• Ce n'est pas que nous croyions tant que cela aux perspectives que peut apporter la participation électorale... Mais ces attaques, qui se développent quasiment à la veille du scrutin sur l'air de la lutte contre le "communautarisme" et même le "séparatisme" (!!), sont bien à comprendre (comme l'affaire de la candidate voilée du NPA à Avignon en 2010, une de nos premières grosses polémiques...) dans un esprit de guerre contre une partie du peuple : les "indigènes" colonisés intérieurs des quartiers dits "sensibles".

    L'objectif, sous-entendu de manière à peine voilée, étant de faire du "communautarisme" (qui n'apparaît pas encore, dans la plupart des études, comme une préoccupation majeure des électeurs...) l'un des enjeux des municipales dans certaines villes, notamment en région parisienne. Le président du groupes des Républicains au Sénat, Bruno Retailleau (dans son rôle d'"aiguillon" réactionnaire qui est celui de la droite dans le Système), a quant à lui d'ores et déjà appelé à "la mise sous tutelle républicaine" des communes dirigées par des élus "complices des islamistes"... 

    https://www.france24.com/fr/20200218-emmanuel-macron-à-mulhouse-pour-lutter-contre-le-séparatisme-islamiste

    Et ceux qui, "ici et là", centrent leurs luttes sur "la classe ouvrière", ou "les questions nationales" (blanches) etc., bref des (soi-disant) "questions plus centrales" que celles des "quartiers" et du colonialisme intérieur ("racisme"), feraient bien le cas échéant de s'enlever leurs œillères et de se dépouiller de leurs (éventuels) petits sectarismes à la con ; car de fait, la répression contre le mouvement des Gilets Jaunes a déjà prouvé que les menées contre cette partie précise des masses populaires sont toujours tôt ou tard vouées à s'étendre à d'autres secteurs qui deviendraient "remuants"...


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  • 2000 personnes environ malgré les difficultés de transport etc... Pas si mal, en réalité. C'est par exemple ce qu'avait réuni la grosse manif antifasciste de Lyon en 2010 (et quel pire, plus dangereux fascisme que celui de l'État policier lui-même contre les quartiers et les colonisés intérieurs qui y vivent !!) ; et c'est plus que (hélas pour nous... mais c'est ainsi) la mobilisation pour les langues régionales du 30 novembre.

    Le meilleur retour dessus, sera certainement celui des concernées elles-mêmes : 


    https://blogs.mediapart.fr/collectif-de-defense-des-jeunes-du-mantois/blog/181219/marche-des-mamans-bilan-et-suites

    Marché des Mamans de Mantes-la-Jolie


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  • Soutien de Lassana et Youssouf, deux frères d'Adama Traoré, à Georges Ibrahim Abdallah qui a lui-même témoigné par courrier son soutien à leur autre frère Bagui, PRISONNIER POLITIQUE de la lutte des quartiers populaires et des colonies intérieures d'Hexagone.

    #Force

    Communiqué du 28 mars APPEL POUR BAGUI TRAORÉ, le 25 AVRIL 2017 à VERSAILLES

     


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  • http://lmsi.net/Vous-avez-dit-race-sociale

    Vous avez dit « race sociale » ?


    Lettre ouverte à mes camarades anarchistes.

    par Geoffrey 
    30 novembre 2015


    Samedi 7 novembre 2015 avait lieu à Lyon, à la librairie libertaire « La Gryffe », une conférence intitulée « Anarchisme et Islam ». Cet article ne traitera pas du contenu de la conférence mais plutôt du débat qui en a découlé. Au cours de ce dernier une personne que je considère comme une camarade de lutte, musulmane et voilée, en est venu à parler du terme de « race sociale ». Grosse erreur ! S’en est suivie plus d’une demi-heure d’attaques envers cette camarade au cours de laquelle elle fut traitée de « racialiste », accusée d’utiliser des termes d’extrême droite. En sous texte il lui a été reproché de ne pas avoir une analyse de classe du racisme.

    J’écris cet article pour enfoncer le clou. Je suis blanc et communiste libertaire comme l’écrasante majorité des personnes qui ont attaqué ma camarade. Dire ceci est central pour ce qui va suivre. Je précise aussi que j’ai l’appui de ma camarade pour écrire ce texte : elle a jugé qu’il était bon de donner mon avis d’anar blanc sur le sujet, elle a relu ce texte et je le publie parce qu’il lui convient.

    L’anarchisme et l’extrême gauche en général ont un problème avec le concept de race. Et comment peut-il en être autrement puisque de prime abord ce terme peut résumer à lui seul deux périodes les plus honteuses de l’Histoire de l’Occident : la colonisation et l’Holocauste où des millions de personnes sont mortes, les premières Noir.e.s et Arabes, les secondes Juif.ve.s et Tziganes pour la plupart, seulement parce qu’ils étaient considérés racialement comme inférieur à l’Homme blanc et chrétien. C’est-à-dire que cette infériorité, pour les bourreaux de ces génocides, résidait dans le code génétique de leurs victimes.

    On pourrait donc comprendre pourquoi l’utilisation du terme de race dans une conférence libertaire puisse susciter l’émoi. Ma camarade serait donc une nazie puisque elle utilise ce terme ?

    Eh bien pas du tout.

    Pour le comprendre, il est fondamental de faire la distinction entre race biologique et race sociale. Ma camarade ne croit pas en l’existence de la race biologique, elle ne croit pas qu’un peuple, qu’une ethnie, qu’une couleur de peau soit supérieure à une autre. Elle croit en l’existence des races sociales. Ce qui signifie qu’au sein d’une société structurellement raciste, les institutions de cette société et la population « racialisent » les individus. En France un.e Noir.e, un.e Arabe, un.e Rrom n’aura pas la même place dans la société qu’une personne de couleur blanche. Face au marché du travail, face au logement, face à la police, face aux différentes institutions un.e blanc.he est avantagé.e face à une personne « racisé.e ».

    Il ne s’agit pas là de racialiser la question sociale, mais plutôt l’inverse, de socialiser la question raciale : d’expliquer que le concept de race, s’il n’est pas une réalité biologique est une réalité sociale : un Rrom est considéré par l’État français et son racisme systémique comme un Rrom en premier lieu, et non comme un « individu » et encore moins comme un « citoyen ». Ainsi, dire qu’il n’y a pas de différence entre lui est moi est au mieux de la naïveté, au pire de l’hypocrisie républicaine. Je ne suis évidemment pas supérieur à lui, mais ma place dans la société que me confère ma couleur de peau et mon identification comme étant français m’accorde sur tous les points de nombreux avantages. C’est ça la race sociale.

    Alors elle est « une ennemie de classe » ?

    « Elle préfère un bourgeois racisé à un prolo blanc » ?

    Et bien, encore une fois c’est une mauvaise réponse.

    Premièrement parce que la lutte des classes ma camarade ne la théorise pas, elle la vit au quotidien, elle fait partie des franges de la population les plus précaires et n’a donc aucune leçon à recevoir de militants qui sont pour la plupart profs.

    Secondement, mes très cher.e.s camarades blancs devraient se pencher sur ce qu’on appelle « l’intersectionnalité des luttes » qui prend en compte, dans un combat pour l’émancipation, la dimension de classe, de race et de genre. Cette approche révolutionnaire, contrairement à celles qui prédominent dans les milieux anarchistes et communistes, ne croit pas en la hiérachisation des luttes au profit de la lutte des classes.

    Autrement dit, toutes les luttes sont imbriquées les unes aux autres : la lutte des classes ne peut se faire et ne doit pas se faire sans lutte contre le racisme, contre le sexisme, contre l’homophobie, la lesbophobie, la transphobie, le validisme… Un patron noir et trans reste donc un patron, mais sa position d’ennemi de classe ne justifie pas par contre les attaques racistes et transphobes qu’il peut subir. Mais il n’est pas un camarade, il est bien considéré comme un ennemi de classe. Cela étant dit, le point de vue intersectionnel amène à souligner le fait que ce patron noir et trans’ est rare – la condition trans comme la condition noire étant synonyme de surexposition à la précarité sociale, et la condition blanche et bio étant au contraire sur-représentée dans la CSP chef d’entreprise…

    S’ils s’étaient penchés sur ce concept ils auraient su de quoi parlait ma camarade, ils auraient su qu’on ne pouvait pas objectivement la taxer de sympathisante d’extrême droite.

    [NDLR nous préciserons ici que ce racisme structurel s'inscrit totalement dans le cadre du capitalisme et vise à fournir à ce dernier la dose de surexploitation* qu'il nécessite pour fonctionner ; étant lui-même le produit de l'impérialisme colonial (qui perdure à présent sous la forme du néo-colonialisme) qui avait le même objectif à l'époque de la "révolution" industrielle. Cette manière dont les systèmes capitalistes (États modernes et Empires) se sont construits en "Centres" (où "remonte" et se concentre la richesse) et "Périphéries" (où se concentrent l'exploitation et la surexploitation) se retrouve également dans les déséquilibres/inégalités entre territoires au sein même de l'Hexagone... en particulier les territoires (et populations) dont la conquête à travers les siècles a "fait" la "France" telle que nous la connaissons ; et ceci jusque dans la superstructure lorsque par exemple les habitants de certains territoires sont qualifiés de "chômeurs, pédophiles et consanguins" ou de "consanguins qui crevaient dans les mines", ceux de tels autres sont vus comme des "paysans" ou comme des "feignasses" hâbleurs dont l'accent n'est pas le bienvenu dans les emplois qualifiés et bien payés, etc. etc. ; TOUT CECI ÉTANT BIEN SÛR un "cercle de périphérisation" "supérieur" au "cercle" colonial et aux colonies intérieures (à l'intérieur de la métropole hexagonale : les racisé-e-s) qui en sont issues, non-comparable et "privilégié" par rapport à celui et celles-ci - l'ordre social structurel, en clair, ne consiste pas en des "monolithes empilés" ("les bourgeois" au-dessus des prolos, "les blancs" au-dessus des non-blancs etc.) mais plutôt en une pyramide dont le sommet est la bourgeoisie blanche hétéro-masculine (avec son petit quota d'executive women à la Parisot), formant elle-même une pyramide dont le sommet est la bourgeoisie blanche parisienne, celle dont les tours de la Défense sont le repaire.]

    Le privilège blanc

    Tout ce débat pose la question du privilège blanc. Pendant la conférence, l’un des conférenciers, pour répondre à ma camarade, lui a expliqué que tout le monde dans la salle était anti-raciste, et que pour la plupart ils ou elles avaient participé a des manifestations antiracistes. Je ne doute pas ici de la sincérité des participants ni de leur engagement. Mais le racisme peut être appréhendé sous deux angles différents :

    - la discrimination : le tort causé aux personnes qui le subissent, une dimension qui est connue et admise (bien que souvent sous-estimée, et dédramatisée) par l’ensemble des personnes qui se sentent concernées par la lutte antiraciste, elles ont bien intégré que les personnes victimes de racisme était donc discriminées.

    - l’autre versant, beaucoup moins évident, qui est le bénéfice voulu ou non qu’en tirent les non-victimes : et notamment les personnes identifiées comme blanches, catho-laïques, de souche…

    Personne ne dit que les blanc.he.s sont mauvai.se.s, qu’elles ou ils profitent volontairement du racisme structurel. Pour autant, que je le veuille ou non je profite de cet état de fait : je suis favorisé à l’embauche, dans la recherche d’appartement, j’ai moins de chance de me faire refouler de boite de nuit, de me faire suivre par un vigile dans un supermarché, de subir des contrôles policiers abusifs qui finissent souvent mal, je subis moins le mépris des institutions et des aides sociales…

    Dans nos sociétés je suis considéré comme la norme, je ne suis pas racialisé, je ne suis que très rarement renvoyé à ma couleur, et n’ai donc que très rarement l’obligation de me définir en tant que tel. Ici, il n’est pas question en tant que blanc, de s’autoflageller, de culpabiliser ou d’avoir honte mais seulement de reconnaitre notre position privilégiée dans la société.

    Ce privilège ne veut pas dire non plus que je ne peux pas être précaire, avoir une vie de merde, être pauvre, cela veut juste dire que l’ouvrier-e racisé-e, le ou la précaire racisé-e, le chômeur ou la chômeuse racisé-e, a un désavantage supplémentaire face à son homologue non-racisé-e. Je peux certes subir une violence symbolique tout en étant blanc, mais pas en tant que blanc : des contrôles de police que je peux subir en tant que militant, dans un cadre précis. J’ai déjà connu la violence physique, l’humiliation et le mépris de la police, mais uniquement dans un cadre militant : en dehors de ce cadre je n’ai jamais de problème avec la police.

    Je peux également subir de la discrimination dans un rapport de classe avec des personnes de classes supérieures me renvoyant à mon inculture par rapport à leur norme, mais cela demeure sans commune mesure avec ce qu’ils pourraient faire subir à des personnes issues de l’immigration post coloniale et/ou des quartiers populaires. Bref : le racisme étant quelque chose d’institutionnalisé, ma couleur de peau fait tout de même de moi un privilégié.

    Mes camarades blancs, qui ont une grille d’analyse n’expliquant les rapports de dominations que par le biais de la classe ont donc une grande difficulté à se définir comme privilégiés du fait de leur couleur de peau, et cela d’autant plus quand ils sont ouvriers. Encore une fois, il ne s’agit pas de dire que nous ne pouvons pas connaitre la galère, mais seulement qu’à compétence et situation économique égale, notre position dans la société sera meilleure ou moins pire que celle d’un racisé.

    Si mes camarades ont autant de mal à comprendre ce privilège c’est premièrement du fait de leur carcan idéologique, qui peut les enfermer dans une interprétation simpliste du monde social actuel : la France et le monde ouvrier en général ne sont plus ce que Bakounine et Marx ont connu de leur temps. Si la lutte des classes reste éminemment pertinente pour appréhender une dimension des oppressions systémiques, les torts spécifiques subis par les personnes racisées sont à prendre en compte s’il l’on veut aboutir à une réelle révolution intersectionnelle.

    Mais la difficulté à prendre en compte ce privilège est avant tout entretenue par l’État, qui a tout intérêt à maintenir cette hiérarchisation et donc à faire intégrer, à nous personnes blanches, que nous sommes la norme. Mes camarades se braquent quasi-systématiquement et crient au racisme quand on parle de « blancs », en répondant « mais non, pas tous les blancs ! ». Le privilège blanc est à comprendre comme un système de valeur et de normalisation : ici on ne parle pas d’individus responsables de racisme, on parle d’une structuration raciste de la société qui privilégie les blancs.

    Ma camarade croit donc aux races sociales, disais-je. Ce n’est en fait pas le terme exact : elle n’y croit pas, elle les vit, sachant que sa situation est encore particulière puisqu’en plus d’être une racisée, elle porte le voile, et subit donc une triple oppression raciste, sexiste et islamophobe. Corollairement, j’ai donc un triple privilège face à elle : je suis un homme blanc et rien chez moi ne laisse supposer une quelconque appartenance religieuse.

    J’ai aussi le privilège de pouvoir parler de privilège blanc sans me faire taxer de raciste, sans que l’on me prenne pour un hystérique. Inconsciemment, dans la tête de mes camarades, je suis plus légitime, plus crédible. Et je m’énerve moins, car je ne suis pas touché directement, quotidiennement, à répétition, par ces attaques.

    Et pourtant ce n’est pas moi la personne la plus légitime pour parler de ça, ce n’est pas moi qui vit le racisme au quotidien, mais bien ma camarade. Ceci pose un autre souci : nous avons un problème avec le fait de nous taire, d’écouter les premiers concernés sur leur propre vécu, et d’en tirer les enseignements sur nos comportements pouvant reproduire des situations de dominations paternalistes, au sein même d’un milieu qui s’est donné pour but de les combattre. La plupart d’entre nous refusent tout simplement de se remettre en question. [NDLR exactement et c'est ce qui rend le dialogue difficile voire carrément "de sourds" à ce sujet : l'ordre social tel qu'il est établi constitue le "râtelier" d'énormément de personnes (à vrai dire presque tout le monde y bouffe, y compris les racisé-e-s par rapport aux néo-colonisé-e-s resté-e-s au "bled", d'où la volonté d'"intégration" qui en anime encore beaucoup et le mépris des "blédards" que l'on peut entendre ici ou là... exactement comme hier celui qui était "monté à la ville" pour y devenir ouvrier qualifié ou employé de bureau pouvait mépriser le "paysan" de son propre Peuple, rejeter la culture et la langue, mêler le drapeau tricolore au drapeau rouge et la Marseillaise à l'Internationale tout ça tout ça lol ; allez voir ce qui se dit de la question bretonne sur Indymédia Nantes et vous verrez)... et cela un nombre tout aussi énorme refuse de l'admettre, a fortiori quand ils/elles ont un train de vie jugé "modeste" et ne se considèrent donc "pas du tout comme des priviliégié-e-s" (voire montent sur leurs grands chevaux : "priviliégié(e) moi !?! de quel râtelier parles-tu, connard d'intellectuel petit-bourgeois !?").]

    Le prétendu « racisme anti-blanc »

    Pendant le débat un intervenant a exprimé que lui aussi dans certaines ZEP pouvait être victime de racisme… Sous-entendu : il pouvait être victime de racisme « anti-blanc », terme cher à l’extrême droite, popularisé par l’organisation « Bloc identitaire » et réutilisé par la droite classique comme Jean-François Copé. Alors soyons clair : le racisme anti-blanc n’existe pas. Car c’est quoi le racisme, d’abord ? Le racisme est un système d’oppressions structurelles visant les personnes racisées en s’appuyant sur des lois, sur des représentations sociales et médiatiques, sur des normes culturelles et sur une réécriture de l’Histoire, légitimant par exemple le discours colonisateur des nations impérialistes.

    Par conséquent, si je peux connaitre la mésaventure de me faire insulter à cause ma couleur de peau, ou de subir des actes violents, cela reste néanmoins ponctuel, et sans commune mesure avec le racisme structurel que seul un non-blanc peut subir. Je ne peux honnêtement pas comparer un « sale blanc » avec ce que pourra subir une femme noire portant le voile, par exemple. Si je peux être confronté à des préjugés, j’ai la chance et le privilège qu’ils ne soient pas légitimé par des représentations médiatiques et des discours politiques, et qu’ils ne me coûtent pas ma scolarité, mon emploi, mon logement, ma tranquillité quotidienne.

    Une femme peut me traiter de « sale mec », ou tenir des propos essentialisants, globalisants et désobligeants sur « les hommes » : pour autant il ne me viendrait jamais à l’esprit de parler d’un « sexisme à l’envers » ou d’une oppression des femmes sur les hommes – et pas davantage des pauvres sur les riches. Eh bien c’est pareil dans la relation entre blancs et non-blancs : en tant que libertaire, je ne peux pas mettre un pied d’égalité le vécu des dominants et des dominés.

    Si la lutte des classes et le combat contre l’État et le capitalisme font partie de nos priorités, la reconnaissance par l’ensemble de l’extrême gauche de l’existence d’un privilège blanc, de races sociales et leurs incidences sur les racisé.e.s est indispensable, d’abord pour ne pas reproduire les dominations présentes dans la société, ensuite pour construire une solidarité entre toutes les personnes précaires, qu’elles soient blanches ou non.


    * L'on peut parler de SUREXPLOITATION lorsque l'on est à la limite permanente de ne même plus permettre la reproduction des conditions d'existence de la force de travail (c'est-à-dire du travailleur...). Une manière de fonctionner qui ne PEUT PAS être la manière générale du capitalisme, car si celui-ci produit c'est pour VENDRE (comment, sinon, dégager des profits et reproduire le Capital ?) et il a donc besoin d'acheteurs, qui ne peuvent pas être simplement 5 ou même 10% de bourgeois et autres personnes aisées. Il lui faut donc des personnes "simplement exploitées", c'est-à-dire à qui leurs revenus laissent une "margeounette" pour consommer. Mais pour que ces personnes puissent exister et exister en quantité conséquente, il est NÉCESSAIRE que d'autres, sur le territoire qu'une bourgeoisie donnée contrôle, soient dans ces conditions de surexploitation (ce qui signifie, en substance, définir et assigner à cette position des "ultra-pauvres" pour que puissent exister des "moins pauvres", que l'on pourra en sus aliéner en leur disant qu'ils ne sont "pas les plus à plaindre").

    [Attention cependant : la surexploitation, vouée à dégager un profit maximal sur investissement (surprofit), intègre aussi des considérations de productivité du travail, de développement technologique (augmentant la productivité) ainsi que d'établissement de situations de monopole (réduction radicale voire élimination pure et simple de la concurrence : quoi de mieux pour les affaires ?). Ceci peut entraîner des situations paradoxales : ainsi par exemple, on imagine difficilement plus surexploités que les esclaves africains des colonies européennes en Amérique ; puisqu'il suffisait souvent de les maintenir en vie quelques années pour tripler ou quadrupler l'investissement représenté par leur achat ("gagner leur tête" disait-on à l'époque). Sauf que voilà : 1°/ comme déjà dans l'Antiquité, la productivité de personnes privées de toute liberté et non-rémunérées pour leur travail s'avérait finalement médiocre comparée à celle d'un travailleur libre, 2°/ pour ces mêmes raisons de productivité, ainsi que pour de simples raisons de sécurité, il était difficile voire impossible de concentrer des centaines et des centaines voire des milliers d'esclaves sur une même plantation (ce qui gênait donc la concentration du travail, et allait contre la constitution de monopoles), 3°/ cette méthode productive était difficile pour ne pas dire impossible à mettre en œuvre en dehors du secteur agricole (certes indispensable à l'économie mais dont la valeur ajoutée, même en agriculture extensive, reste somme toute modeste), dans l'industrie en plein essor notamment, 4°/ elle était incompatible avec le progrès technologique (mécanisation de l'agriculture), voué de toute façon à la faire disparaître, 5°/ les esclaves, qui représentaient le tiers de la population dans le Sud des États-Unis et 80% ou plus dans les Caraïbes, ne pouvaient pas (cf. ce que nous avons dit plus haut) représenter un marché (débouché commercial pour la production) de manière significative. Ce sont toutes ces raisons (et l'on pourrait encore sans doute en citer d'autres), et non des considérations d'"humanité", qui ont amené au 19e siècle les bourgeoisies européennes et américaines à pencher majoritairement en faveur de l'abolition de l'esclavage, bien que celui-ci représentât (à première vue) la forme d'exploitation la plus totale (et donc le profit maximal tiré de la force de travail) que l'on puisse imaginer. Si l'on adopte une vision "arithmétique" de la définition marxiste "classique" de la surexploitation, les paradoxes ne manquent de toute façon pas : les travailleurs les plus exploités pourraient ainsi bien être, par exemple... les footballeurs, si l'on mettait en perspective leurs (multimillionnaires) revenus annuels avec ce qu'ils rapportent à leurs clubs. C'est pourquoi une vision plus "humaine", basée sur la notion de reproduction des conditions d'existence, nous a semblé plus appropriée.]


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  • L’ordre sécuritaire et le soulèvement des quartiers populaires - Retours sur la bataille de Villiers-le-Bel


    Extrait de l’ouvrage collectif "Vengeance d’état - Villiers-le-Bel : des révoltes aux procès" écrit par le collectif Angles Morts. Cet extrait a été mise en page sous forme de brochure et revient sur la bataille de Villiers-le-Bel fin novembre 2007.

    Brochure sur la bataille de Villers-le-Bel à télécharger en bas de page. Extrait de l’ouvrage collectif "Vengeance d’état - Villers-le-Bel : des révoltes aux procès" écrit par le collectif Angles Morts et publié aux éditions Syllepse en 2011.


    L’ordre sécuritaire et le soulèvement des quartiers populaires - Retours sur la bataille de Villiers-le-Bel

    Mathieu Rigouste [1]

    « Que la guerre à la drogue provoque plus d’abus policiers, une répression plus puissante et la suspension des libertés civiles pour tous les habitants des quartiers ne devrait pas surprendre, étant donné la longue histoire de la police des communautés de couleur. La relation coloniale qui structurait originellement la présence policière reste pratiquement inchangée. Comme des armées d’occupation avec quasiment aucun lien organique dans le quartier auquel elles sont assignées, ces forces de police de la grande ville n’opèrent pas différemment des forces impériales d’hier : chaque sujet colonisé est suspect. Il est rare ce policier, même parmi les Noirs, les Latinos et les femmes, qui voit sa tâche principale comme le fait de travailler pour ou d’être employé par les communautés de couleur des quartiers pauvres. Au lieu de cela, la police travaille pour l’État et la municipalité, et son rôle est de garder à vue une population entièrement criminalisée, de contenir le chaos entre les murs du ghetto et de s’assurer que les plus indisciplinés restent dans le rang. »

    Robin D. G. Kelley [2]

    L’impérialisme occidental est entré dans une nouvelle phase d’expansion à la fin du 20e siècle. Pour se restructurer, il attaque et dépossède les derniers territoires qui résistent encore à l’accumulation illimitée du profit et de la puissance [3]. À l’intérieur même des pays dominants, les quartiers populaires concentrent celles et ceux qui pro­fitent le moins de l’ordre en place et qui ont donc le plus intérêt à s’en débarrasser. Ces quartiers sont pris entre les mâchoires de l’État et du capital : une double stratégie, politique et économique qui cherche à les encadrer et à les provoquer, à les contenir et à les attaquer, pour les soumettre, les transformer ou détruire ceux qui entravent encore l’extension des mégalopoles.

    Mais les terrains de chasse du système sécuritaire ne se laissent pas écraser sans combattre. Villiers-le-Bel est une bataille importante dans cette longue campagne inachevée. Elle a permis d’expérimenter de nouvelles technologies de contrôle, de surveillance et de répression, elle a médiatisé ces savoir-faire et les matériels français sur le marché international de la sécurité intérieure. Elle a servi à criminaliser davantage la révolte des quartiers populaires. Mais elle devait aussi offrir une revanche aux policiers victimisés durant les batailles de Clichy-sous-Bois (octobre-décembre 2005). Humiliés une nouvelle fois, caillassés par des adolescents et de jeunes adultes, insultés par leurs parents, méprisés par des retraités, une partie de ces policiers est entrée dans un processus de radicalisation. Pendant la guerre d’Algérie, la contre-insurrection avait déjà débordé. Une fraction fasciste s’était alors constituée à l’intérieur de l’armée et avait tenté de prendre le pouvoir. L’ordre sécuritaire, lui, se confronte à un problème de débordement dans la police.

    Il faut montrer que les révoltes des quartiers populaires s’inscrivent dans la longue histoire des résistances à la domination impérialiste. Analyser l’influence des techniques de guerre coloniale sur les nouvelles méthodes de répression, le rôle des marchés politiques et économiques de la sécurité, décrire les contradictions et les failles dans la police. La bataille de Villiers-le-Bel nous parle des transformations à l’œuvre dans les stratégies et les armes, les forces et les faiblesses de l’oppresseur.

    Lire la suite sur http://www.bboykonsian.com/L-ordre-securitaire-et-le-soulevement-des-quartiers-populaires-Retours-sur-la-bataille-de-Villiers-le-Bel_a2563.html


    Ici en PDF

    Un texte ultra-intéressant : "La bataille de Villiers-le-Bel" par Matthieu Rigouste (8 ans après le début des émeutes qui avaient frappé cette banlieue francilienne)

    Un texte ultra-intéressant : "La bataille de Villiers-le-Bel" par Matthieu Rigouste (8 ans après le début des émeutes qui avaient frappé cette banlieue francilienne)


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  • Près de 10.000 personnes (3.500 selon la police... chiffres que pour le coup la "gauche" francouillasse reprend allègrement) ont marché ce samedi entre Barbès et Bastille à l'appel d'une longue liste de collectifs et d'organisations :


    http://www.politis.fr/Suivez-la-marche-de-la-dignite,32868

    Cliquer sur les photos pour voir les portfolios ou les vidéos :

    Succès de la Marche de la Dignité + un article sur les luttes ouvrières colonisées-intérieures du début des années 1980

    Succès de la Marche de la Dignité + un article sur les luttes ouvrières colonisées-intérieures du début des années 1980

    Succès de la Marche de la Dignité + un article sur les luttes ouvrières colonisées-intérieures du début des années 1980

    Succès de la Marche de la Dignité + un article sur les luttes ouvrières colonisées-intérieures du début des années 1980

    Succès de la Marche de la Dignité + un article sur les luttes ouvrières colonisées-intérieures du début des années 1980

    Succès de la Marche de la Dignité + un article sur les luttes ouvrières colonisées-intérieures du début des années 1980


    Cette Marche, dont le succès n'est donc pas en discussion d'un point de vue quantitatif, se voulait dans la continuité-rupture de celle ("pour l’Égalité") de 1983 dont le "cycle historique" est à présent complètement refermé - et donc, le point de départ d'un nouveau cycle.

    Avec une beaucoup plus nette dimension de lutte des classes ; autrement dit la compréhension que le racisme structurel qui "charpente" la société hexagonale est une superstructure (léguée par les siècles d'histoire) enrobant la surexploitation* dont le capitalisme a besoin, à côté de l'exploitation "normale", pour exister ?

    C'est ce que l'avenir nous dira - en attendant, la mobilisation telle qu'elle a été a suffi pour faire éructer hystérique (et dans un style 100% fasciste moderne) le très républicard délégué interministériel à la "lutte contre le racisme et l'antisémitisme", ainsi que bien évidemment les habituelles poubelles de l'histoire fourestiennes [et avec quelques jours de retard, car cela ne pouvait pas louper, nos chers et incontournables pseudo-"maoïstes" morano-zemmouro-onfraysiens (qui s'imaginent encore, visiblement, que quelqu'un peut prendre leur "orthodoxie communiste" et leurs délires de "complot qatari" au sérieux après ce qu'ils nous ont pondu début septembre)].

    Dans cette perspective, il sera toujours intéressant de lire ou relire cet article de la revue Contretemps montrant comment entre 1982 et 1984, la fameuse et très médiatisée Marche de l’Égalité avait occulté un autre phénomène - peut-être - bien plus profond : les très dures luttes menées dans les usines automobiles par les ouvriers (OS) amenés de l'Empire (néo-)colonial pour (justement) y être surexploités ; autrement dit les pères des "beurs" qui se faisaient flinguer par la police dans les cités HLM et qui avaient (donc) marché jusqu'à Paris pour réclamer la fin des discriminations.

    Histoire de se rappeler - peut-être - que derrière l'islamophobie, le racisme et les crimes policiers, les "quartiers" ce sont d'abord des prolétaires qui fournissent au capitalisme hexagonal la "dose" de surexploitation dont il a besoin pour fonctionner. Et en 1983, au sujet de ces luttes, les prédécesseurs P's' du triste sieur Clavreul évoquaient ni plus ni moins que... "la main de Téhéran" ou de Tripoli (comme aujourd'hui les pseudo-"maoïstes" du 'p''c''mlm' nous servent celle "du Qatar"... les mecs qui ont tout compris avec juste 30 ans de retard quoi). CQFD.


    Des grèves de la dignité aux luttes contre les licenciements :les travailleurs immigrés de Citroën et Talbot, 1982-1984

    Le début des années 1980 est une période de mutations profondes, à l'échelle internationale comme en France. Les élections respectives de Ronald Reagan et Margaret Thatcher annoncent le vaste tournant politique qui est alors en train de s'opérer, qui va faire de la décennie le grand cauchemar que décrit François Cusset1 à propos du cas français. Ce grand cauchemar se caractérise entre autres par la mise à l'index des utopies soixante-huitardes, le reclassement d'une partie des élites issues de l'extrême-gauche, et plus largement par le déploiement d'un consensus entre les principales forces politiques autour de la nécessité d'un programme économique néo-libéral.

    Si ce regard a posteriori est pleinement justifié, il ne saurait masquer un certain nombre de questions que des luttes sociales mettent au grand jour au début de la décennie. Parmi celles-ci, l'immigration, et plus particulièrement le devenir des populations immigrées ou héritières de l'immigration, est l'enjeu de nombreux conflits et mobilisations. Or, si la marche pour l'égalité et contre le racisme en décembre 1983 est demeurée dans les mémoires, faisant du beur de deuxième génération une figure médiatique, les grèves menées par les ouvriers immigrés de l’automobile de la région parisienne posent la question du devenir d'un salariat particulièrement dominé et exploité, dans une industrie en constante restructuration.

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    Succès de la Marche de la Dignité + un article sur les luttes ouvrières colonisées-intérieures du début des années 1980


    Ne pas oublier le meeting organisé par le Bloc Rouge à Aubervilliers, le 21 novembre à partir de 15h00.



    * L'on peut parler de SUREXPLOITATION lorsque l'on est à la limite permanente de ne même plus permettre la reproduction des conditions d'existence de la force de travail (c'est-à-dire du travailleur...). Une manière de fonctionner qui ne PEUT PAS être la manière générale du capitalisme, car si celui-ci produit c'est pour VENDRE (comment, sinon, dégager des profits et reproduire le Capital ?) et il a donc besoin d'acheteurs, qui ne peuvent pas être simplement 5 ou même 10% de bourgeois et autres personnes aisées. Il lui faut donc des personnes "simplement exploitées", c'est-à-dire à qui leurs revenus laissent une "margeounette" pour consommer. Mais pour que ces personnes puissent exister et exister en quantité conséquente, il est NÉCESSAIRE que d'autres, sur le territoire qu'une bourgeoisie donnée contrôle, soient dans ces conditions de surexploitation (ce qui signifie, en substance, définir et assigner à cette position des "ultra-pauvres" pour que puissent exister des "moins pauvres", que l'on pourra en sus aliéner en leur disant qu'ils ne sont "pas les plus à plaindre").

    [Attention cependant : la surexploitation, vouée à dégager un profit maximal sur investissement (surprofit), intègre aussi des considérations de productivité du travail, de développement technologique (augmentant la productivité) ainsi que d'établissement de situations de monopole (réduction radicale voire élimination pure et simple de la concurrence : quoi de mieux pour les affaires ?). Ceci peut entraîner des situations paradoxales : ainsi par exemple, on imagine difficilement plus surexploités que les esclaves africains des colonies européennes en Amérique ; puisqu'il suffisait souvent de les maintenir en vie quelques années pour tripler ou quadrupler l'investissement représenté par leur achat ("gagner leur tête" disait-on à l'époque). Sauf que voilà : 1°/ comme déjà dans l'Antiquité, la productivité de personnes privées de toute liberté et non-rémunérées pour leur travail s'avérait finalement médiocre comparée à celle d'un travailleur libre, 2°/ pour ces mêmes raisons de productivité, ainsi que pour de simples raisons de sécurité, il était difficile voire impossible de concentrer des centaines et des centaines voire des milliers d'esclaves sur une même plantation (ce qui gênait donc la concentration du travail, et allait contre la constitution de monopoles), 3°/ cette méthode productive était difficile pour ne pas dire impossible à mettre en œuvre en dehors du secteur agricole (certes indispensable à l'économie mais dont la valeur ajoutée, même en agriculture extensive, reste somme toute modeste), dans l'industrie en plein essor notamment, 4°/ elle était incompatible avec le progrès technologique (mécanisation de l'agriculture), voué de toute façon à la faire disparaître, 5°/ les esclaves, qui représentaient le tiers de la population dans le Sud des États-Unis et 80% ou plus dans les Caraïbes, ne pouvaient pas (cf. ce que nous avons dit plus haut) représenter un marché (débouché commercial pour la production) de manière significative. Ce sont toutes ces raisons (et l'on pourrait encore sans doute en citer d'autres), et non des considérations d'"humanité", qui ont amené au 19e siècle les bourgeoisies européennes et américaines à pencher majoritairement en faveur de l'abolition de l'esclavage, bien que celui-ci représentât (à première vue) la forme d'exploitation la plus totale (et donc le profit maximal tiré de la force de travail) que l'on puisse imaginer. Si l'on adopte une vision "arithmétique" de la définition marxiste "classique" de la surexploitation, les paradoxes ne manquent de toute façon pas : les travailleurs les plus exploités pourraient ainsi bien être, par exemple... les footballeurs, si l'on mettait en perspective leurs (multimillionnaires) revenus annuels avec ce qu'ils rapportent à leurs clubs. C'est pourquoi une vision plus "humaine", basée sur la notion de reproduction des conditions d'existence, nous a semblé plus appropriée.]

     


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  • Un très bon article à lire :


    Une révolte qui échoue, c’est 20 ans de répression (Quartiers Libres)


    Il y a dix ans, le 28 octobre 2005, en plein mois de Ramadan, les « banlieues françaises » s’enflammaient après la mort violente de gamins poursuivis par des flics. Muhittin Altun, Bouna Traore et Zyed Benna couraient pour échapper à des policiers qui n’avaient aucun motif sérieux pour les poursuivre. De ces trois mômes s’étant finalement réfugiés dans un transformateur EDF, Muhittin Altun fut le seul survivant.

    Zyed_Bouna_10_ans

    Des gamins d’un quartier populaire, la police nationale, des vacances scolaires et le Ramadan : tout était réuni pour que les choses virent au tragique.

    Un simple regard sur les statistiques des crimes racistes et sécuritaires suffirait à montrer que, depuis plusieurs décennies, ceux-ci sont ancrés dans les mœurs françaises. Le drame du 28 octobre 2005 n’est pas isolé : il y en a eu trop avant et après pour que l’on puisse le traiter isolement. Cependant, la singularité de cette séquence, c’est qu’à la suite du décès des mômes, la révolte a explosé dans les quartiers, à travers la France entière, malgré les appels au calme.

    Depuis 1983, le phénomène en lui-même est un éternel recommencement : des jeunes se font tuer sans raison – parce que personne ne mérite de mourir à cet âge et de cette manière, quelles que soient les circonstances – et le quartier se soulève en signe de solidarité et de protestation. La nouveauté, c’est que la dureté de la vie, dans toute son homogénéité pour les classes populaires vivant en « zones sensibles », « ZUP », « cités », « banlieues », « quartiers populaires », va transformer cette révolte locale en embrasement général.

    C’est un révélateur de l’évolution du climat social en France.

    Les conditions se sont dégradées à tel point que la mort de gamins d’un quartier éloigné et le traitement de ces évènements par les médias et les institutions incitent mécaniquement à la révolte dans toute la France.

    Avec l’aide des médias, de par la qualité de leur mise en scène, les habitants des quartiers populaires vont alors effrayer les classes dirigeantes ainsi que leurs « voisins » des zones pavillonnaires pendant tout le mois de novembre 2005, faisant trembler l’Occident tout entier, de Berlin a New York en passant par Londres.

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    "20 ans de répression" (enfin, là on en est à 10 ans mais ce n'est évidemment pas fini), c'est effectivement la première chose qui doit venir à l'esprit et y rester présente avant toute prétention à analyser la portée de ces évènements : le "système" a eu peur, et c'est cette peur qui domine et détermine encore très largement le contexte politique dans lequel nous vivons et luttons aujourd'hui.

    En réalité même des phénomènes politiques comme le dieudo-soralisme, les divers et variés "islamismes" et autres courants idéologiques réactionnaires (suprématisme noir "kémite" etc. etc.), sans même parler de l'individualisme "gangsta" en mode capitalisme extra-légal, peuvent être analysés dans cette perspective de "contre-subversion" ; et ce ne sont pas là nos "délires complotistes et (forcément) antisémites", mais carrément des personnes s'affirmant "Juifs et Juives révolutionnaires" qui le laissent entendre ouvertement : de même que la drogue (l'héroïne notamment) et l'esprit de gang fratricide ont été "injectés" massivement dans les ghettos US à l'époque des Black Panthers et des Brown Berets, on ne peut pas exclure que ces thèses politiques réactionnaires et (surtout) stériles aient été "injectées" dans les "quartiers" d'Hexagone après la "Grande Peur" de 2005 (enfin, elles étaient déjà présentes un peu voire bien avant, mais la "menace des banlieues" l'était déjà aussi), afin de mener les consciences politiques émergentes dans une voie de garage. Après tout (comme le rappellent "Juifs et Juives révolutionnaires"), la méthode a déjà pu être utilisée en Algérie coloniale : les Juifs y avaient obtenu la citoyenneté française, les séparant ainsi d'une population indigène dont ils faisaient pourtant partie depuis près de 2.000 ans ; mais en contrepartie, des groupes de colons bien francaouis agitaient et propageaient aussi la haine anti-juive dans les masses musulmanes arabo-berbères afin de détourner vers les Juifs (utilisant ces derniers comme "paratonnerre" en quelque sorte) la colère anticoloniale qui devait normalement les viser eux...

    Il n'est même pas nécessaire, à vrai dire, d'imaginer un "complot", un "plan" élaboré dans les bureaux d'un quelconque "service spécial" : il s'agit simplement là, dans une période d'explosion de la contestation et de l'antagonisme, des "défenses immunitaires" du "système" qui s'activent "naturellement" en l'absence de véritable organisation révolutionnaire permettant de les surmonter. Ceci rejoint finalement ce que nous avons toujours dit et répété sur Dieudonné et Soral : plus qu'une idéologie et un programme susceptibles de prendre réellement le pouvoir (et donc d'exercer une véritable menace...), un poison "stérilisateur" pour les consciences politiques émergentes et "discréditeur" pour les luttes où ils ramènent systématiquement leur fraise.

    Par rapport à tout cela, on va peut-être encore nous reprocher de "tout le temps parler d'eux" mais enfin, c'est tout de même dans la critique des positions des autres que l'on expose le mieux les siennes : la position du 'p''c''mlm' pour ce dixième anniversaire est absolument évocatrice ; évocatrice à vrai dire de toute leur évolution politique au cours de ces 10 dernières années. En effet, après avoir évalué les évènements à leur juste valeur, ce que trop peu à l'"extrême-gauche" avaient effectivement fait à l'époque, ils ont placé en ceux-ci des espérances totalement idéalistes et, ces espoirs déçus, ont alors basculé dans une amertume qui les a amenés vers des positions de plus en plus réactionnaires (cf. leurs propos actuels sur les "quartiers", l'immigration etc. etc.). Une vision, en réalité, totalement linéaire et "perfectionniste" du mouvement réel et des processus historiques en développement, ignorant complètement tous les obstacles à commencer par celui qu'évoque Quartiers Libres - celui de la "contre-révolution immense" (comme disait Marx) qui va systématiquement se dresser devant les poussées révolutionnaires et les mises en danger de l'ordre dominant de cette ampleur ; ainsi que toutes les contradictions internes propres à un tel mouvement, toute la sinuosité du chemin de la libération pour des millions d'hommes et de femmes.

    Une recherche, aussi, de "l'unité des masses" à tout prix ("cet effet de division au sein des masses populaires françaises", "fracture des masses populaires entre les secteurs populaires des banlieues (...) et les masses de la 'France profonde'", "échec de l'union des masses") ; débouchant à l'arrivée sur un étrange concept de... "démocratie populaire" en pleine métropole impérialiste (ou encore une célébration de "l'esprit Charlie" comme "plus grand mouvement de masse depuis 1945") ; alors que c'est peut-être malheureux à dire, mais Lénine nous a enseigné que la révolution comme "accouchement de l'histoire dans la violence" n'a que peu de chances de consister en une "armée" des classes populaires faisant face à une autre, celle de la bourgeoisie et - disons - des gens gagnant plus de 3 000 € par mois : les unes représentant au moins les 3/4 de la population, et les autres au maximum un quart, les choses seraient un peu trop faciles ! Non, c'est malheureux à dire mais même si la tâche des communistes est bien sûr de rassembler le maximum de forces sociales sous leur drapeau et de briser le plus possible les aliénations à la classe dominante (briser le "bloc historique" adverse...), dans un processus historique révolutionnaire il va aussi y avoir des masses populaires non seulement "indifférentes" ou "peu enthousiastes" mais carrément HOSTILES au dit processus : des masses aliénées qui combattront la révolution et que les masses révolutionnaires devront combattre.

    Du clan Le Pen à Alain Soral en passant par Zemmour, Onfray, Finkielkraut, Chouard, Michéa et autres "briseurs de pensée unique" (que ce soit en mode "néocon" islamophobe ou "rouge-brun" à plus ou moins forte tendance antisémite), les idées les plus réactionnaires sont exaltées comme "ce que pense vraiment le vrai peuple" des "petits" et des "sans-grade" ; mais comme l'écrivait très justement le philosophe marxiste Adorno, "glorifier les malheureux pauvres diables (aliénés) revient bien souvent à glorifier le merveilleux système (capitaliste) qui fait d'eux ce qu'ils sont"...

    La révolution est le paroxysme de la politique, la politique est clivage ou n'est pas et la révolution sera donc aussi un affrontement entre deux parties des masses populaires, deux "BLOCS HISTORIQUES" selon la conception de Gramsci. Aussi déplaisante soit-elle, il faut se faire à l'idée !

    Ce que nous essayons simplement de faire, c'est peut-être de remettre (un peu) en cause un certain nombre d'idées fausses très ancrées dans la "gauche radicale", partagées par le 'p''c''mlm' et partagées y compris par les auteurs de travaux scientifiques sur lesquels nous nous appuyons, comme le "géo-sociologue" (d'idéologie plutôt "chevènemento-séguiniste"...) Christophe Guilluy : il est ainsi (par exemple) FAUX d'affirmer que "les masses populaires de province/'France profonde'", des périphéries, se sentant "seules et abandonnées de tous", auraient "choisi de soutenir le Front National" (et seraient donc, en toute logique, des ennemies jurées et irréconciliables des révoltes de banlieue que nous défendons ici). Une simple mise en parallèle de la carte des "périphéries" (dressée grâce aux travaux de Guilluy lui-même) avec celle du vote Front National montre en effet que celui-ci est d'abord et avant tout un vote d'"entre centres et périphéries", "géographiquement petit-bourgeois" si l'on peut dire, ce que viennent encore confirmer les études "sociologiques pures" confrontant le vote FN chez les "ouvriers non-précaires" à emploi stable (l'aristocratie ouvrière), où il est effectivement très au-dessus de la moyenne générale, et chez les prolétaires précaires où il est nettement plus faible et où le vote à gauche (valant ce qu'il vaut, on vous voit venir...) reste majoritaire. Les "périphéries profondes" non seulement des grandes métropoles (les fameux "quartiers" dont nous commémorons aujourd'hui le soulèvement) mais aussi "provinciales"/rurales ne votent pas particulièrement FN et font parfois même preuve d'un très fort antagonisme populaire comme on a pu le voir récemment à Flers (Orne, 15.000 habitant-e-s) après l'arrestation brutale de deux jeunes pour faits de cannabis, à Pont-de-Buis (Finistère, Breizh-Izel) contre l'armement militaire des forces de répression et en mémoire de Rémi Fraisse ou encore sur les diverses "ZAD" de Notre-Dame-des-Landes ou encore de Sivens (et tss-tsss pas de "ce sont des étudiants bobos gauchistes venus des grandes villes universitaires" : la jeunesse populaire locale est très impliquée dans ces luttes) ; ceci sans même parler du très fort et très antagonique militantisme autour des questions de libération nationale comme en Corse ou au Pays Basque (la conscience de Peuple nié imprégnant aussi fortement les luttes en Bretagne ou en Occitanie) : ces "territoires sociaux" (puisqu'il faut parler clairement, et puisque vous connaissez déjà nos thèses sur le sujet...) font partie selon nous, aux côtés des "zones urbaines sensibles"/"territoires perdus de la République", du "bloc historique" qui doit affronter le Capital et son État et livrer la guerre révolutionnaire en Hexagone. [Sur ce nécessaire "bloc historique" à constituer, lire ici Saïd Bouamama  et  ici "Pour un internationalisme domestique" d'Houria Bouteldja.]

    L'on passera sur la "convocation" au débat du... référendum européen de juin 2005, "séquence politique" qui n'a que très peu intéressé et mobilisé les quartiers populaires concernés par les émeutes 6 mois plus tard, et dont nous ne voyons pour tout dire pas le rapport avec le sujet. Le rejet du Traité constitutionnel européen (contrairement par exemple au Traité de Maastricht en 1992) a principalement résulté du "basculement" momentané d'une partie du PS (incarnée notamment par Laurent Fabius) en sa  défaveur* ; partie du PS mue par des considérations d'opposition électoraliste à l'UMP (alors au pouvoir) et très vite revenue par la suite à ses fondamentaux sociaux-libéraux et européistes ; autrement dit il n'a pas fondamentalement fait bouger les lignes et les rapports de force (les... "blocs historiques") sur la (très "blanche") question pro- ou anti-UE, et encore moins (bien sûr) dans le sens d'une "déferlante nationaliste et social-chauvine tous azimuts" "aidant le fascisme tant en pratique que sur le plan des idées". La très forte poussée réactionnaire et fasciste observée ces 10 dernières années, d'abord avec l'élection triomphale de "SarkoBuisson" en 2007 (que le 'p''c''mlm' n'a pourtant pas comptée aux rangs de cette montée du fascisme...) puis avec l'explosion du vote FN sous l'égide de Marine Le Pen, n'a en réalité rien à voir avec cet évènement et plutôt tout à voir, au contraire et justement, avec la "Grande Peur" provoquée dans la petite bourgeoisie et l'aristocratie ouvrière "pavillonnaire" par les émeutes de novembre 2005 et les nombreuses autres flambées des "quartiers" qui ont suivi depuis !

    Tout ceci sans même parler des inévitables et incontournables contradictions, voire véritables frictions au sein même du "bloc historique" de la révolution : l'on pensera par exemple à la difficulté de mettre en avant certaines questions "sociétales" au sein du prolétariat dans son ensemble (et pas seulement des "colonies intérieures" prolétaires d'origine extra-européenne !), qui reste encore pétri de valeurs patriarcales ; à la "concurrence" des communautés et des mémoires entretenue par le "système" et qui ne disparaîtra pas du jour au lendemain ; aux différences de "centralité du Mal" qui peuvent exister entre les différentes cultures nationales représentées dans l’État français, etc. etc. Des contradictions qui doivent bien sûr être affrontées et "traitées" ; qui produisent et entretiennent des phénomènes comme le dieudo-soralisme (jouant alors, comme on l'a dit, un rôle de "poison" dans les consciences et les luttes) et qui permettent aussi aux "chiens de garde" de l'ordre établi (y compris prétendument d'"extrême-gauche"), en "zoomant" dessus, de discréditer et de frapper d'infâmie l'affirmation de tel ou tel secteur populaire dans son principe même ; mais qui ne doivent pas pour autant nous détourner de voir la tendance générale, tendance à la lutte révolutionnaire, dans son ensemble. Les "convergences" et autres "articulations" des luttes doivent bien sûr faire l'objet de toute l'attention des révolutionnaires... mais elles interviennent aussi régulièrement de manière totalement spontanée et "naturelle", comme lors de l'élection de Sarkozy en mai 2007 qui vit "émeuter" côte-à-côte, dans de nombreuses grandes villes, une jeunesse blanche d'extraction petite-bourgeoise mais vouée à la précarité par la crise générale capitaliste et la fameuse jeunesse "colorée" des banlieues-ghettos ; où encore lors du contre-sommet de l'OTAN à Strasbourg en avril 2009, lorsque des militants radicaux de cette même jeunesse petite-bourgeoise blanche prolétarisée assaillirent un commissariat et restituèrent aux jeunes de la "ZUP" locale les scooters confisqués en répression de l'usage de stupéfiants (comme c'était l'usage sous Sarkozy à cette époque), jeunes du quartier qui se joindront souvent aux affrontements et aideront beaucoup de militants anticapitalistes à échapper à la répression, etc. etc. Il en est ainsi car c'est la tendance historique générale !

    Le grand soulèvement insurrectionnel des quartiers prolétaires urbains à dominante "colonies intérieures" de novembre 2005 n'a donc pas été, de manière idéaliste et incantatoire, le "début de la Guerre populaire" en "France" ; mais UN évènement spectaculaire (par son ampleur "nationale" hexagonale) marquant UN "saut", dans le processus historique de libération révolutionnaire, pour UN secteur social du "bloc historique" populaire de la révolution. Un saut devant en préparer et en amener d'autres, dans un processus PROLONGÉ et semé d'obstacles, de détours plus ou moins malheureux, d'avancées et de reculs. C'est cela, voir les choses de manière dialectique.

    Sur ces évènements et leur 10e anniversaire, on lira avec plaisir ces quelques positions communistes révolutionnaires :


    De la révolte des banlieues à la révolution prolétarienne ! (Bloc Rouge - meeting international prévu le 21 novembre)


    10 ans après les émeutes de 2005 : Combattre le racisme ! Abattre le capitalisme ! (OCML-VP)


    2005-2015, on n'oublie pas, on ne pardonne pas !
    (Femmes en Lutte 93)



    Et puis bien sûr (nous avons gardé le plus important pour la fin...) il y a aura ce samedi 31 octobre à Paris une Marche de la Dignité organisée en mémoire de Zyed et Bouna et de la glorieuse révolte populaire qui a suivi leur mort criminelle et tragique ; marche qui sera encore une nouvelle occasion d'affirmation militante pour le prolétariat ghettoïsé des "quartiers" et en particulier pour les colonies intérieures qui y vivent majoritairement : départ de Barbès à 14h00 en direction de la Bastille.

    BIEN ENTENDU, comme nous avons déjà pu le dire dans divers débats à ce sujet, IL SUFFIRA d'1% d'éléments à l'attitude et au discours douteux (et IL Y EN AURA sans le moindre doute) pour que, "zoomant" dessus, tous les ennemis du principe même d'affirmation des "quartiers" et des colonies intérieures fassent de cette mobilisation un repaire d'"antisémites", de "complotistes" et autres "confusionnistes", de "fanatiques religieux" etc. etc. (à vrai dire la seule présence - probable - de drapeaux palestiniens devrait déjà être incompréhensible et insupportable pour certains...).

    Le fait qu'il puisse y avoir, dans une mobilisation syndicale contre un plan de licenciement ou une quelconque "réforme" gouvernementale de type Loi Macron, quelques % (ou peut-être - voire certainement - plus) de personnes pensant que "quequ'part Marine Le Pen elle dit pas qu'des conneries" ne faisant pas pour autant focaliser nos "chasseurs de confusion" sur ces personnes et dire que ce mouvement social était un "repaire de fachos"... Vous aurez - sans aucun doute - compris où nous voulons en venir.

    Soyons-y donc préparé-e-s "psychologiquement" et (surtout) politiquement.

    10e anniversaire des émeutes de 2005
    10e anniversaire des émeutes de 2005


    * Notre position sur ce référendum, puisque c'est l'occasion de la répéter à nouveau bien que cela n'ait rien à voir avec le sujet, a été celle d'un "Non sans sabler le champagne" :

    - Nous avons analysé (et soutenu sur cette base) le "Non" comme (en réalité) un "merde" au pouvoir en place ; moins le rejet d'un texte déjà aux 3/4 en application (reprenant aux 3/4 les traités antérieurs...) qu'une sanction de toutes les politiques françaises menées depuis le début de la nouvelle crise générale dans les années 1970.

    - Nous avons reconnu aux 55% de "Non" cette valeur, et nous ne leur en avons jamais donné plus. La majorité au pouvoir, une bonne partie de l'opposition et la quasi-totalité des grands médias ayant fait campagne pour le "Oui", nous y avons vu un intéressant moment de divorce entre les classes populaires (où le "Non" était bien au-dessus de 55%...) et ceux censés "faire l'opinion" ; mais nous n'y avons jamais vu pour autant "la révolution" ou une quelconque "rupture radicale" en "marche".

    - Nous avons par ailleurs toujours dit que des gens avaient pu voter "Oui" pour de bonnes raisons ("pensant bien faire", avec des intentions progressistes mais idéalistes - typiquement l'électeur des Verts, ou encore le "régionaliste de gauche" type UDB, PÒc etc.) et "Non" pour de mauvaises (nationalistes, chauvinardes, xénophobes... ou trouvant le texte et l'Union européenne en général trop "sociale", "bureaucratique", "soviétique" - cela existe et c'était même sans doute une très grande partie du "Non" hollandais quelques jours plus tard, qui a pourtant été l'occasion d'un nouveau sablé de champagne pour les "nonistes" hexagonaux !).

    - Quoi qu'il en soit, il est absolument clair et vrai que 6 mois plus tard, l'écrasante majorité (75-80%...) était cette fois-ci pour... soutenir l'état d'urgence et condamner le soulèvement des quartiers populaires ; confirmant rétroactivement nos raisons de ne pas sabler le champagne au soir du 29 mai.

     


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  • Source : http://www.etatdexception.net/

    Source originale : article de Zak Cheney-Rice pour Identities.Mic, traduit de l'anglais par RC pour État d'Exception.


    La leçon que Straight Outta Compton ne veut pas que vous appreniez


    L’ombre de N.W.A a longuement plané sur la Californie du Sud.

    Pour les enfants de Los Angeles nés au milieu ou à la fin des années 1980, l’exposition au travail du groupe s’est faite principalement à travers ses héritiers musicaux, une bande qui gravitait telles des planètes autour de la sphère d’influence du rappeur-producteur Dr. Dre : Snoop Dogg, Xzibit, Nate Dogg, the Game, sans doute 50 Cent et Eminem, et plus récemment Kendrick Lamar et la clique de Top Dawg Entertainment.

    Leur musique était la bande originale de nos soirées collège. Elle grésillait de nos écouteurs pendant les trajets en bus et mettait l’ambiance de nos discussions pendant les barbecues dans le jardin. La plupart d’entre nous étions encore en couches quand l’album Straight Outta Compton est sorti en 1988 – l’année ou « Fuck tha Police » a provoqué l’ire du FBI et a pratiquement anticipé le soulèvement de Los Angeles quatre ans plus tard.

    NWA N&B

    Les membres de N.W.A. lors d’un tournage en 1990 à Elysian Park, Los Angeles. Source : Jeff Kravitz/Getty Images.

    Mais les artistes qui ont porté le flambeau de NWA les deux décennies suivantes n’ont laissé aucun doute sur la façon dont ces jeunes hommes noirs avaient en fin de compte appréhendé notre ville – localement, mondialement, musicalement, etc. – et nous-mêmes.C’est particulièrement évident dans le nouveau biopic sur NWA, Straight Outta Compton, qui sort en salles le 14 août 2015 aux USA [le 16 sept. 2015 en France, NdT]. L’album Chronic 2001 de Dre reste une pierre angulaire de l’adolescence de la fin des années 1990, mais beaucoup d’entre nous ont grandi en connaissant Ice Cube comme le gars de Friday, Eazy-E comme celui qui a chanté « Boyz-n-the-Hood », et on avait du mal à trouver quelqu’un qui avait entendu parler de DJ Yella ou MC Ren. Pour quiconque ne se tenait pas totalement informé dans les années 1980, ce film est le premier à nous offrir une histoire de première main sur l’origine de l’ensemble du groupe.

    A la vu du film, il est tout de suite clair que la dette du hip hop californien envers NWA est immense. Le caractère tranchant du group, la narration souvent élogieuse de la vie dans les marges de Los Angeles, sont rythmés par une sorte de fanfaronnade nihiliste qui a depuis grandement influencé la musique de la région. Sans parler du fait qu’elle a aussi articulé certaines formes extrêmes d’hyper-masculinité à laquelle beaucoup d’entre nous, au pire de notre jeunesse, voulions aspirer.

    Il y a aussi beaucoup de leçons à tirer.

    En voici une : Compton à la fin des années 1980 était un enfer dans lequel vivait à l’époque la plupart des pauvres, des Noir-e-s de Los Angeles. Les gangs et le trafic de drogue structuraient l’ordre social. Les corps des Noir-e-s étaient enfermés, molestés et brutalisés par un réseau de services de police dont la prédilection pour le pillage et la violence militarisée a rarement été égalée depuis. La logique derrière « Fuck tha Police » devient extrêmement claire à mesure que le récit se déroule. Lorsque le groupe est malmené par des mesures de police à Compton, Torrance et Detroit, nous savons – dans nos esprits et dans notre chair – que Ferguson, Baltimore, Cincinnati et North Charleston ne sont pas loin derrière.

    Protest

    Protestataires à Ferguson, Missouri, le 11 aout 2015. Source : Scott Olson/Getty Images.

    En voici une autre : les femmes noires ne comptent pas. Lorsque Ice Cube pose sa main sur la tête d’une femme aux seins nus et la pousse dans le couloir d’un hôtel puis l’enferme dans la chambre, nous sommes censés rire de son humiliation. Lorsque des bandes de femmes à moitié nues dansent en bikini au bord de la piscine ou fournissent des faveurs sexuelles dans des chambres bondées, nous sommes censés oublier la vie réelle, aujourd’hui tristement connue, des héros de Straight Outta Compton qui a fait surface l’été dernier, appelant à des scènes mettant en vedette des « belles filles » qui « devraient avoir la peau claire » avec « des corps vraiment sympas » et des « filles afro-américaines » « à la peau claire jusqu’à foncée » qui sont « [pauvres] et en mauvaise posture ».

    Nous sommes censés oublier ce qui s’est passé avec Dre. À l’heure de #SayHerName [#DitesLeurNom] et de la chute de Bill Cosby, nous sommes censés agir de concert avec les réalisateurs dans l’effacement de l’incident de janvier 1991, où le rappeur-producteur a attrapé Dee Barnes, une journaliste noire, par les cheveux et a claqué sa tête contre le mur dans une boîte de nuit avant de la jeter au sol et de lui donner à plusieurs reprises des coups de pied dans les côtes.

    Dr Dre

    Dr. Dre. Source : John Salangsang/AP.

    « Cette salope pouvait s’y attendre » a déclaré peu de temps après Eazy-E dans un portrait de Rolling Stone.

    Rien de tout cela n’est accidentel. La dégradation ordinaire des femmes consécutive à nos rires, à notre abandon ou à notre silence collectifs est une caractéristique déterminante de la vie américaine. Elle est enracinée dans notre système juridique et de divertissement. Sur les routes polluées de la Californie du Sud, elle s’est infiltrée dans nos autoradios et a alimenté les relations humaines et sociales de notre enfance – reflétant les façons mêmes dont les liens unissant Dre, Cube, Ren, Yella et Eazy dépendaient autant d’une brutale misogynie que du fait de donner la parole à une génération de jeunes noirs qui en avait eu assez de la brutalité policière.

    Une caractéristique admirable du mouvement en cours #BlackLivesMatter est son approche intersectionnelle de la lutte contre les inégalités. La libération des Noir-e-s, dit ce mouvement, ne peut être réalisée sans la libération des Noir-e-s trans, sans la libération des Noir-e-s queer, sans la libération des femmes noires, et ainsi de suite. Il dit qu’en occultant la plupart des transgressions sexistes de NWA, nous faisons le lit du système même qui nous opprime et nous échouons à penser de manière critique notre propre propension à la violence.

    Cela ne vaut pas seulement pour NWA, le hip-hop ou l’Amérique noire. Mais à une époque où les Noir-e-s sont tué-e-s par la police à un taux presque trois fois plus important que celui qui prévaut pour les Blanc-he-s, et où les femmes noires meurent en garde à vue à une fréquence alarmante, les enjeux sont plus élevés pour nous. Nous avons besoin les un-e-s des autres.

    Pour réfléchir à cette dynamique en tant qu’hommes noirs natifs de Los Angeles et disciples de la galaxie NWA, il faut cesser d’ignorer le degré auquel le pouvoir hétéro-masculin et l’amitié, depuis nos années d’adolescence jusqu’à maintenant, ont été modelés par la rhétorique qui brutalise régulièrement les femmes noires.

    Parfois, vous devez tuer vos idoles.

     


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  • Peut-être fallait-il aux bouffons d'AQNI, de "Poisson Rouge", de Non Fides, des "Morbacks Vénères" et autres petits bourgeois gauche-blanche des campus (les fourestiens et Philippe Val à la rigueur on s'en fout, ils ne se réclament pas du camp révolutionnaire) une illustration de ce qu'est une critique CONSTRUCTIVE des positions du PIR (qui sont indiscutablement discutables). La voici.

    [Bon, en réalité, une critique ASSEZ MERDIQUE pétrie de "matérialisme abstrait" blanc et indigène-de-service, comme nous en a largement convaincu la réponse du PIR ici : vacarme-critique-les-indigenes-la-faillite-du-materialisme-abstrait ; mais c'est tout de même vrai, et c'était justement le piège, relevant largement le niveau par rapport aux attaques des précités.]

    Pour une approche matérialiste de la question raciale

    Une réponse aux Indigènes de la République


    Les Indigènes de la République ont contribué à rendre visible un racisme de gauche, appuyé sur le racisme intégral consubstantiel à la société française, mais seraient-ils prisonniers de ces enjeux ? Une analyse systématique des champs de force qui s’exercent sur les plus précarisés permet de sortir de l’ornière : une critique conséquente de l’invisibilisation des questions raciales et de genre, échappant au grand jeu identitaire de l’extrême droite, ancrée dans la critique de l’économie politique.

    Des morts en Méditerranée en passant par les émeutes de Baltimore jusqu’aux menus faits quotidiens de la vie métropolitaine, tout nous ramène à la question raciale. Il nous semble nécessaire de proposer une analyse de fond du racisme qui ne soit pas qu’une réponse à chaud aux événements.

    On assiste aujourd’hui à une montée de l’islamophobie et de l’antisémitisme. C’est une double vague et il faut réussir à penser les choses ensemble, alors que les séparations sociales sont de plus en plus fortes et les logiques de guerre de tous contre tous incontrôlables. Cela signifie refuser les logiques de concurrence entre les racismes ; mais aussi penser islamophobie et antisémitisme dans toute leur spécificité. Et cela dans le contexte général d’une augmentation de la violence sociale, d’un durcissement des segmentations de classes et des effets du racisme structurel (logement, travail, etc.). C’est de plus en plus dur pour les plus pauvres, pour ceux qui sont déjà les plus précarisés (les racisés, les femmes).

    Avec les attentats de janvier, la gauche s’est pris en plein dans la figure son déni de la question du racisme. Elle qui s’est fait une spécialité de dénoncer la victimisation et de refouler le racisme comme phénomène structurel massif. L’obsession du voile des féministes institutionnelles a fonctionné comme un révélateur du racisme d’une gauche accrochée à un universalisme abstrait et agressif.

    Voilà pourquoi nous étions enthousiastes devant l’énorme travail qui a rendu visible ce racisme de gauche, républicain, auquel le Parti des Indigènes de la République (PIR) a participé depuis 2004. Nombreux sont ceux qui ont travaillé à saper ce racisme respectable [1] pour lequel les indigènes ne sont pas réellement des égaux et qui, s’il ne se justifie pas « contre » le racisé, tire son argumentation des grandes valeurs censées l’émanciper. Toute une histoire de la condescendance et du paternalisme de la gauche française reste à écrire, notamment sur la façon dont le discours de classe a été utilisé pour maintenir bien en place les hiérarchies au sein du mouvement ouvrier lui-même.

    Néanmoins, il nous semble que le PIR a glissé. Surfant sur les durcissements identitaires, il propose une lecture systématiquement culturelle voire ethnicisante des phénomènes sociaux. Cela l’amène à adopter des positions dangereuses sur l’antisémitisme, le genre et l’homosexualité. Il essentialise les fameux « Indigènes sociaux », les subalternes qu’il prétend représenter. Tout se passe comme si les prolétaires racisés qui subissent le plus violemment le racisme étaient instrumentalisés dans une stratégie politique qui se joue essentiellement dans l’arène de la gauche blanche et des intellectuels radicaux à la mode.

    Pour nous, descendantes de musulmans et de juifs d’Algérie, mener la critique du PIR, comme mener celle de la Gauche, est une question d’autodéfense.

    Pour nous, descendantes de musulmans et de juifs d’Algérie, mener la critique du PIR, comme mener celle de la Gauche, est une question d’auto-défense. Nous pensons que nous n’avons rien à gagner dans l’opération politique qui subsume toutes les questions sous celle de la race. Pour nous, non seulement les questions de racisme mais aussi les questions d’économie politique, de rapports sociaux de sexe sont à l’ordre du jour

    Économie politique de l’islamophobie

    Qui prend le RER à Gare du Nord le matin sait que ceux qui ont l’air arabe, noir ou rom subissent une pression constante. Contrôles au faciès, « bavures policières », relogement dans des banlieues toujours plus lointaines, les racisés subissent une ségrégation géographique, sociale et symbolique. Ce racisme intégral, pour reprendre l’expression de Franz Fanon, consubstantiel à la société française, commence dès l’orientation en 4e, avec la recherche d’un stage, du premier job… et s’étend à toutes les dimensions de l’existence. Dans ces multiples apparitions, il s’étend des rues de nos villes riches où les hommes racisés se font refouler des boîtes de nuit jusqu’aux confins des mers où on laisse se noyer avec une indifférence complice ceux qui osent franchir les frontières.

    En France, l’islamophobie, le racisme anti-musulman, est à comprendre, non pas simplement comme une opposition laïque à la religion, mais comme un racisme dirigé vers tout ce qui est noir ou arabe. Notamment quand sa présence est visible dans l’espace public, qu’il s’agisse de femmes voilées ou de jeunes tenant le mur. Les événements de janvier n’ont fait qu’accentuer ce processus de stigmatisation. Des attaques de mosquées aux agressions de femmes voilées, en passant par les convocations au commissariat d’enfants de huit ans qui ne disaient pas assez « Je suis Charlie », il est devenu quasiment impossible de parler politique quand on a une gueule d’Arabe sans avoir à se justifier de ne pas être islamiste.

    Il ne s’agit pas de simples discriminations ou de préjugés. L’islamophobie renvoie à une question plus centrale, la question raciale. Celle-ci fonctionne comme assignation à une place dans la division du travail de certaines catégories de population sur la base de leur origine et de leur couleur de peau. Il suffit d’observer un chantier de BTP pour constater qu’en général les gros travaux sont fait par les Noirs, les travaux plus techniques par les Arabes, et que les contremaîtres sont blancs. [2] Le racisme est le régime d’exploitation matériel qui a organisé le développement capitaliste européen.

    Lire la suite >>>>

    Un article intéressant au sujet des Indigènes de la République

    Sur le même sujet (racisme, antisémitisme, islamophobie), lire aussi Les frères jumeaux (Alain Gresh au sujet d'un texte posthume d'Ilan Halevi).

    En ce qui nous concerne (écrit lors d'un de nos nombreux débats en ligne sur la question) :

    - Concernant le discours d'Houria Bouteldja que voilà http://indigenes-republique.fr/racisme-s-et.../, dont nous ne préciserons même pas (tellement c'est une évidence) que 99,9% de ceux qui le critiquent comme "du Drumont" ou un "examen d'entrée réussi dans l'extrême-droite gauloise" ne l'ont même pas lu (un autre "indigène", Norman Ajari, a par la suite précisé le propos ici en réponse aux critiques) : en gros ce qui "déconne" c'est sa recherche du "lieu de production" de l'antisémitisme, qu'elle trouve dans le "philosémitisme d’État" actuel ("après la Seconde Guerre mondiale et la succession de défaites françaises face à la révolution anticoloniale et progressivement et de manière accélérée dans les années 1980") au lieu de le trouver là où il est, c'est-à-dire dans la construction même de l’État moderne et du capitalisme en Europe avec ses balanciers permanents entre utilisation et persécution des Juifs (construisant par conséquent, pour justifier ces persécutions-après-utilisation, leur réputation d'"usuriers" etc. etc.). Là est la racine de la Shoah (avec sa déclinaison particulière hexagonale, les lois antisémites de Vichy). Le "philosémitisme d’État" progressivement construit entre 1945 et les années 1980-90 est une conséquence de cela : une repentance hypocrite "parce qu'il le faut bien" (cela s'est passé "au coin de la rue", au cœur de nos villes et villages contrairement aux crimes coloniaux, et puis le nazisme a mis le continent à feu et à sang tout de même...) ; et comme la logique capitaliste est de trouver un bénéfice dans tout, le bénéfice comme le dit très justement Bouteldja est de "fermer le guichet des réclamations" : puisque "la Fraaaaance" se repent de la Shoah et de tout l'antisémitisme antérieur (affaire Dreyfus etc.) et que désormais "s'en prendre aux Juifs c'est s'en prendre au valeurs mêmes de notre République", c'est "solde de tout compte" et il n'y a plus besoin d'examen de conscience sur tous les autres crimes du capitalisme et de l'impérialisme BBR. Quant à l’État d'Israël (auquel le soutien va généralement de pair avec ce "philosémitisme" républicain), c'est en fin de compte la "solution au problème juif" qu'a fini par trouver la bourgeoisie occidentale ; et comme là encore il faut en tirer un bénéfice, le bénéfice c'est d'en faire les tirailleurs de l'ordre impérialiste au Proche-Orient. Mais tout cela est un PRODUIT de l'antisémitisme et non son "lieu de production". Au demeurant le vieil antisémitisme ressort assez fréquemment, sous forme de "lapsus", dans le champ politique bourgeois "républicain" (de Raymond Barre à Georges Frêche).

    Les antisémites ouverts (et non hypocrites = "philosémites") sont eux aussi un produit de ce même lieu de production qui équivaut à 7 siècles d'histoire : ce sont ceux qui n'ont pas accepté la repentance hypocrite post-Shoah et préfèrent assumer (c'est tout de même rare) ou alors relativiser ou nier (négationnisme). Et les antisémites antisionistes (car tout antisémite n'est pas antisioniste, cf. Xavier Vallat et bien d'autres zélés serviteurs du régime de Vichy) sont ceux qui n'acceptent pas Israël (un État juif au service de l'Occident) comme "solution" au "'problème juif".

    Enfin, l'antisémitisme "des banlieues" est effectivement le plus "réactionnel" (face aux crimes israéliens, face au sentiment de "deux poids deux mesures" en faveur des Juifs) mais il a lui aussi son "lieu de production" et c'est là encore le même, car il est soit sous l'influence d'antisémites blancs bien français comme Alain Soral soit sous celle de l'antisémitisme... d'importation européenne des pays arabes, où les nationalistes bourgeois puis les islamistes ont massivement recyclé les thèses antisémites de Drumont et compagnie, des Protocoles des Sages de Sion (massivement imprimés et diffusés) etc. etc. dans leur lutte bourgeoise (donc idéologiquement pourrie) contre Israël - arrêtons de nous ridiculiser avec des citations de versets du Coran que les musulmans ont toujours su replacer dans leur contexte du 7e siècle : l'antisémitisme des pays arabes est clairement d'importation européenne dans ses références, il suffit de lire la fameuse Charte du Hamas (l'article 22 notamment) si l'on veut s'en convaincre.

    Donc voilà : il faut en effet identifier les lieux de production des oppressions, mais Houria Bouteldja identifie mal celui de l'antisémitisme. La racine de l'antisémitisme c'est 7 siècles de construction du capitalisme et des États européens sur la base de l'utilisation puis du "jetage" des Juifs et elle, elle dit que c'est le "philosémitisme d’État" actuel qui n'est que le résultat (un résultat) de cela : la contrition honteuse après que (pour citer l'antisémite Bernanos) Hitler et ses épigones aient "déshonoré l'antisémitisme" aux yeux de la bourgeoisie occidentale...

    L'autre critique que nous ferions à cette prise de position, c'est de présenter les Juifs dans tout cela comme des sujets passifs passés de gibiers de progroms à moutons du sionisme et du républicanisme ; alors que s'il existe aujourd'hui un "philosémitisme" officiel c'est aussi parce que des Juifs ont LUTTÉ, d'abord contre le fascisme lui-même (qui signifiait la mort pour tous) puis contre la non-reconnaissance de la Shoah comme crime spécifique (rappelons que dans les statuts du Tribunal de Nuremberg c'est loin d'être clair !). Nous nous souvenons ici de Pierre Goldman qui racontait comment il s'était énervé après avoir écouté un Black Panther dire "nous ne nous laisserons pas conduire à l'abattoir comme les Juifs"... Il est vrai qu'il y a cette image fausse et indigne des Juifs menés "passivement" aux camps de la mort ou subissant "hébétés" les pogroms et autres violences contre eux, qui est profondément ancrée dans les esprits y compris racisés alors que c'est faux : les Juifs ont lutté contre leur propre oppression et tentative d'extermination. Puis ils ont lutté par la suite au nom du "plus jamais ça". Bien sûr, le problème est que cette lutte n'a pas été menée uniquement sur une ligne antifasciste révolutionnaire (les Juifs étaient certes très nombreux dans l'extrême-gauche maoïste et trotskyste, une boutade au sujet de la LCR disait que "si l'on ne parle pas yiddish au Bureau politique de la Ligue, c'est parce que Daniel Bensaïd est séfarade"), mais aussi par des forces bourgeoises : LICRA ex-LICA, organisations diverses ayant constitué le CRIF en 1944, sans oublier le mouvement sioniste trouvant sa "solution" dans un État juif aux dépens des Palestiniens ; et lorsque le mouvement révolutionnaire a reflué mondialement dans les années 1980, seules ces forces sont restées en "tête de gondole" pour récolter les fruits de la lutte tout en ne cessant en même temps de dériver toujours plus à droite (État d'Israël de plus en plus oppresseur et criminel envers les Palestiniens, CRIF soutien du sionisme le plus droitier et de toutes les politiques impérialistes servant celui-ci de près ou de loin, LICRA incarnant de plus en plus le discours "républicain" bourgeois universaliste-impérial et le "deux poids deux mesures" en matière de lutte contre le racisme et l'antisémitisme, etc. etc.). Ceci peut effectivement rendre malaisée la mise en avant de cette lutte juive (c'est-à-dire des victimes elles-mêmes) contre l'antisémitisme ; ce dont certains se sortent parfois en mettant en avant le Bund (Juifs ne se niant pas, comme ce fut hélas souvent le cas dans le marxisme-léninisme kominternien, et en même temps clairement anticapitalistes et antisionistes), mais cette référence n'est pas très actuelle - l'organisation n'a plus existé après la Seconde Guerre mondiale. Pourtant, cela ne devrait pas poser de problèmes dans un esprit dialectique, comprenant que les choses peuvent se transformer en leur contraire.

    - Le problème des Indigènes, en fin de compte, c'est qu'ils sont dans une stricte dualité blancs/non-blancs et ne comprennent pas la CONCENTRICITÉ de la domination. La concentricité de la domination, cela ne veut pas seulement dire des Juifs racistes envers les Arabes/Noirs (et considérés "plus blancs" par la pensée dominante, et voyant l'antisémitisme contre eux plus sévèrement réprimé que l'islamo/arabophobie ou la négrophobie...) mais aussi par exemple des Maghrébins (principalement) qui à Marseille incendient un camp de Rroms (difficile de faire "au-dessous" ou "plus périphérique" que les Rroms en Hexagone métropolitain)... La non-compréhension de cette concentricité apparaît également lorsque l'on aborde avec eux la question des Peuples niés d'Hexagone et d'Europe, même les plus "reconnus" comme les Basques ou les Irlandais : ces fronts de lutte font selon eux partie du "champ politique blanc" et ne les "concernent pas", alors même qu'ils affaiblissent pourtant les Centres de leur domination/oppression en tant qu'extra-européens racisés [à ce sujet écouter ici cette intervention de Saïd Bouamama (signataire de l'Appel des Indigènes en 2005) il y a quelques jours au festival EHZ au Pays Basque : une position excellente qui participe de la prise de conscience de cette concentricité des oppressions - lire aussi ici... et finalement ici, quelques mois plus tard (mars 2016), sous la plume d'Houria Bouteldja ; comme quoi le débat fait avancer les choses !].

    - Le problème avec les Indigènes c'est qu'à moins d'aller au bout de leurs conclusions, c'est à dire de s'assumer comme un Black Panther Party hexagonal (sans les gros flingues peut-être, mais dans l'esprit quoi)... c'est quoi la porte de sortie à tous ces problèmes qu'ils ont si brillamment analysés ? Faute d'une telle porte de sortie ils tournent en rond, et tendent à s'enfoncer (comme toute chose qui tourne sur elle-même). Comme le faisait très justement remarquer un commentateur critique, pour le coup "indigène" et racisé lui-même, ils sont axés sur la critique d'un "champ politique blanc" et en particulier de l'aile "gauche" de celui-ci mais on a finalement l'impression que leur activité politique reste entièrement déterminée par ce champ politique "blanc" ; c'est-à-dire en quelque sorte qu'ils se réveillent tous les matins en se demandant ce qu'ils vont bien pouvoir dire ou faire pour "choquer" la "gauche blanche"... Ce faisant, leur activité n'est donc pas réellement autonome de ce champ politique vis-à-vis duquel ils revendiquent (justement) l'autonomie.

    MàJ 12/07  Nous partageons ici le "droit de réponse" des Indigènes au texte de Vacarme, signé encore une fois Norman Ajari (réponse, "critique de la critique" qui a donc achevé de nous faire prendre le parti du PIR dans cette controverse, initié notre vamPIRisation comme dirait le camarade Najiels lol !) :


    Vacarme critique les Indigènes : la faillite du matérialisme abstrait


    ["Droit de réponse" que Vacarme a tout simplement... refusé de publier.]

    Nous sommes de plus en plus d'avis qu'accepter la critique et le débat franc et ouvert n'a jamais fait de mal à personne, et surtout pas à une cause aussi importante que celle des "indigènes" que nous appelons les colonisé-e-s intérieur-e-s (ceci est valable dans les deux sens, Vacarme ayant refusé de publier la réponse du PIR).

    Pour notre part, comme critique du texte de Vacarme sur des points qui ne nous avaient pas fait "tiquer" de prime abord ("lecture en diagonale" sans doute wink2) : "l’histoire coloniale est derrière nous, même si elle laisse des traces" => ben non justement, si elle "laisse des traces" c'est parce qu'elle est FONDATRICE du monde capitaliste-impérialiste occidentalo-centré dans lequel nous vivons, et elle ne peut dès lors être "derrière nous" tant que nous n'en aurons pas fini avec le capitalisme et son monde impérialiste. Nous suggérons aux auteures d'aller demander aux Peuples des dernières colonies directes de Karayib ou de Kanaky, ou encore des néocolonies de (Franç)Afrique, s'ils considèrent réellement que "l'histoire coloniale est derrière nous"...

    On peut aussi regretter l'approche de l'antisémitisme à travers la seule grille de lecture de la Wertkritik et de l'école postonienne (1-2-3), qui peuvent développer des réflexions intéressantes mais dont l'objectif est avant tout d'argumenter l'"unicité", le caractère "à part"/"sans équivalent" et l'"insaisissabilité" de l'antisémitisme et de la Shoah par rapport aux autres racismes et crimes contre l'humanité dans le but de justifier le projet sioniste (puisqu'à haine "sans équivalent" il faut une solution "sans équivalent"...) ; ce que reconnaissent les auteures elles-mêmes en note de bas de page ("Tout en reprenant sa lecture d’un antisémitisme structurel, nous sommes très critiques des positions de soutien à Israël de certains de ses représentants et de la manière dont elle évacue la lutte de classe").

    Un article intéressant au sujet des Indigènes de la République

    MàJ 14/07 - L'honnêteté intellectuelle (qui nous a toujours caractérisés contrairement à nos ennemis) nous impose de reproduire ici les précisions apportées sur un certain nombre de points par un "intellectuel organique" du PIR, Youssef Boussoumah, au cours d'un débat que nous avons eu sur les réseaux sociaux :

    - Sur la question de l'antisémitisme et du "philosémitisme d’État" :

    "D'une part puisque tu nous connais tu sais pertinemment depuis l'appel des Indigènes que nous considérons les Juifs du Maghreb, les berbérophones et les arabophones comme égaux en tant qu'Algériens (c'est écrit en toutes lettres) mais également les Pieds-Noirs ayant rompu avec le colonat comme Iveton, Maillot ou Audin. De plus tu n'as pas manqué de lire la lettre à Zemmour d'HB qui insistait encore là-dessus, à savoir que les Juifs d'Algérie sont historiquement pour nous des Algériens. Le philosémitisme français maintient les Juifs dans un entre deux, ni blanc ni indigène, c'est la raison pour laquelle nous parlons d'antisémitisme d’État. Une catégorie de "Juifs" est maintenue alors que le combat de la Résistance antinazie était censé réintégrer les Juifs dans le corps national. (...)
    Concernant la question "les Juifs sépharades sont-ils ou non des indigènes?" : tant qu'ils étaient au Maghreb oui. Mais depuis, non. Depuis ils ont subi un phénomène de blanchiment avec l'arrivée en France après les indépendances, phénomène bien analysé par certains auteurs, ils ont été progressivement associés au monde blanc et cela s'est fait au nom d'un abandon de leur identité ou plutôt d'une folklorisation de leur identité. Mais d'autre part à ce blanchiment s'est ajouté une politique de philosémitisme qui les concerne eux comme les ashkénazes. Nous considérons que leur blanchiment et ce philosémitisme traduisent à la fois respectivement une xénophobie et un antisémitisme d’État à leur encontre (comme l'explique justement HB dans son texte sur le philosémitisme que personne n'a lu mais que beaucoup attaquent).
    Du coup les Juifs ne sont pas indigènes et ne sont pas considérés comme blancs non plus bien qu'ils aient été blanchis. Ils sont d'une catégorie intermédiaire du fait de ce philosémitisme et de ce blanchiment qui leur ont été imposés, et qui les instrumentalisent en en faisant des auxiliaires du pouvoir porteurs des valeurs occidentales. Nous évidemment nous voudrions qu'ils luttent contre le pouvoir blanc et c'est aussi ce que nous attendons des blancs/blancs. Évidemment c'est le pouvoir blanc qui a imposé cela aux Juifs et cela s'oppose de façon totale, catégorique, absolue à toute lecture d'un pouvoir juif surpuissant, c'est exactement le contraire !

    Alors dis-moi comment tu expliques que d'une part personne ne réagisse et ne voie le danger des proclamations philosémites de Chirac, Hollande, Valls comme "quand on touche à un Juif on touche à la République" (comprendre l’État impérialiste français) ; et que d'autre part quand nous disons que cette instrumentalisation "est de l'antisémitisme" car elle tend à isoler les Juifs du reste du pays, même si c'est une discrimination prétendument positive, des esprits mal intentionnés nous répondent "c'est vous les antisémites" ? Alors que tout le monde voit bien que notre démarche dénonce les positions racialisant les Juifs et qu'au contraire elle privilégie pour les Juifs le droit à l'indifférenciation et à l'anonymat (comme pour les musulmans d'ailleurs, nous sommes opposés à toute politique favorisant les musulmans pour en faire des tirailleurs eux aussi comme cela fut fait pour nos pères, le mien en tout cas de 1930 à 1945). (...)
    D'autre part ce qui d'un point de vue indigène a aggravé les choses, c'est la question de la Palestine. Dans la mesure où le prix à payer pour être soi-disant blanchi a été de faire d'Israël la centralité du judaïsme. Malheureusement, on le voit bien, la question d’Israël divise indigènes et juifs. Mais pour nous c'est bel et bien une question politique, rien de religieux, rien d’ethnique, c'est paradoxalement le pouvoir blanc qui a historiquement imposé le sionisme aux Juifs et pas le contraire, c’est le propos d'un petit bouquin que j'écris,
    "Le sionisme expliqué à nos frères et sœurs" qui est la version écrite de ma vidéo éponyme. Et je remonte pour ça loin avant Herzl. (...)  
    Comme nous l'avons écrit depuis au moins 10 ans (mais les gens nous lisent-ils ?), une hiérarchie raciale a été mise place (pour faire vite) plaçant en dessous du Blanc les Juifs, les musulmans, les Noirs, les Roms. Avec des catégories intermédiaires Turcs, Chinois, Tamouls etc.
    Ce que les antisémites comme Soral proposent aux musulmans ce n’est pas de détruire cette hiérarchie comme nous nous le souhaitons, avec la destruction du pouvoir blanc, mais c'est de faire miroiter aux musulmans la possibilité de passer de la 3e à la 2e place à la place des Juifs."

    - Sur la "centralité de la race", l'analyse de classe, le matérialisme et l'économie politique etc. etc. : 

    "Nous n'avons pas hérité d'un corpus théorique clés en main comme le marxisme, même si je considère que l'apport de celui-ci est très important. Ce qui veut dire que notre pensée, la pensée décoloniale, est jeune et émerge progressivement. Il existe des débats en son sein et c'est ce qui fait sa richesse. Comme pour le marxisme. Elle a ses premiers théoriciens dont Anibal Quijano, mais aussi des auteurs anciens comme Fanon, Sayyad qui sans le savoir nous ont permis de commencer à sortir du vieux monde théorique qui nous enfermait jusque-là.
    À ce propos je veux dire que nulle part ailleurs que dans les bouquins de Sadri Khiari puis dans notre ouvrage collectif de 70 textes notre conception n'a été exprimée avec le plus de clarté. Aussi je suis étonné que jour après jour 7 ans après ces bouquins nous soyons encore obligés d'expliquer et de réexpliquer des choses que nous pensions connues.
    Parmi nous prévaut majoritairement l'idée selon laquelle le racisme occidental se développe contemporainement à l'expansion coloniale européenne qui correspond aussi à une phase majeure de construction du capitalisme, une sorte d'acte de naissance à tel point qu'on ne peut pas penser l'un sans les deux autres (il n'est donc pas une conséquence ou une superstructure contingente au mode de production capitaliste mais une condition), à partir de 1492 grosso modo. D'autres dont moi considérons qu'avant même que soit achevé le processus d'accumulation primitive du capital, émerge un racisme occidental assez élaboré. Il suffit de considérer la Chanson de Roland, et le mythe de Roncevaux déformé pour en faire non pas un épisode de l'affrontement de Charlemagne contre les montagnards basques mais un épisode de l'affrontement déjà considéré comme structurel contre les musulmans. Ou 3 siècles plus tard les descriptions du prophète Mohamed représenté comme un démon noir sur des draps destinés à la propagande sur les marchés d'Occident. Il ne s'agit pas seulement d'un racisme de guerre.* Certes la religion chrétienne est le curseur raciste alors, mais pas seulement. Comment expliquer que les Croisés par exemple massacrent aussi bien les Byzantins lors du sac de Constantinople de 1204 que les chrétiens orientaux de Chypre/Syrie/Palestine, que pourtant ils étaient censés aller libérer ? L'"appât du gain" ? Insuffisant. Si ce n'est parce qu'ils les considèrent tous comme des ennemis à cause de leur proximité culturelle avec les musulmans. Il y a dès cette époque les premiers signes d'établissement d'une hiérarchie raciale européenne, alors que se développe une sorte de nationalisme occidental. Plus tard celui-ci permet à des souverains européens de se retrouver côte à côte pour les Croisades en dépit de leurs rivalités bien réelles, mais tout cela bien avant la pleine expansion de la banque et donc du capitalisme.
    Dès les premières croisades on stigmatise non seulement la religion mais aussi la couleur et le terme
    occidense est déjà présent depuis au moins Charlemagne, empereur d'Occident avec tout ce que cela signifie comme rejet de l'autre à un niveau inférieur. Mais bon il y a là un débat qui n'est pas tranché. En tout cas nous récusons le fait que le racisme serait uniquement une contingence, pour certains il a même acquis avec le temps une sorte d'autonomie lui aussi, ce sont des propositions de réflexions connues. Bref une hiérarchie raciale se met en place et est opératoire dès le tout début du haut Moyen-Âge.
    En fait il y a du racisme structuré avant même le capitalisme avec l'expansion coloniale des Croisades. Et on peut avoir du précapitalisme comme certains le pensent dès la Mésopotamie avec petite propriété agricole ou artisanale individuelle, prêt à intérêt, système bancaire, donc capitalisme privé et un capitalisme d’État avec mise en place de systèmes d'irrigation etc, d'ateliers d’État etc. sans racisme ; de sorte que le racisme n'est pas une conséquence du capitalisme, il l'accompagne ou pas, ce dernier va lui donner un formidable coup de pouce mais l'inverse est vrai aussi.
    L'autre chose que je voudrais dire c'est que c'est la race qui s'est imposée à nous et pas nous qui avions un désir irrépressible d'aller vers la race. Là où vous ne voyez que de la classe, nous nous voyons une interpénétration des deux. La race étant en France un gros mot, il est normal que vous pensiez que nous ne faisons qu'une lecture raciale mais ce que vous devez savoir c'est que nous sommes passés par l'étape du "tout classe", ce n'est donc pas un a priori idéologique mais une évolution de notre pensée bien matérialiste, tirée de notre expérience collective depuis 10 ans pour le PIR, depuis des décennies et pourquoi pas des siècles pour notre mémoire collective."

    - Sur la question de l'opposition entre "champ politique indigène" et "champ politique blanc" : 

    "Nous n'avons jamais dit qu'il ne pouvait pas y avoir de convergence entre le champ politique indigène et le champ politique blanc et je ne sais pas pourquoi cette idée fixe circule alors que nous passons notre temps à établir des ponts. Il a été nécessaire de construire ce champ politique indigène autonome, pas hostile, autonome.
    Mais cela n'empêche pas que nous souhaitons de nombreuses convergences sur la lutte contre le racisme, sur la Palestine, sur les crimes policiers. Comme le PIR le fait depuis 10 ans, c'est pourquoi je suis étonné que vous m'en fassiez la remarque (récemment un grand meeting contre l'islamophobie s'est tenu à Paris, très convergent). Et d'ailleurs le but de notre action est de faire émerger en Europe au moins une majorité décoloniale qui sera évidemment, forcément, anti-impérialiste donc antilibérale et qui se fera forcément avec les pans les plus progressistes du champ politique blanc. Relisez la déclaration d'HB au meeting des 10 ans du PIR avec A.D. (pas Action Directe mais Angela Davis ha ha ha), "Qu'adviendra-t-il de toute cette beauté ?"
    Mais il y a une condition, et c'est logique, dans toutes ces zones de convergence de lutte : nous refusons d'être minorés. Nous tenons à l'horizontalité des relations, comme pour la Palestine par exemple. D'ailleurs l'été dernier pour Gaza cela s'est très bien passé avec les camarades du NPA ou de l'UJFP. Nous avons eu là un exemple parfait de luttes convergentes entre les deux champs politiques. Il en va de même pour les sans-papiers par exemple, pour le soutien à Georges Ibrahim Abdallah ou la dénonciation de la Françafrique."

    - Sur la question de nos Peuples emprisonnés et niés d'Hexagone et d'Europe :

    "Pour parler de cette vidéo de Bouamama elle est très intéressante. Je dois dire que personnellement j'ai beaucoup d'estime pour les cultures dominées en France. Surtout basque, bretonne, occitane que je connais un peu d'un point de vue historique mais aussi alsacienne que je commence à connaître. Elles constituent souvent des îlots de résistance au rouleau compresseur de l'impérialisme qui écrase nos cultures, nos modes de vie, notre aspiration à une réconciliation avec la terre, la nature. Un élément très important de notre révolution décoloniale balbutiante, des sujets sur lesquels il nous faut écrire. C'est vrai qu'il y a eu une colonisation intérieure dont j'ai souvent parlé personnellement, notamment à partir du cas des Cathares. Et j'ai moi-même utilisé l'expression de "colonialisme intérieur". Je suis également très attaché à la lutte irlandaise (ces "nègres de l'Europe" comme ils étaient appelés au XIXe) que je connais bien et que je considère comme l'une des plus anciennes luttes anticoloniale d'Europe.
    Je suis bien d'accord que des peuples entiers ont d'abord été soumis de façon à être intégrés à la nation française en formation, je suis personnellement partisan de définir un champ politique intermédiaire entre champ politique blanc et champ politique indigène, une sorte de champ politique des vieilles nations d'Europe, je ne sais pas encore comment l'appeler. Cependant je ne pense pas que les méthodes de colonisation ont d'abord été expérimentées ici pour
    être ensuite exportées dans les colonies. On a là encore cette espèce de primauté d'ici sur là-bas. Mais aussi parce que même s'il est vrai que la Croisade des Albigeois a été en tous point comparable en violence avec les Croisades d'Orient, il y a eu ensuite la recherche d'une intégration de ces populations au corps national facilitée par l'écrasement des résistances et l'absence d'un marqueur identitaire discriminant. Ces vieilles nations sont maintenant incorporées au champ politique blanc et bénéficient en grande partie du privilège blanc. Elles ont elles aussi été blanchies. Une convergence peut intervenir avec elles dès lors qu'elles prennent conscience de ce champ politique blanc ce qui n'est pas évident. Et luttent contre le champ politique blanc qui coïncide peu ou prou avec l’impérialisme."

    - Sur les questions de genre, patriarcat etc. et le qualificatif de "populisme" que nous avons employé :

    "Bien sûr à ce champ politique blanc collaborent de nombreux indigènes sociaux. La démonstration en est entre autres l'attitude raciste de certains indigènes à l'égard des Roms voire des Noirs, que nous avons dénoncée. Comme nous avons dénoncé la participation de certaines associations musulmanes aux marches contre le mariage pour tous aux côtés de la droite. Cela veut dire qu'à de très nombreuses reprises le PIR a su s'opposer a des comportements plébiscités par certains indigènes sociaux. Quand personne n'osait encore le faire parce qu'il était très populaire, nous avons été parmi les premiers à dénoncer Soral avec force. Puis nous avons tenté d'extraire certains des nôtres, qui le voyaient comme un héros, des bras de Dieudonné avec une fameuse déclaration de HB à une marche des indigènes.
    Cela pour dire que rien n'est plus faux, et même assez outrageant que l'explication qui consiste à dire que les prises de position du PIR résulteraient de la volonté de se faire bien voir des indigènes des quartiers. Cette critique est exactement le pendant de celle de certains indigènes sociaux qui pensent que certaines de nos positions sont prises pour faire plaisir à la gauche blanche.
    C'est ignorer que le PIR a toujours eu son franc parler et cela personne ne peut le lui contester. Dois-je rappeler tous nos communiqués ? Notamment sur l'affaire Merah qui nous a coûté beaucoup puisque la plupart considéraient que tout était un coup monté ?
    À vrai dire une prise de position ne vaut que parce qu'elle vous coûte. Il est facile pour un bobo de prendre telle ou telle décision, il ne s'adresse qu'aux poissons du canal St Martin. Nos positions nous ont souvent coûté, reprenez notre histoire, mais nous les avons toujours assumées, elles sont faites après réflexion de ce qu'est une pensée décoloniale. Il nous est même arrivé de prendre des positions qui sont passées pour un soutien à quelqu'un qui nous déteste et que nous abhorrons, Kemi Seba, quand par exemple nous avons dénoncé sa condamnation à 3 mois de prison ferme pour avoir dit à un commissaire de police "vous êtes au service des sionistes".
    Parole que nous récusons évidemment et qui montre bien l’obsession antisémite de ce type (parce que ce flic est d'abord au service du pouvoir blanc et de l’État impérialiste) ; mais une condamnation disproportionnée, jamais vue pour une parole, illustrant le deux poids deux mesures racistes. Nous l'avons fait alors que nous détestons les prises de positions de ce type, que cela ne nous vaut aucun gain avec notre base qui n'a rien à voir avec lui, et encore moins avec les alliés blancs.
    Au contraire cela nous a valu des critiques violentes. D’ailleurs comment se fait-il que personne d'autre n'ait eu le courage de dénoncer ce verdict raciste, au moment où des hommes politiques jamais inquiétés tenaient des propos bien plus graves que lui ? Nous avons des principes, là où peu en ont encore. Et je le dis bien nous avons toujours considéré ce type comme un allié du pouvoir. Diriez-vous encore que c'était pour ne pas désespérer notre Billancourt ?
    Bien sûr, pour comprendre nos positions, il faut en comprendre la logique et ne pas lire en diagonale Bouteldja. Par exemple quand elle dit que dans les quartiers que nous avons connus et que nous connaissons nous observons que les homos ne souhaitent pas observer un mode de vie gay avec coming-out etc. tel que les grandes orgas voudraient l'y pousser, et que celui-ci ne correspond à rien parce que la plupart des homos indigènes préférant garder de bonnes relations avec leurs familles adoptent des stratégies de contournement. Cela constitue un constat comme cela remet en cause le sacro-saint universalisme blanc qui est convaincu que toute attitude d'Occident constitue la voie à suivre. Alors on déforme ses propos et ça devient "à la chinoise", "elle a dit qu'il n'y avait pas d'homos dans les quartiers". Idem quand emboîtant le pas à Joseph Massad, un ami à nous, détenteur de la chaire d'Edward Saïd à la Columbia University, elle critique l'homo-nationalisme. Pourtant, s'agissant de Massad avec qui les gens ont le droit d'être d'accord ou pas, qui fait une critique poussée de l'homo-nationalisme en étant lui-même d'abord palestinien et ensuite homo comme il le dit, refusant de placer son identité sexuelle avant son appartenance nationale, personne n'ose lui jeter à la figure les tombereaux d'injures proférées contre HB. Va t-on dire que Massad aussi prend ces positions par démagogie, par populisme comme vous le dites ?
    La notion d'impérialisme ne suffit pas car par exemple comment rendre compte concrètement des privilèges accordés au monde blanc et qui justement empêchent la lutte commune contre l'impérialisme. Mais aussi la domination culturelle ? En parler uniquement comme d'une superstructure, est-ce bien raisonnable ? Idem pour la religion. Pourquoi considérer comme normal que la modernité occidentale soit la référence universelle pour l'habillement, la mesure des choses, du temps, la manière de manger et même ce que l'on mange, la chanson, les loisirs etc. Et parler uniquement de superstructures qui disparaîtront avec la chute du capitalisme c'est accepter que l'avenir de l'humanité dépend d'un débat sur le capitalisme entre Occidentaux. Car le monde indigène, les 3/4 de la planète, quand il prend conscience de ses méfaits dénonce d'abord la modernité qui est par nature occidentale. Nous sommes ici une des colonnes avancées de ce monde indigène. Et l'Occident toutes tendances réunies n'a pas fini de nous considérer comme des amphibies sur l'échelle de son évolution."


    [* Notre point de vue est que les Croisades s'inscrivent selon nous dans la PREMIÈRE CRISE GÉNÉRALE de la féodalité qui comme tout mode de production a ses crises générales avec tendance à la concentration et à l'expansion par la guerre. Cette première crise qui va grosso modo de la fin du 11e siècle au milieu du 15e voit aussi les deux Guerres de Cent Ans (1154-1259 et 1337-1453) avec la fin de l'Empire anglo-continental (l'Angleterre se tournant alors vers les Peuples celtiques de l'archipel britannique) et l'annexion de la plupart des Peuples de l’État français dont nous avons parlé...

    Nous voyons donc effectivement là de la propagande de guerre, avec un aspect de démonisation particulier lié au fait que l'adversaire est physiquement assez différent, pratique une religion vue comme une monstruosité par les auteurs chrétiens, et que reste vive la peur de ses raids qui jadis montaient jusqu'à Autun et Poitiers (la fameuse bataille de 732...). C'est dans ce contexte qu'est en effet réécrite la Chanson de Roland. On peut même voir dans  cette réécriture, au risque de choquer... du "racisme anti-basques" wink2, dans le sens où il était beaucoup plus "chevaleresque" à l'époque d'être taillé en pièces par des "Sarrasins" que par des montagnards euskaldun avec leur idiome sorti du Néolithique...

    Les Croisades voient effectivement, on l'oublie trop souvent, les premières colonies européennes hors d'Europe. Mais enfin, celles-ci sont de courte durée... Car il faut dire que l'aire musulmane ce n'était pas n'importe quoi comme civilisation et comme "morceau" à avaler, et de fait sa soumission à l'impérialisme européen ne sera totale qu'au 19e siècle voire au début du 20e (avec la chute de l'Empire ottoman). De là s'est construit un imaginaire dominant fait de mépris mais aussi et surtout de PEUR, qui se retrouve dans l'islamophobie aujourd'hui.

    La motivation de cette entreprise "coloniale médiévale" était bien évidemment économique : le contrôle des routes de l'Orient. C'est d'ailleurs ce qui explique le massacre des Byzantins chrétiens : il s'agissait en fait du "prix" exigé par Venise aux Croisés à qui elle avait offert des bateaux. Il s'agissait pour la "Sérénissime" d'en finir définitivement avec une redoutable rivale en Méditerranée orientale, Constantinople (dont elle était d'ailleurs une possession - exarchat de Ravenne - à l'origine, et dépendait encore nominalement en ce début de 13e siècle).

    Plus largement, sur cette question du capitalisme qui "procèderait" du racisme/colonialisme, nous ne sommes pas d'accord (on peut même y voir le cœur du problème) et nous avons pu écrire que :

    "L'esclavage transatlantique comme toutes les "joyeusetés" de la première ère coloniale (de 1492 à la Révolution grosso modo, ensuite viendra la deuxième) ; ainsi que de la construction des États européens que nous connaissons eux-mêmes ; tout cela constitue une ÉTAPE du développement du capitalisme en Europe et dans le monde. L'étape où il sort des cités où il est né durant la seconde moitié du Moyen Âge (10e-15e siècles), où il sort en fait de son stade de prime enfance et nécessite pour cela d'élargir considérablement sa base d'accumulation (forces productives et marchés) ; exactement comme il faut changer toute la garde-robe d'un enfant arrivé à l'adolescence. L'étape suivante étant les révolutions bourgeoises qui créent les conditions politiques au triomphe de la révolution industrielle (économique), laquelle est déjà en germe auparavant bien sûr, mais "bloquée" comme une dent de sagesse. 

    Si l'on prend l'exemple de l’État/Empire français : au 16e siècle nous l'avons pas tout à fait dans ses frontières actuelles mais enfin déjà bien constitué, avec un territoire issu de la crise de la féodalité et donc de la tendance à la concentration (en l'occurrence de terres, de domaines entre les mains du roi parisien), et un appareil économique constitué d'une pyramide de bourgeoisies (manufacture, commerce, banque) dont le sommet est Paris (où se trouve le Palais donc le pouvoir d’État, donc la bourgeoisie qui lui est directement liée et qui domine) et d'une aristocratie terrienne maîtresse de la production primaire (agriculture, extraction) que la monarchie parisienne se subordonne elle aussi de manière croissante.

    À partir de là, le niveau des forces productives va "exiger" d'élargir la base d'accumulation. Il va donc y avoir quelques annexions territoriales supplémentaires (façade Nord et Est, Roussillon, Corse et Lorraine peu avant la Révolution), ainsi qu'un affermissement de l'autorité centrale dans ce qui est déjà "français", mais enfin ces extensions sont finalement mineures par rapport à ce qu'elles coûtent en guerres.

    Une meilleure affaire va donc être l'expansion coloniale au-delà des mers, car même si les voyages en bateau sont longs et pénibles, derrière d'immenses territoires sont conquis sans grandes difficultés (vu que les gens n'y ont pas de fusils, de chevaux, de canons etc.). D'ailleurs souvent les autochtones meurent tellement en masse qu'on les remplace par des Africains arrachés de force à leur continent.

    C'est dans ces conditions-là que va naître le Blanc et le non-Blanc, dans un long processus que viendra couronner 1789, qui abolit toutes les inégalités juridiques entre Blancs (bien sûr les inégalités économiques et de fait demeurent, mais c'est tout de même un immense "progrès" au service du Capital). Le capitalisme français va ainsi avoir sa dose d'exploitation (les Blancs, "manouvriers" ou paysans, plus ou moins exploités selon les régions etc.) ET de SURexploitation(1) (les non-Blancs esclaves et indigènes colonisés), qui va permettre son accumulation pré-industrielle puis la révolution industrielle elle-même.

    Donc oui, le racisme ou plutôt l'expansion coloniale ultramarine dont il est le reflet a été FONDAMENTAL pour le développement du capitalisme en particulier en Hexagone "français" (ainsi qu'en Grande-Bretagne, aux Pays-Bas, mais enfin de là dans toute l'Europe occidentale aussi). Mais cela ne veut pas dire que le capitalisme existe dans le monde, centré comme il l'est sur l'Europe et l'Amérique du Nord, PARCE QUE le racisme colonialiste européen. Là c'est faire précéder l'idée (le reflet dans la pensée) à la matière (que l'idée reflète)."

    Bien sûr des formes de pensée racistes (suprématistes d'un groupe humain sur les autres) peuvent être trouvées bien avant le Moyen Âge et même jusqu'à la plus haute Antiquité, pouvant ainsi servir d'"argument" à ce que "le racisme précède le capitalisme". C'est tout simplement que tous les modes de production tendent à l'extension de leur base d'accumulation, donc à l'impérialisme (et donc à l'infériorisation des dominés dans la pensée dominante). Il suffit de penser aux Grecs et aux Romains avec leurs "barbares". La question n'est pas que le racisme n'aurait "pas existé" avant l'émergence du capitalisme au Moyen Âge et la "découverte" des Amériques par Christophe Colomb en 1492. La question est que les formes de racisme/suprématisme disparues depuis des millénaires ne nous intéressent pas ; ce qui nous intéresse est le racisme actuel et celui-ci procède du capitalisme et de sa tendance à l'impérialisme (élargissement de la base d'accumulation, besoin de surexploitation)... et non l'inverse.

    Sur la question des Juifs et de l'antisémitisme, nous sommes bien d'accord que cette instrumentalisation "philosémite" en "incarnation de la République (bourgeoise) elle-même" et en "tirailleurs de l'Occident" via le sionisme (qui fait d'Israël la "centralité du judaïsme") est un gros - pour ne pas dire le - problème. Nous sommes toutefois un peu surpris par le discours très... assimilationniste tenu par Youssef Boussoumah à ce sujet ("notre démarche privilégie pour les Juifs le droit à l'indifférenciation et à l'anonymat"), alors qu'il nous semblait que les Indigènes s'étaient justement construits contre les injonctions assimilationnistes. Nous, nous ne voulons la dissolution dans la "citoyenneté républicaine" (autre nom de la juxtaposition de solitudes vendeuses de force de travail, génératrices de plus-value et consommatrices de marchandises de la Cité des Spectres) pour personne, et surtout pas pour des cultures aussi riches que celles du Yiddishland englouti par l'horreur nazie ou des Juifs séfarades du Maghreb. Nous sommes donc quelque part plus "communautaristes" que les Indigènes eux-même... ça c'est la nouvelle du jour !

    Concernant enfin la question de nos Peuples en lutte en Europe, nous reconnaissons totalement notre "privilège blanc" (consacré juridiquement par la Déclaration de 1789) et c'est pourquoi nous avons d'ailleurs critiqué la posture "tiers-mondiste" adoptée par une grande partie de nos mouvements dans les années 1970. Nous ne nous considérons pas comme des colonies mais comme des provinces, terme suffisamment "chargé" lorsque l'on en connaît l'étymologie latine (pro vincia = "précédemment vaincu" = pays conquis). Pour autant, nous considérons comme absolument essentielle la jonction de nos luttes avec celles des "indigènes sociaux", "colonne avancée" du "Tiers-Monde" impérialisé comme le dit très justement Youssef Boussoumah : ensemble nous formons les "campagnes" (comme aurait dit Mao) ou le "bloc historique" (comme aurait dit Gramsci) de la lutte révolutionnaire que nous voulons et devons livrer contre l’État capitaliste-impérialiste BBR.]

     

    (1) L'on peut parler de SUREXPLOITATION lorsque l'on est à la limite permanente de ne même plus permettre la reproduction des conditions d'existence de la force de travail (c'est-à-dire du travailleur...). Une manière de fonctionner qui ne PEUT PAS être la manière générale du capitalisme, car si celui-ci produit c'est pour VENDRE (comment, sinon, dégager des profits et reproduire le Capital ?) et il a donc besoin d'acheteurs, qui ne peuvent pas être simplement 5 ou même 10% de bourgeois et autres personnes aisées. Il lui faut donc des personnes "simplement exploitées", c'est-à-dire à qui leurs revenus laissent une "margeounette" pour consommer. Mais pour que ces personnes puissent exister et exister en quantité conséquente, il est NÉCESSAIRE que d'autres, sur le territoire qu'une bourgeoisie donnée contrôle, soient dans ces conditions de surexploitation (ce qui signifie, en substance, définir et assigner à cette position des "ultra-pauvres" pour que puissent exister des "moins pauvres", que l'on pourra en sus aliéner en leur disant qu'ils ne sont "pas les plus à plaindre").

    [Attention cependant : la surexploitation, vouée à dégager un profit maximal sur investissement (surprofit), intègre aussi des considérations de productivité du travail, de développement technologique (augmentant la productivité) ainsi que d'établissement de situations de monopole (réduction radicale voire élimination pure et simple de la concurrence : quoi de mieux pour les affaires ?). Ceci peut entraîner des situations paradoxales : ainsi par exemple, on imagine difficilement plus surexploités que les esclaves africains des colonies européennes en Amérique ; puisqu'il suffisait souvent de les maintenir en vie quelques années pour tripler ou quadrupler l'investissement représenté par leur achat ("gagner leur tête" disait-on à l'époque). Sauf que voilà : 1°/ comme déjà dans l'Antiquité, la productivité de personnes privées de toute liberté et non-rémunérées pour leur travail s'avérait finalement médiocre comparée à celle d'un travailleur libre, 2°/ pour ces mêmes raisons de productivité, ainsi que pour de simples raisons de sécurité, il était difficile voire impossible de concentrer des centaines et des centaines voire des milliers d'esclaves sur une même plantation (ce qui gênait donc la concentration du travail, et allait contre la constitution de monopoles), 3°/ cette méthode productive était difficile pour ne pas dire impossible à mettre en œuvre en dehors du secteur agricole (certes indispensable à l'économie mais dont la valeur ajoutée, même en agriculture extensive, reste somme toute modeste), dans l'industrie en plein essor notamment, 4°/ elle était incompatible avec le progrès technologique (mécanisation de l'agriculture), voué de toute façon à la faire disparaître, 5°/ les esclaves, qui représentaient le tiers de la population dans le Sud des États-Unis et 80% ou plus dans les Caraïbes, ne pouvaient pas (cf. ce que nous avons dit plus haut) représenter un marché (débouché commercial pour la production) de manière significative. Ce sont toutes ces raisons (et l'on pourrait encore sans doute en citer d'autres), et non des considérations d'"humanité", qui ont amené au 19e siècle les bourgeoisies européennes et américaines à pencher majoritairement en faveur de l'abolition de l'esclavage, bien que celui-ci représentât (à première vue) la forme d'exploitation la plus totale (et donc le profit maximal tiré de la force de travail) que l'on puisse imaginer. Si l'on adopte une vision "arithmétique" de la définition marxiste "classique" de la surexploitation, les paradoxes ne manquent de toute façon pas : les travailleurs les plus exploités pourraient ainsi bien être, par exemple... les footballeurs, si l'on mettait en perspective leurs (multimillionnaires) revenus annuels avec ce qu'ils rapportent à leurs clubs. C'est pourquoi une vision plus "humaine", basée sur la notion de reproduction des conditions d'existence, nous a semblé plus appropriée.]


    4 commentaires

  • Voici une petite revue des réactions militantes face au scandaleux verdict rendu le 18 mai par le tribunal de Rennes :

    Quartiers Libres : Pour Zyed et Bouna, une condamnation à nous battre

    Cases Rebelles : C’est une vieille histoire

    Alternative libertaire : Zyed et Bouna sont bel et bien « morts pour rien »

    Affiche-position du Front Uni des Immigrations et des Quartiers Populaires (FUIQP) :

    Revue de presse : affaire Zyed et Bouna

    Voir aussi cette vidéo où Mathieu Rigouste aborde la question de l'état d'exception policier permanent :

    Le verdict a bien sûr provoqué des mouvements de colère, notamment dans le 9-3 où vivaient et sont morts Zyed et Bouna (et qui s'était le plus enflammé après leur mort) : Rassemblement à Bobigny, la justice a tué une deuxième fois Zyed et Bouna

    Le nouveau (et très bon) site Quartiers XXI "profite" de l'évènement pour revenir sur une expérience militante lumineuse et (pour des raisons qui nous échappent) totalement oubliée aujourd'hui, alors qu'elle a pris fin il n'y a pas 6 ans : celle du Mouvement de l'Immigration et des Banlieues (MIB), en s'entretenant avec un de ses anciens membres (qui continue à militer pour la justice sociale dans le quartier montpelliérain du Petit-Bard).


    « S’il y a toujours reproduction du racisme policier, la muraille de l’arbitraire s’est fissurée »


    Quartiers Libres est d'ailleurs aussi revenu sur cette expérience dans un récent article :


    Les slogans ne tombent pas du ciel


    Beaucoup de militants issus des quartiers populaires ont été influencés directement ou indirectement par les animateurs d’un réseau qui a fini par se regrouper sous le sigle du MIB (Mouvement de l’Immigration et des Banlieues).

    La relaxe des policiers impliqués dans la mort de Zyed Benna et Bouna Traore est l’occasion de rappeler la contribution de ces militants à la mise en place d’expériences, de méthodes et de stratégies : d’une ligne politique, en somme.

    Lire la suite >>>>


    Ici un excellent documentaire où l'on peut voir le MIB en action dans les années 2001-2002 :



    M.I.B. (engl. subt.) from POPLAND on Vimeo.


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  • Programme susceptible d'être réactualisé, à suivre donc ici : http://semaine-anticoloniale-et-antiraciste-marseille.over-blog.com/2015/02/du-5-au-21-mars-nouvelle-semaine-anticoloniale-et-antiraciste-de-marseille.html

    # Jeudi 5 mars à 20h30 > DÉCOLONISATION GÉNÉRALE
    conférence gesticulée de Jean B

    « Je parle de millions d’hommes à qui l’on a inculqué savamment la peur, le complexe d’infériorité… » (Aimé Césaire).
    De missions humanitaires sur le terrain en passant par la Françafrique, la "Zone A Défendre" (ZAD) et la Palestine, cette conférence gesticulée nous invite à questionner certains privilèges et dominations très actuels, et de confronter certaines réalités rencontrées à quelques-uns de nos grands mythes.
    Il y a urgence à ne plus nous taire! Rencontrons-nous ». Jeanbe

    (Dar Lamifa - 127 rue d'Aubagne, Marseille 6e).

    # Samedi 7 mars à 20h > APPEL À LA MARCHE DE NUIT NON-MIXTE

    La rue est à toi, viens à la Marche !

    Pour se rencontrer, crier, chanter notre rage. Parce que c'est l'occasion de faire quelque chose ensemble, un moment où l'on s'affirme, où l'on se sent fortEs et fièrEs quelles que soient nos différences de vies ou de vécus.

    Nous sommes solidaires et en colère ! Nous prenons la rue et la parole pour affirmer : la liberté de décider de nos vies partout et toujours !

    Marchons la nuit, pour ne plus nous faire marcher dessus le jour !

    Rendez-vous à 20h00 devant les grilles du palais Longchamp pour le début de la Marche (côté têtes de lion/fontaine) entre femmes, féministes, gouines, meufs, trans, lesbiennes.

    # Mardi 10 mars à 18h30 > DES NOUVELLES DE PALESTINE AVEC SAMAH JABR

    Où il sera question de la situation en Palestine, après le massacre des palestiniens de Gaza de cet été...
    Samah Jabr est jérusalémite. Elle est psychiatre et psychothérapeute et exerce en Palestine occupée. Auteure, elle a beaucoup écrit sur les traumatismes de la vie des palestinien-ne-s sous occupation. Dans son dernier texte paru en langue française, elle reviens sur l'affaire Charlie Hebdo et la récupération politique orchestrée par les différents gouvernements, et les conséquences pour le peuple palestinien : http://assawra.blogspot.fr/…/ce-quont-perdu-les-palestinien… (rendez-vous organisé avec BDS-Marseille)

    (Manifesten - 59 rue Adolphe Thiers - 13001 Marseille 1er)

    # Mardi 10 mars à 21h > Projection de MOUJAHIDATE (documentaire d'Alexandra Dols)

    Projection en présence de la réalisatrice, qui présentera son film et répondra aux questions du public.
    Des femmes, engagées au sein du FLN-ALN pour l'Indépendance de l'Algérie témoignent.
    En ville, dans les villages ou au maquis, soutien logistique et moral, agent de liaison, infirmière ou poseuse de bombe, leurs formes et lieux d'engagements sont multiples, tout comme leurs identités sociales.
    Dans ce film, des moudjahidate partagent donc avec nous leurs expériences et mémoires. Photos d'époques et extraits de films se tressent avec les récits de Fatma Chebbah Abdelli, Zohra Drif Bitat, Louisette Ighilariz, Baya Outata Kollé, Baya Laribi Toumia ainsi que celui de l'historienne et elle-même ancienne combattante Danièle Djamila Amrane Minne.
    Alors pourquoi et comment ont-elles commencé à « activer » ? Quelles spécificités et stratégies ont-elles eu en tant que femme dans cette lutte ? Quels regards portent-elles sur cette période et qu'ont-elles à nous transmettre ?

    Alexandra Dols est auteure-réalisatrice. Moudjahidate est son dernier long métrage. Elle intervient également depuis 2009 en milieu scolaire pour transmettre des outils d’éducation à l’image et apprendre à les interroger.
    (Manifesten - 59 rue Adolphe Thiers - 13001 Marseille 1er)

    # Mercredi 11 mars > VÉRITÉ ET JUSTICE POUR MORAD !

    Le 1er avril 2014, vers 15h, deux policiers en civil interviennent dans un bâtiment de la cité Fontvert, dans les quartiers nords de Marseille. Morad Touat, 16 ans, tente d’échapper aux policiers et se réfugie dans un appartement au deuxième étage. Poursuivi par l’un des policiers jusqu’au balcon, Morad chute. Il décèdera le 5 avril, après quatre jours passés dans le coma. Depuis, sa famille se bat de toutes ses forces pour comprendre les circonstances exactes du décès du minot. Le 10 juillet 2014, la police des polices (IGPN) conclue à un « manque d’infraction » de la part des policiers. Ce qui conduira la maman de Morad à déclarer que son « fils est mort deux fois : une fois le 5 avril, puis une autre fois, le 10 juillet ». La famille s’est constituée partie civile et a porté plainte. A ce jour, aucune information judiciaire n’a été ouverte et la famille de Morad est totalement délaissée par les institutions.

    Venez rencontrer la famille de Morad et participer au repas de soutien que nous organisons le 11 mars 2015, à Manifesten. Tous les bénéfices de cet événement aideront la famille de Morad à mener son combat pour obtenir Vérité et Justice !

    Pour en savoir plus, voir la page Facebook "Combat Pour Morad"
    Projection d'un documentaire : ABDEL POUR MEMOIRE - "Malik à Paris, Abdel en banlieue, Plus jamais ça!" (Réal. : Mogniss H. Abdallah/Agence IM'média) - Rencontre et débat - Repas solidaire. Une soirée organisée par le collectif Angles morts.
    Le collectif Angles Morts a publié, en 2014, Permis de tuer (éditions Syllepse).
    (Manifesten - 59 rue Adolphe Thiers - 13001 Marseille 1er)

    # Jeudi 12 mars > DETTE & EXTRACTIVISME

    Rencontre avec Nicolas Sersiron (président du CADTM-France), autour de son dernier livre et, plus généralement, des luttes soutenues par le CADTM.
    Le système dette est un grand levier de l’accaparement par les multinationales et les pays industriels des ressources naturelles des pays du Sud. Au Nord comme au Sud, à travers les plans d’austérité, il favorise le transfert de la plus value du travail vers les détenteurs de capitaux. Quand à l’extractivisme, c’est un nouveau mot qui permet de rassembler trois grands pillages : celui des ressources naturelles, humaines et financières. Dette et extractivisme sont des grilles d’analyse qui en se recoupant et parfois se superposant, aident à mieux appréhender les grands problèmes actuels. Dans ce livre, j’ai essayé de montrer que la croissance des inégalités et du réchauffement climatique, la raréfaction des ressources végétales et minières, la dégradation des écosystèmes, comme les forêts, les pluies, l’eau douce, la fertilité des sols, les océans, que la malnutrition au Sud par la faim et au Nord par les affections de longue durée sont tous reliés à la dette et à l’extractivisme. De nombreuses alternatives que les citoyens préparent ou mettent déjà en œuvre pour construire un monde post-extractiviste et post dette illégitime, pour faire cesser la glissade vers des abîmes, sont décrites dans le dernier chapitre.
    (Librairie Transit - 45 Boulevard de la Libération, Marseille 1er)

    # vendredi 13 mars à 19h > LANGUE PENDUE

    - Rencontres littéraires avec Gauz, Stéphane Nowak Papantoniou et Serge Pey
    Gauz : Diplômé en biochimie, Gauz alias Armand Patrick Gbaka- Brédé a exercé une foule de métiers, dont celui de vigile. Rédacteur en chef d’un journal économique, News & co en Côte d'Ivoire, il est également documentariste. Son premier roman Debout-payé, paru au Nouvel Attila en 2014 porte un regard sur les inégalités sociales, la consommation, la société de surveillance contemporaine. Il raconte les trois âges de l’immigration ivoirienne, de 1960 à nos jours. Et dresse un historique du gardiennage.
    Stéphane Nowak Papantaniou : Ecrivain, lecteur, adepte de la poésie-action, Stephane Nowak Papantaniou mène des ateliers d'écriture avec l'association chair des mots et intervient depuis septembre 2010 à l'Université de Provence dans des « ateliers expérimentaux ». Cette rencontre littéraire nous permettra de découvrir sa dernière parution: Glôôsse (Al Dante, 2014), texte à la fois poétique et politique sur la situation sociale de la Grèce d’aujourd’hui.
    Serge Pey : Représentant déterminant de la poésie d’action et de la présence du poème au sein de la performance, son art singulier mêle à la fois certains aspects du happening, de la poésie sonore, de l’installation, de l’agit-prop et de l’art-action… Parmis ses dernières publications : La Boîte aux lettres du cimetière (Zulma, 2014), Agenda rouge de la résistance chilienne (Al Dante, 2014) et Tombeau pour un miaulement (Gruppen Editions, 2013).
    Cette soirée poésie sera suivie, en seconde partie d'un concert :
    - ZA KIBITKOÏ - LA ROULOTTE
    Concert tzigane russe avec l'ensemble À cordes et à cœur
    Stéphanie Aliotti-Delmonte : violon / Imad Mohdi-Mahgrobi : percussions
    Stéphane Pernice: guitare, mandoline et chant / Anne Vassiltchikova : chant
    Oraliture #6, une soirée proposée en partenariat avec Les éditions Al Dante, la librairie Histoire de l'oeil, le Dar Lamifa et l'Union Peuple & Culture, Dans le cadre du Printemps des poètes et de la semaine anticoloniale,
    (Dar Lamifa - 127 rue d'Aubagne, Marseille 6e).

    # Samedi 14 mars à 15h > LA FRANCE ET LA GUERRE CONTRE LE TERRORISME. OPÉRATIONS EXTÉRIEURES ET ENNEMI INTÉRIEUR

    Table ronde avec Raphaël Granvaud, Thomas Deltombe, l’association Survie, et les radios Zinzine et Galère.
    La table ronde sera enregistrée et fera l’objet d’une émission sur radio Zinzine les jeudi 19 et 26 mars de 17h à 18h.
    Afin d’appréhender l’ordre sécuritaire et militaire à l’œuvre dans notre pays et à l’étranger, tout particulièrement dans les ex-colonies françaises, nous reviendrons sur le passé et l’actualité des discours et pratiques des armées et services sécuritaires français, notamment sur les dernières interventions françaises en Afrique et sur la doctrine de guerre antirévolutionnaire. Nous décortiquerons ensuite les liens entre les logiques d’opération extérieure et d’ennemi intérieur. Enfin nous montrerons les dérives antidémocratiques, racistes et fascistes qui se profilent à travers la guerre antiterroriste.
    Raphaël Granvaud : est militant de l’association Survie et participe à la rédaction du bulletin Billets d’Afrique. Il est l’auteur entre autres de Que fait l’armée française en Afrique ? (Agone, 2009) ; De l’armée coloniale à l’armée néocoloniale (1830-1990) (Survie, octobre 2009, en libre téléchargement sur le site internet de l’association) ; "Colonisation et décolonisation dans les manuels scolaires de collège en France" in Relecture d'Histoires coloniales, Cahiers d'histoire n°99, avril-juin 2006. Il a participé à la rédaction des écrits suivants : Survie, Françafrique, la famille recomposée (Syllepse, 2014) ; La France en guerre au Mali, enjeux et zones d'ombres (Tribord, 2013) ; Plate forme citoyenne France-Afrique, Livre blanc pour une politique de la France en Afrique responsable et transparente (L'Harmattan, 2007).
    Thomas Deltombe : journaliste et essayiste français. Il collabore avec Le Monde diplomatique et les éditions La Découverte. Ses récents travaux portent sur les médias et l'islam, l'Afrique, l'histoire coloniale. Il est auteur ou coauteur de : L'islam imaginaire : la construction médiatique de l'islamophobie en France (1975-2005) (La Découverte, 2005) ; Au nom du 11 septembre… Les démocraties à l'épreuve de l'antiterrorisme (avec Didier Bigo et Laurent Bonelli, La Découverte, 2008) ; Mosquées : immersion parisienne dans des lieux ordinaires (le Passager clandestin, 2008) ; Kamerun ! Une guerre cachée aux origines de la Françafrique, 1948-1971 (avec Manuel Domergue et Jacob Tatsitsa, La Découverte, 2011).
    L’association Survie : mène des campagnes d’information et d’interpellation des citoyens et des élus pour une réforme de la politique de la France en Afrique et des relations Nord-Sud. Elle fonde son action sur la légitimité qui incombe à chacun d’interpeller ses élus et d’exiger un contrôle réel des choix politiques dans tous les domaines. Survie réalise un travail d’enquête et d’analyse critique, dénonce les agissements de la Françafrique et promeut auprès des décideurs une autre relation France-Afrique.
    (L'Équitable café - 54, cours Julien - Marseille 6e)

    # Samedi 14 mars à 19h > D'EXHIBIT B À CHARLIE : NOUVEAUX MODES DE REPRÉSENTATIONS RACISTES

    Table ronde avec Houria Bouteldja (porte-parole du Parti des Indigènes de la République) ; Franco Lollia (porte-parole de la Brigade Anti Négrophobie et du collectif contre Exhibit B) ; Pierre Chopinaud (porte parole de La voix des Rroms) et Elsa Dorlin (philosophe - a publié La matrice de la race (La découverte, 2006) ; Black feminism (L'Harmattan, 2008) ; Sexe, race, classe (PUF, 2009). Débat animé par Emmanuel Moreira, de la web-revue laviemanifeste.com où il sera, entre autre, question d'Exhibit B : spectacle proclamé "anti-raciste" par l'artiste, défendu comme tel par les institutions et certaines associations "humanistes" françaises ; et vécu comme raciste par une population souvent issue des anciennes colonies (se rappeler qu'à la demande de dialogue exigée par les manifestants, la réponse des institutions fut l'envoi des forces de l'ordre). où il y sera question également de Charlie, journal satyrique sexiste et islamophobe, devenu symbole français de la liberté d'expression ; où il y sera question, enfin, de cette terrible confusion, où l'on voit un gouvernement, sous couvert d'antiracisme, mener d'évidence une politique xenophobe et colonialiste ; et, sous couvert de liberté d'expression, réprimer toute critique du consensus "charliesque", et ce jusqu'à l'aberration (mise en examen d'enfants…), affirmant ainsi, dans une dérive totalitaire paradoxale, que critiquer la politique raciste du gouvernement... est forcément apologie du terrorisme, racisme anti-blanc, voire antisémitisme !
    (Manifesten - 59 rue Adolph Thiers - Marseille 1er)

    # Dimanche 15 mars à partir de 13 h > DÉCOLONISONS LES CORPS, LES ESPRITS, LES IMAGINAIRES ! TOU-TE-S AU CARNAVAL POPULAIRE DE NOAILLES/LA PLAINE

    13h à Noailles, avec des grillades ; 14h à la Plaine ; à 15h : CHARIVARI !

    # Lundi 16 mars à 18h > L'UNITÉ NATIONALE EN QUESTION...

    07 janvier 2015, la nouvelle tombe comme un couperet:attentat meurtrier à la rédaction de Charlie Hebdo.Quelques heures après, c'est la fusillade de l'hyper Casher à Vincennes.L'horreur est à son comble et la réaction unanime. Sous le coup de l'émotion, 4 millions de personnes descendent dans la rue. L'émotion est sincère et la mobilisation spontanée.
    Pourtant, le mot d'ordre de cette mobilisation reste flou et le consensus dérangeant. En moins de deux, le discours glisse. La mobilisation nationale se transforme en « Union nationale ». Le discours guerrier pointe le bout de son nez pour faire passer ces attentats du statut de fait divers à celui de bataille.Une guerre mythique qui permet de réunir dans une unité non moins fantasmée (la communauté nationale), ce qui est divisé au niveau social.
    Parce que l'"unité nationale" sera toujours celle de la bourgeoisie. Elle sous-entend que nous aurions des intérêts communs, ce qui est faux. Parce que derrière ce terme se cache la préparation de la guerre. En 1914, cette unité a permis dans un même processus la mort du mouvement ouvrier et celle de millions de prolétaires, s'entretuant pour les intérêts de quelques bourgeoisies nationales impérialistes.
    Parce que dans le contexte actuel, elle signifie légitimer la politique coloniale occidentale et la guerre que le capital mène de manière internationale : celle contre les prolétaires, quelle que soit leur couleur ou leur religion.
    Parce que ça va surtout entraîner une hausse cumulée du racisme, de l'islamophobie et de l'antisémitisme, qui arrange bien le pouvoir. Et bien sûr, un renforcement du sécuritaire...
    Nous pensons qu'il est nécessaire de discuter et de s'organiser pour faire exister un autre discours et pour dépasser les divisions du prolétariat que l'Etat nous impose.
    Nous vous invitons à discuter de ces questions le 16 mars à 18h au Kiosque
    lien : http://kiosque13.noblogs.org
    Pierre Stambul, porte parole de l'union juive française pour la paix, sera intervenant durant ce débat.
    lien: http://www.ujfp.org/
    (Le Kiosque - 38 rue Clovis Hugues, Belle-de-mai, Marseille 3e)

    # Mardi 17 mars à 19h > CHALVET, LA CONQUÊTE DE LA DIGNITÉ (film documentaire de Camille Mauduech)

    En février 1974, une grève, menée par des ouvriers agricoles, éclate en Martinique. Dénonçant des conditions de travail intolérables, ils se fédèrent. Les plantations de bananes sont à l'arrêt mais la révolte, elle, est en marche. Elle sera réprimée dans le sang. Au lieu-dit Chalvet, à Basse-Pointe, les grévistes sont encerclés dans un champ d'ananas par des centaines de policiers qui tirent sur eux, tandis qu'un hélicoptère les prend également pour cibles avec des grenades et des gaz lacrymogènes. Ce violent assaut se solde par la mort de Ilmany Renor et plusieurs blessés graves.

    Après cette répression sanglante, des milliers de personnes défilent en Martinique pour exprimer leur indignation que renforce la découverte du corps sans vie de Georges Marie-Louise, sur une plage. Le jeune ouvrier agricole a été torturé…

    présentation et débat avec Ali Babr Kenjah, martiniquais, urbaniste et antrhopologue, également poète et écrivain.

    (Mille babords - 61 rue Consolat, Marseille 1er)

    # Jeudi 19 mars à 19h / HOMMAGE À RENÉ VAUTIER

    Projection et discussion par Alain Castang et la librairie Transit.
    Après être entré dans la résistance à l’âge de 15 ans, René Vautier fait ses études à l’Institut des Hautes Études Cinématographique. En 1950 alors qu’il vient d’adhérer au PCF il tourne son premier film « Africa 50 » qui sera censuré pendant 40 ans, c’était une commande de la ligue de l’enseignement qui devait mettre en valeur la mission éducative de la présence française en Afrique, il en fera un des premiers films anticoloniale français. En 1956 il rejoint clandestinement l’Algérie et participe à la lutte du FLN. De retour en France il participe au groupe Medvekine et tournera en 1972 « Avoir vingt dans les Aurés ». Il luttera énergiquement contre la commission de censure, puis créera sa propre maison de production et continuera à faire des films militants sur l’apartheid, la pollution le racisme… En 2014 il tourne son dernier film « Histoires d'images, Images d'Histoire » Il est mort le janvier 2015.

    (Casa Consolat - 61 rue Consolat, Marseille 1er)

    # Samedi 21 mars / SALON ANTICOLONIALE

    À partir de 14h, les associations organisatrices et amies de la semaine anticoloniale seront présentes à la Dar Lamifa et proposeront des discussions et jeux en plus de leurs table de presse. Choix de livres par la librairie Transit.
    18h : présentation du livre lauréat du prix du livre anticolonialiste 2015 : L'Empire des Hygiénistes de Olivier Lecour Grandmaison (Fayard), en présence de l'auteur et de Gisèle Felhendler, porte parole de la semaine anticoloniale et antiraciste de Paris.
    21h30 - Clôture + concert de DAWA UPENDO
    DAWA UPEN
    DO ou comment 6 flibustiers d'Avignon ayant bourlingué un peu partout dans le monde mélangent allègrement et sans sourciller rock, ska reggae et rythmes afro-latino-punk en français, anglais, espagnol et swahili.

    Avec plus de 50 concerts au compteur depuis la création du groupe il y a deux ans ( dont notamment la première partie de Zebda et Oistar au Festival de La Meuh Folle 2014 ), DAWA se présente à vous, sourire aux lèvres et dynamite dans les jambes.

    (127 rue d'Aubagne, Marseille 6e).

    Semaine anticoloniale et antiraciste de Marseille (du 5 au 21 mars) : le programme


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  • Un grand meeting contre l'islamophobie et le climat de "Patriot Act" qui se développe depuis les attentats réactionnaires des 7-8-9 janvier derniers est organisé le 6 mars à Saint-Denis :

    http://blogs.mediapart.fr/edition/les-invites-de-mediapart/article/190215/6-mars-meeting-contre-l-islamophobie-et-le-climat-de-guerre-securitaire

    Nous disons publiquement regretter et désapprouver la présence à ce meeting de l'UOIF, au nom de la même logique d'ANTIFASCISME POPULAIRE À LA BASE et de REFUS DES ORGANISATIONS BOURGEOISES qui nous a fait refuser par le passé et nous fera refuser à l'avenir, par principe, la présence du PS, du CRIF ou encore - a fortiori - de l'UMP dans d'autres rassemblements (comme un certain il y a un an à Toulouse).

    Nous tenons l'UOIF pour des représentants de la bourgeoisie musulmane, qui ne servent pas la lutte et l'émancipation des colonisé-e-s intérieur-e-s qu'ils prétendent représenter (et nous n'avons pas besoin, pour dire cela, de jouer à l'un de ces insupportables who's who dont un certain "antifascisme" s'est fait la spécialité : les faits et gestes d'untel ou untel à l'UOIF ne font en dernière analyse que découler d'une même source, qui est cette nature bourgeoise). Nous raisonnerions bien sûr de la même manière (voire plus sévèrement encore) avec quelques autres représentants du CFCM, de la Mosquée de Paris ou autre "Islam de la République". Si nous avons rejeté la présence du CRIF et de l'UMP à Toulouse, nous devrions donc logiquement refuser celle de l'UOIF à Saint-Denis : même tarif pour tout le monde. Tout comme le CRIF est connu pour son soutien sans faille à l’État raciste, colonialiste et assassin d'Israël, l'UOIF est connu pour être très proche du pouvoir turc AKP qui joue un insupportable double jeu vis-à-vis de l'"État islamique" Daesh, au détriment de nos camarades kurdes et de leur héroïque combat progressiste. Ces remarques peuvent, au demeurant, s'adresser à d'autres organisations signataires (plus petites et moins connues) ; notamment des organisations liées à des régimes semi-coloniaux réactionnaires du Maghreb ou du Machrek.

    Cette présence de la bourgeoisie "indigène" musulmane est, à notre sens, indissociable de celle (massive) de la social-démocratie ; bien qu'elle ait pu amener quelques débats houleux voire retraits de signature (EELV) au sein de celle-ci.

    Pour autant, ceci étant dit et ayant cette mise au point à l'esprit, nous invitons les camarades révolutionnaires présents sur Paris à se rendre à ce meeting (l'un des plus importants jamais organisé sur ce thème majeur et nullement "contrôlé par l'UOIF" qui a apporté tardivement son soutien à un événement organisé par d'autres, préparé dans des réunions où elle n'a jamais été présente, avec un texte d'appel écrit par d'autres, des intervenant-e-s et des thématiques choisi-e-s par d'autres etc. etc. - voir la liste des participants) pour en enrichir les débats ; tout comme nous n'avons jamais appelé au boycott et au sabotage d'initiatives principalement progressistes en raison de la présence annoncée de qui que soit (PS et appendices, CRIF ou autre) : la désertion, le refus de la confrontation politique et le repli sur les petits microcosmes d'entre-soi n'ont jamais été notre logique, particulièrement sur des fronts de lutte comme l'oppression des colonies intérieures où il y a urgence à poser les questions en d'autres termes que communautaires/religieux, et à porter la contradiction à ceux qui le font.

    Tout ceci fait partie de la logique d'UNITÉ ET LUTTE qui sous-tend toute démarche de Front uni de résistance contre un ennemi principal et mortel, ici la montée du fascisme appuyée sur la mobilisation réactionnaire de masse islamophobe.

    Meeting contre l'islamophobie et le climat de guerre sécuritaire - 6 mars à Saint-Denis

    Une opinion divergente de la nôtre, mais n'en disant pas moins des choses très justes (il faut comprendre que cela s'adresse aux indignations de "gauche" et d'"extrême-gauche" face à cette présence de l'UOIF) sur le Facebook de Julien Salingue : https://www.facebook.com/julien.slng/posts/10204828978098760... Une belle critique en règle des indignations à géométrie variable qui ont effectivement le don de nous insupporter (notre critique de l'UOIF et de sa présence à ce meeting, quant à elle, repose sur des principes et sur une stratégie politique clairement définie : l'autonomie du camp populaire révolutionnaire ; car si effectivement tous les musulmans sont potentiellement visés par la mobilisation réactionnaire islamophobe, tous ne sont pas égaux devant elle - les classes populaires étant évidemment les plus vulnérables - et la "solidarité musulmane" inter-classes, des bourgeois avec les prolétaires, face à une persécution qui se déchaînerait est tout ce qu'il y a de moins sûr).

    Position très importante aussi (de fait + ou - la nôtre !) : https://paris-luttes.info/uoif-psm-hors-de-nos-luttes-2789

    "Ne pouvant nous payer le luxe de boycotter des évènements d’une telle envergure, et qui nous concernent directement, nous vous appelons à venir le 6 mars signifier à l’UOIF (Union des Organisations Islamistes de France) et à PSM (Participations et Spiritualités Musulmanes) qu’elles ne sont pas les bienvenues dans nos luttes, ni dans nos vies." Lire la suite >> 

    Lire aussi : 200 personnes rassemblées à Lille au cri d’«Islamophobie, ça suffit»

    https://quartierslibres.wordpress.com/2015/03/10/manifestation-du-28-fevrier-2015-contre-lislamophobie-bilan-dune-mobilisation/

    Quant à la Marche des Peuples en Lutte prévue cet après-midi à Belleville, elle s'est bien tenue et a notamment vu exposer ces belles fresques en l'honneur de Thomas Sankara, du Rojava révolutionnaire kurde ou encore de Kanaky :


    Meeting contre l'islamophobie et le climat de guerre sécuritaire - 6 mars à Saint-Denis

    Meeting contre l'islamophobie et le climat de guerre sécuritaire - 6 mars à Saint-Denis

    Meeting contre l'islamophobie et le climat de guerre sécuritaire - 6 mars à Saint-Denis

    Meeting contre l'islamophobie et le climat de guerre sécuritaire - 6 mars à Saint-Denis

    Meeting contre l'islamophobie et le climat de guerre sécuritaire - 6 mars à Saint-Denis

    Meeting contre l'islamophobie et le climat de guerre sécuritaire - 6 mars à Saint-Denis

    Meeting contre l'islamophobie et le climat de guerre sécuritaire - 6 mars à Saint-Denis

    Meeting contre l'islamophobie et le climat de guerre sécuritaire - 6 mars à Saint-Denis

    Contre le colonialisme et le néocolonialisme : au cœur du secret de l'impuissance de la révolution prolétarienne en Hexagone ! Dynamitons les digues du pouvoir des monopoles bleu-blanc-rouges !!!

     


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  • Excellent (comme toujours) article de Quartiers Libres :

    Le 21 février 1995 à Marseille, Ibrahim Ali, 17 ans, membre du collectif Hip Hop les B-Vice, était tué d’une balle dans le dos par des colleurs d’affiches du Front National.
    Toute la misère et la vie de nos quartiers se retrouvent dans l’enchaînement de cette soirée du 21 février 1995. Ce soir-là, les B-Vice rentrent d’une répétition. Pour trouver un studio, il faut aller au Centre Social près du port, à 8 kilomètres de la Savine où vivent les B-Vice.

    B-vice

    Les bus et les infrastructures publiques, dans les quartiers nord de Marseille : comment dire ? C’est compliqué à décrire, mais on peut schématiser en reprenant les mots de l’actuel Premier Ministre : c’est l’apartheid. Alors les B-Vice marchent, courent pour ne pas louper la correspondance aux Quatre-Chemins, les bras chargés de platines et de leur table de mixage. Pour les B-Vice le fil de leur vie se casse quand ils croisent Robert Lagier, Mario d’Ambrosio et Pierre Giglio, trois militants du Front national, qui, ce soir-là, collent les affiches de Jean-Marie Le Pen.

    Trois nationalistes racistes dont deux descendants de ritals qui ont oublié qu’il y a encore 50 ans les gibiers des racistes étaient leurs pères…*

    interdit aux ritals

    Lagier et d’Ambrosio sont armés. Le procès établira qu’à la vue du groupe qui court pour attraper son bus, Robert Lagier dégaine son automatique et tire trois fois. Ibrahim Ali est touché dans le dos d’un tir direct alors qu’il cavalait pour atteindre son bus. L’enquête établira que  les B-Vice n’ont fait preuve d’aucune hostilité à l’encontre des colleurs d’affiche du front. Ils ne les ont pas calculés, il fallait juste attraper ce putain de bus.

    Les jours qui suivent, la tension est énorme dans les quartiers nord et dans toute la France, prémices de ce qui se produira 10 ans plus tard, en 2005, à la suite de la mort de Zyed Benna et Bouna Traore.

    Ibrahim ALi medias

    Chacun peut s’identifier à Ibrahim Ali, à cette vie de galérien passée à galoper derrière des bus trop rares dans le quartier, à esquiver les embûches du racisme qui opprime au quotidien et qui, parfois, tue. Comme à chaque fois, la famille et les militants de quartiers organiseront des manifestations pour ne pas laisser salir la mémoire d’Ibrahim Ali ni celle, par ricochet, de la jeunesse des quartiers populaires que la presse décrit volontiers comme menaçante ou délinquante. Jusqu’à l’établissement des faits par la justice, la presse reprendra trop souvent la ligne de défense du FN qui parlera de provocation et d’attaque sur ses militants.

    Toujours en avance sur son temps et sans peur du ridicule, Bruno Mégret, numéro 2 du FN de l’époque, ira même jusqu’à affirmer que le tir meurtrier reçu par Ibrahim Ali dans le dos constituait de la légitime défense. Le coup de « la légitime défense » pour un tir dans le dos avait jusque-là été évoqué uniquement pour des assassinats commis par des policiers. Pour les militants racistes, il faudra probablement attendre 2017 et l’élection de Marine Le Pen pour voir la jurisprudence modifiée et étendue.

    Tout ce que la France compte d’organisations antiracistes inconséquentes et inféodées au Parti Socialiste va se mettre en mouvement pour pleurer sur le crime raciste. Cela permet de masquer les causes de la montée du racisme et son exploitation par tous les partis politiques de gouvernement. Cette gestion par l’émotion et la morale du crime empêchera que l’on mette un grand coup dans les structures du FN et en particulier sur son DPS, à l’origine de nombreuses violences racistes. À l’époque, les principaux rabatteurs de cette politique d’indignation sans lendemain sont Dieudonné qui en fera une chanson et maître Collard, qui s’empresse de devenir l’avocat de la famille d’Ibrahim Ali.

    Vingt ans après, l’un est devenu député Front National et l’autre fait parrainer ses enfants par Jean-Marie Le Pen. Il y a une logique dans ces trajectoires : ceux-là n’ont de cesse de faire du fric sur notre dos en incarnant la fausse alternative à nos problèmes, celles qui collent toujours au discours dominant : antiracisme nian-nian au profit du PS en 1995, islamophobie pour Collard et antisémitisme pour Dieudo au profit du FN en 2015.

    dieudonné_BBR

    Au-delà du parcours de ces deux clowns médiatiques passées de « l’antiracisme bon enfant des jours de fêtes » au soutien et à la promotion de Jean-Marie Le Pen et du FN, le silence médiatique mais surtout l’absence de mobilisations de  grande ampleur autour de l’anniversaire des 20 ans de l’assassinat d’Ibrahim Ali témoignent des énormes attaques idéologiques que subissent les habitants des quartiers populaires. Ces attaques sont le fruit de la passivité d’une partie des nôtres. Soprano qui a grandi et a construit sa carrière de rappeur à partir de la même association de quartier que fréquentait les B-Vice fait ce constat amer : « Aujourd’hui, les jeunes des cités ne savent pas qui est Ibrahim et ne vont pas voter. On a tous notre part de responsabilité là-dedans, moi compris. Une chose est sûre, nous n’avons pas assez transmis. ».

    C’est pertinent mais injuste. Si certains n’ont pas transmis la mémoire de nos luttes ou, pire, n’ont pas lutté durant ces 20 ans, d’autres l’ont fait par tous les moyens nécessaires face au racisme et aux injustices qui pourrissent la vie de nos quartiers.

    Ils en ont souvent payé le prix fort.

    justice pour Ibrahim Ali

    Les commémorations du meurtre d’Ibrahim Ali sont le révélateur de ce que les individus et les organisations faisaient il y a 20 ans, de ce qu’ils ont fait durant ces 20 ans et de ce qu’ils font aujourd’hui. Ainsi le paysage politique se dessine et permet de mesurer la sincérité et la cohérence des engagements de chacun.

    collard avocat famille Ibrahim Alicollard le pen

    Pour un Dieudonné et un Collard passés avec armes et bagages du PS au FN, il existe d’autres parcours plus sincères et engagés comme celui du militant antifasciste Yves Peirat. Il est intéressant de relire le mépris de la gauche institutionnelle incarné par le journal Libération pour les antifascistes comme Peirat qui avait fait sauter, en réaction au meurtre d’Ibrahim, 6 permanences du FN.

    Le 7 février 2001, le journal de la gauche des beaux quartiers écrivait du haut de son mépris de classe pour tous ceux qui luttent « Peirat, le justicier des années 90, voulait faire sauter le Front National parce que le FN menaçait la République. Finalement, le Front a implosé tout seul et Yves Peirat, 41 ans, emprisonné depuis seize mois, comparaît depuis hier devant le tribunal correctionnel de Marseille. ».

    Le Front National « a implosé tout seul » : toute la vacuité de la pensée des journalistes de Libé apparait dans cette affirmation écrite… formulée quinze mois avant la présence Jean-Marie Le Pen au 2nd tour de la présidentielle 2002. Aujourd’hui, le FN est présenté par les médias comme le premier parti de France et le pays est ravagé par le racisme sous toutes ses formes. Cela aura sans doute échappé à la clairvoyance des journalistes moqueurs de Libé.

    Aujourd’hui, l’extrême droite, par la voix de Stéphane Ravier, maire FN du VIIème secteur de Marseille, explique que ce crime fut « un drame qui a brisé plusieurs familles. Celle de la victime, bien sûr et avant tout, mais aussi celles de militants sincères ».

    stéphane ravier

    Le FN ose mettre à égalité les douleurs des familles des militants « sincères » du FN qui ont tiré dans le dos d’Ibrahim Ali et celle de sa famille, afin de faire croire qu’une réconciliation est possible. Ainsi dans le monde rêvé de l’extrême droite les victimes et les bourreaux « sincères » peuvent vivre ensemble unis mais dans l’oubli du malheur que les uns ont infligé aux autres. C’est la mise en pratique du concept de soumission, d’égalité et de réconciliation cher à Alain Soral.

    Une fois le crime raciste commis, cette rhétorique d’extrême droite met toujours sur un pied d’égalité bourreaux et victimes, et permet de ne jamais rendre justice aux suppliciés et aux morts, tout en maintenant les dominations et les oppressions. Dans le réel, cette douille est brulante quelles que soient les fables et mensonges entretenues au sujet des juifs, des illuminatis, ou des francs-maçons utilisés par l’extrême droite pour tenter de cimenter contre un ennemi commun imaginaire les victimes du racisme et du colonialisme.

    Si Dieudonné était conséquent et pas seulement un clown vénal, vingt ans après avoir vendu l’antiracisme à la sauce PS aux proches d’Ibrahim Ali, il retournerait à la Savine en compagnie de Salim Laïbi, le régional de l’étape, vendre ses nouveaux produits de la dissidence. On pourrait tester son habilité à détourner la réalité et voir si elle est en capacité de faire marrer celles et ceux qui à la Savine se souviennent de la mort d’Ibrahim. Il est fort probable que personne ne trouvera drôle un conte de la dissidence, même bien raconté, détaillant que ce ne sont pas des militants « sincères » du FN, portés par leurs idées racistes et colonialistes qui ont tué ce 21 février 1995, mais que des juifs ou des illuminatis manipulaient le bras de Robert Lagier.

    L’anniversaire de l’assassinat d’Ibrahim Ali est l’occasion pour nous d’honorer sa mort mais aussi de tracer un chemin de lutte contre le racisme et l’oppression qui s’éloigne de l’antiracisme moral du PS et de son jumeau « réconciliateur » d’extrême droite. Ce sont les deux facettes d’une même pièce de monnaie façonnée pour acheter, anesthésier et détourner la résistance des quartier populaires face à l’oppression raciale et sociale. A 20 ans d’intervalle, acheter un pin’s « touche pas à mon pote » ou un produit « dissident » toujours vendus par le clown Dieudonné ce n’est pas lutter pour un monde plus juste et fraternel, c’est enrichir des escrocs qui en toutes circonstances se font de l’oseille sur nos souffrances et nos morts. Chaque anniversaire d’une disparition tragique d’un des nôtres est un rappel douloureux de la lutte réelle à mener, ensemble, dans nos quartiers pour la justice économique et sociale et l’égalité raciale.


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  • Le verdict définitif ne sera rendu que le 19 mars, mais la procureure a d'ores et déjà requis la relaxe : http://oumma.com/219633/rien-dillegal-aux-propos-de-saidou-zep-said-bouamama-

    Réquisitoire dans le procès Saïdou-Bouamama : Victoire !

    Il faut bien dire que toutes ces histoires de "racisme anti-blancs" n'ont pour nous rien de nouveau ni de surprenant, et nous parlent profondément. Nous sommes après tout venus au communisme à une époque où le discours "communisme = fascisme" était décliné sur tous les tons (et il en va encore largement de même aujourd'hui) ; nous avons dès cette époque été très sympathisants des luttes de libération nationale et nous avons alors (bien sûr) entendu le classique "les Corses et les Basques c'est comme Le Pen, ils ne veulent pas d'étrangers chez eux, la Corse aux Corses = la France aux Français" etc. etc. ; et puis bien sûr lorsque nous nous sommes penchés sur et emparés de la question occitane, il ne nous a pas fallu longtemps pour nous voir qualifiés d'"identitaires", d'"équivalents régionalistes des nationalistes FN" et on en passe et des meilleures... On pourrait encore citer d'autres concepts ayant émergés ces dernières années, comme l'"hétérophobie" pour les luttes LGBTI etc.

    Le concept de "racisme anti-blancs" ne s'inscrit pas dans une autre logique. Il faut bel et bien voir là l'ARME IDÉOLOGIQUE (réactionnaire) DE DESTRUCTION MASSIVE de notre époque : ne (surtout) pas assumer ouvertement la domination et l'oppression, mais mettre l'affirmation et la colère des opprimé-e-s sur le même plan que les idéologies structurelles des oppresseurs.

    C'est en cela que la petite victoire de ZEP et Saïd Bouamama est une victoire pour nous tou-te-s. La fascisation de l'ordre capitaliste bleu-blanc-rouge est en marche, mais il est encore possible par la mobilisation et une démarche politique offensive de lui porter de petits coups d'arrêt momentanés. Il ne faut cependant pas se bercer d'illusions, et être bien conscient-e-s que cela ne saurait durer éternellement. Ainsi, il faut bien voir que si la probable relaxe des accusés est une victoire pour eux et pour nous, le fait qu'il y ait eu poursuites et procès (et non classement sans suite) est tout de même un point marqué par l'AGRIF - et là est la tendance de fond de notre époque. Il faut notamment être vigilant-e-s devant l'éventualité que d'autres forces (y compris des forces de l'appareil d’État) que cette association très connotée à l'extrême-droite s'engagent sur le terrain de telles procédures : le résultat pourrait alors être nettement différent (l'AGRIF avait toutes les chances d'être déboutée et en a, de fait, l'habitude).

    Pour le moment, par le biais de sa "justice", l'ordre bourgeois républicain campe sur sa position de "balle au centre" : racisme ouvert et "primaire" ("de peau") interdit ; antisémitisme incarnation du "Mal absolu" (et amalgame avec la critique du sionisme savamment entretenu...) ; racisme "subtil" sur une ligne "culturelle" de "critique de l'obscurantisme" ou de "civilisation contre barbarie", ou encore de "réalisme face à la délinquance" et bien sûr de "dénonciation du nouvel antisémitisme des banlieues que personne ne veut voir" (à la Zemmour, Finkielkraut etc.) autorisé à condition de s'exprimer de manière "cultivée" et "posée"/"experte" (en évitant les dérapages d'un Philippe Tesson par exemple...) ; société de toute façon structurellement raciste (normal pour un pays impérialiste !) mais promesses régulières de "lutter contre les discriminations" ; et enfin "racisme anti-blancs" non-reconnu dans le cadre d'une "expression artistique à but polémique", a fortiori si la plainte émane d'une officine notoirement d'extrême-droite.

    Rappelons encore une fois que l'actuelle (immense) mobilisation de masse derrière la bourgeoisie repose totalement sur un paradigme "gentils vs méchants" - avec évidemment la bourgeoisie et sa République dans le rôle des "gentils". Les condamnations pour "apologie du terrorisme" pleuvent sur des dizaines de personnes pour toutes sortes de vociférations d'ivrognes, déblatérations de déficients mentaux ou provocations d'adolescents (stratégie de "choc et effroi") ; mais condamner (même symboliquement) un artiste et un sociologue pour "racisme anti-blancs", alors même que le Syndicat de la Magistrature et Amnesty International commencent à interpeller le gouvernement pour sa chasse aux sorcières "apologistes", aurait sans doute été "aller un peu loin" : cela aurait détonné dans le tableau actuel d'une "République défendant ses valeurs" parmi lesquelles la sacro-sainte "liberté d'expression". Un tableau qui, répétons-le, pourrait être notablement différent dans quelques années, notamment après le duel présidentiel UMP-FN qui nous est promis pour 2017.

     


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  • Les camarades de Quartiers Libres étaient présents :

    Procès de Saïd Bouamama et Saïdou


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    Procès de Saïdou et Saïd Bouamama, 20 janvier 2015, 17ème chambre correctionnelle, Palais de justice de Paris.

    ———–

    La Présidente du tribunal, à Bernard Anthony, président de l’AGRIF : « Comment avez-vous eu connaissance de ce livre-disque ? ». « On s’intéresse à tous les travaux des groupes racistes », répond-il, avançant l’argument du racisme anti-blanc.

    ————–

    S’adressant à Saïdou, la Présidente du tribunal demande :

    • Quel type de rap vous faites, si tant est qu’on peut répondre à cette question ?

    • Je ne comprends pas la question

    • Quel est votre but ?

    • Si vous me demandez le projet, le sens du projet c’est de prendre la parole.

    Saïdou précise que, faisant partie d’une classe sociale dominée et peu représentée, « la seule solution pour prendre la parole est de  le faire de manière alternative, ou artistique ».

    ————-

    Sur le propos poursuivis pour injure raciale et incitation à la haine raciale, Saïdou et Bouamama expliquent le contexte social et politique dans lequel le projet a été réalisé : celui de 2010 et du débat sur l’identité nationale, des déclarations de politiques comme Hortefeux et Guéant, de la reprise par la droite des thèses de l’extrême droite, de la « libération de la parole raciste » (Saïdou). Un contexte vécu comme « une agression absolue » (Bouamama) dans les quartiers, contre laquelle le livre et le disque sont une « prise de position politique » (Bouamama), qui ne vise pas une catégorie de population particulière (comme les français de souche, par exemple), mais qui veut souligner la que les principales victimes du racisme sont Noirs, Arabes, Mususlmans.

    Mr Anthony prend la parole et parle alors « racisme inversé », d’une « dialectique de désintégration », d’une volonté de « remplacer la lutte des classes par la lutte des races », avant de conclure que « c’est une œuvre de guerre civile qu’ils font ». Bouamama répond qu’il s’agit de « mettre des mots sur les colères » de certains quartiers populaires, et qu’en ça, « c’est l’inverse de la guerre civile ».

    ———

    Question de l’avocat de la partie civile à Saïd Bouamama : « Vous dites que le racisme est le fait des dominants. Donc pour vous, il n’y a pas de racisme anti-Blanc ? », ce à quoi il répond que le racisme n’est pas « abstrait », mais un « système » de domination, et que cette rhétorique de l’inversion est récurrente dans les situation de domination, prenant l’exemple des féministes accusées de sexisme anti-homme. L’avocat conclue alors : « Donc pour vous, un Blanc qui se fait insulter dans une banlieue, c’est pas grave ».

    ———

    L’avocat des prévenus demande à Mr Anthony s’il est nostalgique de l’Algérie française. Il répond que là n’est pas la question, « mais [qu’il] pense à ces jeunes désespérés de l’Algérie d’aujourd’hui » qui ont été condamnés pour avoir crié « Algérie française ! », parce que leurs père leur avait dit comment cette époque était plus appréciable que le système actuel corrompu.

    ———

    S’adressant à Saïdou, il lui demande ensuite : « On dit que la musique adoucit les mœurs. Qu’en pensez-vous par rapport à votre musique ? ».

    Réponse de Saïdou : « Je pense qu’il suffit de venir à nos concerts pour se rendre compte de la qualité de notre public. On a la chance d’avoir un public très hétérogène (…) J’ai la sensation d’avoir participé à quelque chose d’intéressant (…) Les gens viennent souvent nous dire après les concerts qu’ils ont eu un peu de dignité »

    Puis, la procureure à Saïdou : « Quelle place donnez-vous aux Blancs dans vos débats ? Y-a-t-il une place dans ce dialogue pour ceux qui ne sont pas issus de la colonisation ? »

    Réponse de Saïdou : « En voyant la sociologie de nos concerts, c’est plutôt multiculturel », précisant que la porte est ouverte à tous les « anti-racistes, anti-capitalistes, anti-impérialistes, anti-sexistes ». « Nous savons qui nous sommes », rajoute-t-il, « j’appartiens à une minorité racisée (…) mais dans nos combats, y’a tout le monde ».

    ————-

    Le premier témoin appelé par l’avocat de Saïdou et Bouamama, Mme Dominique Lagorgette, Maitre de Conférence en sciences du langage à l’université de Savoie. Comme lors du procès de La Rumeur, elle propose une analyse linguistique du texte afin de le resituer dans son contexte complet.

    Après avoir montré en quoi il répondait aux caractéristiques du discours polémique pamphlétaire (opposition à la polémique sur l’identité nationale, reprise d’argument venant de l’« ennemi » – « ennemi intérieur », « barbare », « sauvage » –, prise de parole au nom d’un peuple opprimé…), elle indique que ce texte s’inscrit dans la tradition de la chanson française. Elle explique avoir relevé 15 chansons (Brassens, Renaud, Souchon, Perret, Zebda…) depuis 1969 qui soulèvent les mêmes thèmes de l’identité nationale, de l’égalité et du racisme. Elle s’arrête notamment sur la chanson « Le patriote » du chanteur Raphael, qu’elle qualifie de « plus virulente » que celle de ZEP.

    L’avocat des prévenus réagit alors : « Raphael est blond aux yeux bleus, lui [Saïdou], il est… comme il est ! », avant de demander à Dominique Lagorgette si l’on n’entend pas les choses différents en fonction du locuteur, pour conclure « C’est ça qui est intéressant, on fait des procès à eux, et pas à Raphael ! »

    [Paroles de la chanson en question de Raphael, signé chez EMI : En première page des magazines / Ils sont partout dégueulants / Leurs réformes et leur grippe porcine / Le bon peuple et son président / Mais la France parfois ça m’déprime / et les français sont désolants / (…) Les étrangers, ça va dans des camps / On va quand même pas sauver le monde / Et mes Santiago dans tes dents / C’est toujours mieux que d’te répondre (…) Il faut chanter la marseillaise / Et avé’ la main sur le cœur / Moi je la siffle avec les beurs / Prie pour qu’au foot on soit de la baise / L’ordre moral est bien partout / La démago de gauche à droite / J’aime mieux attendre qu’ils soient bien saouls / Avant de me battre »]

    ———-

    Le deuxième témoin appelé est Olivier Legrand-Maison, enseignant en sciences-politiques à l’université d’Evry-Val d’Essonne et spécialiste de l’histoire coloniale. Il explique qu’il considère l’expression « Nique la France et son passé colonialiste » comme justifiée au regard du passé colonial français, et du traitement infligé à des populations entières assujetties, notamment en Algérie.

    Il fait ensuite le parallèle entre Saïdou et celles et ceux qui se sont exprimés pour dénoncer les fondements et les effets de la colonisation. Il cite Albert Londres sur le Congo, Simone Weil contre le travail forcé, ou encore Paulette Péju (dont les textes avaient été saisis chez son Editeur avant diffusion), qui, dit-il, « à sa façon, en d’autres termes, elle aussi niquait la France colonialiste ».

    https://www.facebook.com/devoirdinsolence?fref=ts

    Lire aussi : Soutien aux deux Saïd (Les Mots Sont Importants)

     


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  • http://la-feuille-de-chou.fr/archives/75653

    http://www.millebabords.org/spip.php?article27317

    https://lechatnoiremeutier.wordpress.com/2012/12/05/soutien-inconditionnel-a-saidou-zep-et-said-bouamama-poursuivis-en-justice-pour-la-publication-de-nique-la-france-devoir-dinsolence/

    Le deuxième lien contient une pétition que vous pouvez signer si vous le souhaiter. Le sociologue et le rappeur, figures de l'affirmation populaire sur le front de la "question indigène" (question colonisée intérieure) et - n'est-ce pas intrinsèquement lié ? - sur la question de la "France" comme appareil politico-militaire et idéologique (de "contrôle des esprits") au service de l'accumulation et de la reproduction du Capital bleu-blanc-rouge dirigé par le Capital parisien, sont poursuivis sur plainte de l'AGRIF - une association originellement liée au FN (aujourd'hui plutôt à ses scissionnaires de la "Droite nationale") et chargée de donner la chasse au "racisme anti-blancs" et à la "christianophobie", thèmes sur lesquels nous nous sommes déjà exprimés il y a quelques années et nous vous invitons à lire (également) ce que pouvait écrire l'Organisation communiste Futur Rouge en avril 2013 (alors que les poursuites commençaient) :

    Journée de soutien à ZEP à Lyon


    Ne pas oublier : le procès politique de Saïdou de ZEP et Saïd Bouamama commence demain


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  • Nous avons écrit dans un article précédent qu'il y avait deux grandes forces révolutionnaires en Hexagone à l'heure actuelle : la jeunesse prolétaire des "quartiers" où vivent les colonies intérieures (jeunesse qui peut tout à fait être "blanche" - d'origine européenne - mais qui alors "devient noire") et la jeunesse des toutes-petites-classes-moyennes, la jeunesse "petite-blanche" (souvent issue des périphéries du système "France") prolétarisée par la crise générale du capitalisme, la fameuse "génération qui vivra moins bien que ses parents".

    Aujourd'hui, l'une écrit une lettre ouverte à l'autre... Le frère de Wissam El Yamni, jeune "indigène intérieur" mort à la suite d'une arrestation "musclée" par la Police à Clermont, écrit à la mère de Rémi Fraisse - représentant typique de la deuxième catégorie :

    http://paris-luttes.info/<wbr>lettre-ouverte-a-la-mere-de-<wbr>remi

    Lettre ouverte à la mère de Rémi


    wissam.jpgLa lettre qui suit est adressée par Farid El Yamni, frère de Wissam - assassiné par la police le 1er janvier 2012 - à la mère de Rémi Fraisse. Il a voulu qu’elle soit rendue publique, mais elle sera également envoyée dès que possible à l’adresse des parents de Rémi Fraisse.

    À l’heure où sur Paris on condamne les manifestations violentes et où on loue les sit-in pacifiques, je vous écris cette lettre.

    J’ai perdu mon frère dans des conditions très proches de celles dans lesquelles vous avez perdu votre fils. Mon frère qui prenait tant soin de ma mère nous a quitté, il ne reviendra plus. La perte de mon frère était sur le coup une douleur immense que je ressens à chaque fois que l’État assassine à nouveau. « Là où croît le danger croît aussi ce qui sauve » disait quelqu’un. À chaque fois que l’État assassine on a aussi l’opportunité de l’arrêter, de le contraindre à changer et de rendre la dignité perdue à tous les autres.

    Par la mort de Rémi se noue beaucoup plus que l’histoire d’une vie, il se noue notre vie à tous, individuellement et collectivement. La criminalisation qui a été opérée est terrible, ça a été la même chose pour nous. J’ai compris plus tard qu’elle était voulue. Je ne voulais qu’une chose, que la Justice fasse la vérité et rende la dignité que méritait mon frère, dans le calme, et que cette histoire profite à tous, à nous les gouvernés pour mieux nous aimer et à la police pour la réconcilier avec la nation. Je pensais que la police ne pouvait accepter dans ses rangs des assassins, je ne la connaissais à l’époque pas assez. Je me trompais. Les quartiers ont brûlé, on a appelé au calme : chaque voiture ou chaque poubelle brûlée était vécue comme une insulte, comme une épine en plein cœur, une épine sur laquelle on appuyait.

    Puis le temps est passé, on nous a promis la vérité, mais on n’a eu que des mensonges, que des fausses promesses, comme tant d’autres avant nous. On nous avait prévenu, mais on n’y croyait pas. François Hollande, lui-même, avait pris ma mère dans ses bras et lui avait promis qu’il nous aiderait à faire la lumière sur la mort de son fils. Sans la justice et la vérité, on vivait le temps qui passait comme une condamnation. Nous étions toujours en prison, à suffoquer et à appeler la Justice à l’aide.

    Et puis on a compris que notre cas n’était pas isolé, que tant d’autres familles vivaient et vivent la même chose. Il y a tant d’humiliations et de mutilations commises consciemment par la police et couvertes par la justice, tant !

    On a aussi découvert la manière de penser des policiers, ça fait froid dans le dos. Voici un exemple : Mercredi dernier, suite à la manifestation sur Paris, un des policiers m’a dit « 1-0 » devant ses autres collègues au commissariat, qui ricanaient lorsqu’ils me voyaient arborer le tee-shirt « Urgence Notre Police Assassine ». Aucun ne l’a repris, aucun… Des exemples de ce genre, tant de français en vivent quotidiennement, ils n’en peuvent plus de cette police et n’en voient pas le bout.

    Je comprends l’appel au calme, on l’a également fait. Comprenez également que de nombreuses personnes ne croient plus en ce système qui donne une impunité de facto à la police. Comprenez que l’on ne peut concevoir la non-violence qu’à condition de supposer que le camp d’en face est capable de se remettre en cause : ils en sont humainement incapables, parce qu’ils considèrent que remettre en cause la police, ce serait remettre en cause l’État. Depuis 40 ans, la police tue impunément, à répétition. Depuis 40 ans, on assiste à la même démarche pour noyer les meurtres de l’État, malgré les vidéos, les témoins, les évidences. Depuis 40 ans, il y a des sit-in, des manifestations, des livres, des prises de positions d’hommes politiques, des tribunes adressées au ministre de l’intérieur. Depuis 40 ans, ça ne fonctionne pas.

    Voici comment ça se passe : dépêche AFP, mensonge du procureur, enquête de mauvaise qualité et tronquée pour aboutir sur une condamnation ridicule après de nombreuses années, voire à une absence de condamnation. Le pire, c’est que ceux qui vont enterrer l’affaire auront des promotions et ceux qui ont tué nos frères, nos fils ou amis, eux seront traités comme des champions par leurs collègues. Telle est la réalité que vous vivrez vous aussi.

    Manuel Valls dit que les violences sont des insultes à la mémoire de Rémi, mais sachez que Manuel Valls, par son inaction à combattre l’impunité policière, est le premier meurtrier de votre fils. C’est un criminel récidiviste. Il est venu à Clermont-Ferrand une semaine avant le rendu du rapport de contre-autopsie bidon dont il connaissait les aboutissants, et il n’a parlé de l’affaire que pour mieux condamner les violences de ceux que la mise à mort de mon frère révoltait.

    Madame, les gens se battent pour Rémi, pour leur dignité et pour leurs idéaux. Ils se battent pour vous, pour nous tous, pour que la fraternité soit effective. Ceux qui se battent connaissent assez la malveillance de nos gouvernants pour comprendre qu’on tente de nous fait croire que nous sommes dans un État de droit, alors que nous sommes dans un État de devoir. L’État ne respecte pas la loi qu’il demande qu’on respecte. Il se joue de notre corps, de notre confiance, de notre argent et de notre dignité. Il nous demande d’être à genoux, c’est un impératif catégorique.

    Je vous ai écris cette lettre à vous comme à tous ceux qui me liront pour vous faire savoir que je comprends aujourd’hui plus que jamais combien la non violence dans les affaires de crimes d’État a ses limites. La non-violence, par son impuissance, est parfois plus condamnable, plus meurtrière que la violence elle même. Les gens qui nous gouvernent sont malveillants, arrivistes, sadiques et récidivistes. Ils doivent partir par tous les moyens nécessaires.

    Farid El Yamni, frère de Wissam El Yamni, assassiné par la police le 1er janvier 2012 à Clermont Ferrand.

    *************************************

    Voilà exactement ce qu'il faut dire et faire ! L'ordre capitaliste bleu-blanc-rouge repose (entre autres choses) sur un "privilège blanc" qui veut que la mort de main policière d'un prénommé Rémi soit une "affaire d’État", quand bien même les forces de "l'ordre" se trouveraient ensuite des défenseurs pour invoquer la "violence inacceptable des ZADistes" etc. etc., tandis que la mort d'un prénommé Wissam reste pratiquement inconnue en dehors des milieux militants (et encore...), le "Français moyen" ayant tout au plus connaissance de "scènes de guérilla urbaine suite à la mort d'un jeune" (mais on ne sait généralement ni comment celui-ci s'appelle, ni à quoi il ressemble, ni ce qu'il faisait ni comment il a été tué). C'est une réalité. Mais à un moment donné, sans nier cette réalité, il ne faut pas non plus la laisser devenir une arme contre nous ! C'est l'ennemi qui impose le "privilège blanc", ce n'est pas à nous de le reconnaître mais au contraire de lui chier dessus ! L'indigénat intérieur est une construction artificielle du système bourgeois, un "mur" au sein des classes populaires que nous devons abattre : les indigènes intérieur-e-s n'ont pas vocation remi-fraisse.jpgà le rester mais à rejoindre - AVEC leur "identité" culturelle - les Peuples occitan, breton, francilien, lorrain ou encore ch'ti-picard parmi lesquels ils vivent, et à participer (en les "fécondant") à leur marche historique vers la Commune Humanité.

    Rémi Fraisse appartenait à un cercle de périphéries, celui des Peuples d'Hexagone (en l'occurence le Peuple occitan vu sa naissance et sa vie sociale toulousaine, puisque ce qui "compte" c'est là où l'on vit socialement) prisonniers de cet État français qui s'est construit dans l'annexion de "provinces" à mesure que le capitalisme se développait. Wissam El Yamni, comme Zyed et Bouna etc., appartenait à un autre : celui des colonies intérieures, "entre" - quelque part - les Peuples hexagonaux et l'"outre-mer" colonial et néocolonial (dont elles sont originaires et sur lequel le Grand Capital BBR a assis et asseoit encore sa puissance de la manière que l'on sait). Mais à un moment donné, il faut que toutes les périphéries s'unissent d'un effort commun, tel un boa constrictor, pour écraser le Centre du pouvoir capitaliste-impérialiste !

    Il faut aller vers la jonction des indigénisé-e-s intérieur-e-s avec les "petits blancs" prolétarisés, la jeunesse "blanche" qui "vivra moins bien que ses parents" comme Rémi Fraisse et ses camarades ; mais avec cette fois un "champ politique indigène" autrement construit et donc un tout autre rapport de force qu'en 2005 ou 2006 (lorsque certains "totos" avaient tenté d'"évangéliser" les banlieues à l'"insurrection qui vient"). Et poser - comme le fait Farid El Yamni - la question de la non-violence s'inscrit totalement dans cette logique car si le "privilège blanc" fonctionne pour les victimes (dont on va parler à tous les JT), il fonctionne également pour les assassins à qui l'on va "demander des comptes" mais sans les remettre en cause en tant que système : pour les proches de militants "blancs" comme Rémi (la "génération qui vit mieux que ses enfants" en quelque sorte !) nous serions quoi qu'il arrive "en république"/"en démocratie" et "l’État de droit républicain" serait "bon" en tant que tel, la mort d'un manifestant sous les grenades ou les coups de la police n'étant qu'un "dysfonctionnement" à "réparer"... parce que dans le fond, "la (sacro-sainte) Républiiiiiique" est BLANCHE COMME NOUS LE SOMMES et ne "peut" donc être intrinsèquement "mauvaise" - tout ceci se traduisant politiquement par l'appel à la "non-violence". En ce sens, la lettre ouverte d'un colonisé intérieur qui ne CROIT PLUS (après y avoir longtemps cru, comme il l'explique !) à ces sornettes revêt une valeur politique absolument fondamentale.

     


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  •  Charles Maurras (1868-1952) disait en substance aux Occitans, aux Bretons, aux Corses, aux Catalans et autres Basques : "c'est dans une France 'nationaliste intégrale' monarchiste et catholique que vos 'identités', vos 'valeurs' (forcément réactionnaires dans son esprit) et vos 'libertés' seront le mieux gardées". Centralisme "uniformisateur" et république parlementaire, "progressisme", "juiverie" et franc-maçonnerie vont de pair, proclamait-il. En somme : il y a un "concept France" et vous sentez bien qu'il vous écrase et vous opprime (tout particulièrement depuis l'"accélération" centralisatrice post-1789), que vous n'en faites pas réellement partie, que vous n'êtes pas réellement les "Français" que l'on veut faire de vous... Eh bien, plutôt que de vous imposer l'uniformité "française" à coups de "hussards noirs" républicains, nous allons vous reconnaître dans vos particularismes, dans vos "petites patries" que sont vos nationalités réelles, mais nous allons néanmoins vous souder au grand projet "France" face à l'ennemi tant extérieur qu'intérieur des "quatre États confédérés" juif, franc-maçon, protestant (= Allemagne et Angleterre) et "métèque" (étrangers extra-hexagonaux), auxquels vient encore s'ajouter le socialisme révolutionnaire marxiste ou l'anarchisme (à moins qu'il ne s'agisse là d'une "création commune" des quatre...).

    L’État français était à l'époque plongé dans une double et énorme problématique : parachever son unité "nationale" encore imparfaite, fait largement nié aujourd'hui par l'historiographie du "siècle des révolutions", mais qui se reflétait pourtant quotidiennement dans la mobilisation politique elections-1849 (orléanisme ou républicanisme bourgeois "raisonnable" dans le Bassin parisien, agitation "rouge" républicaine avancée et socialisante dans le "Midi" occitan-arpitan ou le Nord voire en Alsace, royalisme catholique en Bretagne/Grand Ouest et dans une certaine mesure dans l'Est, "banditisme" = résistance populaire chronique en Corse voire dans les Pyrénées, émeutes régulières contre les forces de l'ordre dans toutes les périphéries rebellions-collectives-gendarmes-1800-1859...) ; et la confrontation avec une nouvelle et redoutable puissance, l'Allemagne, pour le contrôle de l'axe rhénan et la suprématie en Europe continentale (+ le partage impérialiste de l'Afrique et du reste de la planète) ; et voilà, à cette double problématique, la solution que Maurras proposait.

    C'est ce que l'on peut appeler le compromis maurrassien. Et c'est sans doute ce qui lui a valu l'hostilité d'une bonne partie de la droite de la droite de la IIIe République qui partageait pourtant, en dehors de ce "régionalisme", l'essentiel de ses conceptions ("État fort" autoritaire, militarisme, antisocialisme et anticommunisme, antisémitisme) ; et de passer à la postérité comme l'archétype d'une extrême-droite de l'époque qui ne se réduisait - en réalité - pas du tout à lui, avec au contraire des courants attachés au centralisme napoléonien beaucoup plus puissants que son Action française décentraliste (mais comme ces courants ont en bonne partie engendré le gaullisme, alors...).

    Cette ligne est aujourd'hui globalement reprise par les Identitaires (ce sont eux qui en sont le plus proche), en y ajoutant l'échelon Europe ("patrie civilisationnelle") maintenant que l'impérialisme bleu-blanc-rouge a compris l'intérêt de travailler en partenariat avec ses voisins et ne se vit plus comme entouré d'ennemis. Certains éléments comme le breton Jean-Pierre/Yann-Ber Tillenon, ses compatriotes d'Adsav ou de Breiz Atao ou encore (dans une mesure à déterminer) la Ligue du Midi de l'ex-identitaire languedocien Richard Roudier font même carrément "sauter" l'échelon "France" entre leur nationalité réelle (bretonne, occitane) et l'Europe-"civilisation" ; autrement dit font comme le Parti national breton (PNB) des années 1930-40 ; mais l'esprit reste globalement le même (et le rapport à l'entité France reste dans tous les cas très ambigu : on sent bien que ne lui est pas vraiment reprochée son existence ni sa négation des Peuples à travers les siècles, mais seulement de ne pas être l’État ouvertement raciste qu'ils voudraient qu'elle soit).

    Et en substance, Dieudonné et Soral disent aujourd'hui exactement la même chose aux colonisé-e-s intérieur-e-s ("indigènes"), aux personnes de culture musulmane et/ou afro-descendantes, et dans une certaine mesure directement aux néocolonies dont sont issu-e-s ces dernier-e-s : une France gouvernée par le Front National, par les "patriotes", serait la meilleure gardienne de vos "identités", de vos "valeurs" et de vos droits. "Tout ce dont vous souffrez au quotidien dans vos ghettos" (ou vos pays pillés) vient en réalité du "système" dirigé par les "sionisssses et les pédo-satano-francs-maçons", ceux-là mêmes qui se disent antiracistes et viennent vous dire qu'on est racistes alors qu'en réalité on est vos meilleurs potes.

    En somme : vous ne vous sentez pas réellement "français", vous êtes exclus et parqués dans des ghettos par des gouvernements successifs "de droite comme de gauche" qui ne cessent pourtant de proclamer "l'intégration" et l'"antiracisme" ; eh bien nous, "patriotes français authentiques", nous vous tendons la main et vous allez vous unir à nous contre "l'Empire américano-sioniste" et ses agents intérieurs que sont justement les gouvernements de-droite-comme-de-gauche successifs, contre le "mondialisme" et ses corollaires que sont le féminisme, le "lobby gay" et les "idiots utiles gauchistes"... et vous verrez que tout ira beaucoup mieux car après tout, nos bonnes valeurs françaises catholiques et vos valeurs musulmanes n'ont-elles pas de très nombreux points communs ? Et tout cela rencontre hélas, dans une mesure non-négligeable, un certain écho.

    Malheureusement (pour eux), la plupart des prises de position d'un FN en pleine "résistible ascension" viennent complètement contredire cela ; exactement comme la plupart des prises de position de la Fédération républicaine, des Jeunesses patriotes, des Croix-de-Feu, bref de 90% des forces d'extrême-droite des années 1930 et de la "Révolution nationale" (qui sera initiée en 1940 sur cette base idéologique) venaient contredire ceux qui avaient écouté Maurras ou d'autres dans le même style (comme le PNB).

    Le régime de Vichy, qui avait totalement recyclé l'appareil d’État de la IIIe République, méprisera souverainement les nationalistes bourgeois (bretons et occitans principalement) qui avaient vu en lui un "vent de changement" pour leur reconnaissance en tant que nationalités (quelques heures d'enseignement facultatif de l'occitan à l'école par-ci, une région "Bretagne" amputée du Pays nantais par-là) ; et ni les tentatives de jouer la surenchère anticommuniste et antisémite, ni celles de traiter directement avec l'occupant nazi n'auront plus de succès. À la Libération, la répression s'abattra sur eux sans l'ombre de la moindre indulgence tandis que dans le même temps un René Bousquet (qui avait envoyé à la mort des dizaines des milliers de Juifs - hommes, femmes et enfants - et d'antifascistes), après - certes - trois petites années de prison à Fresnes, s'en tirait avec "5 ans de d'indignité nationale" dont il fut au demeurant... immédiatement relevé pour "faits de résistance" (à partir de la fin 1943, arrestation par les Allemands peu après le débarquement de Normandie), avant de poursuivre une brillante carrière dans le secteur bancaire, la presse (Dépêche du Midi) et la politique (radical-socialisme, proximité avec Mitterrand...) ; sans même parler des centaines de Maurice Papon qui ne seront même pas inquiétés (poursuivant eux aussi de brillantes carrières en entreprise ou dans l'appareil d’État). 

    Il en irait exactement de même, demain, pour toute la clique des "régionalistes" identitaro-réactionnaires à la Tillenon... et pour les racisés qui auraient suivi Dieudonné et Soral.

    Ce qu'il faut bien comprendre, en réalité, c'est qu'en situation de crise générale du capitalisme vont pulluler les fantaisies réactionnaires chez les personnes "agressées" par cette crise, car le premier réflexe de l'être humain est d'abord de regarder vers le "paradis perdu" et les "valeurs sûres" plutôt que vers les lourdes tâches d'un avenir émancipé, lumineux mais totalement à construire. Et ces fantaisies réactionnaires vont bien sûr avoir leurs marchands du temple, car cela fait vendre des livres, des DVD et des t-shirts et donne - aussi - l'autosatisfaction du "tribun", du "gourou".

    MAIS VOILÀ, pour paraphraser (encore une fois) C.L.R. James :

    - le cours général de l'histoire de "France" est tel que tout mouvement fasciste d'étendue hexagonale (aussi déguisé soit-il) sera obligé de s'attaquer à la "puissance indigène", à l'affirmation et à la lutte des "minorités visibles"/colonies intérieures pour l'égalité ;

    - le cours général de l'histoire de "France" est tel que tout mouvement fasciste d'étendue hexagonale sera obligé de s'attaquer à l'affirmation des Peuples conquis au fil des siècles et emprisonnés dans l’État (puisque les classes populaires n'ont globalement d'autre voie pour cette affirmation que la voie révolutionnaire communiste et la "bourgeoisie nationale" autonomiste celle de se faire le "parti de l'étranger" - se lier à des États voisins et concurrents comme le Royaume-Uni, l’État espagnol, l'Italie, l'Allemagne ou la Suisse ; ce qui est d'ailleurs également valable pour les colonisé-e-s intérieur-e-s : voie révolutionnaire ou alors se lier aux États d'origine dont certains - Algérie, Turquie - sont "turbulents" et "affirmationnistes", au Qatar et autres pétro-monarchies arabes qui cherchent des terrains d'investissement pour leurs capitaux sur-accumulés, à l'axe Iran-Syrie avec Dieudonné etc. etc. ; or l'agitation sociale-révolutionnaire et l'intelligence avec l'étranger sont deux choses que ne peut tolérer le fascisme, qui est l'instrument terroriste de la fraction la plus réactionnaire du Grand Capital et de son État pour la contre-révolution préventive et la guerre impérialiste mondiale).

    Cela signifie - toujours en substance - qu'à l'arrivée, les "fantaisistes réactionnaires" qui auront suivi les Soral, Dieudonné et autres Kémi Séba ou qui auront fait du "régionalisme" identitaire à la Tillenon (sur le terreau idéologique putride de l'extrême-droite francouille) ne seront jamais que les PAUVRES DINDONS D'UNE SINISTRE FARCE.

              maurras_decentralisation.jpgliste_antisioniste.png


    * Il suffit pour s'en convaincre de jeter un œil aux positions du Front National sur la - toute bénigne - Charte des langues minoritaires et régionales : http://www.frontnational.com/terme/langues-regionales/


    Lire aussi (d'un blog militant réunionnais) : Comprendre le colonialisme et le racisme - le cas d’Alain Soral


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  • Depuis bientôt 10 ans que l'on entend parler de ces personnages (Soral, Dieudonné, puis toute la ribambelle des "quenelliers" plus ou moins "associés", du moins jusqu'au "clash" qui arrive plus vite qu'on le pense), on a l'impression qu'il s'agit de démons jaillis des portes de l'Enfer qui justifieraient "pour la culture et la civilisation" (comme disent les autres) les alliances "antifascistes" les plus hallucinantes, comme avec le P's' bourgeois de Valls (le Parti radical de notre époque)...

    Alors que nous avons tout simplement là des PETITS CAPITALISTES plus ou moins dandys qui ont trouvé dans la mobilisation politique de masse (la "dissidence") un créneau commercial vendeur et qui disent "juif" (enfin, plutôt "sioniste" ou "talmudiste" pour éviter les condamnations, qui coûtent du fric) pour ne pas dire CAPITALISME, car dire "capitalisme" les foutrait dans la merde en tant que petits bourgeois. Qui mettent leur "dissidence" au service du Front National car même la mettre au service du NPA ou de Mélenchon exigerait des remises en cause personnelles trop importantes, une autocritique trop difficile de ce qu'ils sont. Et qui ne vont nulle part sinon au bout d'un croc de boucher car dans ce pays, pour paraphraser C.L.R. James, "le cours géné­ral de l'histoire est tel que tout mouvement fasciste d'étendue nationale (aussi déguisé soit-il) sera obligé de s'attaquer à la lutte des 'minorités visibles'/colonisé-e-s intérieur-e-s pour l'égalité"*.

    Ainsi donc, sur l'effondrement idéologique du soralisme dont nous avions déjà parlé :

    Soral avait tort et "nous" avions raison

    Réponse de l'intéressé sur les réseaux sociaux : "Je ne résiste pas au plaisir de relayer ce magnifique article de ces sous-merdes d'antifas sous sponsoring trotsko-sioniste !". Waow, on peut dire que ça, c'est de l'argument politique !

    L'on pourra également vous inviter à lire ce cinglant article d'un blog anticolonialiste basé et luttant dans l'une des dernières colonies directes tricolores (la Réunion) ; autrement dit à qui on ne fait pas prendre des vessies "antisionistes" antisémites pour des lanternes anticapitalistes et anti-impérialistes :

    Comprendre le colonialisme et le racisme : le cas d'Alain Soral

     

    * La prise de position d'Aymeric Chauprade (le "Monsieur International" du FN) en faveur d'Israël et de ses partisans, lors du dernier conflit-massacre à Gaza et des grande manifestations populaires le dénonçant, et la rupture consécutive d'Alain Soral et de sa nébuleuse avec lui - donc avec le FN (1 - 2 - 3) - sont venues confirmer cela et ce que nous disons depuis des années quant à l'INCONSISTANCE politique du soralo-dieudonnisme (ce qui ne nous empêche pas de dénoncer son fond idéologique, ses buts politiques et ses conséquences néfastes dans les classes populaires). En fin de compte, il est possible de dire que la différence entre Médine et Dieudonné (deux "idoles des quartiers" à leurs époques respectives) c'est que quand Dieudonné a rejoint Soral, cela pouvait encore passer pour une démarche "d'avant-garde" vouée à un certain succès. Cette différence se voit bien, d'ailleurs, dans la manière qu'a Médine (contrairement à Dieudonné qui est "à fond" dans son truc) d'assumer un jour à 100%, un jour à moitié, un jour presque pas etc., en mode "je prends pas parti mais un peu quand même".


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