• La Révolution des Œillets (Revolução dos Cravos) éclate au matin du 25 avril 1974, de manière assez inattendue. 

    La radio commence par diffuser une chanson jusque là interdite, Grândola Vila Morena de Zeca Afonso. Puis, au petit jour, les militaires se déploient dans les rues. Un coup d'État ? 

    Oui, mais d'un genre inédit : les militaires sont membres du MFA (Mouvement des Forces Armées), un mouvement clandestin de militaires marxistes, progressistes ou démocratiques, radicalisés par l'enlisement des guerres coloniales en Afrique. Depuis le début des années 1960 en effet, le Portugal, qui est le dernier pays d'Europe à administrer des colonies directement, fait face à la guerre de libération de celles-ci au Mozambique, en Angola, en Guinée-Bissau comme au Cap-Vert. Le service militaire étant obligatoire, toute jeunesse portugaise commence par 4 années dans les colonies contre la guerre de libération des Peuples africains... Le caractère populaire de l'Armée, une armée d'appelés, sera décisif pour le succès de l'opération : la révolte du Peuple, en particulier de la jeunesse, se retrouvait tout simplement dans les casernes ! [Cela a peut-être fait réfléchir, par la suite, de nombreux pays à la professionnalisation des armées et à l'abolition du service militaire obligatoire...]

    Profondément lié aux économies impérialistes occidentales, le Portugal commençait également à cette époque à subir les effets de la crise naissante, avec notamment un tarissement de la filière d'émigration (très importante) qui irriguait considérablement le pays par ses envois de devises. 

    Au début de l'année 1974, donc, apparaissent des fractures dans la classe dirigeante : en février, malgré des états de service "irréprochables" dans la répression meurtrière des peuples colonisés, le général Spinola (chef d'état-major pour les opérations outre-mer) émet des réserves sur des guerres de plus en plus coûteuses (en hommes comme financièrement)... Il est limogé. Cet évènement encouragera sans doute les dirigeants du MFA à passer à l'action. 

    Mais le 25 Avril ne se limite pas, loin de là, à un coup de force militaire ! Malgré les appels du MFA à ne pas descendre dans la rue (craignant des victimes par des éléments jusqu'au-boutistes du régime, mais aussi de perdre le contrôle), la population passe outre et bientôt une marée humaine envahit les rues de Lisbonne et des principales villes.

    C'est alors jour de marché, et la saison des œillets ; bientôt les fleurs rouges ornent les fusils des militaires. Elles donneront leur nom à la révolution. 

    L'heure a sonné pour un régime vieux de presque un demi-siècle. Successeur d'António de Oliveira Salazar, mort en 1970, le Premier ministre Caetano, assiégé par le MFA au siège de la gendarmerie, cède et démissionne avant de s'enfuir au Brésil (tenu par une dictature militaire du même tonneau idéologique). Il transmet le pouvoir au général Spinola, le limogé d'hier, "pour éviter qu'il ne tombe dans la rue". 

    Depuis 1926, date d'un coup d'État militaire d'idéologie primoderiveriste et "régénérationniste" contre la jeune (datant de 1910) et instable République bourgeoise, dans un contexte d'agitation sociale et politique extrême ; et surtout depuis 1932, date de l'accession d'António de Oliveira Salazar (ministre des Finances) au poste de Premier ministre suivie rapidement de la proclamation de l'"État nouveau" (Estado Novo) ; le pays vivait sous un régime conservateur ultra-autoritaire, national-catholique, traditionaliste et corporatiste appuyé sur l'Armée (de laquelle viendra finalement sa chute...), la grande bourgeoisie de la banque et du commerce ainsi que les grands propriétaires terriens. 

    Le caractère fasciste du régime salazariste est souvent discuté : pour beaucoup, il était beaucoup trop conservateur pour être fasciste. 

    Il est en effet difficile de classer le salazarisme dans une catégorie de fascisme. Appuyé sur la grande propriété foncière, l'élite militaire (qui en est souvent issue), l'Église et une oligarchie de grands banquiers, commerçants et industriels, il possède surtout les caractères d'une dictature réactionnaire classique. Il présente relativement peu les caractères de mobilisation réactionnaire de masse du fascisme...

    Néanmoins il s'en inspire, en particulier du fascisme italien ou encore de l'austrofascisme, pour le corporatisme, la négation de la lutte des classes dans une confusion des intérêts patron-travailleur ainsi que pour l'idée de nation prolétaire.

    Il présente enfin des caractères de fascisme régénérateur : il se pose au fond dans la continuité de la Regeneração, mouvement de "révolution conservatrice" glorifiant le passé mythique des Grandes Découvertes et de la puissance mondiale portugaise du 16e siècle (considérée comme en "dégénérescence" depuis le 18e) et revendiquant un retour aux "valeurs nationales". 

    Mais en tout cas, le salazarisme ne se rattache pas du tout à un caractère impérialiste ni même à un projet impérialiste. Le Portugal a un très grand empire colonial, en Afrique ainsi qu'en Inde (Goa), en Indonésie (Timor) et en Chine (Macao). Mais ce n'est pas un pays impérialiste. En réalité, le pays a un caractère semi-féodal et capitaliste arriéré. Surtout, depuis le 18e siècle, comme l'explique bien Lénine dans L'impérialisme, il est sous la "tutelle" de la Grande-Bretagne (comme l'on peut considérer que l'Espagne est sous celle de la France) qui utilise son empire comme "relais" du sien. Les colonies portugaise d'Afrique sont de fait intégrées économiquement dans l'Afrique britannique ; tandis que le Brésil, indépendant depuis 1820 mais resté longtemps lié par la même famille régnante, est lui aussi très dépendant de la Grande-Bretagne. 

    Ceci explique que le Portugal salazariste, proche idéologiquement des régimes fascistes italien et allemand, ne le sera jamais vraiment diplomatiquement. Son aide aux forces franquistes pendant la guerre civile d'Espagne sera parfois décisive (comme pour la prise de Badajoz), mais restera somme toute limitée. De même, s'il autorise   pendant la 2de Guerre Mondiale quelques centaines de militaires (dont Spinola !) à rejoindre la División Azul espagnole pour aller combattre l'URSS, il offre dès 1943 les Açores comme base aéronavale aux Alliés.

    Après-guerre, il s'insère étroitement dans le dispositif atlantique de la Guerre froide, et rejoint l'OTAN dès sa création en 1949. L'on peut donc parler de fascisme compradore : un régime populiste, agrarien et corporatiste, autoritaire et contre-révolutionnaire, au service de l'impérialisme (principalement anglo-saxon) en Europe du Sud et en Afrique. 

    Cependant, dans les années 1960, le Portugal se brouille avec l'Angleterre qui s'oppose à sa politique coloniale en Afrique. Une opposition qui n'a certes pas pour motivations un quelconque "humanisme" ou "anticolonialisme" de Londres, mais n'a qu'un seul but : récupérer (sous forme de néocolonies pseudo-indépendantes) les colonies portugaises, le Portugal n'ayant pas les moyens d'une "domination indirecte" néocoloniale... 

    Le régime de Salazar se tourne alors vers... la France de De Gaulle, elle-même en froid avec les Anglo-Saxons. C'est l'époque de l'exportation massive de main d'œuvre vers la France (ainsi que vers la Suisse romande et la Wallonie) en échange d'investissements massifs dans les secteurs de l'industrie et (surtout) du tourisme. La France bloque les résolutions de l'ONU en faveur de la décolonisation des "provinces d'outre-mer" portugaises tandis que le Portugal (avec l'Afrique du Sud, elle aussi en rupture de ban, et des pays de la Françafrique) aide la France à soutenir la république sécessionniste du Biafra, manœuvre françafricaine pour s'emparer des réserves pétrolières du Nigéria. Dans ses mémoires, le gaulliste "historique" (et ultra-réactionnaire) Pierre Clostermann aura des mots très durs pour la Révolution des Œillets et fera l'éloge du régime de Salazar et Caetano.  

    Mais arrivé au début des années 1970 le modèle politique et économique n'était plus tenable, entravant les forces productives par ses caractéristiques féodales et oligarchiques, alors que la crise capitaliste mondiale se profilait. Une certaine construction européenne en développement, de plus en plus autonome de la politique impérialiste US-OTAN, n'est peut-être pas non plus à exclure comme cause des contradictions qui ont soudainement secoué la classe dominante. 

    Car la soudaineté de la révolution au Portugal ne doit pas donner d'illusions sur le caractère "magique" d'un "Grand Soir". Non seulement les luttes contre le régime n'avaient jamais cessé durant ces plus de 40 ans, d'abord sous la direction du PCP puis de divers mouvements comme les maoïstes du MRPP, les "trotsko-guévaristes" sur le modèle de la LCR et bien sûr les "marxistes militaires" du MFA, mais ce genre d'effondrement brutal d'un régime usé et dépassé historiquement est extrêmement rare. 

    La force symbolique de la Révolution des Œillets est très forte (encore aujourd'hui) pour le Peuple portugais. Elle a permis la victoire des mouvements de libération nationale en Afrique, et galvanisé les forces en lutte contre la dictature militaire au Brésil. 

    Mais, objectivement, elle n'a pas été une victoire finale mais bien le commencement d'une guerre révolutionnaire que le Peuple portugais perdra. 

    Rapidement (28 septembre 1974), Spinola, chargé par l'oligarchie de conserver ce qui pouvait l'être de l'ordre ancien, tente un putsch avec les nostalgiques de la dictature (appelant à la "majorité silencieuse" contre la "radicalisation politique en cours", rien que de bien classique...). La tentative se brise sur la mobilisation du Peuple et des forces progressistes et révolutionnaires : barricades, manifestations de masse... Spinola démissionne [après une nouvelle tentative putschiste en avril 1975, il se réfugiera en Espagne franquiste voisine puis au Brésil fasciste d'où il dirigera le Mouvement "démocratique de libération" et l'"Armée de Libération" du Portugal, organisations d'extrême-droite attaquant le PC, le MFA et autres forces révolutionnaires et progressistes (comme le "prêtre rouge" Padre Max assassiné en avril 1976, qui sera néanmoins réhabilité dans les années 1980 par le social-traître Soares)].

    Les occupations d'usines par les ouvriers et de terres par les paysans pauvres (souvent non-propriétaires) se multiplient, les travailleurs exploités prennent en main la production, les loyers sont gelés, des campagnes d'alphabétisation sont lancées (il y a 40% d'illettrés),  des noyaux de Pouvoir populaire se mettent en place dans les villes comme dans les campagnes. De leur côté, les anciennes colonies accèdent à l'indépendance (et passent dans la sphère soviétique).

    Le Mouvement des Forces Armées et surtout le COPCON (Commandement Opérationnel du Continent), dirigé par le charismatique Otelo de Carvalho, sont à la pointe de cette "radicalisation". 

    Mais cela ne durera pas. La division des forces révolutionnaires et le reflux général de la révolution mondiale qui commence alors (malgré la victoire du Peuple vietnamien et des mouvements de libération en Afrique portugaise) amèneront à la défaite. 

    Peut-être sous l'influence britannique, le Portugal a historiquement un important mouvement trotskyste. Mais même les plus "corrects" d'entre eux (la LCI et le PRT, qui fusionneront en 1978 dans le Parti socialiste révolutionnaire - PSR), les plus "mandéliens" et "guévaristes" sur la ligne de la LCR française et du Secrétariat Unifié, ne sauront pas jouer un rôle significatif d'avant garde des masses populaires qui puisse permettre de surmonter les limites imposées par l'hégémonie révisionniste à la tête du processus.

    Car le PCP, lui, tient de fait les rênes du pouvoir avec le Premier ministre ("sympathisant" de longue date) installé en juillet 1974, le général Vasco Gonçalves. Mais, inféodé à l'URSS de Brejnev, il mène une politique incohérente ; d'autant plus que l'URSS a fait savoir qu'elle ne compte pas "récupérer" le Portugal dans sa zone d'influence : ce ne serait qu'un nouveau Cuba, dont Mikoyan a dit dès 1965 qu'il serait "insupportable pour l'économie soviétique". Il mène donc une politique "eurocommuniste" (bien qu'officiellement hostile à cette doctrine), une politique réformiste détachée des intérêts soviétiques. Sa réforme agraire lui donne une grande popularité dans les campagnes, notamment dans le Sud resté profondément féodal, mais rapidement son influence recule devant les déceptions. 

    Le MFA, qui a mené l'opération du 25 Avril, éclate entre "radicaux" (Carvalho et son COPCON) qui soutiennent le gouvernement Gonçalves et "modérés" (comme le général Eanes) qui soutiennent les forces démocratiques bourgeoises (Parti socialiste de Soares, Parti social-démocrate, CDS de centre-droit etc.).

    Quand aux maoïstes du MRPP-PCTP, qui ont mené une lutte héroïque contre la dictature au début des années 1970 (un militant, Ribeiro Santos, fut tué par la police politique en 1971), ils sont alors prisonniers de la théorie des trois mondes, théorie ultra-révisionniste impulsée par la ligne contre-révolutionnaire du PC chinois (Deng Xiaoping est aux affaires étrangères de 1973 à 1976) qui fait de l'URSS et des PC pro-soviétiques l'ennemi principal. Il est même infiltré par des éléments ouvertement anti-communistes et pro-US, dont l'un deviendra célèbre : il s'agit d'un certain... José Manuel Durrao Barroso !

    Ils font donc du PCP et de Vasco Gonçalves la cible principale de leurs attaques. Bien qu'ayant marqué l'époque par ses impressionantes peintures murales (toujours visibles) et la mise en place de comités populaires d'usine et de quartiers, le MRPP jouera finalement un rôle "gauchiste réactionnaire" assez proche de celui des trotskystes dans d'autres situations (ou du groupuscule hoxhiste "Bandera Roja" au Venezuela dans les années 2000). Plutôt que de déborder sur sa gauche un PCP englué dans le révisionnisme et de construire au rythme des déceptions et des incohérences une mobilisation révolutionnaire de masse sur le socle de la mobilisation progressiste et démocratique du 25 Avril, il combat le PCP en renforçant sa droite : il soutiendra le PS de Mario Soares et la candidature "populaire" ("O Povo vota Eanes", "le Peuple vote Eanes" !!) du général social-libéral Eanes aux élections de 1976. 

    D'autres organisations marxistes-léninistes comme le PCP-ML (qui se ralliera à Deng Xiaoping), les "reconstructeurs" regroupés en décembre 1974 dans l'Union Démocratique Populaire (UDP - qui deviendra pro-albanaise) ou le Mouvement de la Gauche socialiste (MES, 'socialiste révolutionnaire' et 'léniniste') joueront un rôle mineur. 

    Après une tentative ratée de coup de force par les éléments radicaux du MFA (25 novembre 1975), au printemps 1976, avec les premières élections "démocratiques" de l'histoire du pays, tout est fini : le général Eanes est élu Président (jusqu'en 1986) et le socialiste Soares devient Premier ministre (le PS ayant gagné les élections parlementaires). La droite reviendra au pouvoir de 1978 à 1983, puis Soares de 1983 à 1985, puis de nouveau le centre-droit jusqu'en 1995 ; Soares restant, comme Président de la République (de 1986 à 1996), une figure politique tutélaire du pays. L'alternance bourgeoise... 

    Hier dictature réactionnaire fascisante, relais de l'impérialisme anglais puis rouage (important) du dispositif US de l'OTAN, le Portugal est aujourd'hui un pays capitaliste "artificiel" et dépendant reposant sur le tourisme, l'immobilier, l'agro-alimentaire et la sous-traitance industrielle à bon rapport qualité/coût, soumis à la "Banane Bleue" des grands pays impérialistes européens (France, Italie, Angleterre, Allemagne, Belgique, Pays-Bas etc.). 

    L'histoire de la Révolution portugaise d'avril 1974, ne l'oublions pas, est l'histoire d'une révolution "trahie" ou plutôt d'une révolution perdue (car les révolutions, qui sont des guerres, peuvent comme les guerres être perdues !). Un échec dont il faut tirer les leçons, d'autant plus qu'aujourd'hui la croissance artificielle (largement spéculative) du Portugal s'effondre comme celle de la Grèce, de l'Irlande, de l'État espagnol ou des pays de l'Est. La 'gauche radicale' pousse (aux élections de 2009 le Bloc des Gauches - regroupant le PSR trotskyste type LCR, l'UDP ex-ML etc - frôle les 10%, la coalition PCP-Verts les 8% et le PCTP-MRPP les 1% - et 1,5% aux européennes, ce qui est du niveau de Lutte Ouvrière ici) ; l'extrême-droite (Parti Populaire) commence à mobiliser des forces ; et de grandes luttes s'annoncent. 

    Mais la flamme du 25 Avril brûle et brûlera encore dans le cœur de millions de Portugais-es, une flamme qui éclaire l'avenir à travers les heures sombres du présent !

    La mémoire du 25 Avril est éternelle car elle montre que le Peuple et les enfants du Peuple, hier sous l'uniforme d'une guerre coloniale réactionnaire et aujourd'hui sous le bleu de travail de la sous-traitance franco-allemande ou dans les files d'attente du chômage et de l'aide sociale, FONT ET PEUVENT TOUT !    


    800px-Coruche mural 25 Abril

    maia


    Le chant signal de la révolution : Grândola Vila Morena

    Grândola, vila morena
    Terra da fraternidade
    O povo é quem mais ordena
    Dentro de ti, ó cidade
    Dentro de ti, ó cidade
    O povo é quem mais ordena
    Terra da fraternidade
    Grândola, vila morena
    Em cada esquina um amigo
    Em cada rosto igualdade
    Grândola, vila morena
    Terra da fraternidade
    Terra da fraternidade
    Grândola, vila morena
    Em cada rosto igualdade
    O povo é quem mais ordena
    À sombra duma azinheira
    Que já não sabia a idade
    Jurei ter por companheira
    Grândola a tua vontade
    Grândola a tua vontade
    Jurei ter por companheira
    À sombra duma azinheira
    Que já não sabia a idade
     
    (traduction)
    Grândola, ville brune
    Terre de fraternité
    Seul le peuple est souverain
    En ton sein, ô cité
    En ton sein, ô cité
    Seul le peuple est souverain
    Terre de fraternité
    Grândola, ville brune
    À chaque coin un ami
    Sur chaque visage, l’égalité
    Grândola, ville brune
    Terre de fraternité
    Terre de fraternité
    Grândola, ville brune
    Sur chaque visage, l’égalité
    Seul le peuple est souverain
    A l’ombre d’un chêne vert
    Dont je ne connaissais plus l'âge
    J’ai juré d’avoir pour compagne
    Grândola, ta volonté
    Grândola, ta volonté
    J’ai juré d’avoir pour compagne
    A l’ombre d’un chêne vert
    Dont je ne connaissais plus l'âge



                mes mural Mural4

                mes12xiMurais do MRPP(6)

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  • Le 25 avril 1945 prenaient fin plus de 22 ans de régime fasciste, né le 22 octobre 1922 dans la terreur des squadre en chemises noires et le sang du mouvement ouvrier et paysan. 

    Une marée de drapeaux rouges et de drapeaux tricolores des révolutionnaires du 19e siècle (sans l'écusson de la Maison de Savoie, mais bien souvent avec une étoile rouge à la place) déferlait sur le Nord du pays (le Sud étant conquis par les Alliés depuis plus d'un an). 

    En juillet 1943, Mussolini avait été destitué et arrêté sur ordre du roi et du Grand Conseil fasciste, suite au débarquement allié dans le Sud du pays. La monarchie négocie la paix avec les forces américano-britanniques.

    Mais le "Duce" est rapidement libéré (en septembre) par un commando allemand et ramené dans le Nord aux mains du Reich, à Salo près du lac de Garde, où il installe une "République sociale" fantoche d'Hitler. 

    Après la prise de Rome en juin 1944, les Alliés s'arrêteront sur la "Ligne Gothique", entre Pise sur la Méditerranée et Pesaro sur l'Adriatique. Ils ne la franchiront qu'en avril 1945, dans l'effondrement final du Reich nazi. 

    Ce qui se déroule au Nord de cette ligne est alors exclusivement une guerre du Peuple italien contre les forces fascistes et nazies

    En réalité, la lutte n'a jamais cessé depuis plus de 25 ans. Ancien agitateur socialiste, Mussolini quitte le parti par nationalisme et fait campagne dès 1914 pour l'entrée en guerre de l'Italie aux côtés du bloc impérialiste franco-anglais.

    Il apparaît aujourd'hui qu'il a été financé par les services secrets de Londres (MI5) ainsi que par des fonds spéciaux du gouvernement français, mais il l'a aussi été, très certainement, par la Grande Industrie du pays (principalement du Nord), en quête de débouchés commerciaux et de "champs d'investissement", contre des forces conservatrices et libérales semi-féodales et majoritairement pacifistes. 

    Après la guerre, estimant le pays "mal gouverné" et lésé par les Alliés dans les traités de paix contre l'Allemagne et l'Autriche, il fonde son "mouvement" des "Faisceaux italiens de combat", sur un programme nationaliste et "révolutionnaire", un programme républicain petit-bourgeois. 

    Mais la Révolution d'Octobre 1917 en Russie a fait souffler un vent de terreur sur la bourgeoisie mondiale, et partout les Peuples, la masse des travailleurs opprimés et exploités se lève sous la direction du prolétariat pour instaurer le socialisme. 

    En Italie le Parti communiste ne naît qu'en 1921, il est faible et, sous la férule de Bordiga, il a une ligne gauchiste erronée. Mais le Parti socialiste est puissant et possède un courant pro-bolchévik très fort. On compte également un fort mouvement anarcho-syndicaliste et syndicaliste révolutionnaire. De même, des éléments populaires qui avaient suivi Mussolini au début, comme les Arditi, commencent à déborder le programme petit-bourgeois du "mouvement".

    Durant le Biennio rosso (les "deux années rouges" 1919-1921), l'Italie est secouée par des mobilisations paysannes, des grèves et des manifestations ouvrières, des occupations de terres et d'usines avec parfois des tentatives d'autogestion. La bourgeoisie préfère prendre les devants, "prévenir que guérir"... 

    Mussolini vend alors le mouvement fasciste aux barons de l'industrie et aux grands propriétaires terriens, contre les masses ouvrières et paysannes qui s'organisent sous le soleil rouge de la révolution qui brille depuis la lointaine Russie.

    Le mouvement des masses populaires est écrasé dans le sang de milliers de mort, malgré la résistance héroïque des formations de défense prolétarienne comme les Arditi del Popolo (voir le lien plus haut), qui ont démasqué et se sont dressées contre la mascarade "révolutionnaire" du fascisme, pour une véritable révolution démocratique et populaire. 

    Mais face à la vague de la révolution mondiale, le vieux régime parlementaire bourgeois est historiquement dépassé, et le pays est ingouvernable. Seuls les fascistes défendent efficacement le pouvoir du Capital. La monarchie confie alors le gouvernement à Mussolini, en octobre 1922. En quelques années, toute opposition non seulement communiste, bien sûr (Gramsci), mais également socialiste (Matteoti) et démocratique (les frères Rosselli) est liquidée. 

    Pendant les 20 années qui suivent, le fascisme poursuivra le projet du Grand Capital italien de faire de l'Italie une puissance mondiale. Il achève la "pacification" de la Libye (jusqu'en 1932, 100.000 morts), se lance à la conquête de l'Éthiopie (1935-36, 275.000 morts) puis, allié à Hitler, participe à la guerre civile d'Espagne (1936-39) non seulement contre la "menace" révolutionnaire rouge mais aussi pour asseoir son influence sur ce pays (sous tutelle traditionnelle de la France et de l'Angleterre), envahit l'Albanie (1939) puis la Grèce (1940) et obtient une zone d'influence dans le Sud de l'Hexagone (Alpes et Côte d'Azur) et en Corse après la défaite de juin 1940, ainsi que des parties de la Yougoslavie (1941). Il drape cette politique expansionniste dans la revendication fastueuse d'un imperium méditerranéo-africain "néo-romain"...

    Mais après le tournant de la guerre en 1942-43, l'Italie est envahie par les Alliés (juillet 1943) et la monarchie, les dignitaires fascistes (Badoglio, Ciano...), le Vatican et l'aristocratie du Sud se rallient aux probables futurs vainqueurs (Mussolini est arrêté le 25 juillet, l'armistice est signé le 3 septembre). 

    Tandis que les Allemands récupèrent les zones d'occupation italiennes en Europe et occupent l'Italie jusqu'à la hauteur de Naples, le fascisme avec Mussolini (libéré par un commando allemand le 12 septembre) se replie au Nord sous la protection de la Wehrmacht et de la Waffen SS. Il installe alors un véritable régime de terreur et de génocide, qu'affronte une guerre populaire sans équivalent dans toute l'Europe de l'Ouest. 

    Sous la direction principale du Parti communiste, les forces populaires, démocratiques, progressistes, socialistes ou libertaires (dans la région de Carrare) affrontent la Wehrmacht, les SS et les Chemises noires de la "République sociale". 

    Cette guerre à mort pour la libération du Peuple fera 75.000 martyrs, dont la mémoire guide toujours le Peuple italien plus de 65 ans après.

    Elle sera une gigantesque mobilisation révolutionnaire de masse (malgré l'existence - aussi - d'une Résistance monarchiste, conservatrice, catholique ou républicaine libérale), qui reste une référence pour toute l'Europe et le monde entier. Des villages, des vallées entières ont parfois été des zones libérées, où se mettait en place le Pouvoir du Peuple. 

    Au printemps 1945, c'est l'effondrement : alors que l'Allemagne est totalement conquise par les Alliés et la glorieuse Armée Rouge, les forces anglo-américaines franchissent la "Ligne Gothique" et atteignent le Pô. Mais avant même leur arrivée, comme ce sera le cas dans de nombreuses régions de l’État français, la plupart des villes auront été libérées par les Partisans, et un début de Pouvoir populaire se sera mis en place. 

    Le 25 avril 1945, Mussolini quitte l’archevêché de Milan, où il a tenté de négocier une paix "honorable" avec les Alliés par l'intermédiaire de l’Église. Tentative inutile : alors que Hitler est terré dans son bunker à Berlin, les forces allemandes du pays ont déjà négocié leur retraite avec les vainqueurs.

    Il tente alors de gagner la Suisse ou l'Autriche. Sur le chemin, il rencontre une colonne allemande en retraite (sans doute vers l'Autriche) qui l'emmène avec elle. Mais la colonne est arrêtée à Dongo, près du lac de Côme, par une brigade de Partisans. En échange du droit de poursuivre leur route, les Allemands livrent Mussolini. 

    Le 28 avril, l'ordre du Conseil de Libération Nationale arrive de Rome. Mussolini est exécuté. Son corps est ramené à Milan. La foule essaie de s'en emparer pour le démembrer, les Partisans le suspendent alors par les pieds à une station-essence. 

    C'est la fin lamentable du chien de guerre sanglant de la bourgeoisie monopoliste et de l'oligarchie terrienne. Deux jours plus tard, son comparse Hitler se suicidera dans son bunker de Berlin. 

    Malheureusement, le victoire contre le fascisme ne se poursuivra pas en Révolution. Intégré dans le Conseil de Libération, le Parti communiste fera désarmer les Partisans et se ralliera à la reconstruction du capitalisme italien sous la tutelle alliée. Son rôle de démobilisation des masses terminé, comme son homologue français, il sera éjecté du gouvernement en 1947, et deviendra une "opposition loyale" et un instrument d'accompagnement "social" de la renaissance économique. Le PCI sera même le champion du révisionnisme et de la liquidation idéologique du marxisme-léninisme en Europe. 

    Mais la flamme des Partisans continuera à brûler, éclairant notamment la lutte révolutionnaire des années 1970, ou les combats de Gênes (ville médaille d'or de la Résistance) lors du contre-G8 en juillet 2001.

    Et elle continue à brûler aujourd'hui, tandis que la bande Berlusconi s'enfonce dans une décadence digne des Borgia, et que le fascisme se remet en ordre de marche, annonçant dans la crise terminale du capitalisme le choc final : Socialisme ou Barbarie ! 


    Il Popolo è forte, e vincerà !


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    La fin pitoyable des ennemis du Peuple !

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    Le front levé vers l'avenir !

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    L'Armée du Peuple !

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    LE COMBAT CONTINUE....


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