• Il ne sera pas question, ici, de grands développements théoriques, les différents thèmes ayant déjà été abordés cent fois – et la ligne de SLP, toujours été claire et ferme en la matière ; mais simplement de s’en payer une bonne tranche avec le nouvel étalage de ridicule de nos ‘copains’/détracteurs ultra-gauchistes… et de mettre quelques petites choses au clair en passant. 

    conrad1Après avoir insulté et dressé le ‘procès’ de Servir le Peuple sur des faits ‘de forum’ allant (grosso modo) de janvier 2010 au printemps 2011 (à se demander si ces gens-là ont, accessoirement, une vie), le ‘centre’ (de quoi ?) ‘mlm’ de Belgique, devenu (malgré des travaux de qualité, comme sur la Guerre populaire en pays impérialiste et avancé) un pitoyable appendice du ‘p’’c’’mlm’/’Voie lactée’ (comme, de toute manière, la Belgique universitaire n’est qu’un appendice grotesque de la ‘France’ intello-parisienne), nous a promis de ‘régler’ prochainement ‘leur compte’ à ‘nos amis’ italiens du (n)PCI, et à leur ‘électoralisme putride’. Comme si le fait qu’ils soient des SATELLITES du ‘p’’c’’mlm’ impliquait que Servir le Peuple, pour avoir traduit un certain nombre de documents (jugés intéressants) du (n)PCI ainsi que leur Manifeste Programme, soit un ‘satellite’ de celui-ci – hélas, nos chers bons cons, il n’en est nullement ainsi et SLP n’a jamais hésité non seulement à avoir des désaccords avec le (n)PCI, mais encore à les assumer publiquement.

    Nous attendons donc avec impatience (et non sans une certaine jubilation) leur ‘brillant’ article… sauf que lorsque celui-ci paraîtra, cela fera longtemps que le (n)PCI aura (par avance) répondu : c’est le deuxième article du (n)PCI (extrait de La Voce n°37) traduit et reproduit ici. La position des camarades y est expliquée clairement et, disons le tout net : pour nous, la THÉORIE de ‘l’intervention dans le petit théâtre de la politique bourgeoise’, de ‘l’irruption’ dans le ‘moment électoral’, est foncièrement JUSTE ; par opposition à l’’abstentionnisme de principe’ non seulement d’ennemis politiques comme le ‘p’’c’’mlm’ ou son satellite bruxellois, mais aussi d’organisations amies comme le PCm d’Italie, le PCmF, le PCR du Canada etc., position consistant à ‘appeler’ les masses à l’abstention, puis à se féliciter du taux élevé (éventuellement en progression, ce qui est classique dans un capitalisme en crise générale) de celle-ci. L’abstention en tant que telle ne signifie nullement un début de ‘prise de conscience’ révolutionnaire ; elle peut tout aussi bien signifier une tendance à la résignation, à l’indifférence et à l’apathie, ou encore une évolution vers des positions fascistes. L’appel à l’abstention s’inspire du slogan ‘No Votar !’ de la Guerre populaire péruvienne, mais nous ne sommes justement pas au Pérou, pays (en tout cas dans la 'campagne profonde') pratiquement sans 'société civile', où les élections consistent en la collecte des bulletins de vote par les caciques locaux en faveur de tel ou tel candidat de l'oligarchie, et où refuser de voter, au mépris des menaces et des violences, est un acte de classe hautement antagonique. Dans les pays, au contraire, impérialistes ou de manière générale capitalistes très gramsciavancés, à façade ‘démocratique libérale’, le ‘moment électoral’ récurrent (rarement plus de 3 ans sans ‘échéances’) est au contraire un élément essentiel de la ‘société civile’ (selon Gramsci ; du ‘spectacle’ diraient les situationnistes), comme instrument de contrôle des masses ; et il n’est pas possible pour les révolutionnaires de lui tourner simplement le dos en se pinçant les narines. Le ‘moment’ électoral est un ‘moment’ où, durant quelques mois, éventuellement 6 mois en cas d’échéance ‘nationale’ (présidentielle/législatives), voire presque un an aux États-Unis pour la présidentielle fédérale, la politique (bourgeoise) fait ‘irruption’ (par les médias, les affiches dans la rue etc.) dans la vie quotidienne des masses populaires. Les communistes doivent mettre à profit ce moment, y ‘intervenir’ pour en faire un ‘moment’ particulier d’agitation et de propagande. Affirmer cela est JUSTE. C’est au niveau de la mise en pratique de cette théorie que ce que font le (n)PCI et les CARC (‘organisation générée’ du (n)PCI pour le travail ‘au grand jour’) peut être critiqué – et SLP le critique sans hésitations. Il y a quelques années (c’est décrit dans l’article en lien), les CARC pouvaient encore présenter leurs propres listes à des élections locales et cela permettait un travail conséquent d’agitation et de propagande. Mais depuis, la situation en Italie s’est compliquée, il faut un (grand) nombre minimum de signatures ‘citoyennes’ pour pouvoir présenter une liste et les CARC/(n)PCI ont commencé à appeler à voter pour des représentants de la ‘gauche’ bourgeoise (comme le juge ‘anti-corruption’ De Magistris à Naples ou l’ex-avocat d’Öçalan, Giuliano Pisapia, à Milan), voire carrément des populistes aux relents nauséabonds comme le comique Beppe Grillo : une ‘tactique’ électorale aux forts relents de ‘moins pire’ ou en affirmant voter pour le candidat qui ‘foutra le bordel’ dans la mécanique institutionnelle bien huilée de la ‘République pontificale’… Mais là, pour le coup, le (n)PCI contredit 110605---vivanPCIlui-même sa propre position de La Voce de mars 2011 : il se fait électoraliste ; car si ‘bordéliser le système’ peut être une forme tout à fait respectable de lutte, la ‘bordélisation’ des assemblées représentatives ou de l’appareil administratif local est conçue ici comme une véritable ‘attaque au cœur de l’État’ susceptible de déclencher une crise révolutionnaire ; autrement dit, il serait possible d'instaurer le socialisme par la voie électorale et parlementaire’  - ce qui n'est évidemment pas le cas. L’Histoire regorge [et le (n)PCI le rappelle lui-même dans son article en lien ci-dessus] d’exemples où considérer les instances légiférantes électives comme le ‘cœur’ (à ‘attaquer’) du pouvoir d’État capitaliste a conduit d’authentiques Partis révolutionnaires à ‘s’institutionnaliser’ et à devenir réformistes, voire carrément des auxiliaires ‘de gauche’ de la classe dominante : si tel était le cas, ce serait évidemment déplorable de la part des auteurs de tant de textes qui ont (littéralement) forgé la conscience politique de SLP, et du magnifique Manifeste Programme – mais cela n’impliquerait nullement qu’il faille mettre ces textes au pilon, car alors, il faudrait aller au bout de la logique : la dérive du PCF de Thorez impliquerait de rejeter aux ‘poubelles de l’histoire’ Politzer, et même le Komintern de 1919, les écrits de Lénine et Staline, qui ont ‘engendré’ la SFIC ; le révisionnisme de Togliatti et Berlinguer impliquerait de brûler l’œuvre de Gramsci, etc.

    Pour Servir le Peuple, si l’on veut ‘intervenir’ dans le ‘moment électoral’ de la ‘démocratie’ bourgeoise, d’autres pistes peuvent être explorées ; comme, par exemple, puisque ce qui compte n’est pas d’avoir des élu-e-s, mais l’agitation-propagande déployée au cours de la campagne, distribuer et appeler à déposer dans les urnes des bulletins au nom du Parti (un vote NUL, donc), comme cela a déjà pu être fait en Euskadi-Sud face aux ‘illégalisations’ de l’État franquistoïde, ou comme l’a préconisé (vote blanc ou nul) aux dernières élections le PC d’Équateur ‘Comité de Reconstruction’ (dans ce pays, ne pas voter entraîne une amende de 34 dollars, ce qui est énorme et impossible à demander aux masses populaires pauvres).

    solidarietà gaddafiConcernant le ‘campisme’ ‘anti-impérialiste’ du (n)PCI, qui l’amène à soutenir aveuglément le ‘bolivarisme’ de Chavez, mais aussi les Kadhafi et autres Assad ou l’Iran d’Ahmadinejad ‘résistant à l’impérialisme’ (sans voir l’autre côté des choses, leur caractère bourgeois voire féodaliste, leurs contradictions avec les masses populaires, leurs liens avec d’autres puissances que les impérialismes de la ‘Triade’ ouest-européenne/nord-américaine/japonaise), c’est un autre problème, un autre ‘défaut de fabrication’, en réalité très commun dans le mouvement révolutionnaire transalpin (pays 'impérialiste faible', historiquement 'vassalisé' par les impérialismes plus puissants, aujourd'hui US et 'UE' franco-allemand), et qui n’a rien à voir avec un quelconque ‘électoralisme’ – puisque de par le monde, des organisations ‘anti-électoralistes’ peuvent être exactement sur les mêmes positions, et des organisations ‘électoralistes’ (trotskystes, notamment) peuvent être ‘anti-campistes’. Pour le coup, il faut reconnaître aux antécesseurs de l’actuel ‘Voie lactée’ (‘Front social’, ‘Étoile rouge’, ‘Contre-informations’ première formule) le mérite d’avoir, en ‘francophonie’, ‘assaini’ un petit peu le ‘campisme’ qui régnait en maître, dans les Forces subjectives de la Révolution prolétarienne (FSRP), encore autour de l’an 2000 (avec la question du Kosovo et de Milosevic, de l’Irak de Saddam Hussein, etc.).

    20080808182943-simon-bolivar.jpgBref ! En attendant leur ‘brillant’ article qui devrait ‘en finir’ avec les ‘électoralistes putrides’ du (n)PCI (des gens qui, mes petits clowns, en ont vu d’autres, vous pouvez nous croire !), le ‘centre’ ‘mlm’ de Belgique nous gratifie du bon vieil article de Marx sur Simón Bolívar – article de commande, ‘alimentaire’, pour la Nouvelle Encyclopédie Américaine de 1858 ; sans doute le plus mauvais, pour ne pas dire pathétique article du vieux Karl, dénué de tout matérialisme : la faillite du projet politique de Bolívar n’y repose ni plus ni moins que sur la seule personnalité et les faits et gestes de celui-ci ( !), et non sur les conditions matérielles, le niveau des forces productives de l’Amérique latine au 19e siècle, la puissance des féodalités locales etc. ('ce qui est certain', pourrait-on dire en paraphrasant la 'maître', 'c'est que ce texte n'est pas marxiste'...) ; et puis… d’une traduction d’un texte du PC d’Inde (ML) ‘People’s War’ (qui a fusionné en 2004 dans le PC d’Inde maoïste), lequel vient… contredire totalement l’affirmation de leur ‘grands frères’ intello-parisiens, selon laquelle le ‘néocolonialisme’ serait un concept ‘révisionniste’ et ‘anti-maoïste’ (il y est ainsi expliqué qu’en 1963, pour le PC chinois de Mao, Après la Seconde Guerre mondiale, les impérialistes n'ont certainement pas renoncé au colonialisme, mais ils en ont simplement adopté une nouvelle forme, le néocolonialisme. Une caractéristique importante de ce néocolonialisme est que les impérialistes ont été forcés de modifier leur ancien style de domination coloniale directe dans certaines régions et d'adopter un nouveau style de domination et d'exploitation coloniale en s'appuyant sur les agents qu'ils ont sélectionnés et formés’). CQFD… [Le néocolonialisme n’a strictement rien d’un concept ‘révisionniste’ : il s’agit tout simplement des formes particulières (présence militaire, ‘traités inégaux’, dette délirante, contrôle de la monnaie et de quasiment toute l’économie, ambassade et ‘expatriés’ tout-puissants) que revêt la domination d’un pays impérialiste (souvent d’un seul, hégémonique) sur une ancienne colonie directe devenue ‘indépendante’ – exemple type : la ‘Françafrique’. En Amérique latine (pays semi-coloniaux selon Lénine), avec et après les grandes dictatures meurtrières des années 1960-70-80, la domination impérialiste principalement US a pris des traits néocoloniaux particulièrement marqués, sous le nom local de ‘néolibéralisme’ : des pays comme l’Équateur, par exemple, ou encore le Salvador ou le Panama, n’ont plus de monnaie nationale (c’est le dollar US qui a cours), dans d’autres elle existe toujours, mais elle est de fait tombée en désuétude au profit du dollar, ou est indexée sur celui-ci ('dollarisation', comme dans les Caraïbes anglophones ou en Argentine avant la crise de décembre 2001) ; ce qui rapproche leur situation des pays africains de la ‘zone CFA’, monnaie ‘fantoche’ totalement sous contrôle de la Banque de France. Nier une telle chose, pour un 'marxiste', c'est déjà soutenir...]

    chaveznodNul n’a jamais remis en cause la ‘position maoïste classique’ sur le capitalisme bureaucratique. Il y a, dans les pays semi-coloniaux dominés par l’impérialisme, une oligarchie bureaucratique, telle qu’effectivement décrite par Mao et Gonzalo : celle-ci est en réalité une forme spécifique de compradorisme, correspondant à un stade ‘particulièrement avancé’ de la domination impérialiste (pas avant la première moitié du 20e siècle en Amérique latine, pas avant 1945 en Asie et dans les pays arabes, et pas avant les années 1960 en Afrique) ; ‘étatique’ car il faut bien jouer les apparences de l’’indépendance nationale’, et ‘monopoliste’ tout simplement parce que les pays dominés, dans le cadre de la division internationale impérialiste du travail, sont généralement mono- ou oligo-productifs (une seule, ou deux ou trois productions hypertrophiées, comme par exemple la monoculture sucrière à Cuba, maintenue par Castro contre l’avis de Guevara, entraînant le passage de la domination US à la domination soviétique). En Chine, où il a été identifié pour la première fois par Mao, l’on peut dire que le régime de Tchang Kaï-chek (1927-49) commençait à mettre en place un tel capitalisme bureaucratique. Au Pérou, c’est à travers un processus allant des années 1930 à 1970, avec l’épisode particulier du régime militaire ‘pogressiste’ de Velasco Alvarado (1968-75), qui tenta de tourner ce capitalisme bureaucratique ‘vers l’Est’. En Iran, c’est typiquement sous la dynastie Pahlavi (1925-79), capitalisme bureaucratique repris ensuite par le régime des mollahs à travers les Gardiens de la Révolution (gigantesque consortium militaro-bureaucratique). Au Venezuela, l’on peut considérer qu’il se met en place sous le bref gouvernement AD de 1945-48, puis la dictature militaire de Marcos Jimenez Pérez (1948-58) et enfin, se consolide sous le régime puntofijiste (‘pacte’ de Punto Fijo entre les deux partis grands-bourgeois AD ‘social-démocrate’ et COPEI démocrate-chrétien), régime régnant de 1958 à 1999.

    bananeroMais RIEN DE TOUT CELA ne signifie que cette bourgeoisie/oligarchie bureaucratique, pas plus que la classe compradore (les ‘vend-patrie’ concurrentiels et privés, premiers interlocuteurs de l’impérialisme dans tout pays colonisé ou semi-colonisé), ni même les grands propriétaires terriens (latifundistes, semi-féodalité), n'agissent systématiquement EN BLOC, qu’il n’y ait pas de contradictions non seulement entre ces trois classes, mais également au sein de celles-ci, et que puisse y émerger une ‘gauche’ réformiste, une frange prête à ‘tout changer en espérant que rien ne change’, à faire des concessions, face à l’agitation des masses populaires, pour tenter de sauver l’essentiel – sa position de classe, ses privilèges. Et les pays dominés, comme chacun (enfin, chaque – véritable – maoïste ou même léniniste) le sait, se caractérisent par l’existence d’une bourgeoisie nationale, une bourgeoisie (entrepreneuriale ou ‘à capital intellectuel’) dont la domination impérialiste entrave le développement, et qui salive à l’idée d’accéder aux ‘hautes sphères’ – une partie, cependant, authentiquement progressiste, pouvant rejoindre la classe ouvrière et la paysannerie affamée dans le Front uni du Parti du prolétariat. Si un mouvement de masse permet de porter une partie de cette bourgeoisie nationale (qui le ‘chevauche’) vers les centres du pouvoir, et qu’une frange réformiste suffisante de la haute bourgeoisie bureaucratique (et compradore, et latifundiste) lui ‘ouvre la porte’ pour sauver sa position – ou ‘rétrocède tactiquement’ pour préparer un ‘retour en force’ golpiste, ou tout simplement un retour électoral si les bourgeois nationaux ‘foirent’ et s’empêtrent dans leurs contradictions… nous avons TOUT SIMPLEMENT ce qu’il s’est produit au Venezuela en 1998 – et ce qui a tenté de se produire en avril 2002, dont il est d’ailleurs curieux, en passant, que les dénonciateurs gauchistes de ‘Chavez-le-fasciste’ ne parlent JAMAIS.

    Vladimir-Poutine-et-Hugo-Chavez.jpgÀ cela s’ajoutent, effectivement, les contradictions inter-impérialistes : pour ‘chevaucher’ et ‘canaliser’ le ‘mouvement social’ populaire, les bourgeois nationaux (futurs nouveaux bourgeois bureaucratiques) et les franges réformistes-pragmatiques de l’oligarchie bureaucratique (et compradore, et latifundiste) vont devoir rééquilibrer la contradiction entre caractère national de la production et appropriation impérialiste du produit. Lorsqu’un pays est historiquement sous la domination quasi exclusive d’une puissance ou d’un bloc impérialiste, comme le Venezuela de 1999 vis-à-vis des États-Unis ou la Côte d’Ivoire de Laurent Gbagbo vis-à-vis de l’impérialisme BBR, forte va être la tentation de se tourner vers les puissances ou les blocs impérialistes concurrents, lesquels vont parfois être enclins à des concessions importantes, sur les contrats, les prêts etc., pour nuire à leurs rivaux ["Ce qui est l’essence même de l’impérialisme, c’est la rivalité de plusieurs grandes puissances tendant à l’hégémonie, c’est-à-dire à la conquête de territoires - non pas tant pour elles-mêmes que pour affaiblir l’adversaire et saper son hégémonie" - Lénine, L'impérialisme, stade suprême du capitalisme]. Le nationalisme bourgeois incapable, à l'ère et dans le cadre du système impérialiste mondial, de conquérir pour ces pays une véritable 'indépendance nationale', est ainsi systématiquement voué à se 'raccrocher aux branches' des rivalités entre grandes puissances...

    preview-manifeste-programme-du-nuovo-pci-1Rien de tout cela n’a jamais été remis en cause par Servir le Peuple, la problématique ne s’est jamais située ici – nous y reviendrons. Et SLP n'a jamais eu aucun problème à critiquer les positions 'borgnes' d'organisations comme le PC des Philippines ou le (n)PCI, positions qui ne voient que le 'bon côté' du phénomène 'bolivarien' – les améliorations sociales (immédiates et indéniables) pour les masses ; la 'rupture' avec la servilité des gouvernements précédents vis-à-vis des impérialistes ouest-européens, nord-américains et japonais (la 'Triade'), du FMI, de la Banque mondiale ; etc. Le (n)PCI tombe ici, encore une fois, dans un 'travers' qu'il dénonce lui-même (si l'on considère le nationaliste bourgeois Chavez comme un représentant de la 'gauche bourgeoise' mondiale, ou en tout cas, quelque chose d'assimilable) dans son lumineux Manifeste Programme : "Les réformistes et la gauche bourgeoise sont les propagateurs de l'influence de la bourgeoisie dans les rangs du mouvement communiste. Ils ne sont un danger pour notre cause que dans la seule mesure où ils réussissent à influencer la conduite du Parti communiste, à alimenter dans nos rangs l'opportunisme et le révisionnisme par émulation, timidité idéologique ou corruption, ou le sectarisme et le dogmatisme par réaction défensive : en somme, dans la mesure où ils parviennent à agir sur nos contradictions internes" - les tenants dogmato-gauchistes de 'Chavez-le-fasciste' représentant l'autre travers ; travers qui sont TOUS DEUX des stigmates de la 'Fin de l'Histoire', des reflets du grand 'creux de la vague' stratégique traversé par le mouvement communiste international entre les années 1980 et 2000, dont nous commençons tout juste à sortir (il est d'ailleurs significatif que cette période ait connu deux grandes Guerres populaires - Pérou et Népal - et que l'une ait péri du second travers, l'autre du premier).

    Il y a des personnes dont, quelles que puissent être les divergences que l'on peut avoir avec elles, l’on n’aimerait pas être à la place ; et SLP n'aimerait vraiment pas être à la place du collectif cantabre Odio de Clase en ce moment... Après s'être mis à dos (à grand renfort d'insultes politiques et d'invectives rageuses) toutes les organisations marxistes-léninistes et maoïstes de l'État espagnol sur la question du Népal (rejoignant là la ligne internationale gauchiste, dogmatique et anti-dialectique), sauf l'OCBR de Castille qui s'est récemment... dissoute, et Reconstruction Communiste qui est hoxhiste ; ainsi que les 'centristes' (VRAIS maoïstes) de tous les pays, notamment le PCm d'Italie ; les voilà désormais 'lâchés' par leurs 'amis' internationaux de la 'croisade anti-centriste' (surtout après avoir traité les Équatoriens de 'trotskystes', ce qui n'a certainement pas été apprécié...), pour avoir pris une position (pour une fois) JUSTE, léniniste, sur la nature nationaliste bourgeoise réformiste de Chavez, contre la position noire de 'Chavez = fasciste', au service objectif de l'ultradroite oligarchique, de l'impérialisme US et de ses alliés... En revanche, SLP ne partage évidemment pas leur position du collectif sur la Syrie ou (hier) la Libye... mais là, par contre, il y a du cocasse à voir le 'p''c''mlm' critiquer OdC ! Car, pour le coup, tels des… Chavez, ce n’est pas seulement aux satrapes roulant des mécaniques ‘anti-impérialistes’ (Kadhafi, Assad) que ces derniers avaient apporté leur soutien ‘contre des mouvements totalement pilotés par l’impérialisme’, mais à TOUS les despotes arabes, déniant toute légitimité aux révoltes populaires de 2011 à nos jours…

    L’on se demande, réellement, ce qu'il y a de si compliqué (pour de prétendus communistes) à se placer systématiquement DANS LE CAMP DU PEUPLE. Effectivement, l'on peut dire que tout ce qu'a fait Chavez en 14 ans de pouvoir, c'est de permettre à un certain nombre de bourgeois nationaux de se 'placer' en lieu et place de l'oligarchie bureaucratique (type PDVSA) de 1998, la vieille oligarchie bureaucratique puntofijiste AD-COPEI, qu'il a balayée ; ceci en se tournant vers de nouveaux partenaires impérialistes et 'émergents' (‘BRICS’, Iran etc.) : c’est la fameuse boli-bourgeoisie, que personne, au Venezuela, n’a attendu le ‘p’’c’’mlm’ et ses amis internationaux pour dénoncer.

    Relatives-of-victims-of-General-Augusto-Pinochets-military-Mais le 'problème', pour nous, n'a jamais été de contester cela. Le problème, c'est ce que le RETOUR, en force, de la vieille bourgeoisie bureaucratique (celle liée aux USA), promettait aux masses populaires vénézuéliennes : le pinochétisme. Que Chavez lui-même soit emprisonné, exilé, fusillé ou pendu par les couilles, on s'en tape ! C’est AU NOM DU PEUPLE que Servir le Peuple a défini et toujours suivi sa ligne de ‘soutenir’ (refuser le renversement) les régimes ‘bolivariens’ contre les menées d’ultra-droite ‘pinochétistes’, au Venezuela (où cela s’était ‘calmé’ lors de la naissance du site, en octobre 2009) comme en Bolivie (où il y avait encore des menées d’extrême-droite) ou encore au Honduras avec le coup d’État de juin 2009, dont l’oligarchie réactionnaire commanditaire est aujourd’hui au pouvoir (‘Pepe’ Lobo). Or une telle position est impossible si l’on qualifie Chavez de ‘fasciste’, car ‘fasciste’ a une signification léniniste : cela signifie que TOUTE AUTRE FORME de gouvernement de la classe dominante est, ‘à tout prendre’, ‘moins pire’ pour les masses populaires que le régime de Chavez. Cela signifie, clairement, que la réussite du coup d’État d’avril 2002 aurait été un ‘moindre mal’ pour les ouvriers, les paysans et toutes les classes laborieuses exploitées du Venezuela. Il faut avoir l’honnêteté intellectuelle de le dire en ces termes. Les PC d’Équateur CR et ‘Sol Rojo’ ont pu, ces dernières années, adopter des positions plus léninistes (donc maoïstes) et moins délirantes que d’autres groupuscules de leur ‘internationale ligne rouge’ de pieds-nickelés ; mais nous serions curieux de voir ce qu’ils expliqueront aux masses le jour (si tel est le cas) où le ‘fasciste’ Correa, ne ‘tenant’ plus celles-ci, sera éjecté et remplacé par le VRAI fascisme d’un Pinochet/Videla équatorien… C'est là une position GRAVE, DANGEREUSE, servant OBJECTIVEMENT les plans de la réaction la plus noire, et désarmant les classes populaires d'Amérique latine face à leur pire ennemi. Et affirmer, comme le fait ‘Voie lactée’, que ‘les pays opprimés sont  (tous sans exception, sous-entendu) des pays fascistes - un fascisme bien sûr très différent de la version qui peut exister dans les pays impérialistes’, même s’il est vrai que ces pays sont souvent, par nature, beaucoup plus répressifs que les métropoles impérialistes (l’appareil politico-militaire étatique est principal dans le contrôle des masses, la ‘société civile’ est très secondaire), c’est interdire par avance tout ‘jeu’ tactique mettant à profit les contradictions au sein des classes dominantes de ces pays ; ‘jeu’ qui est ‘riche’ en potentialités révisionnistes, certes (lorsque la direction des classes opprimées se met à la remorque d’une fraction ‘libérale’ ou ‘réformiste’ des classes dominantes, comme au Népal), mais sans lequel aucune lutte révolutionnaire de longue durée ne peut avancer et espérer – un jour – triompher. C’est, peut-être, une telle ‘souplesse’ tactique qui a fait défaut à la Guerre populaire du Pérou et l’a conduite à la défaite, dans les années 1990, après des progrès fulgurants entre 1985 et 1992.

    Assad-l-assassin.jpgAssad, lui, est peut-être de la même engeance bureaucratique que Chavez, d’où leur amitié : l’on peut dire en effet, dans un sens, que son père a pris le contrôle du capitalisme bureaucratique en Syrie, en 1970 – et l’a alors arrimé à l’URSS et à la ‘politique arabe’ BBR gaulliste, tout en ‘rectifiant’ par la droite le ‘processus national-progressiste’ de Salah Jedid, au pouvoir les années précédentes, qui voulait notamment accueillir la résistance palestinienne chassée de Jordanie, ce qu’Assad père refusait ('meilleur ennemi' d'Israël jusqu'au bout des ongles...). Et il est tout aussi vrai que les courants majoritaires de la rébellion (CNS, ASL, salafistes) ne promettent guère un avenir plus radieux aux masses populaires syriennes. Mais à la base, il y a une légitime révolte populaire contre le régime, l'oligarchie bureaucratique en place depuis plus de 40 ans, et ce 'paramètre' ne peut pas être ignoré dans un raisonnement communiste conséquent – quand bien même, ensuite, faute de direction révolutionnaire conséquente, les différentes fractions de la bourgeoisie anti-Assad auraient pris la tête du mouvement et se seraient vendues aux impérialistes (US, ouest-européen) et aux puissances locales (Turquie, Arabie saoudite, Qatar) les plus 'offrantes' pour prendre la place du despotisme baathiste, historiquement lié à la Russie et plus récemment à la Chine, à l’Iran etc.

    En niant cette contradiction entre régimes et masses, contradiction devenue d’un antagonisme irréversible – l’on voit mal comment le régime syrien, par exemple, s’il venait à se sortir de la situation actuelle (ce qui est totalement utopique), pourrait reprendre son ‘cours normal’ des dernières décennies ; l’’internationale ligne rouge’ du ‘p’’c’’mlm’ fait montre d’un ‘campisme’ qu’elle rejette lorsqu’il s’agit des ‘bolivarismes’ et autres ‘gauches’ bourgeoises latino-américaines, lesquelles ne sont pourtant pas en train de massacrer leur population comme le faisaient Kadhafi mais aussi Ben Ali et Moubarak (puisqu’ils dénient là aussi toute légitimité à la révolte), et continue à la faire Assad, même si ses adversaires ASL et salafistes ne valent sans doute guère mieux… on n’y comprend plus grand-chose ! À l’heure où le nouveau ‘souverain pontife’ fait face à une virulente polémique quand à son rôle sous la dictature argentine de 1976-83, l’on se demande à grand-peine où sont les milliers de morts et de ‘disparus’ des tumblr_mjmfzvwDKC1rzsrldo1_500.jpg‘fascistes’ Chavez, Morales, Correa ou Ortega, torturés à mort, abattus et enterrés dans les bois ou jetés d’hélicoptère dans la mer ; les villages entiers atrocement massacrés (comme par les 'autodéfenses unies' paramilitaires colombiennes ou les 'kaibiles' du Guatemala), etc. : c'est CELA, le fascisme en Amérique latine (comme d'ailleurs dans les États réactionnaires arabes) !

    On n’y comprend plus grand-chose… sinon, non sans un certain frisson dans le dos, qu’entre les ‘gauches populistes’ latino-américaines, les ‘islamistes’ qui profitent de l’’appel d’air’ provoqué par la chute des autocrates arabes (seule explication que l’on voit à la position ‘surprise’ du 'p''c''mlm' sur Kadhafi et Assad), les maoïstes du Népal et maintenant (sans guère plus de retenue) d’Inde, nos tenants de la ‘ligne rouge internationale’ semblent en fait totalement partager leur ‘pandémonium’ avec… la ‘droite radicale’ de type ‘néocon-occidentaliste’, de type Dreuz.info, Euro-reconquista etc. Ceci, en s’appuyant prétendument sur le ‘maoïsme classique’ d’organisations affrontant – avec dogmatisme selon nous – les forces politiques ‘bolivariennes’ ou ‘islamistes’ dans leurs pays respectifs, ce qui, pour le coup, ne manque pas de sel ‘cosmopolite’. Sur les pays arabes, leur position est en fait un classique du gauchisme (trotskyste, par exemple) : lancer un mot d’ordre ‘ultra-puriste’ – révolution démocratique arabe – en niant à quelque évènement, quelque lutte que ce soit, le caractère d’étape (ou de possible étape) vers ce but ultime, le vidant ainsi de tout contenu concret, de toute réalisabilité, pour en faire un slogan creux. Ainsi, le 'p''c''mlm' est 'évidemment antisioniste', mais la ‘seule solution’ à l’occupation sioniste de la Palestine est la ‘révolution démocratique arabe’, et en attendant c’est sur les (rares dernières) forces combattant concrètement le sionisme que le ‘p’’c’’mlm’ déverse régulièrement sa bile – puisqu'aucune de ces organisations n'est 'purement' maoïste, voire même simplement marxiste. arab-revolution-2303Quant aux justes révoltes populaires contre les satrapes de tout poil (et de tout 'bord' géopolitique), n'étant pas la pure ‘révolution démocratique arabe’ tant escomptée, dirigée par un Parti maoïste ('sans le Parti, il n'y a rien !'), elles n'ont bien sûr aucune chance de trouver grâce à leurs yeux : autant dire qu'avec des 'Partis de la science MLM' comme cela, les despotes valets de l'impérialisme peuvent dormir tranquille... Voilà bien une méthode fort subtile pour défendre, objectivement, le statu quo dans les pays arabes et musulmans qui, du Sahara occidental à l'Iran, sont la ceinture de feu de la 'forteresse' impérialiste Europe ! [Sur l’État turc et le PKK, il est 'intéressant' de les voir aujourd'hui reprendre dans les grandes lignes l'analyse de Servir le Peuple datant de juin 2010 ; en revanche, il est totalement ridicule d'affirmer que le MLN kurde se résume au PKK et encore moins à Öçalan, qui ne contrôle même pas toutes les factions du PKK : le MLNK existe depuis la fin de l'Empire ottoman, en 1920, et le PKK d'Öçalan n'a été que son expression particulière dans les années 1980-2000.]

    Mais bon… rien de bien étonnant, lorsque l’on connaît le passé pour le moins sioniste de droite (et l’absence totale d’autocritique à ce sujet) du ‘génie éclairé’ qui prétend diriger le ‘Parti de la science MLM’. 

    Quoi qu’il en soit, comme l’on peut encore le voir avec la dernière publication du ‘centre mlm’ sur le néocolonialisme, la pseudo petite ‘internationale-plus-rouge-que-moi-tu-meurs’ du ‘p’’c’’mlm’ et consorts, comme TOUJOURS le gauchisme à travers toute l’histoire du mouvement communiste, est en train d’exploser inexorablement sous ses contradictions, en un véritable panier de crabes. De leur côté, les maoïstes authentiques et conséquents, impliqués dans le mouvement réel des luttes de classe (‘syndicalisme révolutionnaire’ selon nos super-ultra-rouges-de-la-galaxie) et les Guerres populaires (ou le soutien internationaliste – ‘cosmopolite’ – à celles-ci) à travers le monde, construisent patiemment le mouvement communiste international du 21e siècle qui saura faire face aux immenses tâches de la Nouvelle Vague Révolutionnaire Mondiale.

     

    portada de Revolución Obrerra 344PS : l'UOC-MLM de Colombie a 'rendu sa copie', et c'est non sans une certaine surprise que nous trouvons leur position éminemment CORRECTE. Chavez y est correctement qualifié de RÉFORMISTE, la critique de sa politique, non sans une pointe de gauchisme, est la critique léniniste classique du réformisme (que l'on retrouve aussi bien chez les ML et les maoïstes que chez les trotskystes) ; le 'chavisme', SURTOUT, est reconnu comme un PHÉNOMÈNE POLITIQUE DE MASSE que des communistes ne peuvent ignorer et, dans l'avant dernier paragraphe, il est même dit une chose très intéressante : "Le réformisme bourgeois bolivarien au Venezuela, tout en détournant le peuple d'une véritable révolution, ne pouvait pas supprimer la nécessité d'une telle révolution. Il a de fait servi à affiner davantage la lutte des classes, à amener davantage le Peuple aux problèmes de la politique, du pouvoir et de l’État, ce qui a contribué à fertiliser le terrain pour le travail des révolutionnaires authentiques, pour l'activité politique portant les véritables idées du socialisme au Peuple vénézuélien, pour guider le processus qui doit inévitablement abattre le pouvoir des classes réactionnaires et construire un nouvel État des ouvriers et des paysans vers le vrai socialisme dirigé par le prolétariat"... !!! Nous n'aurions pas dit mieux, ni autrement : si les 14 années de 'chavisme' ont eu d'indéniables aspects de 'frein' à l'émancipation révolutionnaires des masses, elles auront aussi été, pour celles-ci, une ÉCOLE DE RÉVOLUTION - si le (n)PCI disait les choses ainsi, nous serions totalement d'accord. Abstraction faite d'une certaine 'tonalité gauchiste générale' du texte (notamment le renvoi dos à dos avec le régime colombien qui, lui, est typiquement 'fasciste du 21e siècle'), SLP peut dire qu'il partage cette analyse dans les grandes lignes...


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  • jpg Ange Diawara2-300x258Servir le Peuple vous offre aujourd'hui un nouveau document historique, portant sur des faits largement méconnus de cette Françafrique qui, pourrait-on dire en paraphrasant Marx (au sujet de l'Irlande et du prolétariat anglais), est réellement le secret de l'impuissance du prolétariat d'Hexagone métropolitain.

    Il y a 40 ans, en avril 1973, au Congo-Brazzaville, était assassiné dans des conditions particulièrement sordides Ange DIAWARA, héroïque fils du peuple et révolutionnaire marxiste, qui avait pris la tête d'une lutte armée contre le pouvoir en place. Contrairement au cas de Pierre MULELE (lui aussi affreusement assassiné, 5 années plus tôt), au Congo-Kinshasa voisin, ce régime avait la particularité de se vouloir "marxiste", "république populaire", "sur la voie du socialisme", et c'est justement ce qu'il est intéressant d'étudier.

    Retraçons donc rapidement l'histoire de cette néocolonie de l'Empire BBR. Lorsqu'il se voit, en 1960, octroyer sa pseudo 'indépendance' par la métropole impérialiste, le Congo voit placée à sa tête l'une des plus grotesques satrapies néocoloniales de la 'Françafrique' : celle de l'abbé Fulbert YOULOU, anticommuniste rabique, vouant (on ne sait trop pourquoi) une haine toute particulière à la République populaire de Chine ("Le péril qui menace l'Afrique aujourd'hui est teinté du jaune communiste de Pékin (...) C'est la race noire tout entière qui est menacée d'extermination sous l'occupation massive des vagues chinoises"), défenseur de "l'Occident chrétien", ami de Moïse Tschombé au Congo ex-belge voisin, etc. etc. Mais, en août 1963, un soulèvement populaire éclate et en trois jours Youlou est renversé : ce sont les 'Trois Glorieuses', qui donneront leur nom à l'hymne officiel du pays. C'est un enseignant 'de gauche', Alphonse MASSAMBA-DÉBAT, qui assume alors la présidence de l'État congolais. Le régime de Massamba est typiquement le genre de régimes que soutient à cette époque la Chine de Liu Shaoqi : un régime nationaliste bourgeois 'progressiste' et 'non-aligné', refusant aussi bien le néocolonialisme de l'ancienne métropole et des ses alliés occidentaux que l'alignement sur Moscou - pour le coup, les pires cauchemars de l'abbé Youlou semblent se réaliser. Des liens sont également noués avec Cuba : le Che rend visite à Massamba en janvier 1965 et dans la foulée (tandis que lui-même rejoint la Tanzanie puis l'Est du Congo-Léopoldville, futur 'Zaïre'), une brigade internationaliste cubaine baptisée 'Patrice Lumumba' (~ 200 hommes) et commandée par Jorge Risquet vient entraîner et appuyer les forces de Massamba ainsi que les divers mouvements de libération du continent, dont Brazzaville est devenue une 'Mecque' : MPLA angolais, ANC sud-africain et SWAPO namibienne, ZAPU et ZANU du ngouabi.jpgZimbabwe, maquis du Kwilu de Pierre Mulele etc. Mais l'expérience 'progressiste' de Massamba-Débat se révèle instable, traversée par le clivage Nord/Sud du pays (sur lequel nous reviendrons), menacée par la droite youliste (Bernard Kolelas, Pierre Kinganga) et contestée par de jeunes officiers 'marxistes' de l'armée, emmenés par le capitaine Marien NGOUABI. Le pays va vers la guerre civile et, entre août et décembre 1968, Ngouabi démet progressivement Massamba de ses fonctions et prend la direction du pays, à la tête d'un Conseil National de la Révolution. À la toute fin de 1969 celui-ci deviendra le Parti congolais du Travail (PCT), 'parti unique d’avant-garde, d’idéologie marxiste-léniniste', et le Congo sera proclamé 'République populaire'. Alors que les amitiés internationales de Massamba étaient plutôt chinoises et cubaines, le pouvoir de Ngouabi est clairement tourné vers l'URSS et le COMECON (en gardant des liens avec Cuba, qui a entre temps choisi l'orbite soviétique), mais aussi... vers l'ancienne métropole BBR, et notamment son monopole pétrolier ELF Aquitaine qui a ses 'hommes' dans l'aile 'droite' du PCT (Ngouabi lui-même représentant plutôt le 'centre'), en particulier dans la clique autour de Denis SASSOU-NGUESSO. C'est ainsi que, dès octobre 1968, le Congo-Brazzaville ngouabiste livre ignominieusement à son voisin Mobutu le héros révolutionnaire marxiste-léniniste Pierre Mulele, qui est massacré dans des conditions atroces... De fait, Ngouabi restait peut-être dans une certaine mesure un progressiste sincère, mais au fil du temps il se révèle de plus en plus l'otage de la clique Sassou. Quelques années plus tard, en 1977, ce dernier 'bouclera' définitivement la boucle en le faisant assassiner puis en accusant du crime Massamba et ses partisans, qui seront condamnés à mort et exécutés. Il règnera sur le Congo-Brazzaville jusqu'en 1992, puis reprendra le pouvoir en 1997 (son successeur Pascal Lissouba s'étant trop rapproché des Anglo-Saxons) au terme d'une guerre civile qui fera encore des centaines de milliers de victimes (on parle généralement de 400.000...). Il y est toujours. Tout cela au service commandé et au plus grand bénéfice d'ELF Aquitaine devenu TOTAL, ce que résumera parfaitement Albin Denis Sassou NguessoChalandon, PDG de la compagnie entre 1977 et 1983 (avant de devenir ministre RPR de la Justice, puis mentor d'une certaine Rachida Dati...), dans un fameux documentaire : "Il vaut mieux avoir un régime... comment dire... 'communisant', mais stable, que des régimes comme on a eu après... républicains, calqués sur notre République, nos mauvaises méthodes politiques et qui étaient tout le temps renversés. C’est pire que tout pour les industriels...". CQFD. 

    C'est donc dans ce contexte troublé qu'émerge, au début des années 1970, la figure lumineuse d'Ange Diawara. Marxiste conséquent, homme intègre, il dirige sous Massamba la Jeunesse du Mouvement national révolutionnaire (MNR, le Parti dirigeant) ainsi que la Défense civile, milice populaire formant la garde rapprochée du président progressiste. C'est lui qui, finalement, 'tranche' en 1968 le conflit entre Massamba et Ngouabi en faisant pencher la Défense civile en faveur de ce dernier : elle sera alors intégrée dans l'armée, où Diawara reçoit le grade de lieutenant. Il intègre également le PCT, dont il devient rapidement un chef de file de l'aile gauche.

    Il avait aussi, comme Massamba-Débat et ses partisans, la particularité d'être originaire du Sud du pays ('Pool' autour de Brazzaville et région atlantique de Pointe-Noire), alors que Ngouabi, Sassou et leurs 'jeunes officiers progressistes' prosoviétiques étaient plutôt originaires du Nord (région de la 'Cuvette'). C'est là une autre caractéristique absolue du colonialisme et du néocolonialisme en Afrique : l'hinterland arriéré est le siège de la féodalité tribale, qui engendre la bourgeoisie bureaucratique et la caste militaire garde-chiourme de l'impérialisme ; tandis que les régions côtières, aux forces productives plus avancées, sont le siège de la bourgeoisie nationale (entrepreneuriale, commerçante et intellectuelle), de la classe ouvrière et des classes populaires semi-prolétariennes, donc des forces qui vont contester la domination impérialiste. Nous avons pu voir, dans la dernière décennie, exactement le même schéma en Côte d'Ivoire, avec Ouattara l'aristocrate dioula du Nord et ses 'Forces nouvelles' nordistes, formées en fait... des meilleures troupes de l'armée ivoirienne d'avant-guerre civile (l'armée étant souvent le seul 'ascenseur social' des jeunes hommes de ces régions déshéritées), tandis que Gbagbo 'l'indocile' était typiquement le prof de lycée (petit-bourgeois intellectuel) d'Abidjan, originaire de la 'boucle du cacao' bété (Sud-Ouest, terre de prolétariat agricole produisant le cacao, première richesse du pays), le bourgeois national par excellence qui voulait desserrer l'étau françafricain sur son pays en se tournant vers les impérialismes concurrents, d'abord US/Anglo-saxons et Israël puis Russie/ChineFlag_of_the_Congo_Army_-1970-1992-.png/'émergents' (BRICS). Ou encore, de la même manière, l'une des premières mesures révolutionnaires de Thomas Sankara au Burkina a été d'abolir la chefferie coutumière... et l'une des premières de son assassin Compaoré fut de la rétablir.

    Diawara conceptualisera brillamment cela à travers le terme d'OBUMITRI : oligarchie bureaucratique militaro-tribale ; éventuellement (comme dans le cas congolais) 'socialiste' (voire 'marxiste') et 'anti-impérialiste' en parole, mais toujours et systématiquement garde-chiourme des monopoles impérialistes dans les faits (analyse totalement valable, par ailleurs, dans des pays arabes comme la Syrie ou hier la Libye). Il sera d'ailleurs, pour cela, dénoncé non seulement (on s'en serait douté...) comme un 'agent de la CIA', mais aussi comme un homme de la 'revanche du Sud' massambiste contre les populations du Nord ; alors qu'il voulait au contraire en finir avec cette 'ethno-féodalité', cette 'division régionale et tribale des tâches' au service de l'impérialisme, pour forger, sur le découpage colonial dénommé 'Congo', une base rouge de la révolution anti-impérialiste en Afrique...

    À partir de 1971, donc, Ange Diawara, avec l'aile gauche du PCT, va de plus en plus fustiger l'embourgeoisement, la corruption et les tendances au népotisme 'nordiste' du régime de Ngouabi ; ce qui lui vaudra d'être écarté de tout poste à responsabilité à la fin de l'année. Il tente alors un coup de force le 22 février 1972, qui échoue, et suite à celui-ci (sans doute était-ce prévu), il déclenche une guérilla révolutionnaire dans le 'Pool' autour de Brazzaville, à la tête du M22 (Mouvement du 22-Février). Celle-ci se battra vaillamment pendant un peu plus d'un an, mais, en avril 1973, Ange Diawara et 13 de ses camarades seront capturés et abattus ; sous la pression de Sassou-Nguesso, Ngouabi devra se livrer à la sinistre mise en scène de l'exposition publique des corps, affreusement profanés, dans le Stade de la Révolution à Brazzaville (au moins étaient-ils déjà morts, contrairement à Mulele quatre ans et demi plus tôt !). Il semblerait, en réalité, qu'ils aient été arrêtés au 'Zaïre' par les forces de sécurité de Mobutu, alors qu'ils tentaient d'y fuir après leurs revers militaires ; ce qui serait alors un joli 'renvoi d'ascenseur' de la part du sinistre satrape de Kinshasa, après la traîtreuse livraison de Pierre Mulele par Ngouabi en 1968...

    jpg mobutuL'on pourra bien sûr dire, bien que Diawara ait été (d'après tous les témoignages) un marxiste 'solide', que tout cela est fort éloigné des 'canons' du marxisme-léninisme-maoïsme [et comme le signale un commentaire sous l'article, la Chine du 'retour à la normale' post-Révolution culturelle et pétage de plombs de Lin Piao n'apportera aucun soutien à la tentative de Diawara, qualifiée par elle et ses affidés (PCMLF etc.) d''aventurisme', de 'guérillerisme romantique' etc... il faut bien dire que paradoxalement, malgré les premières prémisses tortueuses de la "théorie des trois mondes" (appel aux prochinois hexagonaux à soutenir De Gaulle en 1965 par exemple), la politique internationale chinoise du milieu des années 1960 était beaucoup plus intéressante et positive que celle des années 1970 !]. Mais SLP a, d'une part, toujours eu pour ligne de témoigner le plus grand respect à ceux et celles qui sont tombé-e-s, sacrifiant leur vie avec abnégation, pour la cause de l'émancipation des travailleurs et des peuples contre les oppresseurs et les exploiteurs. Et d'autre part, dans un Congo-Brazza mis en coupe réglée, devenu la véritable propriété privée du monopole BBR TOTAL et de son contremaître Sassou-Nguesso, la figure héroïque d'Ange Diawara revêt une signification toute particulière, celle d'une lueur d'espoir sur un continent dévasté par la Françafrique, que celle-ci soit ouvertement bourgeoise et garde-chiourme ou peinturlurée de 'rouge'.

    C'est donc d'un sincère élan internationaliste que Servir le Peuple, média communiste révolutionnaire marxiste-léniniste-maoïste, rend un vibrant et rouge hommage prolétarien au héros révolutionnaire Ange DIAWARA, combattant et martyr de la Libération africaine !


    En 2009, l'intellectuel progressiste congolais Pierre EBOUNDIT a rendu hommage, dans un livre, à Ange DIAWARA et à la guérilla du M22 - dont il a, de fait, été un soutien "civil" (dans le milieu lycéen) à l'époque ; avant de présider aujourd'hui la Ligue panafricaine UMOJA.

    Voici la présentation de celui-ci :


    Le M22, une expérience au Congo, devoir de mémoire


    L’histoire contemporaine du Congo Brazzaville, dès l’aube des indépendances, est une histoire effervescente. A l’événement politique brutal, explosif, massif qui détruit les complexités sociales et psychologiques, s’ajoute le diptyque terrible suivant : Violence et Exclusion.

    La Violence qui transforme l’événement politique en événement-traumatisme d’une part ; l’Exclusion, produit d’exclusivismes identitaires centrifuges (tribal, ethnique ou régional), menaçant en permanence l’altérité et le vivre-ensemble d’autre part, sont les deux faces de ce diptyque qui impose à la société congolaise, et plus particulièrement à son élite, des silences et des peurs, parfois, coupables. C’est ainsi qu’à la suite des différents épisodes douloureux qui jalonnent l’histoire du Congo Brazzaville, il n’y a presque pas de témoignages directs des protagonistes, pour la plupart encore en vie, laissant volontiers la place aux légendes et autres mystifications.

    Le « M22 » (le mouvement du 22 février 1972), n’échappe pas à la règle. Le mouvement d’Ange Diawara traîne ainsi son lot de légendes, de mythes, de fantasmagories dans l’imaginaire des congolais, mais aussi, de mensonges nourris souvent par le discours officiel. C’est pourquoi le témoignage de Pierre Eboundit, l’un des acteurs du réseau urbain qui faisait jonction avec le maquis de Goma Tsé-tsé, rompt avec les conséquences du diptyque Violence/Exclusion, mais aussi servira d’aiguillon, nous l’espérons en tout cas, tel un pionnier, à d’autres acteurs encore en vie du « M22 » afin que toutes les facettes de cette histoire soient connues, au nom de la vérité historique.

    Les mensonges du pouvoir d’alors

    Groupe d’aventuriers hirsutes, tribalistes assoiffés de pouvoir, agents à la solde de la CIA (Central Intelligence Agency) donc contre la révolution… tels sont les arguments du régime d’alors pour justifier la répression aveugle contre les dirigeants du « M22 ». Evidemment, le résultat est éloquent : car dès l’échec de l’action du 22 février 1972, le pouvoir opère près de 1600 arrestations [1] sur tout le territoire national, trois camarades, compagnons de Ange Diawara, sont arrêtés et froidement assassinés : Prosper Mantoumpa-Mpollo à Pointe-Noire, Elie Théophile Itsouhou et Franklin Boukaka [2] à Brazzaville. Ensuite, un an plus tard après le lancement du « M22 », Ange Diawara et ses compagnons seront assassinés sans procès, respectivement le 16 mars 1973 pour Jean-Pierre Olouka, le 21 avril 1973 pour Ikoko Jean-Baptiste et Jean-Claude Bakékolo, et enfin le 23 avril 1973 pour Ange Diawara, suivie d’une scène macabre puisque son cadavre sera exposé devant le public au Stade de la Révolution, puis sillonnera par la suite dans les rues de la capitale congolaise.

    Ange Diawara {JPEG}

    Or, à la lecture du témoignage de Pierre Eboundit, on apprend que ceux que l’on a présentés comme étant un groupe d’aventuriers hirsutes, dès l’échec de leur action le 22 février 1972, avec les conséquences que l’on sait en termes de répression, sans en être impressionnés, se sont retirés dans la campagne au sud de Brazzaville, principalement à Goma Tsé-tsé. Leur première réaction est de publier une brochure pour expliquer aux populations le sens de leur combat.

    C’est ainsi qu’un document intitulé « L’Autocritique du M22 », va circuler sous le manteau à Brazzaville et à l’intérieur du pays. Les groupes de discussion se forment clandestinement autour de ce document, preuve de sa puissance d’analyse. Si la verve est révolutionnaire, fruit du discours de l’époque, à savoir : « la destruction de l’appareil d’état bourgeois bureaucratique et néocolonial, instrument de domination et d’exploitation des masses populaires, au service de l’impérialisme et des classes dominantes », on y découvre surtout une dénonciation lucide des contraintes de servages économiques et les infirmités culturelles qui pèsent sur nos « pays nains » affectant ainsi son métabolisme de base. Par conséquent, si l’on peut discuter des moyens choisis par les dirigeants du « M22 » pour arriver à leur fin, on ne saurait par contre honnêtement nier la réalité des problèmes posés par ceux-ci.

    L’autre accusation mensongère du pouvoir d’alors est de traiter les dirigeants du « M22 » de tribalistes assoiffés de pouvoir. Evidemment, dans un pays où 13 ans plus tôt, avait éclaté une guerre civile opposant Youlou le sudiste à Opangault le nordiste, événement que d’aucuns ont qualifié de « déterminisme historique », quand on sait que le président de la république d’alors, Marien Ngouabi était du Nord et Ange Diawara, leader du « M22 », originaire du Sud, les esprits simplistes se laissent naturellement abusés par une telle propagande.

    Cependant, on y voyant de très près, on s’aperçoit que le « M22 » fut un mouvement basé réellement sur des idées, dépassant le cadre ethnique car comment expliquer la présence de nombreux compagnons de Ange Diawara tels que Ikoko et Olouka, assassinés comme lui et originaires de la région de la Cuvette, donc de la même région que le Président de la République ? Et plus particulièrement, le cas de Pierre Eboundit, jugé et condamné, qui n’avait que 21 ans et lycéen encore, neveu du Colonel Yhombi Opango, chef d’État Major Général des armées d’alors, et de surcroit cousin du Président de la République, le Commandant Marien Ngouabi ?

    Par ailleurs, cette instrumentalisation du tribalisme par le pouvoir pour cacher les véritables revendications des insurgés était de bonne guerre d’autant que dans la brochure « l’Autocritique du M22 », Diawara et ces compagnons avaient magistralement mis à nu le tribalisme au sommet de l’Etat qui régnait comme dans une organisation scientifique de travail, à travers le slogan : O.BU.MI.TRI. (Oligarchie Bureaucratique Militaire et Tribale).

    Enfin, agents à la solde de la CIA (Central Intelligence Agency) donc contre la révolution est un autre argument développé par les autorités d’alors pour discréditer le « M22 ». Or, dans un texte intitulé "Lettre du Zaïre", [3] et repris par Pierre Eboundit dans ce livre, on peut lire : (…) Diawara et ses amis s’étaient repliés sur le territoire zaïrois où ils disposaient de « complicités », semble-t-il pour des questions de ravitaillement (les contacts Brazzavillois étaient « grillés »). Ils sont tombés dans un piège sans aucune possibilité de retraite. Pour Mobutu et Ngouabi il ne restait qu’à négocier la livraison du groupe Diawara contre celle du groupe des douze militaires (dont deux généraux et un colonel) qui avaient tenté de renverser Mobutu pendant son voyage en Chine et s’étaient enfuis à Brazzaville à la suite de l’échec de leur tentative.

    Comment alors traiter les dirigeants du « M22 » d’agents à la solde de la CIA, quand on sait qu’ils ont été livrés par Mobutu, élément notoirement reconnu comme étant l’allié des Américains en Afrique centrale, à un pouvoir se réclamant lui-même anti-impérialiste ? La ficelle, n’est-elle pas trop grosse ?

    Le « M22 », vue de l’intérieur et le procès

    A travers le témoignage de Pierre Eboundit, on découvre pour la première fois, l’organisation interne du « M22 », du maquis de Goma Tsé-tsé au réseau urbain avec différents tentacules dans toutes les couches sociales.

    Autant, on est pris d’admiration devant le dévouement et la foi dans l’idéal qui anime les fugitifs dans le dénuement total, ce qui humanise ce combat ; autant, on y découvre aussi des amateurismes criards dus à l’inexpérience des dirigeants du « M22 ». Or, l’existence du maquis dépendant de la capacité du mouvement à trouver un fonctionnement quasiment clandestin, si les héroïsmes et la fidélité des compagnons ne manquent pas, comme le REMO (Réseau Moundélé, essentiellement constitué de ressortissants étrangers, blancs pour la plupart, dont Paule Fioux, Paule Deville, Kempf ou Mathis, Arthur ou Elico, Bernard Boissay ...), on relève aussi malheureusement l’existence de la traitrise, de la lâcheté, des agents doubles…

    Enfin, arrive le procès. L’avant procès est caractérisé par les tortures d’une cruauté inimaginable sur les cadres du réseau urbain décapité. Ce qui donnera lieu, pour certains d’entre eux, aux aveux ; et pour d’autres, au reniement de leur appartenance au « M22 » ou d’une quelconque relation avec Ange Diawara.

    Nous découvrons aussi les tractations entre le président de la Cour, Henri Lopès, représentant d’un pouvoir prétendument progressiste et anti-impérialiste, et l’avocate Gisèle Halimi, chargée de la défense des expatriés, associés au « M22 ». C’est ainsi qu’il y avait une différence dans le traitement des détenus. Les uns "épargnés" parce que ressortissants de la puissance coloniale, les autres (congolais) abandonnés à la merci des agents de la répression locale.

    Hommage internationaliste à Ange DIAWARA, héros révolutionnaire africain méconnu

    Pierre Eboundit, pionnier à contre courant

    Les guerres civiles à répétition subies par les congolais ces dernières décennies ont, non seulement rendu vermoulue une conscience nationale, déjà bien tenue, en la minant avec les larves d’insectes, de plus, elles ont développé une espèce de mentalité conditionnée ethniquement où les faits socio-politiques du passé comme ceux du présent, avec leur lot de déformation, viennent valider. C’est pourquoi, il faut un sacré courage aujourd’hui pour ramer à contre courant tel un pionnier.

    Lucien Febvre, grand historien français, disait, je cite : Le sort du pionnier est décevant : ou bien sa génération lui donne presque aussitôt raison et absorbe dans un grand effort collectif son effort isolé (…) ; ou bien elle résiste et laisse à la génération d’après le soin de faire germer la semence prématurément lancée sur les sillons. (…).

    Dans ce rôle du pionnier contre les conséquences du diptyque Violence/Exclusion, l’hostilité à cette initiative de Pierre Eboundit pourrait d’ailleurs venir des siens propres. Car l’affaire « M22 », à l’instar des autres épisodes douloureux du Congo Brazzaville, a été conscientisée comme une validation d’une mentalité collective conditionnée ethniquement.

    Mais « pionnier hérétique » déjà hier sous la « révolution » en rejoignant le « M22 », pionnier encore aujourd’hui en allant à contre courant d’une société dont la conscience nationale est en lambeau, c’est un nouveau défi à relever pour Pierre Eboundit.

    Car l’Histoire vraie, assumée, peut servir de ciment social en faisant d’une population un Peuple, Uni et Solidaire dans la construction du présent et de l’avenir.

    Panafricainement !

    [1] Gisèle Halimi, “Avocate irrespectueuse”, éd. Plon, février 2002, p.164

    [2] Prosper Mantoumpa-Mpollo est Lieutenant de l’armée - Elie Théophile Itsouhou est membre du Comité Central, ancien Ministre - Franklin Boukaka, Chanteur très populaire dans son pays et à travers l’Afrique pour ses chansons engagées.

    [3] Publié dans l’ouvrage de Woungly-Massaga, « La Révolution au Congo », p.155 - p.157, Ed. François Maspero - Janvier 1974

     

    Autres liens sur le thème :

    http://www.mampouya.com/article-le-m-22-l-assassinat-de-ange-diawara-53368945.html

    http://pierreboundit.unblog.fr/tag/ange-diawara/

    http://fr.wikipedia.org/wiki/Ange_Diawara

    22 février 1972 – 22 février 2012 : Il y a 40 ans éclata la rupture au sein du P.C.T : récit de l’événement

    22 février 1972, le M22 a 40 ans!

     

    "La question de l'appareil d'État compte incontestablement parmi celles qui se posent communément à tous les pays désireux de lutter contre l'impérialisme. Lorsque nous analysons l’échec de N'Krumah au Ghana, nous constatons que l'erreur la plus importante que commit ce grand militant africain fut de ne pas s'être attaqué radicalement à l'appareil d'État." (Extrait de l'Autocritique du M22, L'Harmattan, p.60)

    AfricaFistZm


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  • Le texte d’Engels : http://sheisausorelh.e-monsite.com/blog/politique/engel-et-l-occitania-fr-oc.html


    Nous voyons donc clairement, ici, un ‘phare’ de la pensée marxiste (au moins aussi important que Marx lui-même), Friedrich Engels, reconnaître explicitement que le ‘Sud’ ou ‘Midi de la France’1 abritait – et rien ne dit d’ailleurs, dans son texte, que cela soit terminé – une nationalité, une nation moderne post-An 1000 (‘Elle fut la première, de toutes les nations modernes, à avoir une langue littéraire’), et une brillante civilisation à la pointe de la ‘renaissance médiévale’, ‘reflet de l’ancienne civilisation hellène’, lorsque les rois capétiens (Philippe Auguste et ses successeurs) la soumirent à leur couronne. Et que même lorsque le processus fut achevé, sous Louis XI, ‘pendant plus de trois siècles’, ‘les Français du Sud luttèrent contre leurs oppresseurs’ (l’État parisien), soit jusqu’à la Révolution bourgeoise de 1789… date à laquelle le père d’Engels était sans doute déjà de ce monde, donc ‘hier’ pour l’auteur.

    Voilà qui devrait faire ravaler leur caquet à une flopée de ‘marxistes’ prétendant que notre lutte révolutionnaire de libération occitane est ‘petite-bourgeoise’, ‘réactionnaire’, résultant d’un ‘mythe’ inventé au siècle dernier par des ‘pétainistes’…

    Quelques observations s’imposent toutefois :

    - L’affirmation selon laquelle, au moment (1848) où écrit Engels, le ‘Midi’ occitan serait devenu ‘le soutien principal du féodalisme’ et ‘la force de la contre-révolution en France’, est factuellement FAUSSE : à cette époque, la ‘forteresse blanche’ (des propriétaires fonciers monarchistes, du cléricalisme réactionnaire) est plutôt l’Ouest de l’Hexagone, le bassin de la Loire en aval d’Orléans, l’espace géographique entre le sud de la Normandie, la Touraine, la Haute-Bretagne gallo et la fameuse Vendée.

    Aux élections de la 2e République, en 1848-49 (au moment donc où Engels écrit ces lignes), le ‘Midi’ est tout au contraire un bastion ‘démocrate-socialiste’ et ‘républicain avancé’, frappé de plein fouet par la modernité industrielle et la prolétarisation. Sa ‘morphologie sociale’, contrairement à celle de l’Ouest, se prête très bien à une ‘conscience populaire’ républicaine et socialisante ; déjà, dans les années 1790, le ‘Midi’ était peut-être ‘girondin’, hostile au centralisme parisien des ‘Montagnards’, mais pas ‘chouan’. C’est là l’acte de naissance du célèbre ‘Midi rouge’, le ‘Midi’ de Jaurès et de l’insurrection paysanne de 1907, du syndicalisme révolutionnaire donnant naissance à la CGT à Limoges ; tendance politique qui ne s’inversera qu’à partir des années 1960-70 – et tout cela en lenga nostra, évidemment : il était aussi absurde de s’adresser aux masses en français académique à l’époque, qu’en anglais aujourd’hui. Dans les années 1890, la magnifique chanson La Libertat, hommage à une grève ouvrière à Marseille, sera encore écrite dans la lenga, de même que les proclamations insurrectionnelles de 1907.

    Déjà, pendant les Guerres de Religion, au 16e siècle, le ‘Midi’ n’avait-il pas été le ‘bastion’ de la Réforme protestante – Réforme considérée par tous les marxistes comme un phénomène progressiste pour l’époque, même si le Paris de la Ligue (contemporain et farouchement opposé) avait lui aussi des traits révolutionnaires bourgeois préfigurant le Paris ‘montagnard’ – ? La ‘république’ aristocratique et patricienne urbaine des ‘Provinces de l’Union’ peut bel et bien être vue comme une ‘résurrection’, à un niveau supérieur, de la ‘république aristocratique’ d’avant la Conquista dont parle Engels. Ce ‘Midi’ huguenot verra ensuite, face à la politique antiprotestante de Louis XIV, se lever l’une des toutes premières ‘guerres populaires avant l’heure’, la Guerre des Camisards ; et ces huguenots deviendront bien évidemment, en 1789, les chefs de file de l’idée monarchique parlementaire ou carrément républicaine. L’histoire de nostra Occitània dément donc dans une très large mesure l’affirmation d’Engels.

    - La Révolution bourgeoise ‘française’ a effectivement ‘achevé’ la destruction de l’Occitanie comme réalité politique, en mettant fin aux ‘provinces réputées étrangères’, aux institutions provinciales autonomes etc.2 Mais affirmer qu’elle a ‘fait des habitants du Sud de la France des Français’, c’est aller un peu vite en besogne. Il s’agit là d’une vision typique du marxisme des débuts, du milieu du 19e siècle : une vision ‘subjectiviste’, ‘volontariste’, ‘superstructurelle’ de ce qu’est une nation ; vision qui était effectivement celle de la bourgeoisie révolutionnaire de l’époque (adhérer à sa révolution bourgeoise, dans un cadre géographique défini, signifiait former une nation). Mais le léninisme (et, dans sa continuité, le maoïsme) nous a ensuite enseigné que les nations sont des réalités infrastructurelles, reposant sur une communauté de vie productive et sociale générant un ‘sentiment de commune appartenance’. Or, si la Révolution bourgeoise a effectivement ‘anéanti les derniers restes de l’indépendance médiévale’, et fait des Occitans des ‘citoyens français’, au niveau de la réalité sociale, malgré les suppliques de l’abbé Grégoire, cela est encore resté très largement sur le papier : à l’époque où écrit Engels, la vie sociale de tous les jours, dans le ‘Midi’, se mène encore massivement dans la langue et la culture ‘régionale’.

    La tentative d’anéantissement de cela n’interviendra qu’encore plus tard, au stade MONOPOLISTE du capitalisme, dans les dernières décennies du 19e siècle et au 20e, tentative apparemment ‘réussie’ dans la seconde moitié de celui-ci… Il est donc un peu rapide d’affirmer que la Révolution bourgeoise a (pour faire court) retiré aux ‘Français du Sud’ ce qu’il leur restait de leur indépendance médiévale, leur a donné ‘la démocratie en échange et en a fait des Français tout court’.

    - ‘Après une lutte de trois cents ans, leur belle langue était ramenée au rang de patois, et ils étaient eux-mêmes devenus des Français’ : en réalité, l’élite sociale (aristocratie, patriciat urbain) maniant la ‘belle langue’ des troubadours aux 12e-13e siècles avait effectivement, 4 ou 5 siècles plus tard, largement adopté le français ‘officiel’ de la Cour de France y compris dans sa vie quotidienne, sauf pour s’adresser à ses ‘gueux’ ; enterrant de ce fait un occitan littéraire qui commençait tout juste à voir le jour. Mais le ‘patois’ dont parle Engels, ce n’est rien d’autre que la langue populaire, avec ses petites variantes régionales, qui n’a jamais cessé d’exister et d’évoluer de son côté, tout comme évoluait le ‘français’ de l’élite entre le Moyen-Âge et la Révolution ! Cela rejoint ce qui a été dit précédemment : l’Occitanie a disparu comme réalité politique, et il est logique que son élite ait cherché à s’’assimiler’ à l’élite ‘du Nord’, en adoptant sa ‘graaande cultuuure’ et sa langue académique (définitivement fixée au 18e siècle). Mais elle a persisté, dans les ‘provinces réputées étrangères’ du ‘Midi’, comme réalité sociale et donc dans la langue de communication de tous les jours, la langue (et la culture) POPULAIRE ; ce qu’Engels nomme ‘patois’ – dans l’esprit d’un homme d’extraction aisée de son époque, qu’il était (‘il n’existe aucune pensée qui ne porte une empreinte de classe’).

    - Pour Engels (et c’est là un argument ‘phare’ de nos détracteurs ‘marxistes’), la réalité qu’il décrit semble ‘irréversible’, dans une vision linéaire des processus historiques, et vouloir revenir dessus, c’est vouloir ‘faire tourner la roue de l’histoire à l’envers’. Il ne semble pas se placer dans une perspective de négation de la négation, concept qu’il défendra brillamment quelques décennies plus tard contre Dühring, et qui est l’une des trois ‘lois fondamentales’ du matérialisme dialectique. C'est-à-dire, dans une perspective où ‘pour les besoins du progrès de l’humanité’, la nationalité ‘de France méridionale’ (occitane) a été niée par l’État moderne (monarchie absolue) ‘français’ (comme d’autres nations, par le même ou par d’autres États modernes), la Révolution bourgeoise venant ‘achever’ cette négation ; mais où ensuite, toujours ‘pour le progrès de l’humanité’, cette Occitanie niée à travers les siècles (sans jamais cesser de résister, nous dit clairement Engels) renaîtrait à un niveau supérieur, dans le cadre de la révolution prolétarienne mondiale, pour nier à son tour l’État français, appareil politico-militaire du capitalisme donc de l’oppression – bien évidemment, les personnes y compris ‘marxistes’ qui ne veulent pas réellement en finir avec cet appareil d’oppression – donc l’oppression elle-même – ne peuvent ni ne veulent comprendre cela.

    Engels semble ‘condamner’ arbitrairement le ‘Midi’ à ne mener que des combats d’arrière-garde… ce qui est déjà erroné à son époque (voir les résultats ‘démocrates-socialistes’ de 1849, ou la résistance de décembre 1851 au coup d’État bonapartiste), mais ignore de surcroît la transformation d’une chose en son contraire, magnifiquement illustrée par l’exemple de la réaffirmation nationale basque (traditionaliste, conservatrice, cléricale au 19e siècle et aujourd’hui progressiste, socialiste, voire révolutionnaire marxiste ou libertaire). D’une manière générale, lorsqu’une nation est soumise par une autre – forcément – plus avancée d’un point de vue capitaliste (ce qui n’était pas le cas de la ‘France du Nord’ au moment de la Conquista, mais l’est devenu par la suite), que ce soit dans un ‘rapport de voisinage’ ou outre-mer, la résistance initiale tend toujours à se tourner vers le passé, idéalisé. C’est seulement lorsque, en quelque sorte, la conscience de masse s’approprie le développement des forces productives induit par la conquête que la résistance nationale devient une force révolutionnaire et de progrès. Cette vision ‘linéaire’ du matérialisme historique, par Marx et Engels dans leurs premières œuvres, a déjà été pointée par Servir le Peuple dans l’article sur la Question nationale au 21e siècle.

    Dès lors que la réaffirmation de cette civilisation occitane que décrit Engels, écrasée par 5 siècle d’absolutisme puis 2 siècle d’État bourgeois ‘pour les besoins’ du progrès de l’humanité, convergera dans le grand mouvement de la révolution mondiale, et deviendra ainsi force matérielle, nous l’avons déjà dit : IL EN SERA FINI de l’État français comme appareil politico-militaire au service de l’exploitation et de l’oppression des masses populaires d’Hexagone, et de dizaines de pays y compris ‘indépendants’ à travers le monde ; car cet État français est précisément de la Conquista de notre Occitània, moment où le ‘roi des Francs’ devient ‘roi de France’, et ne peut pas continuer à exister sans elle !


    1/ Engels n’emploie effectivement pas le terme ‘Occitanie’, comme cela a pu être ‘relevé’, sur un forum marxiste, par un AGENT CONSCIENT de l’ordre ‘républicain’ bourgeois. Mais ce terme, issu de la contraction de la particule ‘Òc’ (‘oui’) et d’Aquitania, d’usage courant au 13e siècle (lors de la Conquista) et jusqu’au 15e, était ensuite tombé en désuétude et presque plus du tout utilisé en 1848, lorsqu’écrit Engels : à partir du 16e siècle s’était généralisé le terme de ‘Midi’, difficilement traduisible - en allemand - autrement que par ‘Sud’. Le terme d’Occitanie ne sera ressorti des ‘tiroirs’ que sous la 3e République bourgeoise ‘française’.

    2/ Le ‘morcellement’ féodal, en une multitude de duchés, comtés et autres fiefs, auquel aurait mis fin l’État moderne puis la Révolution bourgeoise, est un autre mythe bourgeois franc-maçon et ‘libre-penseur’, dont l’influence infeste le mouvement ouvrier hexagonal depuis l’origine. Au Moyen-Âge, si ‘atomisation féodale’ de l’autorité politique il y a, elle concerne justement… le Bassin parisien, et c’est le premier ‘défi’ que doivent relever les Capétiens au 12e siècle : affirmer leur souveraineté sur la ‘France du Nord’. Vers 1200 (au seuil de la Conquista par Philippe Auguste, qui devient par la même occasion ‘roi de France’, et les croisés de Montfort), l’Occitanie n’est partagée réellement qu’entre deux États : le duché d’Aquitaine-Gascogne (de la fameuse Aliénor) au Nord et à l’Ouest (Aquitaine, Limousin, Auvergne), relevant de la lointaine couronne d’Angleterre (Plantagenêt) ; et une sorte de ‘confédération’ de possessions catalanes (Provence, Montpellier etc.) et toulousaines et de ‘républiques’ patriciennes urbaines au Centre et à l’Est (Languedoc, Provence, Drôme-Ardèche), relevant en dernière instance de la couronne d’Aragon.


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  • Article originellement publié sur le site frère Sheisau Sorelh : http://sheisausorelh.e-monsite.com/blog/politique/retour-sur-f-engels-et-l-occitania.html


    Nous publions ici quelques mises au point du blog Servir Le Peuple sur le texte d'Engels sur l'Occitanie (ici) :

    Nous voyons donc clairement, ici, un ‘phare’ de la pensée marxiste (au moins aussi important que Marx lui-même), Friedrich Engels, reconnaître explicitement que le ‘Sud’ ou ‘Midi de la France’1 abritait – et rien ne dit d’ailleurs, dans son texte, que cela soit terminé – une nationalité, une nation moderne post-An 1000 (‘Elle fut la première, de toutes les nations modernes, à avoir une langue littéraire’), et une brillante civilisation à la pointe de la ‘Renaissance médiévale’, ‘reflet de l’ancienne civilisation hellène’, lorsque les rois capétiens (Philippe Auguste et ses successeurs) la soumirent à leur Couronne. Et que même lorsque le processus fut achevé (grosso modo sous Louis XI), ‘pendant plus de trois siècles’, ‘les Français du Sud luttèrent contre leurs oppresseurs’ (l’État parisien)... soit jusqu’à la Révolution bourgeoise de 1789, date à laquelle le père d’Engels était sans doute déjà de ce monde, donc ‘hier’ pour l’auteur. Voilà qui devrait faire ravaler leur caquet à une flopée de ‘marxistes’ prétendant que notre lutte révolutionnaire de libération occitane est ‘petite-bourgeoise’, ‘réactionnaire’, résultant d’un ‘mythe’ inventé au siècle dernier par des ‘pétainistes’, etc. etc.

    Quelques observations s’imposent toutefois :

    - L’affirmation selon laquelle, au moment (1848) où écrit Engels, le ‘Midi’ occitan est devenu ‘le soutien principal du féodalisme’ et ‘la force de la contre-révolution en France’, est factuellement FAUSSE : à cette époque, la ‘forteresse blanche’ (des propriétaires fonciers monarchistes, du cléricalisme réactionnaire) est plutôt l’Ouest de l’Hexagone, le bassin de la Loire en aval d’Orléans, l’espace géographique entre le sud de la Normandie, la Touraine, la Haute-Bretagne gallo et la fameuse Vendée. Aux élections de la 2e République, en 1848-49 (au moment donc où Engels écrit ces lignes), le ‘Midi’ est tout au contraire un bastion ‘démocrate-socialiste’ et ‘républicain avancé’, frappé de plein fouet par la modernité industrielle et la prolétarisation. Sa ‘morphologie sociale’, contrairement à celle de l’Ouest, se prête très bien à une ‘conscience populaire’ républicaine et socialisante ; déjà, dans les années 1790, le ‘Midi’ était peut-être ‘girondin’, hostile au centralisme parisien des ‘Montagnards’, mais pas ‘chouan’. C’est là l’acte de naissance du célèbre ‘Midi rouge’, le ‘Midi’ de Jaurès et de l’insurrection paysanne de 1907, du syndicalisme révolutionnaire donnant naissance à la CGT à Limoges ; tendance politique qui ne s’inversera qu’à partir des années 1960-70 – et tout cela en lenga nostra, évidemment : il était aussi absurde de s’adresser aux masses en français académique à l’époque qu’en anglais aujourd’hui. Dans les années 1890, la magnifique chanson La Libertat, hommage à une grève ouvrière à Marseille, sera encore écrite dans la lenga ; de même que les proclamations insurrectionnelles de 1907. Déjà pendant les Guerres de Religion, au 16e siècle, le ‘Midi’ n’avait-il pas été le ‘bastion’ de la Réforme protestante – Réforme considérée par tous les marxistes comme un phénomène progressiste pour l’époque, même si le Paris de la Ligue (contemporain et farouchement opposé) avait lui aussi des traits révolutionnaires bourgeois préfigurant le Paris ‘montagnard’ ? La ‘république’ aristocratique et patricienne urbaine des ‘Provinces de l’Union’ peut bel et bien être vue comme une ‘résurrection’, à un niveau supérieur, de la ‘république aristocratique’ d’avant la Conquista dont parle Engels. Ce ‘Midi’ huguenot verra ensuite, face à la politique antiprotestante de Louis XIV, se lever l’une des toutes premières ‘guerres populaires avant l’heure’, la Guerre des Camisards ; et ces huguenots deviendront bien évidemment, en 1789, les chefs de file de l’idée monarchique parlementaire ou carrément républicaine. L’histoire de nostre Occitània dément donc dans une très large mesure l’affirmation d’Engels.

    - La Révolution bourgeoise ‘française’ a effectivement ‘achevé’ la destruction de l’Occitanie comme réalité politique, en mettant fin aux ‘provinces réputées étrangères’, aux institutions provinciales autonomes etc.2 Mais affirmer qu’elle a ‘fait des habitants du Sud de la France des Français’, c’est aller un peu vite en besogne. Il s’agit là d’une vision typique du marxisme des débuts, du milieu du 19e siècle : une vision ‘subjectiviste’, ‘volontariste’, ‘superstructurelle’ de ce qu’est une nation ; vision qui était effectivement celle de la bourgeoisie révolutionnaire de l’époque (adhérer à sa révolution bourgeoise, dans un cadre géographique défini, signifiait former une nation). Mais le léninisme (et, dans sa continuité, le maoïsme) nous a ensuite enseigné que les nations sont des réalités infrastructurelles, reposant sur une communauté de vie productive et sociale engendrant un ‘sentiment de commune appartenance’ [et Kaypakkaya d'ajouter, vers 1970, qu'elles voient le jour ‘aux premières lueurs de l'aube du capitalisme’, donc vers l'An 1000 en Europe]. Or, si la Révolution bourgeoise a effectivement ‘anéanti les derniers restes de l’indépendance médiévale’ et fait des Occitans des ‘citoyens français’, au niveau de la réalité sociale, malgré les suppliques de l’abbé Grégoire, cela est encore resté très largement sur le papier : à l’époque où écrit Engels la vie sociale de tous les jours, dans le ‘Midi’, se mène encore massivement dans la langue et dans la culture ‘régionale’. La tentative d’anéantissement de cela n’interviendra qu’encore plus tard, au stade MONOPOLISTE du capitalisme, dans les dernières décennies du 19e siècle et au 20e, tentative en apparence ‘réussie’ (en apparence seulement !) dans la seconde moitié de celui-ci… [le grrrrrand argument des jacobinards de tout poil à ce sujet étant que "le français nous unit" ("sinon comment ferait-on pour se comprendre d'une région ou même d'un patelin à l'autre !!?" blablabla) mais c'est éminemment FAUX, puisqu'en réalité le triomphe du français au 20e siècle aura aussi été celui de l'isolement individuel et de la 'juxtaposition des solitudes' dans les grands centres urbains ou les 'bassins d'emploi' périurbains (plus-ou-moins sinistrés...) de la production capitaliste - la Cité des Spectres...]. Il est donc un peu rapide d’affirmer que la Révolution bourgeoise a (pour faire court) ‘‘retiré aux ‘Français du Sud’ ce qu’il restait de leur indépendance médiévale, leur a donné la démocratie en échange et en a fait des Français tout court’’.

    - ‘Après une lutte de trois cents ans, leur belle langue était ramenée au rang de patois, et ils étaient eux-mêmes devenus des Français’ : en réalité, l’élite sociale (aristocratie, patriciat urbain) maniant la ‘belle langue’ des troubadours aux 12e-13e siècles avait effectivement, 4 ou 5 siècles plus tard, largement adopté le français ‘officiel’ de la Cour de France y compris dans sa vie quotidienne, sauf pour s’adresser à ses ‘gueux’ ; enterrant de ce fait un occitan littéraire qui commençait tout juste à voir le jour. Mais le ‘patois’ dont parle Engels ce n’est rien d’autre que la langue populaire, avec ses petites variantes régionales, qui n’a jamais cessé d’exister et d’évoluer de son côté, tout comme évoluait le ‘français’ de l’élite entre le Moyen-Âge et la Révolution ! Cela rejoint ce qui a été dit précédemment : l’Occitanie a disparu comme réalité politique, et il est logique que son élite ait cherché à s’assimiler’ à l’élite ‘du Nord’, en adoptant sa ‘graaande cultuuure’ et sa langue académique (définitivement fixée au 18e siècle) ; mais elle a persisté, dans les ‘provinces réputées étrangères’ du ‘Midi’, comme réalité sociale et donc dans la langue de communication de tous les jours, la langue (et la culture) POPULAIRE ; ce qu’Engels nomme ‘patois’ – dans l’esprit d’un homme d’extraction aisée de son époque, qu’il était (‘il n’existe aucune pensée qui ne porte une empreinte de classe’).

    - Pour Engels (et c’est là un argument ‘phare’ de nos détracteurs ‘marxistes’), la réalité qu’il décrit semble ‘irréversible’, dans une vision linéaire des processus historiques, et vouloir revenir dessus c’est vouloir ‘faire tourner la roue de l’histoire à l’envers’. Il ne semble pas se placer dans une perspective de négation de la négation, concept qu’il défendra brillamment quelques décennies plus tard contre Dühring et qui est l’une des trois ‘lois fondamentales’ du matérialisme dialectique. C'est-à-dire dans une perspective où ‘pour les besoins du progrès de l’humanité’ la nationalité ‘de France méridionale’ (occitane) aurait été niée par l’État moderne (monarchie absolue) ‘français’ (comme d’autres nations, par le même ou par d’autres États modernes), la Révolution bourgeoise venant ‘achever’ cette négation ; mais où ensuite, toujours ‘pour le progrès de l’humanité’, cette Occitanie niée à travers les siècles (sans jamais cesser de résister, nous dit clairement Engels) renaîtrait à un niveau supérieur, dans le cadre de la révolution prolétarienne mondiale, pour nier à son tour l’État français, appareil politico-militaire du capitalisme donc de l’oppression – bien évidemment, les personnes y compris ‘marxistes’ qui ne veulent pas réellement en finir avec cet appareil d’oppression (donc avec l’oppression elle-même) ne peuvent ni ne veulent comprendre cela. Engels semble ‘condamner’ arbitrairement le ‘Midi’ à ne mener que des combats d’arrière-garde… ce qui est déjà erroné à son époque (voir les résultats ‘démocrates-socialistes’ de 1849, ou la résistance au coup d’État bonapartiste de décembre 1851), mais ignore de surcroît la transformation d’une chose en son contraire, magnifiquement illustrée par l’exemple de la réaffirmation nationale basque (traditionaliste, conservatrice, cléricale au 19e siècle et aujourd’hui progressiste, socialiste voire révolutionnaire marxiste ou libertaire). D’une manière générale, lorsqu’une nation est soumise par une autre forcément – plus avancée d’un point de vue capitaliste (ce qui n’était pas le cas de la ‘France du Nord’ au moment de la Conquista, mais l’est devenu par la suite), que ce soit dans un ‘rapport de voisinage’ ou outre-mer, la résistance initiale tend toujours à se tourner vers le passé, idéalisé. C’est seulement lorsque, en quelque sorte, la conscience de masse s’approprie le développement des forces productives induit par la conquête que la résistance nationale devient une force révolutionnaire et de progrès. Cette vision ‘linéaire’ du matérialisme historique, par Marx et Engels dans leurs premières œuvres, a déjà été pointée par Servir le Peuple dans l’article sur la Question nationale au 21e siècle.

    Dès lors que la réaffirmation de cette civilisation occitane que décrit Engels, écrasée par 5 siècles d’absolutisme puis 2 siècles d’État bourgeois ‘pour les besoins’ du progrès de l’humanité, convergera dans le grand mouvement de la révolution mondiale et deviendra ainsi force matérielle, nous l’avons déjà dit : IL EN SERA FINI de l’État français comme appareil politico-militaire au service de l’exploitation et de l’oppression des masses populaires d’Hexagone et de dizaines de pays y compris ‘indépendants’ à travers le monde ; car cet État français est précisément de la Conquista de notre Occitània, moment où le ‘roi des Francs’ devient ‘roi de France’, et ne peut pas continuer à exister sans elle !


    NB :

    1 - Il n’emploie pas le terme ‘Occitanie’, comme cela a pu être ‘relevé’ sur un forum marxiste par un AGENT CONSCIENT de l’ordre ‘républicain’ bourgeois. Mais ce terme issu de la contraction de la particule ‘Òc’ (‘oui’, qui donne son nom à la langue d'òc) et d’Aquitania ('Aquitaine', nom haut-médiéval d'une grande partie du pays), d’usage courant au 13e siècle (lors de la Conquista) et jusqu’au 15e, était ensuite tombé en désuétude et presque plus du tout utilisé en 1848, lorsqu’écrit Engels : à partir du 16e siècle s’était généralisé le terme de ‘Midi’, difficilement traduisible autrement - en allemand - que par ‘Sud’. Le terme d’Occitanie ne sera ressorti des ‘tiroirs’ que sous la 3e République bourgeoise ‘française’.

    2 - Le ‘morcellement’ féodal en une multitude de duchés, comtés et autres fiefs, auquel aurait mis fin l’État moderne puis la Révolution bourgeoise, est un autre mythe bourgeois franc-maçon et ‘libre-penseur’ dont l’influence infeste le mouvement ouvrier hexagonal depuis l’origine. Au Moyen-Âge, si ‘atomisation féodale’ de l’autorité politique il y a, elle concerne justement… le Bassin parisien, et c’est le premier ‘défi’ que doivent relever les Capétiens au 12e siècle : affirmer leur souveraineté sur la ‘France du Nord’. Vers 1200 (au seuil de la Conquista par Philippe Auguste, qui devient par la même occasion ‘roi de France’, et par les croisés de Montfort), l’Occitanie n’est partagée réellement qu’entre deux États : le duché d’Aquitaine-Gascogne (de la fameuse Aliénor) au Nord et à l’Ouest (Aquitaine, Limousin, Auvergne), relevant de la lointaine Couronne d’Angleterre (Plantagenêt) qui lui laisse en pratique une autonomie totale ; et une sorte de ‘confédération’ de possessions catalanes (Provence, Montpellier etc.) et toulousaines et de ‘républiques’ patriciennes urbaines au Centre et à l’Est (Languedoc, Provence, Drôme-Ardèche), relevant en dernière instance de la Couronne d’Aragon.

    Retour sur F. Engels et l'Occitània


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    chaveznodHugo Chávez Frías, président ‘bolivarien’ et ‘socialiste’ du Venezuela, s’est donc éteint ce mardi 5 mars à Caracas, des suites d’une longue maladie diagnostiquée en 2011.

    Servir le Peuple ne s’étendra pas 'kilométriquement' sur l'évènement, sinon pour dire que comme nous l’annoncions il y a quelques semaines en conclusion d’un article, sa disparition comme ‘clé de voûte’ d’un édifice politique aussi interclassiste et contradictoire que le ‘bolivarisme’ devrait rapidement amener celui-ci à exploser, et de grands bouleversements des rapports de force sont à prévoir.

    Notre position sur le personnage et – surtout, car ce ne sont pas les ‘grands hommes’ qui font l’histoire – la réalité politique latino-américaine qu’il représentait a déjà été largement exposée ici : il vous suffira de taper ‘Chavez’, ‘bolivarien’ ou ‘bolivarisme’ dans le moteur de recherche du blog, d’aller consulter la catégorie ‘Amérique latine’, etc.

    Schématiquement, la position de SLP pourrait se résumer ainsi : le ‘bolivarisme’ de Chávez et consorts était un nationalisme bourgeois social-réformiste, teinté de populisme et de dénonciation de l’hégémonie historique nord-américaine sur le continent, chose assez typique (historiquement, au cours des 60 ou 70 dernières années) en Amérique latine ; et découlant de la conjonction, du ‘frottement’ contradictoire de deux phénomènes :

    1/ depuis les années 1970, la crise générale frappant le monde impérialiste a amené une grande partie de la production à se délocaliser vers les pays d’Amérique latine, ou encore d’Asie-Pacifique, les pays arabes voire certaines régions d’Afrique subsaharienne, entraînant une notable modernisation de la vie sociale et l’émergence de nouvelles couches petites et moyennes-bourgeoises, de classes ‘moyennes’ éduquées ; ce à quoi l’on peut ajouter, dès les années 1970 mais aussi 1990 et 2000, une nette augmentation des cours des hydrocarbures, dont les principaux pays concernés (Venezuela, Bolivie, Équateur) sont de gros producteurs, amenant des fractions de la grande bourgeoisie à désirer une ‘plus grosse part du gâteau’ (en renégociant les contrats, en se tournant vers d’autres clients ‘émergents’ - Chine, Russie, Brésil, Iran - etc.) ;

    2/ face au ‘néolibéralisme’, ainsi qu’est appelée là-bas la domination semi-coloniale (principalement nord-américaine) féroce mise en place après (ou directement pendant) les dictatures fascistes des années 1960-80 (qui ont anéanti les forces révolutionnaires et progressistes), des mouvements de contestation sociale de grande ampleur ont rendu les principaux pays concernés ingouvernables par les ‘méthodes’ et la ‘classe politique’ traditionnelle. Une ingouvernabilité, démontrant une fois de plus que ce sont les masses qui font l’histoire, qui a amené les partis ‘traditionnels’ de l’oligarchie dominante à rétrocéder tactiquement, ouvrant la porte à des ‘créatures politiques’ atypiques : un ancien militaire putschiste à l’idéologie hétéroclite se voulant ‘progressiste’ (‘entre communisme impossible et capitalisme inhumain’) au Venezuela, un syndicaliste paysan ‘musclé’ défendant les cultivateurs de coca en Bolivie ; ou encore, d’anciens partis guérilleros ‘socialistes’ (sandinistes au Nicaragua, FMLN au Salvador) que l’on croyait enterrés aux oubliettes de la ‘Fin de l’Histoire’ (ayant même droit à leur chapitre dans le Livre noir du communisme) en Amérique centrale ; l’économiste ‘catho de gauche’ équatorien Correa étant quant à lui plus proche d'un ‘homme du sérail’, tout comme l'éphémère libéral-réformiste hondurien Zelaya. Une aile de l’oligarchie pensait, sans doute, parvenir avec le temps à les ‘responsabiliser’ (embourgeoiser), scénario qui se s’est finalement réalisé ; une autre qu’ils seraient nuls et perdraient les élections suivantes face aux partis traditionnels ; une autre, enfin, pensait les liquider militairement ou par un mouvement de la ‘société civile’ au moment propice – ce qui a été tenté partout, et a réussi au Honduras.

    Une rupture du front de la ‘Fin de l’Histoire’, voilà finalement la (seule) véritable signification historique qu’il faut retenir de ces phénomènes politiques qui ont dominé la dernière décennie : une démonstration, presque 10 ans avant les évènements des pays arabes (comme cela semble loin !), que les masses se levant selon le principe ‘là où il y a oppression, il y a résistance’ peuvent faire tomber un ordre politique que l’on croyait immuable ; que toute idée de ‘changement pour de bon’ n’est pas irrémédiablement vouée au 'musée des horreurs' du ‘siècle des totalitarismes’… Mais nullement, en aucun cas, le début d’un commencement de révolution au sens marxiste (accession de la classe révolutionnaire, le prolétariat, au pouvoir à la tête des masses populaires).

    Telle est la position qui nous a semblé, à tout le moins, la plus léniniste possible ; léniniste... car il n’y a PAS, au niveau international, de position ‘maoïste’ unifiée sur la question.

    Parmi les Partis, organisations ou simples groupes de personnes qui se réclament du maoïsme, le (nouveau) PC italien vient ainsi de rendre un vibrant hommage au comandante disparu ; le PC des Philippines, qui mène la Guerre populaire dans ce pays, avait un point de vue également assez bienveillant sur le ‘processus’, tout comme les PCR d’Argentine ou d’Uruguay (mais le PCR d’Argentine avait un point de vue positif sur le péronisme, alors…) qui font partie de la même Conférence internationale (ICMLPO ‘International newsletter’) ; mais l’OCML-VP (membre de la même) était beaucoup moins enthousiaste ; le blog cantabre (État espagnol) Odio de Clase relaie quant à lui l’hypothèse d’un empoisonnement du comandante ‘comme Yasser Arafat’ (impossible, peut-être pas, mais dans tous les cas cela ne change pas grand-chose...), etc. etc. En revanche, les maoïstes qui se placent dans la lignée du Parti communiste du Pérou et de Gonzalo étaient et restent FAROUCHEMENT HOSTILES à Chávez et à son ‘processus’ (comme aux ‘processus’ apparentés sur le continent), carrément définis comme… FASCISTES ; ce qui, pour SLP, relève de ce que Dimitrov qualifiait en 1935 (au sujet du New Deal et de certaines positions communistes à son sujet) de pire schématisme :  « N'est-ce pas une manifestation de cette attitude schématique que l'affirmation de certains communistes assurant que l'’ère nouvelle’ de Roosevelt représente une forme encore plus nette, plus aiguë de l'évolution de la bourgeoisie vers le fascisme que, par exemple, le ‘gouvernement national’ d'Angleterre ? Il faut être aveuglé par une dose considérable de schématisme pour ne pas voir que ce sont justement les cercles les plus réactionnaires du Capital financier américain en train d'attaquer Roosevelt, qui représentent, avant tout, la force qui stimule et organise le mouvement fasciste aux Etats-Unis. Ne pas voir le fascisme réel prendre naissance aux Etats-Unis sous les phrases hypocrites de ces cercles en faveur de la ‘défense des droits démocratiques des citoyens américains’, c'est désorienter la classe ouvrière dans la lutte contre son pire ennemi » (exemple d’un pays impérialiste, mais exemple intéressant car il ne faut pas oublier que c’est l’impérialisme US, avec sa ‘tradition’ réactionnaire spécifique, qui pilote principalement la droite radicale anti-bolivariste en Amérique du Sud). Le site ‘Voie Lactée’ du ‘p’’c’’mlm’ a réagi tellement promptement (l’information n’étant parvenue que ce matin en Hexagone) que de toute évidence, l’article ‘enfonçant le mort’ était rédigé de longue date, probablement dès l’annonce de la grave maladie du comandante*.

    Des positions diverses et variées, donc, mais généralement accompagnées des mêmes épithètes les unes à l’encontre des autres, et notamment, bien sûr… ‘trotskyste’ (évidemment !) ; car le mouvement se réclamant de Léon Trotsky et de son Programme de Transition était tout aussi divers dans ses analyses, allant de l’hostilité farouche (ici Lutte ouvrière, ou la tendance ‘CLAIRE’ du NPA) au soutien critique-mais-bon-pas-vraiment (majorité du NPA, la Riposte etc.) : il était donc, quelle que soit la position adoptée, facile de trouver des trotskystes défendant la position inverse…(1) Ou encore l’épithète de ‘révisionniste’, tout aussi ridicule, puisque pour les marxistes-léninistes-maoïstes, sont révisionnistes aussi bien les ‘cubanistes’ et autres ‘brejnéviens’ (comme les FARC-EP, le PC vénézuélien, le KKE, le PTB, en ‘France’ l’URCF, le PRCF ou le RCC), qui étaient farouchement pro-Chávez, que les ‘pensée maozedong’ comme le PCR d’Argentine, qui étaient sur les mêmes positions, mais aussi… les hoxhistes (les marxistes-léninistes ‘albanais’), qui eux, étaient nettement plus hostiles, le PCML d’Équateur étant clairement dans l’opposition au gouvernement Correa, tandis que le petit groupe vénézuélien ‘Bandera Roja’ était allé tellement loin… qu’il s’était fait exclure de l’autre ICMLPO, l’ICMLPO ‘Unité et Lutte’ hoxhiste : il avait soutenu explicitement la tentative de coup d’État (ratée) de la droite ultra vénézuélienne en avril 2002 ! Tout cela semble bien, en fait, relever du plaquage abstrait de vieux schémas (schématisme !) de la première vague de la révolution mondiale, dans toutes leurs limites qui ont conduit à l'épuisement de celle-ci, sur un phénomène de notre époque qui n'a, dans toutes ses spécificités, pas d'antécédent historique...

    La réalité, devant ces positions extrêmement atomisées, que ce soit du mouvement marxiste-léniniste, du mouvement maoïste ou du mouvement trotskyste, c’est que tous ont en fait partiellement raison, tous détiennent une partie de la vérité – mais ne voient, justement, qu’une partie, qu’un aspect du phénomène ‘bolivarien’, et non sa totalité contradictoire, en ‘unité et lutte’. Les forces plutôt ‘avant-gardistes’ (sacralisant le rôle de l’avant-garde, du Parti, ‘centre’ de la ‘vérité’ révolutionnaire et cadres du socialisme de demain) étaient globalement hostiles à Chávez et consorts, ne tolérant pas une autre direction sur les masses que la leur. Les organisations plutôt ‘massistes’, mettant en avant le rôle des masses en mouvement, en lutte pour le progrès démocratique et social, que le Parti doit simplement ‘accompagner’, en avaient au contraire une vision plus positive, sauf peut-être (en Hexagone) VP (maoïste) et certains courants du NPA (trotskyste). Le ‘bolivarisme’ était clairement un ‘rempart’ des classes dominantes face aux mouvements de lutte populaires, empêchant ceux-ci (qui l’ont porté au pouvoir…) d’effectuer un ‘saut’ qualitatif et de devenir révolutionnaires, avec l’émergence d’un Parti. Mais, pour ce faire, il a dû offrir de très réelles et concrètes avancées démocratiques et sociales aux masses du peuple. Dans les pays impérialistes, de telles avancées reposent sur quelque chose que de véritables communistes ne peuvent ignorer : le pillage des pays dominés par l’impérialisme. L’Occidental de 2013 après Jésus-Christ est un Athénien antique, dont la ‘démocratie’ (de façade) et le 'niveau de vie' reposent sur le dos d’une masse dix fois plus nombreuse d’esclaves affamés (phénomène que pouvait déjà entrevoir Lénine dans L'Impérialisme en 1916)… Mais dans des pays dominés, comme le Venezuela ou la Bolivie, des avancées de ce type reposent au contraire sur une réappropriation partielle du produit national, soit, en définitive, sur une réaffirmation du caractère national de la production face à l’appropriation impérialiste de la richesse produite. Cela, le léninisme nous enseigne que c’est toujours (objectivement) positif. Le ‘bolivarisme’ était un phénomène politique à dominante bourgeoise, ne pouvant pas ne pas avoir de contradictions, y compris violentes, avec les masses laborieuses et leur volonté d’émancipation ; et ne représentait en rien une ‘première étape’ d’un processus ininterrompu vers le socialisme et le communisme. Mais un phénomène bourgeois qui nécessitait de chevaucher, qui nécessitait comme appui et comme ‘carburant’ les luttes sociales ; et pouvait, par conséquent, créer par là des conditions favorables au développement d’une conscience révolutionnaire dans les classes opprimées, et d’un mouvement communiste, à condition bien sûr qu’un PARTI révolutionnaire conséquent se saisisse de ces tâches (le régime ‘socialiste’ bourgeois crée simplement les conditions, il ne s’en charge pas). Dans les différentes positions marxistes ayant émergé depuis 15 ans sur le phénomène, jamais la totalité de ces aspects n’a – hélas – été entièrement saisie. Soit Chávez pavait la voie au socialisme et au communisme, soit il représentait la contre-révolution la plus noire… il n'y avait pas d'autre 'subtilité' possible. Et entre le ‘maoïsme’ (ou le trotskysme) virant Libé, grand pourfendeur du ‘populisme fascisant’, et le ‘marxisme-léninisme’ (ou d'autres trotskystes) virant Monde Diplo ou Michel Collon (admirateur béat des régimes et des forces de réaffirmation nationale type bolivarisme, Hezbollah, Frères musulmans ou mollahs iraniens), le prolétariat révolutionnaire avait-il une chance de retrouver ses 'petits', c'est-à-dire sa conception du monde ?

    Quoi qu’il en soit, la position de Servir le Peuple a toujours été claire : quelles que soient ses spécificités, le ‘chavisme’/’bolivarisme’ est un phénomène politique à apparenter au réformisme bourgeois (position partagée, d’ailleurs, par les MLM de Bolivie quant au MAS d’Evo Morales dans ce pays), version social-populiste ; tentant en tant que tel de nier la contradiction fondamentale Capital/Travail (derrière une contradiction ‘Amérique latine surexploitée/impérialisme yankee’), tout réformisme bourgeois cherchant de toute manière à placer un supposé ‘intérêt général’ au-dessus de la lutte des classes ; mais en rien apparentable au fascisme, qui est une forme de gouvernement réactionnaire terroriste, visant l’annihilation de toute force révolutionnaire (même aux théories erronées), mais aussi simplement… réformiste, ‘progressiste’ : régime de Pinochet, junte argentine de 1976-83, régime militaire du Guatemala au début des années 1980, régime de Fujimori au Pérou (1990-2000) ou d’Uribe en Colombie (2002-2010) en sont les exemples type en Amérique latine. Le 'bolivarisme' était un phénomène politique bourgeois, à ne défendre en aucun cas dans ses éventuelles contradictions avec les masses populaires en lutte ou les forces subjectives de la révolution mondiale (ce que SLP n'a jamais fait), mais à défendre tactiquement, oui, comme une certaine République espagnole en 1936 ou une certaine Unité populaire chilienne en 1973, face à une éventuelle contre-offensive de la réaction la plus noire (à la Pinochet), de l'aile réactionnaire la plus terroriste de la classe dominante et des monopoles impérialistes (principalement US).

    Il était un assemblage hétéroclite d’intérêts de classe très variés, ne pouvant pas coïncider au-delà du très court terme – de fait, les contradictions éclataient déjà au grand jour depuis plusieurs années (2) ; et il volera inévitablement en éclat avec la disparition de sa ‘clé de voûte’ (vitale non seulement au Venezuela, mais dans toute l’Amérique latine, les autres dirigeants ne lui arrivant pas à la cheville). Il appartient désormais, de fait, à l’histoire.

    Une nouvelle page de l’histoire populaire révolutionnaire d’Amérique latine s’ouvre. Espérons vivement qu’une analyse marxiste de notre époque, maoïste, correcte du phénomène ‘bolivarien’ saura rapidement voir le jour, afin que les classes exploitées puissent écrire victorieusement leur histoire dans les prochaines décennies.


    (1)
    De fait, si les positions "gauchistes réactionnaires" que nous dénonçons dans cet article sont classiquement qualifiées de "trotskystes" par les marxistes-léninistes et les maoïstes, Trotsky lui-même a pu tenir parfois des propos extrêmement proches... de notre position, et notamment au sujet d'un régime beaucoup plus clairement fasciste (l'Italie de Mussolini était sa référence explicite) que ceux de l'ALBA aujourd'hui : « Il règne aujourd’hui au Brésil un régime semi-fasciste qu’aucun révolutionnaire ne peut considérer sans haine. Supposons cependant que, demain, l’Angleterre entre dans un conflit militaire avec le Brésil. Je vous le demande : de quel côté serait la classe ouvrière ? Je répondrai pour ma part que, dans ce cas, je serais du côté du Brésil "fasciste" contre l’Angleterre "démocratique". Pourquoi ? Parce que, dans le conflit qui les opposerait, ce n’est pas de démocratie ou de fascisme qu’il s’agirait. Si l’Angleterre gagnait, elle installerait à Rio de Janeiro un autre fasciste, et enchaînerait doublement le Brésil. Si au contraire le Brésil l’emportait, cela pourrait donner un élan considérable à la conscience démocratique et nationale de ce pays et conduire au renversement de la dictature de Vargas. La défaite de l’Angleterre porterait en même temps un coup à l’impérialisme britannique et donnerait un élan au mouvement révolutionnaire du prolétariat anglais. Réellement, il faut n’avoir rien dans la tête pour réduire les antagonismes mondiaux et les conflits militaires à la lutte entre fascisme et démocratie. Il faut apprendre à distinguer sous tous leurs masques les exploiteurs, les esclavagistes et les voleurs ! » (La lutte anti-impérialiste, entretien avec le syndicaliste argentin Fossa, 1938) [ceci sans toutefois perdre de vue, comme on peut le voir, son idée de primauté des grands centres capitalistes-impérialistes dans le "déploiement" de la vague révolutionnaire mondiale (il est bien clair que ce sont les possibilités révolutionnaires en Angleterre qui l'intéressent en premier lieu dans son exemple) ; conception qui fait partie de ce que nous récusons fermement dans le trotskysme].

    (2) Notamment avec les extraditions, depuis début 2009, de militant-e-s basques et colombien-ne-s vers leurs États réactionnaires répressifs d’origine. Un ‘tournant’, au cours de ces 14 années de présidence, semble bien avoir été l’opération Phénix de l’armée colombienne (en territoire équatorien), le 1er mars 2008, se soldant par la mort du dirigeant FARC Raúl Reyes et la saisie de l’ordinateur de ce dernier, révélant des liens entre la guérilla colombienne et le Venezuela de Chávez (ainsi que l’Équateur de Correa). Évidemment, les ‘fana-chavistes’ de tout poil déployèrent alors toute leur ‘armada’ de dénégations, pour affirmer que ces documents étaient des faux, une provocation du régime fascisant d’Uribe etc., mais leur authenticité semble en réalité bel et bien avérée. Face à ce que, dans une ‘guerre par procuration’, il faut bien appeler une défaite militaire, Chávez semble alors avoir fait brutalement machine arrière et adopté ‘profil bas’, se repliant sur un anti-impérialisme ‘qui ne mange pas de pain’ (dénonciations tonitruantes de la superpuissance US, ou des crimes sionistes au Machrek arabe), et commençant à extrader les militant-e-s réfugié-e-s sur son territoire pour éviter l’étiquette infâmante d’’État terroriste’, jusqu’à l’arrestation et l’extradition d’un journaliste ‘radical’ colombien qui, pour être pro-FARC, n’en était pas moins retiré de toute activité ‘terroriste’ depuis les années 1980 : le ‘bolivarisme’ révélait ici on-ne-peut-plus clairement ses limites de classe, de nationalisme réformiste bourgeois.


    chavez chronique 3Venezuela-Caracas-Bidonville-1-5


    * Le ‘p’’c’mlm’-‘Voie lactée’ en remet une et même deux couches (attaquant une nouvelle fois le PCm d’Italie) : décidément, ils savent se faire ‘cosmopolites’ (aborder des thèmes non-hexagonaux) lorsque cela les arrange, ou plutôt, lorsqu’ils ont leurs ‘petites obsessions’ – Chávez en l’occurrence, ou le PCmI qui a sûrement dû, à une époque indéterminée, les renvoyer aux petits intellectuels prétentieux qu’ils sont, ou encore les z’horribles z’islamiiiiistes en mettant en avant les textes de leur groupuscule-frère du Bangladesh (pays où l’islam est idéologie d’État, et non la cible première de la mobilisation réactionnaire de masse comme ici ; difficile pour le coup de faire plus ‘cosmopolite’). Ils nous présentent donc, Mao et Gonzalo à l’appui, la ‘position maoïste classique’ concernant le capitalisme bureaucratique dans les pays dominés par l’impérialisme (semi-coloniaux semi-féodaux) : impeccable, jusque-là rien à redire… Sauf que TOUT repose sur un seul et unique postulat : il est AFFIRMÉ et jamais, en aucun cas, DÉMONTRÉ que Chávez représente ledit capitalisme bureaucratique, ni à fortiori qu’il en représente la TOTALITÉ – et non, précisément, une fraction… réformiste. Car que nous dit le ‘p’’c’’mlm’ sur le capitalisme bureaucratique dans les pays dominés ? Si l’on suit leur ‘brillant’ exposé (un vieux document du groupuscule), « Ce capitalisme bureaucratique est le capitalisme que l'impérialisme développe dans les pays arriérés et qui comprend les capitaux des grands propriétaires terriens, des grands banquiers et des magnats de la grande bourgeoisie ; Il passe par un processus qui fait que le capitalisme bureaucratique se combine avec le pouvoir de l’État et devient capitalisme monopoliste étatique, compradore et féodal ; il en découle qu'en un premier moment il se développe comme grand capital monopoliste non étatique, et en un deuxième moment - quand il se combine avec le pouvoir de l’État - il se développe comme capitalisme étatique »… Or cela, au Venezuela… cela s’appelle typiquement (notamment) PDVSA, le gigantesque monopole ‘national’ (soi-disant ‘public’) du secteur hydrocarbure hypertrophié caractéristique de ce pays. À la fin des années 1990, lors de l’élection de Chávez, celui-ci était effectivement aux mains d’une oligarchie bureaucratique, qui vivait dans une opulence indescriptible tout en bradant la principale richesse du pays aux monopoles pétroliers US et européens. Et c’est précisément cette oligarchie qui, dans la première moitié des années 2000 et même au-delà (jusqu’en 2007 voire 2008), a été à la POINTE de la mobilisation réactionnaire anti-Chávez, avec notamment le coup d’État raté d’avril 2002, puis la ‘grève générale’ de décembre 2002-janvier 2003, appuyée sur les syndicats jaunes de cadres et d’aristocrates-salariés. Depuis, Chávez a prétendu ‘renationaliser’ la compagnie, renégocier les contrats avec les monopoles euro-US acheteurs et ‘diversifier’ sa clientèle (avec les fameux ‘BRICS’ et autres ‘émergents’) ; et il a éliminé cette oligarchie en la remplaçant par des partisans à lui… qui ont formé ce que l’on appelle là-bas la ‘boli-bourgeoisie’, la nouvelle bourgeoisie ‘en chemise rouge’, qui est tout le problème, qui démontre sans ambigüité le caractère non-révolutionnaire du chavisme et est dénoncée par tous les révolutionnaires – y compris certains ‘fascinés’ par le ‘processus’ au début. Mais l’oligarchie bureaucratique PDVSA de 1999 a combattu Chávez, et Chávez l’a combattue. Toute la démonstration et les attaques sournoises du ‘p’’c’’mlm’ et des ses amis internationaux reposent, donc, sur une première contre-vérité absolue.

    Les positions d’organisations se réclamant du maoïsme (PC des Philippines, (n)PCI), que ‘Voie lactée’ met en avant, ont été critiquées par SLP comme positions ‘borgnes’ – ne voyant que les aspects positifs du phénomène politique Chávez, et non les très nombreux aspects négatifs. La position du PCm d’Italie, elle, conclut justement (bien que de manière sectaire envers le (n)PCI, le ‘chauvinisme d’organisation’ – plaie du mouvement communiste – ayant encore de beaux restes), mais est beaucoup trop élogieuse au début, donnant au final l’impression de dire ‘tout et son contraire’.

    Mais que penser de la position du PC d’Équateur ‘Comité de Reconstruction’ (un ‘ami’ international de ‘Voie lactée’, bien que des tensions aient éclaté ces derniers temps) ? Pour SLP, cela tient en deux phrases :

    - pire schématisme (cf. Dimitrov) en qualifiant Chávez et le PSUV de ‘fascistes’ ; refusant de voir que c’était précisément les secteurs attaquant son ‘populisme’ et son ‘castro-socialisme’ au nom des ‘libertés’ qui représentaient la réaction la plus noire, terroriste, ‘pinochétiste’ au Venezuela ; et désarmant ainsi les classes populaires vénézuéliennes contre leur pire ennemi et se coupant d’elle (en qualifiant de ‘fasciste’ un homme perçu par elles comme un ‘révolutionnaire’ et un ‘patriote’, ‘phénomène social de masse’ que des communistes authentiques ne peuvent ignorer) ;

    - y-a-qu’à-faut-qu’on dès lors que l’on aborde la question de ‘Que faire ?’ : les tâches exposées sont des tâches pour après la prise de pouvoir par le prolétariat et son alliance révolutionnaire de classes ; mais en dehors de ‘la Guerre populaire’, on ne voit pas l’embryon d’une stratégie pour PRENDRE le pouvoir… Cela alors que cette organisation maoïste évolue dans un pays proche et très semblable au Venezuela : ‘morphologie sociale’ et histoire comparables, secteur hydrocarbure hypertrophié, gouvernement ‘populiste de gauche’ allié à Chávez (Rafael Correa) etc.

    Les anarchistes et les marxistes ‘conseillistes’ (gauchistes), ou encore certains trotskystes, se caractérisent historiquement par leur refus de reconnaître différents types de gouvernement bourgeois, et donc différentes stratégies adaptées à chacun. Mais là, c’est encore pire : il y a carrément, et délibérément, caractérisation erronée d’un gouvernement réformiste ‘populiste’ (c’est-à-dire mobilisant les masses dans son projet réformiste, pour les empêcher de devenir révolutionnaires et sauver ainsi une partie des possédants en en sacrifiant une autre, la plus ‘pourrie’) en gouvernement ‘fasciste’, dont le mouvement communiste international a fixé la définition une fois pour toutes en 1935 : « dictature terroriste ouverte des éléments les plus réactionnaires, les plus chauvins, les plus impérialistes du Capital financier » - et, cela va de soi, de leurs représentants dans les pays semi-coloniaux non-impérialistes. En l’occurrence, les représentants des éléments les plus réactionnaires et impérialistes du Capital financier nord-américain et européen étaient les putschistes ratés d’avril 2002, les agitateurs cambas racistes de la Media Luna bolivienne (2007-2010), ou encore les putschistes couronnés de succès du Honduras en juin 2009. Le régime fasciste typique actuellement en Amérique latine, c’est celui mis en place en Colombie par Uribe et son ‘Parti de la U’, et poursuivi en version plus ‘libérale’ par son successeur Santos.

    Décidément, le ‘p’’c’’mlm’ et ses amis internationaux partagent beaucoup, beaucoup de ‘têtes de turcs’ (‘bolivariens’, ‘islamistes’ etc.) avec la pensée mainstream des monopoles impérialistes, et cela en devient préoccupant…

    Voir aussi la position du PC d’Équateur ‘Sol Rojo’, particulièrement alambiquée : réformisme bourgeois (comme le posaient en 2008 les maoïstes boliviens au sujet d’Evo Morales) ou fascisme ? On n’y comprend plus grand-chose… Ce n’est pourtant pas du tout la même chose, et pas du tout la même stratégie d’action pour les communistes : il faudrait choisir camarades ! Il y a également la position de l’’Organisation des Ouvriers d’Afghanistan MLM’, totalement calquée sur celle du ‘p’’c’’mlm’ : cette organisation paraît totalement ‘générée’ (comme les mystérieux ‘Arab maoists’) par le courant ultra-gauchiste dogmato-sectaire du maoïsme international, certainement à partir d’Afghans de l’exil, peut-être d’anciens éléments du courant ‘communiste-ouvrier’ historiquement fort dans ce pays, dont les positions sont proches… L’amitié de Chávez avec des régimes particulièrement réactionnaires du Proche et Moyen-Orient (Iran, mais aussi Syrie, Libye etc.) est en revanche dénoncée à juste titre – amitié parfaitement conforme aux intérêts de classe de la ‘boli-bourgeoisie’ qui s’est constituée depuis 1999, en ‘occupant les niches’ de la bourgeoisie bureaucratique puntofijiste balayée par Chávez.

    Bien que SLP ne partage pas les louanges du (n)PCI envers la ‘révolution bolivarienne’, il est intéressant de lire l’article suivant, reprenant… la position maoïste classique justement, sur l’attitude qui doit être celle des communistes vis-à-vis de formes de gouvernement réformistes de ce type, et des ‘forces sociales intermédiaires’ qui sont leur base sociale : Les communistes et la ‘gauche’ bourgeoise.

    Un fait historique incontournable est qu’un régime fasciste, même lorsqu’il dénie cette appellation (à peu près tous la dénient depuis 1945), est identifié comme tel par un bon 25% ou 30% des masses populaires, ce que l’on peut appeler le ‘peuple de gauche incompressible’ : tel était le cas en Italie mussolinienne (où socialistes, démocrates sociaux et communistes avaient récolté 34% des suffrages en 1921, et encore presque 15% aux élections frauduleuses de 1924), en Allemagne (SPD+KPD = 30,6% aux élections de mars 1933, donc déjà sous la botte hitlérienne), dans l’État espagnol (les gauches avaient réuni près de 50% en février 1936), au Portugal salazariste, au Chili sous Pinochet, etc. etc. De même, aux États-Unis sous la présidence Bush-Cheney, en Hexagone sous la présidence de Sarkozy et déjà lorsqu’il était ministre de l’Intérieur, et même en Israël-Palestine sous les gouvernements du Likoud et de ses alliés d’extrême-droite, une part significative de la population s’accordait et s'accorde encore à reconnaître au gouvernement des ‘traits fascisants’, une ‘(mauvaise) pente de sinistre mémoire’, etc. Au Venezuela, il n’y avait pas 1% de la population (dont peut-être quelques centaines de ‘maoïstes’ sur la ligne internationale du ‘p’’c’’mlm’) pour qualifier Chávez de ‘fasciste’ : pour ses plus fervents supporters comme pour ses adversaires les plus acharnés, il était un ‘socialiste’ (un réformiste bourgeois ‘radical’), et ceci était précisément l’objet de la ferveur comme de la haine. Et ici ? Et bien, lorsque l’on entre ‘Chavez fasciste’ sur Google, l’on trouve, pour associer cet épithète au dirigeant ‘bolivarien’, les documents de ‘Voie Lactée’ (ou de leurs amis internationaux traduits par eux), et… des sites très-à-droite de type ‘néoconservateurs’ (‘droite radicale’ particulièrement pro-US, pro-Israël etc.), tels que ‘La Pensée néoconservatrice’ ou Dreuz.info (et encore, ces sites parlent-ils de ‘fascisme’… ‘rouge’ !). À méditer...

    Une autre caractéristique du fascisme au sens strict (Hitler, Mussolini, Franco, Pinochet etc., à distinguer du ‘pourrissement réactionnaire généralisé’ de la politique bourgeoise - 'fascisme moderne' - que nous connaissons actuellement en Occident), du choix du fascisme (et non du réformisme) par la classe dominante face à l’ingouvernabilité galopante, c’est le développement d’une intense activité squadriste  (paramilitaire anticommuniste, anti-progressiste) avant même la prise de pouvoir (laquelle est rarement le fruit d’un net résultat des urnes, mais plutôt d’un coup de force, fut-il ‘institutionnel’) : Chemises noires en Italie, SA en Allemagne, Phalange en ‘Espagne’, ‘ligues’ et ‘Cagoule’ en ‘France’, Rex en Belgique, 'Garde de Fer' en Roumanie, Patria y Libertad au Chili, Triple A en Argentine, AUC en Colombie, etc. Rien de tout cela au Venezuela de la fin des années 1990, pas plus qu’en Équateur ou en Bolivie dans la première moitié des années 2000…

    Ah ! Et puis un dernier fait intéressant, un de ces petits ‘buzz’ politiques révélateurs, ce sont les propos de l’ex-président régional de Gwadloup et oncle Tom des dernières colonies ministre de l’Outre-mer, Victorin Lurel, représentant la France aux obsèques du défunt, qui a comparé Chávez à De Gaulle (certes) et Léon Blum (le genre de point de vue très répandu dans la ‘gauche’ bourgeoise et le ‘peuple de gauche’ des Antilles) : ces propos ont été non seulement critiqués par les courants les plus ‘euro-atlantistes’ du PS (Cambadélis etc.), mais aussi vivement dénoncés comme ‘hallucinants’, ‘choquants’, ‘fadaises’ par Jean-François Copé lui-même et la droite copéiste, dont le sinistre Lionnel Luca, chef de file de la Garde de Fer de Sarkozy ‘Droite populaire’ (voir aussi la réaction de Luca ici), bref, la droite dans laquelle le ‘p’’c’’mlm’ voit jour après jour ‘renaître le RPR’ et fleurir le ‘néogaullisme’. Chez les fascistes, Marine Le Pen juge la polémique ‘stérile’ et estime que Chávez "a fait des choses positives, notamment faire profiter son peuple de la manne du pétrole, d'autres dirigeants en Afrique qui avaient des ressources très importantes n'ont pas fait cela" (elle ménage là le fort courant ‘NR’ de son parti, en faisant preuve au passage d’une hypocrisie totale sur les peuples africains pillés par la Françafrique), mais qu'il "avait un exercice un peu personnel du pouvoir et une manière d'envisager la liberté des médias qui n'était pas évidemment la nôtre" (la ‘liberté d’expression’ contre la ‘pensée unique’ - 'de gauche' évidemment - est devenue une rengaine récurrente de l’extrême-droite fasciste depuis une trentaine d’années, à rapprocher de l'UMPiste ex-FN Guillaume Peltier exigeant un 'quota de journalistes de droite', etc.) : bref, elle reste assez ‘neutre’ et ‘garde ses distances’. Son grand rival dans le parti d'extrême-droite, Bruno Gollnisch, en dresse un portrait plus élogieux – et largement fantasmé ; mais s’en sert surtout pour ‘aligner’ Mélenchon, avant de digresser sur les ‘chrétiens de Syrie’, sa grande marotte du moment. Le 'bras droit' de MLP, Florian Philippot (énarque venu du chevènementisme), a certes affirmé (sur Twitter) que Chávez "c'était d'abord une volonté, un courage"... mais il n'est lui-même plus vraiment en odeur de sainteté au sein du FN, qu'il est accusé de 'gauchiser', et encore moins à la droite de celui-ci (le spectre des 'années Soral' flotte encore sur la vieille garde frontiste). Novopress (Bloc identitaire) est en revanche extrêmement critique (critiques rejoignant, d’ailleurs, en partie celles des anti-chavistes d’extrême-gauche…) ; tandis que le site ‘occidentaliste’ et islamophobe Euro-reconquista n’a pas réagi au décès (ni aux propos du Lurel), mais a déjà eu l’occasion de critiquer très violemment le comandante ‘bolivarien’ (la ligne de ce site reflète, très largement, la pensée de l’immense majorité du ‘peuple d’extrême-droite’ hexagonal). Bernard Antony (Chrétienté-Solidarité, extrême-droite nationale-catholique) ironise sur la 'pratique marxiste des momifications' (Chávez devrait être embaumé...), ce qui ne laisse pas supposer (si Chávez est un 'révolutionnaire marxiste' selon lui) une grande sympathie. Ni l'Union de la Droite Nationale, ni ses composantes (NDP, MNR et Parti de la France, dissidences du FN nettement plus maurassiennes et 'occidentalistes') n'ont réagi à la nouvelle. Synthèse Nationale (proche de l'UDN) présente deux analyses, l'une 'NR' (évidemment) fana-chaviste, l'autre d'un membre de la NDP, beaucoup plus critique. Comme chacun-e peut le constater, Chávez était donc loin de faire l’unanimité dans la mouvance fasciste, la ‘droite radicale’ et autres ‘néogaullistes’ de tout poil (la quasi-totalité de la 'droite radicale' et de l’extrême-droite se réfère aujourd'hui plus ou moins à De Gaulle, même si certains lui reprochent encore la ‘trahison algérienne’)... contrairement à ce que prétendent le ‘p’c’mlm’ et ses satellites gauchistes internationaux. Voilà une autre contre-vérité factuelle absolue...

    Et voilà... ça ne devait pas être 'kilométrique'... et ça a fini encore une fois par l'être !

     


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  • communisme.jpgUn nouvel article du site 'Voie Lactée' présente, encore une fois (c'est bien là le mérite essentiel, pour ne pas dire le seul, de ce groupe), une 'matière à débat' extrêmement intéressante pour la construction de la conception communiste du monde à laquelle nous voulons contribuer. La question posée est, synthétiquement : le rôle des communistes, avant-garde la plus consciente et organisée du prolétariat révolutionnaire, est-elle d'impulser, d'animer, de diriger le 'mouvement historique réel' de l'humanité vers le communisme - mouvement qui sans cette direction risque fort de rester emprisonné dans les 'vieux murs' de l'ordre existant, de se limiter au réformisme, voire de tomber dans la réaction ; ou (position de 'Voie Lactée') simplement d'y 'correspondre', de l''accompagner' en s'efforçant d'être toujours du côté du 'nouveau' (ce qui vu leur position sur les questions 'nationales', les 'libérations populaires révolutionnaires' d'Hexagone, n'est pas gagné d'avance...), sachant que pour eux (ce qui n'est pas tout à fait faux, au demeurant) le mouvement de l'humanité vers le communisme s'inscrit dans le mouvement général de la matière universelle vers ce même horizon. Disons-le clairement : TOUT N'EST PAS FAUX, tout n'est pas à rejeter dans les conceptions développées. Mais, néanmoins, sont exprimés des points de vues qu'une conception marxiste du monde, au regard de plus de 160 ans de mouvement socialiste/communiste, ne peut que rejeter catégoriquement - ils admettent eux-mêmes l'hétérodoxie de leur position, essayant de prendre appui sur Gonzalo du PC du Pérou, mais vont (ce qui n'est pas dans leurs habitudes) jusqu'à critiquer Staline.

    L'affirmation - selon nous erronée - est donc que, finalement, le mouvement réel de l'histoire humaine vers le communisme, lui même petite partie du 'mouvement universel de la matière', n'a 'pas besoin' des révolutionnaires, de l'avant-garde de la classe révolutionnaire 'jusqu'au bout' (aujourd'hui les communistes, avant-garde du prolétariat), pour exister et se développer jusqu'à une nouvelle étape, un nouveau mode de production et une nouvelle société du processus historique : il 'suit son cours' naturellement, le rôle des révolutionnaires est de l''accompagner' en se plaçant toujours 'du bon côté de la barricade'. Ils n'ont pas de rôle d'animation (mise en mouvement), d'impulsion, de dynamisation et de direction dans le processus qui conduit, d'étape en étape, vers le mode de production et le niveau de civilisation supérieur : en ce qui nous concerne, d'étape en étape vers la conquête du pouvoir par le prolétariat à la tête des masses populaires puis, d'étape en étape 'socialiste', de cette prise de pouvoir vers le communisme. Cela, selon eux, parce que 'l'être humain ne pense pas', sa pensée n'est que le 'reflet' d'une étape donnée du processus historique qui 'suit son cours' par lui-même (expression dans la société humaine du mouvement général de l'Univers).

    Cela est selon nous gravement erroné ; c'est une 'pente savonneuse' pouvant conduire aux pires dérives, la moins grave desquelles (peut-être) étant l'attentisme le plus complet ; et nous allons en expliquer les raisons.

    La pensée, certes, procède de la réalité matérielle ; elle est un REFLET de la réalité matérielle et de ses contradictions, et notamment de la contradiction MOTRICE de l'époque considérée : nous avons ainsi la pensée progressiste, porteuse et au service du nouveau ; la pensée révolutionnaire (organisée pour agir au service du nouveau dans un 'changement radical', sans attendre les alternances électorales) ; et puis la pensée COMMUNISTE marxiste (organisée pour agir sur la base d'une compréhension scientifique, matérialiste du monde qui nous entoure), avec sa 'pointe avancée' maoïste ; qui toutes sont en dernière analyse le reflet, plongent leur plus profonde racine dans le caractère de plus en plus social et universel de la production. Et puis de l'autre nous avons la pensée conservatrice ou carrément réactionnaire, défendant l'ancien ; ou la pensée individualiste, 'amorphe' ou 'je-m'en-foutiste', 'pense-qu'à-ma-gueule', dans tous les cas totalement inféodée à l'ordre établi et à l'idéologie dominante ou vautrée dans la 'sous-culture' à destination des masses produite par celle-ci : tout ceci est en dernière analyse le reflet, l'expression de la propriété privée des moyens de production et de l'appropriation privée (inégalitaire) du produit.

    Mais ensuite ? Pour transformer (en bien ou en mal, en victoire du nouveau ou en victoire - temporaire - de l'ancien) la réalité sociale (société humaine) dans laquelle nous vivons, toutes ces pensées doivent s'organiser pour agir et devenir FORCE MATÉRIELLE : "La théorie se change [...] en force matérielle dès qu'elle saisit les masses" (K. Marx ; Critique de la philosophie du droit de Hegel, 1843), sous-entendu les masses conscientes et organisées, décidées à agir. Dans la 'matière non-humaine', les cellules, les molécules, les atomes, bref toutes les composantes diverses et variées (aux 'pôles' de la contradiction motrice) de ladite matière 'utilisent' différents instruments physiques et chimiques pour la transformer. Dans la 'matière (sociale) humaine', l'instrument de la transformation dialectique est la pensée organisée dans l'action... Tout simplement.

    envencible guerra populara 3 montanas'Voie Lactée' nous expose '4 conceptions différentes du maoïsme', la dernière (celle de Gonzalo du Pérou) se subdivisant elle-même en deux interprétations possibles. Mais à chaque fois, nous disent-ils, les personnes décrites (militant-e-s politiques, y compris eux-mêmes) ont 'choisi' ou 'voulu' ceci, 'décidé' ou 'cru pouvoir' cela ('gérer la réalité' ou simplement l''accompagner', 'reconstruire le vieux MRI' ou 'correspondre à la réalité' en soutenant la Guerre populaire en Inde, 'saluant' celle du Pérou, rejetant la trahison au Népal et appelant à une nouvelle conférence MLM, etc. etc.). C'est donc, dans leur raisonnement et dans leurs mots mêmes, qu'il y a bien à un moment donné une 'décision', un 'choix', une 'volonté' de dire et faire ceci ou cela... non ? Les maoïstes du Pérou, d'Inde, des Philippines ou du Népal ont bien, à un moment donné, après analyse concrète de la situation concrète, décidé de lancer la Guerre populaire sous sa forme armée de masse...

    Si l'on voulait toujours 'accompagner la réalité', que de choses ne ferait-on pas ! À vrai dire on ne ferait carrément rien du tout... puisque la 'réalité' que l'on 'accompagne', dans le cas de la société humaine qui nous intéresse, c'est et ce serait toujours l'action des autres. Que le marxisme nous ait toujours enseigné qu'il faut savoir agir 'ni trop tôt, ni trop tard', c'est une chose ; dire qu'il faut tranquillement regarder passer le fleuve du mouvement réel de l'histoire depuis la rive... c'en est une autre !

    À la question "et pourquoi donc, dans la vie politique en général mais même parmi des gens se réclamant en principe de la même chose (le maoïsme), y a-t-il autant de positions différentes et s'opposant ?" ; la réponse est tout simplement que, dans la contradiction motrice de la société humaine, les 'pôles' ne se posent pas 'basiquement', 'monolithiquement' comme 'ancien' et 'nouveau', 'bourgeoisie' et 'prolétariat', 'capitalisme' et 'socialisme-communisme'. La société, surtout une société capitaliste relativement avancée, est beaucoup plus complexe que cela ; les conceptions du monde émises par chaque 'pôle' (caractère social/universel de la production et propriété privée des moyens/appropriation privée inégalitaire du produit) s'entrechoquent et s'interpénètrent, il y a des milliers de petites positions différentes dans l'organisation sociale... Or la pensée n'est pas 'le reflet de la réalité' de manière absolue : elle est le reflet de la réalité telle que perçue depuis une certaine position donnée dans l'organisation sociale. Il y a même, à vrai dire, dans la pensée de chaque individu-e une part de 'nouveau' et une part d''ancien', dans des proportions variables et (bien sûr) luttant entre elles, au sein même de chaque petit cerveau... Si par exemple les avakianistes, qui se prétendent (évidemment) 'maoïstes', mettent en réalité en avant un 'démocratisme radical' petit-bourgeois intellectuel, c'est parce qu'ils/elles sont (les 'têtes pensantes' en tout cas)... des petits-bourgeois intellectuels au sein de l'organisation sociale 'États-Unis d'Amérique' ; en particulier des personnes incrustées dans l'appareil scolaire-universitaire du système ... tout simplement !

    zita 391C'est bien en ayant saisi cette complexité que les marxistes ont toujours expliqué qu'il y a, au milieu des masses populaires (l'ensemble de la population, sauf la classe qui dirige la production et gouverne/exploite la société), une 'classe révolutionnaire jusqu'au bout', le prolétariat qui est la classe totalement plongée dans le caractère social de la production ; mais que, au sein même de cette classe, tout le monde n'a pas le même niveau de conscience, de compréhension du problème-capitalisme et de sa solution révolutionnaire ; tout le monde n'a pas la même VOLONTÉ (eh oui !) de s'organiser et combattre, encore moins de consacrer voire sacrifier sa vie à ce combat ; et donc, cela donne lieu à une AVANT-GARDE RÉVOLUTIONNAIRE que l'on nomme 'Parti' (les éléments les plus conscients, décidés et organisés pour agir de la classe révolutionnaire jusqu'au bout, qui peuvent éventuellement, lorsqu'ils ont longtemps été maintenus dans l'ignorance, 'recruter' des éléments d'autres classes subalternes plus 'instruits').

    Cette volonté résulte de mille et un facteurs ne relevant pas seulement, d'ailleurs, de la 'place dans les rapports de production' (sans quoi tout-e ouvrier/ouvrière ou 'subalterne' au salaire minimum serait communiste...) ni de la 'place dans l'organisation sociale/rapports sociaux' (qui ne se limitent pas aux rapports de production) mais aussi - par bien des aspects - du parcours individuel, du vécu personnel de chaque personne... tout cela constituant le point du vue depuis lequel la personne perçoit la réalité, que sa pensée va refléter. Il en va de même pour les personnes des classes 'intermédiaires' que l'avant-garde prolétarienne va 'recruter' pour l'aider dans son combat : des milliers de facteurs de vécu personnel amèneront ces personnes à se ranger sous la bannière du prolétariat, et non de la bourgeoisie ('de droite' ou 'de gauche'). Évidemment, la 'pensée' au sens où l'entend 'Voie Lactée' - c'est à dire la CONCEPTION/COMPRÉHENSION COMMUNISTE de la réalité dans un pays donné - qui va guider l'action du Parti révolutionnaire dans ce pays n'est pas l’œuvre d'un seul individu : elle est l’œuvre de l'avant-garde, du Parti comme 'intellectuel collectif', ce qui va permettre (à travers la lutte interne idées justes/idées fausses) de 'lisser', d''épurer' cette pensée des imperfections qu'il y a inévitablement dans la pensée d'un individu isolé.

    solidarietàgramigna2Voilà pourquoi, selon nous, les thèses émises dans cet article de 'Voie Lactée' sont TRÈS DANGEREUSES, amenant les forces révolutionnaires vers un rôle 'attentiste critique' et 'contemplatif', à moins que le 'mouvement universel de la matière' dans un pays donné n'atteigne (tout seul, comme un grand ?) une étape où il se 'reflète' dans une 'pensée' qui déclencherait la Guerre populaire... ce que l'on peut, à notre humble avis, attendre longtemps ! On rejoint là, finalement, la critique que font les camarades du (nouveau) Parti communiste italien, dans leur 'bilan-synthèse' de la première vague de la révolution prolétarienne (1917-92), aux Partis communistes 'kominterniens' des pays occidentaux : ces Partis ont généralement attendu (en ce qui les concerne dans le travail politique légal, syndicaliste, électoraliste, d''agitation' par la presse etc.) que 'les conditions soient réunies' pour que la révolution 'éclate'. C'est cela qui les a amenés, toujours selon le (n)PCI, à passer sous la coupe de la 'gauche' bourgeoise, à s''institutionnaliser' et à s''enkyster' dans l'ordre social qu'ils prétendaient (au départ) combattre et abolir ; et ceci a été la base matérielle (pour ces Partis qui n'étaient pas au pouvoir) de l'émergence des idées révisionnistes (anti-marxistes mais habillées de marxisme 'repensé', un beau 'reflet dans la pensée' pour le coup !), émergence qui bien souvent a précédé de beaucoup la prise de pouvoir de Khrouchtchev en URSS.

    Ce que nous enseignent tant l'histoire du marxisme que la lecture marxiste de l'histoire, c'est que - certes - 'là où il y a oppression, il y a résistance' : il y a un mouvement 'mécanique', 'automatique', 'humain' de résistance et de révolte (même si minoritaire dans le groupe considéré) lorsque, dans une organisation sociale donnée, un groupe humain est opprimé par un autre (dans la partie proprement productive de l'organisation sociale, le mode de production, on dira qu'il est exploité). De même, le 'nouveau', les 'idées nouvelles', émergent aussi dans un premier temps 'spontanément' : elles naissent de la 'friction' entre le niveau des forces productives et l'organisation sociale, les rapports de productions, l'ensemble des rapports sociaux et les superstructures idéologiques liées qui systématiquement retardent sur celui-ci. C'est-à-dire, en définitive, de la 'friction' contradictoire des deux 'pôles' de la contradiction motrice de la société d'une époque. Mais voilà ! Pour amener, un jour, ces exploité-e-s/opprimé-e-s à briser définitivement leurs chaînes, pour mettre les 'idées nouvelles' définitivement au pouvoir, ce qui veut dire en définitive changer d'organisation sociale et donc de mode de production, il faut un 'saut' qui ne peut résulter que de l'action CONSCIENTE, volontaire, déterminée, organisée pour agir d'un groupe d'individus, l'avant-garde de la classe révolutionnaire de l'époque.

    Prenons l'exemple de la société féodale : les deux 'pôles' de sa contradiction motrice sont la propriété utile (paysanne ou bourgeoise) des moyens de production et la propriété éminente (seigneuriale, ecclésiastique) sur ces mêmes moyens de production et les producteurs, s'exprimant par toute une ribambelle de taxes, redevances, péages, 'travail volé' par la corvée etc. Au sein même de la société féodale va émerger et se développer le capitalisme, urbain et rural, sur la base de la propriété utile des moyens de production, ceci dès le 11e siècle et jusqu'au 18e. Ce nouveau mode de production 'enfermé' dans le mode de production féodal, et le niveau des forces productives qu'il développe comme jamais auparavant dans l'histoire, vont se heurter à la propriété éminente seigneuriale et à l'organisation sociale, à l'ensemble des rapports sociaux qu'elle sous-tend. Ceci va engendrer des Assassinat Etienne Marcel'idées nouvelles' en trois vagues : 1/ communalisme et monarchisme : le bourgeoisie des villes va chercher à arracher sa 'franchise' (liberté) à l'autorité seigneuriale, les paysans un minimum aisés vont aussi essayer de s'en affranchir ; les uns et les autres vont appuyer une dynastie, suzeraine 'lointaine', dans sa lutte contre ses vassaux féodaux (ducs, comtes et autres princes-évêques), 'suzerains immédiats' qui les oppriment. Ceci débouchera sur le 'premier absolutisme' (de Philippe Auguste à Louis XI) et les États modernes. Les nations font leur apparition dans ce contexte, le monarque en réunit généralement plusieurs sous son autorité : d'un point de vue populaire il les opprime toutes ; mais d'un point de vue bourgeois et paysan aisé il en soumet et opprime certaines mais en 'libère' beaucoup du 'suzerain immédiat' ou d'un autre 'suzerain lointain' dont ces classes ne voulaient pas (ou plus). L'avant-garde est constituée par les 'jurandes', les assemblées bourgeoises qui se mettent en place dans les villes, et les 'bourgeois de Cour' qui ont 'l'oreille' du souverain (les paysans sont moins organisés). 2/ Réforme protestante et humanisme non-protestant (16e siècle, première moitié du 17e), expression d'un nouveau 'bond' des forces productives capitalistes ; Guerres de Religion et (tentative de) Contre-réforme débouchant sur (déjà) un certain nombre de républiques ou des monarchies parlementaires bourgeoises (Angleterre, Hollande, cantons suisses), et ailleurs sur le 'second absolutisme', l''Ancien régime' des livres d'histoire. L'avant-garde est ici sous le drapeau religieux de la Réforme, ou rangée ME0000065074 3derrière les intellectuels humanistes. 3/ Lumières et révolutions bourgeoises proprement dites, qui généralisent à l'Europe et à l'Amérique du Nord les républiques et les monarchies parlementaires bourgeoises (1750-1850). Les dernières survivances féodales sont balayées avec l'absolutisme devenu inutile et obsolète. Les forces cléricales sont plus ou moins maintenues selon les besoins d'encadrement des masses, mais dans tous les cas amoindries. L'avant-garde est ici les philosophes 'éclairés', puis les 'sociétés' telles que la franc-maçonnerie et enfin les 'clubs' de révolutionnaires bourgeois (de Mirabeau à La Fayette, de Robespierre à Danton).

    À chaque étape, en tout cas, nous voyons bien que la résistance (des propriétaires 'utiles' contre les propriétaires 'éminents') et les 'idées nouvelles' n'auraient pas pu s'imposer,  imposer une nouvelle organisation sociale, sans l'action consciente et décidée d'une avant-garde de classe, 'analysant concrètement la situation concrète' mais ne se contentant pas de 'refléter' et d''accompagner' passivement le 'mouvement de la matière' (des forces productives avancées contre les rapports sociaux arriérés).

    Il en va exactement de même, aujourd'hui, pour le processus de la révolution prolétarienne mondiale. La 'marche au communisme' n'est effectivement pas un 'choix' purement subjectif (comme le prétendent les avakianistes) : elle est le sens 'naturel' (matérialiste) de l'histoire, le débouché 'obligé' de toute l'histoire humaine depuis la sortie de la préhistoire, la seule autre alternative étant (peut-être) la destruction de l'humanité – en tout cas de la civilisation (le ‘scénario Mad Max’). Mais elle a 'besoin', pour exister, d'une pensée humaine consciente, systématisée et organisée en intellectuel collectif, 'reflétant' la réalité et ses contradictions (devenues insoutenables) d'un point de vue de classe mais ensuite s'organisant pour agir, sans quoi aucune transformation de la réalité n'est possible. Et cet intellectuel collectif est constitué de pensées individuelles qui n'ont, certes, pas 'choisi' au sens idéaliste de penser ainsi ('touchées par le Saint-Esprit', 'éclairées par les Lumières de la Raison' etc.) mais ont vécu dans la réalité matérielle et ses contradictions, analysé cette réalité et ensuite synthétisé ('reflété') cela, en s'affranchissant (par mille et un facteurs) des 'vieux murs' de l'idéologie dominante, dans une théorie révolutionnaire.

    L’histoire humaine ‘marche’ objectivement vers le communisme (l’alternative ‘retombée dans la barbarie’ est en ‘éternel’ débat dans le mouvement communiste, nous ne lancerons pas ce débat ici) ; la pensée humaine (avancée ou arriérée, révolutionnaire ou réactionnaire) ‘reflète’ les différentes étapes de ce processus historique et les contradictions qui les animent… mais pour avancer et notamment pour effectuer les ‘grands sauts’ historiques (changement radical de classe dominante, de mode de production, d’organisation sociale et de civilisation) le processus a besoin d’une pensée humaine ACTIVE et agissante, convergence organisée d’une multitude de pensées individuelles (progressistes et révolutionnaires bien sûr) ‘reflétant’ la réalité historique concrète chacune de son point de vue et à sa manière ; et non d’une ‘pensée’ contemplative ‘accompagnant’ et ‘reflétant’ passivement l’époque, le moment historique – qui serait quoi… sinon l’organisation et l’action des autres ?

    C'est tout le 'paradoxe' de la chose, (presque) digne d'un 'mystère' du dogme chrétien : la pensée n'est que le 'reflet' de la réalité matérielle (sociale) d'une époque et de sa ou ses contradiction(s) fondamentale(s), mais cette réalité a besoin de cette pensée, de ce 'reflet' organisé et agissant (pensée politique et militante) pour se transformer ; ce sont, en quelque sorte, les 'enzymes' de sa transformation. Il en a toujours été ainsi, de tout temps et dans tous les coins du monde.

    [En gros si on veut synthétiser à l'extrême :

    - La barricade est là, ça c'est intangible et indépendant de notre volonté. Le Nouveau d'un côté, l'Ancien de l'autre.

    - Le résultat de la bataille peut être 1000 fois la défaite du Nouveau, mais sera toujours sa victoire à la 1001e, ça aussi c'est intangible ; la variable humaine qui dépend de nous c'est le nombre de défaites d'ici là.

    - Le "libre arbitre" relatif consiste en notre relative "liberté" de choix quant au côté de la barricade où nous nous plaçons (+ nous placer du bon côté, mais caguer le truc et conduire par nos erreurs à sa défaite temporaire). En fait ce n'est pas totalement "libre", c'est juste que ce n'est pas "déterministe grossier" (prolétaire = révolutionnaire par exemple) ; ça dépend de 1000 facteurs du vécu de chacun et dans la majorité des cas ça va être impossible à "expliquer", même par la personne elle-même, autrement que par son "choix" (on perdrait un temps précieux - euphémisme - à essayer d'expliquer au cas par cas les "choix" en ce sens de 7 milliards de personnes, une par une).

    - MAIS à un moment donné aussi, parmi ces facteurs intervient celui de (de la rencontre avec)... l'avant-garde révolutionnaire la plus consciente et son activité ; ensemble d'individus que leurs 1000 facteurs personnels à chacun ont conduits à militer, en avant-garde militante, du bon côté. C'est-à-dire qu'à un moment donné, un ensemble de "choix" mille-factorisés réunis et organisés pour agir ensemble vont eux-mêmes devenir... facteurs de "choix", chez les autres, de les rejoindre du bon côté.

    Ce qui est vrai par contre, c'est qu'il n'y a pas de "libre pensée" (dixit un camarade "les libres penseurs n'ont que trop régné sur le monde, ça commence avec Voltaire, ça finit avec Florent Pagny" LOL !) : il n'y a pas de "liberté" de penser ce que bon nous semble (ou à partir d'un prétendu "libre examen", ou - nouveauté du 21e siècle - en vertu d'un "point de vue de premier concerné" par une oppression, réputé incontestable), il y a la reconnaissance et l'OBÉISSANCE, la soumission à des IDÉES JUSTES (estampillées "justes", certes, après étude du sujet et débat collectif), en principe (dans le cas contraire il faut le détecter et prendre les mesures) incarnées dans une DIRECTION POLITIQUE (une "jefatura", oui, quelque part) à laquelle donc on obéit tant qu'elle est porteuse de ces idées justes ; et effectivement à certaines époques historiques, cette direction a pu consister en un Être Suprême appelé Dieu, et ses "ministres" sur terre (lire notre position sur la question des religions : reflexions-sur-les-religions).]

    stalineConcernant la critique émise à l'encontre de Staline, elle rejoint globalement le point de vue de Servir le Peuple sur la direction soviétique de cette époque-là : les plus graves dérives n'ont pas été des dérives 'thermidoriennes', de droite, contrairement à ce qu'affirment les trotskystes ; mais au contraire des dérives 'de gauche', ultra-volontaristes et subjectivistes, cherchant à faire rentrer ('au forceps' si besoin) la réalité matérielle ('Voie Lactée' prend l'exemple de la nature, mais la société soviétique n'était pas en reste) dans la conception que la direction du PCbUS avait de la société socialiste en marche vers le communisme. Il suffit d'avoir étudié, même superficiellement, les thèses de Trotsky pour s'apercevoir qu'elles étaient ENCORE PLUS subjectivistes, ultra-volontaristes et irréalistes : mépris du caractère encore très majoritairement rural et arriéré de l'URSS ; négation du fait (et controverse avec Lénine sur ce point) que le jeune État révolutionnaire 'populaire' ne soit pas 'parfait' et puisse entrer en contradiction avec le prolétariat ouvrier proprement dit, celui-ci ayant donc besoin de ses 'conseils' et de ses syndicats pour se défendre, au besoin contre l’État et les cadres de la production eux-mêmes (Trotsky voulait faire des syndicats des outils d'encadrement militaro-bureaucratique de la production) ; refus de comprendre la 'lenteur objective' d'un processus révolutionnaire prolétarien, qui ne peut certainement pas embraser le monde, ni même un continent entier, en quelques années, etc. etc. Et lorsque l'on voit la 'social-démocratie radicale' qu'est devenu le trotskysme aujourd'hui, cela rejoint totalement l'affirmation de 'Voie Lactée' (mais qu'ils feraient bien de méditer pour eux-mêmes...) : la 'phrase d'ultra-gauche', l''ultra-radicalité', le 'super-révolutionnarisme' finissent toujours, face au 'mur du réel', par aller s'échouer dans le marécage de l'opportunisme réformiste.

    Cependant, 'Voie LURSS-LENINE_et_STALINE_1933_Gramota-total.jpgactée' ne va pas au fond de la critique de ces erreurs de Staline : le fond c'est-à-dire la conception, nullement 'stalinienne' d'ailleurs, mais généralisée dans le marxisme-léninisme 'kominternien', selon laquelle sous le socialisme (la transition du capitalisme au communisme) la contradiction principale de la société est entre le caractère très avancé du système politique mis en place par le Parti, et le caractère encore très arriéré des forces productives et (donc) de tous les rapports sociaux, des conceptions, de la culture populaire etc. liés à ce niveau des forces productives. 'Donc', la tâche principale que l’État révolutionnaire doit confier à la société est de 'produire, produire et encore produire' et, 's'il vous plaît', faire suivre au pas de course les rapports sociaux, conceptions etc... Sauf que (l'on s'en aperçoit très vite), ceux et celles-ci ne 'suivent' pas ; au contraire, se développent et se renforcent des rapports sociaux qui, jour après jour, préparent le terrain à la prise de pouvoir révisionniste (restauratrice du capitalisme à travers un processus plus ou moins long). Tout simplement parce qu'en dernière analyse les rapports sociaux d'une société dérivent (fut-ce en 'retardant' un peu) des RAPPORTS DE PRODUCTION, et, si la production augmentait effectivement dans des proportions considérables (équivalentes sur 20 ans aux révolutions industrielle 'françaises' ou 'britanniques' sur trois quarts de siècle), les rapports de production restaient... profondément arriérés.

    L'usine ou le sovkhoze pouvaient bien être propriétés de l’État, lui-même (officiellement) 'propriété' de la classe ouvrière et des paysans, mais il y avait toujours des chefs, des cadres et des exécutants, des dirigeants et des dirigés, des 'qui savent' et des 'qui écoutent (et font ce qu'on leur dit)', des intellectuels et des manuels, des villes et des campagnes, des centres et des périphéries, une nation majoritaire et dominante (les Russes) et des nations minoritaires et dominées (Ukrainiens, Baltes, Caucasiens, Sibériens, Centre-asiatiques), etc. etc. ; tout cela agrémenté, évidemment, d'avantages matériels faisant se dire, aux 'avantagé-e-s', "et pourquoi pas le capitalisme... tout simplement ?" (ou un 'socialisme' plus 'souple', mettant moins de limites à leurs privilèges...).

    Ainsi fut, à travers un processus allant de la mort de Staline au 'baisser de drapeau' final de 1991, rétabli le capitalisme en URSS ; et c'est précisément ce que Mao, avec la Révolution culturelle, et les maoïstes après lui ont compris et combattu, portant le marxisme-léninisme à un niveau supérieur : le marxisme-léninisme-maoïsme. Servir le Peuple, et d'autres camarades comme Sheisau Sorelh, font globalement leur l'affirmation du TKP/ML (maoïstes de l’État turc), dans un document du milieu des années 1990, repris à l'époque par la revue 'Front social' (ancêtre de 'Voie Lactée') : "Si une ligne n'amène pas une société au communisme, si elle n'amène pas à avoir la capacité de résoudre les contradictions existantes en faveur des travailleurs, si elle ne minimise pas le besoin de l’État et du Parti afin que les travailleurs deviennent les maîtres, et si elle n'est pas capable de distribuer le pouvoir dans la société sur la route vers le communisme, alors il y a un problème. Être au pouvoir est un instrument pour Tikkomobiliser les masses travailleuses vers le communisme. Ici, l'importance de la question de la "révolution socialiste" devient plus apparente. Le pouvoir prolétaire n'est pas le monopole du Parti, il est la force guidant par la gestion de la direction du Parti, et c'est le soutien de ce pouvoir par les masses travailleuses. Les travailleurs ne peuvent pas être privés du contrôle de la société, du droit à se révolter contre l'injustice, quel qu'en soit le prétexte ; ils ne peuvent pas être privés de leur droit à la continuation de la révolution".

    Voilà donc les critiques que nous émettrons quant aux conceptions développées dans cet article. D'autant plus que, concernant 'Voie Lactée', il nous semble percevoir en quoi consiste leur 'correspondance à la réalité' : le monde, nous disent-ils, et les sociétés occidentales en particulier, sous l'effet de la crise générale terminale du capitalisme, s'enfoncent inexorablement dans la barbarie... une situation proche, finalement, de la décadence du Bas-Empire romain, préfigurant les ‘invasions barbares’ ; et eux font leur site, se posent dans 'l'attente critique' et finalement en 'petits gardiens de la civilisation', soit finalement… dans la position de l’Église à cette époque, dans les siècles précédant et suivant la chute de l’Empire.

    otan-strasbourg-anti09Disons-le clairement : telle n'est pas notre conception de l'engagement communiste. Nous voulons élever au plus haut possible notre compréhension communiste du monde, nous organiser sur cette base et AGIR ; nous voulons être une FORCE MATÉRIELLE de transformation de cette réalité pourrissante qui nous entoure. Le capitalisme, oui, est désormais condamné à sombrer jour après jour dans toujours plus de barbarie et de souffrances atroces pour l'humanité ; l'époque (de la fin du Moyen-Âge jusqu'au milieu du 19e siècle) où ses exactions s'accompagnaient encore de réels progrès de bien-être et de civilisation pour les masses est définitivement révolue. Mais nous VOULONS, et nous CROYONS POUVOIR réduire et abréger au maximum ces souffrances pour le genre humain (et l'écosystème terrestre en général). Telle est la 'fibre', la 'palpitation' de notre engagement révolutionnaire auquel nous sommes prêt-e-s à consacrer toute notre existence.

    Sur la sacralisation métaphysique de telle ou telle 'pensée' de grand révolutionnaire historique (qu'elle ait acquis une portée universelle et soit devenue un '-isme', ou qu'elle ne soit valable que pour un pays donné), il est intéressant de lire ceci (traduction d'un article MLM nord-américain) :

    http://servirlepeupleservirlepeuple.eklablog.com/marxisme-au-dela-de-marx-leninisme-au-dela-de-lenine-maoisme-au-dela-d-a117830876


    1658.SovietFlag


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