(Introduction, première partie et plan général)
Le "progressisme" au service de l'Ordre
Il y a un peu plus de 70 ans, un vieux connard anglais, gras et répugnant comme un verrat du Lancashire, "grand vainqueur" du nazisme... mais responsable (délibérément) de quelques 6 millions de morts dans le Nord-Est de l'Inde (morts qui, vivants, auraient été susceptibles d'accueillir les Japonais à bras ouverts, lire ici : famine-bengale-genocide-anglais), lançait que "les fascistes de demain se diront antifascistes" (sachant manifestement de quoi il parlait, puisqu'il venait lui-même de perpétrer un génocide de dimensions fascistes tout en combattant les puissances de l'Axe...).
Bon, en réalité, ce serait un fake (peut-être l'un des premiers de l'histoire !). Churchill, puisque c'est de lui qu'il s'agit, n'aurait jamais dit cela. À la rigueur, ces propos auraient pu avoir été tenus par un populiste américain, un temps gouverneur de Louisiane, Huey Long. Et quand bien même il l'aurait dit, ce ne serait évidemment que de la pure merde réactionnaire, probablement dirigée contre les socialistes et les communistes (les "antifascistes" du propos) en ces débuts de Guerre froide.
Mais il n'empêche... que fake ou pas, aujourd'hui, chaque jour qui passe semble donner raison à ces propos.
Pas qu'aujourd'hui d'ailleurs : le régime gaulliste (1958-74) autoritaire et corporatiste au service du Capital, massacreur d'Algériens dans les djebel comme sur les bords de Seine, de Guadeloupéens et de Camerounais, était bien un régime issu de la "France libre" et de la Résistance.
L'Italie démocrate-chrétienne aux 25.000 prisonniers politiques, était régie par sa "Constitution antifasciste" d'après-guerre [puisque l'on parle de l'Italie de cette époque, des années 1970, c'est peut-être l'occasion de placer ici un petit Pasolini, dont les réflexions d'alors rejoignent fortement tout ce que nous sommes en train de dire dans cette longue étude : Pasolini-fascisme-moderne.pdf Pasolini-force-passé.pdf].
L'Allemagne "suicidant" la Bande à Baader était dirigée par le social-démocrate Helmut Schmidt et avait également inscrit dans ses lois fondamentales la répudiation de la "folie" nazie qui l'avait conduite au désastre 30 ans plus tôt.
À ce niveau-là, il est important de relever que l’État français occupe une place particulière et à part, car en fait, tout cela n'est pas pour lui totalement nouveau : s'il a connu un intense mouvement fasciste, et même peut-être le premier mouvement préfigurant le fascisme (l'Action Française et plus largement la droite nationaliste et antisémite de l'époque de Dreyfus), il n'a connu un réel régime fasciste que dans le contexte de catastrophe de la défaite et de l'occupation nazie de 1940 ; et de 1900 à 1940, à quelques rares parenthèses près, c'est ce qui était à l'époque la "gauche" qui l'a gouverné... et qui a de fait évité l'instauration d'un régime fasciste, en se chargeant de la mobilisation de masse pour 1°/ la guerre impérialiste, 2°/ le maintien du taux de profit du capitalisme en crise et 3°/ le refus de la révolution prolétarienne que requérait l'époque. Et encore après la Seconde Guerre mondiale, l'anticommunisme des débuts de la Guerre froide a été pris en charge par des gouvernements "de gauche" (avec notamment les sinistres figures de Jules Moch et Guy Mollet). Alors certes, cette idéologie républicaine "de gauche" dans laquelle baignait l'époque avait de quoi apparaître totalement réac vue de ce que sont les critères de la "gauche" aujourd'hui (patriotardisme militariste omniprésent, racisme et colonialisme assumés, antisémitisme "modéré" toujours sous-jacent, peine de mort à tout-va, bagne de Cayenne, femmes pratiquement dernières en Europe à ne pas avoir le droit de vote et être considérées mineures à vie – elles ont pu élire Hitler en Allemagne, mais pas le Front populaire en France ! – etc. etc.). Mai 68 a fait passer le message ; et un grand ravalement de façade a été nécessaire dans les années 1970 et 80. Mais, donc, le "progressisme au service de l'Ordre" n'est pas un phénomène totalement nouveau en Hexagone.
Il serait même, presque, possible de dire dans une certaine mesure que notre bonne vieille France a ni plus ni moins qu'inventé, avec les "exagérations révolutionnaires" de la Terreur (1793-94)... le concept même de gauchisme réactionnaire, de discours ultra-gauche derrière lequel toujours, au bout du compte, on trouve la Finance – lire ici, c'est édifiant : Exageration-revolutionnaire-et-Bande-Noire.pdf
Mais les choses ont encore gagné en ampleur depuis.
Car qui, aujourd'hui, s'affirme "fasciste" ? C'est encore (hélas) assez fréquent en Italie, avant de préciser aussitôt dans la foulée que "ça n'a rien à voir avec le nazisme", et que Mussolini a "certes commis des erreurs". Mais en dehors de ce pays... personne, ou presque. La droite de la droite affirme combattre... le "fascisme islamique", l'"occupation étrangère" immigrée, et bien sûr le "fascisme de gauche" sous lequel "on ne peut plus rien dire". La référence à De Gaulle est omniprésente dans ses rangs, et les auto-dénominations consacrées sont "patriotes" ou à la rigueur "nationalistes" (seuls quelques groupuscules marginaux s'assumant "nationaux-socialistes"). Les Identitaires du Dauphiné s'intitulent "Maquisards" et rendent régulièrement hommage à la Résistance du Vercors. Pour la mouvance Soral, c'est le "fascisme" de "l'axe américano-sioniste", la "vraie extrême-droite atlantiste et ultra-libérale". Tout le monde est "antifasciste" !! Et lorsque vous vous direz "antifascistes" face à ces "antifascistes"-là, ils vous répondront bien sûr que c'est vous les vrais fascistes (et les "collabos" : de la "racaille", de l'"occupation islamiste" etc.), qui se prétendent antifascistes... comme l'avait (soi-disant) prophétisé Churchill.
En Catalogne, le néofranquisme espagnoliste du Parti Populaire de Rajoy et, surtout, de son nouvel avatar Ciudadanos/Ciutadans met en œuvre ses mesures d'exception etat-francais-aura-desormais-frontiere-avec-le-fascisme contre l'aspiration populaire à l'indépendance au nom de la "démocratie", du "vivre-ensemble", du "multiculturalisme" et de "l'ouverture sur l'Europe et le monde" : des valeurs tout ce qu'il y a de plus "progressistes", et qui font forcément et automatiquement (en miroir) de leurs adversaires des "fascistes". Innombrables sont d'ailleurs les gauchistes, en République française "une et indivisible" mais aussi dans la Péninsule, qui marchent dans la combine...
Bien sûr, tout cela pourrait aisément être évité en rendant à l'antifascisme ses lettres de noblesse politiques : antifascisme-a135798346 ; mais bon... on en est loin.
Et dans les milieux "de gauche"... on combat le fascisme d'extrême-droite, bien sûr, mais aussi bien souvent... le "fascisme rouge" des "néo-staliniens", "confusionnistes", "rouges-bruns", "antisémites" etc. etc.
Eh oui... Car là encore, cette fusion que nous avons vue de la "gauche" (anticommuniste et même anti-"communiste" révisionniste, puisque le communisme authentique comme révisionniste a été mis en déroute) dans le dispositif total de contre-révolution préventive post-"Fin de l'Histoire" a conduit celle-ci à devenir partie intégrante, voire presque "actionnaire majoritaire" des basses besognes de "police politique" et de "maintien de l'ordre" intellectuel.
Nous avons dit précédemment que le grand principe de la contre-révolution préventive "démocratique", c'est qu'"on peut penser ce qu'on veut, ce qui est interdit c'est d'agir". Mais bon, cela vaut pour la répression au strict sens pénal (et c'est d'ailleurs de moins en moins vrai : depuis une grosse dizaine d'années, les propos qualifiés par exemple d'"injures" à un responsable politique, ou d'"incitation à" quelque chose de "mal" sont de plus en plus réprimés). Il est bien évident que non, "on ne pense" pas "ce qu'on veut"' ; ou en tout cas, "on pense ce qu'on veut" tant que l'on reste dans les clous du "système" (du dispositif idéologique). L'émergence d'une vraie Pensée politique de "rupture" révolutionnaire (ou ne serait-ce... qu'un retour aux principes élémentaires du mouvement communiste des années 1920-30, ou du mouvement anticolonial/anti-impérialiste des années 1950-60-70), il faut l'empêcher à tout prix, l'écraser dans l’œuf, car une fois entrée en contact avec le mouvement (pour le moment désordonné, en "pilotage automatique") des masses en colère, plus rien (pas même la répression pénale, ou alors une vraiment très très grosse) ne pourra l'arrêter.
À défaut de répression pénale, réservée aux actes qui violent le Code du même nom, ce "barrage" s'exercera donc par le terrorisme intellectuel... et celui-ci est, manifestement, devenu aujourd'hui bien plus une spécialité de la "gauche" que de la droite (extrême ou pas), plutôt chargée de tenir fermement dans les mailles de son filet les masses populaires totalement coupées de la "gauche" et, par la grâce de celle-ci même, des idées révolutionnaires.
Ce terrorisme intellectuel peut pratiquement constituer, parfois, un appel à l'agression physique de ceux qui en sont la cible – mais là pour le coup, voyez-vous, ce franchissement de la "ligne rouge" du droit pénal ne suscitera aucune répression judiciaire, ce qui est logique puisqu'il est justement censé se substituer à elle. Et nul besoin de nervis fascistes : le "milieu" gauchiste, convaincu que vous êtes des pourritures, s'en chargera parfaitement lui-même !!
Là encore, ce n'est pas une question de "radicalité" (en opposition à une gauche "bourgeoise") : celle-ci au contraire, côtoyant, entourant les foyers de possible émergence d'une Pensée politique révolutionnaire, est plutôt en réalité la première ligne de "casques" et de "matraques" que cette Pensée doit percer !
En fait, ce qui est fascinant depuis que Macron est au pouvoir (élu ouvertement par certains comme "moindre mal" face à Le Pen, et par d'autres discréto sans le dire, ou pourquoi pas "au nom de" et "par solidarité" avec un "étranger privé du droit de vote" lolilol-portnawak.png...), c'est combien... il semble mettre en œuvre légalement tout ce pour quoi a milité toute une "gauche" y compris "radicale" depuis une quinzaine d'années. À un moment donné, il devient difficile de croire au hasard.
Poursuite de la criminalisation du mouvement pro-palestinien BDS (Boycott-Désinvestissement-Sanctions) en tant qu'"appel à la discrimination antisémite", déjà bien à l’œuvre sous Hollande-Valls et lancée sous Sarko par Alliot-Marie, mais qui semble monter encore en puissance depuis la rencontre Macron-Nétanyahou à l'occasion des commémorations du Vel d'Hiv (juillet 2017). Ce rejet de BDS est tout sauf un phénomène rare dans la "gauche" la plus "radicale" qui soit, à moins qu'il ne soit remplacé par un silence "gêné" sur la question. Les attitudes et les "débats" de l'été 2014, lorsque Gaza était (une fois encore) sous les bombes et que se levait face à cela, ici en Hexagone, une gigantesque (peut-être la plus gigantesque depuis les années 1980) mobilisation de la "Nation indigène" colonisée intérieure ; soit directement lorsque l'on prenait position pour le Peuple palestinien et ces mobilisations, soit (de la part de gens supposément communistes et anti-impérialistes) lorsque le ton montait avec les premiers connards en question ; sont encore bien gravés dans nos mémoires, nous vous inquiétez pas...
Ou encore, tout dernièrement, la proposition de loi criminalisant les fake news, dans la veine des campagnes de toute une "gauche" même "radicale" depuis des années contre le "confusionnisme" et le "conspirationnisme" ; terrorisme intellectuel que nous avons pu aborder dans cet article : conspirationnisme-et-chasse-aux-conspis (après l'analyse de l'impasse politique que représente le "conspirationnisme" lui-même) ; avec pour médias emblématiques Conspiracy Watch (Rudy Reichstadt, socedem pour ne pas dire socelib), Confusionnisme.info (Ornella Guyet, "gauche radicale") ou Mondialisme.org (Yves Coleman, ultra-gauche) mais loin de s'y réduire – la liste complète serait kilométrique. Bien sûr, inutile de préciser que cette loi n'a sans doute pas prévu de s'en prendre aux mensonges, déformations et dissimulations... d’État, cela va de soi.
Tout ceci reflète, ou plutôt se situe dans le prolongement d'un axe central du terrorisme intellectuel de "gauche" depuis le début des années 2000 : tout ce qui tourne autour de l'accusation d'"antisémitisme" ou de "confusionnisme"-"complotisme" (ou pourquoi pas d'"anticapitalisme romantique", avec la mise en avant du "spécialiste du fascisme"... et sioniste "de gauche" revendiqué Zeev Sternhell, ou encore du tout aussi sioniste sous-produit de l’École de Francfort - Wertkritik - Moishe Postone).
Cet axe, cependant, est depuis quelques années dans une dynamique de déclin. Trop de mensonges et de dissimulations d’État révélées, notamment par WikiLeaks (quoi que l'on pense de la personnalité et des idées de son fondateur), ont battu en brèche l'idée qu'il ne faudrait jamais se poser de questions sur ce que veulent bien nous dire ceux qui nous gouvernent.
L'équation fallacieuse "antisionisme"="antisémitisme" a elle aussi perdu en puissance sous les coups du militantisme politique démontrant son caractère mensonger éhonté ; desservie aussi (sans doute) par son accompagnement d'un pro-israélisme trop tonitruant (nous y reviendrons plus loin), alors que les gouvernements et le centre de gravité politique en Israël sont de plus en plus manifestement d'extrême-droite (et que même Sternhell le dit, LOL) : elle a perdu en fait, non pas son mojo comme Austin Powers mais son trigger, élément clé, "magique" du terrorisme intellectuel "progressiste" et de sa stratégie de shock and awe post-véritaire, qui permet que lorsqu'on est accusé de quelque chose on est automatiquement ce dont on est accusé et les gens ne se posent pas de questions. Elle avait en fait besoin, pour exister, de s'incarner physiquement comme réalité dans des sacs à merde effectivement antisionistes et antisémites, les principaux dans ce rôle étant le duo Dieudonné-Soral (il y a aussi dans la colonne de gauche de ce site toute une compil' d'articles à ce sujet) ; mais ces derniers sont eux-mêmes en déclin, tant auprès de la gauche anti-impérialiste (potentiellement révolutionnaire) qui depuis des années ne mord plus à l'hameçon (sauf l'OCF, qui a depuis soutenu Asselineau à la présidentielle LOL) que de l'extrême-droite qui a compris que ce qui "marche" est exactement le contraire de ce qu'ils lui proposent (plus d'islamophobie et moins d'antisémitisme...), ou encore des jeunes musulmans ("cibles") exaspérés par le racisme qui, lorsqu'ils ne rejoignent pas des trucs corrects, préfèrent de toute façon le salafisme pur et dur (beaucoup plus cohérent, et sunnite alors que la géopolitique soralienne est plutôt pro-chiite) ; écrasés sous les révélations d'hypocrisie, de magouilles et malversations, de comportements décadents sur fond de propos racistes, lâchés par tout leur sillage de suiveurs de la "grande époque" etc. etc.
Mais comme le dispositif est complexe et savant, il se renouvelle en permanence. Par exemple, avec le "progressisme au service de l'Ordre" sur le thème du sexisme et/ou de l'homophobie.
Cela, non plus, ne date pas d'hier : en 2004, il y avait déjà eu la loi raciste contre le port du foulard islamique dans les établissements scolaires ; sur un fond d'ambiance plus "féministe" (Fourest était déjà en première ligne) que les premières affaires de la fin des années 1980 (plus axées "laïcité" et "valeurs de la République") ; et dont il faut rappeler le militantisme d'extrême-gauche des profs à l'initiative du "débat" y ayant conduit, comme Pierre-François Grond de la LCR (futur NPA), chose dont la plupart de ces militants ne se vantent plus guère aujourd'hui...
Mais il y a depuis l'avènement de Macron une accélération, sous l'égide très "société civile" de la nomination de la blogueuse féministe Marlène Schiappa au poste de Secrétaire d’État à l’Égalité hommes-femmes – niveau contre-révolution préventive avec le sourire et tout en "progressisme" et "modernité", il fallait bien ces deux-là pour faire la paire !
Avec par exemple, dans le prolongement d'un développement exponentiel (et souvent parfaitement justifié) des dénonciations de harcèlement ou de (même micro) agressions, culminant dans le mouvement #MeToo-#BalanceTonPorc dont le caractère ambivalent est bien exposé ici : ben-ecoutez.html, la loi de pénalisation du harcèlement de rue... évidemment dans l'arrière-pensée "par les racailles de cité" (il n'y a "qu'eux" qui font cela, non ?) ; d'ailleurs pour le coup même Marsault, militant d'extrême-droite connu pour ses caricatures de social justice warriors postmos qui ont pu lui valoir un certain succès jusqu'à gauche, s'est fendu d'un strip où son musculeux héros éclate la tête d'un "wesh" harceleur ; ou encore, stupéfiante de double standard, l'affaire Tariq Ramadan.
On pourra peut-être ouvrir ici une petite parenthèse, en lien avec la marchandisation de tous les rapports sociaux dans la "société de consommation" terminale que nous avons précédemment évoquée ; puisque la "féministe médiatique" Caroline De Haas (fondatrice d'"Osez le Féminisme !", longtemps PS tendance Hamon puis directrice de campagne de Cécile Duflot à la primaire écologiste, candidate P'c'F-EELV-Nouvelle Donne aux législatives de 2017 à Paris) s'est illustrée dans ce contexte #BalanceTonPorc par une "brillante" proposition face aux problèmes du harcèlement et des agressions : aller "chercher l'amour"... sur des sites de rencontre en ligne, tels que Meetic ou Tinder, qui sont... des machines à fric. Un phénomène qui a connu un développement exponentiel ces 10-15 dernières années, et qu'il n'est pas possible de ne pas mettre en miroir avec une société où, comme aux États-Unis actuellement, plus d'un quart des hommes de moins de 30 ans considèrent qu'inviter une femme rencontrée au hasard de l'espace public à prendre un verre pour faire connaissance constitue déjà une agression ; et semble-t-il, une proportion similaire de femmes françaises de la même génération partagerait le même avis. Jusqu'au jour où l'on se rendra compte que les comportements de sagouins peuvent être tout aussi violents online (où l'on peut toujours, certes, bloquer la personne mais bon...) ; que les rencontres online, bien obligées à un moment donné de se concrétiser in real life, peuvent elles aussi se révéler très dangereuses et très mal finir ; et là, on est curieux d'avance de voir ce que les De Haas du moment trouveront à nous dire... Fin de la parenthèse.
Alors bien sûr, lorsque c'est à ce point flagrant, lorsque d'un côté on verbalise le "wesh mad'moiselle" des "racailles" dans la rue, et que l'on jette au cachot préventif un prédicateur musulman "controversé" sans la moindre des conditions requises par la loi pour ce faire ; tandis que de l'autre on ovationne un parlementaire de la majorité visé par des accusations du même acabit ; la "radicalité" s'en rend quand même un peu compte et conteste (c'est son métier...) – encore que sur l'affaire Ramadan, de fait première application judiciaire radicale du "renversement de la charge de la preuve" en la matière (accusatrice crue sur parole, c'est à l'accusé de prouver son innocence) appelé par la gauche radicale postmo-intersec depuis des années, et "observatoire" de comment cette revendication abracadabrante se fracasse sur le mur de la réalité et des masses (en l'occurrence populaires immigrées musulmanes), la "contestation" soit loin d'être aussi simple et unanime : feminismes-blancs-et-non-blancs-bilan-affaire-ramadan (Houria Bouteldja)...
Il n'en reste pas moins qu'elle n'est (toujours) absolument pas extérieure à ce "progressisme" anti-politique mis au service de l'Ordre, dont elle ne fait que constater parfois horrifiée et "indignée" (même pas toujours...) la récupération et la mise en œuvre par le Pouvoir bourgeois.
Car l'erreur serait là encore de penser que le problème se résume à un "fémonationalisme" ou un "homonationalisme" au droitisme flagrant, comme celui de Caroline Fourest ; ou même à un vieux dogmatisme "laïco-féministe" marxiste ou libertaire à la Pierre-François Grond. Encore une fois, dans le champ du débat intellectuel, la plus grande "radicalité" peut tout à fait masquer ici un rôle de police politique anti-matérialiste, comme cela est de plus en plus visiblement le cas des démarches dites "intersectionnelles" ; "intersectionnalité" partie comme on le sait des femmes impliquées dans la lutte de libération noire aux États-Unis (enfin, quand même déjà pas mal sur les décombres du reflux de cette lutte), mais qui peine aujourd'hui à recouvrir une autre réalité que celle brillamment décrite par Houria Bouteldja ici : race-classe-et-genre-une-nouvelle-divinite-a-trois-tetes ; ou par Norman Ajari dans cet autre papier la-faillite-du-materialisme-abstrait ["Force est de reconnaître, aussi désolant que soit ce constat, qu’une part significative du discours intersectionnel français est formellement semblable à l’universalisme républicain (bien que leurs contenus diffèrent). Il cherche à consacrer la supériorité morale de celles et ceux qui le prônent, en les confortant dans l’illusion d’une légitimité sans borne. Articuler à tous propos la classe, la sexualité, le genre et la race, c’est s’assurer d’avoir son mot à dire sur tout, et d’être rarement contredit. Jack of all trades, master of none, le prêcheur intersectionnel répondra « classe » ou « genre » quand on lui parlera race, et vice versa, installant son petit universalisme par accumulation de points de vue, où son avis seul sera pleinement légitime."].
[BREF EN SUBSTANCE, pour synthétiser à l'extrême : il y a une gauche (de contre-révolution préventive) "réac" qui va brandir ses "valeurs universelles" et ses grands principes moraux pour faire taire les réflexions et les luttes qui bousculent ses petits conforts intellectuels, enveloppe de leurs petites positions de pouvoir ou places au râtelier du système ; mais il y a aussi, pour bien prendre les révolutionnaires à revers et en tenaille, un gauchisme postmoderne "intersectionnel"-"articulateur", "déconstruit" qui va les "dissoudre" dans une critique et une attaque tous azimuts contre toutes les positions de pouvoir (réelles ou largement fantasmées), façon "feu d'artifice" partant dans tous les sens, dans un piétinement de type semi-anarchiste de toute conception matérialiste des priorités (hiérarchie des contradictions) et de manière finalement toute aussi morale et à l'arrivée, liquidatrice. À ce sujet, nous ne pouvons que vous inviter à lire : ajari-intersec-articulation.png - bouteldja-race-classe-genre-nouvelle-divinite-a-trois-tetes - yousfi-postmo-deconstruc-intersec.pdf]
Nous l'assumons : parmi les "trucs un peu connus" (c'est-à-dire pas comme nous), le SEUL qui arbore à ce jour ce que nous qualifierions de Pensée politique rupturiste, certes sur une problématique bien ciblée (la situation des masses populaires "indigènes intérieures" immigrées de l'Empire néocolonial) mais non sans multiples passerelles vers une approche politique globale du "Système France" ; représentant par conséquent une menace existentielle pour ledit Système s'il venait à fusionner avec le mouvement des masses (ce dont il a pour le moment pu être empêché) ; c'est le PIR.
Ce n'est pas LA Pensée-Guide pour la révolution dans l’État français ; mais si cette Pensée-Guide se construit disons avec des "pierres", c'est là qu'il y en a le plus gros "tas" ; les plus grosses caisses de munitions politiques à ce jour contre l'idéologie républicaine bourgeoise qui est le blindage que nous devons percer pour faire la révolution – et ensuite LOL peut-être qu'en deuxième position il y a SLP, mais en mode "pas connu".
Du coup, il est "intéressant" d'observer ce qu'ils se prennent dans la gueule pour leur faire fermer : c'est là un "échantillon" fascinant de tous les ressorts, toutes les techniques, tous les angles d'attaques possibles et imaginables (et jamais épuisés...) du terrorisme intellectuel anti-politique ; et ce, de fait, totalement dévolu à la "gauche" (y compris la plus "radicale"), la droite ne faisant que reprendre les arguments et se frotter les mains.
Il y a eu la vogue "antisémitisme", "ce sont des Soral soft". Et puis, face à la perte de crédibilité de cet argumentaire, comme de celui (pur et simple) du "racisme à l'envers" (de plus en plus de gens comprenant la notion de pouvoir qu'implique le racisme, et donc l'impossibilité du "racisme anti-blancs"), ça a été la vogue "homophobie" ou "sexisme"-"anti-féminisme" qui se poursuit à ce jour. Là-dessus, face à des positions (quand même) très argumentées à ce sujet lorsqu'on se donne la peine de les lire en entier, ont poussé les procès en "mauvaise articulation classe-race-genre" et "non-intersectionnalité" que nous avons précédemment évoqués (et auxquels ils ont répondu... en démolissant politiquement ces notions par les textes que nous avons cités). Avec une dernière salve en date du début de l'affaire Ramadan (octobre-novembre dernier).
Et puis il y a eu à partir du début de l'année dernière l'offensive "terteriste" : ils étaient "homophobes", "sexistes", "islamistes" et "antisémites", donc en un mot comme les "racailles" des quartiers ; les voilà maintenant trop "bourgeois"-"intellectuels", et "coupés" desdits quartiers. La meilleure étant sans doute que cette offensive a mis à contribution des "anciens du MIB" (Mouvement de l'Immigration et de Banlieues)... qui se mangeaient, au début des années 2000, les mêmes accusations de "racailles islamistes virilistes antisémites" (et parfois de "trop politiques pour la jeunesse des quartiers qui s'en fout").
Ou encore, à partir du milieu de l'année dernière, la démarche d'attiser purement et simplement les contradictions inter-indigènes, en l'occurrence Arabes/Noirs, sur le thème (dont tout le monde semble avoir oublié la spécialité négationniste de droite qu'il était il y a encore 15 ans, pour tenter de minimiser le crime contre l'humanité de la Traite coloniale européenne) de l'esclavagisme arabe-musulman et de la négrophobie qui en découlerait aujourd'hui dans ces pays – réalité historique et problématique actuelle bien réelle, mais bien sûr impossible à placer correctement dans la hiérarchie des Pouvoirs (donc des problèmes) lorsqu'on est anti-politique.
Et pour les gens pas connus, comme nous, essayer d'établir des parallèles entre cet arsenal que nous venons de voir et ce que nous rencontrons dans notre propre expérience politique (face au "milieu" gauchiste), les manœuvres pour nous faire taire, nous discréditer et nous isoler, est toujours saisissant. Pour ne pas dire que c'est du pareil au même... Dans le microcosme où, même si nous voulons nous en arracher, nous sommes et avec lequel nous sommes obligés de traiter en permanence, nous pouvons retrouver à peu près tous les mêmes angles d'attaque.
Dans les "tirs de barrage" contre l'émergence d'un mouvement et d'une Pensée maoïste, le passage de la "mode antisémitisme" à la "mode patriarcat" est presque entièrement retrouvable dans le "passage de témoin" entre les campagnes destructives du 'p''c''mlm' (aujourd'hui lesmatérialistes.com et totalement réac) et celles de Futur Rouge et affiliés.
Tout est bon dès lors que l'on peut discréditer ou simplement pinailler, et TUER LA POLITIQUE (et sa matrice obligée, le débat de fond) dans l’œuf.
La "gauche radicale" apparaît concrètement comme une espèce d'organisme auto-immune contre le "virus" de la politique révolutionnaire : "insultés" par celle-ci, "silenciés" par le matérialisme, "incapacités" par une démarche réellement scientifique ; haineux de l'effort intellectuel requis et préférant se poser en défenseurs des "totems" profanés ; se surajoutant à cela les "paralysés" par la crainte de l'"embrouille toxique" et de croiser le fer des idées justes avec les idées fausses, du matérialisme avec l'opportunisme, bref de la lutte de lignes ; tout finit toujours par s'entre-neutraliser. Si l'on ne veut vraiment pas se casser la tête à "argumenter" (avec des arguments de merde de toute façon), on se contentera de dire en mode plébéien que c'est "imbitable", "bac+23", et rideau.
À quoi bon, pour l’État, investir des moyens, payer des fonctionnaires pour surveiller et arrêter, et ensuite nourrir en taule, une telle non-menace ? Il peut se contenter paisiblement de faire respecter la loi, c'est-à-dire de punir les éventuelles atteintes aux propriétés ou aux personnes. Et pour financer cette armée de mercenaires "radicaux", nul besoin de fonds secrets : si votre analyse politique, brillante, jette une lumière crue sur leur propre nullité, assouvir leur jalousie suffira à les rémunérer.
Pour digresser sur un dernier sujet, cette fusion totale de la "gauche" dans le dispositif de contre-révolution préventive est peut-être ce qui explique que désormais, les forces de gouvernement de celui-ci sont idéalement du "centre", voire de "centre-centre-gauche" (en soulignant encore une fois ici l'expérience française en la matière, celle de la IIIe et même de la IVe République) ; permettant d'y rallier aisément la "gauche", au moment crucial des élections, sous le prétexte de "barrer la route" non seulement à l'extrême-droite mais aussi à la droite conservatrice "dure" (ce qui "ratisse" donc un peu moins largement peut-être, mais dans encore plus de cas).
C'est bien sûr le cas typique de Macron et sa "République en Marche" dans l’État français. Mais même dans le mal dé-franquisé État espagnol, le Parti populaire (PP) en perte de vitesse (déjà rayé de la carte dans la nationalité opprimée la plus remuante en ce moment, la Catalogne) comme son alter ego le P's''o'E sont en train de céder la place à une formation du même acabit (et d'origine catalane), Ciudadanos (ici le parcours et les idées de son fondateur, Albert Rivera, et ici Ciudadanos Ligne_politique de fait c'est parfois presque... postmoderne : "faire en sorte que ni l'origine ethnique, ni la langue, ni le sexe, ni la condition économique de l’individu ne détermine de privilège"). En Italie, il y a eu Renzi. Ni "gauches" réformistes keynésiennes "archaïques", ni droites conservatrices national-étatistes et rances, nous avons là des "centres" promettant de gérer le capitalisme "dans le réalisme" tout en chantant l'"ouverture sur le monde" et sa "modernité" (contrairement donc au "repli nationaliste étroit" catalan...), antiracistes morales, "sans hostilité de principe" aux droits LGBT, "sensibles" à la question environnementale, mettant en avant la parité hommes-femmes et la jeunesse (et le "renouvellement") dans le personnel politique, etc. etc. : hormis le rapport au Grand Capital (ici détendu et favorable, présentant le contraire comme de l'"archaïsme idéologique"), le décalage avec tout ce que nous venons de dire au sujet de la "gauche" "progressiste" morale nous semble absolument... imperceptible ; tout juste peut-être avec un peu plus de "réalisme" (qu'il "faut" pour gouverner).
De toute façon, au niveau d'anti-politique atteint, "gauche", "droite" et "centre" ne peuvent plus être que des notions totalement subjectives fonction de chaque contexte culturel national. Aux Pays-Bas, personne même à la droite de la droite n'est contre le mariage homosexuel ou l'avortement ; tandis que Poutine qui passe ici pour d'extrême-droite (et voit effectivement le FN se reconnaître dans ses positions politiques) se positionne en Russie au... centre voire au centre-gauche de "sa" société, et que si Nétanyahou règne en Israël, c'est qu'il y passe de plus en plus pour un centriste (on pourrait encore citer de même toute une ribambelle de dirigeants, comme Erdogan en Turquie ou sa possible successeuse, Meral Akşener, parfois qualifiée de "Marine Le Pen" ici mais dont la démarche politique est en réalité un savant positionnement au centre de la société turque meral-aksener-vole-vers-le-centre).
De leur côté, les oppositions "de gauche" à ces forces, version vieux réformisme keynésien, semblent avoir évolué sur le modèle de l'autre grande nouveauté politique de ces dernières années, qui vient d'arriver en tête aux élections dans son pays : le "Mouvement 5 Étoiles" italien. C'est le cas typique de la France Insoumise de Mélenchon ou de Podemos dans l’État espagnol : des organisations technofluides, en mode "démocratie directe" internétique qui assure en réalité un plébiscite permanent à un leader charismatique qui fait ce qu'il veut et garde ou vire qui il a envie ; et à l'arrivée, au nom d'"écouter le peuple", de plus en plus poreuses à des positions droitières (notamment en matière d'immigration, mais pas que).
On laissera encore d'un autre côté le cas grec de Syriza, relevant plutôt d'un "macronisme de gauche" (leader jeune et fringant) pour faire finalement, une fois au pouvoir, du macronisme... tout court.
Pour Laclau et Mouffe, idéologues mélenchonistes, l'heure n'est de toute façon plus au clivage "droite"/"gauche" mais à "ceux d'en haut" vs "ceux d'en bas"... et dans les deux cas, on peut donc piocher à "gauche" et à "droite" (ici au sens originel historique : ce qui est réactionnaire et ce qui est émancipateur) au gré du "vent" électoral.
[Il est presque possible de dire, en un sens, qu'il s'agit là de la nouvelle forme d'opportunisme social-démocrate de notre époque : l'"hypothèse social-démocrate" est morte car, comme on l'a déjà dit précédemment, elle est désormais un réformisme sans réformes (le capitalisme actuel ne peut plus connaître les grandes réformes de structure qu'appelait celui de la crise de 1929, et qui seront menées dans les années 1930 à 1960) ; si bien que l'opportunisme politique (opportunisme "droitier", pas gauchiste) qui surfe sur le mouvement réel des masses populaires et leur soif de changement radical ne peut plus s'exprimer sous cette forme. Il le fait donc, désormais, sous cette nouvelle forme laclau-mouffienne de "ni droite ni gauche, en bas vs en haut, peuple vs élites !" qui ouvre effectivement jusqu'à la possibilité de convergences avec l'extrême-droite, étant donné que l'on peut considérer le M5S italien, loin d'en être une "dégénérescence", comme au contraire sa mise en œuvre la plus "aboutie".]
Tout se reconfigure et fusionne en permanence, dans un dispositif toujours plus verrouillé de conservation du Pouvoir par la classe capitaliste, dont seule la "percée" d'une Pensée politique révolutionnaire et d'un Plan Général de Travail pour la mettre en œuvre pourra un jour nous extraire.
[Encore un truc fascinant ! Dans la TOTALE CONTINUITÉ du néo-"progressisme" postmo-intersec que nous venons de voir, Marlène Schiappa (encore elle) schiappa.jpg, dont on ne mesure sans doute pas assez combien elle est un personnage CLÉ du dispositif macronien, est elle aussi sur la ligne anti-politique du "libre choix" (flottant complètement dans les airs, alors que toutes ces questions sont éminemment politiques) en matière de port ou non du voile islamique et de tenue vestimentaire des femmes en général ; question longuement abordée ici : punchlines-politiquement-incorrectes
Mais là, attention hein, avec GROS BÂTON en perspective pour les choix qui ne seraient pas "libres" ! Ce dont seront forcément juges... les autorités, vu que si l'on consulte les concernées, dans 90% des cas la réponse ne sera ni "c'est mon libre choix" ni "je suis contrainte et forcée" mais "c'est la volonté de Dieu"...
En fait, avec Schiappa, les postmos-intersecs sont DÉJÀ au pouvoir. Sauf que, comme le FN avec Collomb et hier Valls ou Sarkozy, ils ne s'en rendent pas compte. Ce qui permet de garder les apparences du pluralisme "démocratique"... En attendant, nos "progressistes" de régime pourront se dédier à œuvrer consciencieusement à "l'année de la libération" en Turquie, par exemple ! turquie-kurdistan-elections-anticipees]
[Et hop (décidément...), encore un "encart" important par rapport à la genèse de ce monde dans lequel on vit, ou plutôt de cette gauche y compris "radicale" si impuissante à le changer qu'elle en est presque devenue, devant les flics et les fascistes, la principale garante de la stabilité : les concepts (appelons-les par leur nom : sociaux-démocrates pseudo-"radicaux", et fondamentalement progressistes au service de l'ordre) d'empowerment et de community organizing.
Concept largement mobilisé de nos jours dans la lutte pour (à peu près) toutes les "minorités" ; concept de "minorités" sur lequel il a (déjà) pu être écrit quelque part que :
Les mots ont un sens SCIENTIFIQUE… Et pas celui que quelques postmos paumés veulent s’amuser à leur donner.
Et « minorité » fait partie de ces mots. Déjà à la base, dans le lexique matérialiste, une minorité c’est national et rien d’autre*.
(* j'ai là voulu faire court, mais bien évidemment : OU CONFESSIONNEL, si les gens sont une même nation sur les critères de langue etc. et que c'est la religion qui va servir à délimiter le groupe social opprimé, surexploité, soumis à un "spatial fix permanent")
Ça n’a jamais été employé pour les classes par exemple, et pour cause : si une classe est minoritaire, c’est à peu près sûr qu’elle domine. Le discours de lutte des classes ça a toujours été de s’en PRENDRE à une minorité (oh la pôv petite minorité…), celle des exploiteurs.
Une minorité nationale c’est quand on n'est pas dans le schéma classique d’une nation qui « fait bloc » sur son territoire national… et qui peut tout à fait comme ça être opprimée, colonisée etc. (ça n’a RIEN À VOIR) ; mais de petites enclaves nationalitaires éparpillées, ou carrément des individus dispersés sans véritable territoire défini (des immigrés par exemple, même si souvent ils vont avoir leurs quartiers attitrés), au milieu d’une nation plus grande qui forcément va tendre à dominer, qui contrôle l’État etc.
Ce qui forcément va amener un traitement politique différent, puisque la solution ne peut pas être tout simplement la libération (par séparation politique, indépendance) de la nation opprimée. Voilà pourquoi à une époque on a commencé à parler des minorités nationales.
Et au demeurant ce n’est en aucun cas synonyme d’être opprimé, puisqu’il arrive dans X cas que l’oppresseur, colon etc. soit en minorité dans le pays, comme les Blancs en Afrique du Sud, au Maghreb hier, ou encore en Kanaky (les Kanaks sont minoritaires mais les Blancs aussi, au milieu il y a des travailleurs immigrés océaniens ou asiatiques). Oh les pôv petites minorités ! D’ailleurs quand ça commence à tourner au vinaigre, ils nous font des trémolos sur ce registre, et qui oserait contester le « ressenti » de ces « premiers concernés » ? Pour réclamer leurs « droits », ou leur petit bout de territoire qu’ils ont au départ à 100% volé, leur Volkstaat (la Province Sud en Kanaky)…
Bref, une minorité nationale entendue au sens scientifique peut tout à fait être le groupe social oppresseur sur un territoire donné.
Ou alors, ne pas être exactement le « corps légitime de la nation » mais pas non plus opprimée ; comme en effet, si je vais en Angleterre, pays des Anglais, j’y ferai partie d’une minorité nationale étrangère, la communauté française qui à moins que j’aie loupé un gros épisode n’est pas majoritaire là-bas ; je ne pourrai pas voter pour les gens qui votent les lois auxquelles je devrai obéir, mais bon, mon « oppression » s’arrêtera là…
Quant à parler de minorités dans le domaine du genre, c’est beaucoup plus récent et si ça fait évidemment sens pour les homosexuel.le.s et les trans, ça n’en fait bien sûr strictement aucun pour les femmes, qui sont plus nombreuses que les hommes. Mais qui pour autant, sont opprimées par le patriarcat ; montrant encore que ça n’a rien à voir.
La confusions qui a pu s’installer à ce sujet, c’est que les luttes féministes ont souvent dénoncé la « minorisation » des femmes. Sauf que « minorisation » se rattache ici au statut JURIDIQUE de MINEURS, comme les mineurs de moins de 18 ans quoi. Ne pas pouvoir voter par exemple. Ou disposer librement de son argent. Ce qu’on appelait la « minorité à vie ».
Bref. On pourra m’opposer toute la littérature qu’on voudra, mais ce sera de la littérature postmoderne.
Faire de « minorités » le synonyme de « groupes opprimés » c’est de la novlangue postmoderne, et c’est antiscientifique. Normal puisque le postmodernisme a pour seule vocation depuis 40 ans d’assassiner le matérialisme scientifique et politique.
Parler de « minorité » ça sert tout bonnement, dans le postmodernisme toujours égal à lui-même, à évacuer la Question du Pouvoir qui se cache derrière l’oppression.
Si cette terminologie erronée s'est développée, c'est pour une bonne et simple raison : c'est parce que dans la logique anglo-saxonne qui sous-tend l'affaire, "minorité" est le terme qui va automatiquement de pair avec affirmative action, empowerment, conquête économiste de "droits" et de "visibilité" (jusqu'à la Maison Blanche, de fait... pour la belle jambe que ça fasse aux Afghans, Pakistanais des zones tribales, Libyens, Syriens et Irakiens etc.).
Autrement dit tout ce qui s'est érigé comme dispositif réformiste anti-révolutionnaire sur les ruines des mouvements révolutionnaires de libération nationale/raciale anéantis par COINTELPRO.
C'est ça la réalité historique de cette équation antiscientifique "minorité" = "groupe social opprimé". Une montée en puissance parallèle à celle de ce dispositif.
(Je rajouterai ici en annexe, car il est tout simplement grandiose, ce passage de Sadri Khiari que le camarade Mehdi Meftah a porté à ma connaissance :
« La domination coloniale n’a été qu’une parenthèse, nous dit-on, qui fait partie de l’histoire. Vous n’existez pas comme races dominées, dont les actions produisent un rapport de forces, mais comme une foison de minorités et de « catégories sociales » ayant des attentes très singulières, propres à chacune d’entre elles.
Si, du côté de l’État et des forces politiques gouvernementales, ce dire relève le plus souvent de la plus parfaite hypocrisie, du côté des forces blanches antiracistes la cécité républicaine aboutit à la même conclusion: il n’existe pas de conflit de races mais des causes particulières, plus ou moins légitimes, aux différentes communautés ou aux différents groupes sociaux, sans rapports les unes avec les autres. Les plus sympathiques d’entre eux, du moins ceux qui ne réduisent pas tout à la question socio-économique, nous proposent une stupide « convergence des minorités », comme si le clivage politique opposait, à une majorité « normée », des minorités « hors normes ».
Vouloir faire de nos luttes une simple dimension d’un des autres clivages qui traversent la société constitue l’une des armes qui sont employées – naïvement ou cyniquement, peu importe – par les forces blanches pour nous interdire de percevoir l’unité de la condition de colonisé et la convergence fondamentale de nos dynamiques de résistance.
Elle interdit de penser la Puissance indigène. Chaque groupe indigène, convaincu de mener la lutte tout seul, autour de ses seuls objectifs, devient aveugle à la réalité raciale d’ensemble dont il fait partie ; il ne peut évaluer les rapports de forces et sa propre puissance qu’à partir de sa situation exclusive, petite minorité nationale, culturelle ou «territoriale », noyée parmi un million d’autres minorités, en apparence tout aussi impuissantes.
En appréhendant nos luttes dans une perspective postcoloniale et raciale, une autre réalité apparaît, en l’occurrence l’unité profonde de la logique sociale et politique de ces luttes, le fait que le mouvement d’ensemble de ces résistances procède d’une même logique d’opposition à la domination blanche et constitue une totalité : la Puissance politique indigène. »
Sadri Khiari
Et puis pourquoi ne pas citer tout simplement... le grand Malcolm X : « étant donné que les opprimés constituent la majorité et non la minorité sur cette terre, nous serons à même d’envisager notre problème en majorité capable de revendiquer et non plus en minorité réduite à la mendicité » !!!)
Ces concepts d'empowerment et de community organizing sont intrinsèquement liés à leur initiateur, Saul Alinsky.
Sur lequel (si l'on se donne la peine d'aller consulter son article Wikipédia dédié) on peut lire que :
"Il participe à la fondation d'un grand nombre d'organisations aux États-Unis. Il s'inspire du syndicalisme grâce à sa proximité avec le célèbre syndicaliste américain John L. Lewis, président du Congress of Industrial Organizations"... le CIO, hem hem. Gros, gros syndicat américain de régime au service de la lutte anticommuniste pendant la Guerre froide (ici, il fournira des fonds pour lancer FO contre la CGT).
Mais surtout : "Il entretiendra une amitié avec le philosophe français Jacques Maritain." (...) "Saul Alinsky entretiendra une longue correspondance avec le philosophe français Jacques Maritain du début des années 1940 jusqu'au début des années 1970."
Maritain, ça ne vous dit rien ? Comme source d'inspiration, véritable philosophe de chevet en fait, de quelqu'un de bien connu en ce moment ?
Maritain est, tout simplement, une source d'inspiration majeure du "progressisme" d'Emmanuel Macron.
En plus qu'Alinsky l'ait été directement pour Barack Obama, entre autres.
Mais pas que, cela dit : "En 2017, la méthode Alinsky est mise à l'honneur lors de l'université d'été de la France insoumise, qui y voit un moyen de ramener à la politique les quartiers populaires largement abstentionnistes"... pour quoi faire, sinon les soutenir et voter pour eux, et capituler toute autonomie politique dans la lutte contre le colonialisme intérieur, au profit d'une resucée du mitterrandisme de 1981 ?
Selon Alinsky lui-même, "Le Prince fut écrit par Machiavel pour les nantis, pour leur permettre de conserver le pouvoir. Rules for Radicals (son principal ouvrage) est écrit pour ceux qui n'ont rien, pour leur permettre de prendre le pouvoir aux nantis."
Voilà qui peut sembler de prime abord plaisant... sauf que "ceux qui n'ont rien" ne l'ont pas attendu pour avoir des méthodes de "prise de pouvoir aux nantis". Les gens qui inventent l'eau tiède comme ça, c'est toujours à prendre avec des pincettes. Quelle nouveauté "révolutionnaire" sont-ils censés apporter après des centaines de révolutionnaires (pas seulement un certain Vladimir Illitch) à travers le monde durant des siècles avant eux ?
À une époque où, bizarrement, des Black Panthers, des Carmichael, des César Chávez et des Robert F. Williams "organizaient" très bien leur "community" sans besoin de ses lumières...
De fait, oui, César Chávez a travaillé à une époque (dans un premier temps) avec Alinsky revue-vie-sociale-2012-2-page-111.htm, mais il "rompra avec lui au début des années 60 car celui-ci n’était pas d’accord pour que l’organisation se transforme en syndicat des travailleurs agricoles. Chavez fonda donc ce syndicat. Il sera célèbre pour avoir organisé un boycott du raisin aux États-Unis afin d’obtenir qu’on cesse d’employer des pesticides dangereux."
Waouh ! Donc "organizer" oui, mais pas pour que ça se transforme en organisation concrète de lutte !! Bravo !
Quant au sous-titre de "Rules for Radicals", c'est "Manuel pragmatique pour radicaux RÉALISTES"...
Tout cela ne sent, en fait, pas bon du tout.
Et pour cause : il n'y a guère besoin de plus d'évidences pour voir que nous sommes là face à un dispositif fondamental de désarmement et de liquidation des luttes ; ces grandes luttes des années 1960 dans le contexte desquelles il a émergé, et sur les ruines du reflux desquelles il a ensuite fleuri, entre "intersectionnalité" à sa gauche et "affirmative action" à sa droite. C'est POUR CELA (dès l'après-guerre en fait, dans le contexte de la Guerre froide) que le concept a été lancé et poussé en avant, et pas pour autre chose.
Ce n'est pas, encore une fois, un concept "intéressant et utile à la base" qui aurait "mal tourné", mais bien une arme "progressiste au service de l'ordre" de destruction massive des luttes, qui doit être combattue.]
[Autre exemple de gauchisme de contre-révolution préventive (par une personne très certainement sincère, mais sous catastrophique influence de ces idéologies à la con) : "la violence révolutionnaire (indispensable à la révolution...), c'est viriliste"...
...]
À suivre : La mise à mort de l'internationalisme prolétarien