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    #QuartiersLibres : Made in PS

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  • Article paru sur Contretemps :


    https://www.contretemps.eu/hajjat-mta-autonomie-travailleurs-arabes/

    L'expérience politique du Mouvement des travailleurs arabes (MTA)

    Depuis plus de trente ans, la revendication du droit de vote des étrangers du tiers-monde (ou extra-européens, euphémisme pour ne pas dire Africains et Arabes) est ballottée au gré des changements de gouvernement, des campagnes électorales et du bon vouloir des associations pour les droits de la personne, mais il ne se concrétise toujours pas dans le corps législatif. Le droit de vote des étrangers s’apparente à l’entrée officielle dans le champ politique d’individus jusque-là interdits d’expression, puisque le principe de nationalité inclut la nécessaire « neutralité politique » et le devoir de « politesse » vis-à-vis du pays hôte. Il est inscrit dans la loi que tout étranger troublant l’ordre public peut à tout moment être expulsé du territoire français.

    Il est ainsi peu probable que l’activité politique des étrangers soit officialisée par l’élargissement du suffrage « universel », sauf à subvertir radicalement l’ordre national qui subit, de nos jours, des tensions déstabilisantes par le haut, avec l’accélération de la mondialisation néolibérale, et par le bas, avec l’intensification des flux migratoires. Cet élargissement rendrait paradoxal le corpus législatif exigeant la neutralité politique – pourquoi d’un côté accepter le droit de vote des étrangers, et exiger de l’autre la neutralité ? – et incompréhensibles toutes les mesures d’expulsion menées depuis la Révolution française. En effet, les étrangers en France, quelle que soit leur nationalité, n’ont pas attendu le droit de vote pour s’exprimer politiquement. La focalisation sur le droit de vote rend difficilement appréhendable l’histoire politique des étrangers, qui ne devrait pas exister du point de vue national. La perspective nationale délégitime son existence et empêche la recherche scientifique de s’y intéresser. D’où la persistance dans le sens commun, et souvent parmi les héritier-e-s de l’immigration postcoloniale, d’une vision misérabiliste de l’immigration postcoloniale en France : contrairement aux immigrés[1] européens qui se seraient intégrés sans difficulté aux structures des partis politiques français, en particulier le Parti communiste, les immigrés africains et maghrébins auraient eu tendance à « baisser la tête » devant le patron. Puisque leur présence devait être temporaire, ils se devaient de « raser les murs » et d’être « invisibles » pour la société française. Il semble que tout a été fait pour assurer l’invisibilité des immigrés postcoloniaux dans l’espace public (ségrégation urbaine, exclusion politique, etc.), mais certains immigrés ont refusé l’invisibilité sociale et politique.

    Le « mythe de l’échine courbée » est largement remis en cause par l’histoire politique de l’immigration postcoloniale, en particulier du Mouvement des travailleurs arabes (MTA). Le MTA est créé en juin 1972 par des militants arabes et français proches des maoïstes de la Gauche prolétarienne (GP), dont l’expérience politique commune s’est formée dans les Comités Palestine. Créés en septembre 1970, ces derniers ont été les fers de lance (minoritaires et hérétiques) du soutien à la cause palestinienne en France, avec un discours antisioniste radical. Dès la fin des années 1960 et le début des années 1970 se dégagent les principaux champs de lutte de l’immigration présents jusqu’à nos jours, dans lesquels s’est inscrit le MTA : Palestine, crimes racistes, foyers de travailleurs immigrés, logements insalubres, cartes de séjour et de travail, revendications spécifiques des ouvriers étrangers, etc.

    Dans le mouvement social de l’immigration (porté par des immigrés et leurs enfants et/ou concernant la condition d’immigré), le MTA est une référence historique obligée lorsqu’on rentre dans une logique d’héritage et d’inscription dans une histoire longue. Trop souvent, on postule prématurément une continuité historique entre les luttes anticolonialistes, les mouvements de travailleurs immigrés, l’action politique de leurs enfants dans les années 1980 jusqu’à nos jours, de telle sorte que l’action présente tente de se forger une légitimité historique par le rappel des victoires passées. Le problème de ce type de raisonnement est qu’il évite la réflexion sur la combinaison des ressorts structurels et conjoncturels du mouvement social de l’immigration et, par conséquent, empêche une réelle réflexivité constructive dans l’action politique du moment.

    Pour pallier ce problème préjudiciable pour tous, les chemins du monde des sciences sociales et du monde militant de l’immigration devraient se croiser plus souvent. Les rapports conflictuels entre chercheurs et militants ont souvent décrédibilisé l’approche scientifique de l’immigration, les deux mondes ayant chacun leur part de responsabilité, ce qui rend encore plus difficile un dialogue nécessaire. C’est dans le sens d’une réflexivité militante que j’envisage cette présentation générale de l’expérience politique du MTA.

    Palestine : un engagement fondateur

    La cause palestinienne est l’engagement fondateur de tou-te-s les militant-e-s du MTA, auxquel-les les premiers Comités Palestine[2] ont servi de base structurelle, à cause de leur parcours politique inscrit dans la dynamique du nationalisme arabe. En effet, on ne peut pas comprendre l’engagement du MTA sur la cause palestinienne si on ne revient pas sur les conditions d’émigration de ses fondateurs. Leur émigration était anomique et/ou politique en ce sens qu’elle était motivée soit par des raisons politiques, notamment la répression du régime tunisien, soit par des raisons sociales, liés à des trajectoires individuelles de rupture avec l’ordre social établi. En étudiant celles-ci, on se rend compte que le profil des militants du MTA est analogue à celui des pionniers de l’Étoile nord-africaine, analysé par Abdelmalek Sayad[3] à travers le concept de jayah (celui qui est perdu, égaré, n’est plus sur le droit chemin, etc.).

    Employé de manière péjorative au sein des familles arabes, ce concept est entendu différemment par Sayad. Il vise à comprendre la position et la trajectoire politique de militants politiques en marge du reste de la population. L’engagement politique est en effet expliqué par la position en porte-à-faux et de rupture vis-à-vis de l’ordre social, position désavantageuse qui produit une sensibilité plus grande aux rapports de domination et une volonté de se libérer des contraintes sociales de l’ordre dominant. Les trajectoires des militant-e-s du MTA illustrent premièrement une rupture de l’ordre social traditionnel des sociétés du Maghreb, c’est la raison pour laquelle, par exemple, certains ouvriers ont émigré célibataires, pour ne pas dire parce qu’ils étaient des hommes célibataires (dérogeant à la règle de l’émigration des « hommes d’honneur »). Dans leurs familles ou villages, ils faisaient partie de ceux qui subissaient le plus la contrainte sociale.

    Deuxièmement, rupture avec l’ordre national naissant. Les militants du MTA sont des enfants des indépendances. Certains d’entre eux ont participé activement ou modestement à l’effort de guerre de libération, notamment pour les Algériens. Mais à la fin des années 1960, ils se retrouvent en rupture de ban avec les rangs nationalistes, pour des raisons différentes en fonction des contextes politiques nationaux. Par exemple, les fondateurs tunisiens du MTA font partie des « nationalistes marxisants », et sont proches du mouvement d’extrême gauche Perspectives tunisiennes, plutôt influent dans la jeunesse tunisoise. Mais une distanciation se produit au moment de la guerre de juin 1967. Perspectives tunisiennes décide de mettre entre parenthèses la lutte du peuple palestinien pour privilégier le terrain national contre le régime destourien, ce que n’acceptent pas certains membres du futur MTA. Ainsi, il s’agit de militants, forgés par une conscience nationale panarabe et marxisants, qui se retrouvent obligés d’émigrer pour des raisons politiques ou personnelles (émigration anomique).

    Ce n’est donc pas un hasard que la cause palestinienne soit le premier champ de bataille sur lequel ils se retrouvent en France, en particulier après Septembre noir, date de création des Comités Palestine. Une partie d’entre eux ont acquis des dispositions politiques au pays d’origine (voire en France au sein de la Fédération de France du FLN), d’autres apprendront sur le tas, notamment au sein de la Gauche prolétarienne. L’attraction des militants arabes pour la GP à la fin des années 1960 et au début des années 1970 s’explique par deux facteurs : une proximité sociologique entre militants arabes et militants de la GP, et la position antisioniste radicale de la GP. Le premier rend compréhensible la facilité du travail en commun avec les étudiants des Comités Palestine, le second le ralliement des ouvriers politisés au côté de ces Français pas comme les autres. Contrairement aux trotskistes, la GP s’alignait totalement sur les positions de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) et n’invoquait pas de « soutien critique ». Par ailleurs, le travail de terrain de la GP (tracts, marchés, etc.) a favorisé leur « bonne réputation » du point de vue des militants arabes des Comités Palestine.

    Dans le milieu des militants arabes de Paris, les membres du MTA sont pratiquement les premiers à prendre en considération les revendications des travailleurs immigrés. Toutes les organisations politiques et syndicales concentrent leur attention sur les pays d’origine, dont le champ politique est marqué par la mainmise croissante des pouvoirs dictatoriaux sur la destinée des peuples du Maghreb et la répression féroce de l’opposition : la condition des immigrés n’est pas la priorité. Peu à peu, les Comités Palestine se transforment et comptent bien « suivre le mouvement de masse » et, en fait, tendent à donner une expression et une organisation politique à une nouvelle figure du champ politique : le travailleur immigré, arrivé en France pour les nécessités du mode de production industriel. Ils élargissent leur champ d’action aux conditions d’existence et de travail des travailleurs immigrés en demandant la condamnation des crimes racistes, la transformation du fonctionnement des foyers (héritier de l’époque coloniale, de type militaire), l’accès au logement décent, l’obtention d’un statut juridique stable qui ne dépende pas du bon vouloir du patron, la représentation des travailleurs immigrés dans les syndicats, etc.

    C’est au moment de cet élargissement que la question de l’autonomie est posée et qu’elle devient à la fois une revendication et un mode de fonctionnement.

    Qu’est-ce que l’autonomie ?

    L’investissement sur la « cause immigrée » passe par une double logique d’autonomie et d’alliance, dans un « marché » politique où s’échangent les ressources politiques de chacun. Pour les maoïstes, les militants arabes (étudiants et ouvriers) sont des « passeurs » en vue de toucher les populations maghrébines, plutôt hermétiques à leur discours politique. Les militants arabes font ainsi valoir leur connaissance de la langue arabe et du monde immigré. Pour ces derniers, une alliance avec les Français est indispensable pour avoir accès à certaines ressources dont ils sont dépourvus : financement des activités militantes, expériences en termes de mode d’action, accès aux médias, mobilisation du droit, etc. Une sorte de convergence d’intérêts s’établit pour fonder une alliance relativement solide, jusqu’à ce qu’une série d’événements la fissure.

    Le MTA est une innovation dans l’histoire du monde ouvrier français (c’est la première fois que les ouvriers arabes tentent de s’organiser de manière autonome) qui répond à l’exclusion de fait des immigrés du monde syndical. Leurs revendications ne sont pas prises en compte, voire ouvertement déniées, par les appareils syndicaux, d’où leur proximité avec les établis maoïstes. La négation des droits des ouvriers immigrés provient tout d’abord de leur statut d’étranger, parce que leur exclusion du monde politique et syndical est entérinée par la législation dont un des fondements juridiques reste la frontière entre le national et l’étranger. Mais cette exclusion est aussi due aux pratiques des appareils syndicaux, qui font preuve d’une véritable cécité face aux réalités des travailleurs immigrés. Les syndicats ne conçoivent les luttes ouvrières qu’à l’intérieur de l’enceinte de l’usine : la lutte de classe s’arrête aux portes de l’usine. Or les travailleurs arabes sont aussi concernés par les problèmes du logement et du racisme, et élargissent le domaine de la lutte de classe. L’oppression est vécue à la fois dans l’usine, au café, au foyer et dans la rue. Les syndicats ne semblent pas avoir saisi ce phénomène nouveau.

    Par conséquent, l’existence même d’une organisation de travailleurs arabes subvertit radicalement à la fois l’ordre national, en ce qu’elle rompt avec le dogme de la « politesse » de l’étranger, et l’ordre syndical, qui reste sourd aux revendications spécifiques des immigrés. Par ailleurs, le mythe du retour des travailleurs arabes contribuait à ce que la priorité soit donnée à la conservation et à l’avancement des droits et libertés des ouvriers nationaux, menacés par les attaques patronales. L’organisation des travailleurs arabes en France peut alors s’interpréter comme un des premiers signes, sinon le premier signe, le plus manifeste ou visible, de la volonté d’installation sur le territoire français de l’immigration arabe, donc une des premières fissures du mythe du retour et de l’ordre de l’émigration. De plus, l’existence du MTA rend compte des failles du contrôle de l’immigration par les représentations consulaires des pays d’origine. En effet, le pouvoir des amicales[4] est directement contesté, bouleversant les rapports entre population immigrée et États d’origine. Elle entraîne une remise en cause radicale des logiques strictement étatiques de gestion de l’immigration. Les travailleurs arabes ne sont plus « monnayés » entre États, mais prennent directement la parole pour revendiquer leur autonomie face à toutes ces institutions qui tentent de les encadrer : État français, syndicats français, États arabes et partis politiques arabes.

    La question de l’autonomie était aussi centrale pour les Comités Palestine. Mais, au congrès fondateur du MTA, les militants arabes ont considéré qu’ils n’étaient pas suffisamment autonomes et qu’ils étaient contrôlés par des intellectuels français. Dans les textes politiques des Comités Palestine, comme pour le MTA, le terme « autonomie » est rarement défini en tant que tel. Il existe une sorte d’accord implicite sur sa définition, mais qui reste néanmoins floue pour les personnes extérieures. Il est donc nécessaire de clarifier cette notion pour saisir tous les enjeux qui gravitent autour, puisque l’autonomie est une revendication en tant que telle des militants arabes. Elle est censée être la solution à leurs problèmes mais, justement, à quels problèmes est-elle censée apporter une solution ? Les témoignages des expériences de lutte des travailleurs arabes pendant le congrès fondateur du MTA affirment que l’absence d’autonomie nuit au succès des grèves d’usine. L’enjeu réside dans la question de la prise de décision, du contrôle politique, et du pouvoir des ouvriers arabes. Il s’agit alors d’une demande d’autonomie politique et organisationnelle, qui se rapproche du principe d’autodétermination. Les décisions doivent être prises par les premiers concernés, et les travailleurs arabes du MTA ont trop expérimenté l’accaparement du pouvoir par les centrales syndicales. Le problème se pose particulièrement dans les usines composées d’une écrasante majorité de Maghrébins, ce qui est le cas pour la quasi-totalité des ouvriers rassemblés au congrès. L’autonomie politique ne signifie pas séparatisme politique aux yeux des militants du MTA. Il ne s’agit pas de mettre un terme à l’existence des comités de lutte d’atelier, dans lesquels on retrouve des ouvriers français et d’autres nationalités, mais de dégager un espace politique d’expression des aspirations des travailleurs arabes en vue de la satisfaction de leurs revendications spécifiques, qui ont trait à la carte de travail, à la carte de séjour, aux conditions d’embauche, etc. Autrement dit, les travailleurs arabes auront d’autant plus de poids politique qu’ils sont auto-organisés pour faire avancer leurs propres problèmes, non pris en compte par les syndicats français. Ainsi, la revendication d’autonomie politique et organisationnelle n’est que la résultante de l’exclusion politique et syndicale des immigrés engendrée par le droit social français, et par les pratiques des appareils syndicaux. Si ces derniers avaient répondu aux attentes des travailleurs arabes, nul doute qu’ils se seraient complètement intégrés dans le cadre syndical, ce qui a d’ailleurs été le cas à plusieurs reprises.

    Cette situation ressemble beaucoup à celle des années 1920-30, comme le souligne Sayad sur les discours et pratiques politiques de l’époque, et notamment sur les liens entre communisme et nationalisme. Les personnages politiques des années 1920 ont le plus souvent conclu à l’irréductibilité des deux, sans penser leur possible complémentarité. Plus profondément, nationalisme et communisme sont les grilles de lecture et les modes d’action contre deux formes de domination : le colonialisme et le capitalisme. Or, comme le souligne Sayad, « malin qui pourra départager, dans la conjonction que réalise l’immigration des colonisés entre le fait colonial (et le nationalisme qui en est le produit et la riposte) et la dimension sociale de la condition ouvrière dont les travailleurs immigrés sont une des composantes nouvelles »[5]. Ce qui est en jeu pour les syndicats et les partis politiques de gauche, des années 1920-1930 jusqu’aux années 1970, est la capacité pour le mouvement communiste d’intégrer dans son discours et ses pratiques politiques la dimension coloniale, la domination de l’impérialisme culturel. Or, force est de constater que ni le PCF vis-à-vis de l’Étoile, ni la gauche post-Mai 68 (sauf quelques militants de l’extrême gauche) vis-à-vis du MTA, n’ont su saisir l’émergence de la figure du travailleur immigré. L’émergence du MTA peut être interprétée comme la conséquence de l’incapacité de considérer une nouvelle donne dans la composition de la « classe ouvrière », et surtout de se rendre compte qu’il s’agit d’une immigration postcoloniale. Le silence sur les revendications des travailleurs arabes en France a sûrement à voir avec l’oubli de la période coloniale, séquelle du traumatisme créé par la guerre pour l’indépendance de l’Algérie.

    Le deuxième aspect de l’autonomie est d’ordre culturel. Face à l’idéologie de l’intégration-assimilation, les travailleurs arabes demandent l’autonomie culturelle. Certaines des revendications apparues durant les années 1970 et 1971, comme l’organisation de la fête de l’Aïd-el-Kébir et l’apprentissage de l’arabe, peuvent paraître anodines, mais elles subvertissent radicalement la conception étatique de l’immigration, naturellement disposée à s’intégrer à la communauté nationale. Du point de vue de l’État, si l’étranger compte s’installer sur le territoire français, il est sommé de s’intégrer à la culture de la communauté majoritaire, partant du principe que l’homogénéité culturelle est nécessaire à la cohésion sociale. Affirmer des revendications culturelles remet largement en cause ce qui est appelé le « modèle d’intégration à la française » et résiste à l’injonction à l’intégration. Pour les militants du MTA, l’appartenance à la nation arabe est perçue comme un moyen d’unification culturelle allant de pair avec l’unité politique. Pour obtenir celle-ci, il faut faire face aux menaces d’« extinction culturelle » par l’enseignement de la langue arabe et de l’histoire du monde arabe (mais non religieux). L’enjeu politique et social est alors celui de la capacité des immigrés à s’autodéfinir culturellement, qui est largement compromise par la puissance de l’injonction à l’intégration. L’autonomie culturelle est aussi un refus radical des catégorisations étatiques pour lesquelles l’immigration est synonyme de travailleur. En accolant l’adjectif « arabe », c’est toute la conception de la politique de l’immigration, conçue comme une froide gestion de flux migratoires, qui est remise en cause. Cependant, l’autonomie culturelle ne signifie pas séparatisme communautaire, à la manière du phénomène de Nation Of Islam tel qu’il s’est développé à la même période aux États-Unis.

    Le troisième aspect majeur de l’autonomie des travailleurs arabes en France est le problème du double isolement politique et social. Comme pour l’Étoile nord-africaine, les militants des Comités Palestine ont tenté de l’éviter en bénéficiant des solidarités de fait au sein de l’immigration maghrébine en France, et en s’appuyant sur une organisation d’une autre nature, en l’occurrence la GP. Mais les expériences négatives au sein des Comités Palestine révèlent que les solidarités de fait ne sont pas évidentes, et qu’elles étaient fortement compromises par les pressions des amicales. Pour permettre l’autonomie, les militants du MTA se retrouvent devant le défi de rompre l’isolement vis-à-vis de l’immigration maghrébine et de créer un sentiment d’appartenance à la nation arabe, par une organisation institutionnalisant les liens culturels au sein des « masses arabes ». De l’autre côté, l’isolement politique avec les organisations françaises est clair, d’autant plus que la GP est en phase de désintégration. Il est donc difficile de s’appuyer sur elle pour créer un mouvement autonome. Mais l’isolement n’est pas total, du fait des appuis politiques de certains gépistes français avec qui les militants arabes entretiennent des relations privilégiées, et des réseaux chrétiens progressistes, qui vont jouer un rôle fondamental dans le soutien au mouvement des sans-papiers. Finalement, l’éclatement de la GP va jouer un rôle dans l’autonomisation du MTA. Si le MTA entre dans la voie de l’autonomie politique, c’est aussi parce que la force d’attraction de la GP a fortement diminué, notamment après les antagonismes sur la mort des athlètes israéliens aux Jeux olympiques de Munich en septembre 1972[6].

    Répression

    La concrétisation de la revendication d’autonomie est symbolisée par la fameuse grève « générale » contre le racisme de septembre 1973[7]. Pour la première fois de l’histoire du mouvement ouvrier en France, des travailleurs arabes appellent à une grève pour dénoncer des crimes perpétrés en dehors de l’usine. Déclenchée dans la région marseillaise, ce mouvement essaime dans toute la France, avec des succès divers selon les usines et les localités, et il est l’occasion de mesurer l’ampleur du dispositif de répression de l’expression autonome des travailleurs arabes, en particulier dans la région parisienne. Alors qu’à la même époque, le Black Panther Party (BPP) et l’American Indian Movement (AIM) subissent la répression féroce du COINTELPRO[8], les mouvements dissidents français sont étroitement surveillés et infiltrés. Sans qu’il y ait commune mesure avec la violence du FBI contre le BPP et l’AIM (dont les dirigeants sont assassinés ou emprisonnés) qui relève de l’ordre de la stratégie d’élimination, la stratégie des autorités françaises est celle de l’endiguement par l’expulsion ou de l’emprisonnement des dirigeants du MTA, et la neutralisation de leur capacité de mobilisation.

    La grève contre le racisme de septembre 1973 à Paris, qui a un succès relatif quantitativement (faible mobilisation globale, mais retentissement considérable dans certaines usines ou quartiers) mais énorme symboliquement, est un bon exemple de la stratégie d’endiguement. Les Renseignements généraux (RG) et la préfecture de police de Paris sont très au courant des moindres mouvements et même du contenu des réunions de préparation de la grève, et une institution, créée dans le cadre de la lutte contre la « subversion nationaliste » des indépendantistes algériens, est mobilisée : les Services d’assistance technique (SAT). Les SAT, dirigés par d’anciens militaires de l’armée d’Afrique, signifiaient la collusion entre administration et contrôle politique. Pour obtenir des documents administratifs et circuler, les « Français musulmans d’Algérie » devaient passer par ces services, qui collectaient des informations sur les agents subversifs potentiels. Après 1962, les SAT ne sont pas dissous et les agents SAT continuent leur travail d’encadrement social (et politique) de l’immigration postcoloniale, en particulier africaine et nord-africaine. Ils reconvertissent leur savoir-faire et leur connaissance des milieux immigrés dans le cadre d’une France postcoloniale qui a toujours besoin de leurs services.

    C’est ainsi que les SAT mobilisent leurs agents pour endiguer la grève générale du MTA. Le directeur du SAT parisien et d’autres agents rencontrent le président de l’Amicale des Algériens en Europe, les notables arabes locaux (Belleville et Barbès), des responsables associatifs ou de centres sociaux, des gérants de foyers pour travailleurs immigrés, etc., en leur demandant expressément de convaincre la population arabe de ne pas participer à la grève. Suite au rassemblement devant la mosquée de Paris le 14 septembre, le recteur de la Mosquée de Paris, Si Hamza Boubeker, envoie une lettre à la préfecture pour se désolidariser de l’action du MTA et prête allégeance à la République. L’institution religieuse joue ainsi son rôle de « pacification » des populations musulmanes.

    Les raisons d’une dissolution de fait

    Le MTA a donc dû faire face à de multiples obstacles qui ont grandement compliqué sa tâche, et contribué à sa dissolution de fait en 1976. Une alliance objective, et parfois explicite (comme les archives l’illustrent), entre les amicales (marocaine, algérienne et tunisienne), les syndicats (à l’exclusion de certains secteurs de la CFDT), les institutions religieuses musulmanes et le Ministère de l’Intérieur, pour réduire la zone d’influence du MTA sur l’immigration arabe. Elle s’articule avec une politique d’emprisonnement et la tentative d’expulsion des militants les plus actifs : Hamza et Saïd Bouziri, Vascan Dadayan, Maurice Courbage, etc. L’arrivée au Ministère de l’Intérieur de Poniatowski en 1974 va accélérer le phénomène puisque, suite à une grève de sans-papiers menée par des militants de la région marseillaise, le MTA est quasiment décapité dans le sud de la France.

    L’autre facteur de la dissolution est lié à l’autonomisation de la troupe de théâtre Assifa vis-à-vis du MTA. Depuis 1973, une partie des militants s’est investie dans ce nouvel « outil de propagande », selon les termes de l’époque, supposé porter d’une nouvelle manière le discours politique du MTA. Or, Assifa pose la question fondamentale de la relation entre l’art et l’organisation politique, et le MTA était divisé entre les partisans de la tutelle de l’outil artistique au service de l’organisation politique, et les défenseurs de l’autonomie de la troupe. Les champs politique et artistique n’obéissent pas aux mêmes règles de fonctionnement, décalage qui produit un affaiblissement du MTA. La troupe Assifa se professionnalise peu à peu, pour devenir quasiment indépendante du MTA, ce qui provoque une crise interne du MTA parisien.

    Cet article d’Abdellali Hajjat a été publié initialement en mai 2006 dans le numéro 16 de Contretemps


    Notes

    [1] Nous ne revenons pas sur les ambiguïtés de la distinction entre « étranger » et « immigré ». Pour un point de vue stimulant sur ce problème, lire Françoise de Barros, « Des “Français musulmans d’Algérie” aux “immigrés”. L’importation des classifications coloniales dans les politiques du logement en France (1950-1970) », Actes de la recherche en sciences sociales, n° 159, 2005, pp. 26-45.

    [2] Cf. Abdellali Hajjat, « Les Comités Palestine (1970-1972). Aux origines du soutien de la cause palestinienne en France », Revue d’études palestiniennes, n° 98, hiver 2006.

    [3] Abdelmalek Sayad, « Nationalisme et émigration », in La Double Absence, Paris, Seuil, coll. « Liber », 1999, pp. 133-159.

    [4] Les gouvernements des pays du Maghreb ont créé des « amicales » pour encadrer socialement et politiquement leurs ressortissants en France. Extensions directes de pouvoirs politiques souvent impopulaires, les amicales sont à la fois craintes (elles exercent une réelle pression exigeant l’allégeance au pouvoir en place et la neutralité politique sur le territoire français) et utiles (du point de vue des démarches administratives) pour la population maghrébine en France.

    [5] Abdelmalek Sayad, op. cit., p. 144.

    [6] Le bureau politique de la GP a condamné la prise d’otages, alors que la majorité du MTA soutenait les Palestiniens.

    [7] Pour plus de détails sur l’histoire de la grève, cf. « Le MTA et la grève “générale” contre le racisme », in Plein droit, n° 67, décembre 2005.

    [8] Cf. Ward Churchill et Jim Vander Wall, Agents of Repression: The FBI’s Secret Wars Against Domestic Dissent, Boston, South End Press, 1988.


    Lire aussi, comme témoignage direct de l'époque :


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  • La conquête du Pouvoir populaire est l'objectif central de toute révolution. Dans les conditions de chacune, la tâche est de commencer à l'instaurer en partie, sous la forme de Comités populaires ouverts.

    Ces comités sont formés de cinq membres, appelés "commissaires" parce qu'ils sont commissionnés par les masses et révocables par elles à tout moment. Ils sont désignés par des Assemblées de Représentants qui elles-mêmes, lorsque cela est possible, sont élues par des Assemblées populaires de toute la population d'un village ou d'un secteur donné. Ils sont dirigés par le Parti et constitués de communistes, de paysans et d'autres forces progressistes locales. Leur mission est de commencer à créer une nouvelle politique, une nouvelle économie et une nouvelle culture dans les campagnes, comme préparatif pour pouvoir le faire à l'échelle de tout le pays.

    Parmi les cinq commissaires, le Secrétaire représente le Parti et le prolétariat (présent à la campagne essentiellement à travers le Parti). Le Commissaire de Sécurité, également membre du PCP, est chargé de la défense du Nouveau Pouvoir par la population locale dans son ensemble, organisée en milices, aux côtés des forces de guérilla locales et des forces principales de l'Armée de Guérilla Populaire. Cela signifie aussi se préparer au repli tactique des habitants de la zone en cas de nécessité. Il ou elle est également chargé-e des pouvoirs de police, et prend des mesures contre les contra-révolutionnaires qui attaquent le Nouveau Pouvoir et contre les criminels de droit commun qui nuisent aux masses. Le vol, la drogue, l'ébriété permanente, la prostitution, les jeux de hasard, les violences contre les femmes et les enfants, les viols et autres fléaux qui depuis si longtemps prospèrent sous la protection du vieil ordre établi, sont désormais réprimés.

    Le Commissaire à la Production dirige l'organisation de la nouvelle économie basée sur un nouveau type de relations sociales. La terre est divisée et répartie en premier lieu entre ceux qui n'en possèdent pas, et ensuite seulement, s'il reste quelque chose, entre ceux qui en possèdent peu, sur la base du nombre de membres de la famille. La terre est donnée à la famille dans son ensemble et non pas seulement aux pères de famille ou aux hommes en général (aux jeunes qui souhaitent quitter leurs parents et fonder leur propre famille est également donné de la terre). Mais si la possession de la terre est personnelle, les semences et les récoltes sont collectives et organisées par tous et toutes. Le Commissaire veille à ce que soient entretenues les terres des personnes âgées, des veuves et des enfants orphelins. Il ou elle organise également la production de la propriété directe du Comité, telle que l'élevage de volailles ou de cuyes (cochons d'Inde, équivalent du lapin là-bas), ainsi que les travaux collectifs d'irrigation.

    Des changements fréquents sont opérés dans les plantes et les céréales cultivées, afin de permettre aux Bases d'Appui (ensembles de plusieurs Comités populaires) d'être les plus autosuffisantes possibles. Le Comité s'occupe de la sélection scientifique des semences et de la diversification des récoltes. Avec les efforts pour remplacer les fertilisants chimiques dépendants de l'importation, tout ceci met fin à la nécessité de s'endetter. Ces mesures et l'abolition des fermages ("loyers" pour les terres agricoles) libèrent les paysans du lourd poids de la bureaucratie gouvernementale, qui depuis si longtemps suçait le sang de l'agriculture, et de la tyrannie des potentats locaux dont le pouvoir sur la terre, le contrôle du crédit et des intrants s'exerçaient de la manière la plus arbitraire. Ces nouvelles relations de production et d'échange, conçues pour satisfaire les besoins du Peuple et de la Guerre populaire, libèrent les forces productives de leurs entraves et améliorent la productivité. Dans certains cas se développent même des embryons de manufactures de vêtements et d'outils de travail, de sorte que les Bases d'Appui se font encore plus autosuffisantes.

    Les petits et moyens commerçants sont autorisés à poursuivre leurs importantes activités ; de fait, pour eux aussi c'est une libération. Mais les Comités populaires ouverts organisent aussi l'activité d'échange. Cela peut signifier, localement, une Foire populaire dans laquelle les marchandises peuvent se vendre directement du producteur au consommateur ou être troquées. Cela signifie aussi des convois de mulets qui puissent traverser sans risque les montagnes et permettre le commerce avec d'autres localités, car les Bases d'Appui ne peuvent pas non plus être totalement autosuffisantes et le Parti doit veiller à la solution de ce problème.

    À mesure que se renforce militairement la révolution, et que son pouvoir politique commence à être relativement consolidé dans un certain nombre de zones, ces questions économiques n'en sont que toujours plus cruciales. L'autosuffisance économique signifie l'indépendance vis-à-vis de la dette et de l'inflation, et l'opportunité de commencer à développer une économie qui nourrisse le Peuple au lieu de se nourrir de lui. C'est un élément clé pour la Guerre populaire, car sinon le Pouvoir révolutionnaire s'effondrerait et l'Armée révolutionnaire ne pourrait plus compter sur le Peuple pour se ravitailler. Ces changements font également partie de la préparation de l'avenir, lorsqu'un Pérou économiquement indépendant et militairement puissant pourra se maintenir fermement face à l'impérialisme et servir la révolution mondiale.

    Le Commissaire aux Affaires communautaires est chargé de l'administration de la justice. Cela veut dire organiser les procès populaires : un procureur présente les arguments du Comité, l'accusé a le droit d'assurer sa défense et de présenter des éléments à sa décharge, et en dernière instance ce sont les masses populaires qui écoutent et tranchent. Un autre exemple est l'organisation d'un comité de réparation des dommages entre paysans, de manière tournante. Si la vache d'un paysan endommage le champ semé de son voisin, le comité se charge d'assurer l'indemnisation du préjudice. La première fois, c'est un avertissement, la deuxième fois la vache est confisquée, la troisième fois elle est abattue et sa viande est partagée entre les habitants.

    Ce Commissaire célèbre également les mariages. Les personnes qui souhaitent se marier doivent amener deux témoins qui certifient qu'aucun des deux n'est déjà marié avec quelqu'un d'autre – ceci est la seule obligation. Les affaires de la communauté comprennent aussi le registre des naissances, l'approvisionnement du dispensaire médical populaire (avec des médicaments confisqués à l'ennemi et des plantes médicinales), les examens de santé des jeunes mariés et autres diverses choses.

    L'éducation est guidée par la conception communiste et liée au travail. Aux paysans sont enseignés les mathématiques de base, l'espagnol (que le PCP considère important pour s'ouvrir une fenêtre sur le reste du monde, mais la langue indigène n'est pas réprimée et il n'est pas cherché à l'anéantir), les sciences naturelles et l'histoire. Le Commissaire organise aussi les loisirs, parmi lesquels le sport, la culture (œuvres de théâtre ou spectacles de marionnettes), des célébrations pour les anniversaires révolutionnaires, et aide à l'organisation de la fête votive du village. Celle-ci est organisée comme une fête populaire – le Parti n'aide ni n'empêche d'autres célébrations à caractère plus religieux. Le Parti applique la politique qualifiée par Lénine de liberté de croyance au sens le plus large : il respecte le droit des gens à leurs croyances religieuses, mais se réserve par ailleurs le droit de lutter pour l'éducation au matérialisme dialectique.

    Le divorce est immédiatement concédé, dès que sollicité par un conjoint, sans conditions. Le Commissaire doit réussir à ce que le couple en séparation parvienne à un accord sur les enfants en général. Il essaye aussi d'aider à résoudre les conflits entre familiers, conjoints, ou parents et enfants, à travers un processus de critique et auto-critique. Si une femme souhaite s'en aller pour rejoindre l'Armée de Guérilla Populaire, et que ses parents ou son mari s'y opposent, dans tous les cas elle peut s'en aller. Le mari est prioritaire pour garder la charge des enfants s'il le souhaite ; dans le cas contraire, le Comité cherche et trouve une solution.

    Il y a aussi un Commissaire chargé de convoquer et organiser les réunions des organisations de masse dirigées par le Parti.

    Ainsi fonctionne un Comité populaire ouvert. Au long de la période ces Comités ont pu prendre des formes différentes, en accord avec le rapport de force entre révolution et contre-révolution dans une zone et/ou à un moment donné et avec la fluidité de la Guerre populaire, avançant ou refluant, apparaissant puis possiblement disparaissant pour réapparaître ensuite au même endroit ou ailleurs.

    Un ensemble de Comités populaires forme une Base d'Appui et l'ensemble de ces Bases d'Appui constitue la République de Nouvelle Démocratie en formation, matérialisation du Nouveau Pouvoir qui élimine et détruit le vieil État bourgeois et propriétaire terrien.

    Au travers du Nouveau Pouvoir, les masses s'éduquent révolutionnairement à l'exercice du pouvoir politique et acquièrent une conscience de classe pour elles-mêmes. De cette façon, la ligne de masse pour l'accumulation de forces au cours de la guerre révolutionnaire a pu s'appliquer grâce à la participation des masses à la lutte révolutionnaire et à la construction du Nouveau Pouvoir, étant destinataires de cette ligne les masses les plus profondes de la paysannerie pauvre et du prolétariat. C'est ainsi que des milliers d'ouvriers et de paysans péruviens se sont unis à la Guerre populaire.

    Pour l'année 1986, en dépit des tueries de masse perpétrées par les forces armées gouvernementales et les ronderos (milices supplétives contre-révolutionnaires) contre les paysans des Bases d'Appui, l'on comptait des centaines de ces Comités populaires fonctionnant pour la plus grande partie dans la Cordillère des Andes.


    https://revolucionobarbarie.wordpress.com/balance-del-ciclo-de-octubre/estudio-de-otras-experiencias-revolucionarias-destacadas/el-partido-comunista-del-peru-reconstitucion-y-guerra-popular/

    [Pour faciliter la compréhension des choses, il est possible de prendre cette page (peu glorieuse) de l'histoire du PCF :

    "Le 24 septembre 1922, un rapport fut adopté à l’unanimité par le 2e Congrès Interfédéral Communiste de l’Afrique du Nord, et disait que « ce qui caractérise la masse indigène, c’est son ignorance. C’est, avant tout, le principal obstacle à son émancipation ». Envisagée ainsi, « l’émancipation des populations indigènes d’Algérie ne pourra être que la conséquence de la Révolution en France ». « La propagande communiste directe auprès des indigènes algériens [...] est actuellement inutile et dangereuse. »"

    ... et de l'extrapoler à la situation péruvienne => au Pérou aussi, après la mort prématurée de Mariátegui (principal théoricien communiste de la situation coloniale du pays), pour la gauche "marxiste" à direction principalement criolla (blanche, coloniale espagnole, encore que ce soit là-bas moins une question d'apparence physique européenne que de mode de vie), le "principal problème" et "obstacle à l'émancipation" de l'"Indien" était son "ignorance" (motif aussi, soit dit en passant, de sa privation de droits civiques : jusqu'en 1979, pour voter, il fallait savoir lire en castillan...) ; son seul salut l'intégration à la classe ouvrière des villes et le métissage tant biologique que culturel progressif ; et son émancipation "forcément" une "conséquence" de la "révolution", ou plutôt de la prise de pouvoir électorale ou par putsch militaire de cette "gauche"-là à Lima – la capitale créature du colonialisme espagnol séparé de la métropole en 1821.

    Au "mieux" on "pense très fort à lui" et on le célèbre de manière mythologisante, "bon sauvage" dans un sens, comme Haya de la Torre en son temps (avant de dériver toujours plus à droite pour tenter de gagner les élections) ou de manière plus contemporaine le mandarin et perroquet bavard Quijano (qui au moment d'aller au bout des conséquences de ses brillantes analyses, n'a pas fait grand-chose sinon des conférences "même dans le noir" et pérorer sur les massacres de Fujimori en renvoyant implicitement dos-à-dos le Pouvoir criollo assassin et la seule résistance armée et organisée conséquente face à lui).

    Jusqu'à ce qu'un jour de mai 1980, dans la campagne andine d'Ayacucho, brûlent les urnes de la collecte semi-décennale de bulletins de vote par les caciques politiques (y compris "de gauche") locaux... et commencent à se lever par milliers les ignoré.e.s et méprisé.e.s de toujours, sonnant l'heure du remembrement d'Inkarri, du retour promis de Tupac Amaru étant des millions ("je reviendrai et je serai des millions"), d'une aube nouvelle au bout de la Nuit coloniale espagnole !]


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  • ... véritable coup de grâce porté au "socialisme dans les principes islamiques" de la Proclamation de la Toussaint 1954 ; et instauration du "néolibéralisme policier oligarchique-compradore" en place à l'heure actuelle, par (donc) ce coup d’État dont la mécanique huilée à la perfection peut parfaitement mériter le qualificatif de "postmoderne" (ou, si l'on voulait employer des formules très imagées, de coup d'État "ciseaux", "tenaille").

    Extraits (en "vrac organisé" si l'on veut) de discussions FB ; et quelques morceaux de documentation sur ce vaste sujet qui fait encore polémique aujourd'hui, mais dont la position du "Camp de la Vérité" a tout de même plutôt bien réussi à se consolider autour d'une analyse cohérente :

    "Il est donc question [dans un article du site "Algérie Patriotique" partagé par quelqu'un] que "plus aucun peuple ne tolère vivre sous la férule de la dictature de la finance".

    Et de quand daterait, donc, en Algérie, l'établissement de cette "dictature de la finance" et de "l’intérêt particulier de classes dirigeantes mondialistes, apatrides, illégitimement identifiées à la nation, ces classes parasitaires n’incarnent aucunement la nation qu’elles piétinent et bradent à leur guise à la finance internationale" ?

    Pour moi, clairement, de Janvier 92. Ce sont les janviéristes. Ils ont fomenté la montée du FIS pendant les 4 ou 5 années précédentes, comme "menaaaace" (d'un "Iran 2.0"), jusqu'à ce qu'il soit aux portes du pouvoir, pour présenter alors leur coup d'État comme un sauvetage de la "démocratie". Comme après tout un peu, ici, avec le FN... Depuis 30 ans c'est comme ça : les politiques néolibérales alimentent le vote FN, et c'est au nom de lui faire barrage que le Parti unique néolibéral (aujourd'hui cristallisé en Macron) assoit son règne et impose ces politiques.

    Renseigne-toi sur les émeutes de 1988 qui ont largement 'lancé' le mouvement islamiste en Algérie. Délibérément provoquées. Il n'y avait aucune pénurie. Ils ont délibérément stocké les semoules pour faire exploser les prix.

    Le but était de se débarrasser du socialisme dans les principes islamiques qui régnait depuis l'indépendance conformément à la Proclamation de la Toussaint."

    "Les villages massacrés en 97-98, je serais curieux de savoir pour qui ils avaient voté aux législatives, mais à mon avis tout sauf RND."

    "Je me pose une question bête : serait il possible de retrouver, d'une manière ou d'une autre, les résultats des élections de décembre 91 pour les villages où il y a ensuite eu des massacres ?

    Je veux dire, est ce qu'il serait envisageable que ces massacres 'GIA'-DRS aient surtout été perpétrés contre des villages FIS ?"

    "Ben écoute, moi tout ce que je t'ai dit c'est que si on me présente deux intellectuels devant, l'un s'appelle Bourdieu [lire plus bas] et l'autre BHL, j'ai quand même tendance à vite faire mon choix même si je ne suis pas à proprement parler un fan de Bourdieu non plus.

    Je pense aussi que pour la clique militaro-mafieuse au pouvoir (à moins que tu nies que c'est une clique militaro-mafieuse...), peu importe qu'en face c'étaient des islamistes, ça aurait pu être des maoïstes peu importe aussi : c'était des gens qui allaient prendre le pouvoir à leur place et eux, le pouvoir ils voulaient le garder.

    À partir de là... Des tas de gens ont tout de même argumenté, et documenté que les premiers à fomenter les égorgeurs, si on parle bien des ÉGORGEURS, étaient sans doute ni les Saoud ni les sionistes (quoique sans doute aussi) mais bel et bien cette clique militaro-mafieuse...

    Comme TOUJOURS, car ce n'était pas la première fois dans le monde, on va fomenter la version fanatique-jobastre d'une idéologie pour la rendre odieuse et la griller.

    Ici, le pouvoir craint l'anticapitalisme ; eh ben, en toute logique il fomente et médiatise des éléments qui ne sont certes pas comparables aux GIA, ni à Pol Pot, mais du moins ridiculisent le truc... Il craint les musulmans, les banlieues, et donc en toute logique il est content quand il y a des malades qui poignardent les gens dans le métro, pour pouvoir dire "regardez, les musulmans (je veux dire les musulmans pas tout gentils bien républicains bien carpettes) c'est ça, des barbares qui veulent vous égorger". Ça les arrange.

    Et donc j'ai toutes les raisons de penser que les égorgeurs qui permettaient de dire "regardez, l'islam politique (et, de fait, quiconque nous critique et veut nous renverser) c'est ça", arrangeaient le pouvoir ; et que celui-ci les fomentait tout en prétendant les combattre.

    Ce dont on parle, c'est d'une stratégie de la tension. Tu as une idée de ce que c'est ?

    C'est quand un pouvoir contesté 'tue' le débat politique en l'enfermant dans une alternative binaire entre lui et la PIRE opposition possible, dont personne ne veut ou en tout cas pas assez pour le menacer sérieusement.

    Et personne ne dit que l'"hypercaste" d'Alger en aurait été l'inventeuse... C'est juste vieux comme le monde !

    Donne toi la peine de lire ce lien de Voltairenet, il y est question de ce Khadra dont il est même douteux qu'il ait écrit une seule ligne de ses prétendues 'œuvres' :

    https://www.voltairenet.org/article167514.html

    (Lounis Aggoun, ici interviewé, est le coauteur d'un fascinant "Françalgérie, crimes et mensonges d’États" aux éditions La Découverte)

    Sans atteindre (heureusement) un tel niveau de tragique : quand le régime néolibéral qui gouverne la France reste en place, encore et encore, parce qu'on a installé dans la tête des gens que l'alternative c'est le FN... Ça te parle ?

    Et que ceux qui te parlent d'anticapitalisme, c'est des totos qui se cachent le visage en manif pour aller péter des abribus (le Système en tremble sur ses bases, c'est certain !) et ensuite les darons, les gamins etc. se font gazer...

    Tout ça c'est une technique vieille comme le monde par laquelle un pouvoir se maintient.

    Les massacreurs étaient bien des individus d'idéologie salafiste, particulièrement jobards dans leur genre. Mais les forces d'"État profond" s'en frottaient les mains...

    Aujourd'hui il est de toute façon notoire que des centaines d'individus ex-djihadistes, impliqués dans des atrocités sans nom (faits connus des autorités), sont libres comme l'air... En général, ils tiennent des petits bazars où ils fourguent de la camelote chinoise. C'est 'normal' : ils sont bien récompensés. Ils ont permis d'enfermer le pays dans un débat mortifère, auquel ceux qui sont au pouvoir aujourd'hui doivent de l'être."

    "En enfermant la narration des évènements dans un affrontement entre le 'Bien' (le pouvoir) et le 'Mal' terroriste égorgeur, le Pouvoir cherchait à se gagner le soutien des Occidentaux comme 'moindre mal'.

    Soutien qu'il n'avait pas au départ. C'est bien pour ça qu'il le cherchait.

    Des affaires comme les moines de Tibehirine ou le détournement de l'avion d'Air France, pourraient avoir été 'laissées faire' pour que justement la France 'prenne conscience de la menace' et 'choisisse son camp' une bonne fois pour toute.

    Sauver leur peau, ET en même temps mener à son terme le coup d'État néolibéral qui était déjà rampant depuis la mort de Boumediene (très fortement rampant depuis 87-88)."

    "Le problème en décembre 91 en réalité c'était pas la victoire du FIS (qui avait fait je crois 40% des voix, preuve que lui aussi avec son projet avait du mal à faire consensus au delà d'un plafond de verre d'une demi-Algérie, grosso modo...).

    C'était la défaite du pouvoir en place. Le rejet à son encontre exprimé par les urnes.

    Il faut se mettre dans la tête que ce pouvoir n'était plus celui de Boumediene 20 ans avant.

    Boumediene n'était pas arrivé au pouvoir de la manière la plus 'clean' qui soit. Mais enfin il avait stabilisé et fait avancer le pays ; il y avait une fierté sur la scène internationale ("Mecque des révolutionnaires"), etc. : tout ça faisait une légitimité.

    Mais 10 ans après sa mort, cette légitimité de la haute caste FLN, c'était fini !

    Et la Décennie Noire, c'est ce qui a permis d'inculquer dans la tête des gens "regardez ce qui arrive quand on veut le changement"... Même encore aujourd'hui c'est impressionnant : il y a un grand mouvement de contestation, mais c'est moins violent qu'ici en France ! Les gens sont tétanisés à l'idée d'aller 'trop loin' et d''ouvrir la boîte de Pandore'..."

    "Et la meilleure non : Boudiaf revient ; il va (peut-être) nettoyer un peu les écuries d'Augias... Bim bam boum : assassiné ! Le PRÉSIDENT, mec... Le gars censé être le mieux protégé du pays ! Non mais de qui se fout on ?!!"

    https://www.liberation.fr/week-end/2003/11/15/les-gia-sont-une-creation-des-services-de-securite-algeriens_451964

    Lire aussi, très complet et édifiant : http://www.anp.org/fr/LesGenerauxEtLeGIA.html

    [Autre discussion]

    "Non mais ce que je dis et qui est assez 'acté' par les analystes sérieux, c'est qu'à partir de 88 il y a eu une politique délibérée de provoquer le mécontentement, pour en finir avec le "socialisme dans les principes islamiques" fondateur du FLN et du régime.

    Les émeutes de la semoule par exemple ont été totalement provoquées, y avait pas de pénurie, aujourd'hui tout le monde le sait.

    Ce mécontentement a profité politiquement au FIS. Et ensuite quand aux premières élections libres ils se sont retrouvés aux portes du pouvoir : cris à "l'Iran 2" et coup d'État, pour mettre en place le régime actuel d'une petite caste néolibérale.

    Ensuite de quoi, là encore pour asseoir son pouvoir, cette caste s'est appuyée sur le "gauchisme" (je veux dire l'équivalent pour l'islamisme de ce que Pol Pot ou l'Armée Rouge Japonaise étaient au marxisme) des GIA... afin que ceux-ci massacrent toute opposition, en particulier les masses populaires pro-FIS de 1991.

    Mais évidemment certains étaient moins cons que d'autres : ceux-là se sont dissociés des massacres et globalement c'est devenu le GSPC puis AQMI"

    "Bien évidemment qu'un mouvement de masse aussi maousse que le FIS n'a pas été "une création des services", pas plus que le FN (je préfère largement le programme du FIS, hein) ; mais le système a vite perçu l'intérêt d'en faire un Mal absolu contre lequel "défendre les valeurs de la civilisation"... et ainsi instaurer le néolibéralisme.

    Ensuite de quoi les GIA ben ça a été des agents de ce système, au sens d'équivalents pour l'islamisme de ce que les ultra-gauchistes peuvent être comme agents du système contre les révolutionnaires authentiques. En gros. Mais là de manière extrêmement violente, tuant, égorgeant des villages entiers.

    Il y a eu une vraie politique des janviéristes d'élimination ciblée pour laisser à la tête le chtarbé des chtarbés, Antar Zouabri : un vrai cassoce, même Daesh a jamais fait pire."

    "Il faut se souvenir qu'il y avait eu des élections, présidentielles en 1995 et surtout législatives en juin 1997... "Comme par hasard", juste avant le déclenchement de la pire vague de massacres de villages entiers.

    https://fr.wikipedia.org/wiki/Élections_législatives_algériennes_de_1997

    Avec le recul, on ne peut pas dire que ces élections avaient été un franc succès pour le RND, le "parti janviériste" qui n'avait obtenu que 156 sièges sur 380, loin de la majorité donc.

    Rappelons qu'à cette époque, même le FLN (qui avait obtenu 62 sièges) était un parti d'opposition ; le parti de ceux pour qui il fallait dialoguer avec les modérés, et il n'aurait pas fallu interrompre les élections en Janvier 92. Il avait, en la personne de son premier secrétaire Abdelhamid Mehri, participé à la fameuse "Plateforme de Sant'Egidio" (janvier 1995) qui visait à trouver une solution politique et pacifique à la crise, aux côtés de la Ligue Algérienne des Droits de l'Homme, du Front des Forces Socialistes (FFS) d'Aït Ahmed, du Mouvement pour la Démocratie en Algérie de Ben Bella, et encore d'autres forces d'opposition au pouvoir janviériste, y compris islamistes dont... le FIS.

    Le FIS qui à ces élections restait interdit de participation (il l'est toujours aujourd'hui), mais deux partis islamistes modérés, le MSP et Ennahda, proches des Frères Musulmans, avaient récolté quelques 23,5% des voix et 103 députés (le MSP était carrément en deuxième position derrière le RND).

    Donc une théorie possible et souvent avancée, est que les islamistes (avec le FIS de toute façon toujours interdit) n'avaient pas renouvelé leur succès de décembre 1991 et se sont alors "radicalisés"... Sauf que ça ne tient guère debout, pour ne pas dire pas du tout, étant donné que pour le GIA (qui a revendiqué les massacres, ça tout le monde est d'accord) les élections de toute façon ne comptent pas, et ceux qui y participent sont des "impies".

    L'autre possibilité, beaucoup plus plausible pour le coup, étant donc que ces groupes ultra-radicaux barjos, apocalyptiques, aussi éloignés des Frères Musulmans et même d'un gars comme Hachani du FIS, que Pol Pot de la France Insoumise, aient été poussés en avant avec la "bénédiction" du pouvoir RND et du haut état-major, du DRS etc., pour "punir" les "mal-votants"... Qui étaient tout de même plus de 65% de la population, une paille !

    C'est pour ça que je disais qu'il serait intéressant de savoir pour qui les villages massacrés avaient voté aux différents scrutins depuis 1991..."

    Exemple d'écrasement des maquis armés pro-FIS au plus grand bénéfice des "barges" du GIA, dans le but manifeste d'enfermer la population dans l'alternative mortifère entre ceux-ci et les "éradicateurs", et d'asseoir au bout du compte le pouvoir de la clique janviériste néolibérale (on notera d'ailleurs, au passage dans le récit, les attaques ciblées sur les entreprises et les travailleurs du secteur public... au moment même où le régime suivant les recommandations du FMI entreprenait sa liquidation, quelle "coïncidence" n'est-ce pas !) :

    La guerre civile en Algérie, 1990-1998 (Luis Martinez)



    Le texte de Bourdieu sur la question (1998) :

    "Tous ceux qui ont été là, jour après jour, pendant des années, pour recevoir les réfugiés algériens, les écouter, les aider à rédiger des curriculum vitæ et à faire des démarches dans les ministères, les accompagner dans les tribunaux, écrire des lettres aux instances administratives, aller en délégation auprès des autorités responsables, solliciter des visas, des autorisations, des permis de séjour, qui se sont mobilisés, dès juin 1993, dès les premiers assassinats, non seulement pour apporter secours et protection autant que c'était possible, mais pour essayer de s'informer et d'informer, de comprendre et de faire comprendre une réalité complexe, et qui se sont battus, inlassablement, par des interventions publiques, des conférences de presse, des articles dans les journaux, pour arracher la crise algérienne aux visions unilatérales, tous ces intellectuels de tous les pays qui se sont unis pour combattre l'indifférence ou la xénophobie, pour rappeler au respect de la complexité du monde en dénouant les confusions, délibérément entretenues par certains, ont soudain découvert que tous leurs efforts pouvaient être détruits, anéantis, en deux temps, trois mouvements.

    Deux articles écrits au terme d'un voyage sous escorte, programmé, balisé, surveillé par les autorités ou l'armée algériennes, qui seront publiés dans le plus grand quotidien français, quoique bourrés de platitudes et d'erreurs et tout entiers orientés vers une conclusion simpliste, bien faite pour donner satisfaction à l'apitoiement superficiel et à la haine raciste, maquillée en indignation humaniste. Un meeting unanimiste regroupant tout le gratin de l'intelligentsia médiatique et des hommes politiques allant du libéral intégriste à l'écologiste opportuniste en passant par la passionaria des « éradicateurs ». Une émission de télévision parfaitement unilatérale sous des apparences de neutralité. Et le tour est joué. Le compteur est remis à zéro. L'intellectuel négatif a rempli sa mission : qui voudra se dire solidaire des égorgeurs, des violeurs et des assassins, — surtout quand il s'agit de gens que l'on désigne, sans autre attendu historique, comme des « fous de l'islam », enveloppés sous le nom honni d'islamisme, condensé de tous les fanatismes orientaux, bien fait pour donner au mépris raciste l'alibi indiscutable de la légitimité éthique et laïque ?

    Pour poser le problème en des termes aussi caricaturaux, il n'est pas besoin d'être un grand intellectuel. C'est pourtant ce qui vaut au responsable de cette opération de basse police symbolique, antithèse absolue de tout ce qui définit l'intellectuel, la liberté à l'égard des pouvoirs, la critique des idées reçues, la démolition des alternatives simplistes la restitution de la complexité des problèmes, d'être consacré par les journalistes comme intellectuel de plein exercice.

    Et pourtant, je connais toutes sortes de gens qui, bien qu'ils sachent parfaitement tout cela, pour s'être heurtés cent fois à ces forces, recommenceront, chacun dans son ordre et avec ses moyens, à entreprendre des actions toujours menacées d'être détruites par un compte rendu distrait, léger ou malveillant ou d'être récupérées, en cas de réussite, par des opportunistes et des convertis de la onzième heure, qui s'obstineront à écrire des mises au point, des réfutations ou des démentis voués à être recouverts sous le flot ininterrompu du bavardage médiatique, convaincus que, comme l'a montré le mouvement des chômeurs, aboutissement d'un travail obscur et si désespéré parfois qu'il apparaissait comme une sorte d'art pour l'art de la politique, on peut, à la longue du temps, faire avancer un peu, et sans retour, le rocher de Sisyphe.

    Parce que, pendant ce temps, des « responsables » politiques habiles à neutraliser les mouvements sociaux qui ont contribué à les porter au pouvoir, continuent à laisser des milliers de « sans papiers » dans l'attente ou à les expulser sans ménagements vers le pays qu'ils ont fui, et qui peut être l'Algérie."

    En Algérie, la Loi de Concorde civile de 1999 suivie de la "Charte pour la Paix et la Réconciliation nationale" de 2005 interdit sous peine de plusieurs années de prison de "réveiller le passé", autrement dit toute contestation même mineure de la version "janviériste" des évènements de la Décennie Noire ; et même hors du pays (notamment ici en France), les généraux et dirigeants de l'époque engagent régulièrement des poursuites en "diffamation" contre quiconque met en cause leur rôle à l'époque.


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  • Haya, “En avant” en arabe, est l’extraordinaire chronique de la grève victorieuse des OS immigrés de Citroën Aulnay en avril et mai 1982.

     

     


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  • #AníbalQuijano

    https://es.wikipedia.org/wiki/An%C3%ADbal_Quijano

    Je peux tout sauf prétendre avoir une connaissance encyclopédique de l’œuvre d'Anibal Quijano. Mais disons qu'un membre (si j'ai bien compris) de la Gauche Unie péruvienne [en fait disons d'une "aile critique" de celle-ci : dans les années 1970, ne "marchant" pas dans la combine de la junte "progressiste" de Velasco ce qui est à son honneur, il animait le Mouvement Socialiste Révolutionnaire disons "marxiste hétérodoxe" et trotskysant] ; ponte universitaire issu selon toute vraisemblance de la bourgeoisie blanche ou métisse claire et dont les étudiant.e.s qualifiaient de "petite secte d'halluciné.e.s", et lui-même d'"inter-échange terroriste avec l'État" ce qui a été en réalité, malgré sa défaite finale face au "Plan Challe" du fasciste Fujimori, la PREMIÈRE GUERRE DE MASSE ANTICOLONIALE (anti-"semi-coloniale-semi-féodale" = contre le Pouvoir colonial criollo détaché de la métropole espagnole en 1821) du pays depuis Gabriel Condorcanqui dit Tupac Amaru II en 1780 ; contrôlant en 1990 près de la moitié de celui-ci (pas mal pour une "petite secte d'halluciné.e.s"...) ; j'ai nommé l'héroïque Guerre populaire du PCP "Sentier Lumineux"... je trouve ça un peu moyen quand même.

    Pour ne pas dire rageux de voir un mecton de 6 ans son cadet (Abimael Guzmán "Gonzalo"), finalement du même milieu social que lui (universitaire issu de la petite/moyenne bourgeoisie du province), trouver (lui !) le chemin de la véritable mobilisation des masses paysannes indigènes de l'Altiplano, qui depuis un demi-siècle restaient désespérément sourdes aux appels de la gauche socialiste et communiste même avec les discours les plus indigénistes qui soient - celle-ci ne touchant en réalité (et encore dans une mesure assez limitée) que les personnes parties vers le salariat industriel des moyennes et grandes villes (ce qui était encore une minorité de la population travailleuse dans les années 1980).

    Quijano me fait l'impression d'être un "indo-américaniste de gauche" dans la tradition de l'APRA originelle (Haya de la Torre, avant la dérive droitière, anticommuniste et finalement néolibérale) ; une pensée intéressante et historiquement nécessaire à un moment donné (pas la seule cependant : il y a Mariátegui), mais qui au moment d'aller au bout de toutes ses conséquences, et en particulier d'assumer la violence révolutionnaire totale pour la libération, recule.

    [À ce sujet : http://ekladata.com/L-antagonisme-PCP-vs-ONG-et-Gauche-Unie-au-Perou.pdf]

    Nombreux sont les personnages qui, ayant eu une longue carrière militante politique, sont susceptibles d'avoir ce double aspect (on pourrait penser spontanément à Messali, encore que son hostilité réelle au déclenchement de la lutte armée et à la Toussaint 54 soit discutée par les historiens algériens, donc j'éviterai les affirmations catégoriques à ce sujet... mais bon vous voyez l'idée ; ou sinon Kautsky, qui "prophétisait" la révolution en Russie en 1902 pour finalement la vomir lorsqu'elle arriva réellement 15 ans plus tard).

    De los Andes hasta los mares /
    Rugen las masas embravecidas /
    Enarbolando bandera roja /
    Iniciamos la Guerra Popular !

    Desplegando las guerrillas /
    Va floreciendo la nueva aurora /
    Conquistando bases de apoyo /
    Derrochando heroicidad !


    Aníbal Quijano Obregón (Yanama, provincia de Yungay, 1928) es un sociólogo y teórico político peruano. Actualmente es director de la cátedra América Latina…
    es.wikipedia.org
     
     

     

     

     

    Article à l'occasion de sa mort, juin 2018 :

    Aníbal Quijano, qui vient de s'éteindre à 90 ans, a été un grand théoricien anticolonialiste et anti-impérialiste dans la lignée de Mariátegui, dont la sincérité n'est pas à mettre en doute ; mais qui n'a malheureusement pas su assumer ce que devait être la forme de la destruction de la colonialité du pouvoir qu'il dénonçait, c'est à dire, la forme qu'elle a prise dans son propre pays au cours des années 1980 et 1990 : la Guerre populaire guerre-populaire-au-perou.

    Son modèle se situait plutôt du côté de la politique menée en Bolivie depuis 2006 par Evo Morales ("expression la plus claire d’une crise de la colonialité du pouvoir"), dont on sait aujourd'hui, au bout de 12 ans, qu'elle est à la libération indigène anticoloniale ce que la social-démocratie est à la révolution socialiste retour-situation-amerique-du-sud ; une "sortie pacifique de la colonialité" en quelque sorte, colonialité qui est un système de domination et d'exploitation... or l'on sait, scientifiquement, que l'on ne sort pacifiquement d'AUCUN système de domination d'une classe/position sociale sur une autre (on peut lire à ce sujet le leader indigène historique Felipe Quispe : bolivie-felipe-quispe-le-dernier-mallku).

    Disons qu'il a été L'INTELLECTUEL qui a un peu prolongé, développé, mais surtout réussi à FAIRE PASSER Mariátegui (le "Gramsci de l'Amérique du Sud") dans les hautes sphères universitaires du continent et d'Occident, où en tant que coco il n'était forcément pas trop le bienvenu de prime abord... Mais ceci, au prix de cela : mettre en avant une "rupture" pacifique, syndicaliste et électorale avec le Pouvoir colonial dénoncé ; et non RÉVOLUTIONNAIRE par la Guerre du Peuple, contrairement à Gonzalo et au PCP ; autrement dit donc, un prolongement réformiste de Mariátegui comme Gramsci en a lui aussi connu des dizaines d'exemples. C'est dommage, car sur l'analyse c'est une œuvre tout à fait admirable.

     
    **********************************************************


     #FiladeMaosTrotskosEnAllemagne

    Je crois que c'est surtout encore une fois un exemple du règne de la post-vérité internétique.

    L'ère des embrouilles inter-personnelles, entre petits groupes locaux, dont 100 personnes du ter-ter au grand maximum connaissent tous les tenants et les aboutissants, et qui se retrouvent propulsées-buzzées sur le Net à une échelle parfois internationale (comme c'est le cas ici), généralement transformées par celui qui saura le mieux faire sa victime en véritables "attaques fascistes"...

    En l'occurrence, ayant personnellement les contacts pour avoir la version de l'autre côté aussi, les maos ont également leur liste de griefs contre le groupe trotskyste (local hein, je ne pense pas que ça implique l'orga toute entière au niveau allemand) ; griefs qui vont jusqu'à ce qu'ils considèrent (vrai ou pas, vraiment grave ou pas) comme de la délation et du boulot d'indic (il est question d'exposition publique des identité, noms voire même adresses de membres de la JW).

    C'est ce qui aurait causé l'affrontement en se croisant par hasard lors de la nuit du Nouvel An, pas du tout prémédité, toujours selon la version des maos.

    Il y a eu un certain nombre d'affaires du même type ici en Hexagone, ces 2-3 dernières années... et même topo : on balance ses versions sur Internet, et celui qui tire (généralement) le premier le communiqué le plus auto-victimiste, le plus efficace à occulter ses propres torts, se gagne la solidarité du petit monde internéto-facebookien qui n'existe politiquement pratiquement que là ; tandis que ceux qui tardent au décollage passent pour des "soutiens d'agresseurs" quand ils essayent simplement de rétablir un peu les faits... Par contre, comme j'ai pu le constater dans quelques affaires où (j'aurais préféré ne pas l'être, ayant franchement mieux à foutre, mais) j'ai été vite fait impliqué, c'est que comme diraient les gens de QL "celleux qui luttent savent" (pas forcément tout, mais mieux en tout cas). En général, celleux qui sont un minimum impliqué.e.s dans un militantisme de terrain connaissent mieux le "genre" des protagonistes, ou du moins, ayant l'expérience d'embrouilles similaires, sont plus ouvert.e.s à entendre les différentes versions et à concevoir que les choses soient beaucoup plus compliquées que ce que les "victimes" racontent.

    Je ne pense pas, honnêtement, que le mouvement révolutionnaire anticapitaliste ait particulièrement sombré dans un syndrome d'épouvantable division depuis quelques années. Des ceci qui se tapent avec des cela, ça a toujours existé ; et bien souvent les relations exécrables entre deux groupes locaux ne reflètent pas exactement les relations qui peuvent exister entre les deux mêmes orgas, ou les deux courants idéologiques (souvent vastes et multi-facettes) respectifs à une échelle plus grande.

    La différence c'est que dans les années 70 ou 80, de minimis non curat praetor et ce genre de petits échanges de baffes locaux ne faisaient pas la une d'organes de presse révolutionnaires en ligne jusqu'à l'étranger...

    C'est un peu comme les photos de soi, vous savez : à cette époque, elles étaient dans un album rangé sur l'étagère. Pas sur Instagram à la poursuite des 10.000 likes...

    Il faut dire aussi que les organes de presse des organisations politiques s'adressaient moins à leurs militants (qui avaient des bulletins d'information internes) qu'aux masses, et certainement pas à une nébuleuse cyber-militante facebookienne. Masses qui auraient trouvé le fait de diffuser internationalement ce genre de faits encore plus lamentable que les faits eux-mêmes. Ce qui favorisait peut-être une forme d'auto-censure...

    Berlin. Agression contre des militant-e-s trotskystes

    Au cours de la nuit du Nouvel An, des militant-e-s de l’Organisation Révolutionnaire Internationaliste ont été victimes d’une violente agression à Neukölln, un quartier qui a été la cible de nombreuses attaques, ces derniers…
    revolutionpermanente.fr
     

    [* On pourrait d'ailleurs, je pense, me reprocher à moi certaines des choses que je critique ici.

    Le problème, tel que l'ont défini des dizaines de leaders révolutionnaires par le passé, c'est qu'à un moment donné, on est toujours un peu obligés de se battre sur le terrain défini par l'adversaire. Je pense qu'on rêverait tou.te.s, par exemple, d'un réel changement de société dans la non-violence. Mais on sait que face au Capital, ce n'est pas possible.

    Donc à un moment donné, quand TOUT LE MONDE fonctionne ainsi par "dossiers" et/ou communiqués publics sur ses petites embrouilles entre personnes et groupes affinitaires qui sautent à la rescousse de leurs potes, jusqu'à flirter avec la délation, si l'on veut (au moins) rééquilibrer un peu les faits, on est obligés d'aller sur le même terrain.

    La Jugendwiderstand va probablement répondre à ces accusations dans les prochains jours, et il y aura probablement des attaques ad hominem et de la semi-délation contre le groupe trotskyste. Mais maintenant qu'illes sont qualifiés de véritables nazis et que ça a buzzé jusqu'à l'étranger, il ne leur est sans doute pas possible de rester sans répondre.

    Contrairement à ce qu'on vous a appris à l'école, "c'est qui qui a commencé" est une donnée de toute première importance dans la vie...]

     

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  • "La lutte de l’émir d’Afghanistan pour l’indépendance de son pays est objectivement une lutte révolutionnaire, malgré les conceptions monarchistes de l’émir et de ses lieutenants, car elle affaiblit, désagrège, sape l’impérialisme ; alors que la lutte de démocrates, de « socialistes », de « révolutionnaires » et de républicains comme Kérensky et Tsérételli, Renaudel et Scheidemann, Tchernov et Dan, Henderson et Clynes, pendant la guerre impérialiste, était une lutte réactionnaire, car elle avait pour résultat de maquiller, de consolider, de faire triompher l’impérialisme.

    De même, la lutte des marchands et intellectuels bourgeois égyptiens pour l’indépendance de l’Égypte est une lutte objectivement révolutionnaire, malgré l’origine et la condition bourgeoises des leaders du mouvement national, malgré leur opposition au socialisme ; alors que la lutte du gouvernement ouvrier anglais pour le maintien de l’Égypte sous la tutelle de la Grande-Bretagne est une lutte réactionnaire, malgré l’origine et la condition prolétariennes des membres de ce gouvernement, malgré leurs soi-disant convictions socialistes."

    Lénine, cité par Staline dans Principes du Léninisme, 1924.

    Voilà la seule position anti-impérialiste et internationaliste conséquente dans une lutte anticoloniale.

    PALESTINE : avoir sa préférence pour tel ou tel mouvement de résistance relève de la liberté de chacun-e ; mais le SOUTIEN À TOUTE LA RÉSISTANCE et le NON-RENVOI DOS-À-DOS de la résistance même "de droite" (si l'on veut schématiser ainsi) avec l'occupant en mode "deux fascismes", des quelques victimes des roquettes ou des attentats avec les milliers de mort-e-s des bombardements etc. etc., est une POSITION DE PRINCIPE exigée d'ailleurs par la fameuse (et sacro-sainte) gauche palestinienne que tout le monde (enfin, presque) trouve "safe" de soutenir.

    Ce n'est pas à nous, habitants et financeurs par nos impôts d'un État parmi les principaux soutiens de l'occupation israélienne, de la colonisation et de l'apartheid ; et pas près (à court terme) d'en finir avec lui et la bourgeoisie capitaliste-impérialiste dont il est l'appareil ; de dicter aux Palestiniens opprimés comment ils doivent lutter, sous quel drapeau, sous la direction principale de quelle organisation et idéologie (quelle que soit notre préférence à titre personnel).

    Quant à renvoyer dos-à-dos les principales forces de résistance, au prétexte d'"islamistes" (et pourquoi pas "nationalistes staliniennes" pour le FPLP, FDLP et compagnie tant qu'on y est, je suis sûr qu'il y en a qui y ont pensé...), et la violence raciste criminelle de l'occupant, c'est prendre le parti de ce dernier, tout simplement. Là, ça, ça me démange carrément d'en faire une ligne de démarcation et de déclarer ennemis politiques les tenant-e-s de ce genre de position !!

    Sans, encore pour cette fois, citer nommément personne... à bon entendeur.

    [Lire par exemple ici : http://anti-imperialiste.over-blog.org/article-a-propos-du-…

    "Sur la question palestinienne, la démarcation est claire et doit être inlassablement rappelée : en Palestine occupée il y a un oppresseur et il y a un opprimé. La critique éventuelle des conceptions qu’ont les opprimés – i.e. les forces palestiniennes qui résistent à la colonisation – n’a de sens que lorsque cette ligne de démarcation principale est clairement définie et assumée. En d’autres termes, la critique des conceptions du monde présentes dans les cerveaux des acteurs de la Résistance palestinienne est tout à fait légitime mais cette critique est subordonnée au soutien à cette même Résistance. À nos yeux par exemple, la domination de la Palestine est une affaire de lutte des classes à l’échelle locale et internationale et non un conflit ethnique et religieux. Toute conception pessimiste qui fait du conflit au Proche-Orient l’expression d’un conflit entre religions ou civilisations est erronée. Et il est évident que pour les tenants de l’Islam politique c’est le contraire qui est vrai. Mais en aucune façon la nature des conceptions du mouvement national palestinien n’est un préalable à la solidarité internationale, en particulier pour nous ici dans un centre impérialiste. (...) Les révolutionnaires soutiennent sans ambigüité les forces qui agissent et qui résistent objectivement à l’impérialisme sans pour autant nécessairement partager toutes leurs conceptions. En fait, dans une situation d’oppression, les idées qu’ont en tête ceux qui résistent ne constituent pas la question principale. Ce qui compte c’est ce qu’ils font. Ce qui compte, c’est leur lutte objective. C’est le point de vue du matérialisme historique comme l’a magnifiquement montré Engels dans La Guerre des Paysans en Allemagne."

    Ah et puis les histoire de "la droite et l'extrême-droite israélienne", on oublie aussi... La "gauche" sioniste est le plus grand foutage de gueule de l'histoire de l'humanité. Le Ministre de la Défense lors de la guerre-massacre de juillet-août 2006 au Liban s'appelait Amir Peretz. Quelques mois plus tôt... il avait été célébré comme une sorte de Corbyn local, le "retour de la gauche" à la tête du Parti travailliste israélien !]

     



    J'ai aussi partagé cet article sur FB :


    “Le principe, c’est qu’on soutient les luttes qui
    affaiblissent l’impérialisme français”


    ... Et bim !!!

    C'est là le typique exemple de ce que de très nombreuses personnes révolutionnaires, libérationistes des Peuples ou anticolonialistes pourfendent depuis des années : la THÈSE UTILITARISTE.

    "Soutenir" les luttes parce que ça "affaiblit" notre ennemi, autrement dit parce que ça nous SERT. Exactement le même raisonnement que tou.te.s celleux qui, depuis le Komintern comme l'"Opposition de Gauche" des années 1930 jusqu'à nos jours, ont pu dire "Vive les luttes des Peuples colonisés"... parce que ça affaiblit la bourgeoisie chez nous, notre ennemi direct. JAMAIS pour les Peuples opprimés qui luttent en tant que tels, parce que c'est JUSTICE, parce que c'est le sens de l'Histoire (la strangulation des Centres capitalistes par les Périphéries exploitées)... Parce que c'est la colonne vertébrale du système que nous disons combattre ; parce que (petits Blancs occidentaux vis-à-vis des Peuples colonisés d'outre-mer et des racisé.e.s ici même, petits bourgeois "dans le mouv" des métropoles vis-à-vis des "sans-dents" et des "illettré.e.s" des territoires relégués) nous aurions compris que le secret de notre impuissance est que notre râtelier, notre petit confort repose sur leur servitude et que (en véritables révolutionnaires) nous serions prêt.e.s à TRAHIR, à RENONCER à cela pour soutenir sans prétendre leur dicter leur agenda ces luttes nécessaires pour dynamiter ce système – et arracher l'humanité et la planète à la perdition vers laquelle il les précipite.

    Non, toutes ces luttes ne seraient en réalité (dans le fond) que des "notes discordantes dans le processus révolutionnaire (que l'on) voudrait contrôler" (Argala au sujet de la lutte basque et des partis "ouvriers" espagnols) ; des problématiques "gênantes" (des "cailloux dans la chaussure") dont il faudrait faire en sorte de se débarrasser au plus vite, en en "tenant compte" et en leur donnant "quelque chose comme ce qu'elles veulent" ; sans jamais cesser de chercher, bien sûr, à imposer son agenda au leur à la première occasion... et sans hésiter à les poignarder dans le dos lorsqu'elles ne veulent pas s'y prêter.


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  • Sur la question de l'abolition de l'esclavage "grâce" à la Révolution de 1848, donc des afro-descendants des colonies qui "devraient" leur liberté aux ouvriers de la métropole qui ont "fait" cette révolution : je pense qu'il n'y avait tout simplement aucune causalité, ni dans un sens ni dans l'autre.

    Le seul lien est que le système fRance dans sa globalité impériale avait atteint un point d'ingouvernabilité, avec une recrudescence des révoltes ouvrières et paysannes en Hexagone et des révoltes d'esclaves dans les colonies, mais sans coordination aucune ni même (à cette époque) solidarité voire simplement conscience de l'existence les unes des autres.

    Louis-Philippe est tombé, et à partir de là le système a dû reconstruire sa gouvernabilité en octroyant le suffrage universel masculin aux Blancs ET (enfin) l'abolition définitive de l'esclavage, c'est à dire la transformation des afro-descendants en métayers gardant genre 20% du produit de leur "propriété" (je sais pas exactement combien c'était, en Algérie en tout cas c'était 20% : la khamsa), ou en journaliers payés 4 sous par jour... Mais effectivement, une amélioration quand même et obtenue PAR LA PRESSION mise par les révoltes sur la gouvernabilité de la partie coloniale du système (pression extrêmement concrète, rappelons que la plus riche de toutes ces colonies - Haïti - s'était déjà faite la malle 40 ans plus tôt comme cela, à travers un soulèvement général des esclaves). Et nullement, par contre, par celle mise par les ouvriers et paysans blancs sur la gouvernabilité de la partie hexagonale européenne (il y avait déjà eu une révolution parisienne en 1830, sans abolition pour autant).

    C'est pourquoi d'ailleurs, en toute honnêteté, je pense que Marx himself fantasme dans sa Lettre à Lincoln qu'a dernièrement publiée Ribbe sur son site Une Autre Histoire (en plus d'être un texte prônant la colonisation des "terres vierges" par le "travail des émigrants"-colons blancs, autrement dit un texte anti-Premières Nations). Je ne crois pas du tout, en 1864, à une telle "conscience" des ouvriers européens que la libération des Noirs outre-Atlantique "servirait" la leur...

    Et quand bien même il y aurait vraiment eu une telle conscience... ça n'en reste pas moins une mauvaise chose. Ce n'est pas la même chose de soutenir une lutte parce qu'elle vise l'émancipation humaine COMME NOUS, et même une émancipation d'une oppression PIRE que la nôtre (lorsque l'on est capable d'avoir atteint ce niveau de conscience-là, de reconstruction du sentiment de commune humanité que le capitalisme détruit) ; et de soutenir une lutte parce qu'elle SERT la nôtre... Ça, c'est ce qui conduit systématiquement à vouloir dicter son agenda aux autres. Genre en 1928, l’Étoile nord-africaine, cool ça "affaiblit le Grand Capital impérialiste" donc ça nous rend service => on soutient. Par contre en 1936, soutenir l'ENA c'est un obstacle au Front populaire avec les radicaux et les socialos => hop, on soutient plus (et ceux qui insistent deviennent des "hitlériens")*.


    [* « Ceux qui, n’ayant rien compris ou rien voulu comprendre à la situation politique en France, et dans le monde, voudraient voir se dresser, aujourd’hui même, les peuples coloniaux dans une lutte violente contre la démocratie française sous le prétexte de l’indépendance, travaillent en réalité à la victoire du fascisme et au renforcement de l’esclavage des peuples coloniaux ». Cahiers du Bolchevisme, Deloche - lire ici :
    etatdexception.net/eradiquer-les-fascistes-basa…/ ]

    Sur la question de l'abolition de l'esclavage "grâce" à la Révolution de 1848


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  • Les forces de police franco-espagnole ont mené plusieurs interpellation vendredi aus sein de l'organisation clandestine et séparatiste basque espagnole ETA. Une… 
    lexpress.fr


    Le président d’honneur de la Ligue des droits de l’homme, annoncé un temps comme l’un des interpellés, a expliqué au « Monde », qu’il aurait dû se trouver sur…
    mediabask.naiz.eus|Par Mediabask
     
    Ils ont répondu présent à Bayonne en faveur de la paix 
    Environ 4 000 personnes sont venues apporter leur soutien, aujourd'hui à Bayonne, aux cinq personnes arrêtées à Louho...
    mediabask.naiz.eus|Par Ximun Larre
     

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  • "La classe n'efface pas la race" : c'est ce que ne cessent de répéter les militants décoloniaux, et que démontre l'évidence de manière récurrente.

    Mais c'est aussi quelque chose que rechignent à admettre beaucoup de camarades, blancs mais aussi racisés, disons "marxistes purs et durs". Essayons donc d'avoir une analyse MATÉRIALISTE de la réalité de cette "distorsion" de la hiérarchie de classe par le paramètre racial, c'est-à-dire, en dernière analyse, le reflet dans les conceptions hégémoniques et tous les rapports sociaux de cette DIVISION INTERNATIONALE DU TRAVAIL qu'est la division entre Blancs et non-Blancs. Vous allez voir, c'est en réalité très simple.

    Qui sont les non-Blancs riches, ou du moins aisés ? Il est possible de dire sans se tromper que 99,99% rentrent dans les 3 catégories suivantes :

    - Des dignitaires ou enfants de dignitaires de leurs propres pays colonisés ou néocoloniaux. En Amérique latine, déjà, ce sont généralement des Blancs (caste criolla de colons espagnols + d'immigration européenne diverse, séparés de la métropole au 19e siècle) => out du sujet, illes sont "de la maison". Ailleurs, ce sont des indigènes COOPTÉS par l'impérialisme et à son service, des "courroies de transmission" de sa machine. Lorsqu'illes viennent "faire un tour par ici", ou même s'y installer pourquoi pas, pour y dépenser beaucoup d'argent et y payer beaucoup d'impôts, illes sont reçu.e.s avec les égards dûs à leur rang - quitte à privatiser pour elleux des portions de littoral, ou des boutiques entières des Champs Élysées. Mais attention ! Qu'illes ne viennent surtout pas se MÊLER DE NOS AFFAIRES, surtout de POLITIQUE ; nous dire ce qu'on doit faire... ou nous demander des comptes. Illes doivent rester dans leur rôle (de courroies de transmission, de commis, bref SERVILES et obséquieux). C'est l'expérience qu'a pu faire par exemple Rama Yade (fille de dignitaires sénégalais, pourtant engagée plutôt à droite politiquement). Ou n'importe quel dignitaire de n'importe quel pays du Sud global (Algérie par exemple) qui viendrait rappeler à la fRance ses crimes coloniaux, ou pointer du doigt le traitement de ses compatriotes d'origine dans les quartiers... Christiane Taubira représente un croisement de ce cas et de celui d'une personne d'origine modeste qui s'est hissée socialement par ses propres efforts, que nous verrons plus loin (de surcroît elle a longtemps été d'engagement politique anticolonialiste et indépendantiste, elle s'est grandement "rangée" depuis mais est restée un "caillou dans la chaussure" des tenants de la suprématie blanche).

    - Des représentant.e.s d'économies émergentes, comme Mittal ou les Qataris, Asiatiques etc. etc., c'est-à-dire des fortunes bâties peut-être (pas toujours) comme "courroies de transmission", mais qui s'indépendantisent et ne sont pas exactement réductibles à ce rôle (et puis, sans "monter" jusqu'à un tel niveau, des gens qui auraient accédé à une bonne situation dans de telles économies - il y a de plus en plus une "jolie" classe moyenne dans tout un tas de pays d'Afrique, d'Asie, du monde arabe ou d'Amérique latine, bref des "Trois Continents").

    Mais justement... ces "économies émergentes" sont un phénomène ABSOLUMENT INSUPPORTABLE aux yeux de l'Occident, dont elles sont un symbole du déclin !! Ces individus vus comme des concurrents dans la guerre économique, concurrents d'autant plus insupportables qu'ils bousculent "l'ordre des choses" voulant que les décideurs économiques de la planète soient européens ou nord-américains, qu'ils ne sont pas (en somme, là encore) "restés dans leur rôle", ne risquent évidemment pas de bénéficier de représentations dominantes positives. Genre, qu'ils sévissent en Afrique ou en Lorraine, ils vont être présentés comme des "ogres" économiques au point de presque nous laisser croire, le temps d'un instant d'égarement, que nos transnationales tricolores sont des organismes de bienfaisance. Genre.

    Ces deux premières catégories sont (donc) des cas de bourgeois non-blancs "du bled", directement des pays colonisés ou néocoloniaux.

    - Troisième catégorie, les riches ou du moins "petits bourgeois" D'ICI, né.e.s ici.

    Né.e.s ici c'est-à-dire... né.e.s prolos, ou du moins de parents né.e.s tel.le.s. Soyons sérieux deux minutes : connaître l'histoire de l'immigration coloniale en Hexagone, c'est savoir qu'il est impossible de remonter jusqu'aux grands-parents (grand maximum) sans trouver des prolétaires, l'usine ou le chantier, la cité voire le bidonville. C'est le cas de Benzema ou de Rachida Dati, ou de n'importe qui ayant échappé aux filières techniques pour accéder à la fac et, derrière, à un job stable et correctement payé. Là, la situation est celle d'être perpétuellement vu.e comme "illégitime", "intrus", entré.e "par effraction" dans un milieu où l'on n'est pas censé.e être.

    Et ce n'est pas qu'une question d'"évasion" du prolétariat EN SOI, car on ne retrouve pas cette situation chez les enfants ou petits enfants de prolos en général, de prolos immigrés italiens ou portugais en particulier (ou migrants ou pas des "provinces" les plus périphériques de l’État bleu-blanc-rouge), pour qui l'"ascenseur social" reste et demeure un symbole du "modèle républicain"... mais n'est pas "censé" fonctionner pour celleux issu.e.s de l'immigration coloniale ; plus exactement, il DOIT être "en panne" pour celleux-ci afin de pouvoir correctement fonctionner pour les autres (lien de conditionnalité). Bien entendu, à moins d'assumer ouvertement des lois d'apartheid (ce qui la foutrait mal, tout de même...), il n'est pas possible d'empêcher qu'une petite minorité y arrive tout de même ; trouve en quelque sorte... la porte de l'escalier de service, et le monte. Mais une fois arrivé.e.s "en haut", donc, leur sanction sera d'être en permanence renvoyé.e.s à "là d'où illes n'auraient pas dû sortir".

    Il n'est donc tout simplement pas possible de parler de petit.e.s, moyen.ne.s voire grand.e.s bourgeois.es "comme les autres". Il y a un paramètre fondamental de distorsion.

    Il ne s'agit bien sûr pas (je vois venir les procès d'intention, me faire dire ce que je n'ai pas dit) de dire que le racisme est vécu strictement et exactement de la même manière que dans les quartiers populaires ; que l'argent et/ou autre forme de capital (réseaux relationnels etc.) ne protègent pas au moins de ses manifestations les plus violentes dans une plus ou moins large mesure.

    Il ne s'agit pas non plus d'excuser tout ce qui peut être fait EN TANT QUE BOURGEOIS (comme Mittal en Lorraine) ou dignitaires de colonies ou néocolonies. Il ne s'agit pas, puisque certain.e.s ne pourront sans doute pas résister à ce genre de point Godwin, de dire que les dirigeants actuels de la totalité des pays arabes ne sont pas des pourris ou que Sassou-Nguesso n'est pas un satrape fasciste (À CONDITION de ne pas occulter la main impérialiste occidentale - ou russe, parfois - qui tire les ficelles de ces personnages par derrière).

    Mais il s'agit de faire ce simple constat qu'à côté de la division sociale bourgeois/prolétaires dans chaque pays (à commencer, puisqu'elle y est née, par nos pays blancs occidentaux), il y a une division INTERNATIONALE (séculaire) du travail qui subordonne EN PRINCIPE la totalité du monde non-blanc (impérialiste, si vous voulez) à la totalité du monde blanc (colonial et semi-colonial, si vous voulez) ; et qui rend "intolérables" les "évadé.e.s" de ce schéma.


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  • http://www.vp-partisan.org/article1697.html

    Interview de volontaires du Bataillon International de Libération au Rojava - OCML Voie Prolétarienne

    À l'automne, nous avons interviewé deux volontaires révolutionnaires français partis se battre au Rojava, André et Jacques. Les deux ont combattu dans (...)
    vp-partisan.org
     

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  • Article plutôt trotskyste de toute évidence, c'est-à-dire donc un peu gonflant dans le Staline-ceci-Staline-cela (la bonne vieille personnalisation trotskyste de tous les problèmes de l'expérience soviétique quoi, oubliant soigneusement les racines desdits problèmes dans la période pré-1922 où Trotsky dirigeant de l'Armée rouge était le n°2 de l’État - genre Zinoviev il était bien "trotskyste" non ? Zinoviev du Congrès de Bakou, dont Sultan Galiev avait déjà été écarté... et en matière de "primauté absolue de la révolution prolétarienne en Occident sur la révolution coloniale", vous m'excuserez mais bon, Trotsky... si c'est le même Trotsky qui s'est pris dans les dents par Lénine, sur la question paysanne, des critiques tout à fait transposables aux nationalités paysannes des 'marges impériales'... bon j'arrête là).

    Mais bon, BEAUCOUP DE CHOSES TRÈS VRAIES AUSSI... qui par conséquent ne plairont pas au camp (par contre) des "adorateurs". Désolé. "Adorateurs" qui ne manqueront (peut-être) pas de venir avec leurs Sultan-Galiev-ceci-Sultan-Galiev-cela, comme si une pensée de la PRIME ENFANCE du marxisme appliqué à la révolution anticoloniale pouvait être parfaite et exempte d'erreur : BIEN SÛR qu'à la simple lecture de ce document, qui ne cache rien ou pas grand-chose, on voit bien qu'il y a des choses qui ne vont pas. Mais il faut (dans la vie) savoir contextualiser les choses, en ayant par exemple à l'esprit qu'il s'agissait là d'une des premières tentatives de "parler le marxisme dans la langue des peuples colonisés".

    Notion de première tentative que nous n'avons (nous "mao-stals") pas de mal à rappeler au sujet de Staline, lorsque nous répliquons avec les mots de Mao que "certaines (erreurs) étaient difficilement évitables en l'absence de tout précédent dans la dictature du prolétariat auquel on pût se référer"...

    L'on pourrait encore par exemple parler de Mariátegui, autre pensée fondamentale (pour l'Amérique latine - en particulier andine - cette fois) de cette "traduction du marxisme en langue colonisée", qui n'a pas non plus été exempt de trucs tendancieux, comme ses propos peu amènes sur les Afro-Péruviens ou le fait qu'une fois caractérisée l'arriération économique du pays (comme reposant sur la question agraire qui est aussi une question coloniale et indigène), il voit comme principal problème de celle-ci qu'elle "ne permet pas une véritable immigration européenne", propos bien dans l'esprit et cherchant (sans doute) à se conformer aux marxistes locaux de l'époque, marxistes généralement criollos (BLANCS) qui appelaient de tous leurs vœux cette immigration européenne vue comme une importation de travailleurs à qui ils SAVAIENT PARLER... bref, si on veut lui chercher des poux on en trouvera ! Mais tout ceci n'empêche aucunement qu'il ne nous vienne PAS UNE SEULE SECONDE À L'ESPRIT de nier le géant de la pensée marxiste qu'a été Mariátegui. Alors pourquoi lui et pas un autre ?


    L’idée du communisme musulman : à propos de Mirsaid Sultan Galiev (1892-1940) – Période

    L’idée du communisme musulman : à propos de Mirsaid Sultan Galiev (1892-1940) Matthieu Renault À travers…
    revueperiode.net
     
     
     
     
     
     
     
    Un article qu'il est important de compléter avec la vision critique développée ici : sur-la-question-de-sultan-galiev-a143816850

    2 commentaires

  • Bon ben Fidel est mort... Depuis qu'il avait définitivement choisi l'URSS vers 1968, les maoïstes ne l'aimaient pas trop. J'ai cependant toujours voulu prêcher, moi, pour une position un peu raisonnable et équilibrée : http://servirlepeupleservirlepeuple.eklablog.com/che-guevar…

    Alors il y avait des problèmes, c'est sûr, mais ce sont tout simplement les problèmes du 'socialisme réel' qui se sont posés dans tous les pays (et peut-être à Cuba bien moins que dans d'autres). Et le final, depuis 1992 en fait et plus encore depuis quelques années, s'oriente vers la même chose : ''l'ouverture''... Ici un texte génial d'un jeune communiste de là-bas à ce sujet : Cuba à l'heure de l'"ouverture"

    ''Lesmaterialistes'' vont sûrement nous pondre un article pour nous dire que c'était un ''fasciste'', mais leur idole Gonzalo, pour être très critique, ne tenait pas pour sa part de tels propos outranciers (ici une interview de lui, il y a une question consacrée à Cuba : http://ekladata.com/Document1.pdf ; ou encore ce texte du PCP de 1970, parlant de "voie petite-bourgeoise" dans un moment de grande colère qui était celui de l'échec de la stratégie cubaine foquiste, dans laquelle des milliers de révolutionnaires valeureux avaient perdu la vie pour rien, ce que le PCP n'était pas du tout le seul à critiquer - à juste titre - à cette époque) [ça y est la vomissure est sortie, bien qu'on n'y trouve pas le mot "fasciste" cette fois-ci (contrairement à l'article sur Mandela), histoire de nous faire chier certainement lol].

    Fidel est tout simplement (effectivement) à classer avec les Mandela, Arafat ou encore Chávez dans la catégorie des leaders du Sud global qui auront finalement été des RÉFORMISTES. Mais là-bas pour les Peuples cela représente déjà des avancées énormes, et qui surtout ne se font pas comme ici sur le dos de l'exploitation impérialiste... du Sud global mais justement au détriment de celle-ci, l'obligeant à céder du terrain, à PERDRE des parts du produit national accaparé qui seront mises au service du bien-être de la population (la haine des impérialistes, à moins qu'ils n'aient trouvé un compromis vraiment acceptable comme avec Mandela, est là pour en témoigner).

    Il peut et même doit y avoir des critiques révolutionnaires envers ces leaders, émanant du Sud lui-même ; mais ces critiques ne sont pas là pour venir servir les masturbations sordides de petits bourgeois gauchistes occidentaux en quête d'une manière "plus-révolutionnaire-que-moi-tu-meurs" de couvrir de merde les expériences populaires anti-impérialistes à travers le monde...


    Lire aussi :

    Fidel Castro nous a quittés (Unité Communiste Lyon)

    Communiqué de la RBC à la nouvelle de la mort de Fidel Castro

    Fidel Castro est mort - Saluons le révolutionnaire anti-impérialiste (PCm Italie)

    Sur Castro et le castrisme (PC maoïste)

    Décès de Fidel Castro : hommage de la Gauche indépendantiste bretonne

    Fidel Castro (1926-2016) (Quartiers Libres, texte d'Eduardo Galeano)

    Introduction de Saïd Bouamama à son ouvrage sur la Tricontinentale

    La mort de Fidel Castro vue de Martinique et de Guadeloupe (recension de textes par Breizhistance)

    Castro, un panafricaniste fidèle à l'Afrique (Ligue panafricaine - UMOJA)

    Très intéressant aussi : Cuba / Angola, la bataille qui mit fin à l'apartheid

    Ou encore : 7 raisons pour lesquelles les Noirs aimaient Fidel Castro

    Par rapport à la question de l'homophobie (grand 'argument' des décompos gauchistes anticommunistes en ce moment - illes en trouvent toujours un de toute façon, mais là c'est celui-là) : Droits LGBT à Cuba (Wikipédia)


    Addendum :

    Parler de "révolution bourgeoise" au sujet de Cuba ou de n'importe quel pays du Sud global, dans la seconde moitié du 20e siècle, n'a STRICTEMENT AUCUN SENS et montre bien la farce de "marxisme" et les "anti-impérialistes" en carton que sont les gens qui emploient ces termes.

    L'ère des "révolutions bourgeoises", phénomène au demeurant strictement OCCIDENTAL/blanc (à l'exception peut-être des "demi"-révolutions du Japon et de Turquie, entre la fin du 19e et le début du 20e siècle), est CLOSE depuis près d'un siècle et demi.

    Ce qu'il y a dans le Sud global, les Trois Continents, le monde COLONISÉ (ou "protectoralisé" de diverses manières), ce sont comme premières étapes de la marche vers l'émancipation communiste des LIBÉRATIONS NATIONALES populaires, démocratiques ("de nouveau type" comme disaient les communistes chinois), anti-impérialistes ; des révolutions ANTICOLONIALES. C'est ce qu'il y a eu à Cuba en 1959.

    Ce qui peut varier ensuite c'est la RÉUSSITE ou pas de ces révolutions ; autrement dit la capacité à échapper à la RE- (néo-) COLONISATION ; et il est malheureusement vrai, mais c'est normal au stade de l'ENFANCE d'un processus forcément prolongé, qu'à ce jour nous ne pouvons pas observer dans le monde de véritable "réussite" : le Capital impérialiste a toujours réussi à remettre la main sur les pays et les Peuples qui s'étaient levés contre lui (mais au moins y a-t-il eu des EXPÉRIENCES RÉVOLUTIONNAIRES, contrairement au monde occidental blanc industrialisé, impérialiste, où les travailleurs sont restés prisonniers du réformisme financé -précisément- par la surexploitation du Sud et où il n'y a rien eu de cela, même lorsque c'était possible en 1945). Lorsque ceci est le cas, effectivement, les anciennes directions révolutionnaires (éliminant au besoin les éléments "droits dans leurs bottes") tendent à se convertir en BOURGEOISIES BUREAUCRATIQUES compradores (intermédiaires/"gérants" des intérêts impérialistes).

    À Cuba, le problème et la SEULE CRITIQUE VALABLE qui peut être adressée d'un point de vue autre que décompo ultra-gauche, c'est de s'être liés et rendus beaucoup trop dépendants de l'Union soviétique (à l'encontre des positions du Che, notamment) et d'être ainsi par conséquent soumis, depuis l'effondrement de celle-ci (1991-92), à une recolonisation "en douceur" qui pourrait bien à présent devenir brutale, maintenant que le symbole Fidel a disparu.

    Aucune autre critique n'est recevable ; et dire que Cuba a mené une révolution "bourgeoise" qu'il faudrait critiquer mais enfin quand même soutenir un peu, "fin oui mais enfin bon vous comprenez...", est un non-sens total d'un point de vue marxiste (à la limite, mieux vaut encore le pathétique dans la clarté des positions ultra-gauche style "c'est pas l'pouvoir ouvrier", "et l'homophobiiiiie alors", "ils foutent en taule les opposants bouuuuh" etc. etc.).

    [PS : hahaha MDR quand les gens modifient leurs articles une fois qu'ils ont lu ce genre de critique]


     
    "Les aigles peuvent parfois voler plus bas que les poules, mais les poules ne s'élèveront jamais à la hauteur des aigles" (V.I. Lénine, au sujet de Rosa Luxembourg)…
    servirlepeupleservirlepeuple.eklablog.com

     

     

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    #MacronCeGrosMarxisteLol

    Encore des punchlines réseaux sociaux (pour finir novembre)Enfin ''lol'' bon, c'est marrant qu'à moitié, voire même pas. Voire pas du tout en fait.

    Mais c'est un fait que les derniers propos de Macron sur la colonisation sont en réalité tout à fait conformes à un certain marxisme primitif. Enfin, ''primitif'', façon de parler... Car c'est encore ce qui formate le raisonnement d'une grande partie de l'extrême-gauche actuelle, et rend par conséquent cocasse sa ruée sur l'ancien Ministre de l'Économie.

    Ce qu'il dit en gros c'est que la colonisation a été ''un mal pour un bien''... Or Marx et surtout Engels, vers 1850, ne disaient pas autre chose : oui c'est affreux, oui ça charrie les cadavres et les atrocités, mais ces pays entrent ainsi de plain pied dans la modernité capitaliste, ce qui met la révolution socialiste à l'ordre du jour.

    Le problème c'est que plus de 150 ans d'eau, de réflexions et d'analyses marxistes, mais surtout de FAITS ont coulé sous les ponts... et l'on sait aujourd'hui qu'il n'en est absolument rien.

    Marx et Engels étaient ''imminentistes'' : la révolution ouvrière mondiale était (pensaient-ils) IMMINENTE, elle devait survenir avant la fin de leur siècle (le 19e), et en s'étendant et ''capitalisant'' ainsi toute la planète le capitalisme ''hâtait'' cela, ''creusant sa propre tombe''.

    Bien entendu, l'avant-garde de cette révolution mondiale imminente devait naturellement être les pays les plus anciennement et fortement industrialisés, autrement dit les ''nations civilisées''.

    Un siècle et demi plus tard, nous voyons bien que cela n'a pas du tout été le cas. À travers l'impérialisme, le capitalisme n'a fait que se renforcer de décennie en décennie et il est toujours bel et bien là. Il a acheté la paix sociale dans les métropoles anciennement et fortement industrialisées, ''civilisées''.

    Surtout, nous avons pu constater de visu que l'avant-garde révolutionnaire mondiale était SYSTÉMATIQUEMENT dans les pays les plus ''fraîchement'' capitalisés, d'abord le vaste Empire russe féodal (et... colonial en Sibérie, en Asie centrale et dans le Caucase), puis clairement et définitivement le monde non-blanc colonisé : Chine, Vietnam, Cuba puis Pérou, Philippines, Anatolie, aujourd'hui Inde etc.

    Mao l'explique très clairement :

    "Il est très difficile de faire la révolution et de construire le socialisme dans les pays occidentaux, car dans ces pays l'influence pernicieuse de la bourgeoisie est très profonde et s'est déjà infiltrée partout. En Chine, la bourgeoisie n'existe que depuis trois générations tandis que dans les pays comme l'Angleterre ou la France, elle existe depuis des dizaines de générations. Dans ces pays la bourgeoisie a une histoire vieille de 250 à 260 ans, voire de plus de 300 ans ; l'idéologie et le style de travail bourgeois ont des influences partout et dans toutes les couches sociales. C'est pourquoi la classe ouvrière anglaise ne suit pas le Parti communiste, mais le Parti travailliste.

    Lénine a dit : "Plus un pays est arriéré, plus difficile est son passage du capitalisme au socialisme". Vue d'aujourd'hui, cette thèse n'est pas correcte. En réalité, plus un pays est arriéré économiquement plus son passage du capitalisme au socialisme est facile, et non difficile. Plus un homme est pauvre, plus il veut la révolution. Dans les pays capitalistes occidentaux, le niveau de l'emploi et les salaires sont plus élevés et l'influence de la bourgeoisie sur les travailleurs est plus profonde. Dans ces pays, la transformation socialiste est moins facile qu'on ne le croit." (Notes de Lecture sur le Manuel d’Économie Politique de l'URSS, 1960).

    Certes, nous avons pu constater aussi que la révolution au cœur des Centres impérialistes est également importante, parce que c'est un peu comme les tiques dont le corps se reforme si on ne détruit pas la tête : si les métropoles restent intactes, avec leur paix sociale achetée grâce à la sueur et au sang des Peuples impérialisés, elles parviennent tôt ou tard à RE-(néo-)COLONISER les pays du Sud global qui ont tenté de s'arracher à leur emprise.

    Les plus grands et puissants de ces États (comme l’État français) sont construits historiquement comme des "nations" factices en réalité PLURINATIONALES, des PRISONS DES PEUPLES : c'est un ferment de désintégration possible, et même essentiel.

    Mais surtout, la révolution mondiale dont le vent souffle du Sud possède dans ces pays un fer de lance, un "vecteur" évident qui est la force de travail qui a dû être IMPORTÉE dans le cadre de l'expansion économique des années 1950-60-70 : celleux que l'on appelle les racisé.e.s, parqués en ghettos et soumis quotidiennement au racisme structurel. Il suffit d'ouvrir les yeux pour voir qu'il s'agit là de la force dont le Pouvoir du Capital veut à tout prix empêcher l'émergence... [les États-Unis ou encore le Canada sont quant à eux nés en tant que colonies britanniques et ont toujours eu directement à l'intérieur de leurs frontières, depuis l'origine, des Peuples colonisés : Natifs américains, Natifs métissés hispanophones de la moitié du Mexique annexée en 1848, et évidemment les descendants d'esclaves amenés d'Afrique, + les Asiatiques amenés eux aussi comme semi-esclaves pour l'aménagement de l'Ouest, et toute l'immigration latino-américaine ou afro-caraïbe du 20e siècle, ce qui mis bout à bout représente désormais 40% de la population et la principale "dynamite" à l'intérieur de cette Citadelle impériale].

    Ceci étant dit, et en attendant, beaucoup de celleux qui se ruent sur Macron (qui ne fait que se réjouir DANS LA LOGIQUE DE SA CLASSE de la conquête de ces pays par la "modernité" capitaliste) feraient mieux de ne PAS TROP LA RAMENER, vu combien leur "marxisme" en est resté FONDAMENTALEMENT à ces conceptions du 19e siècle que nous avons vues précédemment... et que même Marx et Engels, au demeurant, ont commencé plus tard dans leur longue vie politique à remettre en question (quand Marx envisage par exemple que la paysannerie "communautaire-collectiviste" de l'Empire russe n'ait pas besoin de passer par les affres du capitalisme pour accéder au communisme https://bataillesocialiste.wordpress.com/…/1881-03-projet-…/, ou quand Engels se rend compte de l'"embourgeoisement" de la classe ouvrière anglaise au travers des bénéfices tirés de l'Empire wikirouge.net/Aristocratie_du_travail, etc. - lire ici une étude globale de cette évolution).

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    Ah tiens, Aymeric CHAUPRADE ex-grand intellectuel organique du FN, dont je savais qu'il avait eu des problèmes pour des déclarations sur l'islam ("problème de forme, pas de fond" selon les cadres du parti à l'époque), mais pas qu'il avait démissionné... SOUTIENT FILLON maintenant.

    Voilà. Je pose ça là.

    Aymeric Chauprade: "Fillon peut bloquer l'accès du second tour à Marine Le Pen"

    Trois questions à l'ancien conseiller de Marine Le Pen aux questions internationales,
    aujourd'hui député européen (non-inscrit) sur la primaire de la… lexpress.fr


    Voilà qui confirme encore ce que j'ai dit et répété plusieurs fois ces dernières années : le "fond de l'air noir", le "Mai rampant de droite" depuis en fait le début du millénaire (toutes les campagnes des dernières années de Jospin, sur l'"insécurité", contre le PACS etc. etc. qui avaient fini par mettre Le Pen au second tour), c'est cette "droite décomplexée" qu'a réussi cette fois à incarner Fillon (alors qu'il avait plutôt incarné le contraire en 2012 face à Copé, qui s'est entre temps grillé avec ses histoires de pains au chocolat et autres âneries, et même entre 2007 et 2012 face à Sarkozy, grillé lui par son bilan et ses affaires de magouilles).

    Le FN, ils vont tenter de nous l'installer dans le rôle du PC révisionniste des années 60... un "gardien" des classes populaires "dans les clous" de l'ordre bourgeois, et qui lui, en plus (contrairement à son prédécesseur), ne fait pas de grèves !

    Les "têtes" comme Chauprade l'ont compris, et il serait d'ailleurs intéressant de savoir ce qu'en pense par exemple Guillaume Faye, autre "intellectuel organique" de la droite radicale, qui a globalement la même position et les mêmes doutes sur la capacité du FN à gouverner...

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    Les Kurdes, c'est comme les Palestiniens : ils ne SONT PAS le problème que peuvent être en revanche certains de leurs soutiens à l'étranger.

    Les Palestiniens ont d'ailleurs des soutiens encore bien pires (pas la peine de faire la liste, on la connaît). Cela n'invalide en rien, pour autant, la légitimité de leur lutte.

    Les Kurdes, qui ont (oui) l'appui aérien des impérialistes occidentaux, ont en Occident énormément de soutiens islamophobes, OUI, de gauche comme de droite (bien que ces derniers aient tendance à préférer les chrétiens, ou l'État kurde autonome - indépendant de fait - bourgeois et ouvertement pro-impérialiste d'Irak).

    Il faut avoir la méfiance la plus maladive pour celleux qui affichent aujourd'hui et depuis 2-3 ans environ un soutien exalté à Rojava ; quand il s'agit pour citer un exemple de gens qui attiraient l'attention il y a quelques années sur l'importance numérique des musulmans religieux visibles dans une banlieue lyonnaise, ou qui invitaient au "whitesplaining" quant à l'"affrosité" d'un intellectuel musulman connu dans une réunion-débat sur Gaza alors que la présence à la même réunion de Stéphane Hessel, grand bourgeois alter-impérialiste en mode gaulliste de gauche, ne semblait pas nécessiter à leurs yeux un quelconque "classplaining".

    Il est important aussi de relayer et de faire connaître les critiques "de proximité" (maoïstes de l’État turc, par exemple) quant aux limites idéologiques du processus.

    Mais le fait est que si en Syrie tout le monde se bat AVEC L'AIDE de quelqu'un (impérialistes ou puissances régionales), les seul.e.s qui se battent UN PEU POUR LE PEUPLE sont les Forces démocratiques syriennes (FDS) autour des YPG kurdes de Rojava. L'"opposition modérée", l'ASL, les forces de type Frères Musulmans ou Al Qaïda se battent pour Erdogan, le Qatar, les Saoud et l'Occident, avec l'aide de ceux-ci. Assad se bat avec l'aide de la Russie et de l'Iran pour sa caste militaire baathiste. Daesh se bat pour ses financeurs du Golfe et la bourgeoisie daeshiste, qui n'est autre que la bourgeoisie sunnite irakienne pro-Saddam transmutée (qui rêvait de se venger de la Syrie depuis sa "trahison" lors de la Guerre du Golfe en 1990). Seules les FDS se battent (un peu) pour les intérêts populaires, avec (certes) l'appui aérien occidental et (donc) le soutien international d'islamophobes, mais aussi l'aide très concrète de milliers de volontaires communistes et autres révolutionnaires (liens : 123 - 4).

    C'est cela qui est déterminant et qui doit nous déterminer, et non le fait que ce soit (enfin !!!) la lutte "safe" tant rêvée pendant toutes ces années passées avec ces foutus Palestiniens ou Irakiens ou Afghans tout vilains islamistes barbus baaah pas beaux ; une lutte "facile" (intellectuellement) à soutenir d'un point de vue occidental de petits bourgeois à l'échelle-monde ; logique qui en ferait effectivement, pour une certaine gauche, l'équivalent des chrétiens d'Orient pour une certaine droite...

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    La gauche révolutionnaire abertzale ne lutte pas pour l'"autodétermination du Pays Basque" (en gros, un référendum où serait décidé le statut et l'avenir du pays, un peu comme le mouvement qu'il y a actuellement en Catalogne). Les choses sont pour elle "déterminées" depuis plus de 50 ans.

    La gauche révolutionnaire abertzale lutte pour un Pays Basque (Euskal Herria) LIBRE, réunifié (il est actuellement divisé entre la Communauté autonome de Bilbao - sa capitale économique, le siège des institutions étant Gasteiz ; la Communauté forale de Navarre et la partie située dans l’État français), et SOCIALISTE. Ce qui n'est évidemment pas possible dans le système "Espagne" ni dans le système "France" tels qu'ils sont construits depuis des siècles, et implique donc l'INDÉPENDANCE (pas une vague autonomie) ; après, si lesdits systèmes venaient à exploser, toute forme d'association ÉGALITAIRE serait bien sûr envisageable avec la double dizaine d'autres Peuples (+ les nationalités de l'immigration coloniale) qui s'y trouvent également emprisonnés.

    La gauche révolutionnaire abertzale lutte par divers moyens (dont la lutte armée jusqu'en 2010) pour rassembler le plus large mouvement de masse possible sur cet objectif démocratique et socialiste, face à des forces espagnolistes (le PP essentiellement) mais aussi "basquistes" bourgeoises (PNV et dans une certaine mesure le PS) qui ont elles aussi "autodéterminé" les choses depuis la fin des années 1970 dans le sens d'un Pays Basque capitaliste autonome et (comme on l'a vu) divisé, réactionnaire et antipopulaire, mais dont leurs comptes en banque font en apparence la "plus riche région d'Espagne après la Catalogne" (vous savez, le genre de "PRB" - produit régional brut - qui aurait largement permis de dire, jusqu'il y a peu voire encore aujourd'hui, que le Lorraine ou le Nord voire la Picardie étaient des régions "riches" où tout le monde vivait dans le luxe... LOL).

    C'est vers cet objectif, vers une RÉPONSE qu'elle a déjà déterminée depuis 50 ans, et non vers la simple possibilité de poser une QUESTION, que la gauche révolutionnaire abertzale lutte pour mobiliser le Peuple travailleur d'Euskal Herria. Depuis 2010 environ, elle est confrontée à la défection d'une partie de ses rangs vers un schéma réformiste (un schéma, peut-être, de "pouvoir poser la question" comme en Catalogne) ; c'est un combat qu'il lui appartient de mener et de gagner, nous n'en disserterons pas ici.

    Mais en tout cas, dire que la gauche révolutionnaire abertzale (puisqu'il est question des prisonniers, et moi, des prisonniers PNV ou Aralar j'en connais pas...) lutte pour "l'autodétermination" est assez révélateur de la part d'une organisation qui s'éperd en lèche vis-à-vis de cette lutte de libération et d'autres, sans jamais perdre de vue en ligne de mire son véritable objectif d'un Parti marsiss-neuneuniss FRANÇAIS qui aurait la gentillesse de "tenir compte" de la réalité nationale des Peuples de la Prison France.

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    Revue de presse : 

    Égalité et approximations

    (Quartiers Libres ; suite et - espérons-le - fin du "feuilleton" Soral)


    https://joaogabriell.com/2016/11/24/repressions-politiques-luttes-des-quartiers-populaires-et-division-de-classe-parmi-les-racises/

    (par rapport à des débats qu'il a pu y avoir au sujet de la "nature de classe" ou de la "non-implantation réelle dans les quartiers" de telle ou telle force politique décoloniale)


    http://www.bboykonsian.com/m/Interview-de-Kaveh_a3558.html

    Grosse interview de ce rappeur irano-allemand de Berlin avec un LONG passage sur la mouvance antideutsch et ''ceux qui disent ne pas en faire partie mais qui partagent ses conceptions''... Une petite erreur cependant : ceux qui, du moins, ''n'en sont pas'' mais en ont les idées ne se trouvent pas du tout circonscrits en Allemagne et en Autriche. Ils sont tout sauf rares en Hexagone, terre peut-être la plus pétrie de colonialisme civilisateur ''de gauche'' au monde, et là pour le coup c'est bien en lien total avec cette imprégnation et non avec une quelconque culpabilité pour quelques uns des pires crimes contre l'humanité de l'histoire, puisque ceux-ci n'ayant pas été commis en Europe (pas dans l'histoire contemporaine), il ne nous est imposé collectivement aucun sentiment de ce type (si véritablement un hipster teuton a un problème de culpabilité 'génétique' d'être allemand, je peux lui faire lire le Discours sur le Colonialisme de Césaire, ça l'aidera peut-être à surmonter, qui sait... et à devenir moins con peut-être accessoirement).


    Guerre populaire en Inde : Communiqué du Parti Communiste d’Inde (maoïste) sur le face-à-face de Malkangiri


    Et puis en région parisienne, la famille d'Adama Traoré, mort asphyxié dans un commissariat cet été et dont l’État a tout fait pour étouffer que la violence policière raciste était la cause réelle du décès, subit une véritable campagne de persécution judiciaire pour lui faire payer (et cesser) son combat pour la vérité, la justice et la dignité ; combat soutenu et rejoint par des milliers de personnes de "l'Empire colonial intérieur" hexagonal.

    L'info sur cette affaire emblématique du racisme structurel du système fRance est à suivre en temps réel sur la page Facebook : 

    La vérité pour Adama


     http://www.pcmaoiste.org/communique/justice-pour-adama-liberte-pour-youssouf-et-bagui/


    1 commentaire

  • SLP a longtemps eu une vision plutôt critique du Parti communiste du Pérou (PCP), dit "Sentier Lumineux" (nom jamais utilisé par lui-même, tiré d'une de ses publications des années 1970), dirigé par Abimael Guzmán Reynoso dit Gonzalo. Nous y voyions un modèle de "fanatisme", de dogmato-sectarisme dans le travail auprès des masses et les rapports avec le reste de la gauche de ce pays, ce qui malgré des succès initiaux avait conduit à sa défaite.

    Mais aujourd'hui, à travers une grille de lecture décoloniale (fanonienne, si l'on veut !), nous aurions tendance à relativiser ces critiques ; même si nous maintenons toujours (en revanche) que la dimension quelque peu messianique et métaphysique prise par la "Pensée Gonzalo" et le caractère ultra-centralisé de la direction (jefatura) autour de ce dernier ont été un problème.

    Ce qu'a fait Gonzalo (sa "Pensée"), en dernière analyse, c'est développer et synthétiser le travail théorique de José Carlos Mariátegui ("par le sentier lumineux de Mariátegui" était le sous-titre du journal à l'Université d'Ayacucho, d'où le surnom donné par la bourgeoisie pour le distinguer de la multitude d'autres PCP) à la lumière du marxisme-léninisme-maoïsme, parallèlement théorisé comme "3e et supérieure étape de la science marxiste" (ce avec quoi nous sommes totalement d'accord).

    Le travail de Mariátegui c'est à dire l'analyse PROFONDE, sociologique et historique, de la société péruvienne comme une société COLONIALE dont la caste de colons espagnols, avec l'indépendance du pays en 1821, n'a fait que rompre avec la métropole comme les colons anglais, écossais et hollandais des États-Unis en 1776, les Boers d'Afrique du Sud avec leur Parti national en 1948 ou encore les fermiers blancs de "Rhodésie" (Zimbabwe) en 1965 :

    Le problème de la terre au Pérou - Le problème racial en Amérique latine (extraits)Régionalisme et centralisme (traduit par nous du castillan) - L'indigénisme marxiste de José Carlos Mariátegui (bon document de Michael Löwy, malgré ses déformations trotskystes et postmodernisantes...)

    [Lire aussi, pour comprendre la structure sociale péruvienne en particulier dans les Andes : Indiens.pdf]

    Il décrivait les résidus, sous la botte de la propriété terrienne coloniale (encomienda), de la communauté populaire ancestrale quechua-aymara, l'AYLLU, comme la base possible et même nécessaire du collectivisme communiste (rural, du moins) dans un futur Pérou rouge.

    Et donc à partir de là, de ce travail, et par l'intermédiaire des cadres indigènes ou métis à dominante indigène (cholos) qu'il avait recruté à Ayacucho, Gonzalo a dit en substance : voilà, j'ai élaboré la "Pensée-guide", la synthèse de la pensée révolutionnaire dans ce pays. Je la remets entre vos mains, à vous de jouer. C'est VOUS qui vous battez POUR VOUS. Je suis un métis plutôt clair, fils naturel de marchand de chevaux aisé et professeur d'université, mais je ne suis pas le énième "amauta" ("grand sage" en quechua, traduction approximative) avec ce profil sociologique qui vient vous dire qu'il se "bat" et "donnera sa vie" pour vous, et je ne vous demande pas de vous battre pour moi.

    Quel était le degré de sincérité réelle d'une telle posture ? Qu'est-ce qui nous dit qu'il ne cherchait pas simplement à prendre la tête d'un État "nouveau" où lui et ses fidèles auraient remplacé la vieille oligarchie, comme cela s'est si souvent produit dans le monde colonisé, y compris avec des indigènes à 200% (mais "blancs politiques") et non des métis comme lui ? Rien, en effet. On ne saura jamais rien à ce sujet : arrêté en 1992, il est incarcéré au secret depuis et ne sera jamais le Président de la République populaire du Pérou.

    Mais ce qui est certain en revanche, c'est que les masses quechuas et aymaras de l'Altiplano ne l'ont pas perçu ainsi. Pour la première fois, par une de ces alchimies politiques que l'on ne sait jamais vraiment expliquer, le lien s'est noué. Et pour la première fois, une partie (du moins) conséquente d'entre elles a vu dans cette proposition stratégique le chemin vers le POUVOIR réel, la libération, ne plus "se confondre avec le paysage" comme disait Mariátegui, et (disons-le) leur RÉSURRECTION EN TANT QUE PEUPLE.

    La réalisation, en somme, de leurs espérances "messianiques" en la résurrection-remembrement d'Inkarri, le retour promis de Tupac Amaru étant des millions, autrement dit (enfin) la sortie de la Nuit coloniale espagnole... (de fait - hasard ou pas ? - la fameuse date des élections du 18 mai 1980, choisie pour le lancement de la Guerre populaire, se trouvait également être celle... du 199e anniversaire de l'exécution de Tupac, en 1781 !)

    [Alors certes, il est vrai que dans ses écrits le PCP n'a pour ainsi dire jamais présenté sa guerre sociale comme raciale, et évidemment les anticommunistes en mode "indigéniste" et "culte du bon sauvage" version Sting-Raoni mâtiné de zapatisme en profiteront systématiquement pour le présenter comme "anti-indigéniste" et même "anti-indigène".

    OUI, il est vrai que dans un pays peuplé à 85 ou 90% d'indigènes ou de métis cholos à dominante indigène (+ quelques afro-descendants), qui se confondent totalement avec le Peuple travailleur ouvrier et paysan, le Parti et Gonzalo n'ont jamais ressenti le besoin de présenter les choses de cette manière.

    Il faut dire que cela ne serait pas allé sans inconvénients : les Péruviens véritablement indigènes, parlant couramment les langues et baignés dans la culture et les traditions, ne représentent que 30 à 40% de la population au maximum, contre 45 à 50% de métis à dominante indigène (selon Wikipédia, "47 % des Péruviens sont des métis, c'est-à-dire d'origine à la fois amérindienne et européenne, et le pourcentage de population d'origine à prédominance européenne atteindrait 15 % (10 % d'ascendance espagnole, principalement des colons arrivés pendant la colonie, et 5 % d'autre ascendance européenne). Dans certaines régions du Pérou, particulièrement sur la côte, on rencontre parfois de nombreux métis d'ascendance africaine. La proportion de la population indigène (ou personnes à prédominance indigène) fluctuerait entre 30 et 45 % de la population", mais "cette estimation est particulièrement difficile à faire car l'Institut national de statistique du Pérou se fonde sur des critères linguistiques et non des critères purement « raciaux ». Il fixe ainsi à 15,9 % le pourcentage des Indiens définis sur un critère linguistique. La plupart des Péruviens se considèrent comme des métis, sans qu'il soit possible de tracer des frontières précises entre les différentes catégories").

    Il y avait donc un risque potentiel de réduire la base sociale de la Guerre populaire à ces 30 ou 40% alors que les cholos souffrent eux aussi de la domination de l'oligarchie criolla et du mépris de la bourgeoisie intellectuelle de Lima, et sont tout autant des indigènes dans la colonialité du pouvoir péruvienne (principe fondamental suivant lequel il est impossible de remporter la victoire sans parvenir, à un certain stade, à faire basculer la majorité du peuple dans la révolution...). D'autre part (et surtout), présenter la lutte comme indigéniste aurait inévitablement posé la question de QUELS indigènes : la majorité des indigènes péruviens sont quechuas (4 millions de locuteurs de la langue, ce qui nous fait environ 12-13% de la population aujourd'hui, sur 30 à 45% "potentiellement" indigènes et 16% "sur critère linguistique"), mais ce ne sont pas les seuls et les autres peuples ont souvent une méfiance historique envers ces derniers, ce que l’État réactionnaire aurait pu exploiter contre la révolution (il l'a d'ailleurs... en grande partie fait, étant donné que dans les faits la base militante du Parti était très majoritairement quechua ou en tout cas métisse des Andes).

    Enfin il y avait aussi une volonté, sur la base des travaux de Mariátegui (socle de la "Pensée" du Parti) mariategui-1929-race, de se démarquer d'un certain indigénisme bon-sauvagiste typiquement criollo ou métis aisé-éduqué qui était déjà un phénomène ancien localement, courant dans l'APRA des origines et que l'on retrouve encore aujourd'hui dans la pensée d'un Aníbal Quijano : "Au racisme de ceux qui méprisent l'Indien parce qu'ils croient en la suprématie absolue et permanente de la race blanche, il serait insensé et dangereux d'opposer le racisme de ceux qui surestiment l'Indien, avec une foi messianique en sa mission comme race dans la renaissance américaine. Les possibilités pour que l'Indien s'élève matériellement et intellectuellement dépendent du changement des conditions économico-sociales. Celles-ci ne sont pas déterminées par la race mais par l'économie et la politique." (Mariátegui, "Le problème racial en Amérique latine", 1929) – au Pérou comme dans toutes les Andes et l'Amérique latine, le problème racial indigène est fondamentalement un problème de la propriété ou plutôt de la non-propriété, de la dépossession de la terre et de tous les moyens de production par la classe dominante des colons espagnols ; il faut donc briser cette infrastructure si l'on veut briser la superstructure de la discrimination raciale, des humiliations et des brutalisations, de la misère et de l'ignorance des populations indigènes... Lire aussi à ce sujet mariategui-regionalisme-et-centralisme ou encore L'indigénisme marxiste de José Carlos Mariátegui, document où l'on trouve aussi une clarification essentielle dans les citations suivantes : "Le communisme moderne est une chose distincte du communisme inca. L’un et l’autre communisme sont le produit de différentes expériences humaines. Ils appartiennent à des époques historiques distinctes." [...] "Le socialisme trouve aussi bien dans la survivance des communautés indigènes que dans les grandes entreprises agricoles, les éléments d’une solution socialiste de la question agraire. Mais cela, de même que l’encouragement au libre essor du peuple indigène, à la manifestation créatrice de ses forces et de son esprit, ne signifie pas, dans l’absolu, une tendance romantique et anti-historique de reconstruction ou résurrection du socialisme inca, qui correspondait à des conditions complètement dépassées, et duquel ne restent, comme facteur utilisable dans le cadre d’une technique de production parfaitement scientifique, que les habitudes de coopération et socialisme des paysans indigènes".]

    Il faut bien se représenter ce qu'était (et reste encore dans une large mesure aujourd'hui) la condition des masses indigènes de la campagne péruvienne à la veille du déclenchement de la Guerre populaire (fin des années 1970) : elles venaient en fait tout simplement (avec la nouvelle Constitution votée en 1979) d'obtenir ... le droit de voteconditionné auparavant à la capacité de lire et écrire en castillan ("espagnol"), capacité qu'elles n'avaient généralement pas ! Les étudiants de l'Université d'Ayacucho (San Cristóbal de Huamanga, fondée en 1677 mais rouverte seulement en 1959 après un siècle de fermeture), issus de la paysannerie quechua ou chola de la région, ne trouvaient généralement pas de débouchés à leurs diplômes en raison de ce racisme ambiant (véritable apartheid non-dit), de leur accent serrano (andin), de leur "allure" etc. etc. : ce sont eux qui, souvent bilingues quechua-castillan, formeront la première base de cadres du Parti et, de retour dans leurs villages, tisseront ce lien unique avec les masses que la gauche marxiste avait été incapable de tisser un demi-siècle après la mort de Mariátegui.

    [Lire là-dessus : gramsci-gonzalo-considerations-sur-la-conquete-de-positions-de-combat]

    C'est ainsi que dans les faits, la "Guerre populaire prolongée" initiée en 1980 est rapidement devenue le PLUS VASTE SOULÈVEMENT ARMÉ DE MASSE INDIGÈNE depuis les deux Tupac, Amaru II et Katari au 18e siècle (1780, exactement deux siècles plus tôt...) ; et de fait la première VÉRITABLE GUERRE DE DÉCOLONISATION du pays puisque comme on l'a dit, l'indépendance de 1821 n'avait été qu'une rupture de la caste coloniale criolla (espagnole née dans la colonie) avec la lointaine métropole. La véritable guerre de libération de Tawantinsuyu – le véritable nom précolonial du pays...

    C'est pour cela que l'accent était tant mis sur la lutte "anti-féodale" et non pas seulement "anti-impérialiste", chasser l'impérialisme yankee et ses "valets locaux" comme dans la conception traditionnelle "cubano-guévariste" du continent. "Semi-féodalité" n'étant que le nom de la botte coloniale espagnole demeurée intacte, simplement séparée de Madrid depuis un siècle et demi.

    D'ailleurs, par la suite et sur tout le continent, CHAQUE FOIS qu'émergera un mouvement armé à forte base indigène (zapatistes ou EPR au Mexique, Armée de Guérilla Tupac Katari -EGTK- de Felipe Quispe en Bolivie, etc.), l'oligarchie locale et ses maîtres impérialistes agiteront le spectre du "Sentier Lumineux", quand bien même ces mouvements en étaient idéologiquement très éloignés. Les "spectres" qui hantent l'ennemi en disent parfois plus long sur les choses que toutes nos analyses...

    Et c'est aussi à la lueur de cela que l'on peut saisir le problème (le "sectarisme") par rapport à la foultitude de petits partis socialistes ou "communistes" regroupés au début des années 80 dans la "Gauche Unie" : si Mariátegui, le "père fondateur" des années 1920, était un petit bourgeois métis visible comme indigène à nos yeux de Blancs, il suffit de regarder des personnalités criollas comme Jorge del Prado ou Gonzalo García Núñez pour mesurer le problème de représentativité de ces gens vis-à-vis de ces 90% d'indigènes ou métis à dominante indigène "pour" lesquels ils affirmaient lutter.

    Il n'en allait pas différemment avec le Mouvement Révolutionnaire Tupac Amaru (MRTA) qui, tout paré du nom de Tupac Amaru qu'il était, incarnait en réalité une petite bourgeoisie métisse urbaine-éduquée avec pour seule proposition stratégique un réformisme armé (lutte armée pour amener l’État à des négociations) et, à l'arrivée, une République "rénovée" où elle aurait sa place...

    Il y avait bien longtemps que les masses paysannes et ouvrières indigènes, si elles allaient parfois en traînant des pieds remplir les urnes de quelques bulletins à leurs noms, ne voyaient pas ces mouvements autrement que pour ce qu'ils étaient : des gens cherchant avant tout des places que l'oligarchie au pouvoir ne leur laissait pas, voire simplement, ayant déjà de telles places, une certaine forme de "justice sociale" pour soulager leur conscience (l'absence d'empathie que suppose la domination n'est pas naturelle chez l'être humain, elle est le résultat d'un conditionnement et il se trouve toujours quelques individus pour échapper à celui-ci... mais de l'empathie à la renonciation à ses privilèges, il y a encore un grand pas beaucoup plus difficile à franchir !!).

    Alors bien sûr, d'aucuns viendront peut-être nous dire que "le Sentier a aussi tué des indigènes", et même "beaucoup", voire même 95% d'indigènes vu que ceux-ci constituaient et constituent encore le gros des troupes militaires et de police (sans parler des "autodéfenses" villageoises paramilitaires). Oui, il est possible de dire cela... comme il est possible pour Mélenchon de dire que la Révolution algérienne a été une "guerre civile", car le FLN aurait "tué plus d'Algériens que de soldats français", etc. etc. Il serait d'ailleurs possible de dire la même chose du Parti communiste vietnamien, ou de l'Armée rouge bolchévique durant la Révolution russe (en remplaçant "indigènes" par "paysans").

    Il est possible, oui, de mettre cela en avant comme l'aspect principal dans une démarche intellectuelle totalement malhonnête.

    Car la vérité, c'est tout simplement que les révolutions ne consistent malheureusement jamais en un affrontement "pur" de 90% d'exploité.e.s contre 10% d'exploiteurs (qui seraient dans ces conditions immédiatement balayés). Elles consistent hélas généralement plutôt en un affrontement entre deux parties des masses, dont une aliénée et au service des dominants, propagandée du cerveau comme quoi la révolution est le Mal absolu, les révolutionnaires des bandits, et ayant en fin de compte plus peur du changement que de sa propre misérable condition actuelle. Le gouvernement péruvien a organisé des milices paysannes d'"autodéfense" contre-révolutionnaires comme l’État colonial français avait mobilisé des centaines de milliers de harkis en Algérie : à ce jeu-là, comment le PCP et le FLN pourraient-ils ne jamais avoir tué le moindre indigène ? En ajoutant à cela la confrontation avec des mouvements adverses hostiles à leur stratégie de lutte armée pour la libération (MNA en Algérie, Gauche Unie et MRTA au Pérou)... etc. etc.

    [À ce sujet : http://ekladata.com/L-antagonisme-PCP-vs-ONG-et-Gauche-Unie-au-Perou.pdf]

    En Afrique du Sud (lutte dont on voit mal, aujourd'hui, qui ne célèbrerait pas le caractère juste et la victoire finale), il y aurait eu entre la fin des années 1980 et le début des années 1990, principalement dans la région du Kwazulu-Natal, peut-être 10.000 morts dans des affrontements entre l'alliance ANC-SACP-COSATU et le parti royaliste zoulou Inkatha, qui par anticommunisme s'était fait le collaborateur du pouvoir blanc d'apartheid. Horreur, malheur : même l'ANC du souriant Mandela aurait, donc, "tué plus d'indigènes que de colons blancs" !!

    En réalité, le PCP n'a rien commis (pour ce qui n'a pas été commis par l'armée ou les milices en mode false flag) de plus horrible que le FLN algérien, le PC vietnamien ou l'Armée rouge dirigée par Trotsky. Les révolutions ne sont simplement pas des dîners de gala. L'unique différence, c'est qu'il n'a pas fini par remporter la victoire ; ce qui renforce bien évidemment les torrents de boue haineuse déversés sur lui (rappelons qu'il a été la seule guérilla révolutionnaire à ne pas entrer dans les processus de "normalisation" de la "Fin de l'Histoire" après 1989, et même à menacer plus que jamais le pouvoir en place après cette date).

    Voilà en substance ce vers quoi notre vision de la question du Pérou et du "Sentier Lumineux" a évolué ces derniers temps.

    Après, nous restons d'avis que la multitude de petits groupes issus de son éclatement (après la capture de Gonzalo) sont effectivement à bien des égards sectaires, par exemple sur la question des gouvernements dits "bolivariens" (lire aussi ici et ici) : il faut savoir analyser les choses dans le contexte et le rapport de force de l'époque, et si ces gouvernements sont indéniablement réformistes, comme peut l'expliquer le leader aymara et ex-guérillero de basse intensité Felipe Quispe au sujet d'Evo Morales en Bolivie par exemple, il n'est tout simplement pas possible de qualifier de "fascistes" des forces politiques qui ont pour la première fois reconnu les droits démocratiques nationaux, culturels et linguistiques des Peuples natifs. Le fascisme en Amérique du Sud ne peut se concevoir que comme un "hispanisme" féroce, écrasant violemment les cultures indigènes - c'est à dire du prolétariat le plus exploité et opprimé. Gonzalo, au secret depuis 1992, n'a évidemment jamais rien écrit sur ces phénomènes politiques ; il a parlé des sandinistes du Nicaragua* pour les qualifier de réformistes radicaux, pusillanimes et inféodés à l'impérialisme soviétique, mais pas de "fascistes" ; et le "bolivarisme" des années 2000 et actuel n'a que peu à voir non plus (au Venezuela et en Bolivie en tout cas) avec la "gauche" péruvienne de son époque ou même les juntes militaires "progressistes" de la décennie précédente.

    Quant à prétendre vouloir transposer ces schémas de pensée "gonzalistes" en dehors de leur contexte colonial, dans des pays occidentaux, c'est évidemment d'un ridicule absolu.


    [Ici en commentaire sous un autre post, un petit descriptif des raisons internes et surtout externes de la défaite, autrement dit le "Plan Challe" local déchaîné principalement sous la présidence de Fujimori (années 1990) – et ce n'est pas une comparaison "comme ça", on sait le rôle qu'ont joué les "experts" français de retour d'Algérie dans les "écoles" de "contre-subversion" en Amérique latine : "Le PCP  a largement survécu à la capture de Gonzalo, jusqu'au moins en 2003 (après je ne sais pas, j'ai pas d'infos sûres) il contrôlait de vastes zones et était un GROS problème pour l'armée. Dans le PCP a triomphé une ligne erronée qui a pensé que le "moment était arrivé" pour prendre le pouvoir, Gonzalo s'y est fermement opposé mais il a perdu (cette ligne était dirigée par le chef du Secours Rouge qui contrôlait aussi Lima). Son arrestation a été un coup rude, certes (comme tout mouvement qui perd son leader) mais c'est surtout la capture de la direction de rechange par "trahison" (il faut dire qu'ils ont torturé la fille de 4 ans du couple dirigeant devant leurs yeux, d’où les guillemets), puis la capture de la direction de rechange du rechange (qui elle n'était pas prête), puis le non respect du fait que si il se passait ce type de situation c'était le front d'Ayacucho qui devait prendre la direction sauf que d'autres ont refusé (j'ai oublié le nom). Ça c'est les causes internes, sinon au niveau extérieur mais les deux sont liés, c'est la politique génocidaire de Fujimori et de la CIA (40.000 morts), des villages entiers rasés, des populations déplacées (je peux même témoigner personnellement je les ai vus les villages détruits, ils ont encore trouvé récemment une fosse commune de 3.000 à 4.000 personnes paumée dans les montagnes)... puis la criminalisation de tout mouvement de gauche, la terreur en gros qui a fait mettre en veilleuse l'organisation. Le PCP est en réorganisation, rien n'est fini, les cadres sont toujours dans la nature et les masses vont reprendre le chemin de la guerre."]

    [Le document "Combien de Péruviens sont-ils morts ?" aborde la question des pertes humaines qui a été évoquée ci-dessus. Dans un contexte de défaite quasi-totale du PCP, la Commission "Vérité et Réconciliation" du gouvernement libéral de Toledo se voit malgré tout obligée de ne lui attribuer qu'un peu moins de la moitié (46%) des 69.000 victimes recensées, contre 30% pour "l'ensemble des forces de répression d'État" et 24% pour les "autres forces non-étatiques ou non-identifiées" (mon œil !), autrement dit les milices supplétives contre-révolutionnaires, les escadrons de la mort et (pour un millier environ) le MRTA (et peut-être aussi des violences liées au narcotrafic, le pays étant producteur de cocaïne)... À noter que cette proportion de 46-54 est fréquemment inversée dans les sources d'information grand public, comme par exemple Wikipédia en français ; d'autres encore n'hésitant pas à attribuer au "Sentier" l'intégralité des "70.000 morts" (de ce qui serait en quelque sorte le "dernier génocide communiste du 20e siècle", si l'on veut). Mais en même temps, quelques paragraphes plus loin, le document indique que "dans d'autres projets de systématisation de l'information, le PCP et l'ensemble des forces non-étatiques ou non-identifiées apparaissent comme responsables d'une proportion bien moindre de victimes"... de l'ordre de 5 à 16%  (donc de 84 à 95% pour l’État, si nos calculs sont bons) ; et conclut lui-même, après une "estimation de systèmes multiples" sur un "échantillon" d'un peu moins de 25.000 victimes communes à trois sources (CVR, ministère public et organisations humanitaires), à un résultat de 37% pour le "Sendero" et donc plus de 62% pour l'État et les "autres" ! BREF.]

    [* "Le Nicaragua a fait une révolution inachevée et son problème est que là-bas, le Pouvoir de toute la grande bourgeoisie n’a pas été détruit ; ils se sont centrés sur l’anti-somozisme ; je crois que c’est un problème. Une révolution démocratique doit balayer les trois montagnes et là-bas, cela n’a pas été fait ; par ailleurs, elle se développe avec des critères cubanistes, réajustés ces derniers temps, et ceci mène simplement à dépendre, en dernier recours, de l’Union Soviétique. (...) Il nous semble que le Nicaragua, pour continuer sur la bonne voie comme le mérite bien ce peuple héroïque, doit développer la révolution démocratique complètement et ceci implique pour lui une Guerre populaire ; il doit rompre le commandement de l’Union Soviétique, prendre en main son propre destin et défendre son indépendance de classe ; ceci exige un Parti et évidemment, exige de s’assujettir à la conception du prolétariat ; sinon il continuera d’être une pièce sur l’échiquier et c’est lamentable." interview de Gonzalo par El Diario, 1988]

    Propos (en castillan) à l'appui de ce qui vient d'être dit : 

    http://ekladata.com/dNKssvxCQsKdO6h2o8TFDUis-ic.png

    http://ekladata.com/dlD-Ic3RUWrMizazKXEOVM_IUeU@633x636.png

    [En fait, si l'on osait (bon, osons !), l'on pourrait dire que Gonzalo et le PCP nous fournissent des thèses et des enseignements précieux mais souvent sans s'en rendre compte, sans tout à fait les conceptualiser ainsi, et donc sans les formuler aussi clairement que nous allons le faire.

    L'enseignement, donc, qu'avant d'être soumis à l'impérialisme yankee le Pérou est et reste une SOCIÉTÉ COLONIALE, avec une élite de colons principalement euro-descendants (+ quelques Syro-Libanais ou Japonais comme Fujimori) détachés de la métropole espagnole en 1820, et une masse ouvrière-paysanne indigène ou métisse à dominante indigène (ou parfois afro-descendante) colonisée ; et que les guéguerres politiciennes au sein de la première n'intéressent au fond pas la seconde et ne sont pas sa libération.

    Il n'y a pas d'autre interprétation possible de l'affirmation (encore dans ce texte de 1987) que "la révolution démocratique a trois cibles : l'impérialisme, le capitalisme bureaucratique et la semi-féodalité, l'une d'entre elles devenant la cible principale selon le moment que traverse la révolution", et que ("actuellement", au moment du texte) "dans cette période de guerre agraire, la cible principale est la semi-féodalité" : la semi-féodalité qui, au Pérou, est totalement synonyme de propriété coloniale ; à combattre donc en priorité, au lieu de considérer que la contradiction principale opposerait simplement "la Patrie" (l'élite des colons inclue !) aux "Yankees", et donc que n'importe quel discours ou politique anti-yankee serait valable. 

    L'enseignement, aussi, que dans les pays semi-coloniaux semi-féodaux, "droite" et "gauche" ne veulent au fond rien dire et qu'il faut combattre dans le mouvement communiste l'opportunisme à ce sujet : selon le même texte, il y a au Pérou une contradiction entre un capitalisme (impulsé par et au service de l'impérialisme) "bureaucratique", monopoliste étatique, et un capitalisme comprador monopoliste non-étatique (privé), le premier donnant finalement (ce n'est pas dit clairement dans le texte mais on le comprend) "la gauche" et le second "la droite". Il n'y a en fait JAMAIS eu, en Amérique latine, de véritable "gauche" non-communiste-prolétarienne mais bourgeoise-nationale et petite-bourgeoise démocratique AU POUVOIR ; sauf peut-être à Cuba en 1959, avant d'être poussée par l'intransigeance US vers un "marxisme" révisionniste et l'arrimage au social-impérialisme soviétique, et peut-être encore au Chili avec l'expérience Allende (1970-73) ou au Nicaragua sandiniste (1979-90) : "la gauche" ça n'a en réalité jamais été que la fraction étatiste-"nationalisatrice", bureaucratique de l'oligarchie capitaliste semi-coloniale et de la propriété terrienne semi-féodale, opposée à la fraction compradore attachée à la propriété privée des capitaux (postérieurement au texte, à partir de 1998, il y a eu les expériences "bolivariennes"-"socialistes du 21e siècle" qui pourraient être qualifiées disons de "dialectique complexe" entre l'une et l'autre de ces deux "gauches" retour-situation-amerique-sud discussion-gauche-amerique-latine-capitalism-bureaucrtq capitalisme-bureaucratique-pays-domines, la seconde prenant cependant - et évidemment - le pas sur la première au final...).

    Cet enseignement est notamment FONDAMENTAL pour, loin de l'Amérique latine, analyser la situation dans les pays arabes et plus largement musulmans de la "Région intermédiaire" (de l'Afrique du Nord à l'Asie centrale en passant par le Proche et Moyen Orient) ; le capitalisme bureaucratique et même comprador (privé) y étant généralement, sauf dans la Péninsule arabique et le Golfe, foncièrement associé au "modernisme" et à la "sécularisation", à l'adoption des "valeurs" occidentales, donc "de gauche" dans une lecture ainsi simpliste ; tandis que la bourgeoisie nationale "conservatrice" vis-à-vis des valeurs de l'islam, voire "obscurantiste", y serait "naturellement" classifiée à "droite" : là encore, ce dont il faut se souvenir est en fait un principe de base du marxisme, à savoir que ce qui compte est L'ANALYSE DE CLASSE des phénomènes et des forces politiques et non des notions subjectives et idéalistes telles que "gauche" et "droite", "progressiste" ou "réactionnaire" etc. etc., sous peine de tomber dans l'opportunisme le plus total comme les innombrables "marxistes" ou "socialistes" égyptiens qui ont soutenu le coup d’État fasciste de Sissi en 2013[Lire à ce sujet cet excellent texte de Joseph Massad]

    Et puis l'enseignement, enfin, à valeur cette fois universelle expliqué ici, comme quoi le fascisme se définit moins par la violence répressive (et, pourrait-on ajouter, le "spectacle totalitaire"), que la dictature d'une classe exploiteuse a TOUJOURS trouvé les moyens (sous différentes formes) d'exercer à travers l'Histoire ; que par sa logique corporatiste d'"unir" les classes autour de la dominante pour permettre au capitalisme de surmonter une crise et d'entrer dans une nouvelle ère (ou, dans les pays semi-coloniaux, de mettre justement en place le capitalisme bureaucratique au service de l'impérialisme) ; ce qui pose du coup la question de savoir si cette forme politique n'est pas liée à un contexte (surmonter la PREMIÈRE crise générale du capitalisme dans CERTAINS pays européens, mettre en place le capitalisme bureaucratique dans le "Tiers Monde") et inséparable de celui-ci ; et en tout cas rejoint beaucoup plus sûrement la thèse du fascisme moderne du PCM que la focalisation sur l'extrême-droite et l'appel au "Front populaire" avec Macron de Mister Matérialiste-point-com (alias "Gonzaloman n°1" dans l’État français)...]

    [Sur la question, assez fondamentale dans le mouvement MLM international et source de polémique permanente, de la "capitulation" ou non de Gonzalo emprisonné ; du fait qu'il soit ou non derrière les "Lettres de Paix" ("adressées" à Fujimori en octobre 1993) et la "Ligne Opportuniste de Droite", etc. etc.

    Camarades marxistes-léninistes-maoïstes "plutôt tendance Gonzalo", la question mérite d'être posée :

    Ne serait-il pas (simplement) possible d'imaginer que Gonzalo ait NON PAS TRAHI... mais simplement fait preuve d'ÉTHIQUE DE RESPONSABILITÉ dans les conditions des années suivant immédiatement sa capture ; avec des revers catastrophiques pour le Parti et la guérilla, des cadres de premier plan capturés ou tués les uns après les autres, donc des perspectives de victoire à court terme s'amenuisant jusqu'à devenir nulles ; et dans le même temps, la guerre GÉNOCIDAIRE livrée par Fujimori aux masses populaires des campagnes, des dizaines de milliers de victimes et ce, dans ces perspectives nulles de victoire révolutionnaire, POUR RIEN ?

    Il aurait alors pu, dans ces conditions, envisager le "détour" dont il avait parlé dans la cage comme une réelle PAUSE, un arrêt certes temporaire mais TOTAL de la violence armée "spectaculaire" à grande échelle, afin de retirer à Fujimori le prétexte n°1 (ce n'était pas la seule raison, en réalité, mais le prétexte n°1...) de sa guerre contre le peuple ; et également préserver ainsi ce qu'il pouvait rester du Parti pour en permettre la Réorganisation Générale ; quitte à  limite laisser croire ses adversaires, dans les ambigüités de son propos, à des intentions d'"accords de paix" et d'abandon complet de la voie armée pour la révolution sociale au Pérou.

    Cela au lieu de s'enkyster dans l'excitation de soi-même"je vous emmerde à tous, je suis la Jefatura du Parti et de la Révolution, la Guerre populaire continuera implacablement jusqu'à la Victoire !!" ; et que s'accumulent ainsi encore et encore les milliers de cadavres dans les Andes POUR RIEN, sans perspective sérieuse de prise de pouvoir révolutionnaire d'ici (disons) l'an 2000 ou 2005.

    Raisonnement qui, loin d'un traître et d'un liquidateur, aurait fait de lui un VRAI GÉNÉRAL prenant sur lui (fût-ce l’infâmie de la "capitulation" que des esprits simples ne manqueraient pas de lui prêter...) pour épargner ses troupes et la population sous sa responsabilité, plutôt qu'un mégalomane à la Hitler enfermé dans son bunker et laissant mourir des millions d'Allemands dans une lutte "jusqu'au bout" sans aucun espoir de renverser la situation militaire.

    Il aurait peut-être pu, aussi, émettre des réflexions comme quoi la Guerre populaire n'aurait peut-être pas "pas dû" être lancée, mais pas dû, du moins, vouloir aller parfois aussi (TROP) vite ; dans un contexte mondial, il faut le reconnaître, peu favorable ; comme lorsqu'il s'était déjà (de nombreuses sources en attestent) opposé en 1991, en plein reflux général mondial des forces révolutionnaires et anti-impérialistes en général, au lancement de la guerre dans les centres urbains, autrement dit concrètement au passage à l'offensive stratégique...

    Toutes réflexions dont l’État réactionnaire péruvien et ses conseillers de la CIA et du Mossad, en prenant et collant des petits bouts tronqués les uns à côté des autres, auraient pu faire des "Lettres" appelant à des "accords de paix" et à l'abandon de la lutte révolutionnaire armée au profit de la voie réformiste négociée, bref à la capitulation.

    Et toutes réflexions que... DES GENS, voulant voir dans le maoïsme version péruvienne une espèce de fétiche fantasmé de jusqu'au-boutisme, de "révolution implacable" qui "ne recule devant rien", afin de s'exciter en se rêvant eux-mêmes en ultra-révolutionnaires et en s'auto-fellationnant, sont bien entendu INCAPABLES DE COMPRENDRE (donc, deux choix : soit ils rejoignent ce qu'on appelle là-bas la "Ligne Opportuniste de Gauche" et considèrent Gonzalo comme un traître et appellent - même - à son exécution pour "trahison" ; soit... ils s'échinent nuit et jour à nier qu'il ait pu avoir ces raisonnements, tenir les propos - on ne parle pas des Lettres, là - que lui prêtent certains ex-codétenus, etc. etc.).

    Lire à ce sujet : http://www.bannedthought.net/International/RIM/AWTW/2006-32/32Peru.htm

    "Je vais probablement finir ma vie dans une cellule de prison. Je prends acte de mon anéantissement militaire (qui n'a rien de honteux vu la disproportion des moyens et les méthodes ignobles mises en œuvre par l'ennemi), et souhaite le plus possible épargner la vie de mes troupes et des masses civiles. J'ordonne donc à l'Armée de Guérilla de cesser ses opérations, afin que le gouvernement mette fin aux siennes et aux souffrances immenses qu'elles causent au peuple. Je sais, en matérialiste, que tant que la misère et l'exploitation existeront au Pérou la révolution reprendra tôt ou tard son cours, avec un autre que moi, qui aura un jour l'honneur de présider la République populaire. Mais pour le moment, rien ne sert de s'obstiner au prix de la vie de 10 paysans ou travailleurs pour un seul soldat ou policier ennemi."

    OU

    "Putain, merde, je suis en taule ; il faut que les autres là, dehors, ils se bougent le cul et redoublent de combattivité et d'esprit de sacrifice pour le Parti et la révolution, histoire de prendre le pouvoir et de me libérer d'ici 5 ans..."

    Lequel, de ces deux raisonnements, serait celui d'un vrai général en chef et d'un homme d'honneur ?

    Voilà, après maintes et maintes réflexions sur cet épineux sujet, la conclusion à laquelle nous en sommes rendus : Gonzalo n'a PAS trahi... parce que les propos qu'on lui attribue (si l'on s'en tient strictement à ces propos) ne sont PAS de la trahison, tout simplement !!

    Ils sont les RESPONSABILITÉS prises par un authentique commandant, et un homme d'honneur, dans la situation telle qu'elle se présentait.

    Il allait y avoir un "détour" (discours de la cage), et ce détour voulait dire cesser pour le moment la lutte armée afin que Fujimori cesse sa guerre d'extermination, et ainsi épargner de vies combattantes comme civiles.

    Et pas "putain merde, je suis en taule, dépêchez-vous de prendre le pouvoir pour me libérer"...

    VOIRE, la jouer un peu "calmer le jeu" en sachant très bien (en matérialiste) que la révolution inéluctable reprendrait son cours tôt ou tard, dans 20 ou 30 ou 40 ans, et que d'ici là il y aurait toujours dans les campagnes ou les bidonvilles des résidus du Parti qui se réorganiseraient.

    C'est en réalité une attitude très responsable, et la seule digne qu'il était possible d'avoir.

    Non pas appeler à l'obstination dans une Guerre populaire conçue comme "sa chose", sa seule raison existentielle qui devait donc continuer indéfiniment pour sa satisfaction personnelle ; mais, en général défait et prisonnier, appeler ses troupes à épargner leurs vies et celles des civils sous leur "juridiction" en cessant le combat, et non à se sacrifier jusqu'au dernier sans le moindre espoir à court terme (comme le faisait Hitler dans son bunker).

    Qu'ensuite, des droitiers l'aient interprété comme un authentique appel à un changement pacifique de société ; et des gauchistes comme une effective "trahison" (thèse qu'a fini par assumer VP, par exemple) ou alors forcément une falsification de l'ennemi (thèse à laquelle tout bon MLM est prié de se tenir), est en soi un autre sujet.

    Mais un autre sujet qui a fini par baiser le débat en le phagocytant, et en empêchant de le prendre (tout simplement) par le bon bout, à savoir : qu'a RÉELLEMENT dit Gonzalo (se pencher VRAIMENT sur l'EXACTITUDE de ses propos), et... avait-il vraiment TORT de le dire ?

    Enfin bon, bref, la seule position correcte sur tout ça c'est de toute façon qu'on s'en fout de ce que Gonzalo a ou aurait dit, pas dit, dit sous la torture ou drogué, depuis un cachot à 8 mètres de profondeur sous une base navale : les derniers documents valables sur lesquels se baser sont ceux du 1er (et dernier) Congrès (1989), du 3e Plénum du Comité Central (1992) et de ces années-là, tels que le "Nouveau plan stratégique de développement de la Guerre populaire pour conquérir le pouvoir dans tout le pays" ; car la ligne d'un Parti n'est pas les paroles d'un seul dirigeant, encore moins emprisonné, qui du fond d'une prison ne dirige ni la ligne opportuniste de droite (comme le prétend le texte avakianiste en lien ci-dessus), ni la ligne de gauche ni rien du tout. Telle est la position des VRAIES organisations "gonzalistes" d'Amérique du Sud, mais pas, bien évidemment, des petites sectes occidentales qui se branlent.

    * Oui car une grande questionla grande énigme serait-on tenté de dire, avec ces "accords de paix", c'est... OÙ SONT-ILS DONC ? Où sont-ils, ces accords ? Quelqu'un peut-il nous montrer un document, signé et contresigné par Gonzalo et Fujimori (ou un autre représentant de l’État) ?

    Il y a (ou aurait) eu des LETTRES adressées par Gonzalo à Fujimori et lues par celui-ci à la tribune de l'ONU en octobre 1993, puis une réitération de cet appel à un accord, entouré de sa compagne Elena Iparraguirre et des autres membres emprisonnés du Comité central, dans une vidéo retransmise à la télévision en décembre de la même année. C'est de cela, et UNIQUEMENT de cela qu'il est question, et de (concrètement) s'il a pu être forcé à cela, ou a agi de son plein gré. Puis, de supposés entretiens (dans sa prison ou par radio) avec des dirigeants guérilleros hostiles (au départ) à l'abandon de la lutte armée et qu'il aurait convaincus ; et des propos rapportés par ses avocats, notamment le fameux Alfredo Crespo, et compilés pour certains dans l'ouvrage De Puño y Letra paru en 2009.

    En dehors de cela, il n'y a RIEN D'AUTRE ; ni avec Fujimori tombé en 2000, ni avec aucun des quatre chefs de l’État qui lui ont succédé depuis ; aucun "accord" signé et contresigné, aucune "feuille de route" prévoyant des mesures, démocratiques, sociales ou autres, pour prétendument "transformer" la société péruvienne par la voie pacifique ; avec un PCP transformé en parti légal et légaliste prenant part au "processus" (comme cela s'est produit partout où il y a eu de tels "accords", en Amérique centrale, au Népal, en Afrique du Sud, en Palestine, en Irlande etc. etc.). Le Movadef, qui centre son militantisme sur la demande d'une "amnistie générale humanitaire" (pour faire court) des prisonniers du conflit, et dont Gonzalo a par ailleurs affirmé n'avoir "rien à voir avec", est disons tout juste "toléré"...

    Il n'y a donc PAS d'"accord" qui pourrait signifier le passage de Gonzalo (et de la haute direction emprisonnée du Parti) sur une ligne d'abandon de la révolution armée et de "transformation sociale" par des mesures négociées avec la bourgeoisie (seul le haut cadre Oscar Ramirez "Feliciano", successeur immédiat de Gonzalo à la tête du Parti, serait aujourd'hui sur une telle ligne, enfin, carrément sur la ligne que la "démocratie" péruvienne actuelle est "très bien comme elle est"...).

    On a donc, déjà pour commencer, l'impression de débattre d'"accords", de "négociations"-trahison qui... n'existent pas !!

    TOUT CE QU'IL Y A c'est, à la rigueur, des appels à mettre fin à la Guerre populaire au sens de violence armée, et à une "réconciliation nationale" qui serait de toute évidence à entendre dans un sens purement humanitaire (libération des prisonniers, fin de la violence répressive, de l'état d'exception permanent et quasi-héréditaire sur les "populations terroristes" etc. etc.). En d'autres termes, PRENDRE ACTE d'une situation de déroute militaire et d'inutilité de s'acharner (la "longue marche" révolutionnaire du Peuple péruvien reprendra quand elle devra reprendre...), et essayer de "gérer" HUMANITAIREMENT cette situation "au mieux"... [Ainsi par exemple le document du Comité central "Sur la nouvelle grande stratégie politique", en novembre 1993, parle de "lutter pour un accord de paix et renforcer les bases, préparer le 2e Congrès", ce qui ne laisse pas vraiment entendre une démarche de liquidation du Parti et de liquidation de la Guerre populaire, ni que l'"accord de paix" évoqué soit autre chose que tactique et humanitaire – ajoutant d'ailleurs ensuite "l'autre situation dans laquelle pourrait s'appliquer cette Nouvelle Grande Stratégie Politique serait la défaite dérivée de ne pas pouvoir développer la Guerre populaire, mais seulement la maintenir et voir ses forces se déliter lentement, (ce qui conduirait à devoir) appliquer strictement la même Nouvelle Stratégie, mais dans les pires conditions pour la classe, le peuple et la révolution, ce qui serait rendre indubitablement service à l'impérialisme et à l'autre colline (l'ennemi réactionnaire) et sans doute ce qu'ils espèrent le plus" (...) "en synthèse, la tactique que nous suivons en application de cette Nouvelle Grande Stratégie Politique signifie que le Parti organise de manière centralisée le repli général politique et militaire qui lui permettra dans la dure, complexe, difficile et dangereuse lutte pour un Accord de Paix de jeter les bases pour un 2d Congrès, lequel posera les fondations d'un nouveau développement du Parti et de l'accomplissement de ses tâches au début du 21e siècle, au sein et en fonction de la future nouvelle grande vague de la Révolution mondiale", ce qui rejoint largement le raisonnement que nous avons envisagé jusqu'ici (à la rigueur l'appel à un "Accord de Paix", comme grand mot d'ordre avec majuscules, pourrait être considéré en contradiction avec certains propos de Gonzalo comme quoi toute discussion et accord avec l'ennemi ne peut que refléter la situation sur le champ de bataille, donc en cas de déroute, une déroute, mais là encore pourrait être à comprendre dans le sens d'un accord humanitaire - libération des prisonniers, petits militants pour le moins, cessez-le-feu de part et d'autre et arrêt des massacres - et non d'une "solution" politique pour la société péruvienne...).]

    Ce qui, on l'a dit, relèverait d'une attitude de RESPONSABILITÉ et aucunement d'une capitulation des principes communistes.

    Ce que nous essayons d'expliquer, et de faire comprendre ici, c'est que même dans la très hypothétique hypothèse où l'on viendrait nous jeter sur la table "toutes les preuves" que Gonzalo a bel et bien "capitulé" (comme certains prétendent déjà le faire, en tout cas l'insinuent lourdement)... il resterait encore à démontrer que ceci peut bien être qualifié de "capitulation", si l'on se place (bien sûr) dans le contexte du Pérou de la fin 1993 et non dans le beau ciel bleu étincelant des idées :

    - Cesser le feu, se replier en bon ordre et se réorganiser pour relancer un jour la Guerre populaire dans des conditions redevenues favorables ; et non poursuivre la lutte armée en mode suicide collectif et sans issue ; n'a dans un tel contexte strictement rien à voir avec "capituler", déjà. Capituler, c'est rendre ses armes, renier ses idées révolutionnaires, et pour ainsi dire considérer que tout ce que l'on a fait jusque-là était une erreur.

    - Mais MÊME l'idée d'"accord de paix", dont on sait ce qu'elle est devenue aujourd'hui avec le Movadef et compagnie, aurait tout à fait pu être "tacitement acquiescée" par Gonzalo lui-même (sans guère de possibilité de communication et de concertation directe avec le Comité central, rappelons-le), si on l'entend dans un sens HUMANITAIRE... C'est à dire que c'est bien de cesser le feu et se replier pour se réorganiser ; mais c'est encore mieux si de l'autre côté Fujimori cesse lui aussi le feu, la répression, les tortures et les massacres ; envisage même, peut-être, de relâcher les prisonniers simples combattants, etc. Ceci n'a strictement rien à voir avec un accord POLITIQUE qui prétendrait, dans la défaite la plus totale, apporter des "réformes progressistes" au pays et transformer le Parti en crétin parlementaire au service de ce "processus".

    Comme Gonzalo l'a lui-même expliqué, les négociations et même les accords avec l'ennemi ne sont pas "interdits" ; simplement, ils ne peuvent pas refléter autre chose que le rapport de force militaire sur le terrain. Il est donc bien évidemment illusoire, comme le mouvement basque en 2010 ou les FARC plus récemment, d'être complètement écrasé par la répression mais de penser pouvoir faire "triompher ses idées" dans un "processus démocratique", "par des voies désormais pacifiques" bla-bla-bla. Mais un accord purement humanitaire, visant à épargner le plus de souffrances possible à la base militante et aux masses populaires lorsqu'il n'y a (pour le moment, à brève échéance) plus d'issue victorieuse possible au combat, n'a en revanche rien d'idiot ni de choquant et n'est pas en contradiction avec ce principe. Rien de garanti non plus, bien sûr, puisque l'ennemi est en position de force absolue et fait (concrètement) ce qu'il veut... Mais rien n'empêche de le tenter, de le proposer, ne serait-ce que pour démontrer une fois de plus sa monstruosité aux masses s'il refuse !

    Ce sont là deux genres d'"accords" qui n'ont strictement rien à voir entre eux... Mais qu'il est effectivement facile de confondre à dessein, que ce soit pour se lancer corps et âme dans la véritable capitulation, conciliation et liquidation (comme le Movadef), ou pour calomnier, ce que les haters de Gonzalo et du PCP ne sont pas peu nombreux pour faire.

    Et BIEN ENTENDU, à toutes les personnes pour qui la révolution relève encore largement du fantasme, de la pose, limite du jeu de rôle, et non de la cruelle et immédiate réalité qu'elle était pour le Parti communiste du Pérou, ce genre de chose apparaît totalement incompréhensible.]

    [Et puis important aussi, pour celles et ceux qui connaissent un peu les "bails" à ce sujet entre maos (et même pour les autres c'est intéressant, surtout au cas où ils viendraient à s'y pencher...), il faut préciser un truc de toute première importance par rapport à tout ce que nous venons de voir mis face à ce que sont, dans un certain nombre de pays, les "pro-" pour ne pas dire "fana-Gonzalo".

    Qu'est-ce que la ligne rouge du PCP (pas la "ligne opportuniste de droite" connue, celle des "accords de paix" et aujourd'hui du MOVADEF) ? C'est essentiellement et forcément, on sera d'accord, ce qui "communique" comme tel, ce qu'il en parvient à la connaissance sensible des gens, sa "voix".

    Or... pendant quelques 12 années (1999-2011), cette "voix" du PCP ligne rouge à l'international, la "position péruvienne", "Pensée Gonzalo" sur la réalité de la révolution là-bas comme sur tous les sujets de l'actualité, a été incarnée par le dit "Mouvement Populaire Pérou" et ses sites internet "Sol Rojo" en castillan et "Red Sun" en anglais. ET... au tournant de 2011-2012, le principal rédacteur de ce site a été DÉMASQUÉ comme un agent provocateur (longtemps) au service du "rat José", dirigeant du maquis de la VRAE (vallée des fleuves Apurimac et Ene) et tenant d'une ligne finalement analysée comme (ce que nous appelons) gauchiste réactionnaire, opportuniste de droite sous couvert de phrases ultra-révolutionnaires :

    http://ekladata.com/MPP-et-toutes-ces-histoires.pdf (ici les articles de VND en castillan : 1 - 2 et ici en anglais : 3)

    Le gars, en substance, avait littéralement passé plus d'une dizaine d'années à dire tout et son contraire ; ou plutôt à prendre systématiquement, en chaque circonstance, la position erronéeobjectivement au service de la Réaction impérialiste mondiale. Apôtre du "socialisme du 21e siècle" à une époque, visiblement ; mais nous, aussi loin que remonte notre mémoire c'est à dire à la fin des années 2000, la ligne du site "Sol Rojo" était au contraire très hostile aux régimes bolivariens... précisément à un moment où ceux-ci faisaient face à une très forte pression impérialiste US et occidentale (Venezuela et Équateur face à la Colombie après la mort du n°2 des FARC dans une opération militaire en territoire équatorien et la "découverte de son ordinateur", Bolivie au bord de la guerre civile avec l'agitation fasciste de la région orientale, coup d'État au Honduras etc.) !!

    Une façon, que nous trouvions déjà détestable dès nos premières lectures, d'emphatiser sur la Pensée Gonzalo comme un véritable talisman magique ; ne pouvant pas ne pas faire penser au culte délirant de Mao qu'avait tenté d'organiser le traître Lin Piao ; et surtout, de rendre toutes les contradictions pouvant exister dans le mouvement communiste (maoïste) international en particulier, et dans le "camp révolutionnaire", "de la résistance" mondial en général, ultra-principales et antagoniques à mortpires que toute contradiction avec l'impérialisme et les forces réactionnaires.

    Tout ceci en prenant toujours fermement appui sur les fondamentaux du MLM et de la Pensée Gonzalo ; autrement dit, en agitant savamment le drapeau rouge contre le drapeau rouge.

    Son manège a fini par être démasqué lorsque, une région de plus de 300.000 km² au Pérou étant le théâtre d'une gigantesque opération militaire US et de la Réaction locale, il a brutalement tourné casaque et, ayant encensé jusque-là le maquis opportuniste de la VRAE, a commencé à le dénoncer comme "révisionniste armé et narcotrafiquant"... alors même que ceci était le prétexte n°1 de l'opération. Ainsi que, vers la même époque, redoublé d'attaques contre la Guerre populaire en Inde, insinuant quasiment qu'elle serait un révisionnisme armé elle aussi ; après l'avoir déjà toujours qualifiée de "lutte armée" et non de Guerre populaire, depuis son renouveau au milieu des années 2000.

    Une ligne gauchiste réactionnaire... évoquant fortement, si vous nous suivez depuis un certain temps, celle du 'p''c''mlm' = "Contre-Informations" puis "Voie Lactée" puis "Les Matérialistes" (exemple 1 - exemple 2 - exemple 3), et pour cause : celui-ci a longtemps été le plus grand défenseur francophone de cette ligne, voire littéralement sa "branche française" ; et a d'ailleurs vigoureusement pris sa défense lors de son démasquage par le groupe VND Nouveau Pérou (MPP.pdf) ; avant de sombrer, comme entraîné dans sa chute, dans des positions de plus en plus ouvertement bourgeoises (souvent réactionnaires) pour finalement rejoindre tout dernièrement la social-démocratie agauche.org.

    Mais il serait profondément erroné de croire que l'on a démasqué cet agent réactionnaire et "ça y est", "tout est rentré dans l'ordre" (même s'il est vrai que le débat communiste-maoïste international en a été relativement assaini). Comme on l'a dit, durant plus d'une décennie, ce site a été pour des milliers de personnes intéressées par le maoïsme la seule connaissance sensible de la "ligne rouge péruvienne". Il serait pour tout dire délirant d'imaginer qu'il n'a pas eu une INFLUENCE considérable, qui peut perdurer encore jusque aujourd'hui ; tout comme l'affirmation de VND Nouveau Pérou, après tout ce qu'ils exposent, que "néanmoins jusqu'en mai 2011, Sol Rojo c'est principalement le drapeau rouge", "seulement après cette date le drapeau noir", a de quoi laisser perplexe...

    La réalité c'est bel et bien que cette influence a été réelle, sur tout un "état d'esprit", une conception du monde et un style de travail ; qu'en dehors (bien sûr) du corpus théorique de Gonzalo et du PCP avant son arrestation (mais qui comme on l'a dit, comme toute pensée "figée dans l'histoire", peut tout à fait être dévoyé et servir d'appui à un "drapeau rouge contre le drapeau rouge"...), le PCP à l'international pendant toute la grosse décennie qui a vu se lever la nouvelle vague de la révolution mondiale, ça a "été" ce site ; et qu'il serait absurde et anti-matérialiste de croire que la rupture avec lui, pour salutaire qu'elle ait été, ait pu être autre chose que partielle, même chez les "meilleurs" "gonzalistes" qui puissent exister (au Brésil notamment), a fortiori dans une logique d'enfermement dans une alternative binaire avec une "ligne philippine" qui pose aussi ses propres problèmes (campisme bête et méchant, soutien à des régimes de pourritures comme Assad au nom de l'"anti-impérialisme", manque de critique vis à vis des "gauches" bourgeoises du Sud global etc.).

    La réalité, c'est que bien plus qu'un Gonzalo emprisonné au secret depuis plus d'un quart de siècle et ses théories de "Pensée" ou de "Jefatura" ("Grand Dirigeant") contre lesquelles certains s'éreintent à s'acharner vainement, ce que ces "certains" appellent et dénoncent sous le nom de "gonzalisme"... c'est ça (cette influence néfaste), en fait.]

     

     

    Sur Gonzalo, le PCP et la Guerre populaire au Pérou


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  • "Vive l'antiracisme politique sans le PIR !"...

    Ça claque comme slogan non ? Ça a un petit côté #KronstadtCredibility ("vive les soviets sans les bolchéviks !") qui sied bien à une certaine ultra-gauche...

    Ou dit autrement : vive l'antiracisme politique... sans celleux qui quoi qu'on en pense dans le détail l'ont initié dans ce pays, l'ont porté sous un déluge de crachats et ont été dans les faits sa LIGNE DE DÉMARCATION avec le reste pendant près de 10 ans. La ligne de démarcation, en substance, entre celleux qui sont capables de lire un texte avant (éventuellement) de lui adresser une critique constructive et celleux qui préfèrent hurler avec les loups (sans avoir lu) au ''grand remplacement de la classe par la race'', à l'antisémitisme, à l'anti-féminisme et à l'homophobie...

    Hein quoi ? Que me dites-vous ? Que c'est UN PEU FASTOCHE ??? Ah... euh... ben... à bien y réfléchir... Oui, en fait.

    Mais bon, ho, abusez pas quoi... S'offrir une cause en plein essor et porteuse d'avenir pour prendre la pose à côté et avoir l'air super révolutionnaire, ça peut pas coûter une telle remise en question de soi non plus. C'est comme quand tu veux du mascarpone, tu vas pas l'acheter hors de prix à Grand Frais (le bien nommé) alors qu'il coûte trois fois moins cher à Lidl.

    Surtout quand y a pas deux ans et demi on chiait abondamment sur les mobilisations autonomes pour Gaza et la consolidation d'un champ politique non-blanc organisé qui se jouait alors là-dessus.

    Surtout quand on est, pour dire les choses clairement, incapables du moindre anti-impérialisme conséquent à l'international et que la situation des racisés.e.s en Occident, et donc l'antiracisme politique autonome de celleux-ci, c'est juste un chouïa lié à la domination impérialiste occidentale sur la planète.

    BREF. J'en jette plus sinon j'en ai pour 8 jours lol.

    Je veux parler là de gens (blancs de chez blanc, bien sûr) parmi les plus démonstratifs et théâtraux dans leur soutien, par rapport à l'action de Marseille par exemple ; des gens qui m'évoquent irrésistiblement les roulements d'yeux du serpent Kaa dans le Livre de la Jungle ("ais confiaaaance"), notamment avec leurs appels à l'"articulation" et à l'"intersectionnalité" ; et qui ont ABSOLUMENT BESOIN de dégommer le PIR parce que le PIR, en clair et quoi qu'on en pense par ailleurs, reste le lieu de production d'une "carapace" intellectuelle (ce récent article en offre un bon exemple, ou encore celui-ci sur la question de l'"intersectionnalisme" : Race, classe et genre ; une nouvelle divinité à trois têtes) contre leurs manœuvres d'approche de nouveaux "potes" : le PIR, quoi qu'on en pense, a un SOCLE IDÉOLOGIQUE qui est que les "indigènes", les racisé.e.s, les nationalités ultra-opprimées de "l'Empire colonial importé en métropole" sont un "autre pays", un "autre peuple" ("Tiers-Peuple") qui "ne se laissera pas dicter son agenda" par la gauche radicale blanche... ce qui ne peut évidemment pas plaire à tou.te.s celleux qui, à l'affût dans leur "rôle d'allié", attendent le moment propice pour "dicter" ainsi le leur (d'agenda) ! (c'est notamment, bien sûr, une évidence pour celleux qui ont en ligne de mire la constitution d'un Parti révolutionnaire FRANÇAIS...)

    Et sinon : arrêtez d'"articuler les luttes intersectionnelles", vous allez finir par vous faire un tour de rein. Rien ne s'articule avec rien du tout. Il n'y a juste simplement pas un ''prolétariat mondial'' dans la même situation abstraite et idéalisée d'un cercle polaire à l'autre, il y a des masses populaires qui sont dans des situations spécifiques différentes, produites par l'histoire, qui appellent des formes spécifiques (et différentes) de lutte de classe et l'antiracisme politique, révolutionnaire, est simplement la forme spécifique de lutte de classe des catégories populaires racisées. Tout comme le féminisme révolutionnaire (lire aussi ici) est une composante obligatoire de la lutte de classe pour les femmes prolétaires. Ou comme il n'est pas possible (pour les travailleurs blancs, bon les autres ont aussi le droit de s'y intéresser) de mener la lutte de classe dans le ''Midi' ou en Bretagne, de poser la question du pouvoir, sans avoir une analyse historique approfondie de ces territoires... et devenir ainsi occitanistes ou abertzale ou emsavistes (libération bretonne).

    C'est juste que ''l'exploitation'', ''la domination'' ne sont pas des notions universelles abstraites mais des réalités concrètes produites par l'histoire des territoires et des groupes humains, prenant donc des formes particulières localisées qui appellent chacune une lutte particulière (particulière ce qui ne l'empêche pas d'être solidaire des autres, dans la mesure où ces autres sont réciproquement et sincèrement solidaires d'elle, mais dans le respect et non la négation de sa particularité).

    "Punchlines" réseaux sociaux - novembre 2016

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    #TRUMP  #FASCISME

    Depuis que j'ai crié à l'avènement du fascisme en 2007, je suis devenu méfiant.

    Ou plutôt si : le fascisme, en tout cas la Réaction la plus noire arrive... TOUT DOUCEMENT, pas à pas, comme un MOUVEMENT DE FOND et non en lien absolu avec l'élection d'untel ou unetelle. La victoire dans les urnes de tel ou telle démagogue hirsute est un jalon sur cette longue pente descendante, un "signe", mais pas la proclamation du fascisme en tant que telle. Comme un bouton purulent est un signe de la maladie mais pas la maladie elle-même, tapie au plus profond de l'organisme.

    On le voit bien avec le PS de Valls Cazeneuve et compagnie, qui fait des trucs que Sarkozy n'aurait jamais fait (tant sur le plan social que des libertés). Jamais fait, pas parce qu'il était meilleur mais parce que l'époque ne l'exigeait pas, et maintenant elle l'exige.

    Et c'est aussi ce qu'ont bien compris les révolutionnaires et la plus grande partie des progressistes outre-Atlantique en qualifiant le duel présidentiel de "peste et choléra" - il y a eu du vote barrage certes, cela dit chez les non-Blancs et notamment les Noirs c'est traditionnel face au Parti républicain, rien de vraiment nouveau sous le soleil ni surtout de signe d'un enthousiasme débordant pour "sauver la démocratie" ; finalement cela n'a réellement été observé que chez les "liberals" petits bourgeois blancs jouant à se faire peur pour se sentir exister, alors que je vois honnêtement très improbable que Trump ait prévu des camps de concentration pour eux...

    Donc j'ai de plus en plus tendance à me dire que peu importe qui gagnera l'année prochaine, et en 2022 et ainsi de suite : le gouvernement quel qu'il soit fera dans tous les cas ce que l'époque lui dicte ; seule la forme et le caractère ouvert et assumé des choses changeront peut-être (et encore).

    L'époque qui est celle de la crise généralisée et terminale de l'OCCIDENT, qui voit son monde (celui qu'il a construit) s'effondrer sous ses yeux. Ah merde ! Voilà donc que les "sauvages" n'acceptent plus nulle part notre domination sans broncher... Ah merde ! V'là maintenant que les Jaunes, les bronzés et (qui sait) bientôt les Noirs se mettent à produire en masse (pour leur propre compte) de la camelote bon marché et nous, avec nos salaires 3 ou 4 ou 5 fois supérieurs, on n'arrive plus à suivre... Etc. etc.

    Un phénomène finalement, en réalité, sans précédent dans l'Histoire et qui questionne pratiquement l'emploi du terme fascisme, dans un sens, car il ne s'agit pas d'une situation de frousse bourgeoise face au "peuple de gauche" local, ni de petites puissances qui veulent se tailler leur part du gâteau face aux grandes (Italie, Japon), ou de puissances rabaissées après une guerre perdue et qui veulent prendre leur revanche comme l'Allemagne nazie (ça, on le trouverait plutôt en Russie). Non, c'est le capitalisme qui, jamais aussi peu massivement contesté depuis sa naissance au Moyen Âge (même si ça repart tout doucement après la grande "Fin de l'Histoire" des années 90), ne fonctionne plus EN TANT QUE TEL... en tout cas dans ce qui est son berceau et le Centre historique de l'extension de ses tentacules sur toute la planète, l'Occident. En train de s'effondrer tout doucement sur lui-même pour ne laisser bientôt qu'un gros cratère.

    Une très bonne chose dans l'absolu ! Sauf que ça ne va malheureusement pas se passer aussi simplement que ça ; les tauliers (héritiers des bâtisseurs) de ce monde qui s'effondre vont défendre bec et ongles leurs intérêts et c'est ce qui produit cette "tendance lente et rampante au fascisme", à la droitisation radicale DE FOND (de "l'opinion" via les médias aux mains du Capital et leurs succursales dépotoirs-à-boloss de la "dissidence"), avec ses "éruptions" du temps d'une campagne façon Berlusconi ou Fortuyn pour les déjà-un-peu-vieux comme moi, Sarkozy, et maintenant Marine Le Pen et Trump... qui élus (3 sur 5 que je viens de citer l'ont été) ne représenteront pas une "rupture" telle que l'arrivée au pouvoir d'Hitler en Allemagne, mais la poursuite et l'approfondissement de cette tendance de fond qui leur préexiste et qui les a portés, celle des besoins du Capital transmis à "l'opinion" formatée et que (on le sait maintenant) ceux qu'on appellera la "droite modérée" (comme le PS) suivent absolument tout autant qu'eux.

    "Punchlines" réseaux sociaux - novembre 2016

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    #AntiracismePolitique  #LuttesDesPeuples  #PasToutConfondre

    Moi, voyez-vous, je suis deux choses : 1°/ un (sale) COMMUNISTE, un gros rouge qui tâche lol, et 2°/ un affreux-tout-vilain "nationaliste" (pour reprendre les mots des détracteurs), au sens où je soutiens sans concession (et participe moi-même à une) les LUTTES DE LIBÉRATION DES PEUPLES (toutes, nonobstant que les formes et les degrés d'oppression ne s'équivalent pas). Car ces luttes sont non seulement compatibles, mais INDISSOCIABLES de la lutte contre le Capital ; les oppressions nationales n'étant pas une "problématique annexe" mais la NORME et, en réalité, le "carburant" du système capitaliste.

    Et donc, voyez-vous encore, c'est à travers ces lunettes toutes simples que j'arrive à voir les choses aussi simplement que cela : les racisé.e.s, les non-Blancs, ce sont des (un ensemble de) NATIONALITÉS OPPRIMÉES subissant une oppression PARTICULIÈRE - particulièrement brutale, excluant idéologiquement de l'espèce humaine, en lien avec la SUR-exploitation capitaliste de leur force de travail (ou parfois la volonté, qui a existé dans l'histoire, de les voir tout simplement disparaître pour garder leurs pays et leurs ressources sans la population).

    Cette forme particulière d'oppression nationale est bien connue de tou.te.s, hors d'Europe, sous la forme du COLONIALISME déployé par les Européens à partir de 1492, s'emparant grâce à leurs moyens militaires (armes à feu, chevaux etc.) d'immenses territoires à un moment où les gains territoriaux en Europe devenaient coûteux pour un résultat maigre et incertain, et y surexploitant sans pitié les populations locales ou des esclaves amenés d'Afrique et de quelques autres endroits (Madagascar, Inde, Indonésie) ; colonialisme ayant évolué à partir du milieu du 20e siècle vers une domination NÉOCOLONIALE plus "masquée" qui (elle) existe encore aujourd'hui (il n'y a plus de véritables colonies, les collectivités françaises d'outre-mer sont une forme de néocolonialisme).

    Et de manière tout à fait logique, elle (cette forme d'oppression nationale) a "accompagné" les millions de travailleurs de ces nationalités qui ont été IMPORTÉS pour les besoins du capitalisme au cœur même des métropoles impérialistes européennes - sans compter les cas particuliers d'anciennes colonies de peuplement blanc devenues des pays impérialistes : États-Unis, Canada, Australie etc., avec leurs nations indigènes et/ou descendant.e.s d'esclaves.

    Ce n'est pas plus compliqué que cela, et ne devrait pas faire de nœuds au cerveau des militant.e.s de notre champ politique "nationalitaire périphérique" : les non-Blancs/racisé.e.s sont des nationalités opprimées de manière particulièrement brutale et déshumanisante ("zone du non-être" comme disait Fanon au sujet des colonies) ; non "autochtones" mais "importées" pour les besoins du capitalisme (mais néanmoins bel et bien ici et "d'ici" : un "Empire colonial intérieur" à la métropole hexagonale en quelque sorte) ; dont l'oppression, comme nous l'avons dit, n'est pas une "problématique annexe" mais un élément essentiel au fonctionnement du système capitaliste ; et dont la lutte d'émancipation est une "dynamite" (au même titre et même PLUS que la nôtre) pour faire sauter celui-ci, d'autant plus qu'elle est en lien direct avec l'Empire extérieur (hors d'Europe) qui en est une sacrée (de dynamite) !!

    Le système qui a d'ailleurs très bien compris cela comme le montre la répression par le crachat, la calomnie, le pamphlet aussi pompeux que malhonnête et la démonisation de toute expression radicale à ce sujet (laissons de côté l'action, toujours réprimée par la loi lorsqu'elle franchit certaines lignes jaunes - ce n'est pas un critère). Quoi de plus simple, pour savoir qui est réellement un danger pour le système capitaliste-impérialiste français (ou n'importe quel autre...), que de regarder dans la direction des aboiements de ses chiens (y compris "de gauche") ?

    Voilà donc la base (l'ANALYSE SCIENTIFIQUE) toute simple sur laquelle nous pouvons et devons apporter notre soutien à l'antiracisme politique (que nous ne pouvons QUE soutenir, comme des hommes ne peuvent que soutenir le féminisme), pour répondre par exemple à la main tendue par certain.e.s de ses représentant.e.s : https://bouamamas.wordpress.com/…/la-logique-coloniale-fra…/ http://indigenes-republique.fr/pour-un-internationalisme-d…/

    Il ne s'agit nullement de substituer à la lutte contre le Capital une prétendue lutte contre "les oppressions" (où chacun.e s'emparerait d'une oppression qui l'afflige et se mettrait à lutter contre celle-ci) ; et d'ailleurs il faut affirmer  quelque chose bien clairement ici, car j'ai VU de mes yeux écrire le contraire noir sur blanc : NON, "toutes les oppressions" ne se valent pas. Non. Par définition, puisque ces oppressions consistent précisément à établir des HIÉRARCHIES au sein de la grande masse (mondiale) des producteurs-consommateurs de marchandise (et non des divisions "horizontales" et abstraites dont "l'unité de classe" ne devrait faire qu'une bouchée, comme dans la conception "rien-que-la-classiste" qu'il faut également réfuter)... "Hiérarchie" étant, pour celleux qui n'auraient pas bien suivi, un terme a priori antithétique d'"équivaloir".

    En dehors des quelques % de grand.e.s bourgeois.e.s "maîtres du système" (celleux qu'on ne croisera jamais dans la rue...), tout le monde est exploité et opprimé à un certain degré ; mais le principe même de "stratification" des masses populaires fait que l'oppression du travailleur même "précaire" homme blanc, ou même d'unE précaire blanchE ne "se vaut" pas avec celle d'un prolétaire racisé et a fortiori d'unE, et il en va de même si l'on prenait comme identité n'importe quel Peuple travailleur blanc d'Hexagone (puisque les "Français" comme nationalité, on l'a vu, cela n'existe pas), même les plus périphériques (Corse, Occitanie ou Bretagne "profondes", Pays Basque etc.) ; ou encore le cas très particulier des personnes juives ; et encore de même pour les situations opprimées sur la base du genre (femmes, personnes non-hétéronormées), qui ne sont jamais "abstraites" de l'appartenance de classe ou de race sociale : à bien des égards, oui, il est possible (et il ne faut pas avoir peur) de dire que LA prolétaire non-blanche de banlieue a finalement moins de choses en commun avec la petite bourgeoise blanche bien francouille (j'y reviendrai au paragraphe suivant) qu'avec... "son" HOMME (qui supposément la voile, bat et viole en tournante dans les caves aux yeux de la précitée). Et il n'est pas loin d'en être de même pour la prolétaire blanche de n'importe quelle périphérie "profonde" d'Hexagone !

    C'est là un démenti important à apporter aux thèses (plutôt de type anarchiste) de celleux qui pourraient y compris, rompant brutalement avec les "niqueurs de race" archéo-classistes, venir se poser en "allié.e.s blanc.he.s" de l'antiracisme politique. En clair, il ne s'agit surtout pas de verser dans une espèce de "foire aux identités opprimées" dans laquelle (et bien que nous convenions que toutes les oppressions, pour être de nature et de degré de violence différents, n'en soient pas moins "respectables") on en arriverait de fil en aiguille à cellelui qui n'est PLUS VRAIMENT L'AMI.E/ALLIÉ.E : le/la FRANCOUILLE (cf. le concept expliqué plus bas) - ou dit de manière peut-être sommaire et abrupte, le/la petit.e bourgeois.e blanc.he (qui aura bien toujours une ou deux oppressions à faire valoir dans sa besace, du genre être "précaire" à la sortie de ses -longues- études et "vivre moins bien que ses parents" - ce qui est le cas de toute personne blanche née après 1975 mais bon)... Un.e allié.e extrêmement encombrant.e.

    Il importe aussi, dans le même registre, de sortir d'une certaine "politique des ressentis" et d'un certain "nombrilisme politique" (faire de l'oppression sur laquelle on s'est focalisé - pour les raisons qui sont les siennes - l'alpha et l'oméga de tout) ; ce qui est particulièrement insupportable (entre risible et très énervant, disons) lorsque l'on est dans une situation d'oppression concrète "plus que toute relative" (il y a beaucoup de cas) ; mais fait dans tous les cas (même d'oppressions réellement très fortes) obstacle à la nécessaire compréhension globale du système dans sa totalité - en clair, une politique révolutionnaire totale et cohérente ne peut pas être un "défouloir" de souffrances individuelles, pour réelles et terribles qu'elles puissent être.

    Il s'agit au contraire et tout simplement, dans l'approche que nous devons avoir de toutes ces questions, de comprendre SCIENTIFIQUEMENT la manière dont le capitalisme, avalant au fil des siècles territoires et populations (arrachées à leur paisible "économie naturelle" agrémentée de quelques redevances féodales) pour les mettre dans ses chaînes (de production de plus-value), a "empilé" celles-ci dans sa besace et établi entre elles des hiérarchies dans sa division (mondiale, à l'arrivée) du travail.

    Exactement de la même manière que l'hétéropatriarcat ne se combat pas sur la base d'une "foire aux oppressions", mais d'une analyse scientifique de son caractère structurant pour le mode de production capitaliste (il existait déjà ici et là dans des modes de production antérieurs, mais il est démontré aujourd'hui que c'est le capitalisme qui l'a systématisé et "mondialisé").

    "Punchlines" réseaux sociaux - novembre 2016

    "Punchlines" réseaux sociaux - novembre 2016

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    Le concept 'francouille'

    Il n'y a pas de 'Français'. Il y a ce qui n'est pas une nationalité (une 'ethnie') mais plutôt une 'sociothnie' et qui s'appelle les FRANCOUILLES, consistant en les personnes qui baignent dans l'idéologie ou l'aliénation [exemple de cette aliénation francouille en mode "plus ouvrier que moi tu meurs" : http://humaniterouge.alloforum.com/blog-komunouriezh] ''lafRrrrance'' où qu'elles se trouvent sur le territoire hexagonal - mais particulièrement concentrées dans les zones les plus blanches (le choix de la couleur est sans doute un hasard lol) sur cette carte, ce qu'on appellera les "métropoles dans l'mouv" : http://ekladata.com/7BIxTBpdTv9J60kmiUW-oFMjJDY.jpg

    Et l'on peut dire dans un sens que ce qui définit les non-Blancs c'est l'impossibilité de devenir pleinement de tels 'francouilles', ou du moins la possibilité au prix de beaucoup plus d'efforts et pour être moins bien 'payés' à l'arrivée que nous les Blancs (qui le sommes hélas devenus en très grande majorité, en catégorie 'aliénés' du moins).

    [Lire aussi : les-francais-selon-nous-ne-sont-pas-les-gens-du-bassin-parisien-a146645518]

    Voilà donc la 'sociothnie' dont nous refusons de voir se reproduire la prééminence dans une ''organisation révolutionnaire de la classouvrière de Frrrance'' (prééminence de Paris sur la 'province', des 'métropoles dans l'mouv' sur les périphéries reléguées, et bien sûr des Blancs sur les non-Blancs) ; reproduction automatique et inévitable dans un tel schéma [auquel j'assume, aujourd'hui, préférer un schéma de "Grand Front révolutionnaire coordonné" avec à la fois cette dimension d'"internationalisme domestique" incontournable (une "piste de modèle" à ce sujet pouvant être la Rainbow Coalition du BPP - Fred Hampton - aux États-Unis à la fin des années 1960) et, aussi, une dimension de pluralisme politique révolutionnaire car si l'on attend que tout le monde soit d'accord sur les moindres détails d'un programme politique et d'une idéologie (maoïste par exemple en ce qui nous concerne), le risque réel est d'attendre beaucoup trop longtemps : l'Hexagone et le monde auront plongé dans la pire barbarie fasciste bien avant... Si nous CROYONS en notre idéologie maoïste, si nous pensons vraiment qu'elle est la meilleure pour répondre à l'ordre du jour mondial d'abattre le capitalisme et d'instaurer le socialisme menant l'humanité au communisme, alors de quoi avons-nous peur ? Quel souci y a-t-il à assumer le pluralisme dans le travail révolutionnaire, puisque nos conceptions devraient naturellement s'imposer d'elles-mêmes, influencer de plus en plus de gens etc. etc. ?].

    Et voilà ce que je viens de répondre à la 578ème proposition de construire un tel ''grand Parti de la classouvrière'' à m'avoir été adressée dernièrement....

    http://servirlepeupleservirlepeuple.eklablog.com/petite-ref…

    [Révision de ce concept de "sociothnie francouille" (juin 2019) :

    "La France" n'est certes pas une nation au sens scientifique marxiste du terme (Lénine-Staline, Kaypakkaya etc.). Elle est un État (pseudo-"nation") qui dans ses vastes frontières en comprend (au sens scientifique) plusieurs (sans même parler de l'outre-mer) : Bretagne, Corse, Savoie, Alsace, "Grande" Occitanie avec ses "petites nations" provençale, gasconne, auvergnate etc., Pays Basque... À la rigueur peut-on parler d'une "Nation française" réelle dans un certain Bassin parisien, aux contours mal définis (faut-il y inclure les Ch'tis annexés plus tard que les Antilles ? la Lorraine de langue d'oïl, annexée 3 ans avant la Corse ? la Bourgogne, ou encore la Normandie qui ont des identités tout de même bien marquées ?).

    Ce qu'est "la France", c'est le cadre géographique d'un PROJET POLITIQUE.

    "La France" c'est, sur un territoire géographique défini, celui de l'Hexagone :

    - Un "pacte", une union de BOURGEOISIES sous la conduite (sans équivoque) de celle de Paris ; dans un projet politique capitaliste et impérialiste.

    - Un ensemble de PEUPLES dans le "même bateau" depuis des siècles ; et qui dans ce cadre étatique commun, face à un ennemi commun (pouvoir central réactionnaire et/ou envahisseur), peuvent éventuellement s'engager dans un combat émancipateur commun : 1789 (et années suivantes), 1848, 1870-71, le Front populaire et la Résistance-Libération, Mai 68 et les années suivantes, etc. ; "Ma France" de Jean Ferrat, quoi.

    La "Nation française" peut donc ici (et seulement) prendre forme dans un sens renanien, comme il peut y avoir une "Nation suisse" qui compte en réalité 4 nationalités réelles (romande arpitane, alémanique, tessinoise et rhéto-romanche) ; mais pas dans un sens scientifique marxiste et léniniste.

    Ces deux aspects ont été en contradiction apparente dès les évènements politiques des années 1790.

    Dans le second aspect, elle peut demeurer encore aujourd'hui un signifiant positif ; et amener à prendre avec recul, par exemple, les marées de drapeaux tricolores du mouvement des Gilets Jaunes (à partir de novembre 2018, encore en cours en juin 2019) ; dans le cadre duquel ceux-ci ne sont pas à voir uniquement comme une marque d'aliénation (d'"arrimage" à la bourgeoisie) mais aussi dans leur signification révolutionnaire ("refaire 1789", "couper la tête au roi Jupiter-Macron"...), sachant que (aussi) les drapeaux "régionaux" y fleurissent comme dans aucun autre mouvement social : tel est, peut-être, le "prix à payer" pour un mouvement (finalement) beaucoup moins isolé au sein de la population hexagonale que celui de Mai 68.

    En somme : avant 1789, "la France" était une pure addition de "colonies" parisiennes sous l'autorité de la Couronne ; et depuis, elle est en quelque sorte une contradiction permanente entre 1/ la continuation de cet Empire parisien sous la forme d'un État bourgeois, technocratie au service du Grand Capital, et 2/ une nation renanienne dont l'idéal-ciment... est précisément la lutte commune, "tous dans le même bateau", contre cet État bourgeois technocratique continuateur de la monarchie ; symbolique qu'il faut savoir saisir dans les drapeaux bleus-blancs-rouges "1789iens" des Gilets Jaunes.

    Le souverainisme, le vote populiste-BBR pour le Front National ou (au mieux) Mélenchon, est quelque chose qui part de ce patriotisme populaire "français" du deuxième aspect, de ses aspirations à la fois sociales et d'"économie morale" ("la gauche radicale n’arrive pas à rompre avec son matérialisme froid qui l’empêche de comprendre le besoin d’histoire, d’identité, de spiritualité et de dignité des classes populaires blanches ; une dignité qui ne soit pas seulement la dignité de consommer. Les prolos français qui ont voté pour Sarkozy ou Le Pen n’attendent pas seulement d’eux qu’ils augmentent leurs salaires : ils votent pour des « valeurs », quoi qu’on puisse penser de ces valeurs ; et à des valeurs on n’oppose pas 1500 euros mais d’autres valeurs, on oppose de la politique et de la culture. La question de la dignité est une porte d’entrée trop négligée. Cette dignité bafouée a su trouver auprès de ceux qu’on appelle les « petits blancs » en France ou encore les « white trash » aux États-Unis une voix souterraine pour s’exprimer, c’est l’identité. L'identité comme revers vicieux de la dignité blanche, et qui sous cette forme n’a trouvé comme traduction politique que le vote FN, puisque ces petits blancs sont « trop pauvres pour intéresser la droite, trop blancs pour intéresser la gauche » pour reprendre la formule d’Aymeric Patricot" (...) "Ce mépris n’est pas seulement un mythe entretenu par l’extrême-droite. Il est au cœur de la dévitalisation d'une gauche satisfaite d’elle-même qui donnant d’une main des leçons d’antiracisme moral aux petits blancs, apprenait de l’autre l’intégration républicaine aux immigrés", avec pour résultat "à ces deux extrémités, deux camps qui se regardent en chien de faïence, et une expérience commune : la négation de dignité" - H. Bouteldja; d'une soif (en définitive) de POUVOIR des masses ; pour tomber dans les griffes du premier aspect, ou du moins, de la fraction la plus "seule contre tous" de ce "pacte" bourgeois tricolore.

    Lire aussi : http://servirlepeuple.eklablog.com/feu-sur-les-jacobinards-ou-plutot-les-bonapartistes-de-gauche-et-autre-a156409988]


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  • La Belgique est née historiquement des Pays-Bas espagnols (puis autrichiens au 18e siècle) qui étaient les provinces des "Pays-Bas" (tout le Benelux actuel à la base) majoritairement catholiques et ayant fini par rester sous la coupe de l'Espagne ; alors que les provinces protestantes avaient fait sécession pour devenir les Provinces-Unies qui sont aujourd'hui les... Pays-Bas (ou "Hollande", qui n'est en fait que l'une de ces provinces).

    C'était le pays du roi-empereur Charles Quint, et celui qu'il a fait principalement profiter (et non la péninsule ibérique, d'où le problème historique de celle-ci) du pillage des Amériques. D'ailleurs peut-être qu'en plus des considérations catholiques, on peut imaginer que ces provinces aient voulu rester "espagnoles" pour continuer à bénéficier tranquilou des ressources de l'Empire colonial (alors que les Hollandais, une fois indépendants, devaient s'en reconstruire un).

    Elle a également toujours été inclue dans les visées expansionnistes françaises des "frontières naturelles" (qui visaient à aller jusqu'au Rhin), tous les rois de l'Ancien Régime cherchant à la conquérir et la révolution bourgeoise l'annexant finalement de 1793 à 1815 – ces prétentions n'ont pas encore totalement cessé aujourd'hui puisque... Mélenchon himself les agite encore, au sujet de la Wallonie du moins. Sans compter les visées de la Prusse (puis de l'Allemagne unifiée) en vertu de sa "germanité" historique (appartenance au Saint Empire).

    Le problème étant que l'Angleterre n'a jamais pu tolérer de telles prétentions à l'annexion par une grande puissance, les côtes flamandes permettant de lancer directement une flotte sur Londres...

    C'est pourquoi, après avoir été rattachée aux anciennes Provinces-Unies en 1815 pour former les "Pays-Bas" (c'est comme cela que la "Hollande" a finalement gardé ce nom), lorsqu'elle se soulève contre ce rattachement en 1830 sur une base catholique et (surtout) francophone (langue de la bourgeoisie bruxelloise, wallonne et aussi des centres urbains de Flandre, les Flamands flamingants du petit peuple n'étant peut-être pas si enthousiastes que cela à se "libérer" de leurs cousins hollandais), une conférence internationale est organisée pour faire finalement (donc) des anciens "Pays-Bas espagnols" le Royaume de Belgique, ayant vocation à être un État neutre, Paris et Berlin cédant à Londres sur ce point en échange du fait que la bourgeoisie dominante soit francophone et francophile, et le roi un aristocrate allemand.

    [En réalité, et cela semble notamment transparaître dans ce passage sur Wikipédia par exemple, la Révolution indépendantiste belge du 25 août 1830 pourrait bien avoir été... l'une des premières "révolutions colorées" de l'histoire ; pilotée (le plus probablement) par la France de Louis-Philippe tout juste intrônisé quelques semaines plus tôt, dans un but d'annexion ou de "protectoralisation" puisque c'est dans un premier temps le duc de Nemours (deuxième fils de celui-ci) qui est envisagé comme souverain ; le sinistre Talleyrand (revenu en grâce à la faveur des Trois Glorieuses) évoquant quant à lui clairement un rattachement de la majeure partie du pays en laissant Liège à la Prusse et la Flandre jusqu'à Anvers à l'Angleterre ; mais cette dernière (surtout) s'interposera et fera capoter le plan, imposant le principe d'un État neutre et d'un monarque germanique.]

    La Flandre fait bien sûr partie du nouvel État, puisqu'elle consiste en la côte qu'il s'agit de neutraliser. Mais la réalité est que l’État abrite bel et bien deux nationalités, wallonne et flamande, avec une capitale Bruxelles historiquement flamande mais dont la bourgeoisie est francophone et francophile, et qui sera francophonisée au fil du temps (les arrivants wallons étant quant à eux de langue romane d'oïl, et les immigrés étrangers se voyant imposer le français, seule langue officielle jusqu'aux années 1950)... Ceci donnant le fameux accent connu comme "l'accent belge", mais que les francophones non-bruxellois n'ont pas (ou peu).

    À cette époque, donc, la "bonne société" parle le français académique qui est la seule langue officielle de l’État, et le moteur économique est plutôt la Wallonie (où les ouvriers parlent wallon ou "français populaire" local). La Flandre est paysanne (ou de vieille industrie textile), pauvre, conservatrice... et méprisée. Elle revendique bien sûr contre cette situation, mais plutôt sur une base conservatrice et de droite, voire fasciste dans les années 1930.

    Ensuite de quoi, dans la seconde moitié du 20e siècle, la situation s'inverse et c'est la Flandre qui devient nettement plus riche, à l'image des Pays-Bas voisins, tandis que la Wallonie connaît le même déclin que le ch'Nord ou la Lorraine – le nationalisme flamand reste donc de droite, mais cette fois avec des "raisons" matérielles de l'être ; tandis que la Wallonie est contrôlée par le PS et que la bourgeoisie francophone bruxelloise reste au Parti libéral comme elle l'a toujours été (c'est devenu le MR, actuellement au pouvoir).

    Ce sont aussi surtout des Flamands qui sont allés jouer les petits soldats dans les colonies (Congo etc.), tandis que les Wallons étaient affairés dans leurs mines et leurs usines, et ils n'en sont bien sûr pas rentrés avec un esprit hyper progressiste et antiraciste...

    Globalement on peut dire qu'aujourd'hui il y a deux nationalités, flamande et wallonne, au Nord et au Sud, représentant chacune un tiers de la population, auxquelles s'ajoute un dernier tiers de communautés issues de l'immigration (principalement sud- et est- ou alors extra-européenne) qui résident principalement en Wallonie et dans le Grand Bruxelles, bien qu'également dans les grandes villes flamandes (comme Anvers), et qui tendent plutôt à adopter le français que le flamand dans leurs échanges externes ; ainsi qu'environ 70.000 "germanophones" parlant des dialectes franciques (comme au Luxembourg), dans quelques cantons de l'Est annexés sur l'Allemagne à l'issue de la Première Guerre mondiale.

    Voilà pour le panorama actuel et le "bref" rappel historique ; vu qu'il n'est jamais possible de faire vraiment "bref" en la matière, et certainement pas de torcher en une phrase 5 siècles d'histoire pour déboucher sur un tableau idyllique absolument à des années-lumière de la réalité et des problèmes LOURDS de cet État (qui sont de notoriété publique), une espèce de "société idéale" qui serait aujourd'hui "ignoblement agressée par la barbarie mahométane" [référence ici à une shitstorm du ridicule 'centre' 'mlm' de Belgique (misérable appendice bruxellois du 'p''c''mlm' d'ici et ayant adopté ses délires sur les 'romans nationaux'), auquel ce texte faisait partie initialement d'une réponse : facebook servir.lepeuple posts]...

    EN RÉSUMÉ DONC, qu'est-ce que l’État belge, de qui la Belgique est-elle l’État ?

    En dernière analyse, la Belgique est l’État de la bourgeoisie bruxelloise-brabançonne, autrement dit d'une bourgeoisie flamande parlant le français académique parce que c'était la langue "classe" à l'époque (étant également celle - évidemment - de la bourgeoisie de Wallonie, mais aussi de la "bonne société" de Flandre) ; exploitant-opprimant à la fois la paysannerie flamande ("flouée", en un sens, par sa propre bourgeoisie) qui n'avait alors même pas droit, devant la justice, à un procès dans une langue qu'elle comprenait (la plupart des dernières exécutions capitales au 19e siècle auront lieu dans ces conditions, avant que le roi ne décide d'accorder une grâce systématique à partir de 1867), ET la classe ouvrière wallonne dont la misère à cette époque était si effroyable qu'elle alimentait une considérable émigration vers le Nord voisin de l’État français, pourtant pas connu pour sa vie de palace non plus (les patrons les y appelaient fréquemment pour remplacer les mineurs en grève...) – on attribuera à ces populations le sobriquet de "Borins" ou "Borains", de boren = creuser, un peu comme les Lyonnais avaient coutume de surnommer les Stéphanois "lapins".

    Cela a donc effectivement été une erreur, pour les deux mouvements qui ont émergé à partir de la fin du 19e siècle (mouvement flamand généralement droitier, conservateur, et mouvement wallon au contraire plutôt syndicaliste et socialiste, avec le fameux renardisme 1 - 2 né de la Question royale de 1945-51 et de la grande grève insurrectionnelle de l'hiver 1960-61), de voir l'"ennemi" en l'autre population de l’État alors que cet ennemi commun aux deux Peuples travailleurs nationaux est celui que nous venons de voir : une bourgeoisie brabançonne (donc flamande) ayant adopté le français comme langue de distinction sociale (et francophonisé petit à petit, dès l'époque autrichienne en fait, sa capitale fr.wikipedia.org/wiki/Francisation_de_Bruxelles) ; exploité férocement la classe ouvrière principalement wallonne (en dehors des quelques grandes villes de Flandre et du port international d'Anvers) pour faire dans la seconde moitié du 19e siècle de la production industrielle et minière belge la première au monde par rapport au nombre d'habitants ; et marginalisé sa propre population flamande non-francophone tout en s'appuyant sur son conservatisme pour en faire une masse de manœuvre réactionnaire contre les luttes ouvrières, ou encore dans la colonisation sanguinaire du Congo (la paysannerie wallophone ardennaise aussi, dans une moindre mesure : la province sera après 1945 la seule en Wallonie à soutenir le roi Léopold III, autrement dit l'ordre établi, contre les appels à la république lancés par les socialistes et les communistes).

    En résumant à l'extrême, on pourrait donc parler d'oppression de la Wallonie ouvrière par une bourgeoisie FLAMANDE mais de langue française, et coupée de (et opprimant aussi) son propre Peuple flamand principalement paysan.

    [Sachant que bon, aujourd'hui même tout ça c'est largement du passé : l'ennemi commun des travailleurs wallons ET flamands ET de Bruxelles devenue une véritable ville-monde populaire au 100 langues (au moins), c'est la dictature mondiale "intégrée" des monopoles financiers qui tend d'ailleurs de plus en plus à faire du pays, et en particulier des beaux quartiers de sa capitale une ville-monde... grande bourgeoise, attractive par sa fiscalité avantageuse, siège par ailleurs des institutions technocratiques de l'UE etc. etc.]

    Par la suite bien sûr, comme nous le savons tous, un peu comme au Canada avec la disparition de l'oppression nationale québecoise dans la "Révolution tranquille" (parallèlement à la transformation du dominion britannique en pays impérialiste pleinement indépendant), il y a eu entre les années 1950 et 1990 de grandes évolutions (peut-être la plus importante restructuration intérieure d'un État européen à l'époque contemporaine) et il n'existe plus aujourd'hui à proprement parler d'oppression nationale de la Flandre, devenue au contraire la région économiquement dynamique (en partie du fait d'une réorientation vers elle, après guerre, des investissements de la bourgeoisie bruxelloise centrale ainsi que des investisseurs étrangers... notamment anglo-saxons, pour faire contrepoids à la bourgeoisie francophone et francophile ainsi que bien sûr, dans le contexte de la Guerre froide, à un mouvement socialo-communiste surtout fort en Wallonie ouvrière) ; ni même réellement de la Wallonie d'ailleurs, en dehors de son oppression économique de région industrielle en déliquescence (comme la Lorraine ou le Nord Pas-de-Calais).

    À cela s'est par ailleurs ajoutée, à partir des années 1960, l'immigration extra-européenne qui représente désormais (par exemple) un bon 40% de la population de Bruxelles-Capitale ; constituant (donc) des colonies intérieures dans le pays et contribuant, en utilisant le français comme lingua franca, à la francophonisation de celui-ci (notamment dans le Brabant flamand autour de Bruxelles, faisant partie de son aire urbaine) ; la revendication flamande, axée sur la "frontière linguistique", n'en prenant évidemment qu'un tour encore plus réactionnaire et xénophobe.

    Il ne sera sans doute pas utile de revenir ici sur les discours au sujet de ces communes des 19 que compte l'agglomération bruxelloise, comme Molenbeek, qui ne seraient "plus l'Europe" ; puisqu'on les trouve (ces discours) y compris sur des sites prétendument "maoïstes"...

    Conséquence logique, comme ailleurs, de la politique impérialiste et coloniale (même si elle n'a colonisé directement que le Congo, ainsi que le Rwanda et le Burundi après 1918, la Belgique a largement profité de la colonisation européenne et ce dès le 16e siècle...) ; et autre baril de poudre sur lequel sont donc désormais assis nos bourgeois flamands adeptes de la langue de Molière (et les exilés fiscaux de toute l'Europe qui les ont rejoints, faisant de Bruxelles l'une des toutes premières places financières capitalistes du continent).

    L'oppression de part et d'autre de la frontière linguistique est donc aujourd'hui une oppression DE CLASSE des travailleurs flamands et wallons, et une oppression nationale des masses populaires d'origine extra-européenne (et dans une moindre mesure des travailleurs non-nationaux originaires du Sud et de l'Est du continent), par 1°/ une désormais puissante bourgeoisie flamande en tant que telle, néerlandophone et usant de cette revendication linguistique pour "souder" les masses populaires à ses intérêts, 2°/ également une bourgeoisie wallonne, flanquée de tout un caciquat politique de notables PS post-renardistes ou libéraux MR, et 3°/ trônant toujours au milieu de tout cela, l'oligarchie bruxelloise flamande francophone (et polyglotte) rejointe par des grands bourgeois de toute l'Europe et l'Occident dans une sorte de "Monaco du Nord" : c'est cette espèce de "triade" (faite d'unité et de lutte, secouée de contradictions en son sein notamment avec les revendications toujours plus agressives de la bourgeoisie flamande néerlandophone) qui structure l’État actuel et que doivent affronter les travailleurs, exploité.e.s et opprimé.e.s des dizaines de nationalités qui peuplent ses 30.000 km² de territoire.

    Sur cet aspect socio-économique, la carte ci-dessous montre bien comment se configure la Belgique d'aujourd'hui : la pauvreté se concentre essentiellement en Wallonie désindustrialisée, principalement dans la province de Hainaut (= Borinage), ainsi que dans la région de Bruxelles-Capitale (là ce sont très clairement les colonies intérieures non-européennes) à l'exception de quelques communes comme Ixelles qui sont l'équivalent de Neuilly (carte détaillée ici) ; et dans une moindre mesure dans certaines grandes villes de Flandre (Gand, Anvers, Turnhout, Genk etc.) et sur la côte (La Panne, Nieuport, autour du port de Bruges etc.) mais la plus grande partie de la région fédérale a désormais (ce qui n'était pas le cas il y a un siècle !) un taux très faible. De fait, et malgré (pour certains) l'obstacle de la langue, c'est là que vont s'établir les moyens et grands bourgeois pour être "loin sans être loin" de Bruxelles et de sa "faune" molenbeekoise...

    La Flandre (voir ici) avait en 2015 un PIB régional de 37 300 € par habitant, supérieur à toutes les régions de l’État français sauf l'Île-de-France, et Bruxelles-Capitale de 63 300 € soit loin devant celle-ci (54 600 €) tout en ayant dans la plupart de ses 19 communes les taux de pauvreté les plus élevés... La Wallonie, avec 26 400 €, se situant quant à elle au niveau de... la Corse (tirée vers le haut par le Brabant wallon proche de Bruxelles, la plupart des autres provinces se situant au niveau voire au dessous des plus pauvres d'Hexagone que sont la Picardie, le Languedoc-Roussillon ou la Lorraine).

    La carte des revenus moyens des ménages est également très instructive.

    Brèves considérations sur un État contemporain, questions nationales et luttes de classe : la Belgique

    La non-compréhension de cela (lire ici : PC_question_nationale.pdf) est peut-être ce qui a valu au mouvement communiste de l’État belge sa faiblesse historique, entre d'un côté une Wallonie dominée par le socialisme réformiste et de l'autre une Flandre largement conservatrice-réactionnaire (bien qu'ayant aussi engendré le PTB qui connaît à présent un certain succès après sa conversion totale au réformisme...).

    À lire aussi : socialisme-et-question-nationale-notamment-en-belgique-et-wallonie

    Brèves considérations sur un État contemporain, questions nationales et luttes de classe : la Belgique

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