• Lire la première partie


    Voici maintenant un autre texte très intéressant, issu quant à lui de la revue marxiste basque Sugarra :

    Euskal Herria : Situation actuelle et perspectives (25 août 2011)

    http://herridemokrazia.blogspot.fr/2011/11/euskal-herria-situacion-actual-y.html

    Euskal Herria 500Les élections municipales et forales [provinciales] du 22 mai dernier ont permis, une nouvelle fois, de montrer la capacité de récupération du mouvement populaire basque après la campagne d'encerclement et annihilation menée, sous prétexte de "lutte contre le terrorisme", par l’État espagnol contre les secteurs les plus dynamiques et combattifs de notre peuple ces 10 dernières années.  

    La coalition Bildu, formée par EA, Alternatiba et des indépendants proches de la Gauche abertzale, a reçu l'appui électorale de près de 315.000 personnes en Hegoalde [Pays Basque du Sud, "espagnol"], devenant la deuxième force politique de la Communauté autonome basque. Près de 1.200 mandats électifs (1.138 municipaux et 52 au niveau des provinces) ont permis à la coalition de s'emparer d'une centaine de municipalités, parmi lesquelles celle de Donostia ["Saint-Sébastien"], et de la députation [équivalent du conseil général] du Gipuzkoa [dont Donostia est la capitale]. Évidemment, il s'agit d'un pas important mais qui ne doit pas susciter de fausses illusions.

    Il est certain que la nouvelle situation politique créée par le cessez-le-feu d'ETA et la légalisation de Bildu a permis d'initier un processus de large accumulation de forces abertzales et démocratiques, ce qui semblait jusqu'à présent impensable. D'après les dernières enquêtes réalisées par Euskobarómetro: Le différentiel de 150.000 à 170.000 suffrages gagné par Bildu par rapport au vote nul de 2009 (environ 40 % de son score actuel) provient de sa propre abstention antérieure (23 %), de voix prises au PNV (8 %), d'EA (6 %), de nouveaux votants (6 %), d'Aralar (5 %) et d'EB (4 %).” [Euskobarómetro mai 2011. UPV-EHU. Page 36].

    Il faut aussi prendre en compte la répercussion qu'ont pu avoir ces élections en Iparralde [Pays Basque du Nord, "français"] où, le 8 juillet dernier, un groupe de 40 élus (maires et conseillers municipaux), membre de différents partis politiques ou indépendants, a lancé un appel (manifeste “Bil Gaiten”) en faveur de l'unité des abertzales de gauche, pour mener un projet commun inspiré des expériences EH-Bai et Bildu, ce qui ouvre de nouvelles perspectives politiques en Ipar Euskal Herria [EH du Nord].

    Mais il n'en reste pas moins certain que la lutte au sein des institutions n'est qu'une part, et pas la plus fondamentale, de la lutte pour l'indépendance est le socialisme. Pour cette raison, la proposition de Bildu au PNV pour former une alliance électorale dans le perspective des prochaines législatives générales ["espagnoles"] du 20 novembre nous semble un peu précipitée, au regard du caractère inconséquent, timide et hésitant du PNV (due à la position contradictoire de la classe dont il défend les intérêts : une fraction de la bourgeoisie moyenne basque) [voir là encore la note 2 ci-dessous]. Ceci pourrait être le signe d'une tendance à l'électoralisme de Bildu, à moins que le but de sa proposition ait été précisément de mettre en évidence les hésitations du PNV et de tenter d'aiguiser les contradictions internes qui existent à la base de ce parti.

    1901116 713418255377502 836621131 nDans tous les cas, la légalisation de Bildu et sa participation aux élections municipales et forales du 22 mai ont permis une véritable bouffée d'oxygène pour la Gauche abertzale, et lui ont permis de récupérer de larges secteurs de sa base sociale qui courraient le danger de se dissocier ou diluer petit à petit, comme le recherchait précisément l’État espagnol. Des secteurs qui, par leur extraction sociale, font partie du Peuple travailleur basque ; et que les communistes ont intérêt à voir maintenir leur unité dans une perspective stratégique. Telle a été la principale raison pour laquelle, aux dernières élections, nous avons choisi d'appuyer tactiquement Bildu, appelant à voter pour cette coalition.

    Sur la nature de Bildu 

    Quoi qu'il en soit, nous sommes conscients à SUGARRA qu'une coalition électorale, pour autant qu'on la présente comme stratégique et comme un tremplin vers l'avenir, n'est pas pas la même chose qu'une accumulation de forces populaires luttant pour l'autodétermination et l'indépendance, ni (encore moins) qu'une union de forces révolutionnaires pour prendre le pouvoir. Si la première ne requiert que des accords “au sommet” entre les  directions des différents partis signataires, ce qui lui donne une moindre consistance et un caractère plus conjoncturel et temporaire (malgré l'importance tactique qu'elle peut avoir) ; la seconde et la troisième requièrent le développement de toute une structure commune dans les quartiers et les villages, créant une série d'organismes unitaires servant à forger l'unité populaire et/ou révolutionnaire depuis la base.

    D'autre part, nous sommes également conscients qu'aucune des organisations ou courants formant actuellement Bildu n'ont un caractère socialiste révolutionnaire, mais qu'au contraire leur orientation s'inscrit dans ce que nous pouvons qualifier de social-démocratie, tandis que par la composition sociale (interclassiste) de elur électorat et par la position de classe que dénote leur programme, elles n'ont pas un caractère prolétarien. Ce qui fait que, n'ayant pas non plus un caractère à proprement parler bourgeois, on ne peut définir la ligne de cette coalition que comme petite-bourgeoise. Concernant la Gauche abertzale, nous devons apporter quelques précisions.

    Courants au sein de la Gauche abertzale

    kaleborrokaherriborrokaEn ce moment l'on peut observer en son sein deux courants principaux. L'un propose le dit “socialisme identitaire”, de type social-démocrate et que nous pouvons qualifier de néo-keynésien. Il ne prétend pas à la prise de pouvoir par le Peuple travailleur ni à la création d'un État socialiste, sinon à la restauration de l'“État-providence” et à une distribution plus “équitable” de la richesse, base de la “justice sociale”. Il ne prétend pas mener une transformation révolutionnaire, vouée à l'élimination du capitalisme et à la disparition des classes sociales. Il aspire seulement à une économie mixte, avec un fort secteur public, et son modèle sont les pays capitalistes du Nord de l'Europe. D'autre part, ce courant défend la création d'un État basque indépendant au sein de l'Union européenne.

    L'autre courant, que nous pouvons qualifier de gauche radicale, aspire lui à une transformation révolutionnaire de la société. D'un point de vue idéologique, il a des caractéristiques spontanéistes. Il est lié aux idées du “conseillisme” et avec l'“opéraïsme” ou l'“autonomie ouvrière”. Il possède aussi une certaine composante libertaire. Il a des sympathies pour le processus bolivarien au Venezuela, surtout pour les expériences “communautaristes”, bien qu'il soit critique envers Hugo Chávez, surtout pour sa personnalisation du pouvoir et pour l'extradition de réfugiés des FARC.

    La lutte idéologique

    Notre attitude envers ces courants se base sur la logique unité-critique-unité. Partant du principe que les contradictions entre eux et nous ne sont pas antagoniques ni inconciliables mais qu'il s'agit de contradictions au sein du peuple (qui doivent être surmontées au moyen de la critique et de l'autocritique, pour aller vers une nouvelle et plus étroite unité), nous devons éviter tout type de critique destructive, calomnieuse ou visant à creuser les différences, vu que si nous ne traitons pas correctement ce type de contradictions, nous pouvons en venir à changer leur nature, à les transformer en contradictions inconciliables comme celles qui existent entre nous et nos ennemis.

    Le but de la critique n'est pas de détruire ceux que l'on critique (à moins qu'il ne s'agisse d'un ennemi de classe) mais, comme disait Mao, de “sauver le patient”. Pour cela, nous devons toujours bien avoir à l'esprit les nuances et les différences entre tel ou tel courant et les autres, entre telles positions idéologiques et politiques et les autres. Même si, parfois, elles ont entre elles des points communs et se manifestent simultanément dans un même secteur socio-politique, nous ne pouvons pas toutes les mettre dans le même sac. La lutte idéologique que nous devons mener envers les unes et les autres ne peut pas être identique. Nous devons être capables de les différencier et de mener envers chacune d'elles un “traitement” différencié.

    Sur les aspects stratégiques

    PP-Donostia-profusion-izquierda-abertzale EDIIMA20130816 03Comme nous l'avons dit plus haut, l'essentiel n'est pas les élections ni les institutions bourgeoises, bien qu'il puisse être opportun de participer aux processus électoraux et d'avoir une présence institutionnelle. Mais en fin de compte, cela n'est que considérations tactiques. Pour élaborer une ligne révolutionnaire correcte, nous devons étudier de fond en comble notre propre réalité, et tenir compte des conditions concrètes de la société basque : sa structure économique et sociale, les aspirations les plus communes pour le Peuple travailleur, l'état d'esprit des masses etc. Mao disait, se référant à ces communistes qui sans aucune connaissance de cause ne faisaient que bonimenter, que “sans enquête, pas de droit à la parole”. C'est seulement sur la base de l'analyse concrète de la réalité concrète que nous pourrons tracer les lignes générales d'un travail révolutionnaire avec possibilités de succès.

    En tenant compte de ces aspects, à moyen et long terme s'impose la nécessité d'impulser une solide articulation de forces qui aille au-delà de simples coalitions électorales (comme Bildu aujourd'hui), afin de promouvoir la lutte démocratique et révolutionnaire pour la conquête des objectifs stratégiques du Peuple travailleur basque : l'indépendance et le socialisme.

    À SUGARRA, nous considérons que nous atteindrons ces objectifs au travers d'un processus de lutte pour l'émancipation nationale et la transformation sociale, que nous appelons Révolution basque. Ce processus devra se dérouler sur la base de deux contradictions, l'une de caractère social (de classe) et l'autre de caractère national. Ce qui nous amène à considérer que l'accumulation de forces, pour être possible, devra se faire sur la base de deux axes distincts et pour cela, cette accumulation de forces devra aller vers la constitution de deux blocs distincts, bien qu'interdépendants : un bloc  révolutionnaire (anticapitaliste et socialiste) et un bloc démocratique national plus large et ouvert que celui-ci, qui pour cela devra être interclassiste. Nous commencerons par définir ce que nous entendons par ce dernier.

    Le bloc démocratique national

    Sous cette appellation nous nous référons à une sorte de front élargi dans lequel prennent place des forces politiques et sociales de différente nature de classe. Certaines pourraient être petites bourgeoises voire même de la bourgeoisie moyenne [1], mais en feraient aussi nécessairement partie des forces politiques et sociales de la classe ouvrière (partis, syndicats et autres types d'organisations de masse). Pour autant, un bloc de ce type requiert l'établissement d'alliances de classe autour des objectifs nationaux démocratiques. Et seule l'hégémonie de la classe ouvrière, au sein de ce bloc, serait la garantie que la lutte pour ces objectifs s'inscrive dans la perspective de la révolution socialiste. Pour que ceci soit possible, la classe ouvrière basque doit se doter d'un instrument organisatif d'intervention politique, un Parti communiste basque. SUGARRA travaille à créer les conditions idéologiques, politiques et organisatives qui le permettent.

    Le bloc révolutionnaire

    hasiSous cette appellation, nous nous référerons à un bloc qui regroupe toutes les forces susceptibles d'impulser le processus révolutionnaire et le changement social. Ces forces représenteraient toutes les classes, couches et secteurs sociaux ayant intérêt, objectivement, au socialisme. Pourraient y participer une bonne part de ceux qui font aussi partie du bloc démocratique national, mais pas la bourgeoisie moyenne.

    En menant une politique habile et flexible face aux différentes couches de la petite bourgeoisie, une partie d'entre elles pourrait être gagnée à la cause révolutionnaire, faisant qu'elles se sentent motivées et attirées par le changement révolutionnaire. Gagner ces couches est une question cruciale pour la classe ouvrière étant donné qu'elles ont un poids considérable dans la structure sociale basque, représentant près d'un tiers de la population active. Pour cette raison, nous ne pouvons pas sous-estimer l'importance de la petite bourgeoisie et encore moins la mépriser. Si la classe ouvrière n'était pas capable de la tirer à elle, ce serait la bourgeoisie basque ou l'oligarchie espagnole qui le feraient et, dans ce cas, les possibilités révolutionnaires se compliqueraient considérablement.

    ________________________

    NOTES :

    1.- Nous pouvons dire que la bourgeoisie moyenne (non monopoliste) est organiquement intégrée au mécanisme global d'accumulation et de reproduction des rapports de production capitalistes, hégémonisés par la grande bourgeoisie. Cela signifie qu'elle fonctionne, se développe et se reproduit comme partie intégrante du fonctionnement, du développement et de la reproduction du système capitaliste. Le Grand Capital (monopoliste) cherche à maintenir subordonnée la bourgeoisie moyenne, tant pour des raisons économiques que politiques. Cependant le développement du capitalisme, surtout dans les périodes de profonde crise économique, accentue les contradictions entre le moyenne et la grande bourgeoisie. Dans le même temps le fait national, comme c'est le cas en Euskal Herria, conditionne et module la relation dialectique entre les deux. Nous pouvons ainsi dire qu'entre la grande et la moyenne bourgeoisie, il y a une relation simultanée (dialectique) d'antagonisme et de complémentarité.

    En parlant de cette bourgeoisie moyenne basque, il convient de clarifier que cette classe est formée par les propriétaires de la grande majorité des entreprises de taille moyenne, aussi bien industrielles que commerciales ou de services, ainsi que d'une partie du secteur bancaire [faire partie du secteur bancaire nous semble totalement incompatible avec faire partie d'une bourgeoisie "moyenne" NDLR]. D'après les données dont nous disposons, on comptait en 2009 dans la Communauté autonome basque quelques 2.174 entreprises de taille moyenne (entre 50 et 250 salariés), soit 1,1% du total, employant quelques 208.453 salariés, soit 21,8% de la population active. On peut également y inclure les agriculteurs aisés. Sans le moindre doute, il s'agit d'une classe exploiteuse.

    1220011477220 fEn outre, on peut aussi y inclure les cadres dirigeants et supérieurs des entreprises. Toujours selon les données dont nous disposons, au premier trimestre 2011, le nombre de cadres dirigeants et supérieurs dans la Communauté autonome était de 46.500, ce qui représente 4,95% de la population active à cette période.Bien que ces secteurs ne fassent pas partie stricto sensu de cette classe, faute de posséder des moyens de production, ils sont de par leur position dans la division du travail (planification, organisation et contrôle) incontournables pour assurer le fonctionnement de la production, l'accumulation du capital et la reproduction des rapports de production capitalistes, basées sur l'exploitation du travail salarié.

    La moyenne bourgeoisie basque est une classe contradictoire. D'un côté, elle est soumise à une spoliation de la part de la grande bourgeoisie monopoliste et des multinationales, mais de l'autre elle a besoin de l’État espagnol pour survivre. Elle est économiquement subordonnée à la haute bourgeoisie et à son État (à travers le crédit, les politiques de prix et de salaires, la politique fiscale, les subventions, les plans de stabilisation et/ou de reconversion, et dans une moindre mesure à travers son éventuel actionnariat dans les entreprises de la grande bourgeoisie, etc.). 

    Un secteur de la bourgeoisie moyenne basque, le plus fort et dynamique, a tenté de s'extraire des étroites limites du marché espagnol, et a réussi à s'associer avec des entreprises étrangères et à innover sa technologie. Dans le même temps, dans les années de prospérité, à la chaleur de l'expansion économique, il a aussi tenté de se doter de sa propre structure financière, afin d'être en condition de rivaliser avec la bourgeoisie monopoliste et, en même temps, faire son trou sur le marché européen et asiatique. [NDLR une activité économique transnationale qui exclut donc de parler de bourgeoisie "nationale", dont la base d'accumulation et la zone de chalandise est forcément autochtone ou, tout au plus, au niveau de l’État dominant et/ou de l'étranger immédiat : Occitanie pour la Catalogne et inversement, etc.]

    Dans la recherche d'une position plus avantageuse pour défendre ses intérêts économiques et accéder dans de meilleures conditions au marché international, une fraction de la bourgeoisie moyenne, représentée par le PNV, défend l'élargissement du cadre autonomique actuel voire l'instauration d'un nouveau, dans lequel il bénéficierait de plus larges compétences. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement autonome basque a présenté le fameux Plan Ibarretxe (approuvé par le Parlement basque le 30 décembre 2004 et rejeté par le Parlement espagnol un mois plus tard). Par son caractère fortement contradictoire, la bourgeoisie moyenne est une classe hésitante ayant fortement tendance à la conciliation et à pactiser avec les différents gouvernements de l’État espagnol, que ce soit du PSOE ou du PP.

    Nous, communistes basques, devons être capables de mettre à profit les contradictions entre la bourgeoisie moyenne basque et la grande bourgeoisie espagnole ; soit pour tenter d'amener cette bourgeoisie basque, ou des secteurs significatifs de celle-ci, sur le terrain de la lutte d'émancipation nationale de façon à ce qu'elle s'intègre au bloc démocratique national, soit tout au moins pour la neutraliser.

     

    Et voici un autre texte beaucoup plus récent (octobre 2013) qui revient sur la situation dans l’État espagnol et dans les provinces basques qui en font partie, avec une première évaluation de la gestion locale Bildu (de cet article sont tirées les citations du camarade basque en commentaires de cet article ; camarade auteur de la longue et intéressante étude publiée fin 2011 : 1 - 2 et 3) :

    RÉFLEXIONS SUR LA SITUATION BASQUE


    La crise économique frappe violemment l’État espagnol et, bien qu'avec une intensité atténuée, également en Hegoalde (Pays Basque "espagnol"). D'après les données du Service public de l'Emploi, citées par le cabinet d'étude de ELA (principal syndicat nationaliste basque, lié au PNV-EAJ) le 2 octobre 2013, en septembre 2013 le nombre de chômeurs en Hegoalde était de 226.893 personnes, 3.061 de plus que le mois précédent et 13.077 de plus que l'an dernier. Ceci représente un taux de chômage de 17,5%, nettement supérieur à celui de l'Union européenne des 28, qui est de 10,9% [NDLR : le Pays Basque apparaît ici dans sa position ambivalente de pays/peuple économiquement "privilégié" dans l’État espagnol, mais périphérisé dans le système capitaliste européen (qui en a confié la "garde" à une Castille encore au-dessous en termes de e-lutte-des-mineursdynamisme économique)].  

    Ce haut niveau de chômage n'est dépassé que par l’État espagnol pris en entier (26,2%) et par la Grèce (27,9%). Il faut en outre tenir compte du fait que presque la moitié des sans-emploi (45,2%) ne bénéficie d'aucune protection sociale, et que 34,7% seulement perçoivent une prestation contributive [les "Assedic" locaux].  

     La crise commence même à affecter un secteur comme celui des coopératives, longtemps considéré comme "à la pointe" de l'économie basque.  

    La soumission du gouvernement néo-franquiste du PP aux directives économiques de l'UE a conduit à une série de coupes budgétaires et de restrictions, qui ont aggravé plus que sensiblement les conditions de vie de la majorité de la population et ont dérégulé et précarisé totalement les conditions de travail des salarié-e-s.

    Dans le même temps s'aiguise de jour en jour la crise sociale et politique dans l’État espagnol. À la persistance d'un taux de chômage élevé, il faut ajouter l'indignation croissante contre le système financier dans les classes populaires, conséquence des expulsions pour non-paiement des loyers ou des hypothèques. Les scandales de corruption se succèdent l'un après l'autre, éclaboussant les principaux partis du système et l'ensemble des institutions démocratiques bourgeoises, touchant jusqu'à la monarchie elle-même qui commence à être ouvertement remise en cause.

    La crise politique affecte aussi d'autres États du Sud de l'Europe comme la Grèce, l'Italie et le Portugal, mettant en péril la stabilité même de l'UE. De plus, "l'axe franco-allemand" qui était il y a peu le moteur de celle-ci s'est affaibli considérablement et c'est l'Allemagne, en solitaire, qui se retrouve à exercer cette fonction.

    L’État français, de son côté, a perdu son autonomie politico-militaire [NDLR : constat peut-être un peu rapide et de toute manière, nous n'avons jamais considéré que cette "autonomie" bénéficiait de quelque manière aux travailleurs et aux peuples, à l'intérieur comme à l'extérieur]. Après être revenue dans le Commandement intégré de l'OTAN, dont elle s'était retirée depuis 1966, elle s'est complètement mise à la remorque des États-Unis. Enfin, la Grande-Bretagne exige avec toujours plus d'insistance le renégociation des conditions de son adhésion à l'UE, avec le risque pour cette dernière qu'elle finisse par la quitter. Dans le même temps, l'on observe dans la plupart des pays une montée des courants "eurosceptiques" et de l'extrême-droite raciste et xénophobe.

    gudari e05 kasDans ce contexte, la grande mobilisation populaire qui a eu lieu en Catalogne à l'occasion de la fête nationale, le 11 septembre, renforce cette crise politique et menace la sacro-sainte unité de l'"Espagne". Tandis que les deux partis du régime resserrent les rangs, dans une vaine tentative de montrer cette mobilisation du doigt, ressurgissent les groupes nazis-fascistes et s'accentue la répression de l’État bourgeois contre de larges secteurs de notre peuple.

    Tout ceci nous amène à considérer que vont en s'accumulant divers facteurs qui, s'ils venaient à agir de manière combinée, pourraient donner lieu à une situation objectivement révolutionnaire. Cependant, la maturation des conditions subjectives est beaucoup plus lente, non seulement dans l'ensemble de l’État espagnol mais aussi en Hego Euskal Herria.

    Si nous nous laissions guider par l'autosatisfaction, nous nous contenterions de répéter la phrase tant de fois prononcée que Euskal Herria est une "cadre autonome" de lutte de classe. Mais voilà : si cette affirmation est bien vraie, ce n'est pas vraiment une raison pour sonner les cloches à toute volée. En effet, il en est ainsi parce qu'Euskal Herria a connu une relative régression politique.

    Le débat Zutik Euskal Herria, qui a culminé en 2010 ; la constitution de Bildu comme plateforme électorale et sa participation aux élections municipales et forales (22-05-2011) ; le communiqué d'ETA rendant publique sa décision d'abandonner la lutte armée (20-10-2011) ; la constitution d'Amaiur et sa participation aux élections générales "espagnoles" (20-11-2011) ; la légalisation de SORTU par le Tribunal constitutionnel espagnol (20-06-2012), la création d'EH Bildu et sa participation aux élections autonomiques (21-10-2012) ; ont été des évènements qui ont marqué le retour de la gauche abertzale à une situation de légalité.

    Sur une position de respect et de non-interférence, nous avons toujours exigé et appuyé la légalisation de la gauche abertzale. Mais cela ne signifie pas que nous devons toujours approuver toutes les actions de celle-ci ni des différentes plateformes électorales auxquelles elle participe, et nous ne le faisons pas non plus pour son parti SORTU.

    Concrètement, nous avons pu constater ces deux dernières années le penchant croissant du secteur majoritaire de la gauche abertzale à assumer la légalité bourgeoise et à donner la priorité à l'activité institutionnelle et parlementaire. Son acceptation progressive des "valeurs" éthiques de la démocratie bourgeoise, ses efforts pour être "homologuée" par le PSOE et le PP l'ont conduite à assumer des attitudes et des comportements propres aux partis du système : rejet de tout type de violence ; admission de la nécessité d'un "nouveau récit" des quatre dernières décennies de notre histoire, bien qu'elle le veuille "consensuel" ; question de la "repentance" et du "pardon des victimes" etc.

    gudariegunaCette attitude n'est cependant pas exempte de contradictions. Pour éviter que la décision d'ETA puisse être interprétée comme une défaite de l'organisation armée face à l’État espagnol [ce qu'elle est NDLR], la gauche abertzale tente de mettre en scène une "négociation" entre elle et le gouvernement de Madrid, avec pour but de légitimer l'abandon des armes. Mais à chaque pas en arrière sur ses principes, les exigences des partis du système vont croissantes (auto-dissolution, remise des armes etc.) et tout semble indiquer que cette négociation recherchée n'est pratiquement pas viable.

    bietan jarraiD'autre part, ce qui n'a pas été fait a été une analyse rigoureuse (politique et non morale) de l'incidence négative qu'a pu avoir l'activité armée d'ETA (basée sur un activisme avant-gardiste et minoritaire) sur le développement du mouvement et la nécessaire accumulation de forces [NDLR : incidence indéniable si l'on parle des 5 ou 10 dernières années].

    Néanmoins, la présence dans les institutions de la coalition souverainiste Bildu reste un grave problème tant pour le PNV que pour le PSOE et le PP. Ont été découverts la corruption et beaucoup des manœuvres spéculatives qui fleurissaient à l'ombre de ces partis. Pour cette raison, ils se sont jurés de faire tomber Bildu et consacrent tous leurs efforts à cet objectif.

    D'un côté, dans de nombreuses municipalités de Gipuzkoa qui sont aux mains de Bildu, ils profitent de la mise en place du plan de traitement des déchets (qu'essaye de mettre en œuvre la coalition) pour dresser contre elle une partie du voisinage et tenter ainsi de l'"user" et de la discréditer. Mais ce qu'ils ne disent évidemment pas, c'est qu'est en jeu le juteux business de l'incinérateur de Zubieta...

    De l'autre, sous prétexte de mener à bien l'accord "fiscal", ils ont formé un front entre PNV, PSOE et PP avec pour objectif est de déloger Bildu de la Députation (gouvernement provincial) de Gipuzkoa et de la mairie de Donostia, si malgré tout la coalition parvenait à gagner les prochaines élections municipales et forales de 2015. Tout ceci nous conduit à penser qu'en dépit de ses penchants réformistes, la gauche abertzale reste l'ennemi à abattre pour l’État espagnol et les classes sociales et forces politiques qui l'appuient.

    disturbios-bilbao2-03-03-2014C'est pour cela que la gauche abertzale, considérée dans son ensemble (comme large mouvement populaire), garde une considérable importance stratégique dans la lutte pour le socialisme.

    Cependant, son ambigüité quant à l'appartenance d'un futur État basque à l'UE et au changement de modèle socio-économique (qui n'est autre qu'un État-providence néo-keynésien en opposition au modèle néolibéral), ou encore sa confuse et ambiguë conception du socialisme, rendent indispensable un profond travail idéologique et politique, en son sein, par les communistes basques afin de gagner à la cause révolutionnaire les secteurs de gauche les plus conséquents.


    (2) Nous ajouterons à cela que selon notre analyse, le PNV-EAJ ne représente pas la "bourgeoisie nationale" (bien que celle-ci, appelée "bourgeoisie moyenne" par Sugarra, puisse être sa base militante) mais bel et bien la fraction "basquiste" de la bourgeoisie monopoliste au Pays Basque, faisant face à la fraction "espagnoliste" (PP-PSOE) ; une grande bourgeoisie régnant sur un des territoires au capitalisme le plus puissant d'Europe, aux côtés de l'Île-de-France (Paris), du Grand Londres, de la Bavière, de la Flandre, de la Lombardie etc. (et bien sûr de la Catalogne). La contradiction de ces fractions bourgeoises monopolistes (PNV-EAJ en Euskal Herria et CiU en Catalogne) avec l’État espagnol se situe en réalité entre l'affirmation nationale portée par cette dynamique économique, et le besoin politico-militaire de l'"Espagne" pour "tenir" un prolétariat nombreux (pays très industrialisés) et (surtout) CONSCIENT. Nous avons déjà caractérisé l’État espagnol, avec sa suprématie politico-militaire de la Castille/Meseta malgré un dynamisme économique bien moindre, comme une sorte de "Sainte Alliance ibérique" : un système comparable à celui de l'Europe de la première moitié du 19e siècle, où la Russie et l'Autriche-Hongrie, pays sans doute les plus arriérés économiquement, jouaient le rôle politico-militaire de gendarmes de la Réaction (réaction pour le coup aristocratique-cléricale contre la révolution démocratique bourgeoise ; et aujourd'hui en "Espagne" réaction grand-capitaliste contre révolution prolétarienne et libération révolutionnaire des peuples - "LRP"). La Meseta castillane est cela : un territoire économiquement arriéré mais une redoutable force de frappe contre-révolutionnaire contre les remuants prolétariats du pourtour (Catalogne, Euskal Herria, Asturies, Cantabrie etc.) ; soit en quelque sorte la Russie tsariste de la péninsule ibérique. Ainsi se pose la problématique basque ou encore catalane : ce n'est pas réellement une problématique coloniale comme celle qui peut prévaloir dans le Sud (Andalousie etc.) ou aux Canaries, territoires conquis et soumis militairement au 15e siècle, maintenus dans la féodalité terrienne et le sous-développement etc.

    Il suffit de penser que lorsqu'en 1918 les Empires russe et austro-hongrois éclatèrent, sous l'action conjuguées de la Première Guerre mondiale et de la Révolution bolchévique, les États nationaux qui leur succédèrent furent tous plus réactionnaires les uns que les autres : la contradiction qui opposait les élites nationales aux Empires ne se situait pas du tout à ce niveau-là. Il s'agissait simplement de la contradiction entre des bourgeoisies de plus en plus puissantes, se sentant "étouffées" par la bureaucratie impériale, et des Empires forces politico-militaires dont elles avaient en même temps besoin pour tenir leur "chiourme" en respect (mais qui s'effondrèrent militairement et politiquement en 1917-18, donc la question ne se posait plus ; en général elles cherchèrent alors la protection des vainqueurs de la guerre, "France" et Grande-Bretagne).

    Ne pas avoir réellement "réglé" la question de la nature de classe et des relations avec le PNV a sans doute été le cancer latent de la gauche abertzale ces 40 dernières années.



    punopunopunoA1-1816065934

     


    votre commentaire

  • Nous avons publié, il y a déjà plus de deux ans, la brillante analyse d'un camarade communiste abertzale d'Iparralde (Pays Basque du Nord, "français") sur les évènements en cours dans le mouvement de libération nationale de là-bas (MLNV) : 1 - 2 et 3. C'était l'époque de la "capitulation" (cessation définitive de l'activité armée) d'ETA et de la proclamation par la gauche électorale abertzale (de libération nationale), à nouveau légalisée (alors que sa représentation politique était bannie depuis 2003), d'un "nouveau cours démocratique" et d'un "processus de paix" (en quelque sorte), d'une "résolution démocratique et pacifique du problème basque" etc. etc. Nous avions eu nous-même l'occasion de livrer quelques réflexions sur le sujet (en réalité, plutôt sur le fait que pour certains "maoïstes" ces évènements démontraient le caractère nul et non avenu de toute lutte de libération nationale) : considerations-diverses-un-gros-pave-sur-la-question-nationale-a114084658

    La position de ce camarade reflète celle d'un large courant communiste (essentiellement marxiste-léniniste) local, avec des organisations comme Kimetz, etc. Mais il y a eu à cette même (triste) époque d'autres positions, comme celle du collectif maoïste Herri Demokrazia ("Démocratie populaire") et de la revue marxiste Sugarra ; position qui sans "acclamer" le virage réformiste, ont été plus nuancées. Ces positions méritent d'être connues du public francophone s'intéressant aux luttes de libération, et d'être étudiées, car elles ne disent pas que des choses fausses comme nous allons le voir. Elles s'inscrivent dans le débat franc et ouvert qui, que nous le voulions ou non (mais en général, seuls les jacobins ne le veulent pas), se répercute dans notre mouvement révolutionnaire en Occitanie, pour qui ce qu'il se passe au Pays Basque n'a jamais été vraiment "étranger" (pour preuve, des gens qui se complaisent, finalement, dans ce qui était la ligne de Batasuna avant son interdiction nous attaquent encore aujourd'hui pour nos positions sur le sujet). Elles montrent qu'au Pays Basque en particulier, où vit un Peuple travailleur (classes populaires : personnes tirant exclusivement leurs revenus de leur force de travail et non de celle des autres) particulièrement opprimé (socialement et "nationalement"), il faut savoir prendre les choses dans leur complexité et être extrêmement vigilants sur la distinction entre contradictions au sein du peuple (qui doivent se résoudre par le débat, la discussion, le tri entre idées justes et idées fausses, la conviction et bien sûr l'expérience pratique) et contradictions avec l'ennemi (avec qui on ne discute pas, mais que l'on combat).

    Mais plus largement, Pays Basque ou pas, elles nous permettent d'illustrer une conception que nous assumons profondément : nous ne sommes pas pour la "liberté d'expression" dans l'absolu, nous ne sommes pas pour la liberté d'expression de Dieudonné par exemple, ni des fascistes en général ; ce sont là des contradictions avec l'ennemi. Mais il y a ce que nous appellerons un champ politique progressiste dans lequel oui, nous sommes pour la "liberté d'expression" ou plutôt, pour ce que nous communistes appelons le débat franc et ouvert. Cela ne veut pas dire que toutes les idées se valent, qu'il n'y ait pas d'idées justes et d'idées fausses, mais que justement faire la part des idées justes et fausses implique de laisser les idées s'exprimer et d'en débattre respectueusement, sans disqualifier a priori celui avec qui l'on n'est pas d'accord. Vous l'aurez compris, c'est là quelque chose de particulièrement étranger aux mentalités du cadre géographique dans lequel nous vivons : l’État français. D'un côté, bon nombre vont nous dire en mode "voltairien" très français : "et où est-ce que vous fixez la limite entre ce qui est progressiste et ce qui ne l'est pas ? C'est vous les fasciiiiistes !!!", comme si cela ne sautait pas aux yeux au regard de l'histoire, comme si cela ne tombait pas sous le sens, sous le "bon sens" gramscien. De l'autre, bon nombre vont être strictement incapables de "discuter" sans disqualifier préalablement leur interlocuteur, lui dénier le droit d'avoir une opinion, peu importe ce qui est invoqué à l'appui (appartenance à une chapelle politique adverse décrétée "contre-révolutionnaire" - le fameux "trotskyyystes" vs "stalinieeens" ou "autoritaiiiire" vs "anarchiiiste", appartenance supposée - on n'en sait généralement rien - à la "petite bourgeoisie" ou aux "révolutionnaires de salon", etc. etc.). Ils et elles vont être incapables de réaliser que l'état actuel des forces révolutionnaires ne permet pas le fanatisme sectaire ; et que l'époque est à ce que "cent fleurs s'épanouissent"(1) dans la réflexion. Servir le Peuple a plus d'une fois subi les giclures de leur bile, peu importe qu'ils/elles défendent une position "opportuniste-réaliste-pragmatique" ou au contraire "plus-révolutionnaire-que-moi- tu-meurs" : dans les deux cas ils se targueront de leur "pratique du terrain", d'être "vraiment dans les masses" etc. Mais finalement, les deux tendances se rejoignent : le refus d'aller sur le fond pour faire avancer les idées politiques révolutionnaires. En fait, elles reviennent strictement au même problème : c'est justement parce que la psychologie dominante "française" ("cartésienne") est incapable de saisir la notion d'idées justes et d'idées fausses à démêler, et la distinction entre différences de vues au sein du même camp (débat franc et ouvert, unité-critique-unité) et idées réactionnaires ennemies à combattre, que l'on est pas capable de contredire un point de vue sans préalablement disqualifier son auteur.

    Par ailleurs, et pour revenir au cœur du sujet, ces textes ont pour nous un intérêt tout particulier, puisqu'ils peuvent et doivent nous servir (à une échelle sans comparaison bien sûr entre les deux mouvements) à définir notre attitude vis-à-vis de la gauche occitaniste (il suffit, en un sens, de remplacer "abertzale" par "occitaniste"), qui s'est parfois voire souvent calquée sur la gauche indépendantiste basque et qui traverse elle aussi, depuis quelques années, une certaine crise.

    Ceci étant clarifié, nous refermons la parenthèse et voici les textes pris sur le site Herri Demokrazia :


    Quelques réflexions sur la fin de la lutte armée d'ETA, le MLNV et le rôle des communistes basques


    comunismoepatriaL'organisation ETA a annoncé le 20 octobre dernier la "cessation définitive de son activité armée". Nous qui rédigeons ce blog considérons cela comme une nouvelle positive.

    Mais nous nous réjouirons beaucoup plus lorsque surviendront d'autres nouvelles : lorsque Euskal Herria conquerra et pourra exercer son droit démocratique à l'autodétermination, lorsque les prisonniers politiques sortiront de prison, lorsque les forces d'occupation espagnoles et françaises quitteront notre pays, ou encore mieux, lorsque celles-ci seront DISSOUTES, vu que depuis une position de classe et internationaliste, elles sont des appareils de violence et de répression des bourgeoisies monopolistes. Et bien entendu, lorsque l'organisation terroriste armée internationale capitaliste-impérialiste OTAN cessera d'exister.

    La décision historique d'ETA vient confirmer, sans le moindre doute, un scénario dans lequel la lutte de libération nationale et sociale du Peuple travailleur basque [NDLR : les classes/masses populaires, ensemble des personnes tirant l'intégralité de leurs revenus de leur propre force de travail et non de celle d'autrui] fera face à une nouvelle phase qui va se développer dans les prochaines années. Une nouvelle époque dont, toutefois, les contours restent à définir et sur laquelle pèsent des incertitudes importantes.

    Nous n'analyserons pas ici et maintenant la trajectoire prolongée et complexe de 50 ans de lutte politique et armée d'ETA, et ce que cela a supposé pour notre Peuple. Nous ne prétendrons pas non plus en ce moment même à une analyse et une évaluation de l'ensemble du MLNV [mouvement de libération nationale basque] et de sa longue trajectoire historique : au cours de ces décennies de riche et intense parcours se sont accumulés des succès et des erreurs multiples, des victoires et des défaites, avec une énorme capitalisation d'expérience, de lutte, de compromis, de dévouement et de sacrifice.

    Bien que nous saluions la décision bienvenue d'ETA, nous communistes ne sommes pas ingénus ni pacifistes ; nous savons parfaitement que les sociétés divisées en classes, avec leur consubstantielle lutte des classes entre exploiteurs et exploités, oppresseurs et opprimés, sont historiquement inséparables de la violence. De même, nous savons que l'évaluation de la violence en général et de la lutte armée en particulier chez les classes et les Peuples opprimés doit se faire fondamentalement en fonction de si celles-ci servent à faire avancer vers les objectifs de libération sociale de la classe ouvrière et de l'ensemble du Peuple travailleur, et de la libération nationale de ce dernier le cas échéant ; ce qui pour notre pays se concrétise dans les objectifs stratégiques suivants : indépendance et État socialiste basque. C'est par la dialectique matérialistes que nous, marxistes, arrivons à l'analyse concrète de la réalité concrète, c'est-à-dire à la juste compréhension, à chaque moment et dans chaque société concrète, des divers facteurs objectifs et subjectifs en présence, et que nous élaborons et appliquons en conséquence la stratégie et la tactique la mieux adaptée. Cette réalité est toujours dialectique et historique et en cela concrète, c'est pourquoi son interprétation pertinente exclut toute formulation abstraite et hors contexte, toute formulation livresque, doctrinaire et dogmatique. Il ne faut pour cette raison rejeter ni sacraliser aucune forme de lutte, qu'elle soit pacifique ou violente, légale ou illégale, clandestine ou au grand jour, dans ou en dehors des institutions bourgeoises etc., et le choix et la combinaison de ces formes de lutte devra toujours être subordonnée et adaptée à la recherche de l'efficacité qui permettra d'avancer vers les objectifs tactiques concrets (parfois ambitieux, parfois plus limités), sans jamais perdre de vue à aucun moment les objectifs stratégiques.

    1253933178 1En quoi l'activité d'ETA bénéficiait-elle au renforcement du cadre national de la lutte des classes et en quoi renforçait-elle ou mettait-elle en difficulté la lutte de libération nationale et sociale du Peuple travailleur basque ? De notre point de vue, et (croyons-nous) du point de vue de la majorité de la militance du MNLV (chacun depuis ses propres perspectives), il y avait longtemps que la stratégie de l'ensemble du mouvement avait cessé d'être efficace sur des aspects sur lesquels elle l'était auparavant, et qu'elle montrait des signes sérieux d'être entrée dans une phase d'essoufflement en partie due à l'influence de l'activité armée d'ETA. La stratégie répressive d'encerclement et annihilation du MNLV déployée par les États espagnol et français, il faut le reconnaître honnêtement, était en train de remporter des succès impensables auparavant, et mettait la Gauche abertzale dans une situation difficile de relatif repli politique et social.

    Dans ce sens, avec plus ou moins de succès, la nécessité et l'urgence de surmonter cette situation a donné le jour à un pari ferme pour ouvrir un nouveau cycle. Devant une telle situation, demeurer immobiles comme si rien n'avait changé ne conduit finalement à rien d'autre qu'à la déroute. Cela n'a aucun sens de se bunkériser, de maintenir une position pétrifiée dans le temps, avec des lectures complètement décontextualisées comme si les circonstances politiques, idéologiques et sociales n'avaient pas changé d'un poil en plus de trois décennies, et comme s'il n'y avait rien à réajuster tactiquement. Il serait intéressant que ceux qui laissent entendre, et surtout ceux qui prétendent le faire depuis des milieux disant défendre le matérialisme dialectique, que l'abandon de la lutte armée par ETA suppose un grave affaiblissement de la lutte de libération nationale et sociale en Euskal Herria (EH) nous donnent des arguments fondés à l'appui de cette position, et nous expliquent aussi quelle alternative ils proposent ici et maintenant pour notre Peuple. Le virage de la Gauche abertzale aurait-il donc été si "radical", pour qu'elle puisse passer de mériter être soutenue à être ainsi attaquée et dépréciée ? Tout est-il si négatif aujourd'hui ? Trêve d'exagération... Il est certain, et ce n'est pas nous qui dirons le contraire, que la stratégie qui s'est configurée depuis un peu plus de deux ans dans le MLNV présente et soulève des doutes, des inquiétudes, des scepticismes, des insuffisances et des points faibles. Mais est-ce qu'auparavant, ou fut-ce une seule fois dans son existence, le MLNV aurait été communiste ? Nous autres considérons que non, car bien que par le passé le marxisme ait pu avoir un certain poids dans sa militance et dans ses discours, il n'est jamais parvenu à suffisamment prendre racine ni n'a été assumé de manière générale. Et le fait que le MNLV, y compris ses expressions électorales, n'ait pas le caractère d'organisations dirigées par le Parti de la classe ouvrière n'a pas été un obstacle insurmontable pour que depuis des décennies une grande part des communistes basques l'appuient, y compris en militant en son sein.

    independentzia sozialismoaPour nous, le fond de la question ne réside pas, ni aujourd'hui ni hier, dans l'organisation armée ETA, avec tout le respect et même la reconnaissance qui sont dus envers l'engagement de tant de militants qui ont lutté dans ses rangs, mais dans la question idéologique et le reflet que celle-ci doit avoir, en conséquence, dans les questions politiques et organisatives. Que veut-on pour l'avenir, quel programme propose-t-on pour les classes travailleuses, chaque jours plus exploitées et opprimées par la dictature de la bourgeoisie monopoliste, dans un système capitaliste mondial en crise toujours plus profonde et donc toujours plus violent et oppressif ? Quel est la nature et la profondeur du changement politique et social dont parle de manière récurrente la Gauche abertzale ces dernières années ? Comment s'organiser et quelles formes de lutte développer ? Quel type d’État et de société ? "Socialiste", nous dit-on... Mais qu'entend-on par-là ? Quel programme pour la classe ouvrière et le reste du Peuple travailleur basque va-t-on défendre dans les prochaines années ? Et si nous obtenons des parcelles importantes de pouvoir dans les institutions, et bien entendu en dehors de celles-ci, vers quoi va-t-on diriger ce potentiel ?

    Il y a évidemment beaucoup de choses qui sont pour le moment impossibles à préciser et anticiper, mais rien de tout cela ne doit être oublié ni sous-estimé, tout cela n'est que quelques-unes des interrogations qu'il faudra mettre au clair sur l'unité entre théorie et pratique, sachant que ce sera dans le cours du mouvement, dans le développement des contradictions et dans les décisions adoptées à chaque moment que tout cela s'éclaircira demain.

    Avec ses contradictions, défauts et limites, au jour d'aujourd'hui le secteur politique et social le plus enraciné dans les masses populaires, le plus organisé et combattif en EH est toujours la Gauche abertzale ; et nous considérons qu'elle reste la force capable de générer les contradictions les plus aigües au sein du conglomérat de pouvoir et d'appareils qui soutient actuellement l’État espagnol. Évidemment, tout cela ne veut pas dire que nous communistes devons renoncer à toute critique ni à défendre nos propres positions théoriques et pratiques, loin de là. Nous ne devons pas être suivistes envers tout ce que proposent les courants majoritaires de la Gauche abertzale, mais nos déclarations doivent être prudentes, méditées, réalistes et respectueuses, ce qui de notre point de vue a fait et continue à faire passablement défaut dans certains milieux communistes basques. Au regard de ce que doit être la position des communistes envers ce secteur socio-politique, nous défendons l'application politique et idéologique du principe dialectique d'unité et lutte, à travers la formule unité->critique->unité, face à ce qui constitue des contradictions au sein du peuple et non des contradictions antagoniques [avec un ennemi, qu'on ne règle que par la guerre].

    Dès lors que nous ne perdons pas de vue quels sont nos principes et nos objectifs stratégiques, nous communistes ne devons pas craindre d'arriver, dans certaines circonstances, à des concessions et des compromis tactiques. Lénine et évidemment Mao ont su agir avec souplesse tactique dans de nombreuses occasions. Lénine et les bolchéviks n'ont-ils pas changé de tactique à de multiples occasions ? Mao n'a-t-il pas pris l'initiative, et n'a-t-il pas passé de nombreux accords et compromis tactiques avec le Kuomintang alors que ce parti était responsable de l'assassinat de dizaines de milliers de communistes ? Notre idéologie est scientifique : le matérialisme dialectique, et nous tenons pour clair quels sont nos principes, pour cette raison précise nous ne pouvons avoir des codes fermés et éternels dans des catéchismes, des bibles ou des talmuds dans lesquels trouver toujours la formule qui convient.

    Il sera évidemment nécessaire, dans notre pays également, de passer des alliances bien au-delà de la classe ouvrière avec d'autres classes, couches et secteurs sociaux ; alliances qui seront nécessairement et  à divers degrés instables, temporaires et partielles, plus ou moins larges ou limitées et en reconfiguration permanente. En ce sens, les communistes basques doivent considérer ses alliances comme tactiques et leur apporter leur concours en maintenant leur indépendance idéologique, politique et organisative ; et dans un futur plus ou moins proche, la classe ouvrière avec son Parti communiste d'Euskal Herria comme organisation politique indépendante exprimant ses intérêts pourra prendre la tête du processus de libération nationale et de classe dans notre pays.

    Comme nous l'avons dit, et que cela nous plaise ou non, nous entrons dans une nouvelle étape de la lutte de libération nationale et sociale qui, à côté des éléments nouveaux qui se présentent sur le plan politique interne, devra affronter une crise extrêmement profonde du système capitaliste-impérialiste mondial, seulement comparable à la crise des années 1930 qui amena le fascisme et la pire guerre impérialiste mondiale de l'histoire ; crise qui frappe et frappera encore avec la plus grande brutalité la classe ouvrière et l'ensemble des classes populaires et des couches laborieuses non monopolistes. En ce sens, il est effectivement inquiétant que ce soit à ce moment précis que les tendances les plus social-démocrates et réformistes de la Gauche abertzale gagnent du terrain.

    kaleborrokaHistoriquement, un des grands succès et une des grandes forces de la Gauche abertzale était d'avoir compris que libération nationale et libération sociale sont les deux faces d'une même pièce, qu'elles se comprenaient comme une unité dialectique. Tout ce positionnement correct, pour n'avoir pas été consciemment fixé, est allé en s'affaiblissant avec le temps, passant à considérer le Droit à l'Autodétermination comme une question et une revendication uniquement et principalement démocratique, déconnectée et étrangère à la lutte des classes (la même chose s'est produite vis-à-vis de concepts comme l'indépendance ou la souveraineté). Ce sont là des problèmes qui ne remontent absolument pas à deux ans mais qui relèvent au contraire d'un processus progressif (ou régressif selon le point de vue) à l’œuvre depuis plus de 20 ans, et qui a sans doute à voir avec l'éloignement progressif et croissant du marxisme vécu au sein du MNLV.

    La Gauche abertzale n'est pas parvenue à la conclusion que le système capitaliste n'est pas intéressé à maintenir le dit "État-providence" lorsque ses classes dirigeantes savent très bien que les circonstances historiques qui ont conflué pour lui donner naissance n'existent plus. Pour cette raison, stratégiquement et d'un point de vue de classe, les postures défensives qui mettent l'accent sur la défense dudit "État-providence" à partir de postulats sociaux-démocrates (et même de recettes néo-keynésiennes face à la crise capitaliste) constituent une erreur et contribuent au confusionnisme et à semer de fausses illusions dans la classe ouvrière et l'ensemble du Peuple travailleur, sur le fait que le socialisme puisse être instauré par le biais de réformes qui ne touchent ni aux principes fondamentaux sur lesquels repose l'exploitation capitaliste, ni aux principaux appareils de pouvoir qui la protègent.

    Les ouvriers et le reste des classes laborieuses et des couches populaires ne peuvent se contenter d'une redistribution des richesses au travers de politiques fiscales plus justes ou simplement d'une plus forte intervention étatique, d'une plus large politique d'investissement public qui aurait pour conséquence des services publics et des prestations sociales améliorées. Tactiquement ce sont des conquêtes qu'il ne faut pas rejeter, car elles améliorent les droits et les conditions de vie de la grande majorité ; mais en aucun cas elles ne peuvent être une fin en soi et le socialisme ne peut être cela en aucune manière, quel que soit le côté duquel on considère la question. Il n'est pas possible de dompter le capitalisme, ce que démontre tout son développement historique. Tout conquête relativement progressiste qui serait éventuellement obtenue dans l'actuelle étape du capitalisme impérialiste serait extrêmement instable si nous ne sommes pas en condition de dépasser les limites qui enferment la classe ouvrière. D'un point de vue stratégique, nous devons nous attaquer à la racine de l'exploitation, de l'inégalité et de l'injustice et cela ne se peut qu'en prenant le Pouvoir, en détruisant le capitalisme et en construisant un État de dictature démocratique populaire ou de démocratie socialiste, dirigé par la classe ouvrière en alliance avec les autres classes et couches populaires. Nous devons construire le socialisme.

    Nous ne savons pas si notre Peuple conquerra l'indépendance à travers l'accomplissement d'objectifs révolutionnaires qui nous mettront en condition de construire l’État socialiste basque, ou s'il l'obtiendra avant cela. Dans le deuxième cas, ce ne pourrait être la conséquence que d'un long processus de lutte démocratique mené par d'importants secteurs du Peuple travailleur basque, qui bien que n'obtenant pas la libération de classe parviendrai à générer certaines conditions permettant la rupture démocratique avec la situation imposée par les États français et (surtout) espagnol ; l'une de ces conditions étant la résolution dans une large mesure de la contradiction et de l'oppression nationale, ce qui contiendrait déjà en soi une part de satisfaction des revendications démocratiques largement partagées par les masses populaires basques. L'un comme l'autre de ces deux scénarios pourrait aussi avoir l'effet positif d'impulser les luttes de classe et de libération nationale dans les différents Peuples soumis au joug oppresseur et exploiteur des États capitalistes-impérialistes français et espagnol, principalement de ce dernier.

    independentziasozialismoaMais dans tous les cas, notre modèle n'est ni ne peut être celui des nouveaux États formellement indépendants constitués en Europe depuis la dernière décennie du 20e siècle. En aucun cas, d'un point de vue de libération de classe comme de construction d'une Euskal Herria socialiste, n'est défendable la perspective d'un État basque à l'intérieur de l'Union impérialiste européenne. Nous pourrions discuter à ce titre de quel est le degré d'indépendance réelle des Pays baltes, de la Croatie, du Kosovo, de la Macédoine, du Monténégro etc. En tant que classe ouvrière et en tant que communistes, nous ne pouvons nous satisfaire d'une "indépendance" qui n'en aurait pas le plus petit semblant de réalité. De même, nous avons vu dans toute sa brutalité comment d'autres États capitalistes, le plus connu étant la Grèce mais pas seulement : des États comme par exemple l'Albanie, la Bulgarie, la Hongrie, le Portugal, la Roumanie etc., et même des États impérialistes de second rang comme l'Italie ou l’État espagnol, complètement indépendants en théorie, sont contraints à se soumettre et à exécuter les diktats des institutions européennes du Grand Capital monopoliste.

    Face à cela, nous affirmons que la classe ouvrière est la seule qui par ses intérêts objectifs peut se placer à la tête de la lutte de libération nationale et défendre conséquemment la souveraineté et l'indépendance d'EH contre les chantages et la violence des États capitalistes-impérialistes et des bras économiques et militaires transnationaux du Grand Capital. La libération pleine et entière d'EH ne sera une réalité que lorsque le Peuple travailleur, avec la classe ouvrière à sa tête, conquerra le pouvoir politique et se dotera d'un État socialiste basque. C'est pour cette raison que pour avancer vers la Révolution basque, dans une perspective de libération globale, nationale et sociale, la nécessité pour la classe ouvrière de notre pays est de construire le Parti communiste d'Euskal Herria.

    Nous communistes défendons l'internationalisme prolétarien et pour cette raison, c'est aussi une nécessité pour nous que de rechercher la convergence et l'unité dans la lutte du prolétariat international, de rechercher en permanence des cadres et des structures organisatives communes. Pour autant, dans le cas des nations opprimées et sans État, cela ne passe pas toujours nécessairement par militant dans des structures organisées de cadre étatique (nous faisons référence ici au cadre "espagnol" ou "français"), vu que ceci suppose souvent de proposer une "unité" mal comprise de la classe ouvrière à partir d'abstractions dogmatiques, éloignées et coupées des conditions réelles et concrètes d'existence des collectivités humaines et de la lutte des classes en leur sein : facteurs économiques, politiques, culturels (psychologie, langue), historiques etc. À l'heure qu'il est, tout communiste révolutionnaire devrait tenir pour clair que, sans le moindre doute, nous appartenons à une même classe ; mais pas à une même nation

    Hego Euskal Herria [le Pays basque "espagnol" NDLR] est le maillon le plus faible à l'intérieur de l’État espagnol et nous pensons que promouvoir le cadre national de la lutte des classes est notre meilleure et plus efficace contribution à la lutte contre la bourgeoisie monopoliste et ses alliés locaux, et à la destruction de son appareil de domination et d'exploitation de classe (en ce qui nous concerne, d'oppression nationale également) dont la matérialisation effective prend la forme de l’État capitaliste impérialiste espagnol ; notre meilleure contribution à la lutte libératrice des classes et des autres peuples opprimés de l’État espagnol, et à la Révolution prolétarienne mondiale. Ceci bien que, comme nous l'ayons dit, le prolétariat soit une classe internationale et sa lutte également, ce pourquoi il est nécessaire d'impulser des coordinations et des cadres unitaires pour renforcer la lutte de classe. Logiquement, en respectant certaines réalités données par l'existence de cadres nationaux où se déroule concrètement la lutte des classes, il serait nécessaire et très positif de rechercher des formes de coordination et d'unité internationale avec les organisations de la classe ouvrière et des couches populaires d'autres pays, en commençant pas les pays voisins et proches, a fortiori lorsqu'il existe avec ces dernières une commune oppression par un même État et des liens économiques, sociaux, historiques etc. entre notre Peuple et les autres Peuples travailleurs opprimés par les États espagnol et français. 

    1901116 713418255377502 836621131 nPour revenir au sujet de la nécessité de construire le Parti de la classe ouvrière basque, le PC d'Euskal Herria, nous voyons actuellement émerger deux lignes que nous considérons toutes deux erronées parmi ceux qui se réclament du communisme abertzale.

    D'un côté, il y a ceux pour qui le Parti communiste devrait d'ores et déjà être constitué et qui attaquent violemment la Gauche abertzale en appelant ouvertement à sa scission. Leur principale activité consiste en la critique destructive et qualifier la Gauche abertzale de traîtres, liquidateurs, petits bourgeois, révisionnistes et toute une ribambelle d'épithètes (certains se voulant amusants) que nous n'allons pas reproduire tous ici ; jusqu'à finir par la considérer comme l'ennemi principal de la classe ouvrière basque (dans le processus révolutionnaire basque, quel type d'alliances sociales et politiques pensent donc passer ceux qui jettent en permanence l'anathème sur tout le monde, sous l'accusation d'être des "petits-bourgeois", des traîtres, des liquidateurs, des révisionnistes etc. ?). Tout cela avant d'avoir articulé le début d'un discours un minimum cohérent, sans émettre le moindre type de proposition positive et apparemment, sans rien savoir du degré réel de conscience idéologique des masses populaires basques, en particulier de la classe ouvrière, ni du degré réel d'influence que les communistes peuvent avoir au sein du Peuple travailleur basque. Bien sûr qu'il faut avancer vers la construction du Parti communiste d'EH, mais les attitudes irréalistes qui confondent les désirs avec la réalité, les attitudes sectaires et dogmatiques comme celles de certains "hyper-communistes" ne servent en rien à avancer vers cela. Construire les conditions pour fonder le Parti communiste, ce n'est pas se les inventer à partir du néant.

    De l'autre, il y a ceux qui disent ne pas nier la nécessité du PC mais considèrent que ce n'est jamais le moment d'avancer, qui ne prennent aucune décision pour avancer sérieusement vers cet horizon et concentrent toute leur activité et leurs efforts sur d'autres tâches ; si bien que le Parti est une question éternellement renvoyée à plus tard, sans bien savoir eux-mêmes quelles sont les circonstances et les conditions qu'ils considèrent nécessaires pour faire un pas en avant, de manière décidée, sur le chemin de la construction du PC d'EH. Ils aiment invoquer la nécessité d'une "masse critique" nécessaire pour créer le Parti, mais ils oublient que les conditions subjectives, idéologiques nécessaires à sa construction ne tombent du ciel, n'apparaissent pas spontanément par la grâce d'un quelconque mécanisme déterministe des développements sociaux de la lutte des classes : c'est la décision consciente d'individus concrets qui fait que ces conditions se renforcent et s'accélèrent ou au contraire s'affaiblissent et régressent.

    Face à cette situation, nous communistes devons nous efforcer à développer ces conditions subjectives, les facteurs idéologiques et organisatifs [niveau de conscience et d'organisation des masses populaires NDLR] qui rendront tôt ou tard possibles de nouvelles victoires du prolétariat et un nouveau cycle révolutionnaire mondial, en Euskal Herria également. De la même manière, nous communistes basques devons également discuter, décider et concrétiser sur quels objectifs, où et comment nous voulons travailler politiquement. Faire tout cela est une nécessité vitale, au lieu de se jeter à la gorge de l'actuelle ligne politique dominante dans la Gauche abertzale pendant que, malheureusement, le communisme basque ne montre que son incapacité à produire une ligne idéologique, politique et organisative cohérente et conséquente pour intervenir au sein de notre Peuple.

    Regrettablement, à côté de ceux qui ont parfois exprimé des critiques légitimes, même si pas toujours mesurées ou correctes, il y a ceux qui passent leur temps à la critique presque toujours destructive, à l'attaque gratuite et frontale et à semer la division, fustigeant sans mesure les dirigeants et les milliers de militant-e-s de la Gauche abertzale et utilisant des méthodes telles que l'insinuation, l'intoxication, les demi-vérités, la diffamation, le mensonge et l'insulte au lieu de travailler sérieusement au renforcement du Mouvement communiste basque ; une manière de procéder qui ne profite objectivement qu'aux États espagnols et français, aux ennemis les plus acharnés de la libération sociale et nationale de notre Peuple. Peut-être en est-il qui voient ainsi renforcée leur estime d'eux-mêmes, et y trouvent une dose d'autosatisfaction... Mais la réalité est que l'on peut invoquer le soleil tant que l'on veut, s'époumoner à dire et même crier à toute occasion que "les marxistes-léninistes doivent être en première ligne de la lutte de libération", cela ne changera rien à la réalité objective qui est que pour le moment, la capacité réelle des communistes basques à influer politiquement sur les évènements est très limitée, et qu'il reste un énorme travail à faire dans notre propre maison, où pratiquement tout est à construire. Quel est le niveau de développement des forces révolutionnaires ? Quel est le niveau de conscience idéologique des masses travailleuses basques et en particulier de la classe ouvrière ? Quelle est l'influence réelle des communistes basques au sein du Peuple travailleur ? Quel type d'instruments organisationnels avons-nous su créer parmi les masses ouvrières et populaires ? Les communistes, tout en faisant preuve d'intelligence tactique, ne doivent pas oublier quels sont leurs objectifs stratégiques maximaux : la construction révolutionnaire du socialisme, en marche progressive vers la société communiste. Définitivement, le Parti communiste est un moyen indispensable pour atteindre ces objectifs et la libération nationale d'EH ; mais est-il sérieux d'agir comme si ce Parti était une réalité organisative solide et véritablement enracinée dans la classe ouvrière basque, et comme si nous étions déjà en condition de prendre la tête de la libération nationale et sociale de notre Peuple ?

    abstentzioa-copiaIl est évident que la direction politique de quelque processus que ce soit doit être conquise à la force du poignet en démontrant sa capacité, en démontrant dans la pratique que la théorie et la pratique des militant-e-s communistes est la plus juste ; mais cela ne s'obtient pas par le simple fait de le croire et de le proclamer : cela s'obtient en conquérant cette position devant les masses populaires, en gagnant sous leurs yeux leur confiance. Nous communistes basques devons être capables d'accomplir nos devoirs, ce dont jusqu'à présent nous n'avons pas été capables dans une large mesure ; organisant les secteurs les plus conscients de la classe ouvrière basque et contribuant décisivement à élever le niveau de conscience et d'organisation de la classe en général par notre travail idéologique, politique et pratique. Nous, communistes basques, serons-nous capables d'organiser le Parti révolutionnaire du prolétariat, le Parti communiste ; de jouer un rôle significatif dans la lutte de libération nationale et sociale de notre pays et un jour, de la diriger ?

    Pour conclure, conséquemment avec ce que nous avons dit et devant les prochaines élections du 20 novembre, nous décidons d'appuyer les candidatures de la coalition électorale AMAIUR, dont la Gauche abertzale est la principale composante ; sans tomber dans un fantastique optimisme ni dans le pessimisme démoralisateur ; car pour commencer nous tenons pour clair qu'ici et maintenant s'abstenir serait encore pire tant d'un point de vue de nation opprimée que de classe, et que face à la vague croissante de répression et de réaction qui pèse sur nous il n'y a d'autre alternative que cela ou la frustration, l'impuissance ou le "témoignagisme" stérile. Nous considérons que le front électoral et institutionnel, sans être d'aucune manière le plus important, ni que ce soit au sein des parlements bourgeois que puissent être satisfaits les intérêts fondamentaux du Peuple travailleur, reste dans le cas présent un front de lutte de plus qui peut servir de porte-voix ou de caisse de résonance à beaucoup de ses aspirations populaires et qui doit contribuer à renforcer et impulser le mouvement populaire sur le chemin de ses objectifs de libération nationale et de classe.  


    GORA EUSKAL HERRIA ASKATUTA !!! (Vive le Pays Basque libre !!!)


    GORA EUSKAL HERRIA SOZIALISTA !!! (Vive le Pays Basque socialiste !!!)


    JO TA KE INDEPENDENTZIA TA SOZIALISMOA LORTU ARTE !!! (En avant avec détermination, pour l'indépendance  et le socialisme !!!)

     

    En fin de compte, nous avons passé en orange le paragraphe (final) avec lequel nous ne sommes pas d'accord ; qui ne nous semble pas, clairement, être la conclusion nécessaire de ce qui précède ; avec quoi nous sommes d'accord à 99% par ailleurs et qui contient même des raisonnements absolument brillantissimes à nos yeux. Devant les mêmes constats (authentiques, puisque locaux), nous aurions plutôt tiré la conclusion que : "Nous ne jetterons pas la pierre aux gens qui voteraient pour Amaiur-Bildu, nous les considérons évidemment comme des personnes progressistes avec qui les éventuelles contradictions sont au sein du peuple [c'est d'ailleurs la position que nous avons prise ici, en Occitanie et en Hexagone, pour les gens qui voteraient localement pour certaines listes progressistes ou autonomistes/indépendantistes de gauche : NPA et autres gauches "radicales" ou "alternatives" en fonction de la réalité locale, Breizhistance en Bretagne ou occitaniste-de-gauche en Occitanie, "Saint-Herblain à gauche toute" dans cette ville de la banlieue nantaise, "Émergence" en banlieue parisienne, "Basta!" à Metz etc. etc.] ; MAIS en tant que communistes nous ne POUVONS PAS donner une consigne de vote pour une telle liste, que nous venons de définir comme "petite-bourgeoise" (comme Batasuna avant son interdiction) mais surtout, dominée par les tendances les plus réformistes, social-démocrates voire social-libérales, européistes, "modèle suédois" et néo-keynésiennes, autrement dit la petite-bourgeoise (classe intermédiaire) qui penche plus vers la grande que vers le Peuple travailleur (contrairement, là, à Batasuna avant 2003 donc)".  En revanche, appeler à voter pour une ligne de "gauche radicale" assumant une certaine "rupture avec le capitalisme", comme Batasuna avant son illégalisation (2003) ou le Parti communiste des Terres Basques (EHAK) en 2005, nous semble tout à fait justifié d'un point de vue tactique et, au demeurant, parfaitement transposable dans nos "provinces" (pays/peuple conquis) périphérisées de l’État français (forces comme Breizhistance en Bretagne etc.) ; car constituant un défi de peuple et de classe à l’État oppresseur du Grand Capital (2).

    Un autre aspect est peut-être un peu vite passé "à la trappe" par Herri Demokrazia et Sugarra (ci-dessous) : QUI a légalisé Bildu puis Amaiur, si ce n'est l’État espagnol (les juges de l'Audience nationale) ? Servir le Peuple a souvent dit que l’État espagnol n'est pas le Royaume-Uni car, si tel était le cas, certains dirigeants abertzale ne seraient pas en prison mais déjà ministres du gouvernement "autonome" basque (selon la tactique éprouvée en Irlande du Nord, d'appuyer systématiquement les franges modérées du mouvement national combattant). Mais il se peut qu'au sein de l’État espagnol, certains éléments aient commencé à "raisonner à l'anglaise"... Il y a même ici et là des rumeurs persistantes sur la présence de "conseillers en sortie de crise" anglais auprès des autorités espagnolistes, à Bilbao comme à Madrid. Il nous semble un peu contradictoire de dire que le front électoral et institutionnel est intéressant mais pas primordial pour faire avancer la lutte, et de considérer qu'il fallait pouvoir se présenter aux élections pour accumuler des forces de gauche abertzale ; de considérer que l’État espagnol agit de manière quasi-fasciste et de ne pas envisager des moyens d'accumuler des forces dans la clandestinité. Le principe communiste en général est plutôt que même lorsque l’État ennemi va jusqu'à tuer, "il peut tuer les révolutionnaires mais pas la révolution", ce qui est également valable avec le verbe "emprisonner" ; et qu'il faut trouver les moyens de retourner cette atmosphère répressive en mobilisation de masse contre lui.

    Mais bien entendu, nous ne sommes pas sur place. Herri Demokrazia a fait le choix d'appeler à voter "sans illusions" pour la gauche abertzale "re-légalisée" (il faut aussi tenir compte de ces années d'illégalisation, qui ont notamment permis la victoire des espagnolistes en 2009, dans le raisonnement) et social-démocratisée : la coalition Amaiur qui raflera à ces législatives "espagnoles" du 20 novembre 2011 quelques 22% des voix (333.000 suffrages) et 7 sièges aux Cortes (sur 23 pour le Pays Basque), passant même devant le PNV-EAJ nationaliste bourgeois (5 sièges), dans la continuité de son score (à peu près identique) aux municipales et provinciales du 22 mai précédent (coalition Bildu), score encore répété (~ 25%) aux élections parlementaires de la Communauté autonome en octobre 2012 (Euskal Herria Bildu).

    D'autres forces ont fait le choix inverse. Le débat en Euskal Herria même est, encore aujourd'hui, loin d'être clos...

    hasiNous sommes tout à fait d'accord, en revanche, pour dénoncer et rejeter les attitudes sectaires visant à creuser, immédiatement et définitivement, un fossé inconciliable d'antagonisme entre les communistes et la gauche abertzale. Ces attitudes sont totalement suicidaires. Nulle part au monde, les communistes n'ont atteint même le plus modeste de leurs buts sans un grand mouvement de masse autour d'eux. Au Pays Basque, ce mouvement s'appelle la gauche abertzale et il n'y en a pas d'autre. Il faut en fait parvenir à bien intégrer dans nos têtes que le respect n'interdit pas la critique et inversement. Les militant-e-s de la gauche abertzale ont lutté pendant des décennies, honorablement, et cela n'est pas en cause. Mais si au nom de cela on ne peut pas critiquer, par exemple, une gestion municipale Bildu, alors que l'on s'interdise aussi de critiquer l'Autorité palestinienne ou Martin McGuinness en Irlande du Nord : le Fatah et le Sinn Féin n'ont-ils pas lutté eux aussi héroïquement pendant des décennies, dans des conditions (de loin) bien plus dures encore qu'au Pays Basque ? Il faut arriver à comprendre, en matérialistes dialectiques, que des dizaines d'années de lutte sont un "capital" d'expériences, une richesse qu'il n'est pas question de jeter aux orties (comme voudraient le faire certains gaucho-dogmatiques, et bien sûr certains gaucho-jacobins quand il s'agit de libération nationale) ; que ce qui a existé a existé et a été, par bien des aspects, utile et nécessaire ; mais qu'à un moment donné, la situation impose de critiquer, de repenser et de DÉPASSER ce qui s'est fait jusque-là. Évidemment, cela rencontrera toujours des résistances, non pas seulement de vendus comme McGuinness mais aussi de militant-e-s sincères et incontestables qui, purs produits de l'époque révolue et ne comprenant pas la dialectique, ne parviennent tout simplement pas à concevoir les choses autrement ; cela les insupporte et même - littéralement - les ulcère, ils/elles vont hurler aux "donneurs de leçons" qui "se prennent pour qui", etc. etc. Certains, il faut bien le dire, auront acquis dans ladite époque révolue et dans leur sphère militante une certaine "importance", et craignent à tort ou à raison que celle-ci soit menacée. Il mettront bien sûr en avant leur (sacro-sainte) "pratique", leur "expérience", leur "réalité concrète sur le terrain", les "besogneux de la lutte" qu'ils sont contre les "révolutionnaires de salon" qui appellent à une fastidieuse remise en question de leurs certitudes ; "argumentaire" qui pourrait tout à fait être celui des réformistes ou des révisionnistes "orthodoxes", des trotskystes ou des ML dogmatiques à l'intérieur ou à l'extérieur du Front de Gauche, des syndicats réformistes ouvriers ou étudiants etc. "Argumentaire" qui était celui du PCF contre les maoïstes et autres révolutionnaires dans les années 1968... Bien entendu, dans ce combat, l'éventuelle attitude gauchiste, sectaire et insultante de certains groupes dogmatiques nous dessert totalement ; car (surtout lorsque nous partageons les mêmes références politiques ML ou maoïstes) les personnes dont nous venons de parler nous assimilent à eux. Servir le Peuple en a plus qu'à son tour fait les frais, encore récemment face à des personnes qui se voulaient (pour dire les choses clairement) le "copié-collé" occitan de la gauche abertzale.

    Concernant la "cessation définitive de la lutte armée" par ETA, nous n'irions pas jusqu'à la qualifier de "positive" : c'est la marque d'une défaite, et il n'y a rien de positif à cela. Nous l'avons qualifiée à l'époque, avant tout, de prise d'acte d'une réalité : depuis le milieu des années 2000, l'organisation révolutionnaire armée évoluait de toute façon comme un mort-vivant, décapitée (arrestation du dirigeant Mikel Antza en 2004, puis de "Txeroki" en 2008), décimée (10 fois plus de prisonniers que de combattants libres) et ne sachant plus où elle allait. La défaite était patente, et un mouvement révolutionnaire doit savoir reconnaître sa défaite, se replier en bon ordre et réfléchir sur quel "bon pied" repartir de l'avant. Cela, ETA a eu raison de le faire, le problème n'est pas là. Le problème, c'est tout l'enrobage idéologique de tout cela, visant à "transformer" cette défaite en victoire ; les grandes tirades sur une solution "démocratique" et "pacifique" au problème basque - national comme social. Cela, c'est semer les illusions, et cela doit être combattu internationalement, sans blabla de "tu n'es pas sur le terrain, ferme ta gueule" ; car comme le dit très justement Herri Demokrazia, ce n'est pas au moment où la crise générale terminale du capitalisme fait rage sur la planète qu'il faut jouer à semer ce genre d'illusions. Le Peuple travailleur basque subit une double oppression, nationale et sociale, sous des formes particulièrement brutales (héritées du franquisme). Affirmer qu'une telle oppression peut se résoudre "démocratiquement" et pacifiquement signifie que pratiquement toutes les oppressions de la planète le peuvent. C'est une affirmation aux conséquences potentiellement catastrophique.

    Mais cela, comme le dit Herri Demokrazia et nous sommes 100% d'accord, doit être combattu avec une compréhension juste de la situation particulière basque, des tenants et des aboutissants, et sans déclarer irrémédiablement la guerre à toute la gauche abertzale, sans traiter celle-ci en ennemie et bien sûr, sans en tirer la conclusion (comme tout un magma d'anarchistes, trotskystes, "marxistes-léninistes" et même "maoïstes" jacobins) que c'est là la "preuve" de "l'impasse" fatale des luttes "nationalitaires". Comme disait Mao - et le répète Herri Demokrazia - les communistes doivent être "au chevet du patient", et non le jeter par dessus bord !

    Voici maintenant un autre texte très intéressant, issu quant à lui de la revue marxiste basque Sugarra :

    Euskal Herria : Situation actuelle et perspectives (25 août 2011)

    http://herridemokrazia.blogspot.fr/2011/11/euskal-herria-situacion-actual-y.html


    Lire la suite ici


    (1) Les Cent Fleurs en Chine (1957) ont bien sûr été dépeintes par la propagande bourgeoise sur l'air de "Mao, sous la pression de la 'déstalinisation' en URSS, a été obligé de laisser ses opposant s'exprimer puis d'un seul coup, il s'est retourné contre eux et les a envoyé en camp de travail"... La réalité est évidemment toute autre : face à la grande crise du mouvement communiste international ouverte par le "rapport Khrouchtchev" mais aussi d'autres évènements (Hongrie), et à la situation de "blocage" de la révolution en Chine même, le Parti communiste a laissé les positions et même les critiques s'exprimer... puis a fait le tri des idées justes et des idées fausses : unité -> critique -> nouvelle unité à un niveau supérieur. Si des activistes contre-révolutionnaires ont ainsi été démasqués, ils ont pu être sanctionnés mais ce n'était pas l'objet premier des "Cent Fleurs". Les idées justes recueillies ont donné lieu au lancement des Communes populaires (certes largement sabotées et échec dans un premier), et ont très largement été la "matrice" intellectuelle de la Grande Révolution culturelle prolétarienne.

    (2) Nous ajouterons à cela que selon notre analyse, le PNV-EAJ ne représente pas la "bourgeoisie nationale" (bien que celle-ci, appelée "bourgeoisie moyenne" par Sugarra, puisse être sa base militante) mais bel et bien la fraction "basquiste" de la bourgeoisie monopoliste au Pays Basque, faisant face à la fraction "espagnoliste" (PP-PSOE) ; une grande bourgeoisie régnant sur un des territoires au capitalisme le plus puissant d'Europe, aux côtés de l'Île-de-France (Paris), du Grand Londres, de la Bavière, de la Flandre, de la Lombardie etc. (et bien sûr de la Catalogne). La contradiction de ces fractions bourgeoises monopolistes (PNV-EAJ en Euskal Herria et CiU en Catalogne) avec l’État espagnol se situe en réalité entre l'affirmation nationale portée par cette dynamique économique, et le besoin politico-militaire de l'"Espagne" pour "tenir" un prolétariat nombreux (pays très industrialisés) et (surtout) CONSCIENT. Nous avons déjà caractérisé l’État espagnol, avec sa suprématie politico-militaire de la Castille/Meseta malgré un dynamisme économique bien moindre, comme une sorte de "Sainte Alliance ibérique" : un système comparable à celui de l'Europe de la première moitié du 19e siècle, où la Russie et l'Autriche-Hongrie, pays sans doute les plus arriérés économiquement, jouaient le rôle politico-militaire de gendarmes de la Réaction (réaction pour le coup aristocratique-cléricale contre la révolution démocratique bourgeoise ; et aujourd'hui en "Espagne" réaction grand-capitaliste contre révolution prolétarienne et libération nationale populaire). La Meseta castillane est cela : un territoire économiquement arriéré mais une redoutable force de frappe contre-révolutionnaire contre les remuants prolétariats du pourtour (Catalogne, Euskal Herria, Asturies, Cantabrie etc.) ; soit en quelque sorte la Russie tsariste de la péninsule ibérique. Ainsi se pose la problématique basque ou encore catalane : ce n'est pas réellement une problématique coloniale comme celle qui peut prévaloir dans le Sud (Andalousie etc.) ou aux Canaries, territoires conquis et soumis militairement au 15e siècle, maintenus dans la féodalité terrienne et le sous-développement etc.

    Il suffit de penser que lorsqu'en 1918 les Empires russe et austro-hongrois éclatèrent, sous l'action conjuguées de la Première Guerre mondiale et de la Révolution bolchévique, les États nationaux qui leur succédèrent furent tous plus réactionnaires les uns que les autres : la contradiction qui opposait les élites nationales aux Empires ne se situait pas du tout à ce niveau-là. Il s'agissait simplement de la contradiction entre des bourgeoisies de plus en plus puissantes, se sentant "étouffées" par la bureaucratie impériale, et des Empires forces politico-militaires dont elles avaient en même temps besoin pour tenir leur "chiourme" en respect (mais qui s'effondrèrent militairement et politiquement en 1917-18, donc la question ne se posait plus ; en général elles cherchèrent alors la protection des vainqueurs de la guerre, "France" et Grande-Bretagne).

    Ne pas avoir réellement "réglé" la question de la nature de classe et des relations avec le PNV a sans doute été le cancer latent de la gauche abertzale ces 40 dernières années.

     

    euskadi komunista 

     


    votre commentaire
  • caprilesAu sujet des évènements ("révolution colorée") qui secouent une nouvelle fois, depuis plusieurs semaines, le Venezuela, nous ne nous étendrons pas outre mesure pour rappeler (pour la 150e fois environ) notre position : le "bolivarisme", RÉFORMISME BOURGEOIS qui s'appuie (au niveau international) sur les "émergents" BRICS et autres "États-parias" (Iran, Syrie, hier Libye) contre "l'Empire" des USA et de leurs proches alliés, doit être critiqué sans concession dans ses contradictions avec les masses populaires laborieuses et son opposition de gauche (progressiste et révolutionnaire), combattu lorsqu'il perpètre des actes aussi réactionnaires que livrer des militant-e-s à des États semi-fascistes (Colombie, "Espagne"), mais toujours fermement défendu contre les menées réactionnaires de la vieille droite oligarchique puntofijiste et de l'impérialisme (principalement) US. Clairement : renversement du bolivarisme par une révolution populaire, anticapitaliste et anti-impérialiste, 100 fois oui, comme y appellent ces camarades du Mouvement Guévariste Révolutionnaire dont nous avons publié la brillante analyse il y a quelques mois ; mais renversement par des néo-Pinochets fussent-ils "en civil", NON, le niveau actuel de conscience et de mobilisation des masses populaires ne pouvant être surmonté par l'oligarchie réactionnaire qu'au 1849649 3 3d6f le-president-par-interim-du-venezuela da90deprix du massacre de milliers de personnes, ce qu'aucun révolutionnaire ou progressiste digne de ce nom ne peut accepter. Telle est notre position de communistes et nous n'y renoncerons jamais ; nous la maintenons fermement depuis maintenant plus de 4 ans sous les crachats tant des adorateurs béats du "socialisme du 21e siècle", qui hurlent au "trotsko-maoïsme", que des dogmato-gauchistes qui compensent par le sectarisme et les "lignes de démarcation claires" la vacuité de leur pensée, de leur stratégie et de leur pratique révolutionnaire (et nous traitent évidemment de "trotskystes" lorsqu'ils sont "staliniens" et inversement, de "révisionnistes", d'"opportunistes" ou carrément de "nationalistes révolutionnaires" etc. etc.).

    Cependant, il faut bien être clairs (et dialectiques !) : les choses ne tombent pas non plus du ciel, et si le gouvernement de Maduro est actuellement déstabilisé, c’est que l’opposition réactionnaire a su profiter de ses faiblesses. Nicolás Maduro n’a été élu en avril dernier (après la mort de Chávez) que d’une très courte tête (50,62% !) et Chávez lui-même, six mois plus tôt, par 55% seulement. L’assise populaire du "socialisme bolivarien" s’effrite inexorablement, comme l’ont bien expliqué les camarades du MGR ; car le "processus" a atteint ses claires et indépassables limites (bourgeoises) de classe. En ce sens, les appels du PCV à "approfondir le processus #LAFOTO JAVU, movimiento de la extrema derecha en #Venezuelrévolutionnaire" face aux menées de la droite sont de purs prêches dans le désert, dès lors qu’il n’a pas compris que cet "approfondissement" ne relève pas de la classe au pouvoir : la gauche bourgeoise "bolivarienne"[1] qui voulait simplement desserrer l’étau impérialiste sur le pays (qu’elle y soit parvenue et dans quelle mesure est un vaste débat) ; mais bien des masses populaires et de leur révolution démocratique anticapitaliste, anti-impérialiste et agraire sous la direction d’un Parti révolutionnaire conséquent.

    En tant que gouvernement d’État (à bien différencier de "l’État profond", avec lequel il est en conflit quasi-permanent), le gouvernement "socialiste" du Venezuela fait partie de ce que les marxistes conséquents appellent une force intermédiaire : une force envers laquelle notre attitude (de communistes) varie et s’adapte en fonction des circonstances, de ce qu'elle dit et/ou fait à un moment donné ; un peu comme la "petite bourgeoisie" (les classes moyennes) dans la société de classe d'un pays donné. C'est en ayant cela bien fermement en tête que l'on peut avancer et prendre position sur les évènements de ce vaste monde, envers et contre le terrorisme intellectuel des uns ou des autres. Si l'on prend par exemple le Hezbollah libanais : appréciation positive lorsqu'il inflige une défaite morale à l'armée sioniste (en 2006 ou déjà en 2000, avec le retrait du Liban), mais appréciation négative lorsqu'il va aider son ami Assad à massacrer le Peuple syrien. D'aucuns nous diront que nous "distribuons les bons et les mauvais points", "depuis notre clavier" bien sûr au cas où quelqu'un supposerait que nous écrivons depuis un mobile sous les obus à Alep... Grand bien leur fasse ; cela ne changera pas notre position d'un iota. Qu'ils reviennent, éventuellement, avec 1400 articles à raison d'au moins une demi-douzaine par mois, d'analyse et de positions sur les évènements de la planète entre les mains et on en reparlera.

    1201017

    En Ukraine, les choses prennent malheureusement la tournure prévue. À Kiev, le gouvernement "d'union nationale" pro-UE a été présenté directement (pour acclamation) à la foule de la place Maïdan. Au premier rang devant la tribune, bras croisés, on a pu voir clairement les membres de la 6131809-9157372"milice d'autodéfense" de la place, les nazis de Svoboda et compagnie... Dans les régions que cette "opposition" (désormais maîtresse du pays) contrôle depuis plusieurs semaines, comme à Lviv (Galicie, ouest nationaliste), il ne fait pas bon être "rouge" : le secrétaire du PC local a été sauvagement torturé par des (probables) partisans de Svoboda. Dans le centre du pays (Cherkassy), des bus ont été arrêtés et leurs passagers violemment tabassés ; les auteurs et les victimes ne sont pas chose claire : pour ce site castillan (anti-Maïdan), qui parle même de morts, ce sont des nationalistes ukrainiens qui ont attaqué des pro-Ianoukovitch allant contre-manifester à Kiev ; mais pour ce site d'extrême-droite pro-russe (comme l'essentiel de l'extrême-droite BBR) ce sont au contraire de valeureux habitants "anti-ordre-mondial" (pro-russes) qui ont intercepté des EuroMaïdan. La violence des faits demeure la seule 200583937certitude. En Crimée par contre (nous en avions déjà parlé), les pro-russes sont clairement hégémoniques ; à vrai dire, on se sent russe et le drapeau de la Fédération a même carrément été hissé sur le Parlement local (c'est une province autonome avec son propre Parlement). Après tout, la région n'a été rattachée à l'Ukraine qu'en 1954, "cadeau" de Khrouchtchev à son pays natal. De violents affrontements ont opposé les partisans de la Russie (qui a au demeurant une base navale à Sebastopol) à ceux du nouveau pouvoir ukrainien. Ces derniers sont principalement des Tatars, une minorité (250.000 personnes, 12% seulement de la population de la presqu'île) turcophone et majoritairement musulmane. Si la situation dégénère, on sait hélas ce que cela veut dire... De son côté, Poutine a mis ses troupes en état d'alerte dans les régions frontalières de l'Ukraine, dans la perspective évidente d'intervenir en appui à d'éventuelles régions sécessionnistes (Kharkov, Donetsk ou Crimée), comme la Russie l'a déjà fait par le passé (Ossétie et Abkhazie en Géorgie). La conflagration-massacre semble s'approcher à grands pas.

           crimee-simferopol-ukraine 4798330200592953
           Srt-1024x647lQ0bfuS47k
           1391005999 984629 75-1

    En fait, les contradictions inter-impérialistes entre bloc occidental UE-US et "nouvel Est" (Russie, Chine, "BRICS") ont atteint un tel niveau que nous assistons simultanément à deux "révolutions colorées" sur deux continents différents, dont l'une (au moins) pourrait bientôt dégénérer en guerre civile réactionnaire selon un "scénario yougoslave".

    centraf quenelle militairesAutre théâtre d'opérations inter-impérialistes, cette fois entre Soudan-donc-Chine ("Chinafrique") et Françafrique : la Centrafrique où l'intervention BBR "Sangaris" vient d'être prolongée par le Parlement (428 voix contre 14 à l'Assemblée et 328 contre 3 au Sénat), ce qui en dit long sur l'Union sacrée néo-colonialiste de nos chers élus. Mais que voulez-vous, il faut bien que le nouveau génocide made in France se poursuive en toute tranquillité, jusqu'à ce que les machettes des partisans antibalakas de l'ami Bozizé (admirez le pedigree, il vaut le détour !) aient reconquis chaque centimètre de terrain. Ce nouveau génocide a d'ores et déjà fait un bon million de déplacés (dont 250.000 à l'extérieur du pays), quant aux morts on ne sait pas trop mais à coup de 50 par-ci, 70 par-là, le compteur à l'air de tourner vite. Ce qui est certain, c'est que les témoignages s'accumulent quant à une complicité active des troupes françaises avec les antibalakas. 

    L'Immonde nous rejoue sa bonne vieille position négationniste intellectuelle-de-gauche déjà expérimentée lors du génocide rwandais, clamant en gros titre "Centrafrique : attention aux mots". Et pour ne rien arranger, AQMI s'en mêle, promettant de venger les musulmans assassinés (Boko Haram s'était déjà exprimé dans ce sens il y a 15 jours)...

    611803-000 par7760906

    Voilà donc pour ce rapide petit "tour" du monde que nous offre le capitalisme impérialiste. Une impression latente, en fait, de revenir perpétuellement 10 ans, 20 ans ou 25 ans en arrière, au temps des déstabilisations contre Chavez dans les années 2000-2005 (et bien avant cela, au Chili sous Allende), au temps des guerres de Yougoslavie (1991-95) et de la guerre civile et du génocide rwandais (1990-94). Une impression de tourner en rond. Nous laissons tout-e un-e chacun-e méditer à la viabilité de ce monde, et aux moyens d'en finir avec lui.

    Il y aura d’autres flashs infos réguliers comme celui-là. À bientôt.

     


    [1] Une aile gauche des différentes classes bourgeoises existant dans ce pays dominé : bourgeoisie compradore (entrepreneurs privés intermédiaires ‘classiques’ de l’impérialisme) et bureaucratique (liée à l’appareil d’État dans des ‘monopoles’ sur les productions essentielles du pays, comme le pétrole au Venezuela et dans beaucoup de pays) , moyenne et petite bourgeoisie ‘nationale’ (base d’accumulation dans le pays et lui seul) et même peut-être certains éléments de la grande propriété agricole, même si ceux-ci sont généralement les plus farouchement réactionnaires (bloquant toute ‘solution négociée’ avec les FARC en Colombie par exemple, cette ‘solution’ ayant pour prérequis une réforme agraire).

     


    votre commentaire
  • Nous avons décidé – à l'unanimité plus un  – de mettre en place cette nouvelle formule permettant de faciliter la lisibilité du site, entre l'aspect (fondamental) "prise de position" et l'aspect de pure "information des masses".

    Désormais, chaque semaine (plus ou moins, fréquence variable selon la "charge" d'actualité), un article présentera une sélection d'articles de presse révolutionnaires que nous aurons jugé intéressants à partager avec nos lecteurs ; dès lors que ces articles n'appellent pas de notre part une prise de position particulière.

    Cette semaine nous vous proposons :

    - Kurdes de Syrie : «Nous ne voulons pas dresser de nouvelles frontières » (avanti.be) (interview d'un dirigeant du PYD, le "PKK de Syrie")


    Kurds


    - Sur les évènements du week-end à Nantes/Naoned : NDDL : mobilisation sans précédent samedi à Nantes !


    1495241_10151906280901078_974670479_o


    Voir aussi : http://www.rennestv.fr/catalogue/web-tv/nddl-manifestation-du-22-fevrier-a-nantes-affrontements-ultra-violents-avec-les-crs.html 

    - En Ukraine, alors que les "européistes" ultra-nationalistes, russophobes et violemment anticommunistes (et antisémites) triomphent, des communistes montent la garde autour des statues de Lénine dans l'Est du pays (cliquer sur les images pour les liens). Nous laisserons de côté (si vous le voulez bien) les débats et autres invectives (plus nombrilistes qu'autre chose) sur le caractère "révisionniste", "brejnévien" ou "stalinien" etc. etc. de ces forces : la situation dans ces pays, qui ont connu la tentative d'édification d'une société socialiste (quelles qu'aient été les imperfections, les erreurs, les dérives, bref tout ce qui n'est pas notre conception du socialisme dans cette tentative) avant d'être brutalement ramenés aux joies de la "démocratie de marché", est de toute manière complexe. Contentons-nous d'admirer l'attachement admirable de toute une partie des masses populaires envers le "père" de la Révolution d'Octobre et de la première vague révolutionnaire mondiale ; pendant que d'autres exhibent fièrement les portraits d'Hitler et/ou d'autres kollabos-SS :


    http://news.bbcimg.co.uk/media/images/73167000/jpg/_73167102_73167100.jpghttp://4.bp.blogspot.com/-RG2V61vLw1I/Uwo7iyc1DtI/AAAAAAAAATE/AB0GtPWJ1Sc/s1600/1926847_10152218308688954_193543957_n.jpg


    - Retour en Hexagone, plus exactement chez nous en Occitanie, à Toulouse/Tolosa où se déroulait ce samedi une grande manifestation antifasciste suite à des inscriptions homophobes, antisémites, racistes, néo-nazies etc. disséminées dans toute la ville. Les camarades maoïstes de l'OCML-VP (et les autres forces militant-e-s présentes) ont réaffirmé le caractère RÉVOLUTIONNAIRE, POPULAIRE et AUTONOME de la lutte antifasciste ; en procédant notamment à l'expulsion d'un politicien UMP (sa présence était un comble après 10 ans de sarkozysme... et vu sa position sur le mariage pour tous !) mais aussi de la représentante du CRIF, par-l'odeur-alléchée d'un possible "coup" confusionniste vu le caractère antisémite de certains graffitis dénoncés. Il lui a été signifié que pour tout-e révolutionnaire ou progressiste conséquent-e, le sionisme et sa politique colonialiste et d'apartheid en Palestine EST UN FASCISME au même titre que l'antisémitisme de Dieudonné ou autres, dont il se nourrit d'ailleurs et reprend l'essentiel des présupposés. Et par conséquent que le CRIF (devenu depuis des années l'avocat systématique des pires crimes de la politique israélienne, sans même parler de ses prises de position politiques intérieures) n'avait pas sa place dans une telle manifestation : Le CRIF n'a pas sa place dans les manifestations antiracistes à Toulouse comme ailleurs ! [de la même façon que - par exemple - un Sébastien Chenu, ex-dirigeant-fondateur de GayLib (officine de l'UMP puis de l'UDI) passé depuis au Rassemblement Bleu Marine, n'aurait pas sa place dans une manif suite à l'agression de personnes LGBT].


    http://www.vp-partisan.org/IMG/jpg/dsc_0634.jpg


    Évidemment cela n'a pas plu aux intéressés (qui hurlent comme d'habitude à la "haine des Juifs", autrement dit à l'antisémitisme), aux ratonneurs de la LDJ ni sans doute aux pseudo-"antifascistes" qui confondent union des progressistes contre le fascisme et alliance avec les républicains bourgeois pro-sionistes contre l'antisémitisme de Dieudonné, ce qui n'est pourtant clairement pas la même chose pour tout cerveau à peu près sain.... Et cela aura accessoirement permis au responsable local du Front de Gauche d'étaler toute sa veulerie et sa conception d'un "antifascisme" républicain bien petit-bourgeois comme il faut.

    - Enfin, le site Solidarité Ouvrière (communiste-ouvrier) permet toujours un suivi régulier et assez exhaustif des évènements en ex-Yougoslavie (particulièrement en Bosnie) : https://communismeouvrier.wordpress.com/category/zone-geographique/bosnie-herzegovine/


    tuzla18

     


    votre commentaire

  • UkrainLa situation en Ukraine vient de franchir un nouveau seuil de violence (60 à 80 mort-e-s au cours des derniers jours) qui semble conduire le pays au bord de la guerre civile réactionnaire. L’enjeu – le même depuis 10 ans – est son appartenance à l’orbite impérialiste russe (comme la Biélorussie voisine par exemple) ou à celle de l’Union impérialiste (ouest-) européenne, notamment de l’Allemagne qui y a toujours vu une partie ‘naturelle’ de son Lebensraum, son espace vital’ (tout du moins) économique – d’où, par exemple, l’affaire montée en épingle (par Goebbels et le groupe de presse philo-nazi Hearst) de la ‘famine’ ukrainienne au début des années 1930. Plus largement, elle est aujourd'hui une pièce maîtresse (46 millions de producteurs et de consommateurs !) du "Grand Échiquier", cette théorie consistant, après la chute de l'URSS, à en dépecer les restes (voire, en dernier lieu, la Russie elle-même !) au profit des impérialismes occidentaux, afin d'empêcher à tout prix la constitution d'une superpuissance russe sur l'"Eurasie". L'Union européenne exerçant une fascination certaine sur les peuples voisins qui n'en font pas partie, elle est évidemment mise à contribution comme "mirage mobilisateur", alors même qu'elle est en crise terminale et que les années qui lui restent sont - sans aucun doute - comptées.

    Le camp pro-russe s’étend du ‘Parti des Régions’ (droite oligarcho-mafieuse) du président en place Yanoukovitch jusqu’au Parti ‘communiste’ refondé en 1993 et nostalgique du social-impérialisme soviétique – dont la prose est évidemment relayée par tout le ‘révisio-campisme’ international de la mouvance PTB-KKE-‘Solidarité internationale PCF’ et compagnie. Il a ses bastions dans l'Est (région de Donetsk, Kharkov etc.) et le Sud (côtes de la Mer Noire, notamment Crimée) du pays.

    Mais le camp pro-européen, lui, s’il s’est offert les services de BHL et compte effectivement des forces social-démocrates ou social-libérales (Parti socialiste d'Oleksandr Moroz etc.) ou encore libérales-démocrates comme l'Alliance démocratique de l'ancien boxeur Vitali Klitchko, s’avère désormais très clairement dominé par des nationalistes d’extrême-droite extrêmement virulents et dangereux. Ils sont pour la plupart originaires de l’Ouest du pays, la partie qui n’a pas été soviétique (mais polonaise, ou tchécoslovaque) de 1920 jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, et avait donc servi de base de repli à tous les nationalistes anticommunistes comme les pogromistes de l’hetman Petlioura (responsables de la mort d’une centaine de milliers de Juifs, justice fut faite à Paris par le révolutionnaire Samuel Schwartzbad en 1926). Par la suite, ce nationalisme réactionnaire évoluera vers le pro-nazisme avec Stepan Bandera et servira massivement d’auxiliaire slave au IIIe Reich pendant sa guerre d’extermination en Europe de l’Est, avec la Légion ukrainienne, la division SS Galicie, les Hiwis auxiliaires volontaires de l’extermination des Juifs, des Rroms, des communistes et de bien d'autres crimes, etc. Il poursuivra même la guérilla anti-soviétique pendant plusieurs années après la guerre, appuyé cette fois-ci par le ‘monde libre’ sans le moindre état d'âme.

    Voilà donc de quels monstres la course à la guerre pour le repartage impérialiste du monde permet la résurgence, comme troupes mercenaires. Il y en a déjà et il y en aura à l’avenir beaucoup d’autres, dans tous les camps en présence (impérialisme US comme Russie, France ou Allemagne comme Chine) : si les énergumènes de la place Maïdan sont violemment indépendantistes et anti-russes, il y a en Russie une très puissante extrême-droite qui, si elle peut être en bisbille avec Poutine, voit en tout cas en Kiev le ‘berceau de la Russie’ un peu comme le Kosovo pour les fascistes grand-serbes, et certainement pas un pays indépendant. Ils ne sont donc pas franchement les amis des néo-bandéristes ukrainiens, sans être pour autant plus recommandables. Il ne sera évidemment pas question dans les pages de Servir le Peuple de ‘campisme’ ni d’anti-impérialisme/antifascisme à sens unique. En Ukraine même, des militants anarchistes locaux (qui semblent sur une ligne ni-ni à penchants pro-opposition) font état, du côté du pouvoir pro-russe de Yanoukovitch, d'escadrons de la mort et d'autres forces antipopulaires guère plus sympathiques que les nostalgiques de la collaboration avec le nazisme [*]. D'ailleurs (à toute chose malheur étant bon), ce dossier ukrainien intervient à un moment où la ligne "eurorussiste" [pour un fascisme identitaire européen incluant et même célébrant la Russie mais refusant l'"eurasisme" de Douguine, c'est-à-dire les alliances chinoise et asiatiques, iranienne, arabe et "tiers-mondistes" en général] a plus ou moins acquis l'hégémonie sur le fascisme hexagonal et ouest-européen ; et il est plutôt agréable de voir ses tenants s'arracher les cheveux, entre leur demi-dieu Poutine d'un côté et, de l'autre, des national-fascistes arborant fièrement le drapeau européen bleu étoilé et souhaitant rejoindre l'Europe-puissance (l'intellectuel organique Guillaume Faye, lui, a finalement tranché en faveur de Poutine et du pouvoir pro-russe).

    2Mais les fascistes qui, face aux forces de sécurité, mettent en ce moment même Kiev à feu et à sang font l’actualité et, dans le même temps, guère d’efforts pour se cacher ; ce qui au demeurant en dit long sur de quoi sont capables (qui sont capables de soutenir sans honte) les impérialistes ouest-européens en crise terminale et aux abois, au moment même où en Centrafrique semble se profiler un nouveau Rwanda. Ils nous offrent donc une ‘belle’ et – surtout – massive illustration de notre propos.

    Il est intéressant et important de dire cela, car la mouvance antifasciste des pays occidentaux tend peut-être parfois à ‘prendre le problème à l’envers’ : ce n’est pas le fascisme qui engendre la guerre, c’est la tendance mondiale à la guerre qui sécrète le fascisme comme forme politique adaptée à ses besoins ; fascisme qui va dans un premier temps ‘pulluler’ sous de multiples formes jusqu’à ce que tant la volonté des pouvoirs dominants que les évènements eux-mêmes procèdent à une ‘sélection naturelle’, seules survivant les formes les plus ‘efficaces’.

    ‘Efficacité’ qui consiste, bien entendu, à massacrer par milliers des personnes du peuple qui n’aspirent qu’à vivre leur vie en paix, et à terroriser toutes personnes organisées porteuses d’une perspective progressiste d’avenir. Ces personnes – est-il utile de le rappeler – existent en Ukraine comme dans tous les ‘pays de l’Est’ et, face à l’omniprésence des forces réactionnaires terroristes, sont depuis longtemps organisées pour leur autodéfense antifasciste.

    Des antifascistes nord-américains leur ont donné la parole, entrevue traduite par l’AA Paris Banlieue et reprise sur le site Coutoentrelesdents :

    Interview de l’Action Antifasciste Ukraine


    Sascha, Andrei et Mira sont membres de l’Union Antifasciste Ukrainienne, un groupe qui surveille et combat le fascisme en Ukraine.

    Nous nous sommes assis pour parler de l’influence du fascisme sur EuroMaidan, voilà ce qu’ils m’ont dit :

    Sascha : Il y a beaucoup de Nationalistes ici, dont des nazis. Ils viennent de toute l’Ukraine, et ils représentent environ 30% des manifestants.

    Mira : Les deux plus gros groupes sont Svoboda et Pravy Sektor (Secteur Droit ou "de Droite"). Les forces de défense ne sont pas à 100% du Pravy mais beaucoup le sont.

    S : Svoboda est un groupe légal, mais ils ont aussi une faction illégale. Pravy Sektor est plus illégal, mais ils veulent prendre la place de Svoboda.

    M : Il y a beaucoup de querelles entre Pravy et Svoboda. Ils ont travaillé ensemble pendant les violences, mais maintenant que tout est calme ils ont le temps de se focaliser les uns sur les autres. Pravy et Svoboda reçoivent tous les deux des dons et ils ont beaucoup d’argent.

    Pravy a récemment eu de tout nouveaux uniformes, des treillis militaires. L’une des pires choses est que Pravy a sa structure officielle. Ils sont coordonnés. Tu as besoin de laissez-passer pour aller sur certaines places. Ils ont le pouvoir de donner ou de ne pas donner la permission aux gens d’être actifs. Nous essayons d’être actifs mais nous devons éviter les nazis, et je ne vais pas demander la permission à des nazis !

    S : Un groupe de 100 anarchistes a essayé d’organiser leur propre groupe d’autodéfense, différents groupes anarchistes sont venu ensemble pour un meeting sur le Maidan. Pendant qu’ils faisaient leur meeting, un groupe de nazis est arrivé en plus grand nombre, ils avaient des haches, des battes de baseball, des bâtons et des casques, ils ont dit que c’était leur territoire. Ils ont appelé les anarchistes « juifs », « noirs », « communistes ». Ils n’étaient même pas communistes, c’était juste une insulte. Les anarchistes ne s’attendaient pas à ça et ils sont parti. Les gens qui ont des visions politiques différentes ne peuvent pas rester sur certaines places, ils ne sont pas tolérés.

    M : Plus tôt, une tente stalinienne a été attaquée par des nazis [NDLR : nous ne savons pas trop de quelle organisation ils parlent les camarades, les "staliniens" en Ukraine étant plutôt du côté de Yanoukovitch]. Une personne a été envoyée à l’hôpital. Un autre étudiant a dénoncé le fascisme et il a été attaqué. Pravy Sektor a beaucoup attiré l’attention après les premières violences, les médias leur ont donné de la popularité et ils ont commencé à croire qu’ils étaient des gars cool. Pravy existait déjà avant, mais maintenant ils grandissent et ils attirent beaucoup de nouvelles personnes.

    S : Après ça Pravy a recruté beaucoup de jeunes gens. Ils ont de l’argent pour faire de la propagande, des uniformes, ils attirent l’attention et ils ont l’air cool. 


    Un groupe de jeunes hommes qui ont récemment rejoint la Milice de Défense.Un groupe de jeunes hommes qui ont récemment rejoint la Milice de Défense.


    M : L’Ukraine est un pays patriarcal alors être un homme fort qui combat est une bonne chose.

    S : Les groupes nazis essayent également d’imiter les gauchistes, d’essayer de les intégrer. Ils utilisent un vocabulaire anarchiste, des mots comme « autonomes ». C’est ce qu’est en train de faire l’un des plus affreux groupe nazi en s’appelant « Résistance Autonome ». Ils ont beaucoup de succès avec cette tactique. Ils attirent quelques anarchistes qui pensent qu’ils font changer les nazis, alors qu’en vérité c’est les nazis qui sont en train de les changer. Ils deviennent plus nationalistes, ils ont des visions plus antiféministes, etc. C’est maintenant que les anarchistes doivent s’exprimer et se faire entendre.

    Deux symboles que l’on peut retrouver à EuroMaidan. La croix celtique (en haut) est un symbole commun qui représente la suprématie blanche. La Wolfsangel (en bas) était un symbole utilisé par différentes divisions SS pendant la seconde guerre mondiale et représente maintenant le Néonazisme:

                                              stormfrontwolfsangel


    S : Tout l’éventail nationaliste est représenté. Ils se divisent entre groupes qui ont leurs propres symboles. Ils veulent du soutient alors ils n’utilisent pas tant de symboles nazis ou fascistes que ça. Ils utilisent des symboles reconnaissables par d’autres fascistes, mais qui sont inconnus pour les autres gens. Par exemple il y a le symbole d’un aigle spéciale. Il est dessiné de telle manière qu’il ne ressemble à rien à moins que tu connaisses la signification.

    Personnes n’a idée de comment les choses vont tourner, quelle forme va prendre le nouveau gouvernement. Les groupes fascistes n’ont pas de but communs, ils savent à quoi ils sont opposés, et qu’ils sont opposés les uns aux autres, mais ils ne veulent pas tous la même chose. Si Pravy a une place dans un nouveau gouvernement, ce serait vraiment dangereux, mais c’est impossible, ils ne sont pas assez puissants pour ça.

    M : Les gens chantent ces slogans : « Gloire à l’Ukraine », « Gloire aux Héros », « Mort aux ennemis ». Mais qui sont ces héros, qui sont ces ennemis ? Je pense qu’ils n’en ont pas idée. « L’Ukraine avant tout » en est un autre, comme ils chantent en Allemagne.

    Andrei : Je viens d’Allemagne et je pense que le nationalisme en Ukraine date de la chute de l’URSS. Le sentiment nationaliste à Maidan est là pour diviser les gens. L’Est de l’Ukraine est pro-russe, l’Ouest est nationaliste.

    Les gens sont plutôt divisés, mais si tu regardes le pays tout entier, tout le monde a les mêmes problèmes sociaux et économiques. Si les gens s’en rendaient compte et venaient ensemble, ce serait le plus gros danger pour Svoboda, ou Yanukovich, ou n’importe quel parti politique. Svoboda et Yanukovich défendent la même politique néolibérale qui empire la vie des ukrainiens.

    M : Ces nationalistes sont là non pas pour défendre leurs droits mais pour défendre la nation, et c’est pratique pour les leaders d’encourager ça, parce que pendant que les gens se concentrent sur des questions nationalistes, ils peuvent faire ce qu’ils veulent. Il y a surtout des ouvriers et des pauvres à EuroMaidan, et il faut détourner leur attention des problèmes réels. Beaucoup de gens veulent manipuler les gens ici…” 


    Un symbole accroché à une tente à EuroMaidan : « Ultra-Radical Pacifist »Un symbole accroché à une tente à EuroMaidan : « Ultra-Radical Pacifist »


    Traduit par des camarades depuis ce site.



    [*] Un autre article (presse bourgeoise) évoque une "milice cosaque de Sébastopol" en Crimée, dirigée par un certain Mareta qui en appelle à l'intervention russe "comme en Ossétie" - la Crimée, rattachée à l'Ukraine en 1954 seulement et ultra-majoritairement russe, russophone et russophile (avec une minorité indigène tatare alliée tactique des nationalistes ukrainiens), pourrait effectivement bien s'acheminer vers la sécession... Quant à l'affirmation "cosaque", elle renvoie à ces troupes de cavaliers du tsar qui formèrent souvent l'élite des armées blanches anticommunistes, en Ukraine et en Russie du Sud, durant la guerre civile (1918-21, la République anti-bolchévique du Don comprenait Donetsk, bastion des pro-russes aujourd'hui) et encore pendant l'invasion nazie... à méditer pour ceux et celles qui croiraient simplistement que pro-russe = "antifasciste".

    Il faut cependant souligner, pour être absolument juste, que cette "cosaquerie" (lire son histoire ici : wiki/Cosaques) notamment zaporogue n'a pas non plus toujours été cela : ce sont à l'origine des communautés slaves (mêlées à d'autres populations, notamment tatares) et (généralement) orthodoxes mais "libres", souvent nomades d'ailleurs, parlant une langue composite (mêlant russe, ukrainien, polonais, turc etc.) et vivant dans les "champs sauvages" (la steppe pontique) de l'Est et du Sud de l'actuelle Ukraine où ils échappaient tant à l'autorité de l'Empire polono-lituanien que des Tatars vassaux des Ottomans (les Zaporogues sont célèbres pour une de leurs missives adressée au sultan)... et de la Russie, s'organisant de fait en républiques démocratiques farouchement attachées à leurs libertés. Ce n'est que tardivement (fin 17e, 18e siècle) qu'ils feront allégeance à Moscou pour conquérir (notamment) les territoires tatars et repousser les Polonais, mais cette relation n'ira jamais sans contradictions et conflits (notamment avec la tsarine "despote éclairée" Catherine II, qui écrasera leurs révoltes - Pougatchev - et supprimera leurs institutions libres avant d'introduire le servage dans le pays). Si beaucoup seront "blancs" lors de la Révolution bolchévique, et d'autres encore pro-nazis durant la Seconde Guerre mondiale, beaucoup se rallieront aussi dès le début à l'Armée rouge tandis que finalement, le plus pur "esprit cosaque" originel (égalitariste, démocratique et "libre" de toute tutelle extérieure) se trouvait peut-être dans l'Armée "révolutionnaire insurrectionnelle" anarchiste de Nestor Makhno (dont le territoire correspondait pratiquement à celui de la cosaquerie zaporogue du 17e siècle !). Bien évidemment les divisions de classe joueront un rôle fondamental dans ces différents positionnements, étant donné qu'après l'introduction du servage et (globalement) de l'ordre social russe par Catherine II les "hordes" cosaques perdirent leur farouche égalitarisme des 16e-17e siècles : les chefs devinrent des aristocrates (et un corps de cavalerie d'élite en temps de guerre) tandis que le "commun", les Cosaques "de base" devinrent pauvres fermiers voire serfs, d'autres encore des koulaks (paysans libres et aisés, employant souvent des journaliers) etc. etc. - un mécanisme faisant penser à la dissolution des clans écossais entre les 17e et 19e siècles, les chefs de transformant en landlords, la "base" en pauvres métayers expulsés pour céder la place aux moutons etc. Ce sont donc essentiellement des Cosaques possédants qui s'opposeront farouchement à la Révolution bolchévique et iront (pour certains) jusqu'à servir sous l'uniforme nazi en invoquant un "génocide communiste" contre leur Peuple et leur culture, leurs "traditions" etc. etc. ; tandis que les masses paysannes pauvres (passées par le servage jusqu'en 1861) se diviseront entre aliéné-e-s suivant les premiers et d'autres qui, conscient-e-s, comprendront leur intérêt de classe dans le socialisme et le communisme (fut-ce le communisme anarchiste et rejetant le léninisme de Makhno). Les "colons russes" (pour reprendre la terminologie imbécile de certains...) de l'Est et du Sud de l'Ukraine (ainsi que de Crimée) sont donc en réalité, pour la plupart, des descendants de ces Cosaques zaporogues - bien que l'introduction du servage et (surtout) l'industrialisation aient aussi amené d'autres apports de population russe par la suite. 

    L'Europe de l'Est (depuis les frontières allemandes, autrichiennes et italiennes jusqu'à l'Oural) a de toute manière une histoire et (encore) une réalité présente d'une telle complexité, faite de questions et de luttes nationales parfaitement légitimes mais profondément traversées par les luttes de classes (et aux expressions parfois très réactionnaires !) ainsi que de menées impérialistes et expansionnistes pour l'"espace vital" prenant appui sur ces aspirations (dans leur expression bourgeoise), qu'il est tout simplement interdit d'y appliquer abstraitement des schémas du style "X est un colonisateur, Y est colonisé" (car Y prenant le dessus peut parfois se révéler plus oppresseur et "nettoyeur ethnique" que X ne l'a jamais été...) ; quand bien même une puissance clairement impérialiste comme la Russie serait impliquée (mais voilà, à en écouter ou lire certains, on aurait presque l'impression qu'elle est le SEUL impérialisme impliqué dans cette crise ukrainienne !). Lénine était déjà très clair là-dessus à l'époque de sa théorisation de l'impérialisme et de sa lutte contre la Première Guerre mondiale (1914-18) : il distinguait nettement trois groupes de pays dont l'un, consistant en l'Europe centrale et orientale déjà (à l'époque) théâtre de puissantes luttes nationales et enjeu de tous les appétits impérialistes (russes, allemands, autrichiens, français etc.), ne pouvait se voir appliquer les même analyses et prises de positions que les deux autres - à savoir les pays impérialistes d'Europe occidentale et d'Amérique du Nord et les pays colonisés ou semi-colonisés d'Afrique, d'Asie et d'Amérique latine. Il posait dès lors, pour ce grand ensemble est-européen, deux principes essentiels qui ont gardé toute leur actualité : un droit absolu des Peuples à l'autodétermination allant jusqu'au droit (mais pas l'obligation !) à la sécession (car "la liberté de se fédérer passe obligatoirement par la liberté de se séparer") ; mais aussi une impérieuse nécessité de convergence (dans le même intérêt de classe et les luttes communes) des différentes classes ouvrières et autres classes exploitées nationales, assortie d'une vigilance de chaque instant envers les nationalismes bourgeois et leurs quasi-systématiques mises au service de l'impérialisme (pour se créer des protectorats ou, après la Révolution d'Octobre, pour encercler et attaquer celle-ci) - il combattit ainsi implacablement les nationalistes ukrainiens de Petlioura et de Skoropadsky, qui n'étaient en fait pas grand-chose d'autre qu'une force compradore et contre-révolutionnaire entre les mains de l'Allemagne et de l'Autriche (qui occupaient alors l'Ukraine après la paix de Brest-Litovsk).

    Pour revenir à notre sujet, la réalité c'est que l'Ukraine est historiquement partagée (depuis le Moyen Âge, lire notamment ce très bon exposé historique) entre un Ouest qui regarde vers la Pologne et l'Europe centrale et un Est (et Sud) tourné vers la Russie (qui a éliminé au 18e siècle, grâce aux Cosaques justement, les khanats tatars héritiers de la Horde d'Or turco-mongole et alliés aux Ottomans) ; plus spécifiquement vers la Russie du Sud qui fait partie de la même steppe eurasienne, longtemps domaine des peuples de cavaliers nomades asiatiques (Sarmates, Khazars, Petchenègues, Koumans et enfin Tatars) avant que Moscou ne s'y impose progressivement entre les 16e et 18e siècles. Ce caractère de confins (entre Moscovie/Russie, Pologne-Lituanie et Tatars/Ottomans), de zone frontière a d'ailleurs vraisemblablement donné son nom au pays : U-krajina, étymologie que l'on retrouve dans la Krajina (ancienne zone frontalière avec l'Empire ottoman) en Yougoslavie.

    Les nationalistes ukrainiens (notamment ceux de la première indépendance, 1918-20) se sont souvent réclamés de l'"État cosaque" des 16e-18e siècles, effectivement assez central (sur le fleuve Dniepr) par rapport à l'Ukraine actuelle ; leurs leaders (Skoropadsky, Petlioura) se parant souvent des titres d'"hetman" ou "ataman" et leur parlement prenant le nom de Rada (c'est aussi le nom du Parlement ukrainien aujourd'hui), comme l'assemblée des guerriers cosaques dans le sitch (campement fortifié "capitale") zaporogue de naguère. Pourtant, la réalité c'est que dès le milieu du 17e siècle ces Cosaques se divisent entre l'Est et l'Ouest du fleuve, les uns regardant vers la Ruthénie (Pologne-Lituanie, "vraie Ukraine" nationaliste actuelle) qu'ils intègrent petit à petit nationalement et les autres vers la Russie impériale, dont ils deviendront pour certains les plus fidèles serviteurs (y compris, donc, contre le bolchévisme à partir de 1917 ; même si beaucoup se rallieront aussi à la Révolution d'Octobre et défendront farouchement le pouvoir soviétique contre la guerre d'extermination nazie).

    C'est ce clivage que l'on retrouve aujourd'hui entre une Ukraine "cosaque" ou "Nouvelle Russie"/Novorossiya, se sentant finalement proche de la Russie du Sud, et une Ukraine "ruthène" (Rusyn, terme d'ailleurs préféré à "ukrainien" jusqu'à la fin du 19e siècle) anti-russe avec d'autant plus de force que l'on va vers l'Ouest (Galicie et Volhynie, rattachées à l'URSS en 1939 puis 1945 seulement et sièges - il y a bien plus longtemps en arrière - d'une principauté médiévale "matrice" de la nation ukrainienne proprement dite).

    La période soviétique justement, autre paramètre historique incontournable (dont tous ces territoires s'inscrivent dans la "légende" et l'"épopée", notamment contre l'invasion nazie), viendra encore renforcer le sentiment d'unité et d'artificialité de la frontière entre Russie du Sud et Est de l'Ukraine ; le Donbass industriel (ou encore la région de Kharkov) mêlant allègrement Russes, Ukrainiens et autres nationalités et la définition comme "soviétiques" venant souvent mettre un point final au questionnement identitaire [tandis qu'en Ukraine ruthène (Galicie-Volhynie-Podolie), après une décennie 1920 de grande mise en avant démocratique de la culture ukrainienne, la russification "jacobine" initiée dès les années 1930 par Staline verra s'accroître et s'ancrer le ressentiment nationaliste].

    C'est donc avec méfiance que ces régions accueilleront la dissolution de l'URSS et l'indépendance de l'Ukraine, votant généralement en sa faveur (1er décembre 1991) mais en plaidant pour des autonomies régionales fortes (par exemple) ou encore pour une protection légale de la langue russe. Toutes les élections par la suite ne feront que refléter, en dernière analyse, qui a surtout peur de la satellisation par la Russie et qui a surtout peur... du nationalisme "ruthène" de l'Ouest, perçu comme un fanatisme identitaire étranger à la culture de l'Est et du Sud (où existent certes des fanatiques identitaires "russes orthodoxes" ou "grands-russes" ou "cosaques", mais ce n'est pas la majorité du "pro-russisme") et ne cachant souvent pas, par ailleurs, sa sympathie pour les collaborateurs du nazisme lors de la Seconde Guerre mondiale - de fait, ce qui caractérise l'Ukraine "pro-russe" est moins sa supposée "russité" que sa multiethnicité (comme toutes les cartes concordent à le montrer), avec le russe comme lingua franca (carte des pourcentages de partisans de sa co-officialité en 2007) ; c'est l'Ukraine nationaliste qui se caractérise par sa "pureté ethnique" (90% ou plus d'Ukrainiens ruthènes) et le vrai clivage pourrait bien en réalité être là, non pas entre des "Russes" et des Ukrainiens mais entre une culture de "pureté ethnique" et une culture de coexistence des identités.  

    Les contradictions inter-impérialistes poussent désormais ce clivage vers une sanglante guerre "ethnique" ressemblant énormément à celle de Yougoslavie, les "Cosaques" pro-russes de l'Est rappelant les tchetniks serbes et les "Ruthènes" anti-russes de l'Ouest (souvent catholiques, revendiquant la collaboration nazie pendant la Seconde Guerre mondiale etc.) rappelant les nationalistes croates nostalgiques du régime oustachi...

    C'est ainsi que, de problématique "identitaire" pouvant être résolue DÉMOCRATIQUEMENT (dès lors que l'on a la communauté de classe laborieuse bien à l'esprit), on en arrive à un terrible carnage et au final à des espèces de "principautés ethniques" totalement soumises aux monopoles impérialistes, mises en coupe réglée. Heureusement, il y a une différence entre l'Ukraine d'aujourd'hui et la Yougoslavie d'il y a 20 ans, et cette différence c'est la lumière qui s'est levée... d'ex-Yougoslavie justement, balayant sublimement l'ombre de ces conneries chauvinardes ! Puisse(nt) le(s) Peuple(s) d'Ukraine admirer et réfléchir sur cet exemple !

    votre commentaire
  •  

    Sur les évènements qui secouent en ce moment même l'ex-Yougoslavie, voici la position du Partija Rada (Parti du Travail), organisation communiste marxiste-léniniste principalement basée en Serbie et au Monténégro mais également bien implantée en Bosnie, issue de la lutte anti-titiste sur les positions soviétiques puis albano-chinoises et connue (surtout) pour son positionnement viscéralement anti-nationaliste et (fait rarissime là-bas) en faveur de l'autodétermination du Kosovo

    IL N'Y A PERSONNE POUR DIRIGER LES MASSES EN COLÈRE DANS LEUR LUTTE ! 

    524px-Partijarada4.svg

    Après deux décennies de pauvreté, de guerre et de faim, les masses travailleuses de Bosnie-Herzégovine ont fini par se lever contre l'oppression et ont rejoint les millions de personnes asservies luttant pour leurs droits tout autour du monde. Après une longue période de nationalisme rampant, utilisée par les capitalistes et les profiteurs de guerre pour s'enrichir personnellement en pillant ce qu'il restait de propriété d’État, les masses ont été plongées dans la misère et l'indigence. Tandis qu'elles souffraient et criaient famine dans le dénument, ceux qui s'étaient enrichis sur le désastre n'avaient qu'une seule préoccupation : comment accroître encore leur capital.

    tuzla protest 6Le commun des Bosniaques, des Serbes et des Croates vit dans les mêmes difficultés au quotidien. Qui est responsable de cela ? Les responsables sont tous les parasites, politiciens, prêtres et imams, banquiers et capitalistes qui étaient les premiers à appeler aux armes lorsqu'ils voyaient le moment venu de pousser les masses à se massacrer mutuellement.

    Les évènements à Tuzla et ailleurs en Bosnie-Herzégovine nous montrent que ceux qui sont au pouvoir ne peuvent plus, pour satisfaire leurs intérêts, manipuler davantage les masses opprimées à travers une rhétorique nationaliste. Les masses se lèvent contre leur système, qu'ils essayent de maintenir par la force brute. La brutalité déployée par la police contre les protestataires montre seulement combien le gouvernement a peur de la colère des masses opprimées du peuple. C'en est fini de leur orgie nationaliste, fasciste et prédatrice ! Enfin la conscience de classe s'est éveillée dans les masses populaires ; la conscience que la division en nationalités est moins importante que la division entre oppresseurs et opprimés, entre capitalistes et prolétaires.

    La désorganisation et la naïveté, dans les premiers jours du soulèvement, ne veut pas dire que les masses opprimées ne vont pas rapidement venir à bout de toutes les tactiques de la lutte des classes. Le problème n'est pas dans les masses, car celles-ci mènent la lutte de classe en ce moment même. Le problème est l'absence d'une force révolutionnaire qui puisse les conduire vers leurs buts. Cette absence peut certainement être mise à profit par des forces qui voudraient tenter de manipuler les masses avec de fausses promesses et des agendas secrets.

    Mais ces évènements sont aussi une grande opportunité, pour le mouvement ouvrier et révolutionnaire, de renforcer ses rangs et de se lier aux masses.

    L'esprit révolutionnaire de ceux qui n'ont que le mot "révolution" à la bouche doit être démontré sur les barricades, en première ligne ! 

    LA SEULE VOIE POUR UNE LUTTE DE CLASSE VICTORIEUSE ET UNE VIE MEILLEURE EST LA VOIE DE LA RÉVOLUTION !

    À BAS LA DICTATURE DU CAPITAL !

    EN AVANT, AUX PREMIÈRES LIGNES DU COMBAT !

     

    tuzla protest 8En définitive, il n'y a là que ce que nous avons dit et répété dans tous les évènements de ces dernières années, depuis les pays arabes en passant par l'Europe du Sud (Grèce, Italie, État espagnol) jusque maintenant aux Balkans : partout les effets désastreux et criminels de la crise générale capitaliste, entrée en phase terminale depuis 2007-2008, poussent les masses ouvrières, paysannes et populaires en général (ou encore les grandes classes moyennes en perdition des pays très avancés) dans la lutte contre ces souffrances et les dirigeants bourgeois qui les incarnent ; MAIS il n'y a pas de force révolutionnaire conséquente, D'AVANT-GARDE, en tout cas pas (encore) reconnue des larges masses, pour donner à ces luttes une direction consciente et méthodique vers la solution, qui est d'abattre le capitalisme et d'instaurer le Pouvoir organisé des travailleurs ; ce qui ne passe d'ailleurs pas par un "simple" soulèvement populaire de masse, mais par une lutte de longue haleine, une guerre de tranchées que l'on appelle GUERRE POPULAIRE, dans laquelle des évènements comme ceux que nous voyons actuellement en ex-Yougoslavie sont une petite bataille et non la guerre à elle seule : l'effervescence, tôt ou tard, retombera, les choses rentreront dans l'ordre ; mais on aura avancé dans la guerre révolutionnaire de longue durée contre le Capital, dans l'élévation et la fortification de la conscience et de l'organisation populaire, et dans la fragilisation du Pouvoir capitaliste qui aura été contraint soit à des concessions importantes, soit à descendre sur le terrain de la guerre civile (tirer dans le tas, état d'exception, instauration d'un régime réactionnaire terroriste - fasciste - etc.).

    Simplement, ces sinusoïdes tuzla protest 5, ces explosions et ces reflux des luttes populaires (jusqu'à la nouvelle explosion...) peuvent durer aussi longtemps que durera le capitalisme et sa crise, son décalage permanent entre  ce que le niveau des forces productives suscite d'aspirations à une vie meilleure  dans le peuple, et l'enfer quotidien des relations de travail et des relations sociales (en général) imposées par la logique capitaliste. Pour que ces vagues qui se lèvent, puis refluent, puis se lèvent à nouveau ENTAMENT et finissent par FAIRE TOMBER la forteresse du Capital, il faut qu'une force révolutionnaire conséquente, une AVANT-GARDE (ce mot que les camarades libertaires/anarchistes détestent tant...) leur imprime cette direction consciente, fédère les larges masses dans la conscience du problème (le capitalisme), de la solution (son renversement, le Pouvoir du Peuple, le socialisme) et des moyens pour l'atteindre (la stratégie révolutionnaire, le plan général de travail et ses tactiques du moment). Et c'est là qu'hélas, nous voyons la plupart des forces révolutionnaires en Europe comme dans les pays arabes soit rejetter cette nécessite d'une avant-garde, soit la reconnaître mais pas l'assumer, se payant trop souvent de slogans et autres "mots d'ordre". 

    C'est la critique que nous avons pu faire à beaucoup de forces "marxistes-léninistes" comme "maoïstes" comme "marxistes révolutionnaires" (trotskystes) d'Hexagone dans les évènements hexagonaux de ces derniers temps, avec parfois, du surcroît, la déformation intellectuelle chauviniste "jacobine" en prime : "il manque", "il faut" aux masses en lutte une direction révolutionnaire conséquente et déterminée... Certes ! Sauf que c'est précisément ce que l'organisation qui écrit tuzla protest 7cela est censée, dans ses statuts, leur apporter, aux masses ! On déplore que les masses agissent sans direction consciente, perméables ainsi à toutes les "fantaisies réactionnaires" petites-bourgeoises et se démobilisant à la première occasion ; alors que l'on prétend soi-même (et à l'exclusion de tout autre groupe, généralement) être cette avant-garde qui fait défaut. Mais alors, que fout-on, et qu'a-t-on foutu jusqu'à présent ?

    C'est ainsi que l'on peut voir des "marxistes-léninistes" ou des "maoïstes" dans cette attitude pour le moins schizophrène de présenter, d'un côté, la révolution (ou la Guerre populaire) comme un processus de longue haleine, mais d'éructer, de l'autre, contre tous ces mouvements ("révolutions arabes", Grèce, Indignad@s, Occupy etc.) éclatant sans direction et finissant (forcément) par retomber au bout d'un moment, et/ou par être récupérés par des forces bourgeoises réformistes ou réactionnaires : en fait, il n'y a de mouvement/action de masse qui "vaille" que sous leur direction ; or ce n'est pas le cas à l'heure actuelle ; mais, voyez-vous, c'est aux masses d'accepter de leur propre chef cette direction, cette avant-garde, sans quoi elles sont vouées aux gémonies ; et non aux communistes eux-mêmes d'instaurer par leur travail pratique cette direction sur les masses, de conquérir leur confiance et de se faire reconnaître par elles comme les éclaireurs de l'avenir ! 

             partijaradapartijarada3

             partijarada2partija-rada-plakat1

    Ici une brève présentation du PR et de son positionnement idéologique... Inutile de dire que ça nous plaît plutôt pas mal : 

    L'apparition de groupes et partis marxistes-léninistes en Europe dans les années 1970 était une réaction à l'expansionnisme militaire du bloc impérialiste occidental, en rupture avec le révisionnisme soviétique et en soutien à la Révolution culturelle chinoise. Ces groupes et partis ont préservé la théorie marxiste-léniniste en Europe dans de très difficiles conditions.
    Cependant, nous pouvons généralement dire aujourd'hui que tous ces groupes et partis ont suivi le destin des anciens partis révisionnistes, ou sont tout près de disparaître de la scène politique. Ils demeurent enfermés dans une pensée dogmatique, menant des débats sans fin autour de la ligne politique de Lénine, Trotsky, Staline, Mao, Hoxha etc.

    Même sans une profonde analyse, il est possible déterminer quelques conditions objectives qui ont contribué à cela : période de stabilisation du capitalisme et situation privilégiée du prolétariat en Europe, ce qui a inévitablement conduit à une divergence entre la théorie révolutionnaire et la pratique des travailleurs dans leur vie quotidienne.

    Le PR pense que ces partis sont incapables d'une évolution radicale permettant de se lier avec les masses, dans une situation de crise fondamentale du capitalisme à l'aube d'une nouvelle guerre impérialiste. C'est le problème de toutes les organisations et du PR lui-même. La crise actuelle du capitalisme les a simplement réveillé en sursaut, et ils n'ont aucune réponse historique à cela. 

    Mais le PR pense qu'en ce moment les révolutionnaires en Europe ont pour tâche historique de saboter la guerre entre impérialistes et la guerre contre les peuples, de porter la guerre de classe mondiale au cœur de la forteresse impérialiste. Toute autre chose peut être laissée de côté. Alors que l'impérialisme occidentale livre des guerres aux peuples du monde entier, et tandis que se prépare la guerre entre les vieux impérialismes qui veulent imposer un monde unipolaire et les nouveaux qui tentent d'arracher leur part de gâteau du marché mondial, ne pas mener la lutte et la guerre de classe directes et rester sur le bord du chemin est tout simplement une capitulation et une trahison de la voie révolutionnaire. Et alors que les masses des travailleurs et de la jeunesse attaquent et se lancent contre les institutions capitalistes européennes et les rapports sociaux capitalistes, nous voyons généralement les organisations marxistes-léninistes rester à l'écart.

    Si les marxistes-léninistes ne font pas ce pas en avant dans la lutte révolutionnaire, l'Histoire ne le leur pardonnera pas et ils seront cloué à un pilori auquel citer Marx et Mao ne les arrachera pas ; et ils termineront comme leurs prédécesseurs les révisionnistes.

     


    votre commentaire

  • Avec tambours et trompettes, comme d'habitude et 11 mois à peine après l'opération Serval au Mali, l'impérialisme "hollandais" BBR lançait en décembre dernier l'opération Sangaris dans cette ex- et néo-colonie (ancien "Oubangui-Chari") d'Afrique centrale (comme son nom l'indique).

    Officiellement pour "mettre fin aux massacres", ces violences perpétrées par la coalition rebelle Séléka qui a renversé, voici bientôt un an, le président Bozizé, satrape arrivé au pouvoir 10 ans plus tôt avec le "feu vert" de l'impérialisme francouille, et déjà sauvé par celui-ci à plusieurs reprises en 2006 et 2007. Une Séléka que les médias dominants, bien sûr, ne manquent pas une occasion de nous présenter comme "musulmane" dans un pays "à 80% chrétien", sachant pertinemment l'effet mobilisateur d'une telle affirmation sur "l'opinion publique" aliénée (un "petit" pays, en fait plus grand que la "France" mais certes peu peuplé, livré à des "talibans noirs"), et comme auteure d'effroyables massacres alors que, comme dans toute guerre géopolitique africaine, c'est surtout une milice mi-combattants mi-pillards qui "vit sur le pays" en obtenant ce qu'elle veut par l'intimidation.

    En réalité parce que la Séléka (héritière des guérillas anti-Bozizé de 2006-2007, rejointes par de nouveaux transfuges de son propre régime) c'est le Soudan, et le Soudan c'est la Chine, dont il est le premier partenaire et fournisseur de pétrole africain. Le régime tchadien d'Idriss Déby, qui intervient d'ailleurs en appui à Sangaris comme hier à Serval au Mali, avait lui aussi été menacé à la même période 2006-2008 par un rébellion financé par Khartoum, ce qui avait également nécessité une intervention BBR (camouflée sous une opération européenne d'aide aux réfugiés du Darfour). Le triangle Tchad-Centrafrique-Soudan (au Mali, c'est autre chose) est en fait depuis le milieu des années 2000 au cœur d’un grand affrontement géostratégique entre impérialismes français et chinois pour la suprématie sur le continent africain ; et la Séléka au pouvoir cela voulait dire les Chinois à Bangui, situation d'autant plus délicate que le grand voisin, le Congo "démocratique" de Joseph Kabila (avec ses amis angolais), se pose lui aussi (depuis 2006 environ) en grande "porte d'entrée" africaine de Pékin – du coup, l'impérialisme BBR s'est rapproché de l'Ouganda, puis carrément du Rwanda de Kagamé pour entretenir la sécession de fait de la région des Grands Lacs. Pointer la "menace islamiste", cela marche pratiquement à tous les coups, puisque cela amène dans 99,99% des cas à affronter 1°/ soit une expression militarisée du Capital arabe suraccumulé et "rebelle" du Golfe, 2°/ soit, lorsque les forces se rattachent au Soudan ou à l'Iran, des bras armés du nouvel impérialisme chinois (ou du cheval de retour russe) ; autrement dit les deux grandes menaces stratégiques actuelles pour les puissances occidentales [dans certains cas, comme en Syrie, les deux menaces s'affrontent entre elles, la consigne est alors de les laisser s'entre-égorger le plus longtemps possible].

    20 ans après le Rwanda, vers un nouveau GÉNOCIDE FRANÇAIS en Centrafrique ?

    Un scénario qui rappelle terriblement, quelque part, celui du Rwanda il y a 20 ans, lorsque la "racine du mal" pour l'hégémonie BBR en Afrique était l'Ouganda de l'ex-guérillero marxiste (reconverti en chantre du néolibéralisme) Yoweri Museveni ; le "fer de lance" le FPR à direction tutsie "dans un pays à 80% hutu" ; le deus ex machina l'impérialisme US remettant brutalement en cause le quasi-monopole tricolore sur le continent accordé pendant la Guerre froide ; et le discours médiatique – déjà – était si confus que nos jeunes cerveaux pré-adolescents avaient compris, pendant plusieurs semaines voire plusieurs mois, que c'était le FPR qui perpétrait les massacres. Un scénario si semblable... et aux mêmes conséquences ? Toute conscience progressiste ne peut qu'espérer (ou prier, pour les croyant-e-s) le contraire. Mais c'est malheureusement ce qui semble être en train de se dessiner ; où l'on voit ressurgir dans les mains des antibalakas (ces milices "d'autodéfense" pro-Bozizé formées à partir de 2009, rejointes depuis par des militaires et autres séides de l'ancien régime) les sinistres machettes qui au Rwanda fauchèrent atrocement, pendant trois mois terribles de 1994, près de 10.000 vies par jour :


    La Centrafrique à l'heure de l'épuration ethnique

    Le Monde

    centraf lemonde1

    Ils fuient sans se retourner. Ils entassent ce qu'ils peuvent sauver dans leur voiture et des camions, et partent vers ces pays qu'ils ne connaissent pas, le Tchad et le Cameroun. Ils fuient la haine et les machettes.

    La Centrafrique est en train de vivre la pire « purification ethnique » de son histoire. Le pays, secoué depuis l'indépendance (1960) par une multitude de rébellions et de coups d'Etat, n'avait encore jamais connu une telle hémorragie de sa population, et encore moins sur une base communautaire ou religieuse.

    Ils fuient, les musulmans. Le dernier ghetto musulman de Bangui, le quartier de PK5, se vide. Poumon du commerce traditionnel de la ville, PK5 accueille aussi les réfugiés des autres quartiers qui, tel Miskine récemment, ont été attaqués par des hordes de combattants chrétiens anti-balaka et de pillards.

    Au fur et à mesure que l'étau se resserre, des convois d'évacuation sont organisés, protégés par des hommes en civil de l'ex-Séléka et par des soldats tchadiens de la force africaine, la Misca. Cela dure depuis des semaines.

    Lire : Centrafrique : l'opération « Sangaris » entre dans sa 2e phase

    centraf lemonde2

    LA CURÉE 

    Une gigantesque colonne d'au moins deux cents véhicules a de nouveau quitté Bangui le 7 février, meubles et sacs entassés sur des camions. Sur les bords de la route, les gens crient leur joie de voir les musulmans partir. Certains les insultent pour leur collaboration, réelle ou supposée, avec la Séléka durant son année au pouvoir.

    Juché très haut sur un camion, un jeune homme est renversé sur la route, fauché par un câble électrique. Aussitôt les machettes apparaissent. C'est la curée. Mains, pieds et pénis coupés. D'autres, le même jour, subissent le même sort, au camp de réfugiés musulmans de l'aéroport et en bordure de PK5.

    Lire notre reportage (édition abonnés) : Mémoire pillée en Centrafrique

    Ce sentiment d'une impossibilité de vivre ensemble a gagné tout le pays. A Kaga-Bandoro, il est minuit moins cinq avant l'orage. Cette ville de la province de Nana Gribizi, dans le Nord, où chrétiens et musulmans cohabitaient fort bien jusqu'à il y a un an, est au bord du précipice.

    La Séléka, qui se replie peu à peu de Centrafrique, tient encore la ville. Les milices anti-balaka ont mené une première attaque le 5 février et sont en embuscade dans la brousse. Les civils de chaque communauté sont piégés : les musulmans vivent dans le centre-ville commerçant et fuient chaque jour vers le Tchad, et les chrétiens dorment éparpillés dans la brousse, de crainte que la Séléka ne commette d'ultimes exactions avant de partir.

    centraf lemonde3

    « LES MUSULMANS NOUS EMMERDENT »

    Après la première attaque des anti-balaka, qui se sont installés dans les villages de la commune de Botto, à cinq kilomètres de Kaga-Bandoro, les séléka ont mené un raid, tuant une femme et brûlant une cinquantaine de maisons. Les chrétiens de ces villages se sont réfugiés dans le quartier de Baiko, à la lisière de la ville, autour de l'église de la Nativité-du-Seigneur.

    « Les gens de Botto viennent ici, nous les accueillons, et la nuit, nous dormons tous en brousse,raconte Richard Baganga, un vieux de Baiko. Les anti-balaka sont apparus il y a trois semaines, pour nous défendre. On leur a demandé de rester sur la réserve car s'ils attaquent, c'est nous qui sommes ensuite exposés. Les séléka ont promis de tous nous tuer et de tout détruire avant de partir. Nous sommes certains qu'ils viendront. Même les enfants savent que les séléka vont venir nous tuer… »

    Richard raconte qu'après des décennies de coexistence, depuis 2013, « les musulmans se sont détournés de nous, se sont accolés avec la Séléka, et ils nous emmerdent. Alors oui, même s'ils étaient comme des parents, ils peuvent partir. Peut-être pourront-ils revenir un jour, s'ils changent de comportement, et à moins que toutes leurs maisons soient brûlées… »

    Les chrétiens en veulent à la Séléka d'avoir non seulement commis des crimes et perturbé les relations avec la communauté musulmane locale, mais aussi d'être venue avec des mercenaires tchadiens et soudanais, et des éleveurs peuls. « Les Peuls tchadiens font paître leurs troupeaux dans la région, ils sont armés de kalachnikov et très dangereux », témoigne l'Abbé Martial Agoua, de l'église de Baiko. « S'ils voient l'un d'entre nous aller au champ avec sa machette, ils l'accusent d'être un anti-balaka et lui tirent dessus, raconte Richard. Nous ne pouvons plus cultiver nos champs, ni chasser en brousse, ni aller chercher le miel. Il est donc normal que nous commencions notre petite guerre, nous aussi, pour tuer les séléka et chasser les Peuls. »

    centraf lemonde4

    « C'EST DE LA PURIFICATION ETHNIQUE »

    Au marché de Kaga-Bandoro, où transitent, ce 8 février, des camions partis de Bangui la veille, les musulmans de la ville entassent leurs biens dans les véhicules. « Nous ne savons pas ce que nous allons devenir, se lamentent Hassan et Moussa. Nous ne connaissons pas le Tchad. Et ici, en Centrafrique, c'est fini pour nous. Nos maisons et nos commerces sont systématiquement détruits. »

    « C'est de la purification ethnique, même si personne de la communauté internationale n'a le courage de le dire », s'indigne un responsable de l'ONU à Bangui. Abdou Dieng, le coordinateur humanitaire des Nations unies, prudent, estime qu'« on ne peut pas dire que ce n'est pas du nettoyage ethnique et religieux ». En visite à Kaga-Bandoro, il sait, comme tout le monde, qu'« ici même, ça va basculer, et personne ne réagit ». « Il faudrait une grande réconciliation, mais l'urgence serait d'avoir davantage de troupes étrangères pour stopper cette hémorragie. »

    Partout dans le pays, les anti-balaka, les pillards, les combattants de la dernière heure, et parfois simplement les gosses des voisins effacent les traces de décennies de coexistence, rasant les commerces, les mosquées et les habitations des musulmans. Le règne, bref et sanglant, de la Séléka s'achève en cauchemar pour la communauté qu'elle affirmait vouloir défendre.

    Lire le diaporama Accédez au portfolio

    Lire notre entretien (édition abonnés) : En Centrafrique, « la situation s’aggrave à l’intérieur du pays »

    Rémy Ourdan (Bangui, Kaga-Bandoro, Centrafrique, envoyé spécial )
    Le Monde


    Intéressant aussi à ce sujet, un article du collectif Quartiers Libres qui pointe la manière dont ces grands affrontements géopolitiques, en Afrique, sont dissimulés sous une mythique "sauvagerie tribale" ; cette image hégémonique de l'Africain "bébête", généralement placide ("un rien les amuse, ils sont toujours à rire, ce sont de vrais gamins") mais capable, d'un coup d'un seul et sans raison rationnelle, un peu comme ces chimpanzés auxquels l'assimile l'idéologie raciste blanche, des pires accès de violence (ou des pires pulsions lubriques) :


    Tribus gauloises et continent Africain 


    La course aux matières premières fait rage. Elle dévore le continent africain. Aux millions de morts du Kivu, se rajoutent aujourd’hui ceux de Centrafrique.

    Afin d’expliquer ces lointains massacres, on nous présente dans les médias d’inévitables guerres tribales. Explication confortable pour justifier l’intervention militaire française comme un geste humanitaire, le prélèvement de matières premières n’étant qu’un pourboire pour le gentil pacificateur.

    20 ans après le Rwanda, vers un nouveau GÉNOCIDE FRANÇAIS en Centrafrique ?

    Cette manière de décrire les tensions économiques et sociales qui secouent le continent africain ne font que révéler la manière dont il est perçu depuis la France. C’est une terre de conquête, d’opportunités économiques, et cela parce qu’elle est peuplée de gens dont les dominants français pensent qu’ils sont Lire la suite 


    Plus d'infos (mise à jour 15/02) :

    Le génocide s'intensifie

    Centrafrique : alerte au génocide !

    Un génocide sur le compte de l'intervention militaire française

    Le Nouvel Observateur : CENTRAFRIQUE. Amnesty international dénonce un "nettoyage ethnique"


    Quoi qu'il en soit, génocide ou pas (et nul ne le souhaite bien entendu !) et que les victimes soient principalement chrétiennes ou musulmanes ou quoi que ce soit, en Afrique comme ailleurs, les Peuples sont encore et toujours les sempiternelles victimes de la voracité du Grand Capital.

    Mais LE JOUR APPROCHE où le vent brûlant de la Révolution, de la GUERRE POPULAIRE qui se lève déjà partout de l'Inde à l'Amérique latine, balayera enfin toute cette pourriture et libérera à jamais l'Humanité !

    French-military-bases-in-africa


    votre commentaire
  • Depuis plus d'une semaine l'ex-Yougoslavie est agitée par de grands mouvements sociaux, partis essentiellement de Bosnie-Herzégovine mais qui commencent à se diffuser aux autres ex-républiques (Serbie, Croatie notamment).

    En Bosnie, plusieurs caciques locaux de "cantons", ces petites baronnies "ethniques" instituées par les accords de Dayton en 1995, ont déjà démissionné (c'est la principale revendication des insurgé-e-s : "qu'ils dégagent tous !") ; et la perte de contrôle inquiète d'ores et déjà le "haut-représentant" ONUsien (sorte de proconsul impérialiste, principalement occidental) au point d'envisager carrément... de faire donner la troupe Eufor (la "force de stabilisation" européenne en place depuis 2004) si la situation dégénère !

    Comme personne ne l'a (sans doute) oublié, l'ancienne République fédérative socialiste de Yougoslavie a été plongée dans les années 1990 dans un terrible conflit "inter-ethnique" [en fait, en dehors du cas particulier albanais au Kosovo, tout le monde parle la même langue "serbo-croate" avec des variantes dialectales infimes ; la différence tient à la religion pour ceux qui en ont une : orthodoxe = serbe, catholique = croate et musulman = bosniaque ; et à l'histoire car ce n'est pas d'hier que les Balkans sont la proie des appétits impériaux voisins : Autriche-Hongrie, Venise puis Italie, Empire ottoman, Russie, France etc.], conflit qui a fait environ 20.000 morts en Croatie et 100.000 en Bosnie (grosso modo 60% de Musulmans bosniaques - avec une majuscule, catégorie "ethnique" et non religieuse -, 30% de Serbes et 10% de Croates). Un conflit provoqué en réalité par les déséquilibres économiques territoriaux issus du "socialisme autogestionnaire" capitaliste d'État de Tito [nationalismes "de riches" en Croatie ou Slovénie, "de pauvres" au Kosovo, en Macédoine ou en Bosnie et de "moyens" (ne régnant que par le nombre et la prééminence historique) en Serbie], et par les contradictions inter-impérialistes reprenant de plus belle après l'effondrement du bloc "socialiste" soviétique : ainsi l'Allemagne et l'Autriche sont-elles connues pour avoir soutenu à fond l'indépendance slovène et le nationalisme croate ; la Russie post-soviétique d'Eltsine le nationalisme grand-serbe ; l'impérialisme US et ses protectorats arabes du Golfe les Bosno-musulmans ; l'impérialisme BBR étant lui très serbo-complaisant sous Mitterrand (1991-93), avec toutefois des éléments de droite dure, d'extrême-droite mais aussi "républicains" (comme un certain Finkielkraut) pro-croates [mais bon, à un moment donné Serbes et Croates étaient pratiquement alliés pour dépecer la Bosnie, alors...] et un gros activisme pro-bosniaque autour de BHL ; puis se ralliant aux "plans de paix" américains sous la cohabitation balladurienne et surtout avec Chirac (qui obtient toutefois de ses alliés des clauses favorables au nationalisme serbe).

    À l'arrivée, la totalité de l'ancienne RFSY, y compris la Serbie où Milosevic a été renversé en 2000 par des courants pro-occidentaux (puis arrêté et transféré à La Haye où il mourra) mais où la question du Kosovo ("indépendant" depuis 2008) reste toujours un point de crispation important, est devenue une sorte d'immense sweetshop/zone franche de l'impérialisme principalement ouest-européen, où l'euro est d'ailleurs la devise courante ; une périphérie complète de l’Europe du Capital, les anciennes républiques devenues indépendantes rejoignant l'Union au compte-goutte (la Croatie y a fait son entrée le 1er juillet dernier).

    La "communauté internationale" y maintient une présence militaire importante : un millier de militaires européens (et quelques centaines d'Américains) en Bosnie et environ 5.000 au Kosovo ; et pour cause : aux pays de la glorieuse Guerre antifasciste de 1941-45, la "chiourme" est toujours susceptible de se réveiller, comme nous le voyons à présent sous nos yeux. Au demeurant, les "zones de contact ethnique" où ces forces internationales sont particulièrement présentes sont aussi celles où est particulièrement concentrée la production capitaliste (forcément, celle-ci favorisant le "brassage" des "ethnies")...

    L'actualité de ce grand mouvement populaire a été particulièrement bien compilée sur le site Solidarité Ouvrière (communiste-ouvrier) :

    Les premiers frémissements (5-7 février) : Bosnie-Herzégovine : Tuzla se révolte contre la misère et le chômage - Deuxième jour de colère sociale en Bosnie-Herzégovine - Colère contre le chômage et la misère en Bosnie-Herzégovine - Bosnie-Herzégovine : les flammes de la révolte se propagent dans tout le pays - Vidéos : Révolte contre le chômage et les licenciements en Bosnie-Herzégovine

     

    L’EXPLOSION (07-10/02) :

    Bosnie-Herzégovine : La population attaque les bâtiments du pouvoir dans plusieurs villes

    Belga, 7 février 2014 :

    Des manifestations contre la pauvreté et le chômage ont tourné à l’émeute vendredi en Bosnie, où des manifestants ont saccagé les sièges des administrations régionales à Tuzla (nord-est) et à Sarajevo.

    Ces manifestations, pour la troisième journée consécutive, sont d’une ampleur sans précédent dans cette ex-république yougoslave qui, il y a trente ans jour pour jour, accueillait les Jeux olympiques d’hiver.

    Elles illustrent l’exaspération de la population face à une classe politique engluée dans des querelles politiciennes et incapable de redresser une économie sinistrée, depuis la fin de la guerre intercommunautaire de 1992-95.

    Lire la suite

    Le siège de la présidence à Sarajevo incendiée

    Ouest-France, 7 février 2014 :

    Des manifestants en colère contre la situation économique en Bosnie ont mis à feu au siège de la présidence à Sarajevo.

    le-siege-de-la-presidence-sarajevo-incendiee

    Les flammes s’étendaient jusqu’au deuxième étage de cet immeuble qui jouxte celui du gouvernement régional, incendié peu auparavant par les protestataires.

    Dans la journée, des manifestants ont également saccagé et incendié l’immeuble abritant l’administration régionale à Tuzla, dans le nord-est du pays.

     

    Manifestations en Bosnie-Herzégovine : ce n’est plus une révolte, c’est la révolution

    Troisième jour consécutif de manifestations sociales en Bosnie-Herzégovine. A Tuzla, le bâtiment du gouvernement cantonal a été pris d’assaut et incendié par les manifestants. La ville ressemble à un champ de bataille. La veille, les affrontements qui ont eu lieu entre manifestants et forces de l’ordre auraient fait quelque 130 blessés, dont 102 policiers et 28 protestataires. Des manifestations ont lieu aujourd’hui dans tout le pays. Lire la suite

     

    Bosnie-Herzégovine : la révolte du désespoir et le début d’un nouveau « printemps »

    Le Courrier des Balkans, 8 février 2014 :

    « Tous ensemble ! » Tout est parti de Tuzla mercredi 5 février, mais le mouvement a vite gagné l’ensemble de la Bosnie-Herzégovine. Vendredi, Zenica, Sarajevo et Mostar étaient en feu. Dans cette ville, les manifestants ont incendié les sièges du HDZ et du SDA, les deux partis nationalistes. Parmi les manifestants, les divisions ethniques sont oubliées.

    sarajevo-tulza-mostar

    Ces manifestations marquent peut-être le début d’un « Printemps bosnien ». Elles ont débuté à Tuzla mercredi 5 février et se sont rapidement étendues aux autres villes de Bosnie-Herzégovine. Elles sont l’expression d’une révolte populaire. En cause : les conditions de vie des Bosniens, et une situation économique et sociale déplorable. Ces manifestations marquent le début d’un réveil des consciences pour l’ensemble de la population, sans connotation ethnique. La plus grande crainte des autorités est en effet qu’un jour, tous les citoyens du pays s’unissent pour agir en commun et mettent en péril vingt ans de discours nationalistes qui ont permis à la classe politique de se maintenir au pouvoir. Lire la suite

     

    En Bosnie comme ailleurs : « Ostavke svi ! Smrt nacionalizmu ! »

    Communiqué de l’Initiative Communiste-Ouvrière :

    La colère des ouvriers licenciés, des travailleurs sans salaire et des jeunes chômeurs de Tuzla s’est étendue depuis le 6 février à l’ensemble de la Bosnie-Herzégovine. Partout, tant dans la Fédération Croato-Musulmane qu’en Republika Srbska, la population descend dans les rues pour protester contre le chômage, les fermetures d’usines, les politiques anti-sociales et la corruption des politiciens au service de la bourgeoisie maffieuse. Le 7 février, à Tuzla, Zenica et Sarajevo, la population a attaqué et incendié plusieurs bâtiments symboles du pouvoir en place.

    tuzla

    Bâtiment du gouvernement à Tuzla, 7 février. Sur le mur on peut lire "Ostavke svi !
    Smrt nacionalizmu !"
    (Qu’ils dégagent tous ! Mort au nationalisme !)

    Lire la suite

    Révolte sociale contre les dirigeants nationalistes

    L’Humanité, 10 février 2014 :

    Parti d’une manifestation de chômeurs, un mouvement qui traduit un immense ras-le-bol de la précarité, la mal-vie, des privatisations, déferle sur un pays ravagé par les orientations nationalistes et libérales de ses gouvernants.

    Mostar : La colère et la misère unissent les communautés divisées - Revendications des travailleurs et habitants de Tuzla - 2000 manifestants à Bihac - Quelques nouvelles de Bosnie-Herzégovine

     

    Les menaces de répression impérialiste :

    Troupes de l’Union Européenne hors de Bosnie-Herzégovine !

    Communiqué de l’Initiative Communiste-Ouvrière :

    Suite au puissant mouvement de protestation des ouvriers licenciés, des chômeurs, des travailleurs sans salaires et de la population pauvre de Bosnie-Herzégovine, l’Union européenne pourrait être amenée à y envoyer plus de soldats "en cas d’escalade de la situation", a estimé dimanche le haut-représentant de la communauté internationale, Valentin Inzko.

    bosnie-ne-volez-pas-mon-avenirBosnie-Herzégovine : "Ne me volez pas mon avenir"

    Lire la suite

     

    LA PROPAGATION HORS DE BOSNIE :

    Un même combat de Belgrade à Tuzla

    Créé le 6 février 2014, la page facebook "Podrška narodu Tuzle iz Srbije" (Soutien à la population de Tuzla depuis la Serbie) a déjà obtenu plus d’un millier de mention "j’aime". Depuis cette page, un appel est lancé à un rassemblement le lundi 10 février à 16 heures au centre de Belgrade pour soutenir les manifestations en Bosnie-Herzégovine.

    Appel à des manifestations en Croatie

    Après Belgrade, c’est en Croatie qu’apparaissent des appels pour rejoindre les ouvriers et les chômeurs de Bosnie-Herzégovine dans leur lutte contre le chômage, les privatisations et les politiciens corrompus.

    stop-nationalismSous les symboles nationaux bosniaques, croates et serbes : "Un même but, une vie meilleure. Stop au nationalisme ! Les voleurs ne nous alièneront plus !"

    Appel à une manifestation à Zagreb le jeudi 13 février (18 heures Cvjetni trg) :

    Les travailleurs, les chômeurs, les jeunes et la population en général de Bosnie-Herzégovine nous ont donné ces derniers jours un exemple de la façon dont nous pouvons hardiment et courageusement lutter pour nos droits et une société meilleure. En Croatie, il y a un demi-million de chômeurs, de nombreux jeunes n’ont pas d’emploi, les gens fouillent dans les poubelles pour se nourrir, de plus en plus de gens tombent dans l’esclavage de l’endettement, la corruption est partout, les criminels de la privatisation sont restés impunis et la démocratie que nous avons n’est qu’une blague.

    Lire la suite

    Belgrade : Manifestation en solidarité avec la révolte de Bosnie

    300 personnes, selon la presse locale, ont manifesté ce lundi 10 février à partir de 16 heures dans le centre de Belgrade pour affirmer leur solidarité avec la révolte de Tuzla et des autres villes de Bosnie-Herzégovine. "Courageuse Bosnie, nous sommes avec toi !", "Salut à Tuzla antifasciste !", étaient quelques-uns des slogans des manifestants qui affirmaient que la meilleure solidarité est de nous organiser ici pour mettre à l’ordre du jour les questions posées par la population de Bosnie.

    beograd

    Et ça continue… :

    Révolte sociale en Bosnie: des cahiers de doléances sur Facebook - Nouvelles manifestations à travers la Bosnie-Herzégovine - Les manifestations se poursuivent en Bosnie-Herzégovine - Bosnie: les manifestations contre le pouvoir continuent - Images de la manifestation du 11 février à Sarajevo - Bosnie-Herzégovine : la population s’organise en plénums

     

    Une fois de plus éclate ici le message universel de la Révolution prolétarienne : LES MASSES FONT L'HISTOIRE ; offrant un splendide contrepied à la situation en Ukraine par exemple, où s'entre-déchirent encore une fois laquais de l'impérialisme russe (révisionnistes brejnéviens de tous les pays à leur remorque, comme sur la Syrie...) et mercenaires de l'impérialisme occidental, parmi lesquels des nostalgiques déclarés du Reich hitlérien... exactement comme en Yougoslavie il y a 20 ans.

    Les masses sont la lumière même du monde ; les masses FONT ET PEUVENT TOUT et les Peuples de l'Est ne sont pas éternellement condamnés à n'être que des pions sur le "grand échiquier" de Brzeziński.

    Sarajevo, Tuzla, Mostar : ces noms qui voilà deux décennies symbolisaient le retour du chauvinisme militariste et de la guerre impérialiste barbare en Europe, avec son cortège de massacres ; quel plaisir de les retrouver aujourd'hui dans un magnifique soulèvement qui trouvera, soyons-en sûrs, toute sa place dans la glorieuse épopée de la révolution prolétarienne européenne et mondiale... Et cette fois-ci (on s'en doute) sans l'insupportable BHL, plutôt signalé du côté de Kiev !

    Ostavke svi ! Smrt nacionalizmu, kapitalizmu i fašizmu ! Sloboda Narodu !

    Que les ouvriers et les paysans de Yougoslavie retrouvent le Glorieux chemin des Partisans !

     

             PartizZgrabimo oružje svi1899977 1447310798833267 152546329 n

     


    votre commentaire
  • Plusieurs milliers de personnes (environ 1.500 a priori) ont défilé dimanche à Paris contre tous les fascismes et les racismes, en commémoration des manifestations antifascistes de février 1934 et en hommage au camarade Clément Méric tombé en juin 2013. Un succès indiscutable non tant par le nombre des présent-e-s (vraisemblablement ~ 2.000, comme à Lyon en avril 2010) que par la diversité des cortèges, montrant une tendance à la rupture avec les traditionnels défilés de la "militance professionnelle" et  notamment avec une certaine extrême-gauche "centrale" (dirions-nous) ou "blanche" (diraient d'autres).

     

    Lire un petit compte-rendu ici : 1500 manifestants contre tous les fascismes

    1618321 1447535198813448 1614459496 o

    Ici une galerie de photos : http://www.flickr.com/photos/rodrigoavellaneda/sets/ ; on y voit notamment le cortège "Palestine" qui n'a pas plu (il fallait s'y attendre) à tout le monde avec sa composition très colonies intérieures, mais a porté vigoureusement la double exigence de rappeler que le sionisme est un fascisme (là-bas par son apartheid et ses actes criminels de nettoyage ethnique, ici en copinant ouvertement avec l'extrême-droite tendance "occidentaliste") et de ne pas laisser Dieudonné, Soral et consorts (l'extrême-droite "tiers-mondiste" antisémite à la Genoud) en confisquer et monopoliser la dénonciation.

    12419040003 df400a9b19 z

    Des collectifs de sans-papiers ont également participé, rappelant que le fascisme ce ne sont pas seulement des bandes attaquant les minorités et les progressistes dans la rue mais aussi une tendance naissant et se développant au cœur même de l’État du Capital, duquel viendra d'ailleurs son éventuelle victoire : une tendance à la "rationnalisation" inhumaine de l'appareil de production capitaliste pour lequel, désormais (alors qu'il y a 40 ans on allait carrément recruter là-bas et entasser dans les bidonvilles ici), la "place" de certaines personnes est "dans leur pays" à ramasser l'arachide ou coudre des t-shirts pour 1€ de l'heure sous une dictature oligarchique corrompue et meurtrière, et non ici à "profiter" du "paradis" capitaliste occidental...

    7439532-0

    Ceci explique, peut-être, le nombre relativement faible de manifestant-e-s (1) : la "gôôôche" bourgeoise étant (de surcroît) au pouvoir, on ne pouvait évidemment pas compter sur le renfort de ses troupes dans une manif ne tapant pas seulement sur quelques groupes ultras (comme lors des manifs-hommage à Clément Méric)... mais aussi sur la politique de l’État qu'elle dirige depuis bientôt deux ans ; et affirmant par ailleurs que le juste et nécessaire rejet de Dieudonné n'implique pas la complaisance envers l'apartheid sioniste, dont la social-démocratie BBR est depuis l'origine (fin des années 1940) le premier soutien hexagonal avant même la droite (gaulliste ou pas).

    Pour autant, comme vient de nous le rappeler l'affaire Valls-Dieudonné et les naufrages politiques (prévisibles selon nous, mais bon) qu'elle a entraîné, cette voie d'autonomie populaire claire et nette et la seule praticable ! Il n'y aujourd'hui quasiment nulle part au PS, et surtout pas du côté de Manuel Valls, quoi que ce soit qui ressemble à la base populaire SFIO des années 1930 (que l'on peut à la rigueur s'amuser à chercher du côté du NPA, des écolos et autres "alternatifs" ou au sein du Front de Gauche - mais pas dans sa totalité) avec laquelle former un Front antifasciste uni (fut-il tactique et temporaire) : le PS est presque intégralement un néo-socialisme à la Déat, un COURANT de la fascisation rampante en cours depuis des années et ses contradictions éventuelles avec d'autres courants de celle-ci (notamment "tiers-mondistes"/"antisionistes" alors que lui est pro-Israël à fond) n'en font PAS et n'en feront JAMAIS un allié !

    La mobilisation ne s'est pas non plus limitée à la capitale de l'État bourgeois : la veille à Rennes (Breizh) où se tenait un meeting du Front National à la Salle de la Cité, ancienne Bourse du Travail chargée de mémoire militante ouvrière (un comble qui en dit long sur la complaisance et la décomposition idéologique de la "gauche" qui dirige la ville), les choses ont pris une tournure autrement plus "chaude". Contrairement au mythe jacobinard "de gauche" d'une Bretagne soi-disant rongée par le "fascisme" d'ouvriers et de paysans qui se crèvent le cul de bonne heure et ne veulent rien d'autre que pouvoir VIVRE, DÉCIDER ET TRAVAILLER au pays, Breizh a encore une fois montré sa solide combattivité antifa ! : 

     

    http://www.rennes.maville.com/actu/actudet_-manif-anti-fn-retour-en-video-sur-une-soiree-de-heurts-violents_52674-2487706_actu.Htm

    1614115 584285881648522 137379965 o

    Enfin, le week-end a également été mouvementé en Occitanie de tout-à-l'Ouest, à Bordèu/Bordeaux deux branches de la mobilisation fasciste étaient carrément présentes en même temps ce samedi. Dans le quartier de la place Stalingrad (ça ne s'invente pas...), 150 antifascistes, progressistes et révolutionnaires faisaient face à à peu près autant d'islamophobes rassemblés à l'appel du Bloc identitaire ou encore du candidat FN aux municipales Jacques Colombier contre un projet de Centre culturel musulman aux cris de "Ici c'est l'Occident, on est pas en Orient" et autres joyeusetés... Mais un peu plus tôt dans l'après-midi et à quelques arrêts de tram de là, c'était le national-socialiste (selon ses propres mots), antisémite et "ami des musulmans" (à condition qu'ils se tiennent tranquilles et "aiment la France") Alain Soral qui tenait une séance de dédicaces de son dernier torche-balle à l'Athénée municipal. Malgré la faible publicité dont "l'essayiste" entoure ses sorties physiques (contrairement à ses vidéos d'élucubrations), environ 70 personnes étaient rassemblées à quelques mètres contre sa présence ; puis s'en sont allées (pour la plupart) rejoindre la manif contre l'islamophobie de l'autre côté du Pont de Pierre. Là, les antifascistes ont tenté de s'approcher des islamophobes pour leur dire, chanter, crier ou éventuellement exprimer à coup de canettes, de près, tout le bien qu'ils-elles pensent d'eux. Les CRS et la BAC (on s'en serait douté...) ont protégé leurs petits copains et quatre antifascistes ont été arrêtés (mais rapidement libérés heureusement).

    Voici quelques articles parus dans la presse locale :  

    http://www.francebleu.fr/infos/musulman/bordeaux-manifestations-pour-et-contre-le-centre-culturel-musulman-1260322

    http://www.sudouest.fr/2014/02/09/face-a-face-a-stalingrad-1456391-2780.php (réservé aux abonnés, mais le temps que ça passe en gris vous avez largement le temps de lire ou de faire un copié-collé sous Word)

    http://www.sudouest.fr/2014/02/08/future-mosquee-de-bordeaux-quatre-interpellations-lors-des-manifestations-1456205-2780.php

    1656095 535813566531369 697164588 n

    LA RIPOSTE POPULAIRE, RÉVOLUTIONNAIRE et UNIE NE FAIT QUE COMMENCER !


     

    (1) : Bon, en réalité, en tenant compte de cette autonomie vis-à-vis de la "gauche républicaine" et hors événement particulier (assassinat de Clément Méric, Le Pen au 2d tour en 2002 etc.), c'était possiblement le plus gros rassemblement antifasciste sur la capitale depuis au moins 15 ans (mais certain-e-s ont préféré se focaliser sur la désormais fameuse banderole antisioniste, voir ici la mise au point de la Horde, collectif antifasciste libertaire à l'initiative de l'appel).

     


    votre commentaire

  • À l'occasion du 80ème anniversaire du 6 février 1934, nous republions ici l'article que nous avions consacré en février 2012 à l'analyse du fascisme de cette époque, dans l’État "France", par l'historien américain Robert Soucy :

    Le fascisme en France : l'analyse de Robert Soucy


    Comme nous l'avions déjà dit à l'époque, l'intérêt majeur de cette analyse est sa RUPTURE avec l'historiographie dominante de la "France" des Trente Glorieuses (René Rémond et compagnie), (très) timidement remise en cause à partir des années 1980 : il n'y aurait "pas vraiment eu" de fascisme français pendant l'entre-deux-guerres, ou alors comme phénomène "très marginal" ; "marginalité" qui impose bien sûr de "dé-fasciser" les Croix-de-Feu/Parti social français (500.000 à 1 million de membres et 15% des suffrages à la fin des années 1930, 11 députés, 541 conseillers généraux et 3.000 maires en 1939) soi-disant "trop respectueuses des institutions parlementaires" 6fev3412ou encore l'Action Française ("trop conservatrice et traditionaliste"), mais aussi la floraison de propos autoritaristes (pour un "régime fort"), antisocialistes et anticommunistes violents, antisémites (bien sûr) et xénophobes, pro-Hitler ou (plus souvent encore) pro-Mussolini à la droite (Fédération républicaine)... mais aussi bien au centre de l'hémicycle "républicain" pendant la quinzaine d'années précédant le conflit.

    Tout ceci convergeant bien sûr (c'est le but…) dans la thèse de l'"accidentalité" de Vichy, simple "parenthèse sombre" de l'histoire hexagonale, pur produit de la défaite, de l'occupation étrangère et de la "si humaine lâcheté" devant le traumatisme des évènements, facteurs permettant à une "ultra-minorité illégitime" de s'emparer de l’État français "failli" pour le mettre au service de la barbarie nazie. Peu importe que cette thèse ne résiste pas à la moindre étude historique sérieuse, du moment que cette étude reste ignorée des larges masses… Peu importe que non seulement les pleins pouvoirs à Pétain, mais aussi les fondements juridiques et idéologiques ("L’Assemblée nationale donne tout pouvoir au gouvernement de la République, sous l’autorité et la signature du maréchal Pétain, à l’effet de promulguer par un ou plusieurs actes une nouvelle constitution de l’État français. Cette constitution devra garantir les droits du Travail, de la Famille et de la Patrie") de la "Révolution nationale" aient été votés par une majorité écrasante (649 sur 907) du Parlement d'alors, le Parlement élu en 1936, celui... du Front populaire. Peu importe que ledit Parlement n'ai nullement été dissous mais simplement "suspendu" (et certes purgé des figures les plus éminentes du Front populaire qui auraient "conduit à la catastrophe"), et qu'en janvier 1941 ait été mis en place un "Conseil national" de 213 membres choisis comme suit :

    "Parmi les politiques, les élus de droite et du centre-droit dominent ; des radicaux-socialistes et des socialistes, issus de la mouvance pacifiste de l'avant-guerre ; des PSF (Parti Social Français) comme le colonel François de La Rocque - qui en démissionne 6 mois plus tard - ou Stanislas Devaud, député de Constantine.
    La mouvance fasciste ou proto-fasciste est représentée par certains de ses chefs de file comme Jacques Doriot (Seine), chef du Parti populaire français. On trouve quelques parlementaires de la mouvance agrarienne : Louis Guillon, fondateur du Parti républicain agraire et social, le député Pierre Mathé (Côte-d'Or), et Henri Dorgères, délégué à la propagande du Comité central d'action et de défense paysanne.
    La droite conservatrice est représentée par l’intermédiaire des députés Augustin Michel (Haute-Loire), Emmanuel Temple (Aveyron), Ernest de Framond de La Framondie (Lozère), Jean Crouan (Finistère), François Martin (Aveyron), membres de la Fédération républicaine, le sénateur Louis Linyer (Loire-Inférieure), ainsi que des parlementaires conservateurs comme Léopold Robert dit Jean Yole (Vendée), les députés Robert Sérot (Moselle), et Émile Taudière (Deux-Sèvres), républicains indépendants et Jean Le Cour-Grandmaison (Loire-Inférieure), député, président de la Fédération nationale catholique.
    Le centre-droit est quant à lui fortement représenté par des députés comme Paul Bacquet (Pas-de-Calais), Léon Baréty (Alpes-Maritimes), député du centre-droite (Alliance démocratique), Louis de Diesbach de Belleroche (Pas-de-Calais), Maurice Drouot (Haute-Saône), Joseph Féga, Pierre Dignac (Gironde), André Magnan (Loire), Aimé Tranchand (Vienne) et des sénateurs Jean Boivin-Champeaux (Calvados), Charles Bouissoud, Victor Constant (Seine), Charles-Henri Cournault (Meurthe-et-Moselle), Jean Fabry (Doubs)), membres ou proches de l’Alliance démocratique. Autre tendance du centre-droite également très présente dans ce Conseil, la mouvance radicale indépendante : l’ancien député et ministre Louis Germain-Martin, les députés Albert Dubosc (Seine-Inférieure), Louis Buyat (Isère), Jean Montigny (Sarthe), Paul Saurin (Oran), Gratien Candace (Guadeloupe), ainsi que les sénateurs Jacques Bardoux (Puy-de-Dôme), Edmond Hannotin (Ardennes), Émile Mireaux (Hautes-Pyrénées), André Mallarmé (Alger), Édouard Roussel (Nord) y siègent. Le centre-gauche est essentiellement représenté par quelques radicaux-socialistes : les députés Albert Chichery (Indre), Georges Bonnet, Lucien Lamoureux (Allier), Jean Mistler (Aude), et les sénateurs de la Gauche démocratique Pierre de Courtois (Basses-Alpes), Émile Cassez (Haute-Marne, ancien ministre), Paul Maulion (Morbihan). On trouve également quelques socialistes indépendants : les députés Édouard Barthe (Hérault) et Antoine Cayrel (Gironde), ainsi que le sénateur René Gounin (Charente). Enfin, Gaston Bergery (Seine-et-Oise), député du Parti frontiste, ancien radical-socialiste, fit également partie de ce Conseil. Enfin, un quarteron de socialistes fut également appelé à siéger à ce conseil : les députés René Brunet, Paul Faure (Saône-et-Loire), Isidore Thivrier (Allier), Louis L'Hévéder (Morbihan). S’ajoutent quelques indépendants : les sénateurs non-inscrits Paul Brasseau (Seine-et-Oise), René Courtier (Seine-et-Oise), Jean Jacquy (Marne), Manuel Fourcade (Hautes-Pyrénées).
    Des syndicalistes de la mouvance pacifiste et anticommuniste, proches de René Belin en sont aussi membres : Pierre Vigne, secrétaire général de la Fédération du sous-sol, Alfred Savoie, de la Fédération de l'alimentation, Liochon, secrétaire général des travailleurs du livre, Marcel Roy, secrétaire de la Fédération des métaux et Georges Dumoulin, que l'on retrouvera dans l'hebdomadaire L'Atelier et au Rassemblement national populaire de Déat. On relève des conseillers issus du monde agricole ou théoriciens du corporatisme chrétien comme Louis Salleron. Jacques Doriot et le colonel de La Rocque représentent, quant à eux, les publicistes. Pressenti, André Siegfried refuse de siéger"
    ...

    CQFD. Peu importe que Vichy ait recyclé, quand il ne l'a pas carrément promu, la quasi-totalité du personnel politique et administratif présent en 1939 ; et qu'il n'ait nullement prétendu au monopartisme, se fabriquant au contraire tout un éventail politique de l'extrême-droite à la "gauche" (Déat, Doriot ; le premier assumant même totalement l'héritage "révolutionnaire" bourgeois dans sa version jacobine et la prétendue "continuité" de celui-ci avec le "nouvel ordre européen" national-socialiste...), "continuant" une "France" qui aurait simplement été "expurgée" de son "anti-", de ses "ennemis intérieurs".

    concordeCe qui importe, surtout, c'est que cette négation de la continuité entre la IIIe République du Grand Capital et Vichy permette aussi de faire oublier celle entre Vichy et la République d'après-guerre, littéralement truffée de "vichysto-résistants", ces partisans de la "Révolution nationale" ralliés à la "France libre" (généralement) après les débarquements alliés en Afrique du Nord (novembre 1942) puis en Italie (été 1943) et dont certains seront appelés à de très hautes destinées : Maurice Papon, préfet-proconsul en Algérie, au Maroc et en Corse puis préfet de police de Paris (1958-67) et ministre du Budget de Giscard (1978-81) ; Raymond Marcellin, Ministre de l'Intérieur de triste mémoire (1968-74) ; Maurice Couve de Murville, Premier ministre (1968-69) et précédemment Ministre des Affaires étrangères depuis 1958 ; sans oublier bien sûr (last but not least) François Mitterrand, inoxydable ministre régalien (Justice, Intérieur) de la IVe République et Président de la Ve (1981-95)… Tout cela tranquillement jusqu’à leur extinction générationnelle pour cause de vieillesse (vieillesse certes quelque peu écourtée pour un René Bousquet par exemple).

    Finalement, si l'on laisse de côté ceux (nombreux) qui aujourd'hui oublient ou minimisent les évènements de février 1934, c'est cette même logique que l'on retrouve chez ceux qui les mettent en avant pour célébrer qui la "victoire de la République", qui celle de ce qui deviendra le Front populaire entre radicaux, socialistes et communistes (les deux ne faisant d'ailleurs qu'un pour certains) : un fascisme "marginal"... ou pas mais en tout cas extérieur (marginal dans ce sens-là) au "système France", se lançant à l'assaut de la "Sainte" République et heureusement défait grâce à la mobilisation démocratique-républicaine se levant des usines comme des campagnes, des bureaux comme des salons littéraires...

    Mais en réalité, bien loin d'objectifs "révolutionnaires", les ligues d'extrême-droite réclamaient "simplement" la démission du gouvernement (vite fait de gauche) mouillé dans l'affaire Stavisky et le retour à son poste... du préfet de police de Paris, Jean Chiappe, réputé bien-de-droite et limogé quelques jours plus tôt. La quasi-totalité des députés du centre et de droite, au demeurant, avaient démissionné en protestation contre ce limogeage...  Et pour héroïque qu'elle ait été (de ces moments héroïques qui forgent notre histoire et préparent les victoires de demain), la mobilisation antifasciste socialiste et communiste n'a pas à elle seule "déjoué" le (supposé) sinistre "plan" de prise de pouvoir fasciste : c'est bel et bien la République bourgeoise qui a résisté ou plutôt, la bourgeoisie monopoliste dominante qui a décidé que le moment n'était pas venu et que, en l'état des circonstances, le régime de la IIIe République, certes usé mais doté d'un bel acte de naissance (l'égorgement des Communes en 1871) et de beaux états de service (depuis) dans la répression des mouvements ouvriers et populaires, était encore "le pire à l'exclusion de tous les autres" pour servir ses intérêts. Plus que sur les casques de la garde mobile ou sur la haie de fer des masses ouvrières mobilisées, la tentative des ligues s'est brisée sur une majorité silencieuse travaillée depuis 60 ans par les idéologues et autres "hussards noirs" républicains ; cette majorité silencieuse, acteur essentiel de l'histoire, qui n'a jamais serment1934été que la volonté des dominants faite peuple et que Gramsci appelle "société civile", la même sur laquelle se brisa la tentative putschiste d'Alger en 1961 ; sachant au demeurant que toutes les ligues présentes (et notamment les Croix-de-Feu de La Rocque, explicitement) ne partageaient pas l'idée d'une prise du pouvoir par la force, mais parfois simplement d'un "coup de pression" permettant une reprise en main institutionnelle du pays par la droite... C'est d'ailleurs ce qui se produisit : le gouvernement du second Cartel des Gauches (Daladier) tomba, fut remplacé par un gouvernement d'"union nationale" nettement plus ancré à droite... et tout rentra rapidement dans l'ordre, Chiappe revenant pour sa part à la tête du Conseil municipal de Paris dès l'année suivante. Jusqu'à la prochaine crise, bien plus grave en l'occurrence (et aux conséquences du coup beaucoup plus graves) : la guerre, la défaite, l'occupation. Une réalité toute bête, c'est qu'il n'y pas (il n'y a JAMAIS eu) d'instauration du fascisme dans un pays quel qu'il soit si la FORCE ARMÉE, l'état-major militaire, ne le veut pas ; fut-ce comme solution "provisoire" qui ensuite perdurerait contre le souhait de bon nombre de ses initiateurs (si une partie seulement le veut, le fascisme peut aussi s'installer après une guerre civile comme en "Espagne"). Mais encore derrière la Force armée il y a la classe dominante-possédante, le Grand Capital, la bourgeoisie monopoliste. En Février 34, l'Armée n'a nullement "bougé" (même en partie) en faveur des émeutiers d'extrême-droite ; il est même probable qu'elle serait intervenue CONTRE eux si nécessaire (en cas de prise du Palais Bourbon) ; en revanche, avec le patronat (Comité des Forges etc.), elle a poussé à la démission de Daladier dès le lendemain et à la formation d'un nouveau gouvernement radicaux-droite (dans lequel s'illustrera notamment un certain Pierre Laval...) ; ce qui était d'ailleurs sans doute l'objectif d'une grande partie des manifestants (comme les Croix-de-Feu).

    Ce que l'on voit clairement là, c'est que si la tendance au fascisme face à la crise générale du capitalisme des années 1930 était bel et bien une réalité, elle avait également des caractéristiques TRÈS DIFFÉRENTES dans un système bourgeois politiquement mature comme la "France" de ce qu'elle pouvait avoir dans des pays nouveaux-nés comme ceux d'Europe de l'Est (de la Finlande à la Turquie), arriérés comme l’État espagnol ou le Portugal, ou en tout cas jeunes et n'ayant pas encore consolidé et ancré une vraie idéologie dominante dans les masses comme l'Italie ou l'Allemagne, avec d'autant plus de gravité, dans ce dernier cas, qu'il y avait de décalage entre cette immaturité politique et l'extrême modernité du développement capitaliste. En un mot : la tendance au fascisme est autant une réalité (hier comme aujourd'hui) en France qu'ailleurs, mais il est illusoire et finalement suicidaire de l'attendre sous les habits bruns du NSDAP allemand.

    Dans la nouvelle crise générale du capitalisme mondial commencée depuis 1970, mais entrée dans sa phase aiguë depuis 2007-2008, c'est exactement cette même erreur qui amène les uns à nier la tendance au fascisme du régime capitaliste dans lequel nous vivons (et à se concentrer, par exemple, uniquement sur les "attaques contre les travailleurs et les acquis sociaux", dans une logique économiste), et les autres à se concentrer sur des appendices du phénomène, "maîtres quenelliers" de Dieudonné, conspirationnistes de tout poil fleurissant sur la toile ou bandes nazillonnes ultras (à combattre par tous les moyens bien entendu) sévissant dans la rue, jusqu'à parfois tomber dans la pire alliance qui soit, celle avec l’État républicain bourgeois... du CŒUR duquel viendra, le moment venu, la dictature terroriste ouverte autrement appelée fascisme !

    printemps françaisNous, depuis le début en octobre 2009, avons clairement tracé le parallèle entre la situation actuelle et celle de l'entre-deux-guerres, montrant même les ressemblances saisissantes entres les forces en présence dans les deux cas : non seulement entre le fleurissement des "ligues" de l'époque et celui des "Blocs" ceci ou "Jeunesses" cela, des "Printemps français", "Résistance républicaine" et autres "Jours de Colère", bref de l'atmosphère de "Mai 68 de droite" actuelle (particulièrement depuis la victoire "socialiste" de 2012) ; mais aussi entre les Croix-de-Feu/PSF et le Front Nation "dédiabolisé", "reconnaissant les valeurs de la République" et rassemblant (très) large (6 millions et demi de voix à la présidentielle, 3 et demi aux législatives) de Marine Le Pen, et entre l'UMP de plus en plus "décomplexée" de Copé et consorts et la Fédération républicaine des années 1930 qui fournira à Vichy plus d'un de ses acteurs de premier plan (Xavier Vallat, Philippe Henriot) ; sans même parler des tendances de plus en plus droitières à "gauche", au PS et même au P'c'. La seule différence (mais majeure...) étant la haute improbabilité d'une situation comparable à la défaite et l'occupation de 1940, et même au bourbier algérien de 1958, laissant donc ouvert le point d'interrogation quant à la situation exceptionnelle qui ferait passer de la fascisation rampante au fascisme stricto sensu (attaques "terroristes" majeures ? situation de "guerre civile" dans les quartiers populaires ?). En tout cas, si les circonstances sont peut-être du domaine de la politique-fiction, la "solution" est déjà dans les tuyaux... et ce n'est pas un allumé internétique (Soral ou autre) qui le dit, mais bien le leader du principal parti "républicain" d'opposition.

    Nous n'avons nullement besoin de "date anniversaire" (fut-ce octodécennale) pour exprimer notre point de vue sur la question : le capitalisme est en crise générale et celle-ci, après une brève et illusoire "reprise" suite à la défaite stratégique de l'URSS, est même entrée dans sa phase terminale ; la tendance au fascisme (fascisation rampante) en est l'expression politique incontournable dans un système capitaliste monopoliste, et cela n'a pas commencé hier mais bien depuis 20 voire 30 ans (même si les choses ont, peut-être, été un peu freinées par le mitterrandisme et le jospinisme) ; il faut combattre les mille et une expressions de cette tendance, les mille et une têtes de l'hydre fasciste sur la terrain de notre vie sociale populaire ; MAIS il ne faut jamais perdre de vue, jamais baisser la garde envers l’État qui est le cœur du problème et là d'où, en dernière instance, viendra le coup décisif (comme le vote pour la "Révolution nationale" en juillet 1940, l'appel à "l'homme providentiel" De Gaulle en mai 1958, etc.).

    français en colèreCe que nous avons dit et qui a pu, le cas échéant, nous être reproché ; mais que nous répéterons toujours, en lien avec tout ce que nous avons exposé plus haut ; c'est que le mouvement révolutionnaire du prolétariat doit être plus vigilant aujourd'hui qu'hier, au regard de l'expérience historique, à développer un véritable antifascisme populaire AUTONOME qui ne se mette pas purement et simplement à la remorque de l'aile "gauche" (ou prétendue telle...) du système "républicain" bourgeois BBR, "gauche" qui dans l'histoire a toujours fini par être la droite quelques générations plus tard... voire beaucoup plus vite pour certains éléments. Un antifascisme qui ne se jette pas, par exemple, dans les bras d'un Manuel Valls, profil même du "républicain" de "centre-gauche" qui aurait été vichyste sans états d'âme en 1940, 41 et peut-être même 42 ; contre un "antisionisme" antisémite et complotiste (anti-impérialisme des imbéciles) détestable et écœurant, vomitif même, mais nullement mainstream dans la tendance fasciste générale - tout au plus des tirailleurs idiots utiles qui, le moment venu, finiront comme les SA allemands de la Nuit des Longs Couteaux...

    Si nous retenons évidemment du 6 février 1934 (et de tout ce qui a suivi) l'enseignement que la mobilisation progressiste de masse, sous la direction des révolutionnaires communistes, peut faire reculer le fascisme ; nous retenons aussi L'AUTRE enseignement fondamental, celui de la faillite politique totale d'un mouvement révolutionnaire antifasciste qui se VEND sans guère de conditions à l'"antifascisme" républicain bourgeois, lequel s'en va de ce pas (par exemple) continuer à mitrailler ou carrément bombarder, à massacrer sans nom dans les colonies (comme en Algérie en 1945, alors que l'Europe célébrait la défaite du fascisme justement...) ; bien loin - il faut dire à décharge... - des délicats regards métropolitains qui du coup (comme l'expliquait Césaire) sont saisis d'effroi lorsque des verts-de-gris demissionviennent commettre de telles choses sous leurs riants clochers ;  et puis chuuut, il ne faut surtout rien dire car cela "casse le front républicain" et "fait le jeu du fascisme"... Un peuple complice de l'oppression d'un autre ne saurait être libre : tel est l'enseignement que nous lègue l'histoire du siècle dernier, à nous communistes "occidentaux" ; la "République française" est un appareil INTERNATIONAL d'oppression ; et c'est ainsi (faute d'avoir compris cela) qu'en février 1934 et en 1936-39 comme en 1944-45, en 1961-62 (putschistes de Salan et OAS) ou encore dans les années 1980 avec SOS-et-compagnie, le fascisme a bel et bien reculé... pour mieux sauter, et non été écrasé en même temps que le capitalisme impérialiste dont il n'est que le visage sans fard ; ce dernier ne faisant que se réorganiser et se moderniser jusqu'à la nouvelle crise... et au nouveau pourrissement fasciste.

    Et puis, pour qui a étudié le fascisme en marxiste conséquent, celui-ci apparaît en définitive comme une caporalisation du système capitaliste d'un État donné et de ses contradictions, face aux urgences posées par la crise générale. Pour comprendre la tendance au fascisme dans l’État capitaliste où nous vivons, il faut donc avoir compris le "système" que celui-ci recouvre, et ses contradictions. Et cela, c'est justement tout le travail que mène Servir le Peuple depuis des années, pour comprendre la "France" comme système produit d'une construction historique.

    Si nous sommes MAOÏSTES et non "marxistes-léninistes" (encore moins thoréziens), c'est précisément parce que le modèle absolu pour nous n'est pas le Front populaire, ni en "France" ni en "Espagne", ni avec Thorez ni avec Carrillo, mais bien l'indépendance politique et de classe gardée par le PC chinois de Mao vis-à-vis du Kuomintang bourgeois et pro-occidental, dans la résistance unie contre la barbare invasion impérialiste japonaise aux 20 millions de mort-e-s !


    CONTRE LE FASCISME, VISAGE NU DU CAPITAL, DANS L’UNITÉ POPULAIRE CONSTRUISONS LA RIPOSTE RÉVOLUTIONNAIRE !!!

     

    9-fevrier-2014 


    votre commentaire
  •  


    Excellent article publié en septembre dernier sur le site du PCmF. Incontournable pour écraser le confusionnisme et le "campisme", déviations qui (parfois) mènent tout droit à la Main d'Or...  


    Le repartage du monde entre les puissances impérialistes

    Les marxistes-léninistes-maoïstes et les confusionnistes 


    ob_8ef3f327add566c38456067cbbc7d6aa_inter-imperialiste.jpg"Ce qui est l’essence même de l’impérialisme, c’est la rivalité de plusieurs grandes puissances tendant à l’hégémonie, c’est-à-dire à la conquête de territoires- non pas tant pour elles-mêmes que pour affaiblir l’adversaire et saper son hégémonie." (Lénine, L'impérialisme, stade suprême du capitalisme)

    Alors que les puissances occidentales s’agitent dans une perspective d’intervention militaire en Syrie, on observe dans les différents groupes politiques « de gauche » et chez les masses populaires d’énormes confusions.

    Soutien sans réserve pour les uns à Bachar el Assad, perçu comme un résistant à l’impérialisme ; soutien à l’Armée Syrienne Libre pour les autres, perçue comme d’authentiques révolutionnaires. Ces positions erronées proviennent de l’ignorance de l’impérialisme dans son essence et du mode de production capitaliste en général. L’ignorance de la vraie nature de l’impérialisme, entraine dans un cas comme le conflit en Syrie, l’alignement sur les intérêts bourgeois des différentes puissances en présence. Les véritables causes tant internes qu’externes à la crise syrienne sont délibérément ignorées. Aussi, il ne faut pas se perdre dans un débat inutile sur l’utilisation ou non d’armes chimiques par le régime syrien - cela n’a d’importance politique que pour l’opinion publique. Les raisons de l’agitation guerrière n’ont rien à voir avec ça.

    C’est en prenant le cadre politique global de repartage du monde entre les différentes puissances impérialistes depuis plusieurs années qu’il faut analyser ce conflit. Bien sûr, celui-ci à ses propres causes internes à la société syrienne, mais les expéditions militaires de ces dernières années tant en Cote d’Ivoire, en Lybie, au Mali ; l’envoi récent de troupes supplémentaires au Cameroun, et le terrain actuel de grande tension internationale qu’est la Syrie s’explique par la phrase de Lénine citée plus haut. La concurrence économique féroce dans laquelle s’affrontent les différents États capitalistes pour assurer la domination de leurs monopoles sur les matières premières et la force de travail des peuples dominés, voilà la cause du mouvement des impérialistes, c’est cette incessante lutte pour l’hégémonie économique qui fait avancer leurs pions, qui dessine leurs alliances et exacerbe les conflits d’intérêts d’un camp impérialiste contre un autre. Les partisans du régime de Damas qui le présente comme un rempart contre l’islamisme et l’impérialisme sont des anti-impérialistes en paroles et des défenseurs de l’impérialisme en pratique. Car ils ne veulent voir qu’un seul côté du phénomène impérialiste mondial. Leur raisonnement consiste en ce que l’impérialisme se définit par U.S.A et U.E. Ceux-ci arment les rebelles syriens alors il faut défendre ce régime contre l’impérialisme atlantique, et du coup on soutient la Russie et la Chine ! C’est voir les choses en borgne. C’est balayer la nature impérialiste des États russe et chinois, c’est faire le jeu d’un camp impérialiste contre un autre. Les communistes n’ont pas à défendre des intérêts qui ne sont pas ceux de la classe ouvrière et des masses exploitées, mais qui sont juste la lutte pour la sauvegarde et l’extension des monopoles d’une poignée de bourgeois, et ceci qu’ils soient yankees, français, russes, ou chinois.

    Si nous défendons sans esprit d’analyse, comme le font certains, le régime d’Assad, ce serait dire aux masses qu’un impérialisme est meilleur qu’un autre. C’est une position intenable et qui n’aide pas les peuples du monde à comprendre et par la même combattre fermement la domination impérialiste.

    La théorie maoïste nous apprend que « partout ou il y a une guerre, il y a une situation militaire d’ensemble.» (Mao Tse Toung, Problèmes stratégiques de la guerre révolutionnaire en Chine).

    Si l'on comprend cela et le fait que la guerre sert les intérêts d’une classe dominante d’un pays donné, il doit être facile de comprendre que si les faiseurs de guerre occidentaux, sans oublier bien sur le Qatar, l’Arabie Saoudite, la Turquie et Israël soutiennent et arment l’ASL pour défendre leurs intérêts ; la Chine et la Russie soutiennent Bachar pour les leurs et non pour les intérêts du peuple syrien. C’est comprendre une situation dans son ensemble, globalement et non de manière partielle, incomplète. Toute critique de la guerre impérialiste qui ne prend pas en considération l’ensemble des politiques des pays impérialistes depuis ces dernières années ne peut refléter une juste compréhension de la situation mondiale actuelle.

    Tous les peuples, de tous les continents qui subissent l’impérialisme d’une ou plusieurs grandes puissances, doivent compter sur leurs propres forces s’ils veulent se débarrasser à jamais de la misère et de l’exploitation. La domination d’un maitre ne saurait être plus enviable que celle d’un autre.

    La Russie et la Chine, qui ont fait preuve de faiblesse sur la Lybie, sont bien contraintes aujourd’hui de mettre la pression s’ils ne veulent pas se faire bouffer leurs marchés par les impérialistes occidentaux, paniqués de la forte ascension de leurs concurrents asiatiques.

    Chacun travaille à son hégémonie et non à la liberté des peuples, du Mali à la Syrie. Écoutons les fantasmes de la bourgeoisie française exprimés par la ministre du commerce extérieur, Nicole Brick dans son « devoir » sur « la France de 2025 ». Elle nous parle de la présence française en Afrique : « La France, parallèlement l’Europe, ont perdu leur place de partenaires privilégiés. Nous devons la retrouver d’ici 2025. La décennie à venir sera donc celle du retour à l’Afrique. »

    Et pourquoi cette chère France ne fait plus office de partenaire privilégié avec l’Afrique ? Parce que l’État chinois y conquiert toujours plus de marchés et par là sape le taux de profit des capitalistes français !

    Messieurs les humanitaires, qui vous extasiez en éloges sur la France républicaine venue sauver les Maliens des coupeurs de mains et de pieds, pensez vous vraiment que la guerre soit un acte de charité, ou êtes vous de simples hypocrites, des valets de l’impérialisme ?

    lafarguecartechineafrique.jpg

    Vous qui attendez les conclusions d’une enquête de l’ONU sur « gaz ou pas gaz ? », ignorez vous vraiment que ce n’est pas l’abus d’une arme spécifique qui est la cause du mouvement des impérialistes dans l’escalade vers la guerre ?

    La défense de leurs marchés, l’extension de nouveaux marchés voici leurs buts. Cette foutue concurrence mondiale. Vous savez ? Celle qui est dans la bouche de tous les politicards bourgeois de notre pays lorsqu’ils disent que la France n’est pas assez « compétitive ».

    Combattre l’impérialisme exige également de balayer les partisans de la France « dominée » par l’impérialisme U.S, clamant qu’elle agirait comme un simple pion. C’est une théorie dangereuse, car elle trompe les masses sur la nature de l’État français ; un État colonialiste et impérialiste qui exploite les peuples du monde pour les intérêts de sa bourgeoisie monopoliste. Lorsque la France mène la guerre au Mali, ne protège elle pas ses intérêts dans ce pays et au Niger voisin ? L’armée française se bat elle pour Areva ou pour Coca-Cola ? On voudrait nous faire croire que les intérêts rapaces de l’État français ne sont pas en jeu dans le conflit syrien. Mais qui ignore la présence de l’impérialisme bleu-blanc-rouge au Liban ? Ses importants intérêts économiques et sa présence militaire via la Finul. Là non plus, comme la Chine et la Russie, la France ne vaut pas mieux que les États-Unis.

    a07fcb9c-9321-11df-84a3-d79eb2f51e7e.jpg

    Que disent les « amis » du peuple syrien ?


    Nous pouvons classer ces « amis » en plusieurs catégories politiques.

    Le P « c » F : « Non à toute interventions militaires en Syrie ! Empêchons que les militaires français soient expédiés en mercenaires de l’impérialisme ! »

    Le P « c » F est contre l’intervention militaire française, mais fidèle à son attitude de défenseur de l’État bourgeois, il s’indigne qu’on veuille faire de l’armée française une bande de mercenaires de l’impérialisme. Comme si elle ne l’était pas ! À moins que pour le P « c » F, « impérialisme » veuille dire « USA ». Appelons un chat un chat, l’impérialisme français est en tête des fauteurs de guerre, et il défend ses propres intérêts dans la région.

    Poursuivons : « depuis deux ans et demi, une révolte sociale, injustement et cruellement réprimée par un pouvoir qui n’a pas notre sympathie, a été détournée en guerre civile. Des groupes, des communautés, soucieux de ravir le pouvoir localement ou nationalement, se sont opposés au régime avec armes, incités dès le départ par des puissances étrangères ». On voit bien là le reflet de la ligne pacifiste et réformiste du P « c » F, incapable de poser le problème de la direction prolétarienne pour lutter contre l’impérialisme. Tout se résume ici en vœux pieux : « l’arrêt des ingérences impérialistes est le préalable nécessaire à un retour à la paix, un retour des réfugiés, à la reconstruction du pays, au rétablissement de sa cohésion, à une évolution démocratique après l’expérience de la tragédie ». Voilà comment ils veulent en finir avec l’impérialisme et leurs chiens de garde laïcs ou religieux ! Alors que le peuple a besoin d’une stratégie révolutionnaire, le P « c » F prône la stratégie des doléances aux impérialistes, une solution venue d’en haut, bref, une politique pacifiste qui désarme les masses. Ils sont dans leur rôle d’hypocrites bourgeois, partisans d’une « solution politique » faisant semblant d’ignorer que, comme le résumait Clausewitz « La guerre est la continuation de la politique par d’autres moyens ».

    Le Parti de gauche : « Le rôle de la France n’est pas de suivre les États-Unis dans leur nouveau délire guerrier ». De même que leurs compères du front de gauche cité plus haut, on apprend que la France ne saurait être impérialiste. Si elle entre en guerre c’est forcément pour le compte de l’empire Yankee. Ce parti a pourtant soutenu l’impérialisme français en Lybie et au Mali (sous couverts humanitaires bien sûr…). Le parti de gauche demande une nouvelle fois un règlement négocié du conflit dans le cadre de la seule institution internationale jugée « légitime », l’ONU, et des accords de Genève qui prévoyaient un cessez-le-feu et une transition négociée, des élections libres et transparentes, bref, tout l’attirail de la pensée bourgeoise. Là encore on ne veut pas appeler un chat un chat. L’impérialisme français a agi en Lybie en concert avec l’impérialisme italien qui a apporté son soutien logistique. On voudrait nous présenter l’ONU comme un organisme au-dessus des intérêts des classes dirigeantes.  Rappelons-nous la guerre de Corée, l’ONU avait formé un corps international par les USA. Au Cambodge, au Congo, qu’ont-ils semé les représentants de l’ONU tant civils que militaires ? Protection des exploiteurs locaux compradores, viols et prostitution infantile. Qu’ont-ils apporté à Haïti, si ce n’est le choléra ?  

    Le PCOF : Que dit le PCOF, membre du même front d’opportunistes que les deux précités, ex pro-Hoxha ? Dans son communiqué il ne dénonce pas nommément l’impérialisme français, mais les dirigeants des grandes puissances occidentales. Certes il écrit : "Nous n’avons cessé de dénoncer Bachar el-Assad, mais nous avons avant tout mis en garde et exprimé notre opposition à toute opération militaire des puissances impérialistes qui veulent se débarrasser du régime syrien, pour en mettre un autre à la place qui leur saura favorable." Pas un mot sur la lutte inter-impérialiste entre les anciens impérialistes et les nouveaux (Russie et Chine). Où est la stratégie de cet ex-parti révolutionnaire dont le combat essentiel a été de profiter du désarroi du mouvement communiste international après la mort de Mao Tsé-toung pour attaquer le maoïsme et ainsi s’opposer à la lutte révolutionnaire armée, à la Guerre populaire ? Aujourd’hui ils bêlent avec les moutons et n’apportent rien de concret, aucune stratégie à notre peuple et aux autres peuples du monde.

    Le PRCF : Des nationalistes chauvins comme le PRCF se font l’écho de l’impérialisme lorsqu’ils déclarent « C’est un Fabius militariste, comme aux plus belles heures coloniales des socialistes français qui renie les principes défendus par la France lors de l’invasion américaine en Irak face à Bush, Dominique de Villepin avait refusé toute intervention militaire… ». Malheureux d’entendre pareilles conneries de la part de gens se revendiquant communistes. Ainsi la France aurait refusé la guerre en Irak en vertu de « principes » et non parce que la guerre contre l’Irak sapait les intérêts que l’impérialisme BBR avait avec Saddam Hussein. Pathétique… De même lorsque les mêmes révisionnistes nous disent « le gouvernement socialiste, qui s’apprête à démolir les retraites […] trouve soudain des milliards d’euros pour agresser un peuple souverain, alors qu’il prétend ne plus avoir d’argent pour la protection sociale et les services publics. »

    Renvoyons les donc à une leçon élémentaire du Manifeste de Marx et Engels : « Par quel moyen la bourgeoisie surmonte-t-elle les crises ? D’une part par l’anéantissement forcé d’une masse de forces productives ; d’autre part par la conquête de nouveaux marchés et l’exploitation plus poussée des anciens. »

    Il n’y a donc rien d’étonnant dans les pratiques du gouvernement « socialiste ». Exploitation plus intensive de la force de travail des prolétaires, destruction des acquis sociaux des travailleurs et conquête de nouveaux marchés par la guerre vont ensemble comme les ingrédients d’une même recette. À l’étape impérialiste, c’est d’une logique claire pour les communistes trempés dans la théorie marxiste-léniniste-maoïste.

    L’URCF : Si cette organisation est une des seules à avoir appelé à l’unité d’action des communistes contre la guerre en Syrie, elle s’affiche en véritable soutien au régime de Damas, résumant outre l’accaparement des richesses comme but pour les impérialistes, leur volonté de « briser l’axe de la résistance contre l’impérialisme américano-sioniste ». Voici la défense d’un impérialisme contre un autre dans toute sa splendeur ! Il n’existe pas de lutte inter-impérialiste mais un impérialisme américano-sioniste contre un « axe de la résistance ». Que l’URCF nous informe si la Syrie faisait déjà partie de cet axe lorsque Hafez el Assad massacrait les communistes de Syrie ? À quoi ressemble donc cet axe ? Un triumvirat nous vient à l’esprit : la Chine, la Russie, l’Iran. L’URCF ne voit qu’une Syrie une et indivisible, un peuple sans contradictions, une Syrie « qui n’a jamais ménagé sa solidarité avec la cause palestinienne… ». Pour finir, c’est en faveur d’un processus de paix que les membres de ce groupe s’expriment : « Le gouvernement syrien est prêt, sans préalable, à participer à une conférence internationale pour trouver une solution politique au conflit. » et encore « Ce sont les « rebelles » qui ont toujours refusé de négocier… ». On voit où entraine le rejet du maoïsme pour cette organisation ; le rejet de la loi de la contradiction leur empêche d’analyser la situation d’ensemble et de déterminer une ligne juste. Que peut-on attendre d’une organisation qui est passée de la lutte anti-trotskyste aux revendications trotskystes, de la dictature du prolétariat aux accords de paix en faveur d’un chien de garde des impérialistes asiatiques ?


    Du coté des trotskystes…


    Le NPA soutient la déclaration des groupes trotskystes arabes dont celui des trotskystes syriens. Ceux-là même qui versent des illusions sur « le pacifisme de la révolution » (difficile à croire dans une situation comme la leur). Dans sa déclaration du Premier Mai, ce groupe mentionne l’armement des ouvriers, mais les perspectives ne sont pas claires. L’armement est perçu comme une mesure essentiellement défensive, la prise du pouvoir par un processus armé n’est pas évoquée. En voici quelques extraits :

    « Nous appelons les travailleurs et les ouvriers à mettre la main sur les usines et les installations industrielles et agricoles qui ont été fermées par l’État ou les capitalistes, et de les gérer eux-mêmes à travers des conseils ouvriers autonomes. »

    « Il n’y a pas de révolution démocratique radicale, ou plutôt pas de révolution sociale, sans un rôle déterminant et autonome des travailleurs et des masses laborieuses. Œuvrons à constituer des conseils de travailleurs et d’ouvriers dans chaque usine et chaque installation, avec des fractions de résistance ouvrière armées partout. »

    Comme tout groupe trotskyste, il apparait incapable de comprendre les priorités d’un processus révolutionnaire. Il donne, en plus, du crédit à l’ASL qu’il décrit comme une armée constituée d’éléments populaires sans analyser le rapport qu’elle entretien avec les impérialistes occidentaux. Il préconise l’entrisme en son sein. Les trotskystes n’apprennent rien de l’histoire. Ils ne se donnent pas la peine d’étudier les révolutions victorieuses. Leur ligne politique participe à freiner les masses et à jouer le jeu des impérialistes tout en prétendant les combattre. Ils s’obstinent dans une ligne ouvriériste qui ne peut pas répondre correctement aux tâches d’une révolution. Comment les masses populaires de Syrie peuvent elles sortir de l’impasse d’une guerre civile et répondre à l’agression impérialiste sans être regroupées dans un large Front uni anti-impérialiste sous la direction d’un Parti communiste révolutionnaire, armé du marxisme-léninisme-maoïsme ?

    La révolution armée pour la prise du pouvoir : dans n’importe quelle situation, n’importe quel pays, les trotskystes, les gauches « révolutionnaires », ne veulent pas en entendre parler.

    Écoutons-les :

    « Nous dénonçons la complicité directe des gouvernements de la Russie et de l’Iran qui encouragent les crimes d’Al-Assad. Mais nous réaffirmons que les grandes puissances occidentales, en refusant de livrer des armes que réclament depuis tant de mois les structures collectives de lutte dont s’est doté ce peuple, portent une lourde responsabilité dans la perpétuation du régime assassin tout en contribuant au développement de courants obscurantistes religieux qui constituent un second ennemi pour le peuple syrien. »

    De qui se moque le NPA ? Les puissances occidentales et leurs alliés n’arment elles pas l’ASL, que leurs collègues syriens proposent de noyauter ? Mais analysons leurs confusions après cet autre extrait de leur déclaration où il est défendu que les bombardements occidentaux seraient « contre-productifs, face à un régime criminel et aventuriste, qui pourrait au contraire renforcer sa propagande internationale et finalement augmenter les souffrances en Syrie. C’est au peuple syrien de se libérer en toute autodétermination, avec toute l’aide internationale indispensable mais sans les manœuvres et interventions directes d’États qui défendent d’abord leurs propres intérêts. »

    Prenons une aspirine et récapitulons !!! Le NPA dénonce le soutien de la Russie et de l’Iran et reproche aux impérialistes occidentaux de ne pas soutenir les «  rebelles » (ce qu’ils font pourtant - pas assez pour les trotskystes). Les bombardements sont critiqués pour leur seul aspect « contre-productif », les Syriens devraient se libérer tout seuls sans les manœuvres et interventions directes d’États qui défendent leurs propres intérêts (critiqués auparavant pour ne pas fournir d’armes) mais avec toute l’aide internationale indispensable (???).

    Nous nous faisons mal à la tête en mettant à nu autant de profondes contradictions dans si peu de phrases ! Qu’est-ce que « l’aide internationale indispensable » si ce n’est les manœuvres et les interventions directes ou même indirectes des États ? Le NPA attend il une contribution des scouts ? Des associations de motards ou de joueurs de pétanque ? Il n’a pas précisé. Si les États défendent leurs propres intérêts, pourquoi leur reprocher de ne pas fournir d’armes ? L’impérialisme même lorsqu’il fournit du riz le fait, naturellement, dans ses intérêts.  Une quelconque aide internationale « indirecte » tels des organismes comme « Médecins sans frontières » ne servirait elle pas aussi des intérêts des États impérialistes ? Si les impérialistes occidentaux interviennent de façon « indirecte » quelle sera la position du NPA ? Un peu plus et on pourrait penser que le message du NPA s’adresse principalement à l’impérialisme français en ces mots : « Vous n’envoyez pas suffisamment d’armes », « ne bombardez pas le pays, l’ennemi en sera plus fort » ou encore « envoyez des aides via des couvertures humanitaires, des euros etc. »

    Peut-on être considéré comme luttant véritablement contre l’impérialisme lorsque l’on sème des illusions sur sa nature ?

    Nous ne citerons pas tous les autres partis opportunistes, aucun d’eux, derrière l’anti impérialisme dont ils se couvrent n’éclaire le prolétariat des peuples du monde sur la seule route possible pour triompher de tous les impérialistes : la révolution prolétarienne dans les pays impérialistes et celle de la démocratie nouvelle dans les pays opprimés par l’impérialisme.


    Croire au pouvoir des masses


    Le véritable problème dans la situation à l’intérieur de la Syrie réside dans le fait que les masses révolutionnaires refusent de s’armer dans une perspective de prise de pouvoir, laissant ce privilège à l’ASL via les impérialistes occidentaux et leurs alliés Turcs, Qataris, etc.

    Ce que nous avons pu remarquer au sujet de l’ASL, c’est qu’il y a déjà eu des conflits internes en son sein. C’est un indicateur important tant il semble que les impérialistes occidentaux ont du mal à contrôler complètement ce mouvement, d’où le besoin des impérialistes d’intervenir pour faire le boulot à la place de leurs chiens de gardes.

    Les éléments avancés de la classe ouvrière syrienne doivent profiter de cette inorganisation des rebelles pour former leur parti, regrouper les masses populaires dans un front uni et mener la lutte avec leur propres forces armées, indépendante des impérialistes.

    Il appartient aux Syriens de déterminer, en cas d’invasion, la juste voie à suivre dans l’étude et la résolution de la contradiction principale et de la contradiction secondaire. Que celle-ci détermine leurs alliances, leur stratégie et leur tactique. Mais une organisation communiste doit garder jalousement son indépendance et se prononcer pour la prise de pouvoir par la voie armée.

    Quant à nous, nous sommes évidemment opposés à toutes les interventions impérialistes et combattons celle de notre pays en particulier. Les communistes qui veulent éduquer et diriger les masses, doivent juger indispensable de leur faire comprendre la place et le rôle qu’elles occupent dans la politique globale de repartage du monde entre les puissances impérialistes actuels. La dégradation du niveau de vie et de l’exploitation toujours plus poussées des prolétaires des pays impérialistes est en lien étroit avec les guerres menées contre les peuples du monde pour leur asservissement. Prolétaires de tous les pays, nous avons les mêmes ennemis !

    Les prolétaires qui peuvent être amenés par manque de connaissance politique à soutenir un camp impérialiste contre un autre, ne doivent plus se faire d’illusion et prendre en compte le caractère de classe des conflits d’aujourd’hui. Ceux qui soutiennent sans réserve l’ASL en sachant pertinemment qu’elle est armée et entrainée par les impérialistes occidentaux et leurs alliés dans le but de défendre leurs intérêts font partie des pires renégats. Alors que l’impérialisme occidental s’apprête à intervenir en leur faveur comme il l’a fait pour les rebelles libyens, ces opportunistes ne retirent en rien leur soutien.

    Les « pragmatiques » qui choisissent la défense de l’impérialisme asiatique comme «  moindre mal » sont dominés par cette conception bien bourgeoise du monde que ce sont « les grands hommes » qui font l’histoire ; qu’il est impossible de compter sur les forces populaires, que le peuple est faible, ignorant. Tout n’est qu’affaire de dirigeants, d’États. Pour eux, le peuple doit choisir son camp et rejeter le « ni-ni ». Peu leur importe qu’aucun de ces camps ne servent les intérêts des masses exploitées puisque de toute façon il leur est réservé le sacro-saint privilège de décider du sort de l’humanité. Ils ne croient pas dans le pouvoir du peuple, dans son pouvoir de changer le cours de l’histoire en défendant son propre camp. C’est l’illusion perpétuelle que le peuple a besoin de la bourgeoisie, celle à laquelle nous répondons par les mots de feu Armand Elisée de Loustalot « Les grands ne nous paraissent grands que parce que nous sommes à genoux. Levons-nous ! »

    À l’inverse de ceux qui s’abaissent aux pieds des bourgeois pour décider de l’avenir du monde, nous, maoïstes, n’oublions pas que le camp du peuple est notre camp et que c’est lui qui fait l’histoire. Même si cela fait office de simple formules pour tous ceux qui n’ont rien compris à toute l’expérience historique de la lutte des classes.

    En Syrie comme ailleurs, le peuple ouvrier et paysan et les couches les plus exploitées peuvent former le parti communiste révolutionnaire et mener le processus révolutionnaire jusqu’au communisme ! 

     

    MORT À TOUS LES IMPÉRIALISTES !!!

    LE PEUPLE DOIT COMPTER SUR SES PROPRES FORCES

    UNI ET ARMÉ, IL VAINCRA !!!

     

    PC maoïste de France

    septembre 2013

     


    Annexe SLP : Comment caractériser et "lire" le monde impérialiste aujourd'hui ? 

    C'est une importante question qui a déjà été traitée par nous (ici point 2), mais nous produirons ici un "rendu" beaucoup plus synthétique.

    Il y a les deux premières puissances mondiales qui sont

    1°/ de loin mais en perte de vitesse, les États-Unis d'Amérique,

    2°/ loin derrière mais en ascension fulgurante, la République "populaire" de Chine revenue au capitalisme après le coup de force de Deng Xiaoping en 1977-78. La géopolitique chinoise est devenue incontournable pour comprendre le monde d'aujourd'hui, même si elle se manifeste de manière apparemment beaucoup moins agressive que les impérialismes occidentaux (pas d'interventions militaires directes par exemple, mais soutien à nombre de régimes criminels comme la Syrie d'Assad par contre), au point de passer aux yeux de certains (on pense à un certain parti "marxiste" belge) pour le "camp de la paix". D'autant plus incontournable qu'elle joue pour le moment l'alliance avec la Russie, qui se réaffirme elle aussi sur la scène internationale après sa décadence des années 1990... mais jusqu'à quel point ? (des manœuvres militaires russes en Sibérie, l'été dernier, peuvent ainsi être interprétée comme un avertissement à Pékin, dont les ressortissants "colonisent" économiquement la région).

    Les puissances impérialistes moyennes sont les autres pays du G8 (sauf les États-Unis) : Royaume-Uni, France, Allemagne, Japon, Italie, Canada, Russie.

    Les "petits" impérialismes voire "impérialismes vassalisés" (à l'une ou l'autre des puissances sus-énoncées) sont les autres pays ouest-européens (Belgique, Pays-Bas, Autriche, État espagnol, Danemark etc.), ou encore l'Australie et la Nouvelle-Zélande.

    Il existe des États qui, au regard de la balance des IDE notamment, sont clairement semi-coloniaux, dépendants (ils importent nettement plus de capitaux qu'ils n'en exportent), marqués de surcroît par la semi-féodalité dans les campagnes ("problème de la terre"), mais qui expriment et exercent des velléités de puissance au niveau de leur région du monde : Brésil, Argentine et bien sûr Venezuela en Amérique latino-caraïbe, Afrique du Sud en Afrique (et à une plus petite échelle Algérie en Afrique maghrébo-saharienne, Nigéria en Afrique de l'Ouest, Ouganda et Rwanda en Afrique centrale etc.), Inde en Asie du Sud, Turquie, Iran et Arabie saoudite au Proche/Moyen-Orient etc. En fait, si l'exportation de capitaux est retenue comme critère déterminant du caractère impérialiste d'un État (cf. Lénine, il y en a bien sûr d'autres, comme la dépendance quasi-exclusive d'une production à l'export), ces exemples ne le sont clairement pas au niveau mondial ; cependant, au niveau régional ils peuvent exporter beaucoup plus de capitaux vers leurs voisins qu'ils n'en reçoivent d'eux : il est alors pratiquement possible de parler de semi-impérialisme régional.

    Lorsque ces régions sont conflictuelles, ces acteurs sont incontournables pour comprendre les choses ; de manière étroitement imbriquée, ils "relaient" une ou plusieurs puissances impérialistes (grande ou moyenne) mais jouent aussi leur propre partition.

    Des petits voire micro-pays, mais abritant des concentrations capitalistiques très importantes, peuvent également être des acteurs régionaux importants, même si ce n'est pas de manière agressive (en tout cas, pas à visage découvert) : Qatar (qui a jeté le masque et appuie ouvertement des forces "subversives" dans les pays musulmans) mais aussi Émirats arabes unis (Dubaï, Abu Dhabi) dans le Golfe, Liban qui est aussi (avec Beyrouth) une grande place capitaliste arabe, Malaisie ou Singapour en Asie du Sud-Est, etc. Israël, en plus d'être une place forte militaire pour l'impérialisme occidental (principalement US), a aussi dans une certaine mesure ce caractère de place financière (Goush Dan autour de Tel-Aviv). Ses rapports avec l'Occident sont en principe ceux d'une "troupe de choc" avec son QG, dépendant de manière vitale de ce dernier, mais peuvent aussi être conflictuels, car le projet colonial sioniste (en lien, "entre autres", avec la valorisation de ce capital concentré) a aussi son autonomie, et en irritant les pays arabes il peut desservir les intérêts impérialistes européens et US (d'où l'existence de "lobbies" pro-israéliens dans tous les grands États occidentaux qui "comptent").

    D'autres pays, enfin, jouent également le rôle de concentrations capitalistiques et de places financières, mais refusent (pragmatiquement) la géopolitique et proclament parfois leur "neutralité". La Suisse (le plus gros et peuplé d'entre eux) est typiquement dans ce cas ; c'est en fait une gigantesque banque pour les capitalistes des pays européens (principalement les pays voisins). Mais tous les micro-États européens, dont on peut supposer qu'ils auraient disparu depuis longtemps autrement, sont aussi dans ce cas de figure : Luxembourg, Monaco, Andorre, Liechtenstein etc. ; ainsi que les dernières possessions britanniques dispersées à travers le monde (îles anglo-normandes, îles Caïmans etc.).

    Ce sera là, puisque nous en avons beaucoup parlé en janvier, l'occasion d'une dernière réflexion sur le "cas Dieudonné" ou plutôt le "cas Soral", puisque celui-ci est l'idéologue et Dieudonné le bateleur. Pro-Assad déclarés, les deux zigotos rejoignent finalement la liste des organisations "communistes" ci-dessus énumérées qui sont sur cette même position ; plus précisément, ce "campisme" issu de l'ultime décomposition brejnévienne du "marxisme-léninisme" post-Komintern est ce qui nourrit en permanence le soralisme (et le "nationalisme-révolutionnaire" en général) d'éléments "venus de la gauche".

    C'est typiquement là un phénomène de puissance moyenne, qui en plus de cela ne l'a pas toujours été ; qui a été une grande puissance et cherche le moyen de continuer à exister. Pour cela existent différentes "options stratégiques" :

    1°/ La première consiste tout simplement à occuper sa place, a priori généreuse (vu le rôle militaire réellement joué dans la dernière guerre mondiale), dans le bloc occidental/atlantique que l’État français a naturellement rejoint lorsqu'il fut créé (à la fin des années 1940) par les Alliés occidentaux vainqueurs de la Seconde Guerre mondiale, face à l'URSS. Mais voilà : cela consiste (ou paraît avoir consisté) trop souvent à "ramasser les miettes" des Anglo-saxons (les grands vainqueurs de 1945) et cela ne plaît pas à tout le monde, dans une bourgeoisie dont apprendre la langue était encore une obligation pour toute "élite" qui se "respectait" avant ladite (et maudite) guerre.

    2°/ La seconde consiste, en partenariat solide avec l'Allemagne, à construire une "Europe forte", forte à la fois contre les Anglo-saxons et contre "l'Est" (remplacé aujourd'hui, schématiquement, par Russie + Chine ou encore Asie "émergente") et le "tiers-monde" qui, "comme à son habitude", remue ("ils ne savent que revendiquer ces gens-là", voyez-vous...). C'est la ligne qui est devenue (de loin) la plus suivie dans la bourgeoisie monopoliste BBR depuis les années 1960 (un débat demeurant sur "de quel côté" cette Europe va plutôt pencher, si elle va être "atlantiste" ou résolument anti-américaine).

    3°/ La troisième enfin, apparue dans le courant des années 1960 (car il fallait que les pays "socialistes" deviennent ouvertement révisionnistes) dans des milieux de droite "dure" et extrême (Thiriart), mais sans que les Partis "communistes" révisionnistes ne disent finalement grand-chose d'autre, consiste à s'allier (soit la France seule, soit l'Europe entière) avec l'Est (aujourd'hui la Russie et la Chine) et le "tiers-monde" nationaliste bourgeois ; en agitant pour cela un discours "anti-impérialiste" exclusivement dirigé contre les Anglo-saxons et (à l'attention des pays arabes... ceux qui ont le mazout vous comprenez !) le sionisme.

    drapeaux_france_syrie4-4.jpgCité en modèle par à peu près tout politicien bourgeois qui se "respecte", De Gaulle était globalement sur la deuxième option (c'est l'essentiel de son œuvre géopolitique, incarnée par le "couple" avec Adenauer), mais donnait parfois l'impression de pencher vers la troisième.

    Nous avons donc déjà eu l'occasion de dire que l'agit-prop à la fois "tiers-mondiste" et brûnatre-rance menée par Dieudonné et Soral n'a rien de "nouveau" ni de "spécial". La haine antisémite n'est rien d'autre que naturelle pour eux puisque parmi les "ennemis stratégiques" qu'ils souhaitent pour l'impérialisme français il y a en premier lieu Israël, et puisque c'est un discours très ancré dans les bourgeoisies nationalistes arabes (ou turque ou iranienne) qu'ils veulent séduire, d'autant plus verbalement virulentes contre le sionisme qu'elles ne le combattent guère en pratique.

    Mais ce n'est pas tout. Ce qu'il fait voir aussi, c'est que la mise en avant par eux des Chavez, Kadhafi, Assad ou Ahmadinejad voire Lumumba et Sankara (!) s'inscrit totalement dans un esprit et une culture coloniale européenne. Car ce qu'ils nous disent en fin de compte c'est : "Regardez ces Noirs, Arabes ou Latinos, ils nous montrent la fierté d'être patriotes, cette fierté dont nous les Blancs sommes interdits par la bien-pensance mondialisée" - ces "Noirs", "Arabes" et autres "Latinos" sont donc un peu des privilégiés en quelque sorte... En réalité, que l'on dénonce ces leaders nationalistes du "tiers-monde" (comme Pascal Bruckner et consorts) ou que l'on fasse mine de les valoriser en mode "NR"/Soral, c'est finalement la même pensée en arrière-plan.

    L'idée directrice, c'est de revendiquer pour les "Blancs" européens le "droit" d'être "patriotes", chauvins ; le "droit" pour les nations dominatrices d'être nationalistes... et de dominer.

    Le postulat, abstraction faite d'aimer ou pas les nationalistes du "Sud", c'est que les nationalismes se valent. Si un "Noir" ou un "Arabe" peut être nationaliste (encore une fois, que l'on prenne cela pour "modèle" ou qu'on le supporte mal), "pourquoi un Européen ne le pourrait pas". C'est le fond de l'idée qui anime aussi bien ce courant "national-révolutionnaire" que toute l'extrême-droite, autrement dit l'expression politique de la fraction la plus radicale des monopoles. Et c'est tout le contraire de ce que nous disait Lénine (par exemple) en 1922 : "Il faut distinguer entre le nationalisme de la nation qui opprime et celui de la nation opprimée, entre le nationalisme d'une grande nation et celui d'une petite nation. Par rapport au second nationalisme, nous, les nationaux d'une grande nation, nous nous rendons presque toujours coupables, à travers l'histoire, d'une infinité de violences, et même plus, nous commettons une infinité d'injustices et d'exactions sans nous en apercevoir. (...) Aussi l'internationalisme du côté de la nation qui opprime ou de la nation dite «grande» (encore qu'elle ne soit grande que par ses violences, grande simplement comme l'est, par exemple, l'argousin) doit-il consister non seulement dans le respect de l'égalité formelle des nations, mais encore dans une inégalité compensant de la part de la nation qui opprime, de la grande nation, l'inégalité qui se manifeste pratiquement dans la vie. Quiconque n'a pas compris cela n'a pas compris non plus ce qu'est l'attitude vraiment prolétarienne à l'égard de la question nationale : celui-là s'en tient, au fond, au point de vue petit-bourgeois et, par suite, ne peut que glisser à chaque instant vers les positions de la bourgeoisie". Les choses ne peuvent être dites plus clairement.

    des-supporters-de-dieudonne-font-le-salut-de-la-quenelle-deLe "nationalisme" est une idée politique et donc (si l'on est matérialiste, et non idéaliste comme ces clowns fascistes), en soi, il n'existe pas vraiment.

    Il est l'expression d'une position et d'une relation ÉCONOMIQUE entre une "nation" et les autres. Cette position/relation peut être dominante, ou dominée.

    Il en résulte des "nationalismes" foncièrement différents dans leur nature. Si l'on peut dire (comme beaucoup de marxistes et de libertaires/anarchistes le disent), "abstraitement", que le "nationalisme" n'est jamais une bonne chose (car il conduit à faire l'impasse sur des positions et intérêts de classe contradictoires, impasse dont le "tiers-monde" a éprouvé durement les conséquences après sa "décolonisation"), il n'en reste pas moins que le "nationalisme" POPULAIRE (ouvrier, paysan, "plébéien", pas bourgeois) dans une nation dominée (une périphérie) est potentiellement révolutionnaire, transformable en conscience populaire révolutionnaire, alors que dans une nation dominante (siège d'un Centre capitaliste-impéraliste) seul l'internationalisme l'est.

    En plus, comme nous à SLP et au CC-PCRÒc sommes passablement des salopards, nous avons encore sensiblement compliqué les choses ; en expliquant que dans un État impérialiste de grande taille comme la "France" (ou le Royaume-Uni, ou l'Italie, ou l’État "petit-impérialiste" "espagnol") il n'y a pas une "nation" (française) mais un ensemble de Peuples absorbés au cours de l'Histoire et dont la majorité des "élites" ont, en quelque sorte, "fusionné" (celles qui ne le voulaient pas étant de toute façon éliminées, expropriées ou tuées), donnant une bourgeoisie et donc une pseudo-nation "française".

    La manière dont cette entité nommée "France" s'est construite comme "système" a instauré ce que l'on peut appeler des hiérarchies concentriques, depuis le Centre jusqu'à l'extrême-périphérie ("DOM-TOM" et ex/néo-colonies). Une personne "française" est ce que nous définissons comme une personne "insérée" (ayant une "situation" diraient nos chers papas-mamans) socialement et culturellement dans ce "système", un "petit bourgeois" comme diraient les marxistes vulgaires ; c'est-à-dire finalement une notion de classe. Cette personne, si elle veut rallier le camp de la révolution, n'a d'autre choix que la rupture intellectuelle et culturelle avec la "France", qui n'est pas une "nation" mais (finalement) un enclos idéologique. À côté (ou plutôt, au-dessous) de cela, il y a les Peuples (ensembles de classes populaires unies par les même caractéristiques nationales) ; y compris un Peuple (on va dire) francilien (entre Orléans, Rouen, Beauvais, Soissons, Troyes, Auxerre), même si celui-ci n'est plus guère "de souche" (les franciliens "séculaires" sont généralement et sauf exception "petits bourgeois", sociologiquement français) mais plutôt composé de descendant-e-s d'immigrés-déracinés de tout l'Hexagone et de toute l'Europe, aux côtés de massives colonies intérieures (d'origine extra-européennes) qui sont encore autre chose.

    L'organisation de la production capitaliste a hiérarchisé ces Peuples. Donc finalement, à l'arrivée, cela redevient simple (vous allez voir) : être "nationaliste" vis-à-vis des Peuples situés "au-dessous" dans la hiérarchie établie par le Capital, c'est être CHAUVIN, raciste et, en définitive, enchaîné idéologiquement à la bourgeoisie bleu-blanc-rouge (car qui d'autre cela sert-il ?). Seuls des sentiments internationalistes, de "solidarité", peuvent évidemment être considérés comme progressistes et potentiellement révolutionnaires. Vis-à-vis des Peuples situés "au-dessus", les révolutionnaires de chaque Peuple, comme hier les Black Panthers vis-à-vis des "Blancs", ne sont pas animé-e-s par la haine (sentiment qui encore une fois ne mène qu'au service objectif des dominants) ; mais avant tout par l'amour de leurs propres masses populaires opprimées. Ils et elles peuvent, en revanche, être amené-e-s à les rappeler à leurs devoirs internationalistes envers les Peuples "au-dessous" d'eux, a fortiori si les personnes en face ne sont pas des "philosophes de PMU", mais se prétendent des révolutionnaires... En résumé (et imagé) : se vouloir "occitan", "breton" ou "cooorse" et considérer que le combat "prioritaire", "l'invasion" contre laquelle lutter ce seraient "les Arabes", c'est être complètement à côté de la plaque et à vrai dire un gros con. Mais se vouloir "révolutionnaire", "communiste" ou "anarchiste" ; un "révolutionnaire" bien central cela va de soi – inséré, centrurbain, intellectuel ou (aristocrate) ouvrier (moâââ monsieur !) dans une grosse boîte bien stable, de préférence publique ; et nier les Occitans, Basques, Corses ou Bretons ; ce n'est pas "presque", c'est exactement la même chose !

    Tel est l'internationalisme véritable qui doit guider les révolutionnaires authentiques de tous les Peuples de la planète ; et qui n'a rien à voir avec la prétendue "égalité des nationalismes" des fascistes "tiers-mondistes" (ou pas), qui ne sont que les chiens de garde du Capital et de son État d'oppression !

    Le "Blanc" à la Ayoub qui se veut "nationaliste" et prétend que son nationalisme "vaut" celui d'un "coloré", que celui-ci a raison ou pas mais qu'en tout cas cela "justifie" le sien, est un chauvin de grande nation et un impérialiste pitoyablement déguisé et auto-justifié ; comme d'ailleurs tout central (en général) raisonnant ainsi envers un périphérique. Et le "coloré" ou le "périphérique" en général, à la Kemi Seba, qui prétend que son nationalisme "vaut" celui du "Blanc" ou du "central" en général, est un tirailleur et un nègre de maison. Point barre, et à bon entendeur salut !


    votre commentaire



    Suivre le flux RSS des articles
    Suivre le flux RSS des commentaires