• [Décryptage] Les propos du républicard de gôôche Alexis Corbière sur les langues "régionales" et aussi "minoritaires non régionales", comme l'arabe, à l'Assemblée



    https://france3-regions.francetvinfo.fr/bretagne/langues-regionales-vif-debat-entre-paul-molac-france-insoumise-assemblee-nationale-1450337.html

    "Vous vous trompez si vous ne montrez que de la bienveillance envers ces écoles. En effet, elles véhiculent parfois des idéologies identitaires anti-républicaines" a ainsi déclaré Alexis Corbière, précisant quelques instants plus tard : "Monsieur Le Fur, lorsque vous dites que des familles souhaitent que leurs enfants parlent la langue de leurs parents, on peut entendre votre argument. Mais faisons attention : je suis élu en Seine-Saint-Denis où beaucoup de Français ont des parents dont la langue n’est pas une langue régionale. Comment accueillons-nous cette situation ? Quand des gens voudront apprendre le portugais ou l’arabe, langues de leurs parents ou de leurs grands-parents, que leur dirons-nous ? Notre réponse ne peut pas être à géométrie variable."

    Sans aller (encore une fois) jusqu'à comparer les oppressions, qui n'ont rien à voir, le bonapartiste de gauche Corbière met là en lumière une continuité historique fondamentale : celle de l'État-"nation" qui se prolonge dans l'Empire ; duquel les indigènes viennent ensuite à leur tour (le "prolongeant" en quelque sorte) dans la métropole État-"nation" pour s'y ajouter à sa multinationalité réelle, que le républicard de base qu'il est, s'essuyant le front, se demande de plus en plus comment gérer ; comment faire pour que les larbins parlent comme leurs maîtres afin de "penser comme eux et ne bouger que dans les limites qu'ils leur auront fixées".

    Ce qu'il met en lumière (en y exprimant son opposition...), c'est : frappe l'État-"nation", tu affaibliras l'Empire ; frappe l'Empire, tu affaibliras l'État-"nation".

    Et dans l'autre sens c'est aussi une manœuvre classique de Mélenchon, qui lui est radicalement hostile aux langues régionales (et même aux accents prononcés, on l'a vu), d'instrumentaliser l'arabe contre, en mode (dans sa période sénateur de l'Essonne) "les langues minoritaires ? par chez moi dans l'Essonne, la première c'est l'arabe !" (comprendre dans ce propos une prétendue opposition d'un prétendu multiculturalisme francilien open sur the world - mais chacun bien à sa place hein, attention ! - aux "bouseux identitaires" avec leurs "patois")*.

    [* C'est là un classique gauchiotte, aussi bien FI-enteux qu'ultra-gauche, que de piocher les problématiques coloniales et état-nationales et les dresser les unes contre les autres au gré des humeurs, ou plutôt des intérêts du moment. Encore que bon, en général ce sont plutôt "les galériens blancs" et "la lutte de classe" qu'ils vont prendre et brandir contre les questions coloniales-raciales ; parce que nos questions nationales, on ne sait pas pourquoi on dirait vraiment qu'elles leur empestent les doigts.

    Là on a le cas sur les questions du droit aux langues (parce que oui oui, ce sont des questions POLITIQUES). Un coup c'est Mélenchon qui tokenise l'arabe en mode regardez les "vraies" langues minoritaires où elles sont, contre nos "patois". Le coup d'après c'est Corbière qui présente l'arabe comme une... menace (le portugais on se demande un peu ce qu'il vient faire là...), laissant entendre que les langues "régionales" bon "ça va", mais faudrait pas avec les écoles hors-contrat/contrôle ouvrir une boîte de Pandore (lourdement sous-entendu : arabo-islamiste).

    Ou sinon, les gens qui se découvrent soudainement antiracistes et arabophiles quand il s'agit de stigmatiser les Corses comme de gros Néandertaliens (sur-les-recents-evenements-racistes-survenus-en-corse sur-les-derniers-evenements-en-corse).

    Les gens qui, quand on parle Bretagne - Occitanie - Pays Basque - Corse etc., vont nous brandir les dernières colonies ("DOM-TOM"), la Françafrique voire même la Palestine : "nan mais z'avez pas un peu honte, de vous prétendre colonisés ??" (ni nous ni un certain nombre autour de nous ne nous prétendons tels, et personne à notre humble avis, dans les mouvements "régionalistes", ne le prétend DANS LES PROPORTIONS de l'Afrique ou de la Palestine, mais c'est pas grave).

    Mais attendez un peu que la Palestine vienne violemment sur le devant de la scène, un peu comme en 2014, et là... ce seront les dernières colonies et la Françafrique (suivies de près par les luttes internes aux pays arabes) CONTRE la Palestine : "gna gna gna quand c'est l'chlordécone en Martinique et la Françafrique et les Printemps arabes écrasés on les voit jamaiiiiis (ah bon ?) les pro-pals"...

    Ce qui est juste ballot, et que tous ces gens ont un peu perdu de vue, c'est qu'il existe entre autres choses une Plateforme syndicale des Nations sans État, ou encore diverses rencontres internationales (comme les plus célèbres, celles de Corte en Corse) dans lesquelles les peuples en lutte des dernières colonies côtoient et reconnaissent et respectent tout à fait les luttes de ceux d'Europe... Dommage !

    Ce sont là leurs méthodes dilatoires bien rodées, au fond très dans la ligne postmoderne : prendre les problématiques et les utiliser les unes contre les autres dans la certitude d'avoir toujours le dernier mot ("Jack of all trades, master of none, installer son petit universalisme par accumulation de points de vue où son avis seul sera pleinement légitime").

    Au fond, ça rejoint un peu la méthode hyper-critique d'un certain Bob récemment décédé... LOL, ça leur ferait sûrement pas plaisir qu'on leur dise ; raison de plus (peut-être) pour le faire :D :D :D

    Il est absolument VITAL (et ils l'ont compris) de casser le continuum État-"nation" - Empire.]

    Alors ensuite, le truc c'est que les propos en apparence assez ambigus de Corbière donnent lieu à des interprétations divergentes : pour les tenants des langues "régionales", "il nous compare à Daesh" (en gros, et donc ouin ouiiiin, vite vite il faut clamer urbi et orbi son allégeance aux "valeurs civilisées") ; pour d'autres au contraire, les langues régionales ne le dérangent pas vraiment et c'est surtout "le racisme et l'islamophobie" de son propos (qui opposerait "bonnes" langues "régionales" et "mauvaises" langues minoritaires "non-régionales" comme l'arabe) qui est pointé du doigt.

    D'autres voudront y voir au contraire (pour citer une intervention sur les réseaux sociaux) quelque chose de plutôt positif : "Il parle d'"idéologies identitaires antirépublicaines" à propos de ceux qui défendent les langues régionales, ce qui est inacceptable. En revanche, et là il faut ouvrir les oreilles, sa comparaison avec les langues des non-blancs, qui sont stricto sensu des langues minoritaires ou même titre que les langues régionales et sont donc a priori protégées par la charte européenne sur les langues minoritaires, est destinée à montrer que leurs revendications éventuelles de faire des écoles immersives ne seraient pas moins légitimes. Et ça, Molac et bon nombre d'autres régionalistes ne parviennent pas à le concevoir (et ne sont donc pas moins racistes que Corbière). Et ça, c'est bien que ce soit dit en séance publique à l'Assemblée Nationale."

    En réalité, au delà de cette apparence prêtant à confusion, sa position obéit à une logique tout à fait cohérente ; il faut simplement pour cela s'y pencher avec un peu de précision, et peut-être (déjà) lui laisser la parole pour la préciser.

    Sa position concrète il la donne là : https://twitter.com/alexiscorbiere/status/979746957827690497

    "Je suis pour l'enseignement des langues régionales ds le service public. Je comprends qu'il y ait des écoles privées pour ces langues, ms je dis attention aux établissements hors-contrat ! Je souhaite un CONTRÔLE [mis en majuscule par nous NDLR] par l'éducation nationale."

    Il dit qu'il n'est pas hostile aux langues régionales et souhaite même leur enseignement public ; qu'il n'a rien non plus contre l'enseignement privé (sous contrat)... toutes choses qui au fond et après tout ne mangent pas de pain ; dont il a, concrètement, compris la faible menace représentée pour la "Républiiiique une et indivisible" et ses hiérarchies territoriales (Servir le Peuple milite VRAIMENT pour que nos mouvements se dé-focalisent de cette question des langues, certes préoccupante surtout en fRance - où l'on va lentement mais sûrement vers leur disparition - mais le centralisme parisien, les rapports sociaux inter-territoriaux ne se résument pas à ça ; pour prendre une contre-exemple absolu : il n'y a pas vraiment eu d'éradication du créole, parlé à tous les coins de rue, en Karayib et Larényon, pourtant ce n'en sont pas moins des colonies, opprimées largement un cran au-dessus du Pays Basque ou de la Bretagne !!).

    MAIS PAR CONTRE, "attention" aux établissements hors-contrat.

    Car par "hors-contrat", il faut traduire : hors-CONTRÔLE. Pourquoi ? Parce qu'il n'est pas con, et il sait que ces établissements comme les calandretas ou les ikastolak ou les Diwan sont portés par des associations, quoi que celles-ci en disent, POLITISÉES. Politisées à gauche ou à droite mais dans tous les cas, pas vraiment dans le sens du patriotardisme républicard tricolore qu'il appelle de ses vœux.

    C'est d'ailleurs bien ainsi que certains intervenants comprennent (enfin... malcomprennent aussi en même temps) l'enjeu :

    "La FI n'est pas contre l'enseignement des langues régionales à l'école ! Elle préfère que cet enseignement soit encadré par l'éducation nationale comme ça se passe dans beaucoup d'écoles publiques actuellement. Les écoles Diwan sont des écoles associatives et non publiques. C'est un débat à avoir je pense..."

    "Les langues régionales et minoritaires doivent avoir un vrai statut. Et, en tout état de cause, le personnel enseignant le breton, le catalan, le portugais, l'arabe ou le wolof, peut et doit être fonctionnaire de l'éducation nationale ou personnel sous contrat soumis à un programme et à l'inspection du ministère. Cela éviterait que Corbière raconte n'importe quoi."

    [Réponse de la part d'un camarade]

    "En l'occurrence c'est ce pour quoi il affirme (sur Twitter) être : l'enseignement public ou sous contrat.

    Parce qu'en l'occurrence, hors-contrat est à ses yeux synonyme de HORS CONTRÔLE.

    C'est pour ça que, contre des écoles en langues nationales minoritaires hors contrat qu'il SAIT (il est pas con) toujours relativement politisées (pas forcément à gauche, mais contre la République une et indivisible, la communion Marseillaise-BBR obligatoire, bref), il brandit l'épouvantail, la "boîte de Pandore" potentielle des écoles en arabe où s'inculquerait l'"extrémisme".

    Parce qu'il sait que c'est la grande psychose du moment. Mais de manière générale, ce qu'il veut surtout c'est qu'il puisse y avoir contrôle sur les programmes et le contenu des cours."

    C'est là que, comme il vient d'y avoir le débat sur l'apprentissage de l'arabe comme "remède" à l'"extrémisme", et la forte contestation de cette idée gouvernementale par toutes les forces d'opposition à LREM, il en remet une petite couche avec ça et, effectivement, il vient greffer cette problématique sur l'autre, dans le rôle d'épouvantail absolu par les temps qui courent. Comme archétype de politisation potentielle "ultra-dangereuse" des écoles hors-contrat ; archétype "comme par hasard" pas choisi (justement) au hasard : l'arabe, l'islam etc. etc. (donc oui, comme on ne pouvait guère s'attendre à autre chose d'un mélenchoniste, c'est islamophobe).

    Plus globalement (donc), et en résumé, par rapport aux multiples interprétations qui ont pu être faites de ses propos : Alexis Corbière n'est "hostile par principe" à l'enseignement d'AUCUNE langue, ni "régionale" ni... (tout simplement) étrangère, ce que sont l'arabe, le portugais ou encore le wolof (qui pourrait sérieusement se dire contre l'enseignement de langues étrangères vivantes du vaste monde qui nous entoure ??) ; MAIS, ce sont ses propres mots on-ne-peut plus clairs sur Twitter, SOUS LE CONTRÔLE vigilant de la Républiiiique ; CAR SINON, et là il parle absolument de TOUS les cas de figure, des "idéologies identitaires anti-républicaines" risqueraient d'être propagées...

    [Et nous bien sûr... coooomme des connaaaards LOL, nous disons VIVE les idéologies identitaires anti-républicaines !!]


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