• Quelques mises au point complémentaires (et conclusives) sur la ‘‘question Dieudonné’’ (et Dreyfus, le Front populaire, l’antisémitisme etc.)


    Le site "lesmaterialistes" du 'p''c''mlm' évoquait déjà dans son éditorial du 7 janvier la nécessité pour les communistes et "tou-te-s les progressistes" de se ranger derrière le Ministère de l'Intérieur et le PS dans leur croisade contre l'antisémite Dieudonné. Il l'assume désormais clairement et l’argumente dans un article entier, faisant le parallèle avec... l'affaire Dreyfus. Ridicule ? Non, ce serait injuste de dire cela, et il n'est pas nécessaire d'être injuste dans le débat politique. "Bien tenté" serait plutôt le terme qui convient ; il faut dire que le virage à 180° du "Parti de la Science", de l'Olympe de la "pureté prolétarienne" à la remorque complète de la place Beauvau, nécessite de faire appel à des références historiques fortes – il a encore renchéri depuis avec le Front populaire.

    Degradation alfred dreyfusForte et convaincante, la référence à l'affaire qui marqua, en Hexagone, le passage du 19e au 20e siècle l'est indéniablement. Hélas, si l'on creuse les choses un peu plus avant, en marxistes, la comparaison-argumentation apparaît un peu plus compliquée.

    L'affaire Dreyfus a eu en effet DEUX ASPECTS ; or comme il fallait s'y attendre le 'p''c''mlm' n'en voit qu'un seul :

    1°/ D'un côté, au regard du rôle POLITIQUE de mobilisation réactionnaire de masse qu'allait jouer l'antisémitisme au demi-siècle suivant, la nécessité progressiste de "soutenir" le capitaine Dreyfus apparaît effectivement évidente. Toute l'idéologie exterminatrice qui allait sévir au Vel d'Hiv et à Drancy, et remplir les wagons vers Auschwitz 40 ans plus tard était déjà contenue dans la phrase de Barrès en 1902 : "Que Dreyfus soit capable de trahir, je le conclus de sa race" ; autrement dit le Juif est par nature "cosmopolite", "trans-" et "anti-national", loyal à sa seule communauté ou encore... à l'argent ("comme Judas"), "parti de l'étranger" (500.000 Juifs vivaient en Allemagne "donc" les Juifs étaient "forcément" pro-allemands ; les nazis feront ensuite la même déduction de "l'importance" des Juifs dans les directions politiques soviétique et française). Servir le Peuple l'a déjà affirmé sans ambigüité, et a dénoncé l'attitude dogmatique "sur l'Aventin" des marxistes de l'époque dans un article consacré à la grande mobilisation réactionnaire de notre époque qu'est l'islamophobie : Après le vote suisse, la vague fasciste islamophobe déferle sur l'Europe. Ceci dit, il apparaît également que la victoire dreyfusarde n'a finalement pas empêché grand chose, l'antisémitisme continuant à se répandre jusqu'à devenir omniprésent dans les années 1930 (alors que l’État français avait reçu un afflux très important d'immigration juive, la communauté passant de 80.000 personnes lors de l'affaire Dreyfus à plus de 300.000 en 1940), puis exterminateur ; réalité annonciatrice avant l'heure de l'impuissance de l'antiracisme/antifascisme bourgeois.

    2°/ MAIS de l'autre, la victoire des dreyfusards (grâce et libération du capitaine en 1899, réhabilitation totale en 1906) a aussi été celle de l'idéologie républicaine monopoliste, inaugurant quatre décennies de règne sans partage du Parti radical jusqu'en 1940... lorsque 90% des députés radicaux voteront les pleins pouvoirs à Pétain et à sa "révolution nationale" ; montrant bien là que quel que soit le problème (fascisme, antisémitisme ou autre), le cœur du problème est au cœur de l’État. Il faut bien comprendre que si le camp anti-dreyfusard comptait l'Action française, Maurras, Barrès et compagnie, auteurs d'une "synthèse des droites radicales" extrêmement moderne et matrice intellectuelle d'une grande partie de la "droite radicale" aujourd'hui encore, il comptait surtout une droite catholique, conservatrice, souvent anti-républicaine ou républicaine par pure résignation ("le régime qui nous divise le moins" disait Adolphe Thiers), représentant la vieille bourgeoisie traditionnelle du 19e siècle. Le camp du "progrès", de la "modernité", du 20e siècle, autrement dit des MONOPOLES était au Parti radical, autour de L'Aurore, de Zola et Clemenceau : du côté dreyfusard. Et sa victoire dans cette affaire (l'une des premières grandes "affaires médiatiques" de l'Histoire hexagonale), si elle n'a évidemment pas été déterminante (la tendance aux monopoles et l'affirmation politique allant avec étaient de toute manière inéluctables), a fait office pour elle de sacre symbolique : elle lui a permis, comme la campagne anti-catholique de 1905, d'affermir son pouvoir (pour objectivement acquis qu'il fut) et de le forger idéologiquement.

    Là encore, c'est toute la question de l'antifascisme populaire-révolutionnaire et de l'antifascisme bourgeois qui montrait ses prémisses. Si l'antifascisme populaire-révolutionnaire gagne l'hégémonie dans le combat antifasciste, il gagne des points pour la révolution. Si en revanche l'hégémonie est laissée à l'antifascisme bourgeois, soit (très souvent) celui-ci est impuissant et le fascisme l'emporte, soit le "blocage" temporaire du fascisme aboutit de toute façon à une "modernisation" et (donc) à un renforcement du capitalisme : c'est ce qui s'est produit avec l'affaire Dreyfus, même si à l'époque on ne parlait pas encore de fascisme et d'antifascisme ; et plus tard à la Libération (l'antifascisme communiste/progressiste avait versé son sang, mais la direction thorézienne laissa la victoire à De Gaulle et aux républicains bourgeois) ou encore avec l'antiracisme des années Mitterrand (SOS-Racisme et compagnie) face à l'émergence du FN. Cette "victoire" n'étant de toute façon qu'éphémère au regard de l'Histoire, avant qu'un nouveau boulevard ne s'ouvre devant le fascisme voire même que des "antifascistes" bourgeois d'hier deviennent eux-mêmes les fourriers du nouveau fascisme : combien de républicains bourgeois, forgés politiquement Affaire Dreyfus defenseurs 01 maxdans le dreyfusisme au début du 20e siècle, participeront à la fascisation des années 1930 et aux débuts (au moins) de la "Révolution nationale" en 1940, entre "décidément trop de Juifs et de métèques dans notre bonne vieille France" et peur panique du "bolchévisme" ? Dans la nouvelle extrême-droite qui formera le Front National en 1972, il y aura autant sinon plus d'anciens résistants et "Français libres", parfois de la première heure, que d'anciens pétainistes et même "vichysto-résistants" ; et combien de "potes" antiracistes des années 1980 servent aujourd'hui la soupe aux pires délires sécuritaires, anti-musulmans, "guerre des civilisations" etc. etc. ?

    C'est donc, en un mot, une question d'hégémonie au sein même de la lutte contre le fascisme qui est posée. Or, face à la haine réactionnaire antisémite qui s'était abattue sur l'innocent capitaine Dreyfus, le fait est que le mouvement ouvrier socialiste d'alors s'est soit mis à la remorque du dreyfusisme bourgeois de L'Aurore (Jaurès), soit retranché sur l'Aventin des "principes" et de la "pureté" prolétarienne (Guesde et Lafargue). Exactement comme aujourd'hui le 'p''c''mlm', qui nous avait plutôt habitué à la deuxième attitude (l'Aventin de la pureté MLM) sur tout un tas de sujets, adopte désormais la première, celle des jaurésiens, en se mettant à la remorque de l'anti-dieudonnisme républicain bourgeois de Valls, Tribalat et compagnie. Il cite comme les "deux grandes catastrophes", pour la cause révolutionnaire en "France", "l'apolitisme de la Charte d'Amiens" et "le fait que les réformistes socialistes du camp de Jean Jaurès ont été dreyfusards, mais pas les socialistes partisans de la révolution du camp de Jules Guesde"... Il aurait pu citer d'autres exemples (à notre sens) encore plus "catastrophiques", comme le fait qu'en 1914 Jaurès ait rejeté l'hystérie chauvino-militariste et se soit fait tuer pour cela, tandis que Guesde s'est rallié à "l'Union sacrée", devenant même ministre (!!!) jusqu'en 1916 : en réalité, le problème GÉNÉRAL du mouvement ouvrier révolutionnaire en "France" est d'avoir TOUJOURS été partagé entre un progressisme-humanisme sincère mais incapable de s'arracher au "possibilisme" réformiste, ou fantasmant carrément sur "la République" comme "première pierre" d'une société socialiste, et des "révolutionnaires marxistes" enfermés dans le dogmatisme des "principes" (accompagné ou non de luttes économiques radicales et/ou d'agitation démocratique et/ou internationaliste etc.), et capables au nom desdits "principes" de verser dans la réaction la plus totale ; car c'est au nom des "principes" que Guesde et ses "marxistes" refuseront la dénonciation de l'antisémitisme lors de l'affaire Dreyfus (en gros : "cela n'intéresse pas la classe ouvrière", rengaine encore omniprésente dans le mouvement "marxiste" aujourd'hui)... mais aussi qu'ils se rallieront à la Grande Boucherie de 1914 (la guerre étant "la mère des révolutions" dans l'esprit de Guesde, bercé de souvenirs de 1792 et 1871 ; ou encore l'idée que l'Allemagne et l'Autriche étaient les "forteresses de la Réaction" en Europe, etc.) ! Deux voies de garage ayant, au-delà des apparences, un point commun : le refus de construire le CAMP DU PEUPLE, camp idéologiquement autonome, PENSANT AVEC SA TÊTE et non soumis à la bourgeoisie (notamment à la "gauche" bourgeoise), que ce soit en se plaçant à sa remorque ou en "réaction" et en rejet systématique de celle-ci. Guesde et Jaurès ont en fait chacun vu les dangers, les terribles chausse-trappes de la position adverse (liquider l'autonomie du mouvement ouvrier dans une alliance avec la "gauche" bourgeoise vs se couper d'une actualité devenue phénomène de société et laisser, justement, la défense démocratique du capitaine à la "gauche" bourgeoise) ; mais ni l'un ni l'autre n'est parvenu pour autant à dégager la position juste des scories des conceptions erronées…
    Telle est encore largement la réalité (que nous voulons changer) aujourd'hui, et le 'p''c''mlm' s'inscrit totalement dans cette réalité. Il illustre même parfaitement une mécanique bien (et tristement) connue : celle de jouer les "purs", les "intouchables" par quoi que ce soit de "bourgeois" ou "petit-bourgeois" pendant des années... et puis, lorsqu'un "point de rupture" est atteint (c'est la cas avec Dieudonné pour eux), S'APLATIR devant la bourgeoisie et son État comme les pires carpettes. Cela fait vraiment peine à voir...

    trahison juif dreyfusAu contraire, lorsque l'on a développé comme nous (depuis des années) une véritable pensée autonome du camp du peuple, l'on peut sans problème DONNER SA POSITION sur l'actualité en cours, sans se réfugier dans le silence ou derrière un "cela n'intéresse pas le prolétariat", ni prendre le parti de Dieudonné ou du Ministère de l'Intérieur. Nous sommes capables devant les masses, sans perdre notre sang-froid, de remettre tranquillement chacun et chaque chose à sa place, de renvoyer chacun ("camp républicain" comme Dieudonné et dieudonnistes) à ses responsabilités et ses hypocrisies, etc. Au moment de l'affaire Dreyfus, le mouvement marxiste en Hexagone était nouveau-né, mais aujourd'hui il est supposé être plus qu'adulte ! Être capable de ne tomber ni dans l'un (opportunisme, suivisme) ni dans l'autre (dogmatisme, attitude "hors-la-réalité-sociale") de ces travers devrait être la marque de cette maturité ; ce n'est hélas pas toujours aussi évident...

    Pour le reste, comparaison n'est ici pas toujours raison, loin de là. Avec Dreyfus, c'était le Juif, le "racisé" qui était persécuté, frappé par une erreur judiciaire couverte par l’État "profond" ; et il était logique pour toute personne progressiste de ne pas laisser passer cela – ce qui ne fut pourtant pas, on l'a vu, évident. Au-delà même de l'antisémitisme se posaient d'autres questions démocratiques essentielles : l'erreur judiciaire et la possibilité de sa reconnaissance par la "justice" de la classe dominante, la "raison d’État" bourgeoise en particulier pour ce qui touche à la force armée (pilier de la domination), le contexte ultra-patriotard et militariste de l'affaire, etc. D'ailleurs, contrairement aux fantasmes du 'p''c''mlm', le fait même que Dreyfus soit juif n'était pas, pour beaucoup de personnes à l'époque, si important que cela : la question centrale était celle de la "Justice" (militaire en l'occurrence) et de son "infaillibilité", position idéologique capitale pour tout État au service d'une classe dominante, contre laquelle les révolutionnaires de l'époque auraient (normalement) dû voir un grand coup à porter (briser le mythe, montrer que la "justice" est au service d'une classe et de son État, qu'elle se moque des "petits", des pauvres et des "racisés", etc.), ce qui aurait distingué leur dreyfusisme de celui de Clemenceau et consorts.

    Car le débat (du coup) était essentiellement entre ceux qui voulaient préserver à tout prix l'infaillibilité judiciaire (surtout militaire, dans un contexte de "paix armée" avec l'Allemagne) même aux dépens de la vérité et au profit d’un antisémitisme qu’ils ne partageaient pas forcément, et (surtout !) ceux qui, dès lors que la manipulation et la condamnation d'un innocent étaient évidentes, voulaient au plus vite reconnaître et réparer l'erreur afin de "laver" et préserver "l’honneur" de l'institution et du pays pour l'avenir (le compte à rebours de la grande "revanche" contre l'Allemagne était enclenché et tout le monde le savait)… C'est AVANT TOUT dans cette optique que Clemenceau et Zola s'indignent dans L'Aurore et que Trarieux (républicain libéral plutôt de droite, très hostile aux droits sociaux) fonde la Ligue des Droits de l'Homme (LDH) en 1898 ; et c’est la position sur laquelle s'alignera le social-réformisme de Jaurès et consorts, l'ultra-démocratisme "anarchiste" de Mirbeau etc. etc. Le texte du fameux J'accuse de Zola est, à ce titre, sans équivoque : le mot "juif" et la question de l'antisémitisme n'apparaissent en tout et pour tout que trois fois (le 'p''c''mlm' a déjà qualifié des textes d''antisémites par négation des personnes juives" pour moins que cela, comme "Nuit et Brouillard" de Jean Ferrat, mais là Zola aurait "sauvé l'honneur de la civilisation") ! Le propos du pamphlet tourne essentiellement autour du nécessaire "triomphe de la vérité", de l’urgence de "sauver l'honneur" de l'Armée, de la République et de la France ("Que de gens je connais qui, devant une guerre possible, tremblent d'angoisse en sachant dans quelles mains est j-accuse-zolala défense nationale ! et quel nid de basses intrigues, de commérages et de dilapidations, est devenu cet asile sacré où se décide le sort de la patrie !") ; ainsi que (prémisse à la grande offensive de la décennie suivante) de combattre l'influence catholique cléricale dans l'état-major ("victime des extraordinaires imaginations du commandant du Paty de Clam, du milieu clérical où il se trouvait", "Quel coup de balai le gouvernement républicain devrait donner dans cette jésuitière, ainsi que l’appelle le général Billot lui-même !"), l’anti-républicanisme (réel ou supposé) du haut commandement afin d'éviter en cas de guerre un nouveau "choix de la défaite" comme en 1870-71 ("choix" qui se répètera finalement en 1940 avec "plutôt Hitler que le Front populaire"... mais cette fois sans clivage cathos-roycos/républicains ni dreyfusards/anti-dreyfusards pour le coup...).

    Eh oui ! L’un des protagonistes les plus importants de l’affaire, le lieutenant-colonel Picquart qui se battra, sera envoyé en Tunisie et même emprisonné pour prouver l’innocence de Dreyfus, se trouvait même être plutôt antisémite sur les bords… mais plus attaché encore à "l’honneur de la Patrie et de l’Armée" et bien sûr à la nécessité d’arrêter les vrais coupables, qui pendant ce temps-là continuaient de transmettre des informations à l’Allemagne. La judéité de Dreyfus, bien plus que pour ses défenseurs de "gauche" ou libéraux bourgeois, importait surtout pour 1°/ les premiers instructeurs de l'affaire (du Paty de Clam etc.), encore qu'il semblerait que les origines alsaciennes de Dreyfus aient plus joué contre lui au tout début que sa religion ; 2°/ (évidemment) la communauté juive et sa bourgeoisie (qui soutiendra la création de la LDH), première concernée par la lourde menace montante, ou encore un journaliste austro-hongrois du nom de Theodor Herzl qui verra là la "démonstration" que "les Juifs ne seront jamais chez eux parmi les Gentils" et fondera le sionisme ; et puis bien sûr 3°/ ses adversaires de droite et d'extrême-droite, pour lesquels c'était un "indice" voire une "preuve irréfutable" de sa culpabilité permettant de préserver l'honneur et l'infaillibilité de la justice militaire avec d'autant plus de force que les preuves d'innocence (et de manipulation par des officiers "chrétiens") s'accumulaient… Dans un sens, il est possible de dire que l'affaire Dreyfus comme affaire centrée sur l'antisémitisme, sur la condamnation injuste d'un innocent parce que juif, est très largement une construction a posteriori (à travers le prisme du génocide ultérieur) : la "gauche", qui avait plus que fourni à Vichy ses contingents de kollabos et de chasseurs de Juifs (Laval himself, Déat, Bousquet et bien d'autres), ravivera alors le souvenir d'une affaire "au cœur de son identité politique" en se donnant – bien entendu – le beau rôle, celui de s'être "élevée contre la peste antisémite dès les premiers signes annonciateurs"... Alors même (pourtant) que la moindre étude historique sérieuse démontre aisément que le clivage dreyfusard/anti-dreyfusard de 1900 n'a JAMAIS été synonyme systématique, 40 ans plus tard, de clivage résistant/vichyste ! Un mythe de la "gauche" donc, et plus largement de la République bourgeoise ; donc un mythe de la France  qu'il importe par conséquent, comme tous les autres, de DÉCONSTRUIRE.

    arton10498-c4125Avec Dieudonné au contraire, c'est le lanceur d'anathèmes antisémites  qui est la cible de l’État ; plus précisément d'un Ministre de l'Intérieur (pilier de l’État français contemporain !!!) connu pour ses propos sur les Roms, les "musulmans", les banlieues "zones de non-droit", le douloureux manque de "blancs" dans sa bonne ville d’Évry et ses rafles et expulsions quotidiennes d'immigrant-e-s "clandestin-e-s" ; et plus largement de personnes diffusant quotidiennement les pires thèses sécuritaires et d'"ennemi intérieur" sur certaines populations. Autrement dit, nous sommes plutôt face à une contradiction au sein de la Réaction, entre un courant dont l'antisémitisme est le fonds de commerce et un autre pour qui c'est au contraire la "ligne rouge de l'inacceptable"... mais souvent bien la seule. Sur le plan tant du droit bourgeois que des conceptions prolétariennes, le niveau d'appel à la haine atteint par Dieudonné rend la sanction absolument incontestable, et même la moindre des choses. Ceux et celles qui soutiennent sa "liberté d'expression" soutiennent le "droit" de "rire" d'idées haineuses et de crimes contre l'humanité, et de faire passer par le "rire" un message politique fasciste : nous rejetons évidemment totalement cela, tout comme l'idée que "si Zemmour, Finkielkraut, Charlie Hebdo" etc. etc. "peuvent stigmatiser en permanence les immigrés (et descendants), les banlieues, les musulmans", alors "Dieudonné doit aussi pouvoir s'exprimer" sans quoi ce serait "deux poids deux mesures" : NON, l'un ne donne pas d'excuses à l'autre et nous, communistes, sommes pour leur clouer le bec à tous, sans exception. Si Dieudonné rencontre désormais des difficultés pour diffuser son discours (que l'on nous permette cependant d'en douter...), après tout, pourquoi pas et tant mieux ! Ce qu'il s'agit de dénoncer ici, c'est l'HYPOCRISIE des républicains bourgeois qui en le frappant s'achètent une "virginité" et un brevet d'antiracisme/antifascisme, alors qu'ils répandent du matin au soir la peur et la haine sécuritaire des "cités", de "l'islam", des Roms etc. etc. et même "mieux", mettent ce discours en pratique à coup de tasers et de flash-balls, de tonfas et de gazeuses (des armes non-létales... en principe, mais pour combien de temps ?).

    Il ne s'agit pas pour nous de considérer comme "plus acceptable" une haine raciale qui serait le fait de "parias du système" que celle répandue par des médias et des "intellectuels" "mainstream" ou des représentants de l’État ; tel n'est pas le propos. Dieudonné n'est de toute façon PAS "antisystème", qu'on se le dise une fois pour toute : une personne réellement "antisystème", de manière aussi affichée, identifiée et "dangereuse" que Dieudonné prétend l'être, est en PRISON, comme Georges Ibrahim Abdallah depuis bientôt 30 ans, les membres d'Action Directe ou des CCC pendant près ou plus de 20 ans (Joëlle Aubron y est même morte), Gaël Roblin et ses camarades d'Emgann ou les camarades du (n)PCI pendant des années et les anarcho-situationnistes de Tarnac pendant des mois (sur un dossier vide dans ces trois derniers cas) ; et non pas libre, millionnaire et condamnée de temps en temps à une amende comme Dieudonné ! Ce que nous pensons de "l'antisystémisme" de Soral (et donc de Dieudonné-Le-MurDieudonné, son élève), ce que pense tout marxiste authentique, ce n'est pas compliqué et c'est ce qui est écrit ici :

    http://www.marx.be/fr/content/études-marxistes?action=get_doc&id=95&doc_id=733 (si la littérature du PTB suffit, c'est qu'il n'y a pas besoin d'être agrégé de "Science MLM" !).

    Quant aux raisons de son succès auprès de toute une frange des masses populaires, en particulier de la jeunesse, que le politologue gauche-radicale Julien Salingue décrit comme une "démoralisation générale liée à une perte de crédibilité de la perspective de réellement changer les choses", et aux moyens de le combattre (une "(re-)construction, par en bas, de cadres de solidarités et de luttes collectives, antiracistes, progressistes, internationalistes, contre les dégâts de la crise, pour une vraie répartition des richesses et pour une démocratie réelle"), nous dirons plus simplement que c'est l'absence d'un mouvement communiste fort et culturellement hégémonique, et la nécessité de sa reconstruction.

    [Lire aussi : http://indigenes-republique.fr/en-finir-avec-le-soralisme-en-defense-des-lascars-de-quartiers-comme-sujets-revolutionnaires/

    http://servirlepeupleservirlepeuple.eklablog.com/plutot-bon-article-sur-la-declaration-de-guerre-de-la-republique-a-die-a114093570]

    Mais il faut ABSOLUMENT démasquer et briser la manœuvre de la bourgeoisie "mainstream" national-républicaine, l'empêcher se poser à si peu de frais en "rempart contre le fascisme" alors que ses discours et ses politiques, d'une manière ou d'une autre, engendrent le fascisme chaque jour qui passe !!!

    Lorsque l'on a ainsi 1°/ "désacralisé" considérablement le dreyfusisme des Clemenceau, Zola, Jaurès, radicaux et autres libres-penseurs de 1895-1900 et 2°/ souligné les considérables différences avec l'actuelle affaire Dieudonné, la démonstration des "materialistes.com", sans être totalement dénuée de sens, apparaît immédiatement beaucoup plus fragile…

    La référence au Front populaire, elle, est en revanche beaucoup plus pathétique si l'on pense que le 'p''c''mlm', s'agissant d'antisémitisme et de sa bête noire Dieudonné, se jette aujourd'hui corps et âme dans un tel "front uni" avec des gens (Valls et compagnie) qui ont totalement le profil des voteurs radicaux ou "socialistes" des pleins pouvoirs à Pétain en 1940 (ou carrément de primo-vichystes à la Camille Chautemps) ; alors qu'il avait refusé en 2010 de soutenir le NPA (comparable aux pivertistes - gauche de la SFIO - de l'époque du Front pop') d'Avignon dans la curée islamophobe déchaînée par le Figaro contre la jeune candidate musulmane Ilham Moussaïd. Voudrait-on donner corps au "deux poids deux mesures" qui fait le fonds de commerce de Dieudonné (comme celui-ci donne lui-même corps à l'équation antisionisme = antisémitisme des ultra-sionistes) que l'on ne s'y prendrait pas autrement !

    vallsUn Front populaire, un "Front uni démocratique", comme nous l'avons déjà expliqué plus haut, ce n'est pas simplement "s'allier" avec la frange démocratique/ progressiste de la bourgeoisie ; c'est un RAPPORT DE FORCE, que l'on a à la base ou, dans le cas contraire, que l'on construit ; c'est à terme, comme disait Lénine, soutenir la social-démocratie, les démocrates et autres "républicains" bourgeois (face au fascisme) comme la corde soutient le pendu. Dans le cas contraire, on se retrouve caution "prolétaire" et "aile radicale" de la "gauche" bourgeoise, du système bourgeois ; c'est ce qui arrivé au PCF de Thorez en 1936-38 comme à la Libération et par la suite (PCF institutionnalisé "gérant" les villes ouvrières), au PC italien après la chute du fascisme et pendant toute la phase menant à la Constitution républicaine de 1947 (et là encore par la suite), et dans une large mesure au PC de l’État espagnol pendant la guerre antifasciste, conduisant à la défaite contre Franco. Un Front "populaire", "démocratique uni" ou tout ce que l'on veut, c'est garder fermement son autonomie prolétarienne-populaire comme l'a fait le PC chinois de Mao vis-à-vis du Kuomintang dans la résistance contre l'invasion japonaise, une situation d'occupation étrangère barbare à des années-lumière (en gravité) de la lutte contre un pseudo-comique fascistoïde ! Un "Front populaire" ou "uni", cela ne se "décrète" pas alors que la "démocratie" bourgeoise ne vous a pas sonné ; cela se négocie fermement et s'impose lorsque celle-ci sait pertinemment qu'elle n'a plus guère d'autre choix, que c'est les cocos ou Dachau... Et cela implique par ailleurs, et d'autant plus à la lumière de l'expérience, de bien faire la différence entre gens qui s'accrochent réellement à l'humanisme/universalisme démocratique bourgeois et gens qui participent au mouvement de fond fascisant : est-on bien certain que Manuel Valls, sans même parler d'Alain Finkielkraut ou Pascal Bruckner, soient dans la première catégorie ? N'ont-ils pas plutôt le profil de ces "néo-socialistes" et de ces "républicains" qui s’en allèrent grossir les rangs de Vichy par peur/haine du "bolchévisme", de la révolution et des "masses grouillantes" de "métèques rouges", autant d'"ennemis intérieurs" ? Le Front populaire, c'est avec le progressisme petit-bourgeois forçant la main à sa direction bourgeoise ; pas avec une branche du mouvement de fascisation (la branche Finkielkraut-Zemmour-Bruckner-Tribalat-Riposte laïque & co) contre une autre (la branche Dieudonné-Soral). "Socialiste" particulièrement droitier, Manuel Valls n'est là où il est que pour la simple et bonne raison que le PS sait pertinemment qu'il est minoritaire en "France", qu'il n'est au pouvoir que parce que Sarkozy (contrairement à 2007) n'a pas réussi à capter massivement l'électorat FN. Valls est un cadeau à l'électorat droitier majoritaire sur un thème qui lui est cher (la "sécurité"), et sans doute la seule carte du PS dans le vaporeux espoir de gagner à nouveau en 2017... Pas vraiment le genre de force socio-politique "intermédiaire" et "progressiste" avec laquelle on envisage, d'ordinaire, un Front uni ! Le Front populaire, ce n'est de toute façon pas s'empêcher de critiquer (le cas échéant) l'hypocrisie de ses "alliés" bourgeois. Le Front populaire dans les années 1930, cela ne devait pas vouloir dire ne pas critiquer la bourgeoisie "antifasciste" lorsqu'elle refusait d'accueillir les réfugiés de toute l'Europe fuyant la terreur fasciste (et sa compagne la misère), lorsqu'elle n'aidait pas suffisamment la résistance antifasciste en "Espagne", lorsqu'elle réprimait tout soulèvement populaire dans les colonies : si le PCF ne le faisait pas (et bien souvent, hélas, il ne l'a pas fait), il n'y a pas lieu de chercher ailleurs les raisons de sa dérive par la suite. De la même manière, combattre Dieudonné aujourd'hui ne veut pas dire faire silence lorsque Valls et ses comparses pourchassent, internent et expulsent les réfugié-e-s de la misère causée par les pillages de l'impérialisme BBR ; et ni nous ni personne à l'"extrême-gauche" n'avons dit autre chose : qui donc (hormis Vincent Gouysse, taulier du train fantôme stalino-dogmatique albanais communisme-bolchevisme.net, que le 'p''c''mlm' est bien emmerdé pour critiquer puisqu'il relève du même registre psychiatrique pignolage-sur-l'URSS-de-Staline que lui !) s'est prononcé CONTRE l'interdiction des spectacles de Dieudonné ? Personne ! Dieudonné est un fasciste, catégorie antisémite obsessionnel et s'il est réprimé, bien fait pour sa gueule... Simplement, cela n'implique pas pour nous une ovation à Valls et au gouvernement, encore moins un "Front uni" avec eux et surtout pas avec les fascistes catégorie islamophobe, "le-nouveau-fascisme-c'est-l'islam" etc. etc. qui se réjouissent eux aussi de cette interdiction !!!

    apero-identitaire-n.1276093395.thumbnailLe 'p''c''mlm' met en avant "1928 et 1935" et nous explique (une grande première de sa part !) que les communistes ne doivent pas être stupidement bornés, qu'ils doivent savoir s'adapter en fonction des situations etc. etc. Sauf que voilà, en réalité, pour eux, hors antisémitisme, écologie et patriarcat, c'est toujours 1928 : "classe contre classe" et "pureté prolétarienne" plus-rouge-que-moi-tu-meurs, aucune cause démocratique/progressiste qui vaille, ni contre l'islamophobie (cf. affaire Moussaïd) ni pour les peuples périphérisés de l’État-appareil d'oppression "France" (Bretagne etc.), ni contre la chasse aux sans-papiers et aux Roms (cf. affaire Leonarda-Katchik) ni avec les mouvements type Indignad@s ou Occupy, ni contre un coup d’État en Amérique latine ni avec les soulèvements populaires arabes, ni même avec les maoïstes du Népal, des Philippines ou d'Inde (pas assez dans la "pureté" MLM à leur goût) ; tout est "petit-bourgeois" voire "bourgeois" tout court, "lié à" ou "piloté par" tel ou tel impérialisme ou expansionnisme etc. etc. ; chacune de ces positions étant agrémentée de son lot de dérapages réactionnaires à la limite de l'inacceptable. Mais lorsqu'il est (par contre) question d'antisémitisme, de "biosphère" ou de féminisme, c'est toujours 1935 et toutes les alliances sont valables, avec Valls voire avec Sarkozy (quand ce n'est pas carrément défendre à mots à peine voilés le Betar, que le "génial leader" du groupuscule, il faut dire, connaît bien...), avec les "féministes" bourgeoises islamophobes (Pelenop & co) contre la "candidate voilée" du NPA avignonnais, avec un scientifique anglais ultra-réactionnaire et malthusien défendant la grotesque "hypothèse Gaïa"... Bref, en somme, pour le ‘p’‘c’‘mlm’, la lutte ‘antifasciste’ et ‘révolutionnaire’ c’est… ce qui lui tient à cœur, et le reste c’est de la merde. Fort bien… mais cela ne fait pas une conception communiste du monde !

    Et le 'p''c''mlm', comme toujours à son habitude, falsifie et déforme pour jeter l'anathème : c'est maintenant la plutôt sympathique organisation "guériniste" Alternative Libertaire (se trouvant compter dans ses rangs de nombreux Juifs antisionistes, comme Pierre Stambul de l'UJFP) qui est qualifiée de semi-fasciste, accusée d"attaquer la loi Gayssot" pour le fait de dire que "Ce n’est pas par la censure d’État qu’on fera reculer l’extrême droite"... Sauf que le propos exact, délibérément tronqué, est "Ce n’est pas par la censure d’État qu’on fera reculer l’extrême droite… surtout quand cet État mène lui-même des politiques xénophobes" : que la loi Gayssot soit "le fruit d'un rapport de force antifasciste", peut-être et même sans doute... mais au niveau de son application, si elle est appliquée par un gouvernement effectivement (au moins) progressiste sincère, humaniste-universaliste, c'est une loi antifasciste ; si par contre elle est appliquée par la-Valls-des-expulsions, soutenu en cela par des Finkielkraut, Bruckner et autres "nouveaux réacs" en tout genre, cela s'appelle un cache-sexe et rien d'autre ! Rappelons que la loi Gayssot, si elle fait du négationnisme un délit (c'est son grand apport), ne vise pas du tout uniquement l'antisémitisme, mais bien à lutter contre "toute discrimination fondée sur l'appartenance ou la non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion", reprenant et renforçant en cela la loi Pleven de 1972 (qu'elle ne modifie par ailleurs que marginalement - en instaurant par exemple l'action collective des associations - et avec laquelle elle est souvent confondue). Votée, pour le coup, sous une pression antiraciste internationale (Convention de 1965 sur l'élimination de toutes formes de discrimination raciale - ratifiée par l’État français en 1971, alors que les États issus de la décolonisation étaient entrés en masse à l'ONU, que les luttes anti-impérialistes faisaient rage au Vietnam et ailleurs, que le mouvement noir balayait la ségrégation aux États-Unis etc.), cette loi Pleven n'a connu de réelle (et bien timide) application qu'une bonne dizaine d'années plus tard, dans les "années Mitterrand" (il était ainsi encore possible en 1973 d'écrire dans un grand quotidien réactionnaire provençal "assez de voleurs algériens, de casseurs algériens (...) de syphilitiques algériens, de violeurs algériens, de proxénètes algériens, de fous algériens, de tueurs algériens (...) cette immigration sauvage qui amène dans notre pays toute une racaille venue d’outre-Méditerranée" ou de titrer carrément "Dehors les Algériens", d'entendre un maire déclarer que "les Arabes se comportent en terrain conquis, ils sont différents de nous, ils vivent la nuit, c'est vraiment très pénible d'être envahis par eux", le suppléant d'un député devenu ministre que "les immigrés finissent par croire qu'ils sont chez eux, ils alimentent la chronique du proxénétisme, du banditisme, ils sont à la charge du contribuable" etc. etc.). Elle prévoit notamment que "ceux qui, par l'un des moyens énoncés à l'article 23 [par voie de presse, télé, radio etc. NDLR], auront provoqué à la discrimination, à la haine ou à la violence à l'égard d'une personne ou d'un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée, seront punis d'un an d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende"... autant dire que son application stricte et systématique ferait de sacrés dégâts !!! Quant à la disposition visant "tout dépositaire de l'autorité publique ou citoyen chargé d'un ministère de service public qui, en raison de l'origine, ou de l'appartenance ou de la non-appartenance d'une personne à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée, lui aura refusé sciemment le bénéfice d'un droit auquel elle pouvait prétendre" (passée dans le nouveau Code pénal à l'article 432-7, qui prévoit 5 ans de prison et 75.000 euros d'amende), elle aurait tout simplement pour effet de décimer le personnel de la place Beauvau (à commencer par le "Premier Flic" lui-même), de la police et de la gendarmerie, de la "justice" et des préfectures voire de l'enseignement... À vrai dire, l'État tout entier y passerait, rien que pour sa politique des étrangers ("en raison de l'origine" !!!) totalement arbitraire et discrétionnaire ! Certains d'ailleurs, malgré son taux d'application ridicule, s'en inquiètent et réclament son abrogation, alors même qu'ils ne portent pas spécialement Dieudonné dans leur cœur... Mais ce "combat" réactionnaire-là ne semble guère émouvoir nos cyber-"matérialistes" de pacotille !

    Désormais, les choses sont claires, écrites explicitement noir sur blanc. Servir le Peuple ne voit plus l'utilité de "répondre" aux élucubrations du 'p''c''mlm' ; chose qui nous a (sans doute) trop occupé pendant trop longtemps : ses publications sur le site "lesmaterialistes" nous semblent suffisamment parler d'elles-mêmes. Bon vent, et bon débarras ! Les lignes dans le mouvement communiste hexagonal sont désormais - et à tout jamais - claires...


    (Appendice) "Explosion de l'antisémitisme comme anticapitalisme romantique" ? La parole aux chiffres... 

    Depuis 1990 (dans le "fond d'ambiance" qui a vu le vote de la loi Gayssot etc., ce qui devrait donc faire autorité incontestable pour certains), la Commission nationale consultative des Droits de l'Homme mène chaque année une enquête d'opinion sur le racisme, la xénophobie, l'antisémitisme etc. des "Français". Il s'agit là d'un magnifique outil de mesure quant au niveau et, plus important encore, à la DYNAMIQUE de la haine et du rejet envers tel ou tel groupe défini ; haine qui pour nous marxistes, sans être la seule, est une composante incontournable de la montée du fascisme dans un grand pays impérialiste.

    La dernière de ces enquêtes à été menée fin 2013, mais ses résultats ne sont pas encore disponibles. Nous avons ceux de décembre 2012. Que montrent-ils ? Ils montrent, sur les dernières années, une nette progression du racisme et de la xénophobie... mais pas vraiment, et même bien au contraire, de l'antisémitisme.

    Photomontage-Taubira-singe-1Si le nombre de personnes à se déclarer "plutôt racistes" reste stable (7%) depuis décembre 2011, il sont 2% de plus (22%) à se déclarer "un peu racistes" et 3% de plus (25%) "pas trop raciste" (mais "quand même un peu des fois", sous-entendu), tandis que le nombre de personnes se déclarant "absolument pas racistes" chute de 5 points (44%). C'est une évolution assez conséquente si l'on a à l'esprit la réticence qu'il peut (évidemment) y avoir à se déclarer "raciste", fut-ce "un peu"... On ne sait pas, en revanche, si dans le racisme qu'il/elle confesse "un peu" ou "pas trop mais quand même un peu" ressentir, chaque sondé-e inclut ou non des sentiments antisémites. Ce qui est plus frappant encore, c'est la nette progression (depuis 2007) de l'idée que "certains comportements peuvent justifier des réactions racistes" (65% contre 57%), et l'effondrement de l'idée inverse que "rien ne peut justifier des réactions racistes", passant de 42% à 33%. L'idée que des réactions racistes peuvent être justifiées était forte (68%) en 2002-2003, avait baissé à 58% en 2004 avant de remonter à 63% en novembre 2005 (enquête réalisée au lendemain des grandes émeutes), mais s'était ensuite stabilisée à 57-58% jusqu'en décembre 2011. Elle a bondi depuis lors sans évènement "hors du commun" le "justifiant", et il faut attendre les résultats de fin 2013 pour voir si la tendance se confirme.

    On relève aussi un nette progression de l'idée de "racisme anti-français" ou "anti-blancs" (dans l'esprit de beaucoup de sondés c'est sans doute la même chose) : avec 12%, l'idée que les "de souche" sont la principale cible du racisme en Hexagone retrouve le niveau de son pic au lendemain des émeutes de 2005. Depuis lors, elle était restée stable entre 6 et 8%, comme d'ailleurs en 2004 (6%, et 10% en 2002-2003). Il faut dire que quand même des "antifascistes" "maoïstes" s'y mettent...

    Plus significatives encore sont les questions portant sur "former un groupe à part" (ce qui sous-entend un défaut/refus d'intégration dans la "République") et, à connotation plus racisante encore, sur "être des Français comme les autres". Ainsi, l'idée que les musulmans forment un "groupe à part", avec 55%, poursuit sa progression et a gagné 11 points en trois ans (44% fin 2009). À 57% en 2003-2004, elle avait connu un pic à 63% après les émeutes de 2005 puis avait baissé continuellement jusqu'alors, avant d'entamer une remontée soutenue. Portant plus précisément sur les Maghrébins, la question connaît une évolution parallèle (48%->54%->33%->42%), avec toutefois un écart entre "Maghrébins" et "musulmans" qui se creuse (13% contre "traditionnellement" 8-9%, et même seulement 5% en 2007) de manière continue depuis 2009. Là, c'est très clairement la mobilisation réactionnaire islamophobe qui semble porter h-20-2646346-1322211453ses fruits : on reste "prudent" (même si de moins en moins) à affirmer son rejet des "Arabes", mais on assume en revanche beaucoup plus facilement celui d'une religion décrite unanimement, y compris (parfois) à "gauche", comme "violente", "obscurantiste", "terroriste", "intolérante"... même si dans le "fond" de la pensée, c'est (très souvent) du pareil au même ! Le phénomène est encore plus frappant pour les "Noirs" (dont on peut considérer qu'une majorité aujourd'hui, d'origine sahélienne, est musulmane) : la courbe n'est que très faiblement remontée (18%->21% puis nouvelle baisse à 19%) depuis 2009, après avoir presque continuellement baissé depuis le pic de novembre 2005. Les "Noirs", après tout, comme le chantait Béranger, "un rien les amuse, ils sont toujours à rire, ce sont de vrais gamins"... "En soi" ils ont cette image "sympathique", baignée de condescendance coloniale : ils ne deviennent source d'inquiétude que lorsqu'ils sont musulmans ("d'origine" ou convertis) de manière "ostentatoire", ou alors "racailles en bandes ethniques" - mais le sondage ne pose pas la question... Concernant le fait d'être "des Français comme les autres", la question est posée seulement pour les musulmans et non sur des critères "ethniques" ("Maghrébins" ou "Noirs") : la réponse positive est de 70% soit le niveau de 2007, plus qu'en 2005-2006 mais en baisse (continue) de 9 points par rapport à 2009 (79%->76%->72%->70%). Dans le même temps, ils/elles ne sont que 22% (-7%) à avoir une opinion positive de l'islam contre 44% du catholicisme et 37% du protestantisme (inchangé), 34% du judaïsme (-1%)... et bien sûr 68% (inchangé) de la sacro-sainte "laïcité républicaine" (concept qui ne veut absolument rien dire, auquel personne ne sait vraiment quelle signification donner et qu'il est complètement ridicule de mettre en "compétition" avec des religions comme si c'en était une, mais c'est ainsi...). Les résultats de 2013 montreront si la "désinclusion" des musulmans de la "collectivité nationale" se poursuit, ce qui est plus que probable.

    Il faut bien comprendre que pour énormément, et sans doute de plus en plus de sondé-e-s, répondre à une question sur "les musulmans" permet consciemment ou non de mettre un nom "politiquement correct" sur les fameux "quartiers"-"zones de non-droit"-"territoires perdus de la République" qui font la "une" de la propagande sécuritaire depuis 15 ou 20 ans, où se mêlent islam important/majoritaire et "délinquance" petite ou grande, "insécurité", "trafics" etc. etc., quand bien même bon nombre d'habitant-e-s ne sont pas musulman-e-s et, chez ceux et celles qui le sont, le niveau de religiosité est variable. C'est d'ailleurs le "créneau" qu'a tenté de jouer Alain Soral pour se gagner une existence politico-médiatique : "réfléchissez deux secondes, un vrai musulman ne peut pas être une racaille, c'est incompatible... appuyons-nous donc sur les pieux musulmans contre les wesh-wesh".  Malheureusement pour lui, une majorité d'esprits populaires aliénés hexagonaux est restée hermétique à cet argumentaire et continue à mettre islam, terrorisme, délinquance, "insécurité" et "on ne se sent plus chez soi" dans un même grand sac longtemps appelé "immigration" (mais incluant bien évidemment des descendants d'immigrés à la deuxième, troisième voire quatrième génération : ce qu'il faut entendre c'est "non-blanc", "extra-européen", colonisé intérieur), mais qu'il est devenu plus "tendance" d'appeler "musulmans" (des discours de plus en plus nombreux tentent même de relier directement terrorisme, islam et délinquance, expliquant que cette dernière serait déclarée "licite" envers les non-musulmans et servirait à "financer le djihad").

    profanation_tombes_musulmanes69% (+10% depuis 2011 et +22% depuis 2009 !!!) considèrent, enfin, qu'il y a "trop d'immigrés", comprendre "trop de minoritaires visibles", trop de "non-blancs" en "France" ; et 61% que l'on "ne se sent plus chez soi en France" (ce qui revient pratiquement au même), soit une progression de 6 points en un an... et de 20 points depuis 2009 (il y avait eu auparavant une baisse de 55% à 41% depuis 2005) ! Il est évident que la communauté juive, guère "visible", ne compte pas au nombre de ces "immigrés" qui font que l'on ne se sent "plus chez soi"... "L'immigration" (les "non-blancs") est désormais la "première cause d'insécurité" pour une majorité de 54% (44% en janvier 2011 et 36% en novembre 2008), "les enfants" (et sans doute descendants en général) "d'immigrés (extra-européens s'entend...) nés en France" ne sont "pas vraiment français" pour 31% contre 21% fin 2009 ; et (en substance) "beaucoup d'immigrés viennent surtout profiter des allocs" pour 73% contre 62-63% en 2008-2009, dépassant les 71% de 2006 (pourcentage incluant désormais des "maoïstes", vu qu'il faut de tout pour faire un monde !). 56% considèrent que "l'intégration des personnes étrangères" se passe "mal" (42% "plutôt" et 14% "très"), et pour 60%, la responsabilité en incombe principalement aux "personnes d'origine étrangère" en question, contre seulement 29% incriminant "la société française". On retrouve, mais encore plus fortement, la même idée dans l'affirmation que "les étrangers qui viennent en France doivent adopter le mode de vie français". Qu'entend-t-on par "mode de vie français", mystère et boule de gomme (ou plutôt, vraisemblablement, autant de réponses que d'interrogé-e-s) ; mais l'idée, si profondément républicaine bleu-blanc-rouge la-main-sur-le-cœur, est hégémonique (+ de 85%) depuis que la question est posée (2006), et atteint en 2012 son plus haut niveau avec 94%.

    Comme il fallait malheureusement s'y attendre, les Roms "jouent hors catégorie" : pour plus de 70% des sondé-e-s, ils ne vivent strictement que de trafics, de vols et de l'exploitation de leur progéniture, et pour 77% ils sont réellement un groupe à part dans la société. Ceci, évidemment, repose sur un certain nombre de situations bien réelles ; mais il n'y a pas l'ombre d'un début de tentative pour comprendre l'origine sociale et historique de ces situations, pas même chez d'autoproclamés "phares du maoïsme"... On a là une haine de type génocidaire touchant absolument toutes les catégories de la société, depuis un notable de "province" comme Gilles Bourdouleix, maire UDI de Cholet ("Comme quoi Hitler n'en a peut-être pas tué assez") jusqu'aux prolétaires, principalement colonisés-intérieurs maghrébins, d'une cité marseillaise. Et cette haine envers les Roms d'origine balkanique, apparus en Hexagone depuis une grosse vingtaine d'années, "déteint" maintenant sur les "gens du voyage" de nationalité "française" (les "Manouches" au Nord et Gitans en Occitanie) que seulement 63% des sondé-e-s considèrent comme "des Français comme les autres", contre 74% en janvier 2011...

    En revanche, 85% des sondé-e-s considèrent les Juifs comme des "Français comme les autres", même proportion qu'en 2005 avec même un pic à 90% en 2009 (au plus "fort" du dieudonnisme !), contre seulement 70-74% au début des années 2000 (et un gros tiers de la population en 1946, au lendemain de la Shoah). 26% considèrent les Juifs comme un "groupe à part" contre 36% en 2003 et 41% en 2004, il y a 10 ans, au tout début de l'activisme de Dieudonné et avant le fameux "Non" au référendum européen (en baisse continue depuis, très légère remontée de 1% depuis 2011).

    En fait d'"explosion de l'antisémitisme comme anticapitalisme romantique" blablabla, c'est donc plutôt la dynamique totalement inverse que l'on observe, notamment à mesure que s'éteignent les vieilles générations, plus imprégnées de préjugés. Nous avons certes un recul continu (de 90% à 85%), depuis 2009, de l'idée que les Juifs "sont des Français comme les autres" ; il faudra voir avec les résultats de 2013 si la tendance se confirme, ce qui serait à prendre au sérieux, mais en tout cas la baisse est bien moins radicale que celle qui frappe les musulmans ou les "personnes d'origine étrangère" en général. Il faut également noter que les premières années de l'activisme dieudonniste (2005-2009) avaient au contraire vu une hausse crescendo de l'idée de "Français comme les autres", de 85 à 90%.

    a-mort-les-juifsDieudonné et Soral ont leur public, et il n'est pas mince : leurs vidéos font des centaines de milliers de vues sur Youtube et Daylimotion, leurs pages Facebook des centaines de milliers de "like"... Des personnes qui considèrent réellement les Juifs comme au cœur des problèmes de ce monde (et de leur vie) ; ou des personnes qui regrettent simplement le "bon vieux temps où l'on pouvait rire de tout", les années 1980-90 où, contrairement aux délires de certains, "passaient" beaucoup de choses qui ne "passent" plus du tout aujourd'hui, des imitations simiesques d'Africains par Michel Leeb à la "Zoubida" de Lagaf' en passant par les "Envahisseurs" racistes anti-arabes des Inconnus, l'ambiance hétéro-patriarcale et social-darwiniste sordide des "Grosses Têtes", les gribouillages ultra-sexistes de Reiser ou Vuillemin, la lourde caricature d'homosexuels de la "Cage aux Folles", les plaisanteries border line de Coluche et Desproges (souvent cités en exemple) etc. etc. [c'est que les contradictions de la société s'aiguisent et explosent, la société "française" se disloque, la "dérision" peut avoir des effets potentiellement incontrôlables et l’État, bien conscient de cela et fidèle à sa pratique historique depuis Henri IV et son Édit de Nantes (en passant par l'affaire Dreyfus), est dans la phase où il essaye de maintenir les choses artificiellement "sous cloche", d'imposer administrativement le "vivre-ensemble" par en haut (l'étape suivante, celle de Richelieu puis Louis XIV ou de Vichy, est celle où il choisit ouvertement le camp dominant et entreprend la liquidation des "ennemis intérieurs")].

    Pour autant, le fait est qu'une large et (surtout) croissante majorité de la population rejette l'antisémitisme et n'a aucun problème avec les personnes juives ; soit que, progressistes, ils/elles rejettent catégoriquement la haine de quelque groupe social que ce soit... soit que pour eux/elles, le "problème" en France et dans le monde est "tout" sauf les Juifs et Israël !

    L'extrême-droite de Dieudonné et Soral, on l'a déjà dit, n'est absolument pas une nouveauté, ni dans l'antisémitisme obsessionnel ni dans le "tiers-mondisme" façon "Quadricontinentale" au service de l'impérialisme européen, ni dans le "socialisme" sauce Rerum Novarum ni même dans l'appel aux "musulmans" que pratiquait déjà un groupe fasciste des années 1930 (Solidarité française, surnommé à l'époque "Sidilarité française" par ses détracteurs). Si quelque chose de nouveau a émergé depuis l'an 2000 environ, au niveau hexagonal comme européen, c'est plutôt un discours de "droite radicale" (éventuellement "nouveau réac", venant de la "gauche") qui non seulement n'est pas antisémite mais rejette ouvertement l'antisémitisme (Renaud Camus, sites comme "Euro-Reconquista" ou "Riposte laïque" & co, mouvance identitaire, English Defence League ou Geert Wilders à l'étranger, lire aussi cet entretien avec le philosophe Ivan Segré au sujet de son ouvrage La Réaction philosémite) ; voire... est directement le fait de personnes juives (Éric Zemmour, Alain Finkielkraut, Élisabeth Lévy, Gilles-William Goldnadel etc. - lire ici un excellent article de Quartiers Libres ou encore ici sur le site de REFLEXes au sujet des connections LDJ-FN) . Et cela le plus sereinement du monde, dans les colonnes des grands hebdomadaires, sur les plateaux télé ou au micro de radios à grande audience (Zemmour sur RTL, Finkielkraut sur France Culture), sans essayer le moins du monde de faire croire que "c'est de l'humour"...

    1837151-anne-sophie-leclere-qui-est-la-candidate-fn-qui-comIl y a certes toujours eu, depuis la IVe République (premier soutien mondial de l’État sioniste à l'époque...), toute une extrême-droite pro-israélienne voyant dans ce pays un "rempart de l'Occident chrétien" contre le "communisme" hier et l'"islamisme" aujourd'hui ; mais cette extrême-droite restait jusque-là très largement antisémite "à domicile", dénonçant dans le Juif la quintessence des idées "antinationales" social-libérales et progressistes (plus tard "gauche caviar", "immigrationistes", européistes et "mondialistes", charity business etc.), ce que résumait on-ne-peut mieux la sentence de l'ancien "commissaire général aux questions juives" de Vichy Xavier Vallat : "Vive Israël, mort aux youpins !" (autre exemple : Serge de Beketchvolontaire dans les rangs de Tsahal en 1967 mais dont "(les) calembours suintaient l'antisémitisme et (qui) ne ratait jamais une allusion au génocide juif pour en relativiser l'ampleur"). Il a certes, aussi, toujours existé historiquement un certain fascisme non-antisémite ou (en tout cas) ne mettant pas particulièrement l'antisémitisme en avant : il suffit de penser au fascisme italien des débuts ou encore aux  Croix-de-Feu/PSF du colonel de La Rocque. >Il ne s'agit pas du tout de cela aujourd'hui, mais bien d'un phénomène nouveau qui fait de l'antisémitisme une "ligne rouge de l'inacceptable" et utilise cette idée (correcte en soi) pour mobiliser... contre les "musulmans", les colonisés intérieur "arabes" et "noirs" en général, qui seraient finalement les "derniers" à "maintenir vivante l'horreur antisémite" en Hexagone. Les personnalités citées ne sont même pas spécialement "sionistes", en tout cas pas des ultras du Grand Israël : elles sont généralement "pour la paix" et pour "deux États", regrettent que "de part et d'autre" (mais surtout côté palestinien, évidemment...) des "extrémistes sabotent le règlement pacifique du conflit" et pensent qu'il ne faut (surtout) pas "importer le conflit en France" (obsession du "communautarisme"). Elles ne sont pas, non plus, particulièrement "euratlantistes" (ce qui serait la position des BHL, Glucksman, Askolovitch etc.) et même plutôt, au contraire, sur un bon vieux discours républicain souverainiste de droite... Des conceptions finalement proches de celles de Soral mais pas avec le même "ennemi intérieur", le même "communautarisme" comme obsession principale : pour les uns c'est un "lobby juif" qui "noyauterait" la "finance", la politique, les médias etc. ; pour les autres ce sont (définitivement) les "musulmans", "graine" de délinquants et de terroristes. Néanmoins, la confusion "Juif ou anti-antisémite + déteste les musulmans = lobby sioniste" s'est installée dans beaucoup d'esprits, et des gourous de tout poil se font bien sûr une joie de l'entretenir...

    Le "niveau" d'antisémitisme relevé par l'enquête recouvre en fait deux réalités bien différentes. Chez les "blancs", c'est le fait de personnes âgées marquées par les préjugés dominants encore forts au milieu du siècle dernier ; ou alors un marqueur d'extrémisme absolu, de droite de l'extrême-droite, d'appartenance à la mouvance nazie-fasciste au sens le plus strict ou à l'ultra-intégrisme catholique. Par contre, dans une enquête menée en 2005 (la situation a donc pu encore empirer depuis...) auprès d'un échantillon de colonisé-e-s intérieur-e-s originaires d'Afrique du Nord et subsaharienne, de l’État turc etc. (en violation de l'interdiction bien française des "statistiques ethniques"), il apparaissait qu'un tiers de ces personnes avaient des conceptions pouvant être qualifiées d'antisémites contre seulement 18% du groupe "témoin" (personnes de toutes origines, cultures et confessions)... Un phénomène d'autant plus fort que les sondé-e-s sont jeunes (maximal chez les 18-25 ans, plus fort que chez les plus de 65 ans du groupe "témoin") et "fortement corrélé à un regain de la pratique religieuse" (traduction : de l'affirmation de sa culture populaire réelle - à travers l'islam - contre l'identité "républicaine française" imposée). Autrement dit, nous avons là non pas "une jeunesse (...) proto-fasciste, individualiste, acculturée, façonnée par le capitalisme (...) éduquée par Facebook, par une école bourgeoise décadente, par un capitalisme devenant monopoliste (...) graine de facho" (propos tout simplement ahurissants paraissant un "mix" de Finkielkraut... et de Soral), mais bien l'émergence d'une conscience et d'un refus de la ismrésignation envers "ce qu'il se passe" en Hexagone et dans le monde, d'une conscience anticapitaliste ("romantique" ou pas...), "anticoloniale intérieure" et anti-impérialiste sincère (marquée par une ultra-sensibilité à la question palestinienne) mais qui, en l'absence totale d'un mouvement communiste conséquent dans ces "quartiers" dont on parle autant que l'on redoute d'y mettre les pieds, tombe dans le marécage de conceptions réactionnaires et finalement fascistes (au service du fascisme), dont Soral représente une version directement liée à un courant ("eurasiste"-"tiers-mondiste") de l'impérialisme BBR, mais loin d'être la seule (il y a tous les courants réactionnaires religieux, liés ou non à certains États etc.). Le "jihad solitaire" de Mohamed Merah à Toulouse nous a offert, dans l'horreur, une illustration parfaite de cela : il commence par frapper des militaires, agents et symboles de la domination et de l'agression impérialiste BBR à travers le monde... puis, devant l'échec d'une nouvelle action de ce type, bascule dans la barbarie réactionnaire sans nom en abattant froidement trois enfants sans défense simplement parce que juifs, au nom des "petits Palestiniens tués par Israël"... Avec Youssouf Fofana, les préjugés antisémites ("les Juifs ont de l'argent, ils sont solidaires entre eux" etc.) s'étaient simplement greffés sur le cerveau crapuleux d'une sous-merde lumpen avide d'argent facile. Le cas Merah, lui, illustre dans une atroce quintessence cette dialectique infernale entre éveil à la conscience du capitalisme impérialiste, de ses crimes et de ses injustices ; résolution à lui déclarer une guerre sans merci... et basculement dans une idéologie réactionnaire, ici traduite en actes meurtriers : l'antisémitisme version salafiste. Un phénomène terrible qui ne concerne pas seulement des "décérébrés" lumpen (il les concerne, mais par répercussion) mais bel et bien ceux et celles qui devraient normalement être les intellectuel-le-s organiques de la révolution dans ces "quartiers".

    Là est pour nous l'aspect principal, le plus préoccupant et néfaste du "phénomène". Pour "lesmaterialistes.com", l'affaire est entendue : la jeunesse qui applaudit Dieudonné (et/ou Merah) ne vaut pas et n'a jamais valu la peine que l'on s'y intéresse, ce ne sont que des "individualistes façonnés par le capitalisme" et de la "graine de facho", et les "sujets révolutionnaires" sont à chercher ailleurs (mais où ?). Pour nous au contraire, Dieudonné (et Soral derrière lui) comme les sectes fondamentalistes ne nous "volent" pas seulement des "troupes" (cela, tout mouvement soutenu par des personnes de classe populaire le fait...), ils polluent aussi l'esprit de possibles CADRES de la révolution à construire ! Nous avons pu observer (notamment sur les réseaux sociaux) depuis deux ou trois ans un mouvement de rejet de Dieudonné et Soral dans la population des "quartiers" qu'ils ont voulu séduire (ou encore dans la solidarité organisée avec la Palestine) ; des "casseroles" du sinistre duo sont "déterrées" et des voix de plus en plus nombreuses les dénoncent pour ce qu'ils sont : des démagogues fascistes gérant un business de la haine. Néanmoins, la pollution des esprits reste toujours profonde même chez celles et ceux qui ont effectué ce rejet. Quelque part, le point d'arrivée actuel de Dieudonné est dénoncé mais le parcours qui l'y a mené n'est pas compris. Bien souvent, sa dérive est jugée regrettable mais la responsabilité principale en incombe à ceux qui l'y auraient "poussé", aux sionistes qui l'ont "lynché" etc. etc. et non à Dieudonné lui-même : ceci est totalement contraire au matérialisme dialectique (primauté des causes internes, même si des facteurs externes peuvent évidemment jouer) et devrait être invalidé par le seul fait que des milliers de militant-e-s pro-palestinien-ne-s qui subissent la pression (parfois même physique) des ultras du sionisme (et de l’État qui bien souvent les couvre), et qui n'ont pas la protection que sa fortune assure à Dieudonné, ne suivent pas ce parcours...

    La raison de cette pollution des esprits est, elle aussi, à rechercher en premier lieu dans les causes internes : ce n'est pas la "force" du discours inepte de Dieudonné et Soral qui amène des milliers de jeunes de classe populaire à "glisser des quenelles" à la Main d'Or (face à un fantasmagorique "lobby sioniste") plutôt que de lever fièrement le poing face au Capital exploiteur et à son État raciste ; c'est l'incapacité du mouvement communiste à avoir, vis-à-vis des masses populaires concernées, un discours 1°/ cohérent, 2°/ offensif et 3°/ audible. Nous progressons dans ce sens mais l'effort ne doit pas, JAMAIS, être relâché.

    ieri-partigiani-oggi-antifascisti-copy-copie-1Ce qui ressort de nos (déjà !) quatre années d'expérience et de travail politique, d'échange et de débat avec des groupes révolutionnaires en Hexagone et à l'étranger etc., c'est que la question principale vis-à-vis d'une quelconque action ou d'un quelconque mouvement agissant n'est pas la "pureté prolétarienne" de ce qui est dit et fait ("pureté" que chacun-e va mesurer selon ses propres critères...) mais la capacité des communistes à en assumer et exercer la direction consciente dans leur objectif qui est (encore faut-il que cela soit clair !) la prise de pouvoir par le prolétariat révolutionnaire ; "décrassant les esprits" dans le feu de la lutte et diffusant la conception communiste du monde : ce que Gramsci appelle construire l'hégémonie. Assumer et exercer cette direction révolutionnaire consciente sur un mouvement quel qu'il soit amène TOUJOURS, historiquement, les cadres démagogues contre-révolutionnaires à tomber le masque : il suffit de se souvenir comme quelque chose d'aussi imparfait que les Indigènes de la République a suffi pour voir Alain Soral livrer le fond de sa pensée sur les colonisé-e-s intérieur-e-s d'aujourd'hui (et colonisé-e-s tout court d'hier) dont il se prétend le champion : "Houria Bouteldja est la preuve de la réussite totale de la colonisation, c’est à dire que sans la colonisation, cette petite Algérienne serait aujourd’hui tatouée en bleu sur le front, dans un bled de moyenne montagne, elle aurait six gosses et aurait été mariée de force, ce qui est normal dans une société patriarcale et elle fermerait sa gueule. C’est grâce à la colonisation et à la France qu’elle peut être une révolutionnaire anti-française haineuse" !

    Lorsqu'en revanche cela n'est pas assumé ou (pire) lorsque l'on ne veut pas l'assumer, comme cela a trop souvent été le cas vis-à-vis de la "jeunesse de banlieue" sous des prétextes aussi divers que variés (de l'ouvriérisme économiste au laïcardisme cache-sexe du suprématisme culturel européen-judéo-chrétien), alors ce sont des forces réactionnaires au service de fractions de la bourgeoisie impérialiste, d’États réactionnaires divers (Dieudonné et Soral reçoivent beaucoup d'argent iranien, l'Arabie et le Qatar appuient les sectes salafistes etc.) ou de leur seul gourou qui assument cette direction concrète. C'est ce qu'il s'est passé avec le public de Dieudonné et il y a beau jeu, aujourd'hui, de lancer des charges de Don Quichotte contre lui en justifiant par affaire Dreyfus + Front populaire l'alliance avec la place Beauvau pour tenter d'évacuer cette responsabilité ! 

    (MàJ 02/04/2014) L’enquête 2013 est enfin sortie : http://fr.scribd.com/doc/215668601/CNCDH-Racisme-2013-Basse-Def-1 ; lire un résumé ici : http://www.midilibre.fr/2014/04/02/liberation-de-la-parole-raciste-en-2013-surtout-contre-les-roms-et-les-musulmans,843201.php

    Parmi les principales conclusions, on relève que :

    - Davantage encore de Français assument être racistes : 9% se disent "plutôt racistes" (+2 points par rapport à 2012) et 26% "un peu racistes" (+ 4 points). Ils sont aussi plus nombreux à considérer que l'intégration des immigrés fonctionne mal (63%, + 7 points par rapport à 2012).

    - L'islam est la religion la moins positivement connotée et 80% des sondés estiment que le port du voile pose problème pour vivre en société. Les musulmans ne sont "des Français comme les autres" que pour 65% des personnes interrogées contre 70% il y a un an (baisse de 5 points) ; et sont un "groupe à part" de la société pour plus de 55% (45% sur le critère "Maghrébins", contre "seulement" 30% pour les Juifs).

    - Les Roms migrants pâtissent d'une image extrêmement négative : 85% des sondés pensent qu'ils exploitent très souvent les enfants (+ 10 points par rapport à 2012) et 78% qu'ils vivent essentiellement de vols et de trafics (+ 7 points).

    - L'indice de tolérance, calculé à partir d'une série de questions posées aux sondés, recule pour la quatrième année consécutive. Ces résultats révèlent un "refus croissant de l'autre différent" mais dévoilent aussi une "défiance vis-à-vis d'un antiracisme perçu comme censeur".

    - Les Français condamnent en revanche sans équivoque l'antisémitisme et "l'indice d'acceptation" des Juifs "reste de très loin supérieur à celui de tous les autres groupes", selon une étude qualitative de l'institut CSA qui a mené 30 entretiens semi-directifs en face à face du 9 au 17 décembre 2013. 85 % des sondés (stable par rapport à l’an dernier, donc) estiment que les Juifs sont des Français comme les autres, contre 65 % pour les musulmans. Les clichés, comme la thèse d'un rapport particulier des Juifs à l'argent, restent cependant persistants et partagés comme le relève l'étude [concernant les personnes de culture musulmane, un "florilège" de ces préjugés (ainsi que de propos sur la "sacralisation" de l'antisémitisme par rapport aux autres racismes) est présenté page 65 du rapport].

    - Selon les chiffres du Ministère de l'Intérieur, les actes et menaces antisémites ont baissé de 31% entre 2012 et 2013 tandis que les actes antimusulmans ont progressé de 11 points [une progression annuelle constante depuis le début du nouveau siècle alors que les violences antisémites ont tendance à croître puis diminuer "en dents de scie" au gré (notamment) de l'actualité au Proche-Orient, bien que l'"année Merah" 2012 (marquée par une forte poussée) ait commencé à faire mentir cette corrélation].

    342564CercledeprecyRENAUDCAMUSOu en deux phrases :

    - La mobilisation réactionnaire de masse sur les thèmes anti-islam, anti-"immigration" (valable quand bien même il s'agit de la 3e génération née en Hexagone), anti-rroms etc. cartonne, progresse et a sans doute largement rempli les urnes de bulletins FN aux municipales ; on entend de plus en plus parler (Front National, Éric Zemmour, Ivan Rioufol etc.), comme une sorte de synthèse de ces différentes thématiques mobilisatrices, de la théorie du Grand Remplacement élaborée à partir des années 1990 et mise sur le papier en 2011 par l'écrivain Renaud Camus ;

    - La mobilisation sur une ligne antisémite (associée ou pas à la question palestinienne, mais généralement associée) fait du surplace, restant cantonnée à des milieux très particuliers (jeunes prolétaires décomposés-décérébrés des "minorités" ou au contraire petits bourgeois issus de ces mêmes minorités, qui râlent contre un ascenseur social trop lent à leur goût sans pouvoir ni vouloir remettre en cause le capitalisme comme mode de production) ; et même recule dans les actes concrets (sans toutefois exclure que cela remonte dans le futur).

    On peut évidemment supputer que tout cela ne va pas plaire à toute une nébuleuse "antifasciste" anti-antisioniste, anti-"communautariste" etc. caractérisée par ailleurs (généralement) par une conception ultra-jacobine (ou nihiliste nationale ce qui revient au même) de l’État français, au nom de l’anti-"régionalisme-névrose-identitaire"… Mouvance dont en ces temps brunâtres que nous traversons il faut oser clairement dévoiler l’objectif : arrimer, souder, SCELLER la légitime préoccupation antifasciste dans les classes populaires à l’aile "gauche" de l’idéologie républicaine, l’aile "gauche" de la République du Capital ! Objectif que certains d’entre eux ont d’ores et déjà ouvertement révélé, avec leur apologie de l’union "antifasciste" autour de Manuel Valls…


    Nouveaux articles parus sur le sujet :

    Feu de Prairie :  Au sujet de l’antisémitisme moderne 

    OCML Voie Prolétarienne : On ne combat pas le système en applaudissant un antisémite, on ne combat pas le fascisme en soutenant le PS ! [Totalement d'accord que si l'État "interdit aujourd'hui Dieudonné, pourquoi n'interdirait-il pas demain les militants communistes" ou révolutionnaires, les militants ouvriers et progressistes ; il ne s'en est d'ailleurs jamais privé ("groupe Tarnac", "anarcho-autonomes", Contis, BDS, antifas etc.) ; tout comme la loi sur les signes religieux pourrait très bien être étendue aux symboles politiques notamment communistes (en théorie ils sont déjà proscrits par une circulaire de... 1936) et la loi sur la burqa permet aussi de punir les manifestants cagoulés ; ou comme d'aucuns réclament une "loi Gayssot pour l'idéologie criminelle communiste", etc. : c'est l'esprit même de l'idéologie républicaine francouille que de prétendre "combattre les extrémistes de tout bord", d'ailleurs même Vichy (avec Pucheu) prétendait cela... Pas d'accord en revanche avec l'affirmation libérale que "toute atteinte aux libertés, même celles de nos ennemis, peut demain s'étendre à nous". Les communistes, selon nous, doivent savoir être "pragmatiques" : si la branche national-républicaine de la Réaction fout sur la gueule de la branche "national-révolutionnaire tiers-mondiste antisioniste" antisémite, tant mieux, on ne va pas pleurer ! Simplement nous ne sommes pas dupes...]

    Alternative Libertaire : Dieudonné-Valls, ni peste ni choléra !

    Communiqué de la Campagne BDS France sur Dieudonné et Valls

    Comité Anti-impérialiste : Contre la mobilisation réactionnaire des masses

    Communiqué de l'UJFP

    Lire aussi : À quoi sert Dieudonné ? Et qui en profite ? de Pierre Stambul (UJFP)

     


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