• Petite réflexion estivale - sur la nécessité impérieuse de refuser un Parti "français"


    "Toute la supercherie de ta théorie consiste en ce mauvais parallèle historique que tu fais en ce qui concerne la Russie révolutionnaire et la France d'aujourd'hui. Les nombreuses nationalités exploités, opprimées dans leur droits par le tsarisme sont pour toi comparables avec la Bretagne, l'Occitanie et l'Alsace." (extrait d'un mail reçu il y a un bout de temps déjà)


    Eh bien nous dirions même que dans un sens, en "France", C'EST PIRE... L'Empire russe opprimait les nationalités de manière beaucoup plus violente, sanglante, mais n'était pas négateur. C'est justement le concept d'un Empire, où des territoires et des Peuples sont réunis (et opprimés) sous l'égide d'une Couronne, mais sans prétention à constituer un "État-nation" (un peu comme l'Autriche-Hongrie à la même époque... ou le Royaume-Uni et son Commonwealth aujourd'hui !).

    Les Tchétchènes et les Ouzbeks étaient opprimés (par des fonctionnaires russes ou des vendus russifiés locaux), mais personne n'allait leur dire "vous êtes des Russes" (ou alors le phénomène était extrêmement embryonnaire, de même qu'il s'esquissait dans ce qu'il restait de l'Empire ottoman, prélude au turquisme kémaliste qui lui est clairement un clone du "modèle français"). On leur demandait simplement de "respecter" leur "protecteur" qu'était le Tsar...

    L’État français, lui, est fondé depuis 200 ans sur la NÉGATION de sa plurinationalité réelle et sur le discours qu'il n'y a "que des Français en France" (même si pendant un bon bout de temps, il a fallu du boulot et une sacrée répression pour que ça "rentre dans le crâne" d'approximativement 70% de la population d'Hexagone + Corse, et encore aujourd'hui avec les millions de prolétaires issu-e-s de l'"ex" Empire colonial qui forment les "colonies intérieures"). Bien sûr, par "que des Français en France" il faut comprendre "que des bons petits soldats du Capital tricolore sur la base d'accumulation première de celui-ci", mais (et c'est là le formidable tour de passe-passe !) la chose a même réussi à être massivement admise comme "progressiste" et "émancipatrice" par toute une frange de la "gauche" et du mouvement ouvrier...

    Mais bon, tout cela pour dire que c'est ainsi que fonctionne, dans l’État français, l'encagement et l'exploitation-oppression deS PeupleS travailleurS : à coup de "vous n'êtes que des Français, citoyens de la République", et non d'un "devoir de fidélité" envers un souverain.

    C'est la raison pour laquelle un Parti "français" ou "de France" est selon nous une voie erronée, qui conduit à la REPRODUCTION de cette négation au service de la domination politique et économique de la région parisienne - siège du Grand Capital - sur nos territoires et populations périphériques (et de la même manière, du "privilège blanc" sur les racisé-e-s !) ; et donc à impossibiliser l'abolition de l'exploitation du Travail par le Capital elle-même. De manière encore plus certaine que dans l'Empire russe où finalement le principe de réalité, c'est-à-dire de Partis nationaux-réels, s'est imposé assez facilement (encore que sans doute assez imparfaitement, et bien que par la suite l'étiquette "soviétique" ait pu servir à "couvrir" une nouvelle domination russe et même une assez forte russification par endroit) puisque l'évidence de la plurinationalité n'avait jamais été vraiment niée même par l'Empire lui-même. [La question ne s'est jamais réellement posée dans l'Empire austro-hongrois, du fait de son éclatement en un multitude d’États dès 1919 ; en revanche elle a pu le faire fortement et même brutalement au Royaume-Uni, avec les velléités de Parti écossais indépendant et indépendantiste de John MacLean vigoureusement combattues par la direction anglaise du CPGB, ou encore dans l’État espagnol.]

    Une reproduction de cette négation portée par (dans le mouvement communiste/révolutionnaire), et (car) profitant à ce que nous avons affublé du nom de "francouille" ; véritable groupe social bénéficiaire – donc "dominant" – de l'édifice négateur, car il ne s'agit en réalité pas vraiment d'une des nationalités de l'ensemble, mais plutôt de cela :

    "Il n'y a pas de 'Français'. Il y a ce qui n'est pas une nationalité (une 'ethnie') mais plutôt une 'sociothnie' et qui s'appelle les FRANCOUILLES, consistant en les personnes qui baignent dans l'idéologie ou l'aliénation [exemple de cette aliénation francouille en mode "plus ouvrier que moi tu meurs" : humaniterouge-alloforum.com/blog-komunouriezh] 'lafRrrrance' où qu'elles se trouvent sur le territoire hexagonal - mais particulièrement concentrées dans les zones les plus blanches (le choix de la couleur est sans doute un hasard lol) sur cette carte, ce qu'on appellera les 'métropoles dans l'mouv' : FMjJDY.jpg

    Et l'on peut dire dans un sens que ce qui définit les non-Blancs c'est l'impossibilité de devenir pleinement de tels 'francouilles', ou du moins la possibilité au prix de beaucoup plus d'efforts et pour être moins bien 'payés' à l'arrivée que nous les Blancs (qui le sommes hélas devenus en très grande majorité, en catégorie 'aliénés' du moins).

    Voilà donc la 'sociothnie' dont nous refusons de voir se reproduire la prééminence dans une 'organisation révolutionnaire de la classouvrière de Frrrance' (prééminence de Paris sur la 'province', des 'métropoles dans l'mouv' sur les périphéries reléguées, et bien sûr des Blancs sur les non-Blancs) ; reproduction automatique et inévitable dans un tel schéma."

    [Lire aussi : les-francais-selon-nous-ne-sont-pas-les-gens-du-bassin-parisien]

    [Révision de ce concept de "sociothnie francouille" (juin 2019) :

    "La France" n'est certes pas une nation au sens scientifique marxiste du terme (Lénine-Staline, Kaypakkaya etc.). Elle est un État (pseudo-"nation") qui dans ses vastes frontières en comprend (au sens scientifique) plusieurs (sans même parler de l'outre-mer) : Bretagne, Corse, Savoie, Alsace, "Grande" Occitanie avec ses "petites nations" provençale, gasconne, auvergnate etc., Pays Basque... À la rigueur peut-on parler d'une "Nation française" réelle dans un certain Bassin parisien, aux contours mal définis (faut-il y inclure les Ch'tis annexés plus tard que les Antilles ? la Lorraine de langue d'oïl, annexée 3 ans avant la Corse ? la Bourgogne, ou encore la Normandie qui ont des identités tout de même bien marquées ?).

    Ce qu'est "la France", c'est le cadre géographique d'un PROJET POLITIQUE.

    "La France" c'est, sur un territoire géographique défini, celui de l'Hexagone :

    - Un "pacte", une union de BOURGEOISIES sous la conduite (sans équivoque) de celle de Paris ; dans un projet politique capitaliste et impérialiste.

    - Un ensemble de PEUPLES dans le "même bateau" depuis des siècles ; et qui dans ce cadre étatique commun, face à un ennemi commun (pouvoir central réactionnaire et/ou envahisseur), peuvent éventuellement s'engager dans un combat émancipateur commun : 1789 (et années suivantes), 1848, 1870-71, le Front populaire et la Résistance-Libération, Mai 68 et les années suivantes, etc. ; "Ma France" de Jean Ferrat, quoi.

    La "Nation française" peut donc ici (et seulement) prendre forme dans un sens renanien, comme il peut y avoir une "Nation suisse" qui compte en réalité 4 nationalités réelles (romande arpitane, alémanique, tessinoise et rhéto-romanche) ; mais pas dans un sens scientifique marxiste et léniniste.

    Ces deux aspects ont été en contradiction apparente dès les évènements politiques des années 1790.

    Dans le second aspect, elle peut demeurer encore aujourd'hui un signifiant positif ; et amener à prendre avec recul, par exemple, les marées de drapeaux tricolores du mouvement des Gilets Jaunes (à partir de novembre 2018, encore en cours en juin 2019) ; dans le cadre duquel ceux-ci ne sont pas à voir uniquement comme une marque d'aliénation (d'"arrimage" à la bourgeoisie) mais aussi dans leur signification révolutionnaire ("refaire 1789", "couper la tête au roi Jupiter-Macron"...), sachant que (aussi) les drapeaux "régionaux" y fleurissent comme dans aucun autre mouvement social : tel est, peut-être, le "prix à payer" pour un mouvement (finalement) beaucoup moins isolé au sein de la population hexagonale que celui de Mai 68.

    En somme : avant 1789, "la France" était une pure addition de "colonies" parisiennes sous l'autorité de la Couronne ; et depuis, elle est en quelque sorte une contradiction permanente entre 1/ la continuation de cet Empire parisien sous la forme d'un État bourgeois, technocratie au service du Grand Capital, et 2/ une nation renanienne dont l'idéal-ciment... est précisément la lutte commune, "tous dans le même bateau", contre cet État bourgeois technocratique continuateur de la monarchie ; symbolique qu'il faut savoir saisir dans les drapeaux bleus-blancs-rouges "1789iens" des Gilets Jaunes.

    Le souverainisme, le vote populiste-BBR pour le Front National ou (au mieux) Mélenchon, est quelque chose qui part de ce patriotisme populaire "français" du deuxième aspect, de ses aspirations à la fois sociales et d'"économie morale" ("la gauche radicale n’arrive pas à rompre avec son matérialisme froid qui l’empêche de comprendre le besoin d’histoire, d’identité, de spiritualité et de dignité des classes populaires blanches ; une dignité qui ne soit pas seulement la dignité de consommer. Les prolos français qui ont voté pour Sarkozy ou Le Pen n’attendent pas seulement d’eux qu’ils augmentent leurs salaires : ils votent pour des « valeurs », quoi qu’on puisse penser de ces valeurs ; et à des valeurs on n’oppose pas 1500 euros mais d’autres valeurs, on oppose de la politique et de la culture. La question de la dignité est une porte d’entrée trop négligée. Cette dignité bafouée a su trouver auprès de ceux qu’on appelle les « petits blancs » en France ou encore les « white trash » aux États-Unis une voix souterraine pour s’exprimer, c’est l’identité. L'identité comme revers vicieux de la dignité blanche, et qui sous cette forme n’a trouvé comme traduction politique que le vote FN, puisque ces petits blancs sont « trop pauvres pour intéresser la droite, trop blancs pour intéresser la gauche » pour reprendre la formule d’Aymeric Patricot" (...) "Ce mépris n’est pas seulement un mythe entretenu par l’extrême-droite. Il est au cœur de la dévitalisation d'une gauche satisfaite d’elle-même qui donnant d’une main des leçons d’antiracisme moral aux petits blancs, apprenait de l’autre l’intégration républicaine aux immigrés", avec pour résultat "à ces deux extrémités, deux camps qui se regardent en chien de faïence, et une expérience commune : la négation de dignité" - H. Bouteldja; d'une soif (en définitive) de POUVOIR des masses ; pour tomber dans les griffes du premier aspect, ou du moins, de la fraction la plus "seule contre tous" de ce "pacte" bourgeois tricolore.

    Lire aussi : http://servirlepeuple.eklablog.com/feu-sur-les-jacobinards-ou-plutot-les-bonapartistes-de-gauche-et-autre-a156409988]


    C'est la raison pour laquelle il nous faut sérieusement PENSER la manière dont un "commandement" révolutionnaire unifié peut (certes) se mettre en place face à un commandement bourgeois (certes) unifié (l’État), mais SUR LA BASE et uniquement sur la base de mouvements révolutionnaires organisés qui émanent des "Peuples nationaux" réels, sans oublier (encore et toujours) les Peuples "colonisés intérieurs" "issus de l'immigration", de manière autonome/autocentrée et dans la réappropriation d'eux-mêmes (car qu'est-ce que la révolution, en fin de compte, si ce n'est la réappropriation d'eux-mêmes par les travailleurs, les exploité-e-s et les opprimé-e-s de tous les pays).

    Appelons cela "Parti confédéral" ou "fédération de Partis" si l'on veut ; la formule définitive reste à penser collectivement et démocratiquement* ; mais c'est en dernière analyse la seule manière de rompre culturellement et d'en finir avec le "mythe citoyen français" ou encore la "colorblindness" (vis-à-vis des non-Blancs racisés), autrement dit la négation des différences pour mieux maintenir et reproduire les inégalités. Car après tout (sinon) il faudrait peut-être demander un jour, à ceux et celles qui nous opposent cela, pourquoi ils/elles prônent un Parti "du prolétariat" ou "de la classe ouvrière" et non un Parti "des gens", "tous frères humains sauf qu'il serait vraiment temps d'en finir avec l'Argent et la logique du profit qui pourrit la vie à tou-te-s"... Ben oui quoi, c'est quoi ces divisions, ces barrières comme ça entre les gens ?

    Et c'est donc pour ces raisons, après en être arrivés à cette conclusion, qu'il faut désormais oser dire haut et fort notre opposition à tous les "2.0" du grand (et finalement seul et unique) "modèle" du siècle dernier, le PCF avec un grand F ; à toutes ces propositions de nouveau Parti communiste français dont les sections locales "tiendraient compte" (à des degrés divers, selon de la rigidité jacobine de la direction centrale...) des "problématiques, notamment particularistes" de chaque "région". Oser dire clairement aux affirmateurs des réalités nationales (voire carrément aux militant-e-s de luttes de libération) qui "trempent" dans ce genre de chose qu'ils/elles se FOURVOIENT et finiront comme des dindons de la farce (si ce n'est pas comme des traîtres...). Il est impossible (schizophrénique, pour tout dire...) de prétendre défendre les "luttes de libération" et autres "questions nationales" au sein d'une structure FRANÇAISE où toutes les décisions sont prises, tout le "cadre" est fixé à un niveau "central"... français.

    Et si nous restons résolument ouvert-e-s aux militant-e-s sincères et eux/elles-mêmes ouvert-e-s de ce type d'organisations "françaises" ou "de France", nous devons aussi CONTRER impitoyablement les basses manœuvres permanentes de ces directions jacobines qui en préservant LA FRANCE (sous des épaisseurs diverses de maquillage "universaliste", "internationaliste", "y a qu'la classe qui compte" ou "les prolétaires n'ont pas de patrie") préservent le RÂTELIER auquel toute une gigantesque masse petite-bourgeoise et même populaire bouffe ou (du moins) espère (plus ou moins consciemment) bouffer un jour. [Et à ce niveau-là, celles qui avancent masquées sous une "grosse dose" de "tenir compte" et de "soutien" aux "luttes nationales" et décoloniales (mais attention, bien sûr, toujours "bien dans le cadre" d'un projet qui reste un Parti français) ne sont certainement pas les moins dangereuses...]


    * Le PCbUS avait de fait une structure fédérale, de par l'existence d'un Parti communiste pour chacune des Républiques soviétiques fédérées ; toutefois la RSFS de Russie n'avait pas de PC propre, ses communistes étant directement affiliés au Parti "global"... ce qui tendait à signifier que la Russie était en quelque sorte la "norme", la direction "naturelle" de l'Union, et non une simple nationalité parmi les autres (conception s'affirmant - par exemple - en musique dans les paroles de l'hymne soviétique composé en 1943 : "Union indestructible de républiques libres/ réunies pour toujours par la Grande Russie"). Ceci peut être perçu comme un signe annonciateur de l'hégémonisme grand-russe qui (entre autres problématiques) devait corrompre et pourrir de l'intérieur l'expérience socialiste soviétique, tel que le pressentait déjà Lénine peu avant sa mort.

    Plus récent, situé en outre au cœur même de la première puissance impérialiste mondiale, un autre modèle d'"internationalisme domestique" (internationalisme à l'intérieur de et face à un même État capitaliste-impérialiste) qui pourrait nous inspirer serait la Rainbow Coalition (ici en anglais) impulsée par Fred Hampton du Black Panther Party... en imaginant autant de "Young Patriots Organization" ou de "White Panthers" qu'il y a de nationalités "autochtones" réelles dans l’État-"nation" français (refus catégorique de reproduire le centralisme parisien ; refus que les problématiques spécifiques de nos territoires périphérisés et de nos Peuples niés soient simplement "prises en compte" par des organisations hexagonales dirigées depuis le Quartier Latin...). La répression impitoyable déchaînée contre cette coalition par le FBI de J. E. Hoover (programme COINTELPRO) semble devoir suffire à démontrer en tant que telle - a posteriori - la menace ressentie par le système US, non seulement devant le réveil révolutionnaire des minorités raciales pratiquement exclues de l'espèce humaine depuis des siècles mais aussi de voir ce réveil rejoint par des jeunes blancs de classe populaire (et de régions périphériques - Appalaches, Arkansas, Michigan, Nord-Ouest), a priori forgés dans le racisme et le "petit privilège" blanc depuis leur naissance - et non par les habituels fils et filles de bourgeois "libéraux"/"progressistes"... toujours et éternellement aussi paternalistes et "récupérables" à terme.

    Tout ceci sans oublier, bien sûr, les organisations autonomes de genre (femmes, LGBT) pour chacune des composantes de ce vaste mouvement...


    L'on pourra également se procurer et lire ce bouquin de Laurent Lévy (père des adolescentes voilées dont l'"affaire" avait directement conduit à la loi d'apartheid de 2004, et signataire de l'Appel des Indigènes en janvier 2005), "La gauche", les Noirs et les Arabes (chez La Fabrique), et en étendre la logique à nos situations nationalitaires-réelles et périphériques, nonobstant que l'oppression subie soit nettement moins brutale que celle des racisé-e-s, car c'est de manière générale que se pose ce problème d'affirmation de soi (jugée) "intempestive" et "irrationnelle" (cf. la citation en début d'article, ou encore - du même gugusse - "j'imagine le mur auquel tu vas te heurter si tu tente de faire la propagande parmi les ouvriers d'un Parti qui reviendrait à leurs yeux à la création d'un Parti régional"...), voire "manipulée" (non pas, pour le coup, par des "intégristes musulmans" mais peut-être par des "fascistes identitaires"...), et invitée "au mieux" à "se placer sous le parapluie protecteur de la gauche" (ou de l'extrême-gauche, du "Grand Parti" - comme on l'a vu ici - FRANÇAIS et "tenant compte" de nos problématiques).

    De même qu'un Blanc ne peut le faire vis-à-vis de non-Blancs victimes d'un racisme structurel et d'un "indigénat métropolitain" qu'il ne subit pas, ou un homme cishétéro vis-à-vis de femmes ou de LGBTQI, en quoi des gens de Paris, d'Angers, de Lyon ou même de Bretagne ou d'Alsace seraient-ils fondés à décider de ce qui est "intempestif" et "irrationnel" ou pas au bord de la Méditerranée ou aux pieds des Pyrénées ? Voilà, on-ne-peut mieux expliqué, ce qui ne MARCHE PAS en Hexagone depuis des générations et des générations ; et dont la cause est peut-être effectivement à chercher du côté de cette culture dominante "étatiste et élitiste (d'une) République réelle également héritière d’une histoire coloniale (et jacobine-francisatrice !) qui détermine nombre de ses pratiques et des représentations qu’elle contribue à reproduire"...

    ******************************************************

    ENFIN BREF, tout cela pour dire que, les gens semblant par nature durs de la comprenette dans les milieux gauchistes, il est aussi possible de formuler les choses en des termes simples : ce que nous voulons, en lieu et place de l’État bourgeois français tel qu'il est, c'est une Union soviétique (telle que conçue par Lénine au début des années 1920) d'Hexagone... Point.

    D'Hexagone, ou pourquoi pas d'Europe ; en tout cas, des parties de l'Europe qui seraient dans un premier temps libérées du capitalisme par la révolution ; bref – ce genre de question se posera directement en son temps dans la réalité de la lutte, nous n'en sommes pas là.

    Tout simplement parce que le renversement du capitalisme DEVRA signifier, ne PEUT PAS signifier autre chose, que soit brisée l'organisation politico-économique des territoires en Centres financiers d'accumulation capitaliste et Périphéries plus ou moins, mais toujours, reléguées et "pompées" (lire à ce sujet : reflexions-a-partir-de-samir-amin - bouamama-basques-algeriens-colonisation-int-ext) ; organisation intrinsèque à la Modernité capitaliste et qui de fait, aussi longtemps qu'existent ces "hiérarchies géographiques" entre pays, régions d'un pays, etc., "bloque" en réalité tout déploiement d'une lutte des classes "pure", possédants vs exploités.

    Par conséquent, la voie de la raison matérialiste dans la situation concrète de notre époque, c'est d'aller vers... ce qu'était l'URSS (dans sa conception initiale léniniste) : de grands "États-continents" confédéraux, multiculturels, multilinguistiques et inclusifs (en plus, bien sûr, d'être résolument anticapitalistes).

    Car lorsque l'on critique le "tribalisme" des Catalans, Basques, Bretons, Corses ou autres, et cela peut parfois avoir sa part de vérité, l'on a tout de même tendance à oublier, en tout premier lieu, que les États européens existants ne sont ni plus ni moins que des "tribalismes qui ont réussi" : des régions qui en ont conquis d'autres, pour finir par proclamer ces ensembles de conquêtes des "États-nations", lancés à leur tour dans des affrontements "tribaux" avec les ensembles voisins ; tout cela sous un modèle centraliste uniculturel, unilinguistique et exclusif.

    Quant aux grands États-continents capitalistes qui existent déjà, comme les États-Unis ou le Canada, la Russie ou l'Inde, certes ils sont officiellement fédéraux, seul moyen pour eux de s'assurer une certaine stabilité et de n'avoir pas déjà explosé ; mais ce fédéralisme n'en reste pas moins très largement factice, "cache-sexe" d'une domination féroce sur tout un ensemble de groupes humains (Noirs, Latinos et Nations indigènes en Amérique du Nord, Caucasiens, Peuples sibériens et autres non-russes en Russie, Kashmiris, Tamouls, Adivasis "tribaux" et autres non-hindoustanis, musulmans et basses castes en Inde) ; tandis que de son côté l'Union Européenne est une tentative, précisément pour faire face à ces puissances concurrentes, de bâtir un tel super-État continental bourgeois et technocratique autour et au service des "pôles" de Paris et de la vallée du Rhin (Ouest de l'Allemagne, Bénélux), dominant et écrasant le reste comme l'avait fait auparavant chaque État membre avec ses "provinces" (rendant certes cocasse lorsque les "souverainistes" desdits États se plaignent de cette domination...) : il va de soi, bien entendu, que ces "modèles"-là d’États-"continents" ne sont pas les nôtres et sont au contraire résolument à combattre et détruire.

    Voilà donc : à partir de là, ce programme qui est le nôtre, vous pouvez le vomir ; mais au moins saurez-vous clairement sur quoi se déversent vos vomissures...

    "Il faut rappeler aujourd'hui que ce passage [d'une adresse de 1850 à la Ligue des Communistes, qui défendait le centralisme étatique le plus rigoureux] repose sur un malentendu.

    À ce moment-là il était admis – grâce aux faussaires libéraux et bonapartistes de l'histoire – que la machine administrative centralisée française avait été introduite par la Grande Révolution et maniée notamment par la Convention comme une arme indispensable et décisive pour vaincre la réaction royaliste et fédéraliste et l'ennemi extérieur.

    Mais c'est actuellement un fait connu que pendant toute la Révolution, jusqu'au 18 Brumaire*, l'administration totale du département, de l'arrondissement et des communes se composait d'autorités élues par les administrés eux-mêmes qui, dans le cadre des lois générales de l’État, jouissaient d'une liberté complète ; que cette administration autonome provinciale et locale, semblable à ce qui se passe en Amérique (bon là, claire idéalisation des États-Unis avec oubli de la question coloniale-raciale, mais bref), devint précisément le levier le plus puissant de la révolution ; et cela à un point tel que Napoléon immédiatement après son coup d’État du 18 Brumaire, s'empressa de la remplacer par le régime préfectoral encore en vigueur de nos jours et qui fut donc, dès le début, un instrument de réaction**".

    F. Engels dans une note sous le texte réédité, 1885

    [* En réalité Thermidor, voire sa "préparation" dès 1793 par les "représentants en mission" (dont la plupart sont restés de triste mémoire) et la loi du 14 frimaire an II à l'initiative principalement des futurs thermidoriens Billaud-Varenne et Barère, tandis que sur le plan linguistique était promulgué une semaine avant le coup d’État réactionnaire, à l'initiative nullement "de Robespierre" mais de Merlin de Douai (futur thermidorien qui mourra tranquillement en 1838 après avoir été "entre autres" Président du Directoire puis comte d'Empire...), le décret du 2 thermidor an II sur des arguments complètement hallucinants.]

    [** En réalité et pour être exact, c'est dès le Directoire que des "commissaires du gouvernement" dans chaque département préfigurent les préfets napoléoniens.]

    [Si on lit par exemple ce document : décentralisation-nord-1789-1793 ; il apparaît nettement que c'est décembre 1793 (frimaire an II) qui marque un point de rupture fondamental : l'écrasement (pas d'autre mot) de la "révolution provinciale", auquel ne manquera plus alors que celui de la révolution parisienne, consommé avec Thermidor... Les procureurs syndics départementaux, magistrats élus chargés de veiller à l'exécution des lois (sortes d'équivalents des sheriffs nord-américains), deviennent des fonctionnaires nommés ; les conseils généraux sont supprimés et les directoires (exécutifs des départements) voient leurs compétences sévèrement amputées ; etc. etc. La France républicaine abandonne alors définitivement la voie de devenir une "grande Suisse" démocratique et décentralisée, d'exercice local permanent de la souveraineté populaire...]

    Et LÉNINE dans L'État et la Révolution (1917) reprend d'ailleurs ces mêmes propos (légèrement déformés ou propos similaires tenus ailleurs) :

    Feu sur les jacobinards ou plutôt les bonapartistes "de gauche" et autres néo-thermidoriens à la Barère

    Feu sur les jacobinards ou plutôt les bonapartistes "de gauche" et autres néo-thermidoriens à la Barère


    Petite réflexion estivale (sur la nécessité impérieuse de refuser un Parti "français")

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