• Turquie : quels que soient les résultats réels...


    ... (et avec les fraudes qu'il y a eu, allez les connaître !), les cartes des résultats montrent quoi qu'il en soit et très clairement trois TurquieS :

    - La marmaro-égéenne "turque blanche" à l'Ouest... nettement submergée toutefois, autour d'Istanbul (Marmara), par l'immigration anatolienne pro-Erdogan ; mais toujours bien implantée en Égée et en Thrace (Turquie d'Europe) où les rapatriés des Balkans ont remplacé les Grecs chassés dans les années 1920 ; et qui a placé en tête le candidat kémaliste Muharrem Ince (ainsi que le Dersim-"Tunceli" alévi et historiquement kémaliste à la présidentielle, le candidat HDP Demirtaş y réalisant le score honorable mais néanmoins très inférieur de 21%, en revanche le HDP rafle largement la mise aux législatives avec 51%) ;

    - L'anatolienne donc, "turque noire", sur les 3/4 du pays en jaune, pro-AKP ;

    - Et enfin la kurdo-alévie au Sud-Est (Bakur et Dersim), en violet, pro-HDP.

    La première et la troisième sont en guerre contre la seconde (Muharrem Ince ayant été ouvertement choisi par le CHP comme symbole de cette alliance, ayant refusé de voter la levée de l'immunité des députés HDP en 2016) ; ce qui est un MONUMENT D'OPPORTUNISME au regard de la grande histoire révolutionnaire du Sud-Est, entre Guerre populaire communiste et lutte de libération kurde, grande et tragique sous la répression sanguinaire de la Turquie "blanche" moderniste (kémaliste) durant 80 ans kaypakkaya-kemalisme.pdf ; la Turquie "noire" étant alors son exécutrice de basses œuvres fermement encadrée par la grande propriété et les partis de Demirel puis Özal (et le MHP, les "Loups Gris" désormais alliés capitaux d'Erdogan), avant de prendre son envol solitaire et son "indépendance" avec la victoire de l'AKP en 2002, aboutissement de 30 ans de lutte de Necmettin Erbakan... qu-est-ce-que-l-akp

    Les élections ne sont qu'un aspect possible de cette guerre, qui en trouvera d'autres dès lors qu'il s'est avéré impossible de dégager le désormais omnipotent Erdogan par cette voie et que son challenger Ince n'a pas voulu assumer, ou pas "senti" le rapport de force pour lancer une contestation "révolution colorée" des résultats, aussi entachés de fraude soient-ils muharrem-ince-reconnait-sa-defaite.

    [L'on pourrait peut-être y voir ce qu'un camarade marxiste-léniniste évoquait le mois dernier, au sujet cette fois des élections au Venezuela : les forces impérialistes et locales hostiles au régime ne cherchaient peut-être tout simplement pas la victoire par le biais de ces élections - "Ils ne présentaient aucune candidature à la hauteur de Maduro, la victoire de ce dernier fait donc paradoxalement partie tant de la stratégie du mouvement révolutionnaire que du mouvement réactionnaire. La suite de la part de ce dernier est le déclenchement d'un soulèvement et potentiellement d'une guerre civile avec intervention militaire impérialiste pour détruire le mouvement révolutionnaire" (traduire ici : le mouvement nationaliste religieux "centrifuge" vis-à-vis de l'Occident qu'est l'alliance AKP-MHP) analyse-militant-ml-venezuela]

    [(ou alors) DE FAIT :

    - Ce qui a déjoué certes nos prévisions, mais surtout TOUT LE PLAN de l'impérialisme, c'est que le CHP ait finalement décidé de propulser Ince comme candidat.

    - Le CHP ne devait initialement MÊME PAS présenter de candidat ; jugeant que "le président ne doit pas être un chef de parti"... (https://www.zonebourse.com/actualite-bourse/Erdogan-lance-officieusement-sa-campagne-electorale-en-Turquie--26452115/)

    Dans une telle configuration, une part conséquente des électeurs qui ont ici voté Ince auraient sans doute porté Demirtaş à un score de 14 ou 15% (au lieu de 8,4%), en tant que seul candidat réellement "de gauche"... mais le reste aurait voté Akşener, qui aurait donc réalisé la trentaine de % qu'a finalement obtenu Ince.

    Et elle, elle aurait sans le moindre doute osé déclencher un Maïdan contre la confiscation frauduleuse du 2d tour (l'idée étant évidemment celle-là : pas de battre ni même d'arriver devant Erdogan au premier tour - impossible même sans fraude de sa part - mais simplement en position de l'affronter lors d'un second et de dénoncer la fraude faisant qu'il n'y en ait pas, ou qu'il y en ait effectivement un et dénoncer sa victoire forcément "frauduleuse" à ce moment-là). C'était de toute façon elle le véritable "cheval" de l'Occident pour prendre le pouvoir ; elle qui était programmée pour ça et avait les subsides occidentaux dans ce but (pas Ince, ce qui l'a sans doute découragé d'aller au choc). 

    - Mais voilà, avec 7,3% des voix (en réalité) au final, elle était évidemment en position beaucoup trop faible pour cela. Pour que le plan fonctionne comme il était censé fonctionner, il lui fallait être en deuxième position, être celle qui devait affronter Erdogan au 2d tour qu'Erdogan confisquait (ou qu'il y ait un 2d tour et qu'il truque sa victoire à ce moment-là, ce qui revenait au même).C

    C'est Ince qui s'est retrouvé dans cette position, et il s'est sans doute dit qu'il n'avait pas les forces pour déclencher une guerre civile (notamment la capacité de se rallier une partie de l'armée, en tant que kémaliste trop à gauche, et sans doute pas non plus la préférence des Occidentaux).]

    Marqué par une politique "orientaliste" (ou "asiatiste") depuis le début, et encore plus depuis le claquage de porte au nez par l'Union européenne dans la seconde moitié des années 2000, Erdogan, après la brouille évidente dûe à son engagement en Syrie contre le régime d'Assad, vient de retrouver une place nette dans un camp impérialiste en recevant ses premières félicitations de Vladimir Poutine lui-même et de tout ce que la planète peut compter de pro-impérialisme russe : Viktor Orban (Hongrie), Nicolas Maduro (Venezuela), le régime iranien etc.

    [Concrètement tout le monde a fini par le féliciter, c'est ce qui s'appelle la diplomatie ; mais des institutions comme la Commission européenne (UE), l'OSCE et le Conseil de l'Europe ont émis à mots de velours des "réserves" quant à la régularité du scrutin et l’État de droit en général dans le pays ; ce qui revient à dire que Macron ("en même temps"), Merkel etc. etc. peuvent s'abriter derrière ces prises de position qu'ils n'ont pas eu à prendre eux-même - "chacun à sa place" - et le féliciter "chaleureusement" eux aussi ; la Grande-Bretagne de Theresa May et du Brexit a émis des félicitations pouvant peut-être être considérées un peu plus enthousiastes et sincères, c'est à voir ; le Secrétaire Général de l'OTAN a lui aussi félicité le chef de la deuxième armée de l'Alliance mais en insistant tout de même là encore sur "la démocratie et l’État de droit", toutes choses à mettre - aussi - en perspective avec le récent modus vivendi obtenu sur le secteur de Manbij en Syrie au sens, sans doute, de "garantie" temporaire - du moins - qu'Erdogan cessera de revendiquer le reste de Rojava ; et il en va - donc - sans doute de même pour Trump qui a finalement adressé ses félicitations après que toutefois, le jour des résultats, sa porte-parole Sarah Sanders ait "exhorté" la Turquie à "prendre des mesures pour renforcer la démocratie et résoudre les problèmes bilatéraux" entre les deux pays, sur fond de lourde crise pour ne pas dire guerre économique de Washington contre son turbulent "partenaire" ; etc. etc., bref, le récap complet ici : reactions-reelection-erdogan.pdf].

    Dans la contradiction inter-impérialiste qui est le troisième moteur de l'histoire contemporaine avec la lutte des classes et la lutte des peuples et nations dominées contre l'impérialisme, le bloc occidental-atlantique ne compte certainement pas en rester là ; pour reprendre le plein contrôle de ce pays pivot stratégique de tout temps.

    Puissent les forces révolutionnaires, communistes, qui ont dans toute l'Anatolie et le Kurdistan du Nord (Bakur) une longue et glorieuse histoire de luttes, vaincre l'opportunisme liquidateur et ne pas s'engager en lamentables Jules Guesde, en tristes tirailleurs dans cette guerre qui n'est pas celle des peuples ; mais trouver au contraire les clés pour la transformer en la seule qui vaille, la guerre révolutionnaire contre le monde capitaliste et impérialiste !

     

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