• Chute d'Afrin


    Ainsi donc, c'est la triste nouvelle du week-end, les troupes d'Erdogan et leurs alliés syriens sont entrés dans la ville kurde et y on planté leur drapeau : le-drapeau-turc-flotte-dans-la-ville-dafrin (site radicalement pro-turc).

    Manifestement, il n'a pas été trouvé d'accord avec le régime pour une intervention qui aurait bloqué (à moins d'oser le conflit entre armées régulières) l'invasion turque, soit qu'Assad (qui s'insurge mollement contre "l'occupation" et appelle au "retrait immédiat" gouvernement-syrien-condamne-occupation-retrait-immediat) n'ait pas voulu entendre parler des conditions d'autonomie régionale posées par les YPG/J, soit (ou les deux) que la Russie ait finalement accepté, ne serait-ce que temporairement et tactiquement, d'inclure la Turquie dans le plan de partage de la Syrie et de lui accorder une "zone de sécurité" au Nord-Ouest zone-erdogan-nord-ouest-syrie, c'est-à-dire le territoire revendiqué par Rojava situé à l'Ouest de l'Euphrate... syrie-vers-un-triple-protectorat [ce n'était donc pas, comme nous avons pu le penser à tort au début de l'offensive, Afrin contre Idleb mais Afrin contre la Ghouta et les autres enclaves rebelles en territoire dévolu au régime... mais bon ça ne change pas grand chose au fond de l'affaire].

    Et pourquoi pas d'ailleurs, étant donné que le conflit syrien, extrêmement meurtrier certes, est d'abord et avant tout une guerre de déplacement : pour éviter que les choses ne s'éternisent (déjà 7 ans que ça dure...), les différents camps offrent à leurs adversaires et à leurs soutiens civils une porte de sortie des zones de combat pour éviter une résistance acharnée. Et donc... la zone turque au Nord-Ouest pourrait ainsi devenir le "débarras" pour tous les rebelles plus ou moins "islamistes" (et leurs partisans) balayés par le régime des poches qu'il est en train de reprendre une par une. Le conflit pourrait ainsi se terminer plus rapidement que s'il s'agissait d'éradiquer purement et simplement toute la rébellion anti-Assad non-rojaviste, aussi bien des deux tiers de Syrie au Sud-Ouest de l'Euphrate dévolus au régime et à l'impérialisme russe, que du tiers au Nord-Est dévolu à l'Occident et contrôlé par les FDS.

    Puisque l'on parle de déplacements de population, comme une illustration parfaite de ce que nous sommes en train de dire, dans le district d'Afrin l'exode massif déjà commencé ces dernières semaines se poursuit en s'accélérant : evacuation-Afrin. Ce district (en tant que subdivision administrative syrienne) comptait 172.000 habitants en 2011 avant le conflit. Avec l'afflux massif de réfugiés, en tant que zone la plus calme et sécurisée du pays ces 7 dernières années, la population était montée à... 650.000. Et d'ici quelques jours, peut-être une semaine, il pourrait n'en rester... que 50.000 seulement ! Évidemment, l'essentiel du commandement et des troupes YPG/J s'en va aussi, toujours dans cette même logique de guerre de déplacement (forcément acceptée puisqu'il faut traverser la zone turque "Bouclier de l'Euphrate", à moins que ce ne soit la zone régime plus au Sud), en direction de Manbij et du Grand Rojava au Nord-Est.

    C'est donc le PIRE des scénarios que nous avions envisagés qui se réalise ; concrètement, la "moitié" du scénario que nous envisagions il y a 2 ou 3 ans lorsque nous soutenions avec intérêt Rojava : que l'armée turque vienne "sécuriser" le Nord de la Syrie et écraser l'expérience démocratique une fois que celle-ci aurait bien servi contre le Grand Monstre djihadiste, ce qui est donc en train de se passer, mais seulement à l'Ouest de l'Euphrate... ce qui est encore pire, car s'inscrivant dans un cynique plan de partage et une logique de "grand jeu" impérialiste dont la direction bourgeoise kurde s'est rendue totalement prisonnière (de façon encore plus éclatante en gardant une zone dans ce plan de partage, que si tout avait été anéanti).

    Le commandement politico-militaire PYD-YPG/J d'Afrin annonce une guerre de guérilla afrin-cauchemar-turquie ; ce qui serait très bien, c'est n'est pas nous qui allons dire le contraire : notre soutien à la résistance d'un territoire national envahi par une puissance étrangère oppresseuse est DE PRINCIPE et non-négociable ; les discussions dans la sphère idéologique, quant aux lanternes pour lesquelles d'aucuns voudraient faire passer certaines vessies dans un but anticommuniste de gaucho-contre-révolution préventive fasc-anti-pol-4e-part, sont un autre sujet. Déjà apparemment, alors que les civils ont été évacués, l'armée turque et ses alliés sont confrontés à un minage par explosifs des immeubles qui aurait déjà fait 200 morts ou blessés hors-de-combat dans leurs rangs.

    Bien sûr, les enjeux géopolitiques en arrière-plan ne peuvent pas être et ne sont pas perdus de vue ; pas plus que certaines questions opérationnelles concréto-concrètes : comment, par exemple, mener une Guerre du Peuple... sans peuple, celui-ci étant parti à l'exception de quelques dizaines de milliers de personnes ? Ou encore : comment mener une guérilla qui serait une violation d'un plan de partage et de sortie du conflit dont il n'y a pas à douter que les Occidentaux sont tout autant au courant et partie prenante que les Russes, et qui garantit en même temps l'existence et la stabilité de la "Fédération du Nord" conquise sur Daesh outre-Euphrate ? À moins que, comme nous l'avons aussi envisagé, cette "zone de sécurité" turque (qui représente, entre la zone "Bouclier de l'Euphrate" et le district d'Afrin désormais conquis, à peu près un département français) ne soit pensée pour être un bourbier pour Erdogan et conduire à sa mort politique en Turquie, ses successeurs amorçant dès leur arrivée au pouvoir un retrait qui reviendrait à ce qui était initialement convenu entre Öcalan et ses geôliers, à savoir un déplacement de la lutte armée kurde hors de Turquie vers le Nord de la Syrie (mais avec alors l'hypothèse que le régime d'Assad, totalement requinqué, ne reprenne immédiatement le contrôle du secteur).

    Le seul avenir pour cette terrible défaite, ce n'est pas comme (pathétiquement et pitoyablement) tous les gaucho-impérialistes bourgeois et "révolutionnaires" opportunistes* s'écrier "honte à" toute la liste de puissances impérialistes possibles, comme si les peuples avaient quoi que ce soit à attendre d'elles ; mais de la transformer en victoire par les leçons apprises : que TRÈS VITE, face à ce qui est de fait (nous l'avons déjà dit auparavant) un Traité irlandais de 1920 auquel l'opportunisme de la bourgeoisie a mené, émerge une "IRA" populaire-révolutionnaire kurde qui poursuive la lutte armée pour l'objectif premier d'autodétermination du Peuple kurde EN LIEN avec la révolution démocratique anti-impérialiste dans toute la région.

    Ce qui n'est possible qu'en défendant, renforçant et arborant, comme point de ralliement pour toute cette juste "dissidence", la ligne communiste révolutionnaire MAOÏSTE en la matière ; qui est notamment celle du TKP/ML authentique-légitime (non putschiste-opportuniste)... comme nous le faisons depuis maintenant des mois.

    Chute d'Afrin

    [* Au sujet de tout ce mouvement de soutien gauchiste occidental, encore un article qui a de quoi faire réfléchir... et frémir : quel-retour-en-france-pour-ces-volontaires-partis-combattre-aux-cotes-des-kurdes-de-syrie... les volontaires en Rojava "suivis de près", et pas que "suivis de près" : faisant clairement du renseignement pour certains !!]


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