectif, 'reflétant' la réalité et ses contradictions (devenues insoutenables) d'un point de vue de classe mais ensuite s'organisant pour agir, sans quoi aucune transformation de la réalité n'est possible. Et cet intellectuel collectif est constitué de pensées individuelles qui n'ont, certes, pas 'choisi' au sens idéaliste de penser ainsi ('touchées par le Saint-Esprit', 'éclairées par les Lumières de la Raison' etc.) mais ont vécu dans la réalité matérielle et ses contradictions, analysé cette réalité et ensuite synthétisé ('reflété') cela, en s'affranchissant (par mille et un facteurs) des 'vieux murs' de l'idéologie dominante, dans une théorie révolutionnaire.

    L’histoire humaine ‘marche’ objectivement vers le communisme (l’alternative ‘retombée dans la barbarie’ est en ‘éternel’ débat dans le mouvement communiste, nous ne lancerons pas ce débat ici) ; la pensée humaine (avancée ou arriérée, révolutionnaire ou réactionnaire) ‘reflète’ les différentes étapes de ce processus historique et les contradictions qui les animent… mais pour avancer et notamment pour effectuer les ‘grands sauts’ historiques (changement radical de classe dominante, de mode de production, d’organisation sociale et de civilisation) le processus a besoin d’une pensée humaine ACTIVE et agissante, convergence organisée d’une multitude de pensées individuelles (progressistes et révolutionnaires bien sûr) ‘reflétant’ la réalité historique concrète chacune de son point de vue et à sa manière ; et non d’une ‘pensée’ contemplative ‘accompagnant’ et ‘reflétant’ passivement l’époque, le moment historique – qui serait quoi… sinon l’organisation et l’action des autres ?

    C'est tout le 'paradoxe' de la chose, (presque) digne d'un 'mystère' du dogme chrétien : la pensée n'est que le 'reflet' de la réalité matérielle (sociale) d'une époque et de sa ou ses contradiction(s) fondamentale(s), mais cette réalité a besoin de cette pensée, de ce 'reflet' organisé et agissant (pensée politique et militante) pour se transformer ; ce sont, en quelque sorte, les 'enzymes' de sa transformation. Il en a toujours été ainsi, de tout temps et dans tous les coins du monde.

    [En gros si on veut synthétiser à l'extrême :

    - La barricade est là, ça c'est intangible et indépendant de notre volonté. Le Nouveau d'un côté, l'Ancien de l'autre.

    - Le résultat de la bataille peut être 1000 fois la défaite du Nouveau, mais sera toujours sa victoire à la 1001e, ça aussi c'est intangible ; la variable humaine qui dépend de nous c'est le nombre de défaites d'ici là.

    - Le "libre arbitre" relatif consiste en notre relative "liberté" de choix quant au côté de la barricade où nous nous plaçons (+ nous placer du bon côté, mais caguer le truc et conduire par nos erreurs à sa défaite temporaire). En fait ce n'est pas totalement "libre", c'est juste que ce n'est pas "déterministe grossier" (prolétaire = révolutionnaire par exemple) ; ça dépend de 1000 facteurs du vécu de chacun et dans la majorité des cas ça va être impossible à "expliquer", même par la personne elle-même, autrement que par son "choix" (on perdrait un temps précieux - euphémisme - à essayer d'expliquer au cas par cas les "choix" en ce sens de 7 milliards de personnes, une par une).

    - MAIS à un moment donné aussi, parmi ces facteurs intervient celui de (de la rencontre avec)... l'avant-garde révolutionnaire la plus consciente et son activité ; ensemble d'individus que leurs 1000 facteurs personnels à chacun ont conduits à militer, en avant-garde militante, du bon côté. C'est-à-dire qu'à un moment donné, un ensemble de "choix" mille-factorisés réunis et organisés pour agir ensemble vont eux-mêmes devenir... facteurs de "choix", chez les autres, de les rejoindre du bon côté.

    Ce qui est vrai par contre, c'est qu'il n'y a pas de "libre pensée" (dixit un camarade "les libres penseurs n'ont que trop régné sur le monde, ça commence avec Voltaire, ça finit avec Florent Pagny" LOL !) : il n'y a pas de "liberté" de penser ce que bon nous semble (ou à partir d'un prétendu "libre examen", ou - nouveauté du 21e siècle - en vertu d'un "point de vue de premier concerné" par une oppression, réputé incontestable), il y a la reconnaissance et l'OBÉISSANCE, la soumission à des IDÉES JUSTES (estampillées "justes", certes, après étude du sujet et débat collectif), en principe (dans le cas contraire il faut le détecter et prendre les mesures) incarnées dans une DIRECTION POLITIQUE (une "jefatura", oui, quelque part) à laquelle donc on obéit tant qu'elle est porteuse de ces idées justes ; et effectivement à certaines époques historiques, cette direction a pu consister en un Être Suprême appelé Dieu, et ses "ministres" sur terre (lire notre position sur la question des religions : reflexions-sur-les-religions).]

    stalineConcernant la critique émise à l'encontre de Staline, elle rejoint globalement le point de vue de Servir le Peuple sur la direction soviétique de cette époque-là : les plus graves dérives n'ont pas été des dérives 'thermidoriennes', de droite, contrairement à ce qu'affirment les trotskystes ; mais au contraire des dérives 'de gauche', ultra-volontaristes et subjectivistes, cherchant à faire rentrer ('au forceps' si besoin) la réalité matérielle ('Voie Lactée' prend l'exemple de la nature, mais la société soviétique n'était pas en reste) dans la conception que la direction du PCbUS avait de la société socialiste en marche vers le communisme. Il suffit d'avoir étudié, même superficiellement, les thèses de Trotsky pour s'apercevoir qu'elles étaient ENCORE PLUS subjectivistes, ultra-volontaristes et irréalistes : mépris du caractère encore très majoritairement rural et arriéré de l'URSS ; négation du fait (et controverse avec Lénine sur ce point) que le jeune État révolutionnaire 'populaire' ne soit pas 'parfait' et puisse entrer en contradiction avec le prolétariat ouvrier proprement dit, celui-ci ayant donc besoin de ses 'conseils' et de ses syndicats pour se défendre, au besoin contre l’État et les cadres de la production eux-mêmes (Trotsky voulait faire des syndicats des outils d'encadrement militaro-bureaucratique de la production) ; refus de comprendre la 'lenteur objective' d'un processus révolutionnaire prolétarien, qui ne peut certainement pas embraser le monde, ni même un continent entier, en quelques années, etc. etc. Et lorsque l'on voit la 'social-démocratie radicale' qu'est devenu le trotskysme aujourd'hui, cela rejoint totalement l'affirmation de 'Voie Lactée' (mais qu'ils feraient bien de méditer pour eux-mêmes...) : la 'phrase d'ultra-gauche', l''ultra-radicalité', le 'super-révolutionnarisme' finissent toujours, face au 'mur du réel', par aller s'échouer dans le marécage de l'opportunisme réformiste.

    Cependant, 'Voie LURSS-LENINE_et_STALINE_1933_Gramota-total.jpgactée' ne va pas au fond de la critique de ces erreurs de Staline : le fond c'est-à-dire la conception, nullement 'stalinienne' d'ailleurs, mais généralisée dans le marxisme-léninisme 'kominternien', selon laquelle sous le socialisme (la transition du capitalisme au communisme) la contradiction principale de la société est entre le caractère très avancé du système politique mis en place par le Parti, et le caractère encore très arriéré des forces productives et (donc) de tous les rapports sociaux, des conceptions, de la culture populaire etc. liés à ce niveau des forces productives. 'Donc', la tâche principale que l’État révolutionnaire doit confier à la société est de 'produire, produire et encore produire' et, 's'il vous plaît', faire suivre au pas de course les rapports sociaux, conceptions etc... Sauf que (l'on s'en aperçoit très vite), ceux et celles-ci ne 'suivent' pas ; au contraire, se développent et se renforcent des rapports sociaux qui, jour après jour, préparent le terrain à la prise de pouvoir révisionniste (restauratrice du capitalisme à travers un processus plus ou moins long). Tout simplement parce qu'en dernière analyse les rapports sociaux d'une société dérivent (fut-ce en 'retardant' un peu) des RAPPORTS DE PRODUCTION, et, si la production augmentait effectivement dans des proportions considérables (équivalentes sur 20 ans aux révolutions industrielle 'françaises' ou 'britanniques' sur trois quarts de siècle), les rapports de production restaient... profondément arriérés.

    L'usine ou le sovkhoze pouvaient bien être propriétés de l’État, lui-même (officiellement) 'propriété' de la classe ouvrière et des paysans, mais il y avait toujours des chefs, des cadres et des exécutants, des dirigeants et des dirigés, des 'qui savent' et des 'qui écoutent (et font ce qu'on leur dit)', des intellectuels et des manuels, des villes et des campagnes, des centres et des périphéries, une nation majoritaire et dominante (les Russes) et des nations minoritaires et dominées (Ukrainiens, Baltes, Caucasiens, Sibériens, Centre-asiatiques), etc. etc. ; tout cela agrémenté, évidemment, d'avantages matériels faisant se dire, aux 'avantagé-e-s', "et pourquoi pas le capitalisme... tout simplement ?" (ou un 'socialisme' plus 'souple', mettant moins de limites à leurs privilèges...).

    Ainsi fut, à travers un processus allant de la mort de Staline au 'baisser de drapeau' final de 1991, rétabli le capitalisme en URSS ; et c'est précisément ce que Mao, avec la Révolution culturelle, et les maoïstes après lui ont compris et combattu, portant le marxisme-léninisme à un niveau supérieur : le marxisme-léninisme-maoïsme. Servir le Peuple, et d'autres camarades comme Sheisau Sorelh, font globalement leur l'affirmation du TKP/ML (maoïstes de l’État turc), dans un document du milieu des années 1990, repris à l'époque par la revue 'Front social' (ancêtre de 'Voie Lactée') : "Si une ligne n'amène pas une société au communisme, si elle n'amène pas à avoir la capacité de résoudre les contradictions existantes en faveur des travailleurs, si elle ne minimise pas le besoin de l’État et du Parti afin que les travailleurs deviennent les maîtres, et si elle n'est pas capable de distribuer le pouvoir dans la société sur la route vers le communisme, alors il y a un problème. Être au pouvoir est un instrument pour Tikkomobiliser les masses travailleuses vers le communisme. Ici, l'importance de la question de la "révolution socialiste" devient plus apparente. Le pouvoir prolétaire n'est pas le monopole du Parti, il est la force guidant par la gestion de la direction du Parti, et c'est le soutien de ce pouvoir par les masses travailleuses. Les travailleurs ne peuvent pas être privés du contrôle de la société, du droit à se révolter contre l'injustice, quel qu'en soit le prétexte ; ils ne peuvent pas être privés de leur droit à la continuation de la révolution".

    Voilà donc les critiques que nous émettrons quant aux conceptions développées dans cet article. D'autant plus que, concernant 'Voie Lactée', il nous semble percevoir en quoi consiste leur 'correspondance à la réalité' : le monde, nous disent-ils, et les sociétés occidentales en particulier, sous l'effet de la crise générale terminale du capitalisme, s'enfoncent inexorablement dans la barbarie... une situation proche, finalement, de la décadence du Bas-Empire romain, préfigurant les ‘invasions barbares’ ; et eux font leur site, se posent dans 'l'attente critique' et finalement en 'petits gardiens de la civilisation', soit finalement… dans la position de l’Église à cette époque, dans les siècles précédant et suivant la chute de l’Empire.

    otan-strasbourg-anti09Disons-le clairement : telle n'est pas notre conception de l'engagement communiste. Nous voulons élever au plus haut possible notre compréhension communiste du monde, nous organiser sur cette base et AGIR ; nous voulons être une FORCE MATÉRIELLE de transformation de cette réalité pourrissante qui nous entoure. Le capitalisme, oui, est désormais condamné à sombrer jour après jour dans toujours plus de barbarie et de souffrances atroces pour l'humanité ; l'époque (de la fin du Moyen-Âge jusqu'au milieu du 19e siècle) où ses exactions s'accompagnaient encore de réels progrès de bien-être et de civilisation pour les masses est définitivement révolue. Mais nous VOULONS, et nous CROYONS POUVOIR réduire et abréger au maximum ces souffrances pour le genre humain (et l'écosystème terrestre en général). Telle est la 'fibre', la 'palpitation' de notre engagement révolutionnaire auquel nous sommes prêt-e-s à consacrer toute notre existence.

    Sur la sacralisation métaphysique de telle ou telle 'pensée' de grand révolutionnaire historique (qu'elle ait acquis une portée universelle et soit devenue un '-isme', ou qu'elle ne soit valable que pour un pays donné), il est intéressant de lire ceci (traduction d'un article MLM nord-américain) :

    http://servirlepeupleservirlepeuple.eklablog.com/marxisme-au-dela-de-marx-leninisme-au-dela-de-lenine-maoisme-au-dela-d-a117830876


    1658.SovietFlag


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