-
Borotba au sujet de l'atroce incendie-massacre d'Odessa
L'affaire évoque un "Oradour-sur-Glane miniature" où plus de 40 personnes (militant-e-s progressistes/antifascistes et/ou pro-russes contre le nouveau régime de Kiev, mais surtout progressistes/antifascistes dans cette région...) ont atrocement trouvé la mort. Signe de l'atmosphère de terreur fasciste et de guerre civile réactionnaire fratricide qui s'est emparée du pays depuis la chute du régime corrompu de Ianoukovitch ; au moment même où les affrontements font rage dans l'Est pro-russe, où l'impérialisme du Kremlin joue lui aussi ses cartes...
Terreur nazie à Odessa : plus de 40 mort-e-s, des centaines de blessé-e-sLe 2 mai, sous le prétexte d'une soi-disante marche "Pour l'unité de l'Ukraine" (le même jour que le match de foot entre le Tchernomorets d'Odessa et le Metalist Kharkov), des escadrons paramilitaires de nationalistes ukrainiens ont été amenés à Odessa de tout le pays. Ils sont arrivés par bus et par train. Dès le départ, alors qu'ils commençaient à se rassembler sur le square de Sobornaya, on a pu voir parmi les traditionnels hooligans d'extrême-droite beaucoup de paramilitaires bien équipés : boucliers, casques, battes et autres armes contondantes voire à feu. La plupart, des hommes d'environ 30 à 40 ans, n'étaient manifestement pas des supporters de football. Certains portaient des boucliers où était écrit "14e centurie d'autodéfense de Maïdan". Ces paramilitaires nationalistes ont été la principale force de frappe du massacre d'habitants d'Odessa sur le "pôle de Kulikovo".
Au total, plus de 1.000 nationalistes ont participé à la marche et au massacre qui a suivi. Les habitants d'Odessa étaient une minorité parmi eux, tandis que la majorité étaient des paramilitaires d'extrême-droite amenés là ensemble. Ils étaient reconnaissables en particulier au dialecte (non typique de la région d'Odessa), certains d'entre eux reconnaissant et disant même ouvertement d'où ils venaient. Les supporters locaux du Tchernomorets d'Odessa ont quitté la marche lorsque les affrontements ont débuté : ils étaient seulement là pour la marche traditionnelle vers le stade et lorsqu'ils ont réalisé que des "visiteurs" et des provocateurs voulaient les conduire à frapper les habitants de la ville, la majorité d'entre eux (identifiables à leurs écharpes bleues et noires du club) a immédiatement quitté la soi-disante marche "pacifique".
Au même moment, les "militants d'importation" ne se rendaient pas au stade. Leur but était de terroriser les habitants de la ville et de déchaîner la violence contre les activistes du mouvement d'opposition à la junte de Kiev. L'action des nationalistes n'a nullement eu, dès le commencement, un quelconque caractère pacifique ; ce qui s'explique vu le massacre qu'ils préparaient.
Il n'y avait que peu de policiers, bien que le personnel de la seule police locale d'Odessa eut été capable de contrôler une foule d'un millier de personnes et, par conséquent, d'empêcher les pogroms et les meurtres. Il s'est avéré que la majorité des effectifs avait reçu l'ordre de garder le bâtiment administratif du Ministère de l'Intérieur. Par conséquent, la ville entière a été livrée aux mains des paramilitaires néo-nazis. Ceci n'est pas surprenant lorsque l'on connait les liens anciens et étroits de l'actuel Ministre de l'Intérieur, Arsen Avakov, avec les groupes néo-nazis - y compris le "Secteur Droit".
Tandis que la colonne de nationalistes remontait la rue Grecheskaya, quelques militants (200-250 personnes) de la milice locale d'Odessa ont tenté de lui barrer la route. Mais très vite ils se sont retrouvés sous une volée de jets de pierres, de bouteilles et de grenades assourdissantes. Des coups de feu ont éclaté. Le camarade Ivan de Borotba a reçu une balle dans le ventre par une arme de guerre... Les militants et activistes de la milice d'Odessa ont alors tenté de s'échapper par le centre commercial "Athena" situé dans le Quartier grec. La foule de nationalistes d'extrême-droite a alors crié haro sur eux. Les paramilitaires ont commencé à préparer des cocktails molotovs afin de mettre le feu au centre commercial avec les membres de la milice d'autodéfense barricadés à l'intérieur. Des policiers ont alors sauvé la vie des activistes en amenant leurs véhicules directement à l'entrée du centre commercial.
Les nationalistes sont alors remontés jusqu'au "pôle de Kulikovo" où se trouvait le campement des opposants à la junte de Kiev. Des militants de Borotba, aux côtés d'autres activistes et de simples habitants d'Odessa, étaient à la tâche dans le campement. Au total environ 200 personnes étaient là et plus de la moitié étaient des femmes ou des personnes âgées.
Les néo-nazis ont alors commencé à bombarder le chapiteau de cocktails molotovs et l'ont réduit en cendres. Les militants du campement ont été forcés à battre en retraite dans le bâtiment tout proche de la Maison des Syndicats.
Afin de tuer le maximum d'Odessites, les fascistes ont alors mis le feu au rez-de-chaussée de l'édifice. Le feu s'est répandu très rapidement dans le bâtiment.
Des personnes ont commencé à sauter par les fenêtres des étages supérieurs pour tenter d'échapper aux flammes, mais une fois au sol elles étaient rouées de coups par les paramilitaires nationalistes. Notre camarade (membre de Borotba) Andrew Brazhevsky a ainsi trouvé la mort. Le député au Conseil régional (et ami du dirigeant de Borotba à Odessa Alexeï Albu) Viatcheslav Markin a également été tué de la sorte après avoir sauté par la fenêtre. Plus de 40 activistes ont ainsi péri brûlés vifs, asphyxiés par les fumées ou tués par les nazis en tentant de s'échapper du bâtiment en feu. Par chance, un certain nombre de nos camarades a réussi à s'échapper sain et sauf. Certains, y compris le dirigeant de Borotba Odessa et élu au conseil municipal Alexeï Albu, ont été sévèrement frappés à coups de battes et de pieds. Ils souffrent de nombreuses contusions, fractures et blessures à la tête.
Le massacre d'Odessa a été organisé par la junte de Kiev afin d'intimider la population mécontente du nouveau régime et de liquider ceux qui le combattent activement. Le fait que les militants d'extrême-droite soient venus en nombre et très bien équipés en est la preuve ; et l'inaction de la police d'Odessa ou encore la simultanéité des évènements avec l'opération "anti-terroriste" à Slaviansk concordent également en ce sens.
La junte de Kiev est ouvertement en pleine fuite en avant dans la violence et le carnage contre ses opposants. Et les instruments de cette violence aveugle sont les militants néo-nazis, ceux-là mêmes qui travaillent en lien étroit avec la police secrète, qui sont bien armés et financés par l'oligarchie.
Le massacre d'Odessa montre que le régime des nationalistes et des oligarques de Kiev est en marche à vitesse grand V vers la dictature terroriste ouverte de type fasciste.
Le Conseil de Borotba, 3 mai 2014
*******************************************************************************************************Lire aussi : http://www.secoursrouge.org/Ukraine-Un-ancien-prisonnier
Ukraine : Un ancien prisonnier politique blessé à Odessa
Les affrontements entre fascistes et nationalistes ukrainiens d’une part, militants pro-russes et antifascistes d’autre part ont débouché sur un massacre à Odessa. Les nationalistes ukrainiens ont mis le feu à la Maison des Syndicats, où s’entassaient leurs opposants. 31 personnes sont mortes des suites d’une intoxication à l’oxyde de carbone ou en sautant par les fenêtres, parmi lesquelles des militants connus de la gauche révolutionnaire ukrainienne comme Andrew Brazhevsky, membre du mouvement Borotba.
Un ancien prisonnier politique, Alexandre Gerasimov, a été quant à lui gravement brûlé. Alexandre Gerasimov était l'un des 12 militants de l’Union de la Jeunesse Communiste Léniniste [NDLR dont des éléments rejoindront ensuite Borotba en 2011] arrêtés à Odessa en 2002 [NDLR donc sous la présidence de Leonid Koutchma, mentor politique de Ianoukovitch], parmi lesquels quatre Russes, sept Ukrainiens et un Moldave, qui avaient développé une organisation clandestine révolutionnaire dans cette région à grandes concentrations ouvrières multinationales, dans le but de fonder une République soviétique de la Mer Noire. Alexander Gerasimov était resté détenu plusieurs années en Ukraine.
Alexandre GerasimovAujourd’hui, la foule a pris d’assaut le siège de la police d’Odessa et libéré 67 personnes, antifascistes et/ou pro-Russes, détenus par la police ukrainienne.
*************************************************************************************************Dans la fureur ethno-chauvine - impulsée par les rivalités impérialistes - qui s'est emparée de l'Ukraine, Odessa à la longue histoire de brassage multiculturel et de luttes sociales et révolutionnaires (cuirassé Potemkine et soulèvement en soutien à celui-ci, mutineries de la Mer Noire, agitation révolutionnaire tout au long des 20 dernières années du tsarisme etc.) apparaît de plus en plus clairement, telle Sarajevo en Yougoslavie, comme un symbole à abattre.
Ukraïna : une expression géographique ("frontière" en russe), DEUX NATIONALITÉS principales ("novorusse"/"cosaque" et ruthène)*, une dizaine de plus petites (Tatars de Crimée et du Sud-Est, Hongrois, Slovaques, Roumains et Moldaves du Sud-Ouest, Turcs, Grecs, Juifs ashkénazes de l'Ouest ou criméens du Sud-Est, Rroms etc.) et DEUX VOIES : la guerre fratricide de mercenaires sur le "Grand Échiquier" du repartage impérialiste du monde ; ou l'Unité démocratique des Peuples contre tous les oligarques, capitalistes et impérialistes de tous bords pour instaurer le Pouvoir populaire !
[* Cette question de "Novorussie"/"Novorusses" a été très largement débattue, et non sans raisons. En effet, les cartes "ethnographiques" tendent à montrer que les véritables Russes (selon, sans doute, l'ancienne classification soviétique des nationalités) ne sont majoritaires qu'en Crimée (~ 60%) et dans quelques raïons (districts) du Donbass, de la région de Kharkov ou encore proches de la Moldavie (Boudjak). Mais alors, sur quoi (diable) repose donc cette (fichue) identité "novorusse" du Sud et de l'Est de l'Ukraine ? Eh bien, elle repose peut-être précisément sur cela : ni les Russes, ni les Ukrainiens ni qui que ce soit d'autre (Bulgares, Tatars, Roumains/Moldaves, Gagaouzes etc.) ne représentent une écrasante majorité de 90% ou plus dans ces régions. La caractéristique locale est justement le multiethnisme.Le bandérisme, cet ultra-nationalisme fondé sur une "pureté" ethnique ukrainienne "plus-vraie-que-vraie", n'y fonctionne donc pas (sans même parler du fait que sa collaboration passée avec le nazisme, dans des régions martyres de la guerre d'extermination lancée par Hitler contre l'URSS, ne plaide pas en sa faveur...). Des idéologies au service de l'impérialisme russe telles que l'"eurasisme", le "panslavisme" (unité plus ou moins fédérale de tous les Peuples slaves) ou encore un certain "néo-soviétisme" peuvent y fonctionner - et de fait y fonctionnent ; mais le bandérisme, la population du Sud et de l'Est de l'Ukraine le vomit. Si l'Ouest (à 90 ou 95% ukrainien "ruthène") en veut, "tant mieux" pour lui ; mais au Sud et à l'Est on n'en veut pas, c'est ainsi.
On notera que cette culture de coexistence nationale s'accompagne généralement d'un usage de la langue russe comme lingua franca ou plus localement (surtout le long du Dniepr - en orange sur cette carte) d'un dialecte populaire mêlant russe et ukrainien, le sourjyk ; d'où la confusion qui tend à s'installer entre russophones (notion linguistique), "pro-russes" (notion politique) et "Russes" au sens de la classification soviétique des nationalités (notion "ethnique"). La carte de l'usage principal du russe dans la vie quotidienne, ou encore celle des partisans de sa co-officialité (aux côtés de l'ukrainien) montrent ainsi des réalités notablement différentes de celle des pourcentages de Russes "ethniques".]
-
Commentaires