• Pour comprendre la genèse des ensembles linguistiques, comme l'ensemble d'òc par exemple, il faut en fait encore une fois en revenir à Samir Amin : ce sont des résultantes, sur le temps long (plusieurs siècles, un demi-millénaire ou plus), de systèmes économiques TRIBUTAIRES (lire aussi ici) autour d'un Centre ; les gens développant une langue commune d'abord et avant tout dans une relation économique commune.

    Et alors à ce niveau-là, si l'on remonte loin dans le temps, jusqu'au Haut Moyen Âge (5e-10e siècles) : il y a Tolosa (Toulouse) la capitale des Wisigoths (418-507), puis des largement indépendants États aquitains successifs, ok ok ; mais néanmoins, le Centre économique tributaire de la moitié sud de l'Hexagone devait encore rester à cette époque le triangle Arles-Orange-Nîmes, ces vieilles cités romaines qui étaient auparavant le cœur battant de la Provincia et restaient le siège d’archevêchés et autres institutions tributaires fondamentales ; Narbonne étant un centre plus secondaire, Tolosa-Toulouse avant tout un centre administratif jusqu'à la fin du 1er millénaire, Montpellier n'apparaissant elle aussi que peu avant l'an 1000 (mais sa région est, certes, déjà importante auparavant), etc.

    Arles, bien que fréquemment ravagée par divers assaillants en ces temps troublés, est alors un port important (avec son avant-port Fos), comme d'ailleurs sans doute Maguelone, cette île fortifiée par les Wisigoths au milieu d'un étang du littoral languedocien offrant un excellent mouillage naturel (avant que Charles Martel ne la ravage en 737...), sans oublier bien sûr... Marseille la vieille phocéenne, brillante république maritime qui n'a nullement disparu du jour au lendemain avec la fin de l'Empire ; tout ceci s'inscrivant dans un commerce méditerranéen, avec l'Afrique du Nord et l'Orient (Centre... économique du monde connu des Européens de l'époque), qui n'a pas non plus disparu mais reste au contraire florissant (ainsi au sujet d'Arles, on peut lire que "Au VIIe siècle, les marchands orientaux notamment syriens concentrent entre leurs mains le commerce d'importation en Gaule. Un diplôme de Chilpéric II de 716, nous indique par exemple les denrées importées et transitant par Arles ou son port avancé Fos", ou encore que "en 800, Théodulfe (c.750-821), évêque d'Orléans de passage dans la cité, signale tous les produits qu'on peut y trouver grâce à son port : draps de soie, peaux de Cordoue, encens, ivoire et bien d'autres produits de la Syrie, de la Perse et de l'Inde ; Arles est bien à cette époque un port franc prospère ouvert sur le monde méditerranéen").

    Ce qui à ce stade tendrait à donner raison à... Mistral, pour qui le "vrai" "pur" "provençal" (terme synonyme pour lui de langue d'òc) était celui de cette région : le rhodanien.

    C'est, en effet, très probablement dans ce secteur qui était déjà l'épicentre de la Provincia romaine, que s'est développé dans sa forme la plus "pure" le roman post-latin qui allait devenir le provençal de Mistral c'est à dire l'occitan ; l'aire de langue d'òc consistant ensuite tout simplement en le "bassin versant" économique (tributaire) de ce Centre ; ce que tend d'ailleurs à montrer la géographie de cette aire, son "déploiement" en deux "ailes" (une petite à l'Est et une grande à l'Ouest) autour de cette région précise.

    Les (légères) variantes de provençal en sont basiquement la dérivation le long des routes reliant à l'Italie (par la Durance ou par la côte) ; celles de languedocien se développant le long de la Domitia vers l'Espagne et de l'Aquitania entre Narbonne et Bordeaux ; ces deux dialectes étant de fait jumeaux, rien ne permettant vraiment de parler de deux langues différentes. 

    En s'éloignant plus du Centre (Alpes, Massif Central, Gascogne-Pyrénées), par contre et par la force des choses, la langue occitane "dévie" plus fortement de cette "norme" centrale de la basse vallée du Rhône, l'influence des substrats pré-romans se fait plus sentir etc.

    Ainsi par exemple, le "limousin" des ducs troubadours d'Aquitaine (11e-12e siècles) n'était certainement pas le parler des paysans du Limousin, d'ailleurs sans doute, à l'époque, nettement plus gaulois et moins roman que le dialecte d'òc qui a subi l'assaut des hussards noirs de la République parisienne au 20e siècle. Il était simplement nommé ainsi parce que ces ducs avaient l'habitude de résider dans ce secteur entre Poitiers, Limoges, Périgueux, Bordeaux etc. ; mais il s'agissait bel et bien d'un PROTO-LANGUEDOCIEN (sans doute encore plus indiscernable du proto-provençal que ne le sont les deux dialectes aujourd'hui) : la langue noble des élites de la moitié sud de l'ancienne Gaule à l'époque... se communiquant La notion d'ensemble économique tributaire (au Moyen Âge féodal) et la genèse de l'aire linguistique occitanepetit à petit aux masses populaires dans leur parler de tous les jours, à mesure que les villes, (re) gagnant en importance après la période troublée entre 400 et 800 de notre ère, "prenaient" de plus en plus les campagnes et les villages dans leur "orbite" économique (mais ce faisant, aussi, sous l'influence des substrats pré-latins basquisants, gaulois ou ligures, elle se différenciait toujours plus de sa "matrice" gallo-romane méridionale originelle).

    Il en est allé strictement de même en Gascogne : adoption du "roman du Sud de la Gaule" (proto-occitan) par les élites, y compris d'ailleurs jusqu'au Pays Basque (Bayonne, Saint-Jean-de-Luz etc.) ; sachant qu'à l'origine, lors de la conquête romaine par César et pendant encore plusieurs siècles voire un millénaire ensuite (sous le duché de Vasconie etc.), la langue de la région n'était pas gauloise mais plutôt de type euskara ; puis transmission aux masses (hypothèse possible : adoption par elles dans le cadre de l'alliance de classes Église-paysannerie, contre la noblesse guerrière, de la "Paix de Dieu"), donnant donc le (les diverses variantes de) gascon, SAUF dans le petit secteur des montagnes basques, pour des raisons mal connues mais sans doute en rapport avec la longue existence d'un État basque (royaume de Navarre jusqu'au début du 16e siècle, voire fin pour le petit bout qui appartenait à Henri IV) à l'appareil judiciaire et administratif (les "vieilles lois" - lege zaharra) dans cette langue ; "centré" tributairement sur Pampelune et les ports des estuaires de la côte plutôt que sur l'axe Narbonne-Toulouse-Bordeaux, etc.

    Plus au nord, l'aire linguistique arpitane correspond elle à un autre "bassin versant" tributaire, celui de Lyon et Vienne, deux autres anciennes cités romaines et "métropolites" (archevêchés) essentielles (carrément capitale romaine puis primature chrétienne des Gaules pour ce qui est de Lyon) ; "cœur", de fait, du royaume burgonde puis des entités successives (chaque fois que le royaume d'un roi mérovingien sur toute la Gaule se divisait entre ses héritiers après sa mort, on tendait à revenir à un royaume sur ce territoire), dont l'aire arpitane d'ailleurs, étendue à l'origine beaucoup plus au nord qu'aujourd'hui, épousait alors pratiquement les limites. Ce "bassin versant" est sans doute ce qui "enfonce" très au sud (pratiquement jusqu'à Valence, et au sud de Grenoble) la frontière linguistique d'òc de ce côté-là de l'Hexagone, alors qu'elle montre très au nord au niveau du Massif Central. Il est cependant fort possible que la langue de l'époque ait été beaucoup plus proche du proto-occitan qu'elle ne l'est aujourd'hui, et qu'elle ait évolué par la suite sous l'influence économique et politique du Nord (avec pour caractéristique par exemple l'emploi systématique du pronom personnel dans la conjugaison, qui n'est utilisé que pour insister en langue d'òc, comme en espagnol ou en italien, c'est normalement ainsi que les linguistes fixent la "frontière" entre arpitan et occitan).

    D'ailleurs, diamétralement à l'opposé de l'Hexagone, sur l'Atlantique, l'aire poitevine-saintongeaise (ancienne région Poitou-Charentes) est elle aussi réputée avoir été de langue d'òc et "oïlisée" après son annexion par Philippe Auguste (et sous l'influence économique du Val de Loire qui était le véritable Centre, plus que Paris, des langues d'oïl dont la version standardisée deviendra le français - le fait d'avoir déjà été, pendant le demi-siècle précédant la conquête capétienne, une possession des Plantagenêt c'est à dire d'Angers, qui était leur véritable capitale, a sans doute aussi joué).

    [Ici une (très importante) carte des variations des aires linguistiques au cours de l'histoire : Linguae-in-Galloromania.svg]

    Alors ensuite, en plus de ces considérations économiques, il y a l'aspect POLITIQUE qui joue bien sûr un rôle ; mais néanmoins tout de même (surtout avant l'apparition des États modernes) à relativiser.

    La grande majorité de l'aire linguistique occitane actuelle correspond, on le sait, à ce qui était après la chute de l'Empire romain (entre 418 et 507) le royaume des Wisigoths, puis les successives entités (duchés, ou royaumes mérovingiens de division entre héritiers) généralement appelées Aquitaine ; d'ailleurs le terme même d'Occitanie (Occitània), qui n'est pas un néologisme récent mais apparaît dans des textes de peu après la conquête capétienne (et encore dans l'Encyclopédie de Diderot en 1765 : "nom commun à tous les peuples qui disent oc pour oui, c'est-à-dire de la Gascogne, de la Provence, du Dauphiné ainsi que du Languedoc"), pourrait être à l'origine une sorte de "jeu de mot" entre òc (les langues) et Aquitania (Aquitaine en latin). Au nord-est, on l'a vu, se trouvait le royaume proto-arpitan burgonde et là aussi ses successeurs, autour de Lyon et sa voisine Vienne.

    Pour ce qui est, en revanche, de ce que nous avons vu être jusque très tardivement (début du 2e millénaire) le Centre tributaire de l'aire linguistique, à savoir la basse vallée du Rhône et plus largement le pourtour méditerranéen, la situation s'avère un peu plus complexe.

    Au 5e siècle, le Languedoc méditerranéen ET la Provence au sud de la Durance appartiennent aux Wisigoths, tandis qu'au nord ce sont les Burgondes ; puis cette dernière région est annexée un temps par les Ostrogoths, c'est à dire l'Italie, avant d'être conquise par les Francs ce qui signifiait, en fait, rattachée à l'ensemble "burgonde" de l'axe Rhône-Saône. De son côté l'ouest du Rhône, ce qu'on appelait la Septimanie (Languedoc méditerranéen) reste aux Wisigoths repliés en Espagne après leur défaite et la conquête de toute l'Aquitaine par Clovis, puis passe pour une quarantaine d'années environ (720-760) à leurs vainqueurs et successeurs, les Arabes de l'émirat de Cordoue (wilaya de Narbonne), avant d'être à son tour nominalement rattachée à la Gaule franque c'est à dire en réalité à l'ensemble aquitain (duché et parfois, assez souvent même, royaume).

    C'est donc (pour le moins) une terre disputée ; ce que sa richesse explique sans doute ; mais qui garde néanmoins à travers toutes ces conquêtes ses institutions propres, ses "patrices de Provence" (comme Mauronte) par exemple, et son autonomie politique.

    À l'époque carolingienne (entre la fin du 9e et le milieu du 10e siècle) se constitue un grand royaume de "Bourgogne-Provence" ou "d'Arles", qui finira intégré au Saint-Empire en 1032 et dès lors (son "roi" devenant le lointain et absent empereur germanique) se décomposera. Ceci montre d'ailleurs l'importance "centrale" que conserve cette région d'Arles encore à cette époque. Sa frontière occidentale n'est cependant pas exactement le Rhône, mais plutôt les Cévennes ardéchoises et le secteur de Nîmes ; tandis qu'au nord ce qu'on appelle Provence s'étend jusqu'à la hauteur de la Drôme voire de l'Isère, voire garde dans le langage commun de l'époque son sens de Provincia romaine c'est à dire jusqu'à Vienne (pratiquement Lyon) et même au lac Léman (en distinguant peut-être parfois la Sapaudia future Savoie)... et donc théoriquement, aussi, de toute l'Occitanie du moins méditerranéenne, jusqu'à Narbonne voire Toulouse.

    Plus à l'ouest, au sein de l'ensemble aquitain, se développe l'autonomie et s'étend l'influence dans toute l'Occitanie centrale (Languedoc historique) de Toulouse, l'autorité de ses comtes sur leurs vassaux (Trencavel etc.) mais aussi et surtout la force d'attraction de son économie marchande, tandis que s'immisce aussi l'influence politique des rois d'Aragon-Catalogne (qui mettent d'ailleurs la main sur la Provence méridionale, au sud de la Durance, au 12e siècle ; les Toulouse prenant ce qui est au nord - Vaucluse, Drôme - comme "marquisat" ; les Toulouse de fait eux-mêmes d'origine provençale ainsi que leur célèbre croix devenue l'emblème occitan ; bref comme on peut le voir la séparation reste tout sauf nette pour ne pas dire que l'imbrication est totale...). La très importante place intellectuelle et marchande de Montpellier (devenue un Centre tributaire de premier plan) était ainsi leur possession directe (et le restera jusque tard, au 14e siècle).

    Tout ceci a son importance. La politique a, dans les processus de formation nationale, son importance : si par exemple aujourd'hui tout le monde parle français, et le sentiment d'être "français" est une réalité dont quoi qu'on en pense la ligne de masse doit tenir compte (comme on a pu encore le voir dans le mouvement des Gilets Jaunes), c'est en raison de l’œuvre politique de l’État français auquel nous appartenons tous depuis plusieurs siècles... MAIS il s'agit là d'un État moderne, un État-"nation".

    L'importance du rattachement politique ne doit pas non plus être exagérée, a fortiori dans le contexte féodal du Moyen Âge. Les "États" étaient alors d'abord et avant tout des ensembles de terres appartenant et fournissant (par l'impôt) ses revenus à un souverain déterminé. Ce qui faisait de ce souverain, de sa résidence et de sa cour un Centre tributaire important pour les territoires s'y rattachant, certes, mais pas le seul : d'autres importants, pour ne pas dire les principaux Centres tributaires étaient ainsi les Centres ecclésiastiques (évêchés, archevêchés, grandes abbayes), ou les grands ateliers de production monétaire comme Melguèlh-Mauguio (sol melgorien), ou encore les vieilles cités antiques (comme, on l'a vu, Nîmes ou Arles) qui conservaient leur zone d'attraction, de "chalandise" économique (et selon la marchandise concernée, celle-ci pouvait s'étendre très loin !) indépendamment de quel seigneur possédait et tirait ses revenus de telle ou telle terre. S'il fallait fréquemment payer un péage au seigneur des lieux (au passage d'un pont par exemple, ou d'un bac sur un fleuve), mais ceci valait aussi pour le déplacement le plus local qui soit (le pont pouvait d'ailleurs se trouver en plein cœur du domaine d'un seul et même seigneur : ça n'avait réellement rien à voir avec une quelconque question de frontière, c'était simplement une rétribution au seigneur qui l'avait fait construire et se chargeait de son entretien !), les personnes et les marchandises circulaient librement vers le Centre économique sans besoin d'un passeport, ni de droits de douanes, bref sans rien de commun avec le fonctionnement des États-"nations" aux 19e et 20e siècles (avant l'Union européenne).

    C'est, ainsi, surtout le découpage administratif FRANÇAIS qui a fixé sur le Rhône une véritable frontière entre le Languedoc d'un côté (définitivement annexé en 1270) et le Dauphiné (annexé en 1349) et la Provence (1480-82 après le règne de la déjà apparentée dynastie d'Anjou) de l'autre ; avec leurs États provinciaux et leurs Parlements différents, règles juridiques et fiscalités différentes, qui sans en faire des vases clos, tendait néanmoins (on parle là de l'Ancien Régime, 16e-18e siècles) à faire de chacun un circuit économique propre (les capitales administratives françaises devenant Centres de chalandise en se substituant aux anciens).

    L'histoire et la politique, les entités "étatiques" féodales indépendantes puis administratives françaises d'Ancien Régime, ont sans aucun doute forgé des identités culturelles fortes et singulières, dont toute LIGNE DE MASSE en matière "occitaniste" comme de questions nationales dans l’État français en général, ne peut que devoir tenir compte.

    C'est un fait que, si "Occitanie" n'est pas du tout un néologisme, le resurgissement du terme au 20e siècle l'a vu de par sa racine étymologique comme la localisation de ses principaux activistes tendre à se confondre avec "Languedoc" ; venant se surajouter à cela en 2015 l'attribution (après consultation populaire) de ce nom à la nouvelle région couvrant la partie centrale de l'aire de langue occitane (ex Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées), après des décennies déjà d'emploi du terme et de la symbolique (croix) par les anciennes régions, les villes comme Toulouse etc. ; tandis que de son côté le Félibre de Mistral qualifiait de "provençal" l'ensemble de l'aire linguistique d'òc, "annexant" de fait à la Provence tout le "Midi" (et souhaitant faire du provençal rhodanien le seul occitan littéraire et "académique", "digne" d'être écrit...).

    C'est un fait que, au-delà de la problématique déjà non sans importance du sentiment d'être "français", il n'est pas évident en ligne de masse, à ce stade, de parler d'Occitanie en Provence : il y a des occitanistes bien sûr, assez nombreux ; de fait les écoles d'enseignement en immersion linguistique, autrement dit de sauvetage pur et simple de la langue (donc du provençal, car on n'y enseigne pas d'"occitan" unifié qui n'existe pas), sont gérées par des associations occitanistes ; mais il s'agit néanmoins de cercles bien particuliers, politisés, "initiés". Si nous voulons parler en termes DE MASSES, c'est bien le drapeau provençal à bandes sang et or que l'on va éventuellement (assez massivement en fait...) retrouver dans les tribunes sportives (Stade Vélodrome de l'OM, RC Toulon pour le rugby), ondoyant au chant mistralien de la Coupo Santo ; sur (souvent flanqué dans ce cas du dauphin des Hautes-Alpes et de l'aigle niçois, c'est à dire le drapeau de la région administrative désormais ignominieusement rebaptisée "Sud") les mairies et autres édifices publics, ou encore les plaques d'immatriculation ; dans les festivités locales etc. etc. Un sentiment de masse, donc, provençal et pas vraiment occitan ; à quoi s'ajoute désormais, comme on l'a dit, le fait que l'Occitanie... "ben c'est l'autre région quoi, celle d'à côté, Montpellier Toulouse tout ça, de l'autre côté du Rhône... ici c'est la Provence !".

    Il en va assez largement de même en Gascogne, "propre" (Gers, Landes etc.) ou "particulière" (Béarn, Bigorre, Luchonnais etc.), avec cependant toutefois (historiquement) une implantation occitaniste plus importante ; tout comme en Auvergne et Limousin ; la politique... toute récente jouant parfois aussi son rôle comme avec le travail politique du PNO dans les vallées de langue d'òc du versant piémontais des Alpes, qui se définissent désormais largement comme occitanes et arborent fièrement la Crotz, à quelques exceptions près comme Comboscuro qui préfère revendiquer sa provençalité (sachant que sur le plan linguistique, toutes sont nettement plus éloignées du provençal d'Aix comme du languedocien de Montpellier que ceux-ci ne le sont entre eux...). Le Pays de Nice compte des nissardistes qui ne veulent entendre parler ni d'occitanistes... ni de provençalistes ; mais aussi une assez importante "scène" occitaniste (plus importante, peut-être même, qu'en bien des endroits de Provence proprement dite), plutôt de filiation PNO (Assemblada Occitana bien implantée localement, Republica Federal, Nissa Pantai etc.).

    Si être matérialiste, c'est d'abord et avant tout partir du réel... il n'y a pas grand-chose d'autre à ajouter que : "dont acte" ; ceci étant valable pour les uns ("les provençalistes c'est des pourritures de diviseurs" etc.) comme pour les autres ("ces saloperies de panoccitanistes de merde véritables jacobins en modèle réduit", sachant que les provençalistes veulent eux aussi généralement établir une "Grande Provence" qui "peut tenir" par l'histoire, jusqu'à Valence et Menton, incluant les vallées du Piémont voire l'Ardèche, mais où en bien des lieux le sentiment provençal est bien moins évident qu'il ne peut l'être dans certaines tribunes de l'OM ou du RCT, et que le sentiment occitan ne l'est dans celles-ci).

    La politique révolutionnaire, c'est partir de la réalité des masses ; et ceci implique que construire un mouvement de Libération révolutionnaire du Peuple travailleur en Provence ne peut sans doute pas passer par plaquer autoritairement la Croix d'Òc, toute d'origine provençale qu'elle soit, sur des couleurs sang et or qu'il faut déjà tant œuvrer à re-signifier et arracher au pur folklorisme en arrachant la conscience des masses au sentiment "français" ; dans un contexte où, un peu comme la dissolution dans le kafkaïen "Grand Est" a réveillé la lutte et l'affirmation populaire en Alsace, l'ignominie technocratique "Sud" offre l'occasion d'un splendide combat en ce sens.

    Mais être matérialiste, c'est aussi être SCIENTIFIQUE ; et donc admettre la vérité scientifique de ce que nous avons vu ici : la genèse "aminienne" de l'aire linguistique d'òc, comme de toute aire linguistique dans le monde, dans un système économique tributaire d'un Centre que nous avons pu situer (dans la toute première genèse, l'étape de "différenciation romane" du Haut Moyen Âge) dans la basse vallée du Rhône ; avec évidemment des variantes, un phénomène de "dégradé" dialectal à mesure que l'on s'éloigne précisément de ce Centre (et que se fait sentir, peut-être, l'influence d'autres Centres, comme le Centre lyonnais arpitan par exemple ; notamment dans ces secteurs comme la Drôme, théoriquement occitans mais où l'accent, qui dit quand même beaucoup de la langue parlée avant le français, est pratiquement identique à celui du Forez arpitan - le fameux accent d'Aimé Jacquet par exemple ; comme il en va d'ailleurs largement de même dans le Puy-de-Dôme auvergnat etc.).

    Et donc, l'unité historique claire que revêt aussi cette aire en dépit des différents "États" féodaux d'avant l'annexion ; "États" dont nous avons vu qu'ils n'avaient pas la même signification ni la même logique de frontières entre eux que ceux d'aujourd'hui.

    En ce qui nous concerne pour notre part, en tout cas, si toutes ces questions existent bel et bien et méritent d'être réfléchies, ces contradictions entre "panoccitanisme" et "particularismes" (Provence, Gascogne-Béarn, Nice etc.) sont (doivent être) selon nous secondaires, et les crispations, les conflictualités exagérées à leur sujet sont hautement nocives au regard de la priorité ABSOLUE que devrait être pour nous tous d'en finir avec la France comme prison et appareil de domination des Peuples travailleurs ; cette NÉCESSITÉ HISTORIQUE et exigence populaire de "vivre, travailler et décider au pays" qu'est en ce moment même en train de poser, sous ses marées de drapeaux bleus-blancs-rouges et de Marseillaise (qu'il nous faut "déblayer"), le mouvement des Gilets Jaunes...

    À moins bien sûr d'avoir affaire (pour ne nommer personne) à de véritables officines de droite ou d'extrême-droite françaises déguisées, capables par exemple de... prendre position contre le processus d'autodétermination de la Catalogne ; mais cette problématique, cette politique du "sous-marin" réactionnaire au service (en général) d'une petite flamme bel et bien tricolore, affecte toutes les nationalités périphériques de l’État français (Bretagne, Corse etc.) sans qu'elles ne soient forcément concernées par ce type de controverse linguistique ; sachant qu'ici les forces de ce type les plus nocives, par leur ambigüité maurrassienne entre "régionalisme" folklorique et nationalisme français, restent d'un côté comme de l'autre du Rhône les Identitaires et leurs divers faux nez ("Ligue du Sud", "Ligue du Midi" etc.) ; et que le "panoccitanisme" peut lui aussi être totalement incrusté, certes plutôt "à gauche" ou tout au plus au centre-droit, dans l'appareil d’État français qu'il prétend dénoncer, petit monde de cénacles universitaires et de strapontins régionaux gentiment laissés par le PS ou autres, qui pour ne pas être proprement fasciste n'en a pas moins plus que sa responsabilité dans la désaffection ou la "surdité" populaire à son endroit que l'on pourra rencontrer par exemple chez un supporter provençaliste de l'OM (ou un Gilet Jaune d'un rond-point du Var arborant lui aussi fièrement le sang et or).

    Bref, pour parler clairement : en termes de masses, pour partir typiquement du Gilet Jaune lambda qu'il va déjà y avoir toutes les peines du monde à arracher à ses illusions "citoyennes", "républicaines" et "françaises", le gars il n'en a surtout strictement RIEN À BATTRE de ces bisbilles entre "initiés" qui ne font que COUPER leurs protagonistes, les uns comme les autres, de lui et des masses de comme-lui ; de ces préoccupations populaires concrètes et immédiates dont pourtant, l'analyse sérieuse et poussée renvoie toujours à la même conclusion qu'il faut en finir avec le système tel qu'il est, avec LA FRANCE telle qu'elle est, ce qui est a priori le cœur du programme politique de tous.

    IL EST DONC GRAND TEMPS DE POSER LES CHOSES COMME ELLES DOIVENT L'ÊTRE, car la réalité est que toute une conception de l'Occitanie comme (finalement) une espèce d'"anti-nation", d'"anti-France" territorialisée ; conception découlant de la "nation putative" de Lafont-Castan ; a fait en définitive beaucoup de mal, attirant dans le mouvement une prolifération de socedems ou gauchistes vaguement "libertaires", tenants d'une Occitanie "festive" (par exemple) ou on-ne-sait-trop quoi d'autre, etc. etc.

    Face à quoi, les anti-occitanistes "régionaux" (gasconistes, béarnistes, provençalistes) ont beau jeu avec leurs "vraies nations qui elles ont une vraie base historique"... !

    Tandis que nos masses populaires, face à leurs problèmes liés à la domination nationale (dont elles n'ont même plus conscience...) et non-empoignés par les tenants de l'"anti-nation libertaire festive", cherchent refuge (comme c'est hélas trop souvent le cas) dans le nationalisme de droite ou "de gauche" (ou "ni l'un ni l'autre")... français.

    Non, l'Occitanie ce n'est pas un "ensemble mouvant de références culturelles festives" (qui rejoindraient en fin de compte celles de la "scène" d'extrême-gauche) : l'Occitanie c'est le territoire d'un ensemble de problématiques sociales LOURDES ; que l'on peut certes retrouver ailleurs (la France d'Europe, l'Hexagone, a bien d'autres périphéries) sauf qu'ailleurs c'est une autre langue populaire (breton, corse, ch'ti, platt etc.) qui était parlée et qui est en train de disparaître, donc voilà ; et des problématiques dont il faut enfin arriver à dire qu'elles prennent racine dans une histoire, qui est celle d'une CONQUÊTE NATIONALE (par Paris) dans un but bien précis : (nous) EXPLOITER.

    [Lire : qu-est-ce-que-l-occitanie-que-sont-les-occitans-a145587828]

    Il nous faut donc oser (enfin) affirmer ici que l'Occitània (ou les Pays ou les Terres d'Òc, allez, ne chipotons pas !) EST UNE NATION comme peut l'être l'Allemagne ("composite", "plurielle" et donc à vocation fédérative) ; voilà. 

    Une nation actuellement divisée et même pire (que l'Allemagne d'avant 1870), en fait : "unifiée" du fait de l'appartenance... à une autre (qui l'occupe et l'exploite).

    Une nation qui à l'époque historique actuelle (contrairement encore à l'Allemagne au 19e siècle) ne peut avoir de réalisation que ROUGE, révolutionnaire anticapitaliste.

    Et qui sera donc une nation... comme l'aurait été l'Allemagne rouge victorieuse en 1919, avec ses républiques socialistes comme celle de Bavière = les anciens royaumes confédérés de l'Empire, devenus républiques prolétariennes.

    Provence rouge, Béarn rouge, Auvergne rouge etc. etc. = République des Conseils de Bavière (et autres, d'Alsace-Moselle par exemple...) ; Occitanie rouge = Union allemande des Républiques des Conseils (qui se dessinait avant son écrasement par les socedems épaulés par les futurs nazis).

    [On laissera ici de côté le cas de l'Autriche, dont la séparation de l'Allemagne résulte de circonstances historiques précises allemagne-autriche que nous "éviterons" bien sûr de reproduire ; autrement dit, ce n'est pas parce que nous sommes une nation "comme l'Allemagne" qu'il s'agit de faire du "pangermanisme" agressif et réactionnaire...]

    Annexes à lire :

    http://servirlepeupleservirlepeuple.eklablog.com/en-finir-avec-la-france-appareil-politico-militaire-et-ideologique-de--a114084612

    http://servirlepeupleservirlepeuple.eklablog.com/apres-8-segles-a114065314

    http://servirlepeupleservirlepeuple.eklablog.com/grande-etude-historique-du-pais-a-la-commune-populaire-de-la-communaut-a114072740

    http://servirlepeupleservirlepeuple.eklablog.com/notes-de-lecture-sur-en-quoi-consiste-l-inspiration-occitanienne-de-si-a114072518

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    Le seul argument réellement "solide" qui a pu être opposé aux thèses développées dans cet article, est celui d'une langue gasconne qui de manière "prouvée" par les "archéo-linguistes" serait "née par différenciation du latin" (car en effet les langues romanes ne "naissent" pas : elles se séparent à un moment donné du latin) "plusieurs siècles" (2 ou 3) avant les reste des dialectes d'òc.

    En réalité, cette affirmation ne contredit pas vraiment notre analyse et voilà ce qui a pu y être répondu :

    "Il n’a jamais été question de quelque chose d’aussi mécanique qu’une langue qui naît entre Arles et Nîmes et est « importée » en Novempopulanie future Gascogne. Déjà rappelons (tu le rappelles d’ailleurs à ta façon) que la seule « naissance » de la sorte qu’on puisse enregistrer est celle qui intervient presque 1 000 ans avant l’ère chrétienne sur les bords du Tibre, celle du latin lui-même ; et avant ça on ne sait pas trop (la thèse des plaines ukrainiennes est contestée, etc.).

    Tout ce qui est dit dans cet article de SLP ne te contredit pas plus que tu ne te contredis toi-même quand tu parles d’un côté d’une différenciation précoce du proto-gascon et de l’autre d’archaïsmes latins dans le vocabulaire (un esprit simpliste pourrait à ce moment-là te répondre : ton roman proto-gascon, il se différencie plus vite ou moins vite du latin de Cicéron alors ?).

    Ce n’est pas contradictoire, c’est juste la complexité de la naissance des langues en lien avec l’économie politique.

    Le latin on l’a dit est né en Italie centrale. Il s’importe au-delà des Alpes avec l’impérialisme romain. Politico-économiquement, Rome établit sa tête de pont entre Provence occidentale et Languedoc maritime oriental, à côté de son alliée Marseille et de ses comptoirs qu’elle est venue secourir : la Provincia.

    C’est donc de là que le latin se diffuse dans TOUT ce qu’on appelle la Gaule transalpine (la cisalpine c’est la Plaine du Pô). Il se diffuse d’abord par adoption par les élites (il est probable que même avant la guerre de César, le bilinguisme était de bon ton chez nombre d’élites gauloises jusqu’à la Loire et la hauteur de Vesoul..), puis par « pénétration » progressive dans les masses.

    À PARTIR DE LÀ (surtout) vont forcément jouer les influences de substrat dans la différenciation du latin populaire « de tous les jours » par rapport au latin littéraire classique. Ça et aussi l’importance de la colonisation de peuplement. Rome envoie des Italiens centraux s’installer sur des terres qu’elle leur offre, mais évidemment, ils préfèrent les climats auxquels ils sont habitués, méditerranéens. Donc le pourtour méditerranéen et la vallée du Rhône jusqu’à la rigueur Vienne, terres qui "ressemblaient plus à l'Italie que toute autre province", dixit Pline l'Ancien. Ailleurs, ceux qu’on appelle gallo- (ou aquitano-) romains sont surtout des membres romanisés des élites autochtones.

    Le substrat en Provincia, à la base il est celte ou ligure, éventuellement ibère à partir des environs de Narbonne jusqu’aux Pyrénées, ou encore grec (Marseille et ses annexes) ; mais surtout, on a une romanisation des élites qui commence en 120 avant JC (conquête du reste de la Gaule par César : 50 av. JC et encore de la pacification plusieurs décennies ensuite), et une colonisation de peuplement bien plus importante qu’ailleurs (on peut peut-être même envisager, sans toutefois de preuve irréfutable, que l'élément autochtone et grec ait été totalement absorbé par la masse considérable de colons romains et que, peut-être dès le 2e voire 1er siècle de notre ère, on n'y parlait plus le moindre gaulois, ligure, grec, ibère ou quoi que ce soit d'autre que latin).

    Telle est la « tête de pont » de Rome en Gaule. En Aquitaine, on a pas des masses de gens qui viennent du Latium pour peupler, la romanisation c’est d’abord l’adoption du latin par les autochtones qui sont un peu des Basques. Forcément, la « fusion » du latin avec les masses locales va déboucher sur un latin populaire aux traits particularistes marqués. Peut-être encore plus marqués dans le réellement parlé qu’à l’écrit, sans parler des larges masses rurales ou montagnardes qui de toute façon ne parlent pas latin mais toujours aquitain, encore longtemps après la fin de l’Empire.

    Par la suite, alors que ce qu’on parle en Italie centrale même n’est plus le latin de Cicéron, ce qu’on parle du côté de Marseille-Arles-Nîmes l’est encore moins ; tout simplement parce que les langues ne sont jamais immuables. C’est désormais du roman de Provincia.

    Et parallèlement la latinisation se poursuit en Novempopulanie, dans une mouvement de « fusion » avec des masses de langue aquitaine qui donne AUTOMATIQUEMENT une langue plus différente du latin classique que celle qu’on parle en Provincia ou en Italie, sans que ça n’exclue comme tu l’as dit des archaïsmes latins (emploi de racines latines que les gens d’Arles ou de Rome n’utilisent plus), etc.

    Il va alors se passer qu’un linguiste « tâtillon » qui va regarder des textes en latin vulgaire (admettons qu’il y en ait) de la MÊME époque, disons vers 600 après JC, va éventuellement pouvoir dire que la tablette arlésienne « c’est encore dans les grandes lignes du latin » mais par contre, et à fortiori si c’est ce qu’il a envie à la base d'y déceler, que la tablette novempopulanienne présente des déformations « marquées » qui en font « presque du proto-gascon ».

    En attendant, si la Novempopulanie échappe sans doute moins que quiconque au nord des Pyrénées (hormis la Septimanie) à l’orbite économique de l’Espagne wisigothe de Tolède ; IL N’EN RESTE PAS MOINS que Rome qui ne s’est pas faite n’a pas non plus disparu en un jour et reste le grand Centre économique de la Méditerranée occidentale ; en tout cas l’Italie, sans compter que Byzance y a repris pied ainsi qu’en Espagne du Sud et Afrique du Nord (sans probablement y imposer le grec : en tant que provinces byzantines la langue restait latine vulgaire, mais elles faisaient interface économique avec le grand Centre de l'Empire d'Orient) ; et que la « tête de pont » de tout cela en Gaule du Sud restait les ports de Marseille, Arles, Maguelone puis Melguèlh (avant Montpellier qui n'apparaîtra que plus tard), Narbonne etc. (en alternance en fonction des éventuelles attaques qui les ruinent pour quelques décennies).

    [Mais c'est vrai qu'à la limite, si on voulait donner une explication rapide à cette divergence que tu affirmes précoce du roman gascon et pyrénéen, on pourrait évoquer tout simplement un tropisme économique majoritairement en direction de la Péninsule ibérique et non vers l'Italie comme dans la vallée du Rhône et plus à l'Est, ou "partagé" entre les deux comme en Septimanie - si on parle des 6e et 7e siècles ; et ensuite, bien qu'il serait totalement absurde de prétendre une "fin" de toute économie transpyrénéenne lorsque la Péninsule - et même pendant une quarantaine d'années la Septimanie - devient musulmane, une tendance plus marquée au "vase clos" aquitain. L'important c'est que le raisonnement soit toujours guidé par l'économie politique et non que les choses semblent résulter d'une "magie" inexplicable.]

    À LA RIGUEUR un truc que personne n’a évoqué jusque-là mais qu’on pourrait creuser, comme venant « parasiter » le processus, c’est l’épisode de la Vasconie. C’est-à-dire des BASQUES qui vont établir leur pouvoir politique sur la Novempopulanie ; des Basques parlant (donc) la langue des paysans et non des élites urbaines… peut-être dans une forme de lutte des classes, une présence permise par un éventuel accueil en libérateurs de la part de ces paysans, contre leurs ponctionneurs urbains romanisés (les Wisigoths, eux, avaient globalement respecté les élites romanisées). Mais là ça irait plutôt dans le sens d’un « retardement » de l’acquisition de la langue romane, en tout cas par les masses paysannes. Un « retardement » qui, cela dit, pourrait aussi expliquer que quand la romanisation reprend et qu’on commence (époque carolingienne) à voir se multiplier les textes* en latin vulgaire déjà roman, on trouve en Gascogne un roman assez nettement divergent de celui du reste de la Gaule méridionale."

    [* "On a très peu de textes (tendance à écrire en latin ou dans une koinè romane) et évidemment aucun enregistrement des gens en train de parler à l'époque haut-médiévale. Raison pour laquelle les estimations citées dans ton document divergent entre elles de plus... que les 2 ou 3 siècles d'antériorité à l'occitan 'central' que tu prêtes au proto-gascon. Et tout cela encore une fois passe à côté du facteur essentiel qui est QUI parlait ces diverses langues romanes en voie de différenciation régionale du latin ; autrement dit la question de L'ACQUISITION DE MASSE de ces langues... Qui forcément va encore jouer un peu plus sur leur différenciation. Mais qui va aussi, en général, intervenir nettement plus tard que d'éventuelles 'traces' attestant l'usage d'un roman nettement différencié du latin par des élites urbaines, propriétaires terriennes, marchandes, intellectuelles etc."]

    DEUX POINTS, donc, au terme de tous ces échanges :

    - Si l'on part de l'idée que naissance d'une langue romane = séparation, différenciation de celle-ci du latin... il serait en effet tout à fait possible de dire, d'un point de vue linguistique, que les dialectes d'òc sont nés en périphérie de l'aire occitane, et non "diffusés à partir d'un centre" qui serait la Provincia entre Narbonne, Orange et Marseille. Car en effet, ce qui caractérise l'òc en général et sa plus grande "pureté" centrale en particulier c'est d'être moins différentmoins séparé du latin originel que les langues du Bassin parisien. Donc en fait, le premier "centre de diffusion" qu'a été cette région dans son rôle de Centre tributaire économique, c'est d'abord celui du latin... qui en se répandant vers les périphéries de l'aire (et même, disons-le, vers le Nord, l'aire d'oïl... car si l'on regarde par exemple le roman des Serments de Strasbourg en 842, langue noble - s'agissant de rois et de leurs guerriers - à l'époque, c'est tout de même encore très "occitanisant" voire "italianisant", montrant bien d'où vient la genèse linguistique via l'élite... à moins qu'il ne s'agisse - cf. carte plus bas - de la langue de terres situées plus au sud) ; et en y "pénétrant" les masses populaires avec leurs langues antérieures non-latines, a forcément commencé à "diverger" du latin "pur", plus à chaque instant t que l'on pourrait considérer (disons : 200 ou 300 après Jésus-Christ, puis 500, puis 800 etc.) que la langue parlée dans la Provincia ; pouvant donc donner cette vision, apparemment contradictoire avec notre propos, que les langues romanes "naissent" = se distinguent du latin à la périphérie de la Gaule (entre substrat gaulois, ligure, aquitain etc. autochtone et apports extérieurs germaniques, vascon...) et que si la Provincia d'Arles, Nîmes etc. est un centre, d'un point de vue linguistique, c'est plutôt de résistance à l'évolution à partir du latin d'origine. Tout en (quand même) évoluant aussi, bien sûr, soit par innovations endogènes, soit par importation des innovations du latin d'Italie... Mais même passé ainsi à "autre chose" que du latin (en abandonnant le système de déclinaisons par exemple), il pourra toujours être perçu par les archéo-linguistes comme plus "conservateur", moins "détaché" de la souche latine que les dialectes des périphéries nord-occitane, alpine ou gasconne-pyrénéenne, sans parler des langues arpitanes et bien sûr d'oïl (qui avec les royaumes francs ou de Bourgogne, leurs capitales politiques et métropoles religieuses comme Orléans, Tours, Reims ou Lyon, commencent entre le 7e et le 10e siècle à développer leurs "centres de production" linguistique autonomes).

    - Si nous avons défini le pourtour méditerranéen et la basse vallée du Rhône comme Centre économique et (du coup) centre culturel et de formation linguistique de l'actuelle aire occitane, pour ne pas dire dans une certaine mesure de toute la Gaule, cela ne veut évidemment pas dire que c'est un mouvement absolument à sens unique. C'est plutôt comme une sorte d'épicentre produisant des vagues (à commencer par la toute première, celle du latin, après la conquête et la forte latinisation de la région) qui vont "mourir" sur les rivages alentours (perte de la "pureté" latine), puis refluent... et reviennent, en permanence. Si ce Centre, d'ailleurs, est d'abord défini de manière économique, il est bien évident que les flux économiques sont à double sens, qu'il y a un mouvement permanent de va-et-vient. Si bien que si des innovations peuvent naître au Centre (ou y être importées d'Italie) et ensuite être diffusées vers les périphéries, d'autres peuvent très bien être un produit de ces dernières, "ramenées" par un mouvement de reflux vers le Centre et "validées" au fil du temps par lui. C'est d'ailleurs, ici, un point sur lequel il ne faut jamais perdre de vue le caractère de classe de la langue et de sa formation. Au cœur de la Provincia, il est probable que dès le 1er ou 2e siècle un latin plus ou moins vulgaire est la langue généralisée, du plébéien voire de l'esclave jusqu'au grand propriétaire de villa, sans que plus personne ne parle de langue pré-latine ; mais ailleurs c'est la langue des élites, des lettrés, qui ne va que lentement s'imposer à l'usage populaire. En le faisant, elle va généralement produire des innovations, des "déviations" importantes par rapport à la norme classique qui seront considérées comme de l'argot, ou un "créole" et refusées par les tenants de la "bonne" langue, non-validées par le Centre... dans un premier temps, mais finissant parfois au fil du temps par l'être. Ou parfois, ce seront au contraire les élites latinistes des périphéries qui vont se montrer conservatrices et refuser des innovations apparues dans le Centre (qui "brasse" avec ses ports, ouvert sur la Méditerranée etc.). Les villes, sièges des lettrés, sont en principe celles qui diffusent le latin (puis le "beau" roman) vers les campagnes... Sauf que les campagnes ont aussi une tendance au mouvement migratoire vers les villes, qu'elles vont peupler dans les période de croissance urbaine (Renaissance carolingienne, Renaissance des 11e-12e siècles) en y apportant leur roman "rustique", populaire, paysan, qui va finir par y faire partie du paysage (c'est ainsi que Bordeaux s'est retrouvée linguistiquement dans l'aire gasconne : par peuplement rural, et non - selon toute vraisemblance - d'origine...). 

    C'est un processus complexe. Ce qu'il faut retenir, c'est néanmoins que toutes les aires linguistiques où que ce soit dans le monde sont le résultat d'un tel rapport d'"import-export" permanent, économique et culturel, entre un Centre et des périphéries (jusqu'à être tellement périphérique... que l'on passe dans l'orbite d'un autre Centre) ; et que la Provincia romaine, une sorte de triangle Narbonne-Orange-Marseille, a été ce Centre pour l'actuelle aire occitane, et même à vrai dire pour toute la Gaule, mais ensuite les langues très différenciées de la souche latine apparues loin de lui ont commencé à se développer et se systématiser autour de leurs propres Centres autonomes (métropoles mérovingiennes puis carolingiennes - Reims, Soissons, Orléans etc. et petit à petit et de plus en plus Paris, puis la Champagne et ses foires etc., Lyon en "Burgondie" matrice de l'Arpitanie etc. etc.).

    Il ne s'agissait en tout cas pas de dire, comme ont pu l'entendre certaines personnes, que l'occitan languedo-provençal ou le rhodanien seraient "nés" dans l'ancienne Provincia, se seraient constitués tels (ou presque) qu'ils sont aujourd'hui, puis auraient "engendré" les autres dialectes d'òc. Non, ce qui a engendré ces dialectes (ou leurs ancêtres immédiats, leurs "proto"-versions) n'était pas, à l'époque en question, du languedocien ou du provençal ou du rhodanien d'aujourd'hui : c'était tout d'abord, sous l'Empire romain, du latin (plus ou moins vulgaire), puis du "roman de Provincia" déjà différencié de lui (ayant, par exemple, abandonné le système de déclinaisons) mais pas encore, loin de là, du languedocien ou du provençal actuel ; et il n'a de toute façon, on l'a dit, pas "engendré" ces dialectes de manière unilatérale mais il s'est développé (vers la langue actuelle) en même temps qu'ils se développaient (vers le gascon, limousin, auvergnat, alpin actuels) jusqu'à l'apogée culturel précédant immédiatement la conquête (13e siècle), dans un échange dialectique permanent avec eux au sein de cette aire économique tributaire dont il était le Centre et eux les périphéries. En apparaissant effectivement à chaque instant t des deux derniers millénaire, si l'on raisonne en termes de "radicalité" de la séparation avec le latin, moins "radicalement" séparé de lui qu'eux, qui seraient donc "nés comme langues" avant lui.

    Voici une carte qui, peut-être, pourrait exprimer de façon "visuelle" ce que nous cherchons à expliquer :

    [Légende nécessaire pour comprendre :

    Serments de Strasbourg (842) où Louis le Germanique s'adresse aux soldats de son frère Charles le Chauve (enfin, peut-on imaginer, des guerriers féaux - futurs chevaliers, seigneurs féodaux - relativement nobles), et ceux-ci lui répondent, dans leur langue courante... qui, à la lecture et bien qu'on ne sache rien de sa prononciation, "sonne" franchement peu d'oïl. De fait : "en 839, à l'assemblée de Worms, Louis le Pieux (son père) lui donne une partie de la Francie occidentale comprise entre la Meuse et la Seine, l'ouest et le sud de la Bourgogne, la Provence, la Neustrie, la marche de Bretagne, le royaume d'Aquitaine, la Gascogne et la Septimanie" => potentiellement, les guerriers de Charles le Chauve pouvaient venir de tous ces territoires... La liste est longue !

    - Séquence de Sainte Eulalie rédigée vers 880 dans la région de Valenciennes et "sonnant" nettement plus d'oïl (sans que, dans un intervalle de 40 ans, la langue des Serments ait pu à ce point évoluer si elle était celle de cette région) ; dans un contexte où plusieurs synodes se sont réunis pour traiter de la langue du culte chrétien et en ont conclu de demander aux prêtres de s'adresser aux fidèles en langue germanique là où celle-ci domine ; en latin, mais un latin plus simple dans les futurs pays de langue d'òc (synode d'Arles) et en Burgondie (synode de Chalon-sur-Saône) ; et enfin (synodes de Reims et Tours) dans la "langue particulière", la "langue romane rustique" (rusticam romanam linguam) locale, au nord de la Loire.

    - Ligne Von Wartburg

    - Le concept de médioroman/Médioromanie, développé par le géographe auvergnat Pierre Bonnaud, rejoint largement l'idée de la "bande intermédiaire" présentée sur la carte, et qui était très vraisemblablement la langue des Serments.

    Bonnaud est anti-occitaniste ("auvergniste"), mais cela ne rend pas pour autant ses thèses totalement ineptes : simplement, il refuse peut-être d'aller au bout de ses propres conclusions. De fait, si l'on compare les 3 cartes, on ne peut que constater qu'il y a bien une poussée languedocienne au sud de l'aire médioromane, qui rejoint totalement notre carte. Une poussée qui d'ailleurs, tiens tiens, entre 500 et 1000 va plutôt affecter la Lozère et l'Ardèche... Pas très loin de Nîmes et Arles, tout ça ! À partir de la "corne" de l'Aveyron, le "front" reste plutôt stable à cette époque. Par contre, entre 1000 et 1500 (on va dire que dire maintenant c'est dire 1500), la poussée affecte plutôt la Dordogne, le Lot, l'Aveyron et jusqu'au Cantal. Pas très loin de Toulouse... dont on connaît l'importance comme Centre occitan entre le 11e et le 13e siècle. Ce qui ne lui traverse pas (à ce stade) l'esprit, c'est que cette poussée depuis les grands Centres languedociens, poussée languedocienne au sens que c'est ce dialecte qui s'impose, s'accompagne AUSSI d'une occitanisation de ce qui reste non-languedocien... Raison pour laquelle on classe aujourd'hui l'auvergnat et le limousin dans les langues d'òc, sauf à considérer que tous les linguistes autres que lui sont des cons... ou des stipendiés d'on ne sait quelle "puissance occitane" occulte. De son côté, l'arpitan reste l'arpitan autour de Lyon (en reculant tout de même fortement au nord, comme tout le médioroman), et la façade atlantique subit à partir de 1150 environ une déferlante d'oïl depuis les centres d'abord d'Angers-Tours (Plantagenêt) puis bien sûr de Paris, qui pousse aussi au nord du Limousin et de l'Auvergne mais les fières montagnes résistent.]

    Et puis de toute façon, nous nous sommes engagés là sur le terrain d'un débat linguistique de haut niveau ; mais nous avons eu l'occasion de dire et répéter sur ce site que la question fondamentale pour nous ne se situait pas sur ce terrain-là, où l'obsession pour fixer des "frontières" linguistiques (qui sont en réalité tout sauf nettes entre langue d'òc et arpitan ou oïl du Berry ou de Charente par exemple, ou même entre gascon et languedocien, sur quelque critère qu'on prenne) ou encore déterminer ce qui est une langue ou un dialecte régional, tourne parfois au ridicule. Pas plus, bien évidemment, que sur celui d'une "pureté" de la langue latine amenée par les conquérants romains ; dont la Bretagne et l'Alsace par exemple, loin d'être les "gardiennes", ont été au contraire le théâtre de la disparition ; et le Pays Basque carrément de la jamais-apparition ; sans moins mériter pour autant d'être défendus dans leur lutte contre le centralisme parisien ! La lutte contre le centralisme parisien, précisément, voilà la question qui est pour nous fondamentale au service de la révolution populaire dans l’État français ; et c'est pour cette raison que nous sommes d'abord allés sur le terrain de l'économie politique afin de montrer, dans un raisonnement "aminien", la genèse historique d'un Pays d'Òc à la fois uni et divers ("unidiversité") comme "bassin versant" d'un Centre tributaire (comme toute nation ou en tout cas ensemble linguistique d'intercompréhension)... à mettre en perspective avec (dans nos autres articles sur la question depuis des années, voir liens ci-dessus) sa SOUMISSION politique et économique au Nord parisien (13e-17e siècles en laissant de côté Nice et les Alpes maritimes) ; soumission FONDATRICE de l’État et du Système "France" que nous connaissons et combattons, en parallèle avec le "glissement" du Centre de gravité économique de l'Europe vers le Nord-Ouest qu'Amin (toujours) associe indissociablement avec l'émergence du capitalisme proprement dit et de la Modernité.


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  • Communiqué du CRI ROUGE


    DÉCLARATION À L’OPINION NATIONALE ET INTERNATIONALE


    Nous venons d’apprendre que Théo EL GHOZZI – un camarade de la CARA (Collectif Antifasciste Révolutionnaire d’Auvergne) de Clermont-Ferrand – vient de décider d’entamer une grève de la faim pour protester contre le contrôle judiciaire qui lui a été imposé par l’État français après son arrestation du 23 juin 2016 et qui lui interdit tout accès au centre-ville de Clermont-Ferrand (voir carte ci-dessous signalant le périmètre interdit), ville où il réside, travaille et milite.

    Comme il le signale lui-même dans son communiqué, « plus qu'une interdiction de manifester, c'est quasiment une assignation à résidence. Je vis à Clermont-Ferrand, mais je ne peux pas y circuler. Impossible de faire des démarches administratives, de prendre les transports en commun sans faire des détours impossibles (je n'ai pas le permis), de travailler (je suis intérimaire, et je suis souvent de passage dans le centre-ville pour me rendre au travail)... De plus, je dois pointer une fois par semaine au commissariat de Clermont-Ferrand, je ne peux donc pas déménager vers une autre ville ! ».

    Pour revendiquer son droit à la liberté de circulation, de manifester et plus largement de vivre librement jusqu’au 13 décembre, notre camarade commencera donc mardi prochain après-midi, le 28 juin 2016, sa grève de la faim.

    Nous exprimons ici notre entière solidarité avec ce camarade et nous appelons tous ceux qui s’inscrivent dans cette solidarité à signer l’appel suivant pour exiger le retrait de ce contrôle judiciaire inique et la réhabilitation de ce militant dans son droit le plus élémentaire de circuler librement, de vivre, de travailler et de militer dans la ville où il réside.


    NON À LA CRIMINALISATION DES MILITANTS ET DES LUTTES ! 

    LIBERTÉ DE CIRCULER ET DE MANIFESTER POUR NOTRE CAMARADE !

    À BAS LA RÉPRESSION DE L’ÉTAT RÉACTIONNAIRE FRANÇAIS !

    SOUTENONS LE COMBAT DE NOTRE CAMARADE !

    OSONS LUTTER ! OSONS VAINCRE !

    Paris, le 26 juin 2016

    Le CRI Rouge pour la défense des prisonniers politiques révolutionnaires

    Signataires : Comité d’action et de soutien aux luttes du peuple Marocain – Comité de défense des luttes du peuple Tunisiens - Cellule Antifasciste Révolutionnaire d'Auvergne – Plateforme des prisonniers politiques de Turquie et du Kurdistan
     

    Un militant révolutionnaire occitan (auvergnat) en grève de la faim contre une assignation à résidence de faitUn militant révolutionnaire occitan (auvergnat) en grève de la faim contre une assignation à résidence de fait

    Un militant révolutionnaire occitan (auvergnat) en grève de la faim contre une assignation à résidence de fait


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  • Avec le soutien (entre autres) de Coup pour Coup 31, de Libertat et de Breizhistance :

    Ce samedi à Tolosa

    https://www.facebook.com/events/224111671299404/

     


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  • https://www.facebook.com/libertepourantoine/?fref=ts


    Et puis un autre Antoine est lui aussi emprisonné pour ses activités de lutte, dans le Nord cette fois-ci ; et a lui aussi besoin de toute notre solidarité... Liberté pour LES AntoineS donc !!!

    Solidarité avec Antoine, prisonnier POLITIQUE syndicaliste et antifasciste

    https://www.facebook.com/Libérez-Antoine-434191323439614/

     


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  • Eh oui... s'improviser historien n'est pas donné à tout le monde !

    En meeting de campagne aux côtés de Marion Maréchal (nous-voilà...), le maire FN de Béziers Robert Ménard nous ressort la vieille-comme-l'extrême-droite antienne de "Charles Martel" :
    http://www.marianne.net/epaulee-robert-menard-marion-marechal-pen-part-croisade-100238372.html

    Mais il se trouve (malheureusement pour lui...) que le chef de guerre franc, dont le "QG" était d'ailleurs plutôt dans l'actuelle Wallonie, a en réalité (à l'époque) dévasté la ville, sa région (Agde, Nîmes etc.) et globalement tout ce qui deviendra l'Occitanie, en bon préfigurateur de la Conquista cinq siècle plus tard - qui n'était elle-même que l'aboutissement d'une longue convoitise des souverains du Bassin parisien sur les riches Aquitania et Provincia, qui deviendront l'Occitanie et sa région particulière la Provence. La lutte contre les "Sarrasins" (Arabes, Berbères et Ibéro-Romains convertis à l'islam, venus de la péninsule ibérique), qui ne représenteront un réel "problème" que durant quelques décennies entre 720 et 760 (lorsqu'ils occupaient la "Septimanie" soit grosso modo les Pyrénées-Orientales, l'Aude côtière et l'Hérault), n'étant clairement qu'un prétexte conjoncturel comme le seront plus tard les "Albigeois" ("hérétiques" cathares, qui pourraient même selon certains travaux récents... ne pas avoir existé du tout) - les souverains locaux et les élites urbaines, d'ailleurs, préféraient souvent s'allier aux musulmans que d'entendre parler de l'ennemi héréditaire du Nord...

    Voici un article d'un (vrai, lui) passionné d'histoire qui remet les points sur les i :

    La véritable histoire de Charles Martel : celle que Ménard et Jean-Marie Le Pen ignorent


    Par 
    Écrivain


     

    Une gravure de la bataille de Poitiers, le 10 octobre 732 (MARY EVANS/SIPA)


    Depuis le fameux 11 janvier, dont la droite voudrait faire une "Journée d’unité nationale et de lutte contre le terrorisme", le nom de Charles Martel, "sauveur de la chrétienté", est venu, dans bien de réseaux liés à l’extrême-droite, se rappeler au bon souvenir non pas de la France "pays des droits de l’homme", mais de la France "fille aînée de l’Église".

    Comme si la théorie du "choc des cultures" s’était muée en celle d’une "guerre de religions", ce que Jean-Marie Le Pen, toujours aussi lourdement calembourdesque, a résumé d’un cri : "Je suis Charlie Martel !"

    C’est précisément dans cette mouvance lepéniste que Robert Ménard a lancé sa énième provocation, en commençant par criminaliser les petits écoliers biterrois sur la seule base de la "consonance musulmane" de leurs prénoms ! Dans ma tribune, publiée sur Le Plus de l'Obs le 12 mai ("Robert Ménard, changez vitre de patronyme"), j’ai dit ce que je pensais de ce forfait antirépublicain. Cela m’a valu nombre d’incriminations avec, à l’appui, des arguments puisés dans les pages d’un Deutsch métronome promu rewriter du roman national. Comme tant d’autres thèses scolaires, celle de notre auteur-baladin illustre brillamment cette leçon de Marc Bloch (dans son "Apologie pour l’Histoire") :

    "Aussi bien que des individus, il a existé des époques mythomanes […] C’est d’un bout à l’autre de l’Europe, comme une vaste symphonie de fraudes. Le Moyen Âge, surtout du VIIIe au XIIe siècle, présente un autre exemple de cette épidémie collective… Comme si, à force de vénérer le passé, on était naturellement conduit à l’inventer."


    Charles Martel, "dilapidateur et enragé tyran"

    C’est pour répondre à ces nostalgiques orphelins de Charles Martel, comme à notre "rapporteur-sans-frontières" des thèses d’extrême droite, que je tiens à fournir, ici, quelques éléments d’information sur la véritable nature du "tombeur des Sarrasins", et, par la même occasion, sur l’histoire de Béziers (ville dont Robert Ménard a chargé Renaud Camus, le théoricien du Grand Remplacement, d’écrire l’histoire)…

    Pour en finir, donc, avec cette légende qui fait de Charles Martel le "sauveur de la chrétienté", précisons d’emblée que le chef franc, connu de son vivant comme le plus grand "spoliateur des biens de l’Église", n’a jamais bouté les Arabes hors de "France" pour trois raisons : primo, ce pays n’existait pas encore en tant que tel ; secundo, c’est son fils qui réussira à reprendre Narbonne, trois décennies après la mythique bataille ; tertio, la présence sarrasine est attestée dans les Alpes et dans le Jura au moins jusqu’au Xe siècle.

    Tout comme la légende du "Marteau de Dieu", celle du "spoliateur des biens de l’Église" aura, en son temps, la peau dure. De Liège (ou plutôt, la ville n’existant pas encore, de Tongres-Maastricht, ancien fief du père de Charles, Pépin d’Herstal, et dont l’évêque, saint Lambert, fut assassiné sur ordre de l’oncle maternel de Charles) à Nîmes, en passant par Toulouse et Narbonne, l’homme est dénoncé comme aucun grand de ses contemporains ne l’aura été : "Ô Charles Martel, dilapidateur et enragé tyran !", s’écriera Jean Boldo d’Albenas, l’un des pères du protestantisme nîmois [1]. Sans doute cet auteur a-t-il des raisons de fustiger le Franc, qui avait ruiné sa ville (Nîmes) avant d’y mettre le feu : c’était en 739, alors que Charles Martel remontait de Narbonne, tout dépité de n’avoir pas réussi à en déloger les Sarrasins, malgré un long siège éprouvant…

    Plus cohérente est la thèse de Nicolas Germain Léonard, historien de la ville de Liège, qui nous explique en quoi et pourquoi Martel méritait une telle charge : "Il donnait à ses officiers les évêchés et les abbayes. Les biens de l’Église devenaient héréditaires ; on en formait la dot des filles qu’on mariait. Pépin d’Herstal avait enrichi le clergé, Charles le dépouilla." [2]

    Évidemment, après la victoire de Poitiers, la cause est entendue : les biens de l’Église furent "l'instrument de la délivrance de l'Europe, et de la victoire de l'Évangile sur le Coran" ! [3]. Mais que durant toute l’existence de Martel (688-741), à Limoges, Cahors, Auch, Saint-Lizier, Autun, Orange, Avignon, Carpentras, Marseille, Toulon, Aix, Antibes, Béziers, Nîmes, Lodève, Uzès, Agde, Maguelone, Carcassonne, Elne, il y eut une interruption dans la succession des évêques ; voilà qui en dit long sur l’état d’abandon de la "Fille aînée de l’Église" !


    Désordres, ruines, assassinats 

    D’autres griefs ternissent la renommée de Charles. Ceux, notamment, qui font de lui le persécuteur d’Eucher, l’évêque d’Orléans, et de Guidon, le futur saint Guy. Abbé de Fontenelle, ce dernier subit le supplice suprême pour une imaginaire conspiration… Désordres, ruines, assassinats : des forfaits qui poursuivront le chef franc jusqu’à sa mort.

    Mais c’est le sort réservé à l’évêque d’Orléans, le futur saint Eucher, qui assombrira le plus sa renommée. Accusé d’avoir comploté contre Martel, l’évêque "fut envoyé en exil avec tous ses proches, (puis) transféré dans le monastère de Saint-Tron où il mourra en 738" [4]. Conclusion de Flodobert, l’évêque de Noyon et de Tournai (894-966) : "Ce bâtard né d'une servante n'était audacieux qu'à faire le mal envers les Églises du Christ."

    De ce martyre de saint Eucher, une légende naîtra plus d’un siècle après, qui sera consignée dans le compte-rendu d’un concile tenu en 858 à Quierzy, où il est fait mention d’un songe d’Eucher.

    Extrait :

    "Nous savons en effet que saint Eucherius, évêque d’Orléans fut entraîné dans le monde des esprits. Entre les choses que Dieu lui montra, il reconnut Karl exposé aux tourments dans le plus profond de l’enfer." Commentaire de Jean Deviosse, biographe de Charles Martel : "Le texte ne laisse place à aucune équivoque. Karl, spoliateur résolu des biens de l’Église, est reconnu coupable à part entière." [5]

    La même justification sera reprise par Jules Michelet, pour qui "les agressions de Karl contre le patrimoine de l’Église faisaient douter qu’il fût chrétien" ! [6]

    Mais, disions-nous, les mythes ont la peau dure. Et après tout, des spoliations, quel envahisseur n’en commet pas ? Du IXe au XIe siècles, la renommée de Charles en souffrira. Étrangement, c’est aux siècles des Croisades que le nom de Martel va retrouver son aura, celle de tombeur des Sarrasin et de… sauveur de la chrétienté : comme si, écrira Chateaubriand, "Les Maures, que Charles Martel extermina, justifiaient les Croisades !" [7].


    Les crimes de Martel dans le Sud (de la France)

    Sur le terrain, la réalité était tout autre. Ce que Charles visait en fait, et depuis longtemps, c’était la conquête de l’Aquitaine (dont la capitale était alors Toulouse et non Bordeaux). Tant que cette région était menacée par les Sarrasins, il s’était contenté d’attendre son heure. Mais en apprenant avec stupéfaction la nouvelle du mariage du gouverneur musulman de Narbonne avec la fille du duc d’Aquitaine, Martel comprit très vite le risque que pouvait représenter une telle alliance. Celle-ci n’arrangeait pas non plus Abd er-Rahman, le maître de Cordoue (l’Espagne arabo-andalouse était déjà minée par les révoltes berbères contre le pouvoir arabe), ce qui l’amena à supprimer le "traître" gouverneur, un Berbère, avant d’offrir la fille du duc au calife de Damas… Si Charles Martel arrêta effectivement les Arabes à Poitiers, il ne réussit donc pas à les déloger de la Narbonnaise, qu’il attaqua par deux fois, sans succès.

    La légende qui colle au nom de Martel doit être revue et corrigée sur un autre point : jamais les Francs n’ont eu de considération pour les habitants du sud de la Gaule. L’homme "gallo-romain", et particulièrement le citoyen de Toulouse, trop raffiné aux yeux du Franc fruste et inculte, était traité d’homunculus.

    Furieux d’avoir échoué par deux fois à Narbonne, Martel va se venger sur les populations locales (chrétiennes) à qui il reproche de ne pas l’avoir accueilli en sauveur. Sur le chemin du retour (vers ses terres du Nord), il se venge sur Agde, Béziers, Maguelone, Nîmes (dont il brûle les arènes !). Selon Ernest Sabatier, notre cher historien de la ville de Béziers :

    "Les Francs pillent à outrance dans tous les lieux où ils portent leurs pas ; ils désarment la population chrétienne, qui, ayant conservé en partie la civilisation romaine, voyait en eux des Barbares, et leur était suspecte. Forcés d’abandonner le siège de Narbonne, et voulant empêcher les Sarrasins de prendre ailleurs dans le pays une position solide, ils rasent les fortifications de Béziers, d’Agde et d’autres cités considérables. Agde et Béziers sont même livrées aux flammes, leurs territoires dévastés, les châteaux sont démolis. Enfin, en s’éloignant, les soldats de Charles-Martel emmènent, outre un grand nombre de prisonniers sarrasins, plusieurs otages choisis parmi les chrétiens du pays." [8]

    Ces dévastations seront toutes mises sur le compte des Sarrasins, comme le sera un demi-siècle plus tard la mort de Roland à Roncevaux (des historiens ont, enfin, démontré que l’attaque fut le fait des Basques et non des Arabes), et comme le seront cinq siècles plus tard d’autres exactions, et là, c’est toujours l’historien de la ville de Béziers qui témoigne : "Plusieurs dépôts ont éprouvé des vicissitudes qui ont rendu assez rares les documents dont j’aurais pu profiter. Les anciennes archives de Béziers furent, elles, consumées par l’incendie qu’y allumèrent les croisés en 1209..." !

    Plusieurs chroniques l’attestent (Continuation de Frédégaire, Isidore de Beja, Chronique de Moissac, El Maqqari [9]) : les cités susceptibles d’être ou de devenir des repaires pour les musulmans sont ravagées. Maguelone est rasée, Montpellier n’est pas épargnée, et encore moins Nîmes :

    "Pour punir la ville qui a fait appel aux Arabes, Charles démolit les portes, abat les murailles et tente d’incendier les Arènes sous prétexte qu’elles sont aménagées en ouvrage défensif. Sur son ordre, ses guerriers entassent toute une forêt dans l’Amphithéâtre et y mettent le feu" [10]


    Un retour du refoulé historique

    Voilà la vraie nature et l’œuvre du héros de tant de générations d’écoliers de France ! Celui-là même dont le nom figura jusqu’à la veille de l’élection présidentielle de 2002, sur une affiche électorale : "732 Martel, 2002 Le Pen". En attendant, sans doute, de figurer sur le fronton de la mairie de Béziers, à l’approche de 2017 ?…

    Mais comment peut-on imaginer que Béziers puisse, aujourd’hui et en connaissance de cause, dire merci à celui qui mit toute la région à feu et à sang ? Et si, au contraire, comme par un retour du refoulé historique, des Biterrois de souche décidaient, un jour, de répondre à Robert Ménard en manifestant en masse, et sous le seul slogan qui vaille et qui soit digne de la mémoire de leurs ancêtres : "Je ne suis pas Charlie Martel !" ?


     [1] Jean Boldo d’Albenas, Discours historial de l’antique et illustre cité de Nîmes, Nota bene : toutes les références, accompagnant cette tribune, se trouvent  détaillées dans mon essai : Abd er-Rahman contre Charles Martel (Perrin, 2010).

     [2] N. G. Léonard, Histoire ecclésiastique et politique de l’État de Liège, 1801.

     [3] François Laurent, Le Moyen-âge et la réforme, 1866.

     [4] Vita sancti Eucherii, Aurelianensis episcopi, n°8 et 10, cité dans Jean Deviosse, Charles Martel, Tallandier 1978. Epistolae patrum synodi Carisiacensis, année 858, cité dans Jean Deviosse, Charles Martel.

     [5]  Cf. J. Deviosse, Charles Martel.

     [6] Michelet, Histoire de France, cité dans S. Guemriche, Abd er-Rahman contre Charles Martel (Perrin 2010).

     [7] Chateaubriand, Génie du christianisme, dans Œuvres complètes, éd. Furne, 1865.

     [8] E. Sabatier, Histoire de la ville et des évêques de Béziers, Paris 1854, cité dans Salah Guemriche, Abd er-Rahman contre Charles Martel (Perrin 2010).

     [9] El Maqqari, manuscrit arabe de la BNF, ancien fonds, réf. dans Abd er-Rahman contre Charles Martel.

     [10] Jean Deviosse, Charles Martel.


    Lire aussi :
    Charles Martel, imposture historique et mythe fasciste (sur Quartiers Libres)


    L'animal aura également invoqué les mânes des Louis XIV, ce qui à quelques kilomètres des Cévennes ne manque pas de sel ; ainsi que de Napoléon, personnage fort apprécié en son temps par la jeunesse locale qu'il envoyait se faire trouer la peau à des milliers de kilomètres de ses foyers... Tout juste nous aura-t-il épargné "Saint" Louis, c'est déjà ça !

    L'on pourrait au moins se prendre à espérer que ceci montre une bonne fois pour toute aux trop (beaucoup trop !) nombreux électeurs occitans votant ou tentés de voter pour le Front National quel parti de franchimands est celui-ci.

    Mais il est vrai, comme nous l'a judicieusement fait remarquer par mail un soi-disant "maoïste", que les gens ne se sentant pas du tout français ne sont pas non plus légion en Occitanie... et c'est peut-être ça le problème, en fait.


    Quand Ménard invoque Charles Martel... l'homme qui a rasé Béziers, "sa" ville


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  • Coup pour Coup 31

    Plus de 200 personnes ont bravé la pluie et le froid ce vendredi 30 janvier à Toulouse pour manifesté contre le racisme, l'islamophobie et l'antisémitisme. À l'appel de plusieurs collectifs et organisations, le cortège a traversé le centre ville et a scandé tout le long des slogans antiracistes et contre l'unité nationale suite aux attentats de Paris début janvier : "Contre le racisme, riposte populaire !", "Toulouse, Toulouse, métisse et populaire !", "Unité nationale, unité du capital !".

    Le collectif anti-impérialiste Coup Pour Coup 31 restera mobilisé contre toutes formes de racisme et de xénophobie.


    200 personnes vendredi à Toulouse contre le racisme, l'islamophobie et l'antisémitisme200 personnes vendredi à Toulouse contre le racisme, l'islamophobie et l'antisémitisme200 personnes vendredi à Toulouse contre le racisme, l'islamophobie et l'antisémitisme200 personnes vendredi à Toulouse contre le racisme, l'islamophobie et l'antisémitisme200 personnes vendredi à Toulouse contre le racisme, l'islamophobie et l'antisémitisme


    À lire aussi, la dernière déclaration de l'OCML-VP que nous partageons totalement :

    Leur unité nationale c’est l’unité du capital : construisons notre unité populaire !

    L’émotion retombe après les tueries de Charlie Hebdo et de l’épicerie casher.

    Rares sont celles et ceux qui ont osé dire qu’ils ne défileraient pas derrière Hollande, Sarkozy et Valls, derrière les représentants des gouvernements russe, israélien ou gabonais… pour une union nationale, une démocratie et une liberté qui n’est pas la leur.

    Depuis les attentats, le racisme se renforce autour de nous dans des raccourcis imbéciles du type “immigré = arabe = musulman = terroriste”. Valls et Hollande mettent en place un nouveau degré dans la surveillance et la chasse, les condamnations lourdes pleuvent sur les prolos, les ados, on arrête un enfant de 8 ans, mais Tesson, Zemmour et Houellebecq peuvent continuer à sortir tranquillement leurs horreurs sur tous les médias…

    Hollande vient de lever le masque, après l’échec de la dite négociation sur le dialogue social : il faut arriver à un accord au nom de l’unité nationale. On va faire passer la loi Macron sur le même thème, les restrictions du droit des étrangers au nom de la lutte contre le terrorisme, bref la manipulation et la récupération sont claires. Il s’agit d’utiliser la période pour faire passer, sous couvert de la peur et de l’émotion, une nouvelle vague de mesures anti-ouvrières et anti-populaires…

    L’heure n’est pas à la résignation et à la peur. L’heure est à la résistance, collective, à sortir du repli individuel qui paralyse notre camp. Beaucoup ouvrent les yeux, quelques semaines après les massacres. L’heure n’est pas à l’union nationale, mais à l’unité populaire contre ceux qui ferment les usines, pourchassent les immigrés, quadrillent les quartiers et font la guerre au Proche Orient ou en Afrique pour préserver leurs intérêts.

    Nous refusons qu’ils parlent en notre nom ! Nous refusons l’union nationale qui nous enchaîne à nos exploiteurs ! Nous sommes révolutionnaires, nous voulons en finir avec le capitalisme !

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    ... mais bientôt en rejaillira le Soleil d'un monde NOUVEAU, le Soleil de la Libération révolutionnaire des Peuples et de son bras implacable de Justice qui s'abattra sur le Capital et ses milices d'assassins !

    Que résonne d'una montanha a l'autra notre Hymne révolutionnaire de Libération :



    (Paroles)


    Tu es mort sur la route qui mène au communisme, tué par le Capital et ses chiens de garde "socialistes"...

    Onor a tu per totjorn companh !


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  • ZAD-Testet 8973Depuis quelques mois c'est un nouveau Notre-Dame-des-Landes qui a pris ses quartiers en terre occitane : le barrage de Sivens devrait en effet recouvrir quelques 48 hectares de la zone humide remarquable du Testet (pourtant classée en 2011) et de terres agricoles près de Gaillac dans le Tarn, à 60 km de Toulouse ; une région sur laquelle pèse déjà la lourde épée de Damoclès des gaz de schiste.

    Déjà des centaines, peut-être un millier de personnes ont convergé sur le site qu'elles ont proclamé "ZAD", zone à défendre.

    Cette retenue (projet qui remonterait à 25 voire 40 ans selon les sources) n'a pas pour vocation de produire de l'énergie, mais de permettre l'irrigation des exploitations agricoles alentour. La petite rivière (le Tescou) qui arrose le secteur serait en effet souvent à sec... Pourtant, il ressort d'une étude un peu plus approfondie que la capacité du barrage, de l'ordre d'un million et demi de mètres cube, est nettement surdimensionnée par rapport aux besoins réels des agriculteurs, dont les fermes ayant besoin d'eau sont en réalité peu nombreuses selon le porte-parole du collectif anti-barrage, Ben Lefetey. De fait, lorsque l'on voit l'empressement de la FDSEA à soutenir le projet, on comprend immédiatement que ce n'est pas n'importe quelle agriculture qui a besoin d'un tel réservoir mais bien l'agriculture PRODUCTIVISTE, celle qu'incarne typiquement ce syndicat agricole (il suffit de voir le CV de son président...), qui court après les subventions étatiques et européennes et qui, par cette même logique productiviste et absence de concertation (entre entrepreneurs concurrents, forcément)... assèche elle-même le Tescou par ses pompages estivaux !  [Voir ici la position opposée de la Confédération paysanne, qui "calmera" les habituelles tirades des petits réacs de tout poil sur "les pauvres paysans qui triment dur" face aux "sales bobos étudiants crasseux qui veulent même pas qu'ils aient de l'eau"...]

    Barrage de Sivens (Tarn), la ZAD occitaneLe Conseil général des caciques locaux (à majorité PS...) soutient évidemment la Fédération - véritable État dans l’État dans les territoires ruraux - et pense évidemment aux juteux marchés publics qui graisseront la patte des copains entrepreneurs du BTP. Tant pis pour les "cocus" (adhérents FDSEA et/ou électeurs PS ou pas) dont les terres se retrouveront noyées, aux côtés - on l'a dit - de l'une des dernières zones naturelles de biodiversité de la région (voir ici une vidéo montrant que le soutien au barrage est loin d'être unanime dans la paysannerie locale ; ou encore cet article). 

    Nous avons là l'illustration parfaite d'un capitalisme (en l'occurrence agraire, mais ce pourrait être n'importe quel secteur de production) qui, comme nous le disons et le répétons depuis des années, est depuis l'origine une pure machine à dégager du profit mais s'affirme de plus en plus comme tel jour après jour, se moquant tant des territoires et de leurs équilibres écologiques que de ses propres producteurs (les petits, en tout cas) et des masses populaires en général ; chaque territoire et sa population n'étant rien de plus que des rouages à la place bien attitrée dans le grand cadre productif qu'est l’État des monopoles. Le capitalisme commande aux agriculteurs de produire, produire et encore produire ceci ou cela (quoi, ce sont les subventions qui le décident...) pour le bien du commerce extérieur "national" couplé à la survie des uns (les "petits") et aux profits des autres (les "gros"), commerce extérieur qui dans le domaine agricole, on le sait, souffre grandement de la concurrence des pays de l'Est et du Sud ; pour produire il faut de l'eau alors on pompe, pompe et re-pompe (d'autant plus que l'on est "gros", bien entendu) ; et à l'arrivée tout le monde (gros et petits) se retrouve à sec et à soutenir la "solution miracle" du barrage (sauf, bien sûr, ceux dont les terres vont être expropriées et englouties). Un capitalisme incapable de concilier l'inconciliable : le caractère social de la production (même dans une p1030865production agricole à première vue individuelle) et la propriété privée des moyens/ appropriation privée du produit ; et donc de gérer de telles contradictions entre les producteurs, entre l'homme (producteur) et la nature (écosystème... de tous) etc. etc. ; l'appareil politique n'intervenant nullement (contrairement aux illusions "citoyennistes") en protecteur de l'"intérêt général" mais bien en bras armé de la classe dominante - ici la bourgeoisie rurale, locale, et ses représentants élus.

    Car une autre chose dont nous avons l'illustration ici, contrairement à Notre-Dame-des-Landes ou aux LGV qui sont des projets d'aménagement de niveau hexagonal (bien qu'impliquant les "grands décideurs" "régionaux"), c'est bien la nature putrescente de la bourgeoisie "nationale" occitane elle-même, particulièrement éclatante à l'échelle très locale du projet (et qui explique, aux côtés des gendarmes mobiles, la présence et l'extrême virulence d'un mouvement pro-barrage qui attaque les opposant-e-s). Nous voyons parfaitement là comment la négation/périphérisation de nos Peuples et la mise en coupe réglée de nos païs n'aurait jamais été possible, en 8 siècles, sans le concours de logiques locales étroitement imbriquées dans le schéma d'ensemble "français" : l'Occitanie des caciques, des notables, des coteries et des clientèles avec laquelle nous voulons EN FINIR.

    C'est en cela que notre conception et notre lutte ne sont pas "nationalistes" ni "identitaires" : l'Occitanie n'est pas un "corps" organiquement parfait et simplement "parasité" de l'extérieur. L'Occitanie est le territoire d'une nationalité (réelle) subordonnée au Centre capitaliste parisien dans le cadre politico-militaire de l’État français ; mais le MOTEUR de cette subordination est INTERNE : les contradictions INTERNES à la Nation occitane, principalement la contradiction entre bourgeois/dominants/possédants et masses populaires ouvrières et paysannes qui sont les deux 201408261140-fullcomposantes d'une nationalité. Le capitalisme occitan, qui fleurissait au début du millénaire dernier (11e-13e siècles), a engendré la Nation occitane ; mais il l'a aussi "tuée" politiquement par ses propres contradictions, ne serait-ce que parce que les capitalistes sont par définition concurrents entre eux et que certains se sont (en conséquence) tournés vers l'envahisseur français contre leurs concurrents - et sur le dos du Peuple, de la masse des producteurs.

    C'est la raison pour laquelle le Peuple travailleur d'Occitanie ne peut pas obtenir son émancipation au travers de réformes institutionnelles ("plus d'autonomie", "nouvel acte de la décentralisation") NI MÊME de la proclamation (utopique) d'un État capitaliste indépendant, mais SEULEMENT dans le cadre d'une RÉVOLUTION POPULAIRE SOCIALISTE, d'une libération DE CLASSE !

    Nous, communistes pour la libération révolutionnaire du Peuple occitan (LRP), apportons notre total soutien à la ZAD du Testet et à ses militant-e-s, dans l'héritage des grands combats du Larzac dans les années 1970 et dans l'esprit du cri de combat : Volem viure, trabalhar e decidir al Païs !


    Voici une petite revue de presse concernant la situation :

    Presse bourgeoise :
    http://www.ladepeche.fr/actu/<wbr>economie/energie-<wbr>environnement/barrage-de-<wbr>sivens/
    http://www.lepoint.fr/societe/<wbr>tarn-la-guerilla-se-poursuit-<wbr>contre-le-projet-de-barrage-<wbr>de-sivens-09-09-2014-1861657_<wbr>23.php
    http://lexpansion.lexpress.fr/<wbr>actualite-economique/sivens-<wbr>trois-questions-autour-d-un-<wbr>barrage-polemique_1574891.html
    http://www.lepoint.fr/societe/<wbr>tarn-la-guerilla-se-poursuit-<wbr>contre-le-projet-de-barrage-<wbr>de-sivens-09-09-2014-1861657_<wbr>23.php

    Presse alternative et révolutionnaire :
    http://iaata.info/Tarn-contre-<wbr>la-construction-du.html
    http://www.reporterre.net/<wbr>spip.php?article5409

    Site du collectif : http://www.collectif-testet.<wbr>org/

    Autre site d'information sur l'opposition au projet : http://<wbr>tantquilyauradesbouilles.<wbr>wordpress.com/

    Ça a déjà commencé à barder sévère, avec gazages et coups de tonfas à la clé :
    http://www.networkvisio.com/<wbr>barrage-de-sivens-tarn/tv-zad-<wbr>du-barrage-de-sivens-dans-le-<wbr>tarn-les-opposants-malmene.<wbr>html
    http://www.informaction.info/<wbr>iframe-environnement-barrage-<wbr>du-tarn-zad-du-testet-<wbr>nouvelles-echauffourees-le-<wbr>conseil-general-confirme-le-<wbr>projet
    http://paris-luttes.info/la-<wbr>zad-testet-tarn-a-besoin-de
    http://www.reporterre.net/<wbr>spip.php?article6252

    Contrairement aux affirmations des pro-barrage, ce n'est pas qu'une affaire de "bobos parisiens" et la cause mobilise largement dans la population locale, notamment la jeunesse : http://www.reporterre.net/<wbr>spip.php?article6316

    Un soutien de Breizh : http://www.bigouden-nddl.org/<wbr>actualites/item/181-soutien-a-<wbr>la-zad-du-testet-non-au-<wbr>barrage-de-sivens

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  • Encore une illustration (reportage) de la périphérisation populaire en terre occitane Initialement publié sur le site de L'Humanité, ce reportage décrit le quotidien des masses populaires sur un territoire particulièrement relégué de la "région Aquitaine" (concentration de chômage, d'emploi précaire et sous-payé, de très bas revenus, de désocialisation etc.) : un "couloir" allant du Haut-Médoc (pointe de Grave à l'embouchure de la Gironde) jusqu'au nord d'Agen. Cette région occitane, après avoir été longuement disputée, a été globalement rattachée à l'entité-système "France" au milieu du 15e siècle (bataille de Castillon etc.) ; et d'après un récit de l'époque "ceux qui furent trouvés de la langue de Gascogne furent décapités et eurent leurs têtes tranchées"... De fait, ces territoires girondins au nord de Bordeaux (entre Blaye et Libourne, globalement) subirent une telle extermination de population lors de cette conquête (que l'histoire officielle retient comme la "fin victorieuse de la Guerre de Cent Ans"...) qu'il fallut les repeupler de paysans et autres travailleurs amenés du Poitou (entre autres), ce qui conduisit à une importante "oïlisation" de ce territoire jusque-là de langue et culture gasconne (Pays gabay ou "Gavacherie") - la toponymie (noms des lieux) continuant toutefois à trahir l'occitanité originelle.

    La résistance se poursuivra cependant encore tout au long des siècles suivants (aux cris de "Vive Guyenne !", nom de la région alors) avec notamment la fameuse (et très démocratique) République de l'Ormée et même l'opulente bourgeoisie bordelaise mettra du temps avant de "rentrer dans le rang" (on pense aux fameux Girondins, députés hostiles au centralisme parisien pendant la Révolution) même si avec le commerce colonial, et notamment la sinistre traite esclavagiste, on peut considérer sa couche supérieure comme acquise - achetée - dès le 17e siècle (le grand patriciat mettra tout en œuvre pour écraser l'Ormée, mouvement populaire à direction petite- et moyenne-bourgeoise) ; la ville devenant alors le "centre-relais" BBR du "Sud-Ouest" qu'elle est actuellement (et que l'on voit bien en blanc sur la carte ci-dessus, "bavant" jusqu'à ses villégiatures du Bassin d'Arcachon mais comptant aussi, bien sûr, ses ghettos "ZUS").

    Un "centre-relais" APPUYÉ sur l'immense "couloir de relégation" (en bleu sombre sur la carte) que nous allons découvrir ci-dessous ; un "couloir" où sont pourtant produits rien de moins que... les vins les plus chers de la planète, autre source (depuis l'époque gallo-romaine) de la prospérité des notables locaux !

    Bien entendu, 90% de l'"extrême-gauche" du système-France nous rétorquera que "cela n'a rien à voir" et que nous "fantasmons sur de vieilles chimères" moyenâgeuses et "anticapitalistes romantiques"... C'est bien connu, quand un territoire et une population (autrement dit des FORCES PRODUCTIVES) sont rattachés à un système capitaliste de production de plus-value, "ce n'est pas" pour s'y voir attribuer et assigner une PLACE qui déterminera ensuite l'oppression subie par ladite population*.

    LA VÉRITÉ c'est que l'entité francouille a conquis (pro vincia) et soumis dans le sang la Gascogne et la Guyenne comme tant d'autres terres et peuples, qu'elle les a PÉRIPHÉRISÉES dans le cadre de son État au service de la valorisation du Capital tout en faisant de Bordeaux l'un de ses grands ports transatlantiques et le siège d'une bourgeoisie-relais francouillisée qui se pâme aujourd'hui sur son Juppé et son tramway, et que ce "couloir" qui va du Haut-Médoc au Réolais (comme tant d'autres Terres d'Òc et d'ailleurs) est désormais une CAMPAGNE, une FUTURE BASE ROUGE de la Guerre populaire révolutionnaire que nous devons et voulons livrer contre le Capital !

    Tout près de là, du côté de Lacanau ou de Royan, certain-e-s d'entre vous auront peut-être la chance de passer quelques agréables vacances. Vous aurez alors, n'en doutons point, une pensée pour ces hommes et ces femmes prolétaires qui n'ont même pas 14 euros pour se rendre à la ville voisine...

    OCCITÀNIA, LIBERTAT, SOCIALISME ; per tots mejans necessaris !

    L'ORA ES VENGUDA !

    Bonne lecture.


    ob medoc


    Alors que le gouvernement a reçu le huitième rapport annuel de l’Observatoire national de la pauvreté et de l’exclusion sociale, l’Humanité est allée à la rencontre de ceux qui font face quotidiennement à la crise et au chômage en Aquitaine. Nous avons ainsi parcouru « le couloir de la pauvreté », territoire qui s’étend du Haut-Médoc jusqu’au Réolais, où 30% des habitants de moins de 65 ans survivent avec le RSA.

    De Lesparre-Médoc...

    11527563-0« Je suis prête à travailler dans tous les rayons, boucherie, poissonnerie, caissière mais je ne veux pas finir ma vie comme ça », dit Émilie, 21 ans, à une conseillère de la mission locale de Lesparre-Médoc. « Quelles sont vos priorités ? Est-ce que vous souhaitez rester sur ce territoire ? ». Émilie répond : « Je n’ai aucun objectif à part trouver du travail ». La conseillère lui suggère les emplois saisonniers. Émilie résiste : « Deux mois ici, deux mois là, ça ne m'intéresse pas trop». « Vous cherchez le CDI ? », lui rétorque la conseillère. « Oui, comme tout le monde », répond Émilie. « Bon, là, il va falloir se calmer... Chez Carrefour, Leader Price ou la vigne, c'est les CDD de deux mois ou rien ». Justement, Émilie vient de perdre son CDD de caissière à Leclerc, puis radiée par Pôle emploi. Dans cette région mondialement réputée pour ses vignobles d’exception, nombreux sont les jeunes qui, comme elle, se sentent pris au piège.

    « La vigne, ça détruit. Ma mère s’est fait opérer plusieurs fois. Je connais, c’est très dur. Mais, je n’ai pas le choix, il va falloir que je dépose des CV dans les châteaux. Je calcule tout au centime près : essence, loyer et nourriture… Je me prive en permanence», lâche Émilie, fille de viticulteurs, native de Lesparre-Médoc. C’est dans cette petite ville située au cœur de la presqu’île du Médoc que commence le « couloir de la pauvreté ». Un territoire baptisé par l’Insee, la CAF et la MSA (Mutuelle de santé agricole) qui s’étend de la pointe du Médoc jusqu’à Agen, sur plusieurs départements bordant la Garonne et ses affluents. Ce couloir, qui alterne petites villes et zones rurales, a la particularité d’abriter une population faiblement qualifiée et peu rémunérée, soumise aux contrats saisonniers. Qu’il s’agisse de la vigne, soit près de 80 % de l’activité économique, ou du tertiaire, tous les voyants sont au rouge. Entre 2010 et 2013, le nombre de personnes percevant le RSA socle est passé de 90 000 à 98000. Résultat : plus d'un Aquitain sur huit vit sous le seuil de pauvreté, l’équivalent de moins de 950 euros disponibles par mois. Sur les 226 jeunes suivis par la mission locale à Lesparre et Gaillan-en Médoc, 41 % sont sans qualification et seuls 32 % possèdent le permis de conduire. « Ici on peut être sûr d’avoir du travail toute l’année avec la vigne, mais il faut le permis. Or, la plupart des jeunes n'ont pas les moyens de payer 1500 euros. La question de la mobilité est centrale dans une région où il n'y a qu'un train qui relie à Bordeaux et où les bus ne relient pas les villages entre eux », témoigne Vina Seedoyal, conseillère emploi.

    ia194_txchom.pngSous une chaleur pesante, à quelques pas d'un centre-ville où un magasin sur deux affiche « bail à céder » ou « à louer », le local de l'association SOS emploi accueille une douzaine de chômeurs en formation. Son objectif : l'insertion durable dans le service à la personne, le bâtiment, la voirie, l'aménagement d'espaces verts... Durable mais souvent précaire. « Depuis quelques années, la crise est palpable. Il y a moins de CDI et une recrudescence de gens qui touchent les minima sociaux, qui n'ont pas le permis et qui manquent de formation, estime Daniel Keromnes, directeur de la structure. 80 % de la population est en dessous du niveau CAP. Le Médoc est une région enclavée. Certains jeunes n'ont jamais mis les pieds à Bordeaux. Et puis, il y a un côté seigneur ici... Qui aurait intérêt à ce que les ouvriers agricoles fassent plus d'études ? Sûrement pas les propriétaires des châteaux... ». Parmi le groupe en formation, Vanessa, 24 ans, mère célibataire, ne trouve pas d'emploi avec son CAP coiffure. Reste la restauration, la grande distribution ou la vigne... Comme toujours. « Je suis au RSA, seule avec deux enfants de 3 et 5 ans. J'ai fait les saisons avec des contrats de deux mois mais tout mon salaire passe dans le loyer et la nounou. Je n'arrive pas à me projeter. Et puis, les châteaux préfèrent embaucher des Marocains ou des Espagnols qui leur coûtent moins cher», témoigne-t-elle.

    Mardi matin, c'est jour de marché à Lesparre-Médoc. On aperçoit les étals de légumes. Sur une des rues adjacentes, l'association Envols distribue ses colis alimentaires. Les chariots défilent. Un groupe de femmes marocaines arrive avec les enfants. Farida, 33 ans, raconte dans un espagnol parfait une vie d'exil. Celle de ses parents, celle de son mari, la sienne et celle de milliers d'autres. « Nous vivions à Bilbao depuis douze ans. Mon père y est arrivé bien avant nous pour chercher du travail et une vie meilleure. Je l'ai rejoins, je ne parlais pas espagnol. J'y ai rencontré mon mari qui travaillait dans le bâtiment et la restauration. La crise, on la regardait de loin et puis elle nous est tombée dessus vers 2007. Les salaires ont baissé. Les emplois sont devenus rares, on a tenu grâce aux aides. Mais au bout de deux ans, elles ont été supprimées. Par le bouche à oreille, on a appris qu'il y a avait du travail dans la vigne à Lesparre. On est ici depuis huit mois. La vigne, c'est très dur. C'est grâce aux aides qu'on ne meurt pas de faim. Grâce à la solidarité d'ici ». Dans les locaux de l'association Envols, les nouveaux migrants côtoient une classe moyenne ayant quitté Bordeaux il y a une vingtaine d'années pour devenir propriétaire et vivre aisément. C'est le cas de Kamel, professeur de danse, de sa femme, fonctionnaire territoriale et de leurs trois enfants. « Il y a quelques années, j'ai perdu mon emploi, dit Kamel avec son sac rempli de lait et de légumes. Mais les traites de la maison sont restées identiques, 1000 euros par mois. Ma femme gagne 2000 euros. Il faut payer l'essence, les charges, les études des enfants. À cinq, on ne s'en sort pas. L'été, je tiens un stand de kebab sur les marchés. Sinon, je ne sais pas comment on ferait».

    à Pauillac...

    ob dc7914 6-medoc-coret-006Nous quittons Lesparre-Médoc vers le sud. À une vingtaine de kilomètres, Pauillac, la ville des grands crus, fait partie du couloir de la pauvreté. Ici, l'union locale CGT croule sous les dossiers et les permanences juridiques. Licenciements, harcèlement au travail, maladies professionnelles, heures supplémentaires non payées, ruptures conventionnelles, droits syndicaux bafoués... Alain Curot, responsable de l'union locale CGT, a un agenda de ministre. « On a de plus en plus de dossiers à traiter, 800 personnes de plus en trois ans. Les licenciements pour inaptitude sont le gros du bataillon. La vigne oui, mais on a aussi les caissières et les salariés du commerce ». Fille d'un ouvrier de la vigne et d'une femme de ménage marocains arrivés en France dans les années 60, Khadija, maman célibataire, s'est adressée au syndicat lorsqu'elle a été confronté à du harcèlement dans la clinique où elle était agent d'entretien. Toujours en procès avec son employeur, elle cumule aujourd'hui neuf emplois pour à peine 1000 euros par mois. « Je travaille dans une maison de retraite de nuit, je fais des ménages, des extras dans la restauration et je suis aide à domicile. Mais je ne suis pas un cas isolé à Pauillac», s'empresse-t-elle de préciser. Khadija est née dans le salon bourgeois du château Fonréaud à Listrac, alors que sa mère lavait le parquet. « J'ai grandi dans les logements attenants au vignoble avec les Maghrébins et les Portugais que les patrons sont allés chercher dans les villages. Moi aussi j'ai travaillé très tôt dans la vigne. C'était l'esclavage, les cadences, le chaud, le froid. Mes parents sont déglingués. Et ça continue avec en plus les pesticides qui provoquent des cancers et des maladies d’Alzheimer».

    Véronique Lalanne exerce comme assistante sociale depuis 2009 à la Maison des solidarités de Pauillac. Elle pointe la question de l'habitat insalubre et du surendettement. « Les gens trouvent à se loger facilement dans le privé mais il s'agit d'un habitat énergivore qui entraîne des charges qu'ils ne peuvent pas assurer. Du coup, ils déménagent mais ne font que déplacer les problèmes », explique-t-elle. Depuis un ou deux ans, cette professionnelle voit de plus en plus de travailleurs pauvres venus de Bordeaux, envoyés par les bailleurs sociaux. Mais sans emplois, les nouveaux arrivants plongent encore un peu plus. « On est dans une zone sinistrée où l'emploi est rare et où la mobilité est un problème grave. Ce sont des familles entières qui touchent à peine le SMIC qui arrivent dans la région par nécessité et qui ne sont pas éligibles aux aides. Cela renforce automatiquement les poches de pauvreté déjà existantes ». Une réalité sourde qui tranche avec des paysages majestueux, les grands châteaux et les jardins soignés où des cars de touristes stationnent. Et puis, des pieds de vigne à perte de vue qui poussent silencieusement au soleil. Quelques fois, en bordure des champs, des camionnettes stationnées indiquent la présence d'ouvriers. On descend le long de l'estuaire. Nous roulons dans le couloir de la pauvreté.

    en passant par Sainte-Foy-la-Grande 

    ob f9ced7 14-medoc-coret-018Passé Libourne et Castillon-la-Bataille, nous entrons à Sainte-Foy-la-Grande, 2500 habitants, classée zone de sécurité prioritaire en février dernier par l'ex-ministre de l'intérieur Manuel Valls. Dans cette petite ville considérée comme un nouveau « ghetto urbain », 30% d'habitants dépendent du RSA et plus de 40 % des allocataires dépendent de la CAF pour plus de la moitié de leurs ressources. C'est le cas de Marie-Claire, maman célibataire de quatre enfants, vivant dans un petit HLM, à Pineuilh, à quelques minutes de Sainte-Foy. De contrats aidés en emplois à mi-temps, elle n'a cessé d'enquiller les boulots saisonniers dans la vigne et dans le maraîchage pendant dix ans. « Depuis 2006, je n'ai plus d'emploi. Que ce soit l'usine de pommes ou la vigne, c'est très physique, il faut se lever aux aurores et faire garder les enfants. À Sainte-Foy, on est peu aidés, il faut dire que trois quart des gens ici sont au chômage. On vit dans une ville en faillite qui s'enfonce dans la pauvreté », tranche-t-elle. À 34 ans, Marie-Claire survit avec 1000 euros tout net. « Vous enlevez les factures, le loyer, la nourriture, il ne reste plus grand-chose. Je suis obligée de garder des enfants la nuit pour d'autres mamans qui travaillent très tôt. C'est la débrouille permanente ». Chaque mois, le surendettement la guette. Il suffit d'une fois où un des enfants est malade et là voilà dans le rouge au 20 du mois. « J'ai la CMU mais il y a toujours des frais à avancer. L'orthodontie coûte très cher. Mes deux aînés auront un appareil dentaire. Sur 580 euros, le mois dernier, il a fallu que je paie de ma poche 170 euros. Les semelles orthopédiques ne sont pas remboursées non plus », détaille Marie-Claire.

    Des situations de pauvreté comme la sienne, Marie-Claire en rencontre souvent aux Restos du Cœur où elle est bénévole. Là, elle a fait la connaissance d'Estelle, 27 ans, maman de deux enfants, dont une handicapée. Pour trouver du travail, elle a tout tenté : l'aide à domicile, le Mc Do, Lidl, Leclerc... Mais à chaque fois, c'est négatif. « Les caméras de vidéo-surveillance ne nous ont pas changé la vie ou amené du travail... La délinquance et les trafics se sont déplacés. L'hôpital a fermé des services entiers pédiatrie, chirurgie, maternité. On se sent lâchés de partout», poursuit-elle. À Sainte-Foy-la-Grande, il n'y a pas de Pôle emploi. Le plus proche est à Libourne, 14 euros l'aller-retour en train. « Je n'ai pas cet argent et je ne suis pas la seule dans ce cas. Les gens qui sont dans les villages autour, c'est pire. Du coup, on se fait radier et on abandonne». Ancien élu communiste, Claude Mirande a vu sa ville « dégringoler ». Pendant une dizaine d'années, il s'est battu pour empêcher la fermeture de l'hôpital, qui était le plus gros employeur de la ville et de ses environs. « L'argument, c'est qu'il n'y avait pas assez de fréquentation. Résultat aujourd'hui, l'hôpital fonctionne à minima et manque de personnel. Les femmes vont accoucher à Bergerac alors qu'on avait tout sur place. Depuis peu, on voit arriver des gens sans moyens de la banlieue bordelaise qui atterrissent chez les marchands de sommeil, dans des taudis. Au lieu de faire venir les flics, Valls aurait mieux fait de se préoccuper de l'emploi et des services publics ».

    jusqu'à La Réole

    ob 9e09b6 16-medoc-coret-024Aller de Sainte-Foy-la-Grande à La Réole, c'est quitter la Dordogne pour rejoindre la Garonne. S'enfoncer dans les terres du Réolais. Dernière étape de notre périple, ici encore, tout semble calme et même charmant. « On a beau avoir le label Ville d'art et d'histoire, on est une ville très pauvre », lance une des bénévoles des Restos du Cœur, dont le local est à quelques kilomètres du joli petit centre-ville. À La Réole, il reste une gare qui a failli fermer il y a quelques années parce que « soit-disant pas rentable », poursuit une autre. En augmentation constante, le nombre de familles ayant recours à l'association a doublé en cinq ans, alors que les barèmes se sont durcis. Comme à Pauillac ou Saint-Foy, les nouveaux arrivants viennent chercher des loyers modérés et une qualité de vie. « En fait, ils sont pris au piège parce qu'il n'y a pas de travail », explique Élisabeth Margot, présidente de l'association. Une fine silhouette sort du hangar où se fait la distribution de denrées. Sonia, 50 ans, ancienne secrétaire médicale n'a pas eu le choix. « Je suis tombée gravement malade et ma vie a basculé. J'ai perdu mon travail et je ne pouvais plus assurer le loyer. Je vis à La Réole depuis cinq ans dans une petite maison un peu humide. Je ne fais aucun extra, je n'ai pas de voiture car je ne pourrais pas payer l'essence. Les aides au logement sont bloquées alors que tout augmente. Jamais je n'aurais imaginé qu'à mon âge, je doive venir ici pour me nourrir... ».

    Sous une pluie fine, Maria, 25 ans, s'empresse de ranger les légumes et les couches dans le coffre de sa voiture. Les yeux cernés, elle raconte comment les difficultés ont commencé : « Mon mari est parti. Je me retrouve seule avec un petit salaire et la garde des enfants. C'était pas prévu ». Ouvrière en CDI dans un abattoir, elle commence à 5 heures du matin et débauche à midi. Impossible avec les enfants. « Je me suis mise en congé parental et je touche 400 euros par mois. J'essaie d'être rigoureuse dans ma gestion, je ne veux pas me morfondre à mon âge. Je me dis que c'est une mauvaise passe et que ça ira mieux plus tard ». Les ménages monoparentaux sont très nettement sur-représentés, soit 30 % des ménages usagers et deux tiers des personnes qui ont recours sont des femmes. Le chassé-croisé continue. Un couple avec des jumeaux vient d'apprendre qu'il n'est pas éligible aux aides de l'association. « On dépasse de quelques euros. On est pourtant au RSA à 468 euros avec quatre enfants », explique la maman. En location dans une maison insalubre, ils ont du débourser près de 1800 euros en quatre mois pour l'électricité. Un gouffre. Le père, lui, a travaillé dans le gardiennage et ne trouve pas de travail dans cette branche. « Quand je dépose mes CV dans la manutention ou le BTP, on me dit que je suis trop qualifié. Depuis deux ans, on ne s'en sort pas ». Dans un mois, ils quitteront La Réole pour « tenter » Paris, dans l’espoir de trouver du travail.

    Ixchel Delaporte

    photos Olivier Coret

    À retrouver sur le site de Humanite.fr, l'intégralité du reportage photo d'Olivier Coret


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    * En lien avec l'actualité, et sans comparer le moins du monde l'État français à Israël et les classes populaires occitanes périphérisées aux Palestiniens (nous savons bien que la spécialité de certain-e-s est de faire dire aux autres ce qu'ils n'ont pas dit), il est d'ailleurs intéressant de remarquer comment les négateurs et les "moqueurs" de cela, ceux pour qui évoquer ces conquêtes-massacres d'il y a 5 ou 8 siècles relève du "romantisme identitaire", sont souvent les MÊMES qui nient la très actuelle oppression sioniste en Palestine (en renvoyant, par exemple, les deux camps dos à dos) et "antisémitisent" ceux qui la dénoncent. C'est que nous avons tout simplement là le reflet d'une IDENTITÉ MATÉRIELLE ET (donc) INTELLECTUELLE totale dont eux-mêmes n'ont pas conscience en raison (justement) du "différé" historique entre les deux situations, du caractère actuel du sionisme en Palestine et du caractère passé de la Conquista de l'Occitanie (et des autres "provinces"). L'État sioniste (colons venus principalement d'Europe, construction historique subjective) a prétendu, au 20e siècle et encore aujourd'hui, refonder le royaume hébraïque de Salomon (son mythe fondateur) en soumettant et niant le Peuple palestinien (produit objectif de l'histoire) qui vivait là. L'État français (construction historique subjective) a prétendu, de la monarchie capétienne des 12e-13e siècles jusqu'à la "Révolution" bourgeoise et aux régimes du 19e siècle, refonder la Gaule romaine (son mythe fondateur : celui d'une Gaule "fécondée" par Rome à travers la défaite héroïco-sacrificielle de Vercingétorix, et bien sûr le mythe des "frontières naturelles", leitmotiv de sa politique d'expansion qui n'échouera qu'au Nord) en soumettant et niant les Peuples
    (produits objectifs de l'histoire) qui l'habitaient. Dans un cas comme dans l'autre, la véritable question n'est pas celle du "mythe fondateur" et de ses élucubrations et contre-vérités historiques diverses et variées, mais simplement que toute classe dominante exploiteuse cherche à se constituer une BASE D'ACCUMULATION géographique par la soumission et la négation des masses populaires, quelles que soient les "subtilités" idéologiques et pratiques qui accompagnent le processus.

    D'ailleurs si un certain sionisme religieux, messianique s'est développé depuis quelques années sous l'influence des milieux fondamentalistes chrétiens US, le sionisme est historiquement une idéologie LAÏQUE, "éclairée" et "civilisatrice" totalement fille de l'idéologie coloniale francouille de Jules Ferry & co (et les Juifs ultra-religieux, historiquement, y étaient plutôt hostiles).

    Bien sûr, les milieux "antisionistes" réactionnaires BBR (national-catholiques, gaullistes, "souverainistes" de tout poil) sont eux aussi très hostiles à nos affirmations de Peuples niés ("destination Babel" comme dit leur icône Pierre Hillard... qui est au demeurant un fondateur et contributeur de Boulevard Voltaire et trouve plutôt grâce aux yeux de certains sur "Riposte laïque" 1 - 2, sites pourtant pas vraiment fans de l'"antisionisme" soralien, ce qui montre bien comment toute cette merde baigne dans les mêmes latrines !) ; mais nous avons également montré comment en Hexagone l'antisémitisme est indissociable de la construction de l'entité étatique, notamment aux dépens de l'Occitanie. De fait, il n'y a pas une idéologie francouille "philosémite" et une autre "antisémite" ; il y a, depuis un peu plus de deux siècles que le "débat" fait rage, deux écoles antisémites : ceux qui acceptent d'intégrer au monde franco-blanc les Juifs qui en assimilent les valeurs ET/OU, depuis la Seconde Guerre mondiale, les partagent via le sionisme ; et ceux qui refusent catégoriquement d'intégrer les Juifs au monde franco-blanc européen-chrétien (et a fortiori que des Juifs, en Palestine occupée, se retrouvent investis des attributs de la puissance étatique : les Palestiniens ne servent ici que de simples faire-valoir).

     


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  • Alors que l'entité fRance célèbre dans les larmes de crocodile "l'année du centenaire" de la Grande Boucherie de 14-18, faisant mine de pleurer les victimes des "horreurs de la guerre" d'hier pendant que continuent à tomber comme des mouches celles de l'impérialisme d'aujourd'hui (on pense en particulier à la Centrafrique où l'armée impérialiste BBR est en train de couvrir d'abominables massacres, 20 ans après le génocide rwandais dont elle est exclue des commémorations par le gouvernement local ce qui est une excellente chose !), une exposition revient sur le sort très particulier des "provinciaux" périphérisés durant le sinistre conflit ; sur le mépris – omniprésent à l'époque – de ces "Méridionaux" occitans "paresseux" et "lâches", "rouges" et "boulets de la France", mépris qui aura cette fois – dans l'hystérie militariste bleu-blanc-rouge – des conséquences funestes ; ainsi que sur le rôle sanguinaire des TRAÎTRES ET VENDUS "méridionaux" comme le "catalan" Joffre – mais la liste des Occitans dans ce cas est elle aussi longue : les Foch, Gallieni, Nivelle etc. ; car ainsi que l'écrivait Jules Michelet dans les années 1840, "dans le Midi, les gens aisés du moins sont français", tandis que "le petit peuple est tout autre chose, peut-être espagnol ou maure".

    Si vous êtes ou passez en Provença, nous vous invitons vivement à faire un tour à cette exposition hélas (et volontairement de la part de l'ordre BBR) confidentielle ; car c'est en se réappropriant ce genre de mémoire que les Peuples travailleurs d'Hexagone (pas seulement les Occitans), dont l'entité fRance (aujourd'hui "République une et indivisible" des monopoles capitalistes) se repaît de la chair (à canon) et de la force de travail depuis des siècles, pourront forger leur compréhension révolutionnaire du système d'oppression dans lequel ils vivent et forger les armes de la solution : la Guerre populaire, la Révolution prolétarienne qui, dans l’État multinational/ Prison des Peuples "français", veut dire la Libération révolutionnaire des Peuples enchaînés (LRP) !

    Petite présentation :

    1914, la tragique histoire d’une injustice militaire, une erreur de stratégie menant à l’exécution de deux soldats méridionaux. À l’occasion du centenaire de la Grande Guerre, les Archives départementales présentent documents, objets et équipements… En parallèle, on trouve les planches originales de la bande dessinée La Faute au Midi, signées par le dessinateur A. Dan et l’historien Jean-Yves Le Naour.

    Une Histoire oubliée

    Les soldats provençaux du XVe corps sont engagés lors d’une des premières grandes batailles opposant les Français aux Allemands. Mais l’ennemi attire tout simplement les Français sur le terrain qu’il a fixé comme champ de bataille, avec une artillerie dont les tirs sont réglés à l’avance. Les troupes se font massacrer par un déluge d’obus et de mitraille, sans même voir un seul soldat ennemi.

    Si les Méridionaux abandonnent 10 000 morts sur le terrain, ils sont pourtant bientôt accusés d’être les responsables de la défaite. La rumeur se répand, orchestrée par le généralissime Joseph Joffre et le ministre de la Guerre Adolphe Messimy, que les soldats de « l’aimable Provence » auraient lâché pied devant l’ennemi. La tempête gagne alors toute la France : les soldats méridionaux sont désormais diffamés par la propagande officielle. 

     L’Exposition

    Cette exposition revient sur cette blessure longtemps à vif : en partant de la mobilisation, elle évoque la violence des premières batailles, quand les soldats français découvrent la guerre industrielle et la puissance du feu.

    L’accusation de lâcheté des Méridionaux révèle ensuite un racisme intérieur qui ne date pas de 1914. A l’heure de la construction de l’identité nationale, au XIXe siècle, le Méridional est apparu comme le contretype du bon Français, un individu souvent grossier, parfois imbécile, toujours ridicule, vantard et outré. Bref, un Tartarin !

    Cette exposition aborde enfin le thème des fusillés qui ont également hanté la mémoire de la Grande Guerre en suivant la tragédie de deux soldats du XVe corps, Auguste Odde et Joseph Tomasini.

    [Lire : https://www.bastamag.net/Grande-Guerre-fusillés-pour-exemple]

    L’exposition est articulée en plusieurs sections qui reprennent tout à la fois les planches de la bande dessinée et les documents divers (affiches, objets, photographies) retenus pour illustrer l’histoire des soldats du XVe corps et de leur légende noire. 

     Archives et bande dessinée

    Ce partenariat avec les Archives départementales des Bouches-du-Rhône démontre une fois de plus la plasticité de la bande dessinée, sa capacité à traiter tous les sujets, toutes les disciplines et son aptitude à intégrer des documents et des objets hétérogènes.
    Chaque année, l’exposition est associée à une série de rencontres entre les auteurs et le public dans le réseau de la Bibliothèque départementale de prêt.

    Centre aixois des Archives départementales des Bouches-du-Rhône

    25 allée de Philadelphie - Aix-en-Provence

    04 13 31 57 00

    Du 24 mars au 5 juillet


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    C'est ainsi que, unis avec tous les autres cercles de la domination impériale (néocolonies d'Afrique, dernières colonies des Caraïbes, de l'Océan Indien et du Pacifique, colonies intérieures des "territoires perdus" de la République bourgeoise de merde), nous renverserons dans un torrent de feu et de joie cet État pilier du G7 et du G20, de l'Union européenne et de l'OTAN, bref de l'impérialisme mondial ! 

    Lire aussi, pour s'en rappeler tout au long de cette "année du centenaire", notre Déclaration du 11 Novembre :

    Comité de Construction pour le Parti communiste révolutionnaire des Terres d'Òc : Déclaration du 11 Novembre

     


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  • 800 ans ont passé depuis la Conquista ; 800 ans de ‘provincialisation’ et de périphérisation dans et par le système étatique-impérial ‘France’... Alors que le capitalisme qui a construit ce système est entré en crise terminale, le prolétariat et les masses populaires d’Occitània commencent à relever la tête. Il est temps de se doter du seul outil conséquent et efficace pour notre Libération révolutionnaire, en tant que Peuple nié et en tant que classes travailleuses exploitées !

    croisade-albigeoise-combattants-1

    Le 12 septembre 1213, il y a 800 ans, sur le champ de bataille de Muret près de Tolosa, était scellé dans le fracas des armes et les rivières de sang le sort de nòstra Occitània. Commençait alors, à coup de proconsuls royaux et d'abbés-corbeaux de la "Sainte" Inquisition, la liquidation politique de notre Nation, qui devait déboucher sur le découpage départemental de 1790, le règne des préfets napoléoniens puis ‘républicains’ et enfin, à l’ère des monopoles, sous la sinistre ‘République’ qui devait naître dans la répression-boucherie des Communes et s’achever dans la vergonha des pleins pouvoirs à Pétain, sur la tentative de nous nier jusqu’en tant que Peuple.

    Depuis le début de son règne (1180), le roi franc capétien Philippe II Auguste s’était lancé à la ‘conquête de l’Ouest’ de l’actuel Hexagone, les domaines Plantagenêt, comprenant la partie ouest de l’Occitanie, le duché d’Aquitaine-Gascogne (globalement, nos 'régions' Aquitaine, Limousin et Auvergne) : ainsi naquit l’État français, et Philippe Auguste devint le premier roi de France. En Languedoc en revanche, qui comme la Provence était une mosaïque de fiefs et de cités-États relevant soit du roi d’Aragon-Catalogne, soit du comte de Toulouse (lui-même plus ou moins vassal du premier), la Conquista prit la forme d’une sanglante Croisade, sous le prétexte, au nom de Dieu et du Saint-Père le Pape, d’écraser l’hérésie albigeoise plus connue sous le nom de Cathares, que les nobles occitans étaient accusés de protéger (c’était vrai et au demeurant, la tolérance de notre terre s’appliquait aussi aux Juifs, aux Maures venus d’Andalus et à bien d’autres encore)… Un peu comme, aujourd’hui, l’impérialisme lance ses guerres de rapines au prétexte que tel ou tel pays ‘abrite le terrorisme’ – et on en passe et des meilleures [de fait, selon les travaux récents d'une historienne, les Cathares pourraient même... ne pas avoir existé du tout].

    La direction de la Croisade fut confiée au petit baron francilien Simon de Montfort. Ses hordes du Nord déferlèrent alors sur notre Peuple comme une nuée de sauterelles, pour faire main basse sur ses richesses, s’y tailler des fiefs par l’épée et commettre des atrocités sans nom comme le massacre de Béziers en 1209 (‘tuez-les tous, Dieu reconnaîtra les siens !’). La résistance à l’invasion fut d’abord (surtout) l’œuvre de la petite 300px-Cathars expellednoblesse (chevalerie), des comtes Trencavel et des masses populaires. Il faudra plusieurs années pour que le comte de Toulouse, Raymond VI, qui s’était même dans un premier temps rallié à la Croisade ( !), prenne la mesure de ce qui se tramait et se décide à réagir. [Lire ici au sujet de la première décennie de cette Conquête : invasion-de-l-occitanie-centrale-la-croisade-contre-l-heresie-premiere-partie]

    L’année 1213 marqua un tournant avec l’intervention du suzerain des suzerains d’Occitània, le roi Pierre II d’Aragon, auquel le comte de Toulouse fit allégeance. Jusque-là, celui-ci était sans doute trop absorbé… par ses propres ambitions de ‘re’-Conquista ibérique, participant notamment à la bataille de Navas de Tolosa, début de la fin d’Al-Andalus, qui n’apportera pratiquement rien à son royaume mais fera de la Castille la puissance incontestée de la péninsule, annonçant l’État espagnol… qui quelque siècles plus tard rayera l’Aragon et les Estats catalans d’un trait de plume. Dans cette perspective, comme Raymond de Toulouse au début, il avait voulu éviter à tout prix le conflit avec la Papauté et la monarchie parisienne. À présent, le rapport de force allait peut-être enfin changer... Hélas, comme s’il y avait un ‘bon dieu’ matérialiste historique pour punir leurs politiques erratiques et uniquement tournées vers leurs intérêts personnels, l’armée occitano-catalano-aragonaise de Pierre II et Raymond VI sera écrasée sur le champ de bataille. Les rois capétiens n’interviendront directement que quelques années plus tard, avec les successeurs de Philippe Auguste, Louis VIII et ‘Saint’ Louis IX (par ailleurs inventeur de la rouelle pour les Juifs, ancêtre de l'étoile jaune, 7 siècles avant Hitler...), pour anéantir les dernières résistances populaires, nobles et cathares. C’en était fini de l’indépendance politique de notre Nation, ‘confédération’ de fiefs et de républiques urbaines, ‘république aristocratique’ comme l’analysera bien plus tard Friedrich Engels. L’Aquitaine (du Limousin à la Gascogne) sera encore disputée aux rois d’Angleterre jusqu’au milieu du 15e siècle, la Provence semi-indépendante sera définitivement annexée par Louis XI en 1481 et Louis XIII, Louis 1768486817XIV et leurs successeurs jusqu'à la Révolution bourgeoise se chargeront de mettre fin aux dernières semi-indépendances pyrénéennes. Comme souvent dans l’histoire, dans un mode de production (la féodalité) en crise, la classe dominante d’une nation s’est emparée… d’une autre, achetant, soumettant ou liquidant ses élites et s’appropriant ses richesses et ses forces productives : ce que l’on a pris l’habitude, depuis, d’appeler IMPÉRIALISME. Le Royaume de France des Capétiens, de leur aristocratie et de leur bourgeoisie de Cour, future ‘République une et indivisible’ du Grand Capital monopoliste, était né et notre Occitanie en était désormais une province, terme employé aujourd'hui par tout le monde, mais dont tout le monde a tout autant oublié la signification : en latin pro vincia signifie "(pays) précédemment vaincu", pays conquis.

    Cette sanglante tragédie de notre Peuple s'est déroulée, donc, il y a 800 ans... Autrement dit ‘une éternité ; ‘cela remonte à Hérode nous diront certainement, comme pour l’esclavage des Africain-e-s ou le génocide des Amérindien-ne-s, les pourfendeurs habituels de la ‘dictature mémorielle’ – comme si le présent pouvait être autre chose que le fruit du passé et comme si les revendications ‘mémorielles’ tombaient du ciel, sans aucun lien avec la réalité actuelle. Et pourtant ! Que cette sanglante Conquista ne fait-elle penser, aujourd’hui, à tant de guerres et de sanglantes impositions de l’ordre impérialiste à travers le monde ; contre lesquelles se dressent jour après jour les résistances des Peuples, de nos camarades kurdes et palestiniens, des Irakiens et des Afghans, des Mayas du Mexique et des paysans de Colombie, et la forme la plus avancée de ces résistances, la Guerre populaire de nos camarades indiens, philippins, d’Anatolie (État turc) ou du Pérou… Le matérialisme ignore le hasard.

    Il y a 800 ans, lorsque le sang de l’Occitanie égorgée coulait à Muret, à Béziers ou encore à Montségur, le capitalisme voyait le jour. La Conquista de notre Peuple (ainsi que du ‘Grand Ouest’ de la Normandie au Poitou) ne fut ni plus ni moins que l’ACTE DE NAISSANCE… de la ‘France’ comme État moderne, lorsque Philippe II Auguste devint roi de France ; et cet État fut pour les siècles suivants l’instrument politico-militaire de l’aristocratie ‘franque’ liée au monarque, mais aussi d’une classe émergente, la bourgeoisie capitaliste (du Nord mais aussi occitane traître) qui trouvait là, à ce stade de son développement, un grand marché intérieur et le cadre politique adéquat à son activité fondamentale : l’accumulation de richesses.

    Il y a deux sortes de modes de production ‘barbares’ : un mode de production qui émerge, et ne s’embarrasse guère de scrupules dans l’accumulation de ses premières grandes fortunes ; et un mode de production qui agonise et qui, pour défendre les privilèges accumulés, ne recule devant aucun crime. L’État français moderne, du 13e siècle jusqu’à 1789, mariait les deux : un capitalisme émergent en accumulation sauvage, et une féodalité pourrissante dans l’hyper-concentration absolutiste de la propriété éminente. Et, n’en déplaise à nos pourfendeurs de la ‘repentance’, la situation actuelle, l’État français contemporain, œuvre des révolutionnaires bourgeois (notamment Napoléon) qui renversèrent l’absolutisme, et une grande partie de la situation mondiale où l’État français ‘joue un rôle’, sont le produit direct de cette histoire. La Conquista a donné naissance à l’État françaisdragonnades huguenots ; comme la conquête de l’Écosse, du Pays de Galles et de l’Irlande a donné naissance à l’État britannique et la conquête d’Al-Andalus, à l’État castillan puis espagnol. L’État français a donné naissance à l’impérialisme du même nom, d’abord ‘accumulateur primitif’ préindustriel (à l’époque de Louis XIV, Louis XV etc.) puis monopoliste (avec la sinistre IIIe République égorgeuse des Communes). 

    L’État français est né à partir d’un Centre, la région de Paris, siège du pouvoir politique monarchique et du pouvoir économique de l’aristocratie et de la haute bourgeoisie de Cour, qui a soumis par le fer puis la poudre les Peuples de l’actuel Hexagone qu’il a transformés en Périphéries, masses de producteurs taillables et corvéables à merci.

    [Pour citer Kaypakkaya au sujet de l'assez similaire État turc (né simplement plus tardivement et de façon plus "accélérée" et brutale)  : "Quel est l'objectif de l'oppression nationale ? Cet objectif, de manière très générale, est de maîtriser la richesse matérielle de tous les marchés du pays sans avoir de rivaux, pour gagner de nouveaux privilèges, étendre les limites des privilèges actuels et s’en servir. Dans ce but, la bourgeoisie et les propriétaires issus de la nation dominante, afin de conserver les frontières politiques du pays font d’énormes efforts pour empêcher par tous les moyens les régions dans lesquelles vivent plusieurs nationalités de se séparer du pays. Dans les mots du camarade Staline : “Qui dominera le marché ?” [la bourgeoisie du Bassin de la Seine ou occitane, lyonnaise, de Flandre-Artois, ou encore anglo-normande ? les foires de Champagne ou du Languedoc ? etc.]. C’est l’essence de la question. (...) L’oppression des travailleurs des peuples minoritaires acquiert de cette manière une double qualité : premièrement il y a l’oppression de classe utilisée contre les travailleurs afin d’exploiter et d’éradiquer la lutte de classe ; deuxièmement, il y a l’oppression nationale mise en œuvre pour les objectifs mentionnés plus haut contre toutes les classes des nations et des nationalités minoritaires. Les communistes font la distinction entre ces deux formes d’oppression parce que, par exemple, tandis que les bourgeois kurdes et les petits propriétaires s’opposent à la seconde forme d’oppression, ils supportent la première. En ce qui nous concerne, nous sommes opposés aux deux formes d’oppression. Afin d’éradiquer l’oppression nationale, nous supportons la lutte de la bourgeoisie kurde et des petits propriétaires, mais, d’un autre côté, nous devons nous battre contre eux pour mettre un terme à l’oppression de classe."]

    Puis il est allé chercher des périphéries outre-mer, devenant Empire. L’État espagnol (d’abord royaumes de Castille et d’Aragon), de même, est né par la conquête de l’État musulman de Cordoue, puis par la soumission à la Castille de l’Aragon, du León, des Pays catalans et du Pays Basque, des Asturies et de la Galice etc. (se 'réalisant', d'autre part, dans la conquête et la colonisation des Amériques). L’État britannique est né de la conquête anglaise des peuples celtiques : dans ces deux cas, l’ordre imposé aux conquis fut encore plus ouvertement colonial. Et on l’oublie souvent, mais c’est la conquête (13e-15e siècles) et la colonisation, par les Chevaliers teutoniques, des territoires ‘païens’ situés dans l’actuelle Pologne et les Pays baltes qui donnera naissance au royaume de Prusse, lequel fondera entre 1815 et 1871 l’Allemagne actuelle (qui a perdu ces territoires après la défaite du nazisme) : l’Allemagne unifiée est en réalité née du mariage entre cette économie agraire coloniale d’outre-Oder et l’économie industrielle de Rhénanie et Westphalie (acquises par la Prusse en 1815) ; et cet expansionnisme (Drang nach Osten) au détriment des ‘barbares asiatiques slaves’ fondera l’idéologie nazie du Lebensraum (‘espace vital’ supposé s’étendre jusqu’à l’Oural et à la Volga…), l'effroyable Generalplan Ost, etc. Plus près de nous dans le temps, dans le cadre d’une véritable construction d’État par la bourgeoisie seule (et une maison monarchique ‘libérale’), l’État italien est par la conquête et la périphérisation du Mezzogiorno (ancien royaume de Naples + Sardaigne piémontaise depuis 1718), ce qui sera étudié par Gramsci et deviendra un fondamental du marxisme-léninisme transalpin : il ne s’est (absolument) rien passé d’autre en ‘France’, avec le ‘Midi’, mais plus tôt et beaucoup plus étalé dans le temps, sur plusieurs siècles.

    résistance var 1851Dans son texte de référence sur notre ‘France du Sud’, Friedrich Engels, qui fait correctement s’achever la conquête totale à la fin du 15e siècle (après la Guerre de Cent Ans, on pourrait même dire début du 17e pour une bonne partie de la Gascogne), fait ensuite résister nòstra Occitània… pendant 3 siècles, soit jusqu’en 1789. Et, à dire vrai, Engels, qui était un brillant théoricien socialiste mais aussi… un rentier capitaliste et un défenseur assez borgne du ‘rôle historique progressiste’ du capitalisme, fait quelque peu s’arrêter l’histoire quand cela l’arrange ; car le vote démocrate-socialiste de 1848-49, la résistance armée massive (et au contraire très faible au Nord de la Loire) au coup d’État bonapartiste de 1851[1], les Communes de 1871 (Marseille, Narbonne, Toulouse, Limoges etc. ainsi que Lyon et Saint-Étienne, "semi-arpitanes semi-occitanes" par leur population ouvrière) ou encore la Grande Révolte de 1907 c’était encore de la résistance occitane, même s’il n’y avait pas de revendication séparatiste, tout au plus anti-centraliste (mais il n’y en avait pas, non plus, pendant les Guerres de Religion !). Et d'ailleurs, lors de cette Grande Révolte des vignerons et des journaliers viticoles acculés à la famine, près de 7 siècles après la Conquista et il y a à peine trois générations, l'ultra-réactionnaire journal bourgeois le Figaro n'osait-il pas écrire : "Ne vous y trompez pas, c'est un pays à reconquérir comme au temps de Simon de Montfort" ? Et l'Aurore, quotidien phare du républicanisme radical-socialiste alors au pouvoir avec Clemenceau (le Manuel Valls de l'époque...), de renchérir sur des références un peu moins ‘moyenâgeuses’ : "Autrefois, ça n'aurait pas traîné : on aurait déjà appris à ces messieurs des départements fédérés qu'il y a une République une et indivisible, et que cette République ne tolère pas qu'on joue avec elle au séparatisme" (référence aux guerres de la Convention contre le ‘Midi’ girondin ‘fédéraliste’ en 1793)… Exactement comme aujourd'hui même, y compris à 'gauche' (comme une certaine élue marseillaise), d’aucuns allient dénonciation de la 'repentance' ou des 'enchères mémorielles' et appels à une 'bataille d'Alger' dans les quartiers populaires 'difficiles' (peuplés de colonies intérieures) : la continuité historique est ici TOTALE. [Pour un "florilège" de déclarations CONFINANT AU RACISME contre les "méridionaux" et leur "patois" depuis la "Renaissance" jusqu'au 20e siècle, reflets dans la pensée de notre domination politique et économique par l’État central parisien, voir ici : http://www.p-n-o.org/imperialisme_et_racisme_anti_occitan.htm.]

    APRÈS 8 SÈGLES…

    C'est aussi cette période allant du milieu du 19e siècle (avec son héroïque résistance démocratique au coup d’État bonapartiste) à la Seconde Guerre mondiale qui verra en Occitanie comme dans d'autres "provinces" (en Bretagne notamment) un premier mouvement culturel de réaffirmation en tant que Peuple face au centralisme "français" triomphant, avec le connu-de-tout(e)s Frédéric Mistral et son Félibrige (surtout basé en Provence) mais aussi d'autres cénacles (comme la Société d'études occitanes) en Languedoc et ailleurs. Un mouvement hélas essentiellement constitué de notables (alors même que le provençal, le languedocien, l'auvergnat ou encore le gascon étaient encore la langue courante de 90% des ouvriers et des paysans) et souvent conservateur pour ne pas dire réactionnaire (bien que de nombreux "rouges" socialistes et même - après 1920 - communistes en fussent également membres) ; dont beaucoup d'éléments seront sensibles au "compromis" avec le chauvinardisme francouille formulé à la toute fin du 19e siècle par Charles Maurras (lui-même provençal et ancien félibre) et certains même, comme Louis/Loís Alibert (au même titre que de nombreux autres en Bretagne), plongeront sous l'Occupation dans les abîmes de "l'ennemi de mon ennemi est mon ami" : la collaboration ouverte avec les nazis (théories racialistes sur un Peuple occitan "ibère" et espoir, sans doute, de trouver sa place dans l'"Europe des races" qu'étaient supposés vouloir Hitler et ses comparses). Bien entendu, la lutte d'affirmation du Peuple occitan en ressortira après-guerre marquée du même lourd et durable sceau d'infâmie ("argument"-gimmick des jacobinards de tout poil) que son équivalente armoricaine, alors même que l'acculturation produit (et au service) du capitalisme monopoliste bleu-blanc-rouge s'apprêtait à triompher.

    lutte occitaneC’est donc seulement dans les décennies suivant la Seconde Guerre mondiale, dans les forêts de grues et de barres d’immeubles de la ‘reconstruction’ et des ‘Trente Glorieuse’ que nòstra Nacion put sembler anéantie à jamais. Mais à cette même époque, les grandes luttes anti-impérialistes qui secouaient le monde du Vietnam à l’Angola poussèrent une partie de notre Peuple à relever la tête et à se réaffirmer, après trois générations non seulement de suppression politique (celle-ci étant totalement achevée depuis 1789) mais de véritable tentative d’ethnocide, de suppression nationale-culturelle en tant que Peuple. C'était l'époque où l'on pouvait ainsi trouver les marxistes de Lutte occitane (bonne petite présentation au cinquième paragraphe du lien), qui formeront en 1974 un collectif dont le nom-slogan - Volem viure al Païs ! - deviendra célèbre, ou encore les libertaires de la Fédération anarchiste-communiste d'Occitanie (FACO) tandis que les nazillons de Pòble d'Òc, issus de la mouvance d'ultra-droite universitaire montpelliéraine (dont un certain Richard Roudier* qui deviendra le leader local des Identitaires puis de la "Ligue du Midi") et célèbres pour avoir participé à l'agression de Mitterrand au Larzac en 1974 aux côtés de maoïstes et ‘gauchistes’ divers (tandis que Lutte occitane tentait pour sa part de protéger le ‘candidat de la décentralisation’...), étaient eux-mêmes obligés par le fond d'ambiance à se faire passer pour des ‘gauchistes’ ‘libertaires autogestionnaires et anti-impérialistes’... au point que certains finiront par le devenir vraiment !

    Cependant, ce mouvement est resté prisonnier de profondes entraves théoriques : il n'a pas su correctement s'emparer du marxisme révolutionnaire, qui pourtant dirigeait souvent les luttes anti-impérialistes dont il s’inspirait, pour comprendre la Question occitane à sa lumière. S’il connaît par cœur les évènements que nous venons d’exposer et revendique fièrement cette ‘tragédie du Peuple occitan’, il n’a jamais compris leur enchaînement et leur logique matérialiste dialectique... et jamais compris le ferment révolutionnaire formidable que contenaient ses propres revendications, car si la conquête de l’Occitanie a été l'acte de naissance de l’État français capitaliste et impérialiste, la libération de notre Peuple ne peut que signifier sa mort ! Ceci a conduit ce mouvement à la faillite, d’autant plus qu’il ne pouvait pas, comme en Catalogne, compter sur l’appui d’une véritable et puissante bourgeoisie ultra-autonomiste voire indépendantiste : pour des raisons historiques, la grande bourgeoisie occitane est idéologiquement la greve du mineur dans carmaux cartes postales-r0c5702b001(ultra-majoritairement) ‘française’, bien au chaud dans le cadre douillet de l’État français ; elle a pu résister violemment sous l’Ancien Régime mais depuis la Révolution bourgeoise, elle a globalement trouvé son compte (même si c’est en position subordonnée) et ce n’est pas elle qui souffre vraiment de notre négation. La petite et la moyenne bourgeoisie la suivent en grande majorité sur cette position, même si elles peuvent parfois râler (avec un Pierre Poujade par exemple) contre le centralisme et la ‘bureaucratie’ de Paris. S’il y a, en Catalogne ou au Pays Basque, une bourgeoisie dynamique qui se sent (historiquement) ‘parasitée’ par la Castille, dominante politico-militairement mais moins avancée économiquement, en Occitanie la bourgeoisie et autres ‘élites’ nationales ont eu 8 siècles pour se vendre ou disparaître ! Le système dans lequel s'inscrit la bourgeoisie occitane l'implique en position subordonnée : l’État français n'est pas polycentrique comme peuvent l'être l’État espagnol, l'Allemagne ou encore le Canada. Le ‘cœur’ et la ‘clé’ de la question occitane se trouve clairement, totalement et uniquement dans les masses prolétaires et populaires ; il n’y a aucun ‘modèle’ à chercher, pour notre émancipation, au Sud des Pyrénées.

    Le questionnement et la compréhension de ce qui précède a finalement amené, ces dernières années, des militants ‘occitanistes’ de longue date à se saisir de la théorie marxiste et à comprendre, à travers elle, les problèmes contre lesquels ils militaient ; tandis que, de l’autre côté, des communistes révolutionnaires qui ne s’étaient jamais réellement penchés sur la question occitane sont venus à comprendre combien elle était au fondement même de l’existence et, donc, de la continuité de cet État français du Capital qu’ils combattent. Ceci a donné lieu à une très importante (même si, peut-être, encore imparfaite) réflexion et production théorique que l’on peut trouver, notamment, sur les sites Sheisau Sorelh et Servir le Peuple.

    De ce travail théorique ressortent deux conclusions fondamentales :

    carte11°/ Le monde capitaliste que nous connaissons s'est construit à partir de Centres, qui ont concentré au fil des siècles le pouvoir économique, politique et idéologique/culturel, subjuguant des Périphéries où se sont concentrées la misère et l'exploitation ; périphéries en cercles concentriques autour des Centres et de leurs 'antennes-relais', depuis les banlieues-ghettos des grandes métropoles impérialistes jusqu'au plus affamé 'Tiers-Monde'. Ainsi le capitalisme, à partir du moment où il s'est doté d'un bras armé étatique (monarchie absolue puis État bourgeois), a-t-il nié les organisations sociales antérieures. Il est donc logique que la lutte révolutionnaire du prolétariat, négation du capitalisme par le communisme, se déploie des Périphéries en direction des Centres : les Périphéries sont les 'campagnes' de chaque pays et du monde, dans ce qui est la véritable universalité de la Guerre populaire théorisée par Mao et d'autres. Au sein de chaque État capitaliste, les révolutionnaires doivent identifier où sont les 'campagnes' et où sont les 'villes', où sont les Périphéries et les Centres, pour déployer la lutte des premières vers les seconds.

    bc7e7de8Ceci, sans mettre en cause les meilleures et les plus généreuses volontés (laissons de côté les groupes ouvertement ultra-jacobins : POI, CNT-AIT etc.), reste souvent mal compris par beaucoup de personnes et d’organisations révolutionnaires que l’on peut qualifier de ‘centrales’ ; soit de par leur position géographique (‘vraie France’ du Bassin parisien ou ‘centres-relais’ tels Lyon, Nantes etc.) dont elles ne comprennent pas et donc ne remettent pas en question les ‘privilèges’ qui y sont attachés ; soit parce qu’elles perçoivent (consciemment ou non, et à tort ou à raison) leur position/existence sociale comme liée à l’État bleu-blanc-rouge et à l’Empire (fonctionnaires, salariés publics ‘à statut’ ou d’entreprises à commande d’État, aristocrates-ouvriers) ; soit par pure aliénation (sous l’influence des deux premiers cas). Cet État français, elles veulent le transformer en république socialiste, ‘reconnaissant’ éventuellement les ‘cultures régionales’… mais pas le DÉTRUIRE, comme il se doit, pour le remplacer par quelque chose de complètement nouveau, politiquement et socialement, quelque chose qui ne peut d’ailleurs être que l’œuvre des masses en révolution, et non de quelques ‘ingénieurs politiques’ dans un bureau.

    APRÈS 8 SÈGLES…

    2°/ Toute la misère de l''occitanisme' depuis l'après-Seconde Guerre mondiale se résume à s'être placé, pour 90% de ses déjà maigres troupes, dans une perspective RÉFORMISTE (en l’occurrence autonomiste ou 'régionaliste', 'décentraliste', mais eût-elle été indépendantiste comme en Catalogne que pour nous communistes, sans renversement du capitalisme, cela reste du réformisme), ou alors dans une perspective 'autogestionnaire' utopiste, rejetant le marxisme, théorie révolutionnaire gardarem-lo-larzacde notre époque, ce qui revient au même car 'sans théorie révolutionnaire, pas de mouvement révolutionnaire conséquent' (Lénine). Ils n'ont pas envisagé la Question occitane dans le seul cadre qui permette sa résolution : la Révolution prolétarienne mondiale dont la nouvelle vague se lève à présent dans le monde entier ; et l'Occitanie, dans l’État capitaliste français, comme de toute évidence la première 'campagne' dans la lutte révolutionnaire contre celui-ci : la Périphérie (concentration de misère et d'exploitation) la plus grande et la plus peuplée, et de surcroît la plus ancienne ; en fait, la première et fondatrice : c'est précisément de la conquête de nòstra terra et de l'asservissement de nòstre Pòble, il y a 8 siècles, dans le fracas et le sang de Muret, qu'est né le Royaume de France, premier avatar de ce qui allait devenir l'un des principaux États impérialistes de la planète. Faute de placer leur lutte dans cette perspective (la seule correcte), faute de lui donner cette dimension, les 'occitanistes' étaient condamnés à l'échec.

    gaz schiste articleC'est que, n’étant pas ou très ‘vite fait’ marxistes, ils n’ont pas compris le matérialisme dialectique et le matérialisme historique ; ils n’ont pas compris l’Histoire comme un processus de négation de la négation. Engels illustrait cela par l’exemple d’un grain qui en disparaissant donne une plante qui en disparaissant à son tour, donne des dizaines de grains. De la même manière, tout mode de production et tout ‘système’ de société a d’abord nié (aboli, renversé, supprimé) un système inférieur, puis sera nié à son tour par un système supérieur. Le capitalisme, avec son bras armé l’État moderne, a nié le système féodal avec ses ducs, ses comtes, ses barons, ses abbés etc. ; accomplissant par là une douloureuse mais NÉCESSAIRE étape historique pour l'humanité : il a permis un développement sans précédent des forces productives, des sciences et des techniques, arrachant finalement l'humanité à l'impuissance face aux forces naturelles (aléas climatiques, famines, épidémies) ; jamais dans l'histoire le génie humain n'avait été autant stimulé que par la perspective capitaliste d'en tirer un profit financier. D’autre part, et surtout, il a permis l’affirmation de l’humanisme : la reconnaissance et la valorisation de la personne humaine comme maîtresse de son destin, ayant des droits ‘naturels’ et ‘inviolables’ etc. etc., ce qui est logique, car le capitalisme fait de l’être humain le seul propriétaire de sa force de travail, qu’il est certes souvent réduit à vendre, et non plus la propriété d’un maître d’esclave, chose que l’on retrouvait encore au Moyen-Âge dans certaines formes de servage. Tel a été le rôle historique du capitalisme et de l’État moderne ; telle a été la signification de la ‘France’ dans l’Histoire.

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    Mais ce faisant, le capitalisme a aussi démantelé avec une violence inimaginable la communauté populaire précapitaliste (ce que Rosa Luxemburg appelait l'économie naturelle), relativement démocratique et solidaire sous l'autorité féodale qui se contentait de lui prélever régulièrement ses taxes et ‘redevances’ et d’intervenir lorsque l’on faisait appel à elle, mais pour le reste 'faisait sa vie' dans ses châteaux et abbayes ; une communauté populaire traditionnelle dont nous avons eu des exemples jusque très tard – jusqu'en 1789 en fait – avec nos 'républiques' de montagne occitanes (pyrénéennes ou alpines) [de fait l'anéantissement de la langue (thème central pour les "occitanistes" et tous les "régionalistes"/autonomistes/indépendantistes d'Hexagone et d'ailleurs) a été une CONSÉQUENCE de cela, un MOYEN de briser cette cohésion sociale populaire : les jacobins aiment à arguer que le français "nous unit", que "sinon comment ferait-on pour communiquer d'une région à l'autre" etc. etc. mais c'est éminemment FAUX puisque le triomphe du français au 20e siècle a en réalité été celui de l'isolement individuel et de la "juxtaposition des solitudes" dans les grands centres urbains ou les "bassin d'emploi" périurbains plus ou moins sinistrés -  la Cité des Spectres !]. Démantelé en Europe d’abord, comme dans notre Occitanie, puis sur les autres continents où l'irruption de la colonisation européenne entraîna cette fois de véritables génocides, qu’il fallut compenser par l’esclavage des Africain-e-s etc. etc. : en fait, pour les nécessités de son développement, de l’accumulation et de la valorisation du capital, le capitalisme a constamment piétiné d’un côté les valeurs humanistes qu’il générait de l’autre !

    1_8f6fo.jpgCes masses arrachées à leur vie sociale traditionnelle et immémoriale, il en a fait des prolétaires modernes ; et les terres que ses Centres (ses ‘points de départ’) ont peu à peu soumis à la loi de la plus-value, il en a fait des concentrations de misère et d’exploitation, des Périphéries. Mais aujourd’hui, après la révolution industrielle (aux conditions déjà terribles) et l’entrée dans son stade suprême monopoliste et dans sa crise générale quasi-permanente (de 1870 à 1945 puis de 1970 à nos jours), le capitalisme a cessé de jouer tout rôle historique progressiste pour l'humanité : l’heure est venue pour lui d’être renversé, d’être nié, justement par ces Peuples qu’il a transformés en prolétaires, en Périphéries ! L’État moderne français, instrument politique du capitalisme, a anéanti l’Occitanie médiévale ; à présent, c’est son tour d’être anéanti par l’Occitanie comme projet révolutionnaire, l’Occitanie populaire et socialiste, dont la libération sera une petite pierre apportée à l’édifice de la Commune universelle, car le prolétariat et les masses populaires opprimées et exploitées veulent désormais le COMMUNISME.

    José Carlos MariáteguiEt la Commune populaire, cellule de base de la future société communiste, objectif premier de notre lutte révolutionnaire de classe, ne sera finalement rien d'autre que la négation communiste du capitalisme, la négation du capitalisme et de son État moderne qui a lui même nié la communauté populaire précapitaliste ; donc, dans un sens, rien d'autre que la commune urbaine ou la 'république villageoise' occitane médiévale (liquidée par l’État français) à un niveau supérieur, comme pouvaient l'affirmer José Carlos Mariátegui au sujet de la communauté paysanne précoloniale des Andes (ayllu)[2] ou John MacLean pour la communauté 'clanique' écossaise[3], ou même encore… Marx, sur la fin de sa vie, au sujet du mir russe[4]. Mais c'est bien là quelque chose que n'ont jamais compris les 'occitanistes', et sur lequel ils n'ont jamais le moins du monde basé leur combat !

    nouveaux partisansNous en sommes donc arrivés à la conclusion que, dans l’État français, la Question occitane (posée de manière réformiste depuis un demi-siècle par les 'occitanistes') n'a pas d'autre place que dans le cadre général de la révolution prolétarienne ; de la Guerre populaire prolongée qui se déploie depuis les Périphéries de la construction politico-militaire et socio-économique bourgeoise vers les Centres ; nòstra Occitània étant non seulement l'une des Périphéries les plus opprimées en termes de pauvreté, chômage, mépris pour notre peuple et notre écosystème etc., mais aussi et surtout la périphérie FONDATRICE sur laquelle est née l’État français comme projet capitaliste d'exploitation et d'oppression MONDIALE.

    Par conséquent, la Question occitane n'a pas d'autre résolution possible que dans la fondation de l'instrument indispensable aux masses populaires pour mener la lutte révolutionnaire acharnée qui la résoudra : le Parti communiste d'Occitanie

    Ce huitième centenaire de la sanglante bataille du Muret, qui scella la conquête de notre Peuple et, en donnant naissance à l’État français, le sort de tant d'autres sur la planète, est donc l'occasion d'annoncer la formation d'un Comité de Construction pour le Parti communiste révolutionnaire des Terres d'Òc ; instrument de la lutte révolutionnaire de classe dans notre périphérie/'campagne' occitane, en lien avec toutes les autres forces révolutionnaires authentiques de l’État français pour abattre celui-ci, et le capitalisme dont il est le bras armé.

    ÒSCA LO COMITAT DE CONSTRUCCION PEL PARTIT COMUNISTA REVOLUCIONARI DE LAS TÈRRAS D’ÒC !

    PÒPLE D’ÒC ENDAVANT CAP A LA REVOLUCION PROLETARIANA !

    SOCIALISME E LIBERTAT !


            maocbig provence flag 

     

    ENGLISH VERSION HERE :

    Occitany - 8 Centuries Later - A Revolutionary perspective for National and Social Liberation

    THANKS TO COMRADES FOR PUBLISH AND MAKE IT INTERNATIONALLY KNOWN !



    [1] L’Empire, dans l’esprit des masses, c’était les Préfets tout-puissants, nommant les maires etc. : il est donc évident que résister au coup d’État et au retour du bonapartisme c’était refuser cela, c’était vouloir la souveraineté locale du peuple, de la Commune comme collectivité sociale immédiate. Il s'agissait donc d'une résistance des peuples ‘provincialisés’ contre une version ultra-autoritaire de centralisme ‘français’ ; et il est logique que cette résistance ait été très importante en Occitània.

    * Par rapport au commentaire qui nous a été laissé par un ex-membre de l'organisation, citons cet extrait du dossier de la Horde, qui corrobore plus ou moins sa clarification : "Contrairement à la plupart des Identitaires, dont le régionalisme de pacotille se limite à agiter quelques éléments de folklore, l’attachement de Roudier à l’Occitanie et à sa langue, qu’il commence à apprendre adolescent, est à la fois ancien et authentique. C’est également au sein de la lutte régionaliste occitane qu’il fait la connaissance de sa femme Maryvonne, avec qui il fonde en 1971, en compagnie d’un ancien d’Occident, Jean-Louis Lin, le petit mouvement Pòble d’Òc, qui se présente comme « autogestionnaire » et héritier de la Commune de Paris, mais dont la dizaine de militants sont pour l’essentiel issus d’Europe-Action, d’Occident ou d’Ordre nouveau.… Une stratégie confusionniste telle qu’elle fut définie par le Rassemblement socialiste européen, qui invitait les nationalistes à noyauter les milieux gauchistes, et ici appliquée par Roudier, mais sans succès, Pòble d’Òc ayant toujours suscité la méfiance des milieux occitans, qui ne se laissent pas abuser et le qualifient volontiers de fasciste. Quand, au milieu des années 1970, Jean-Louis Lin donne à Pòble d’Òc une orientation internationaliste, en particulier en soutenant le peuple palestinien, et que le mouvement se repositionne comme fédéraliste et libertaire, c’en est trop pour Roudier, qui s’en éloigne en 1976."

    [4]http://bataillesocialiste.wordpress.com/documents-historiques/1881-03-projet-de-reponse-a-vera-zassoulitch-marx/  [Lénine en revanche rejettera ce point de vue, affirmant que le mir n’existait déjà plus depuis longtemps, depuis le 17e  siècle en fait, avec l’émergence en Russie de l’absolutisme et du servage moderne… Mais la question, n’en déplaise à Vladimir Illitch, n’est pas que la communauté populaire précapitaliste existe encore (si en Russie "le paysan était asservi au propriétaire du sol, il ne travaillait pas pour lui-même mais pour le boyard, le monastère, le propriétaire foncier", il en allait exactement de même, depuis des siècles, en Amérique coloniale espagnole et en Écosse sous domination britannique) ; elle est que son souvenir vive encore, même de manière diffuse et non-conceptualisée, dans le cœur des masses et guide leurs aspirations et leurs luttes pour une société meilleure !]

    À lire aussi : La lutte pour le droit à l’autodétermination nationale dans les pays impérialistes, par G. Maj du (n)PCI


    2 commentaires

  • Le 'FLNP' (Front de Libération Nationale de la Provence) a encore frappé… Après une première action, en janvier, contre une agence immobilière à Garéut ('Garéoult') dans le Val d'Issole (l'engin explosif n'avait pas explosé) ; puis une autre en mars contre une autre agence immobilière à Sant Nàri ('Sanary'), faisant des dégâts matériels légers ; c'est le 6 mai dernier un établissement bancaire de la BNP Paribas (l'un des 'géants' financiers BBR) à Draguignan, la 'capitale' administrative du Var, qui a été visé (la bombe de faible puissance a été désamorcée par les forces de l'ordre bourgeois). Mais surtout, pour la première fois, des tracts de revendications ont été retrouvés sur les lieux de l'attaque, permettant enfin (peut-être) d'en savoir un peu plus sur ce 'mystérieux' groupe. L'un de ces tracts, le jour même des évènements, a été reproduit sur le site de la presse régionale de régime, le 'petit empire' Nice/Corse/Var-Matin. Mais voilà : le texte du tract en question était... flouté ! Comme c'est étrange... Se pourrait-il que ce tract dise quelques vérités qui dérangent, dont le système voudrait 'préserver' des masses populaires 'tellement influençables' ? Le 'petit souci' c'est que sans besoin d'être un grand hacker, il est très facile de déflouter légèrement un floutage informatique (du coup ils ont carrément supprimé la photo du tract... mais trop tard, nous l'avions téléchargée ! ).

    pro.jpgVoici ce que nous avons pu en décrypter :

    « ESPECULAIRE ET TOUT (…) DEFORS ! [Spéculateurs et tous (…) dehors !]

    Notre terre est devenue la colonie des spéculateurs et des nantis en tout genre, colonisation encouragée par l’État français, ses élus et subalternes, (qui ?) nous (…) de notre pays.

    La Provence est la terre des Provençaux, nous n’en revendiquons aucune autre, nous entendons bien la défendre par tous les moyens que nous jugerons nécessaires à la libération de notre pays. Tout Provençal doit passer en priorité sur sa terre, dans tous les domaines, acquérir son logement (…) assurer le bien-être de sa famille et de ses enfants.

    QUICONQUE SE CONDUIT EN PAYS CONQUIS CHEZ NOUS SUBIRA LES CONSÉQUENCES DE SES ACTES, TOUS CEUX QUI N’ONT PAS VOCATION À (rester ?) EN PAYS PROVENÇAL DOIVENT QUITTER SANS DÉLAI NOTRE TERRITOIRE, LES TRAÎTRES ET LES VENDUS À L’ÉTAT FRANÇAIS SERONT PLUS DUREMENT FRAPPÉS. TOUS SONT DÉSORMAIS PRÉVENUS.

    PATRIOTE, rejoins la lutte, rejoins le FLNP, rejoins-nous par tes actions contre l’envahisseur, tu regagneras ta liberté.

    LIBERTA PER NOSTRE POBLE, PER NOSTRO TERRA, PER NOSTRO NACIOUN [Liberté pour notre Peuple, pour notre terre, pour notre Nation]

    AVEN UNO LENGO, UNO CULTURO, UN DRAPEU, UNO IDENTITA, UNO TERRA, UN PAIS, PROUVENÇO TERRA NOSTRO. [Nous avons une langue, une culture, un drapeau, une identité, une terre, un pays ; Provence notre terre]

    OSCO PROUVENÇO – FLNP   [VIVE LA PROVENCE – FLNP] »


    En fin de compte... le communiqué ne dit rien de bien 'spécial'. Il ne permet toujours pas de rattacher les auteurs à une idéologie précise. En fait, le groupe semble sur la ligne du nationalisme corse dont il s'inspire manifestement (ne serait-ce que déjà pour le nom...) ; il se veut sans doute, comme celui-ci, 'rassembleur' en évitant les propos ‘idéologiquement tranchés' – ce qui, à notre sens, est peut-être 'payant' dans l'immédiat mais une erreur à long terme. Pour autant, rien que cela semble déjà intolérable pour le système bourgeois bleu-blanc-rouge et sa presse aux ordres… Quant à l’‘occitanisme de régime’, ces ‘bouffons de la République’ comme il y avait jadis des bouffons du roi (phénomène bien abordé ici), il dit ‘comprendre et partager totalement’ les revendications du FLNP sur la question immobilière (qui, en même temps, affirmerait sérieusement être ‘pour’ la crise du logement ??) mais condamne la ‘violence’, pourtant jusqu’ici ‘zéro morts/zéro blessés’ mais qui ‘pourrait’ en faire selon eux. Comme si la première violence n’était pas celle subie par les familles populaires incapables de trouver un logement décent… et de toute manière, tout révolutionnaire conséquent sait bien qu’il n’y a pas de plus grands terroristes que les États qui nous dirigent (et dirigent le monde).

    Le ‘FLNP’ considère peut-être qu'il faut d'abord 'libérer' la Provence, se séparer de l’État français et ensuite... il y aura une 'démocratie' (bourgeoise) avec une 'droite' et une 'gauche', des élections et des alternances ; simplement, un ‘gouvernement des Provençaux par les Provençaux’ (comment les définit-on d’ailleurs, qui est provençal et qui ne l’est pas ?) serait 'naturellement' plus conforme à 'l'intérêt général' des habitants de la Provence... C'est là une conception fondamentalement erronée, démentie par des dizaines de néo-colonies à travers le monde : si l'on ne pose pas la QUESTION DU POUVOIR, de QUELLE CLASSE DIRIGE (prolétariat à la tête des classes populaires – petits employés, paysans pauvres etc.  ou petite minorité de bourgeois), on ne résout rien comme le disait déjà dans les années 1910 le héros révolutionnaire irlandais James Connolly : "Si dès demain vous chassiez l’Armée anglaise et hissiez le drapeau vert sur le Château de Dublin, à moins que vous ne proclamiez la République socialiste, vos efforts auraient été vains. L’Angleterre continuerait à vous dominer. Elle vous dominerait par l’intermédiaire de ses capitalistes, de ses propriétaires fonciers, de ses financiers, de toutes les institutions commerciales et individualistes qu’elle a plantées dans ce pays et arrosées des larmes de nos mères et du sang de nos martyrs".

    cote_d_azur_ferienhaus.jpgPar 'spéculateurs' il faut très certainement entendre les spéculateurs IMMOBILIERS, et par 'nantis' les grands bourgeois héliotropes ('cherche-soleils') qui infestent la région de leurs résidences secondaires : la 'campagne' actuelle du groupe est en effet essentiellement dirigée contre la PRESSION IMMOBILIÈRE, comme l'attestent les deux premières cibles ; une pression (prix du mètre carré) devenue, dans ce département de Provença, absolument intolérable pour les classes populaires. Ce point avait déjà été abordé, après l'action de Sant Nàri, dans un article du blog 'frère' Sheisau Sorelh à ce sujet.

    Mais, et c'est sans doute là le plus important à souligner, le communiqué de revendication s'en prend clairement à l’État français, 'ses élus et ses subalternes' ('caciques' locaux qui sont un élément structurel de l'organisation sociale occitane sous domination BBR et cadres administratifs, policiers, judiciaires et militaires) et les ‘traîtres et vendus’ à lui, qui sont 'désormais prévenus'. L’État semble ici bien identifié comme l’ENNEMI PRINCIPAL, création et arme de l’oppresseur bourgeois (comme les 'spéculateurs et nantis' en question) ; et non comme un simple 'complice' d'un autre phénomène déplaisant, que l'on pourrait réussir à 'détacher' de celui-ci : pression immobilière, ravages environnementaux ou 'mondialisation marchande' si l'on est sur une ligne 'altermondialiste' ; 'mort du petit commerce', 'racket' du fisc et des radars routiers ou 'immigration incontrôlée' si l'on est sur une ligne poujadiste fascistoïde. C'est là un antagonisme assumé qui est, pour nous, hautement positif ; un antagonisme pour lequel, déjà, une grande majorité de la 'gauche radicale' hexagonale n'a pas de leçons à donner au 'FLNP'. Généralement l'extrême-droite (profondément implantée dans la région, tant le FN que les Identitaires) est profondément respectueuse de l’État, certes ‘corrompu’ par une 'élite mondialiste' mais restant intrinsèquement 'sain' et même 'l'ultime recours' de 'ceux qui n'ont plus rien'. Plus largement, l'extrême-droite rejette les attaques et les dégradations tant contre les 'biens publics' (que l'on 'paye avec nos impôts'), à l'exception peut-être des radars routiers, des agences du fisc ou de l’URSSAF (les 'racketteurs') que surtout  contre la 'propriété privée' – sauf bien sûr lorsqu'elle est 'allogène' : épiceries arabes, kebabs, mosquées voire cimetières musulmans etc., là ‘on peut dévaster’ sans problème ! Et si pour dénoncer la ‘finance mondialisée’ et ‘apatride’ il y a toujours ‘du monde’, l’on trouvera rarement des attaques contre la spéculation immobilière… et pour cause : les cadres politiques d’extrême-droite sont souvent, comme tous bons bourgeois BBR, de ‘jolis’ ‘petits’ propriétaires de ‘parcs’ fonciers !

    Une autre chose qui mérite d'être soulignée, sur ce point, c'est que le communiqué n'évoque à aucun moment des thématiques réactionnaires comme 'l'immigration', 'les étrangers', 'les Arabes' (même comme 'instruments' de l'État français dénoncé), forcément ‘délinquants’ et ‘parasites’, sur un territoire où la question est pourtant 'bien présente' et les propos xénophobes à ce sujet font partie pour ainsi dire du 'fond de l'air'... C'est plutôt positif, car cela serait totalement incompatible avec une démarche de libération révolutionnaire occitane telle que nous la concevons : dans notre Occitanie conçue comme projet révolutionnaire nous affirmons être un Peuple du Nord de la Méditerranée, un 'pont' entre l'Europe et l'Afrique, entre l''Occident' et l''Orient' ; et de toute manière, l'immigration (dont les immigré-e-s et les 'colonies intérieures' eux/elles-mêmes sont les premières victimes) comme le racisme envers celle-ci ne sont que les conséquences de l'impérialisme français dont nous-mêmes, Occitans, avons été les premières victimes sacrificielles et fondatrices voilà 8 siècles. Être raciste fut-ce sur un mode paternaliste  envers les ‘extra-européens’, c’est un ‘reflet dans la pensée’ de l’histoire (et du présent !) impérialiste de la ‘France’ : ÊTRE RACISTE C’EST ÊTRE (idéologiquement) ‘FRANÇAIS’, ce que le FLNP affirme vouloir rejeter.

    En Hexagone l'extrême-droite est généralement tout au plus 'régionaliste' ; l'on ne peut guère citer comme extrême-droite réellement 'séparatiste' (qui attaquerait l'appartenance à l'État français dans ses tracts) qu'Adsav en Bretagne et sans doute quelques courants néo-nazis alsaciens... ces forces ne manquant jamais de pointer du doigt "l'immigration-colonisation" comme "arme de l'État français jacobino-mondialiste". Mais ces thèses d'"ethnocide immigrationniste" développées par ces groupes (ainsi que parfois par certains courants en Corse) sont absurdes et ne tiennent pas la route : pourquoi l’État français voudrait-il remplacer les Provençaux (et les Occitans en général), les Bretons ou les Corses par une population réputée encore moins gérable, dont on sait pertinemment (et l'on voit tous les jours) qu'elle nécessite une mobilisation policière permanente, et non (tout simplement) par de bonnes petites classes moyennes du Bassin parisien qui ne demandent que cela vivre et travailler (ou passer leur retraite) au soleil ? Ce qui est d'ailleurs le cas et que (précisément) combat le FLNP – mais ce n'est pas non plus véritablement une "politique de peuplement" pour "faire disparaître" la population locale ; plutôt une logique capitaliste d'exploitation d'un marché (celui de "l'immobilier au soleil") au détriment des besoins populaires locaux et que l’État (instrument de domination du Capital) protège comme tous les "marchés" capitalistes... La vérité c'est qu'entre 1945 et les années 1980 a été "importée" de la force de travail des anciennes colonies françaises (ou des 'DOM-TOM') pour les besoins du capitalisme français, phénomène concernant tout l'Hexagone, parce que la force de travail hexagonale n'était pas suffisante et/ou pas assez facilement exploitable par rapport à ces besoins. De fil en aiguille, ces travailleurs ont fait souche dans des quartiers transformés en ghettos ("quartiers sensibles") où ils ont eu des enfants et maintenant des petits-enfants, qui sont maintenant l'essentiel des "Arabes" et des "Noirs" présents en Occitanie comme ailleurs. Aujourd'hui il y a toujours des personnes qui veulent immigrer sur le territoire de l’État français, certaines y parviennent mais la position de l’État est qu'elles ne sont pas les bienvenues "étrange" : pourquoi n'en "remplirait"-il pas ces territoires dont il veut supposément voire "disparaître" la population autochtone, au lieu de leur donner la chasse avec des moyens policiers impressionnants ? Il n'y a pas de "politique" française visant à faire "coloniser" nos pays par des extra-européens ; et les immigrés-et-descendants sont tout ce que l'on voudra sauf la cause des problèmes de nos Peuples. Aller sur ce terrain-là c'est déjà avoir rendu les armes face à l’État français et au capitalisme bleu-blanc-rouge sous direction parisienne (dont il est l'instrument de domination).

    provence_libre.jpgNous en sommes encore (nous aussi !) au stade de l'enquête, sans laquelle pas de droit à la parole ; mais pour l'instant les premiers éléments sur le 'FLNP' semblent plutôt positifs - en tout cas pas rédhibitoires, pas de 'carton rouge' a priori. Peut-être que le FLNP – là encore sur une ‘ligne corse’ – prône pour une ‘communauté de destin’ : ‘indigènes métropolitains’, Maghrébins et autres Comoriens, soyez ‘provençaux de cœur’ et il n’y aura pas de problème ! Malheureusement c’est là une vision totalement idéaliste des choses, qui sont beaucoup plus compliquées : les ‘immigrés’ et leurs descendants, en Hexagone, sont les ‘ambassadeurs’ d’un autre cercle de l’Empire BBR ; les ‘Méridionaux’ plus anciennement ‘avalés’ par la construction étatique et impériale, plus ‘proches du Centre’, sont ‘au-dessus’ des immigrés-et-descendants dans l’‘échelle des valeurs sociales’ ; et cela ne peut pas plus être résolu par un simple ‘appel’ à ‘se sentir provençaux’… que par un simple ‘appel’ à ‘se sentir français’ !

    Le gros 'point noir' du communiqué, pour terminer, c'est son côté 'provençaliste' : écrit (pour les passages en occitan provençal) dans la graphie de Mistral, affichant en en-tête les couleurs sang et or de la région (sans aucun symbole idéologique distinctif), il ne fait nulle part mention de l'occitanité de la Provence, encore moins de sa méditerranéité ; il n'inscrit aucunement les problématiques strictement provençales (voire strictement varoises) dans la vaste question méridionale de l'Hexagone en général ; il n'évoque à aucun moment les grandes luttes populaires radicales en 'Espagne' proche ou en Italie pourtant voisine, ni au Maghreb dont les ports de Marseille et Toulon sont la 'porte'. Il n'intègre pas la dimension occitane qui seule, selon nous, est potentiellement révolutionnaire (sans l'être automatiquement). Il n'est pas question pour nous (c'est évident) d'imposer un quelconque 'jacobinisme occitan', de 'dupliquer' sur notre terre le 'rouleau égalisateur' que nous a imposé l'État français depuis 3 ou 4 siècles ; nous respectons et respecterons toujours les différentes variantes dialectales et les cultures populaires régionales de nostra Occitània. Mais historiquement, les courants qui cherchent à 'démembrer' régionalement l'Occitanie en ‘insistant’ sur sa diversité régionale (Provence, Auvergne, Béarn etc.) sont plutôt du côté de la réaction, ou alors finissent par y tomber tôt ou tard…

    De même la référence à 'l'identité', sans plus de précisions, peut être inquiétante... Pour nous, l''identité' en soi, cela ne veut rien dire sinon semer le plus grand confusionnisme de classe et idéologique. 'Identité', de la même racine latine que ‘identique’, n'a de sens qu'entendu comme ensemble d'êtres humains unis par 1°/ un même cadre POLITIQUE, 2°/ un même cadre ÉCONOMIQUE (communauté de vie productive, avec un mode de production principal), 3°/ un même cadre CULTUREL et IDÉOLOGIQUE : langue commune, culture commune (en tout cas commune au niveau de chaque classe de l'organisation sociale), 'sentiment' de commune appartenance, 4°/ éventuellement un projet historique commun. En Provence, le cadre politique a été le comté de Provence, catalan (puis aragonais) à partir du 11e siècle, puis passant aux ducs d'Anjou (frères cadets des rois capétiens de 'France') au 13e siècle avant d'être définitivement rattaché à la couronne en 1480. Le mode de production principal était alors FÉODAL, 'chapeautant' une économie 'holiste' communautaire-patriarcale dans les campagnes tandis que dans les centres urbains le capitalisme était déjà en développement assez avancé. La Provence a gardé une certaine 'identité' politique comme province (généralité, gouvernement militaire et ressort de parlement) sous l'absolutisme, tandis que le capitalisme se développait et 'balayait' petit à petit la féodalité. Puis, pour les Provençaux comme pour les autres 'Hexagonaux', la 'France', la 'Patrie française' avec son drapeau bleu-blanc-rouge, a été de 1789 jusqu'en 1871 (environ) le 'cadre' politique et idéologique de la révolution bourgeoise (comme projet historique) jusque dans sa plus extrême radicalité démocratique (1793-94, 1848, 1870-71), mais 'butant' et 'trébuchant' toujours au seuil de la révolution prolétarienne ; ainsi que le 'cadre' économique de la révolution industrielle ; et du coup... 'naturellement' le 'cadre' de la contre-révolution, des tentatives de barrer la route à cela : c'est ainsi que le poète-écrivain Frédéric Mistral, 'père' du provençalisme et plutôt du côté de la contre-révolution [1], pouvait dire "nous les Provençaux sommes de la grande France, franchement et loyalement" ("li Provençau, flamo unanimo, sian de la grande Franço, e ni court ni coustié"). Charles Maurras de Martegue (‘Martigues’), ‘fils spirituel’ de Mistral sur le plan culturel, ne dira pas autre chose quelques années plus tard. Culturellement et idéologiquement, les classes ‘supérieures’ ont à travers ces siècles globalement ‘fusionné’ avec leurs homologues hexagonales pour former les ‘honnêtes gens’, les ‘bons français’. La culture provençale a subsisté au niveau populaire, dans la 'ruralité' et dans la classe ouvrière naissante que celle-ci ira alimenter tout au long des 18e et 19e siècles (chant emblématique de l'Occitanie révolutionnaire, la Libertat verra le jour lors de la Commune de Marseille en 1871) ; puis, à partir de la fin du 19e siècle, elle subira elle aussi le 'rouleau compresseur' d'une idéologie BBR au stade des monopoles - l'on apprit alors à 'parler français et être propres'... Lorsque par trois fois (aux dates ci-dessus) la bourgeoisie eût écrasé la plus petite tentative d’affirmation autonome du Peuple travailleur, et qu’elle fût entrée concomitamment dans la première crise générale du capitalisme, alors la Provence (‘Midi rouge’ à l’époque), l’Hexagone et l’humanité entière entrèrent dans l’ère de la révolution prolétarienne ; et il n’y eut plus aucun ‘projet historique commun’, donc plus aucune ‘identité’ entre les masses populaires et leurs exploiteurs : la ‘croisade’ du FLNP contre la spéculation immobilière n’exprime pas autre chose que cet antagonisme d’intérêts inconciliables. Aujourd'hui, donc, l''identité' provençale/occitane est (en soi et encore plus pour soi, ‘consciemment’) bien mal en point : elle ne peut être que RESSUSCITÉE et cela n'est possible qu'à travers 1°/ un État révolutionnaire socialiste, fédération de Communes populaires, comme cadre politique, 2°/ une économie socialiste, collectiviste, mettant les travailleurs au poste de commandement et pavant la voie vers le communisme, comme cadre économique, 3°/ la transition révolutionnaire socialiste vers le communisme, la Révolution prolétarienne mondiale comme projet historique commun (relié à l’humanité entière !), 4°/ une culture populaire révolutionnaire provençale/occitane de type nouveau, mettant 'l'ancien au service du nouveau' (notamment la fonction de pont sur la Méditerranée qu'avait l'Occitanie indépendante du Moyen-Âge !) mais tournée vers l'avenir communiste, et non vers un 'folklore' du passé. Bref, cela n’est possible qu’à travers un projet révolutionnaire. Faute de saisir cela, le FLNP reste encore très largement sur une ligne nationaliste petite-bourgeoise ‘à la corse’, ligne qui a précisément conduit dans l’ornière la LLN de ce pays, dont il semble manifestement s’inspirer[2].

    Il est évident que si le 'FLNP' se révélait finalement être un groupe nauséabond, d'idéologie identitaire réactionnaire/fasciste, peut-être des 'dissidents' du Bloc identitaire local (forcément des dissidents, car le BI lui-même ne commettrait jamais de tels actes contre la sacro-sainte 'propriété privée'… ‘blanche et européenne’), toute l''extrême-gauche' BBR jacobinarde se ferait un plaisir de nous tomber dessus à bras raccourcis, 'coupables' que nous serions d'avoir 'pactisé' avec la 'bête immonde'... SAUF QUE nous serions les SEULS à avoir ENQUÊTÉ, à avoir cherché à savoir et à comprendre au lieu d'attendre bien sagement que... LES FLICS, les gardiens du Capital, fassent leur boulot pour se livrer ensuite à la curée sur les 'régionalistes fascisants'. Et sauf que (peut-être), lorsque des millions de personnes ayant les toutes les raisons du monde de faire la révolution (comme la pression immobilière par exemple !) 'préfèrent' tomber dans les bras idéologiques de l'extrême-droite... l''extrême-gauche' hexagonale ferait bien de commencer par se poser des questions sur elle-même ! À bon entendeur...

    Si, au contraire, le FLNP s’alimente d’une conception du monde ‘progressiste-révolutionnaire’, c’est alors la critique ‘classique’ du militarisme, de l’ultra-avant-gardisme armé qui doit s’exprimer : le FLNP doit parvenir à soulever, à se lier avec et à diriger un grand mouvement de masse contre (ne serait-ce que) cette pression immobilière dont il fait le cœur de son combat et qui ravage effectivement la Provence littorale ; sans quoi il restera une petite ‘minorité agissante’ coupée des grandes masses – qui seules font l’histoire. Rappelons-nous que même un mouvement aussi formidable que le mouvement socialiste-révolutionnaire de libération basque a connu cette dérive tragique pour son volet armé ; tandis que le volet ‘légal’ (illégalisé en 2002, mais bon...) se diluait dans une ‘gauche abertzale’ aux vagues contours ‘national-altermondialistes’…

    Pour le moment, wait and see...


    big provence flag

    [1] La réalité de la pensée politique mistralienne serait cependant beaucoup plus complexe... et le conservatisme catholique-royaliste anti-1789 ou le nationalisme réactionnaire avec ses 'petites patries' (comme la Provence) dans la 'Grande' (française) seraient plus le fait de ses 'continuateurs' comme Maurras ou Léon Daudet que de l'intéressé lui-même. Une complexité de parcours politique qui expliquerait la présence dans le Félibrige (dont Mistral revendiquait farouchement l'apolitisme) d'autant sinon plus de 'rouges' (républicains 'radicaux', socialistes ou socialisants et anticléricaux mais hostiles aux centralisme 'français' de Paris) que de 'blancs' nostalgiques (opportunistes) de l'Ancien Régime et des ses 'libres' provinces...

    [2] Rien d’étonnant, en fait, à cela ; car le Var a une ‘morphologie sociale’ et des ‘problématiques’ très comparables à celles de la Corse.

     

    À lire aussi (sans que cela ne veuille dire que nous partageons tout le propos) :

    http://7seizh.info/2013/05/13/front-de-liberation-nationale-de-la-provence-flnp-le-point-de-vue-diniciativa-per-occitania/

     

    Une série d’actions armées, qui n’ont fait aucune victime, vient d’un nouveau groupe clandestin: le Front de Libération Nationale de la Provence ou FLNP. Cette organisation a attaqué deux agences immobilières (Garéoult, 21.1.2013; Sanary-sur-mer, 23.3.2013) et une banque (Draguignan, 6.5.2013). Elle a laissé sur place des tags et des tracts qui revendiquent une “Provence libre” et qui dénoncent la spéculation immobilière.

    Iniciativa per Occitània, le laboratoire politique, prend les positions suivantes :

    1. En Provence comme dans le reste de l’Occitanie, il est légitime de se révolter contre la spéculation immobilière parce qu’elle prive les classes populaires de l’accès au logement et parce qu’elle dévaste l’environnement.

    2. La spéculation immobilière est encouragée par l’État français basé à Paris, par certains patrons sans scrupules et par l’absence d’un pouvoir politique proche des citoyens, en Occitanie en général et en Provence en particulier.

    3. Il est légitime de faire obstacle sur le terrain aux spéculateurs immobiliers et à l’État français centraliste. Pour ce faire, Iniciativa per Occitània préconise l’action politique ouverte, aux yeux de tous, non agressive, dans l’espace public.

    4. Iniciativa per Occitània ne croit pas en l’action armée clandestine, essentiellement parce qu’elle risque de provoquer des blessures chez des personnes innocentes. Les passants, les clients et les travailleurs salariés qui se trouvent dans les banques et les agences immobilières ne sont pas les responsables de la spéculation immobilière. Il faut garantir leur intégrité physique.

    5. Iniciativa per Occitània, sans approuver la méthode, comprend le sentiment de révolte et de désespoir qui a pu conduire à la création du FLNP. Et nous insistons sur le fait que les responsables ultimes du problème qui se pose, en tout cas, restent les spéculateurs immobiliers et l’État français centraliste.

    6. Iniciativa per Occitània dénonce les médias en langue française qui ont retenu l’information à propos du FLNP : ils ont cité le sigle “FLNP” sans expliquer ce qu’il signifie, ou bien ont publié une photo brouillée d’un tract du FLNP qui empêche de le lire en entier. Les citoyens d’Occitanie, et de Provence en particulier, ont le droit de savoir tout ce qui se passe pour se forger leur propre opinion.

    7. Nous souhaitons savoir exactement quelles sont les motivations politiques et idéologiques du FLNP, qui demeurent, à l’heure actuelle, peu connues.

    8. Iniciativa per Occitània rappelle, en tout cas, qu’une lutte de libération nationale doit se mener en cherchant une large adhésion populaire, à l’échelle de toute l’Occitanie, et que la Provence est une partie de la Nation occitane.

    Occitània liura!
    Free Occitània!

    Lo 12 de mai de 2013
    INICIATIVA PER OCCITÀNIA

     


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