• La classe n'efface pas la race (brève FB de la semaine)


    "La classe n'efface pas la race" : c'est ce que ne cessent de répéter les militants décoloniaux, et que démontre l'évidence de manière récurrente.

    Mais c'est aussi quelque chose que rechignent à admettre beaucoup de camarades, blancs mais aussi racisés, disons "marxistes purs et durs". Essayons donc d'avoir une analyse MATÉRIALISTE de la réalité de cette "distorsion" de la hiérarchie de classe par le paramètre racial, c'est-à-dire, en dernière analyse, le reflet dans les conceptions hégémoniques et tous les rapports sociaux de cette DIVISION INTERNATIONALE DU TRAVAIL qu'est la division entre Blancs et non-Blancs. Vous allez voir, c'est en réalité très simple.

    Qui sont les non-Blancs riches, ou du moins aisés ? Il est possible de dire sans se tromper que 99,99% rentrent dans les 3 catégories suivantes :

    - Des dignitaires ou enfants de dignitaires de leurs propres pays colonisés ou néocoloniaux. En Amérique latine, déjà, ce sont généralement des Blancs (caste criolla de colons espagnols + d'immigration européenne diverse, séparés de la métropole au 19e siècle) => out du sujet, illes sont "de la maison". Ailleurs, ce sont des indigènes COOPTÉS par l'impérialisme et à son service, des "courroies de transmission" de sa machine. Lorsqu'illes viennent "faire un tour par ici", ou même s'y installer pourquoi pas, pour y dépenser beaucoup d'argent et y payer beaucoup d'impôts, illes sont reçu.e.s avec les égards dûs à leur rang - quitte à privatiser pour elleux des portions de littoral, ou des boutiques entières des Champs Élysées. Mais attention ! Qu'illes ne viennent surtout pas se MÊLER DE NOS AFFAIRES, surtout de POLITIQUE ; nous dire ce qu'on doit faire... ou nous demander des comptes. Illes doivent rester dans leur rôle (de courroies de transmission, de commis, bref SERVILES et obséquieux). C'est l'expérience qu'a pu faire par exemple Rama Yade (fille de dignitaires sénégalais, pourtant engagée plutôt à droite politiquement). Ou n'importe quel dignitaire de n'importe quel pays du Sud global (Algérie par exemple) qui viendrait rappeler à la fRance ses crimes coloniaux, ou pointer du doigt le traitement de ses compatriotes d'origine dans les quartiers... Christiane Taubira représente un croisement de ce cas et de celui d'une personne d'origine modeste qui s'est hissée socialement par ses propres efforts, que nous verrons plus loin (de surcroît elle a longtemps été d'engagement politique anticolonialiste et indépendantiste, elle s'est grandement "rangée" depuis mais est restée un "caillou dans la chaussure" des tenants de la suprématie blanche).

    - Des représentant.e.s d'économies émergentes, comme Mittal ou les Qataris, Asiatiques etc. etc., c'est-à-dire des fortunes bâties peut-être (pas toujours) comme "courroies de transmission", mais qui s'indépendantisent et ne sont pas exactement réductibles à ce rôle (et puis, sans "monter" jusqu'à un tel niveau, des gens qui auraient accédé à une bonne situation dans de telles économies - il y a de plus en plus une "jolie" classe moyenne dans tout un tas de pays d'Afrique, d'Asie, du monde arabe ou d'Amérique latine, bref des "Trois Continents").

    Mais justement... ces "économies émergentes" sont un phénomène ABSOLUMENT INSUPPORTABLE aux yeux de l'Occident, dont elles sont un symbole du déclin !! Ces individus vus comme des concurrents dans la guerre économique, concurrents d'autant plus insupportables qu'ils bousculent "l'ordre des choses" voulant que les décideurs économiques de la planète soient européens ou nord-américains, qu'ils ne sont pas (en somme, là encore) "restés dans leur rôle", ne risquent évidemment pas de bénéficier de représentations dominantes positives. Genre, qu'ils sévissent en Afrique ou en Lorraine, ils vont être présentés comme des "ogres" économiques au point de presque nous laisser croire, le temps d'un instant d'égarement, que nos transnationales tricolores sont des organismes de bienfaisance. Genre.

    Ces deux premières catégories sont (donc) des cas de bourgeois non-blancs "du bled", directement des pays colonisés ou néocoloniaux.

    - Troisième catégorie, les riches ou du moins "petits bourgeois" D'ICI, né.e.s ici.

    Né.e.s ici c'est-à-dire... né.e.s prolos, ou du moins de parents né.e.s tel.le.s. Soyons sérieux deux minutes : connaître l'histoire de l'immigration coloniale en Hexagone, c'est savoir qu'il est impossible de remonter jusqu'aux grands-parents (grand maximum) sans trouver des prolétaires, l'usine ou le chantier, la cité voire le bidonville. C'est le cas de Benzema ou de Rachida Dati, ou de n'importe qui ayant échappé aux filières techniques pour accéder à la fac et, derrière, à un job stable et correctement payé. Là, la situation est celle d'être perpétuellement vu.e comme "illégitime", "intrus", entré.e "par effraction" dans un milieu où l'on n'est pas censé.e être.

    Et ce n'est pas qu'une question d'"évasion" du prolétariat EN SOI, car on ne retrouve pas cette situation chez les enfants ou petits enfants de prolos en général, de prolos immigrés italiens ou portugais en particulier (ou migrants ou pas des "provinces" les plus périphériques de l’État bleu-blanc-rouge), pour qui l'"ascenseur social" reste et demeure un symbole du "modèle républicain"... mais n'est pas "censé" fonctionner pour celleux issu.e.s de l'immigration coloniale ; plus exactement, il DOIT être "en panne" pour celleux-ci afin de pouvoir correctement fonctionner pour les autres (lien de conditionnalité). Bien entendu, à moins d'assumer ouvertement des lois d'apartheid (ce qui la foutrait mal, tout de même...), il n'est pas possible d'empêcher qu'une petite minorité y arrive tout de même ; trouve en quelque sorte... la porte de l'escalier de service, et le monte. Mais une fois arrivé.e.s "en haut", donc, leur sanction sera d'être en permanence renvoyé.e.s à "là d'où illes n'auraient pas dû sortir".

    Il n'est donc tout simplement pas possible de parler de petit.e.s, moyen.ne.s voire grand.e.s bourgeois.es "comme les autres". Il y a un paramètre fondamental de distorsion.

    Il ne s'agit bien sûr pas (je vois venir les procès d'intention, me faire dire ce que je n'ai pas dit) de dire que le racisme est vécu strictement et exactement de la même manière que dans les quartiers populaires ; que l'argent et/ou autre forme de capital (réseaux relationnels etc.) ne protègent pas au moins de ses manifestations les plus violentes dans une plus ou moins large mesure.

    Il ne s'agit pas non plus d'excuser tout ce qui peut être fait EN TANT QUE BOURGEOIS (comme Mittal en Lorraine) ou dignitaires de colonies ou néocolonies. Il ne s'agit pas, puisque certain.e.s ne pourront sans doute pas résister à ce genre de point Godwin, de dire que les dirigeants actuels de la totalité des pays arabes ne sont pas des pourris ou que Sassou-Nguesso n'est pas un satrape fasciste (À CONDITION de ne pas occulter la main impérialiste occidentale - ou russe, parfois - qui tire les ficelles de ces personnages par derrière).

    Mais il s'agit de faire ce simple constat qu'à côté de la division sociale bourgeois/prolétaires dans chaque pays (à commencer, puisqu'elle y est née, par nos pays blancs occidentaux), il y a une division INTERNATIONALE (séculaire) du travail qui subordonne EN PRINCIPE la totalité du monde non-blanc (impérialiste, si vous voulez) à la totalité du monde blanc (colonial et semi-colonial, si vous voulez) ; et qui rend "intolérables" les "évadé.e.s" de ce schéma.


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