• Retour sur les cantonales : des signaux déterminants pour l'avenir


    Jusqu’à présent, SLP ne s’était pas trop exprimé sur les fameux « sondages exclusifs » donnant Marine Le Pen en tête du 1er tour de la présidentielle 2012. Pour deux principales raisons :

    - d’abord, ce ne sont que des sondages, donc des manipulations médiatiques par des entreprises privées payées pour remplir une commande ; par exemple pour justifier une « droitisation » de la politique UMP, ou encore pour imposer Strauss-Kahn comme candidat « socialiste »…

    - ensuite, il n’y a là rien de surprenant à ce que le FN, en s’alignant sur les thèmes et discours de ses homologues des « droites populistes » européennes (c’est à dire, sur les exigences de la bourgeoisie la plus réactionnaire !), rejoigne le même type de scores électoraux. Pour SLP, il a toujours été évident que ce n’était pas en allant sur des thèmes néo-nazis, national-révolutionnaires, ou tiers-mondistes et antisionistes que le FN monterait dans la mobilisation de masse. Il n’y a que pour ceux qui se sont accrochés à cette thèse, que les scores annoncés de Le Pen fille pouvaient éventuellement être une surprise…

    Bref, WAIT AND SEE, telle était la ligne de conduite. Wait… notamment les élections cantonales. Voyons donc ensemble les résultats :

    Avec 25% des suffrages exprimés, le Parti « socialiste » confirme sa position d’alternative (momentanée) pour 2012, encore que… il confirme surtout son emprise, affirmée depuis 2004, sur les élections locales ; la fameuse « cohabitation verticale » que semble plébisciter le « français moyen » : à la « gauche » la gestion locale, la proximité et les milliers de petits avantages sociaux (réductions pour les transports etc.) ; à la droite les choses « sérieuses », la sécurité, l’économie, la politique internationale… Depuis 7 ans, la classe dominante hexagonale semble se satisfaire de ce partage des rôles, dans son théâtre de  marionnettes politicien.

    Avec respectivement 8,9% et 8,2%, le Front de Gauche et Europe Ecologie s’ancrent dans le paysage électoral tricolore ; les premiers dans la petite classe moyenne laborieuse et l’aristocratie ouvrière, ainsi que le prolétariat qui « y croit encore », les seconds dans les classes moyennes éduquées et « bobo » des centres-villes. En Limousin, où l’alliance avec le NPA a été maintenue, le Front de Gauche a même atteint des scores de 33% dans certaines circonscriptions (Bellac), confirmant le terreau culturel progressiste du pays de Georges Guingouin.

    Le résultat le plus marquant, et déterminant pour l’avenir, c’est l’inversion du rapport de force à droite. L’UMP termine la course à 17%, confirmant sa situation de crise ; et le FN à 15%. Même si avec la très forte abstention (55% !) on pouvait redouter plus, c’est le meilleur score de son histoire à de telles élections, traditionnellement décalées de sa culture tribunicienne et personnalisée.

    1243576 caretfranceIl y a 5 triangulaires mais surtout, fait sans précédent, le FN est seul face à l’UMP ou au PS dans… 394 cantons sur 2023 en jeu ! De quoi donner le vertige (et pourtant, on n’entend pas le quart des cris d’orfraie que l'on entendait quand le FN faisait 15%, à la présidentielle, dans les années 90 !). Et, en même temps, rien que de totalement prévisible… Tout additionné (du Modem à Lutte Ouvrière pour la « gauche » et du Nouveau Centre au FN pour la « droite »), les rapports de force « gauche-droite » restent globalement stables. Mais l’électorat UMP se vide au profit du parti de Marine Le Pen. C’est, certes, le résultat du réalignement du Front sur la « norme » des extrême-droites européennes. Mais pas seulement : c’est aussi le résultat d’un mouvement de fond. C’est le résultat d’un glissement général vers la droite de cette petite-bourgeoisie culturelle qu’est l’électorat hexagonal, le « peuple citoyen » ; dont le prolétariat le plus avancé et conscient ne fait pas partie : ce sont les personnes qui croient encore à l’Etat bourgeois et à ses institutions. Ce sont ce que les commentateurs bourgeois appelent la "société civile", "l'opinion publique" ou encore "les classes moyennes", entre les "exclus", les "précaires" et autres "publics en difficulté" (le noyau dur du prolétariat), et la grande bourgeoisie qui vit dans une autre dimension (les "élites")... Bien sûr, ce n'est pas cette petite-bourgeoisie culturelle qui "fait" la politique : c'est la classe dominante, la bourgeoisie monopoliste, impérialiste. Mais elle baigne totalement dans l'hégémonie intellectuelle de la bourgeoisie impérialiste... Qu'elle se veuille "de droite" ou (de moins en moins) "de gauche", ou "un peu des deux". C'est le phénomène de submersion de la société "citoyenne" dans le capitalisme monopoliste, phénomène qui caractérise les pays impérialistes les plus avancés.

    Un glissement à droite qui se poursuit, donc, comme tendance de fond depuis les années 80, soit (avec un décalage de 10 ans) depuis la seconde crise générale du capitalisme. Si inattendu il y a dans la situation actuelle, c’est que la phase terminale de la crise, depuis fin 2008, a accéléré le processus. En 2007, tous les commentateurs petits-bourgeois de la politique s’étaient tantôt réjouis, tantôt alarmés de ce que Sarkozy avait « siphonné » les voix du FN. En réalité, face à un Chirac dépassé par l’évolution historique, et face à un Le Pen lui aussi usé et parti (derrière Soral) chasser sur les terres des « quartiers » (très éloignées de son électorat traditionnel), Sarkozy avait su trouver le discours adéquat à l’état de droitisation idéologique du « citoyen » bleu-blanc-rouge... c'est à dire, aux besoins de la bourgeoisie impérialiste. À cette époque, on pouvait légitimement imaginer Sarko au pouvoir pour 10 ans, deux quinquennats facile. Mais aujourd’hui, une crise économique mondiale plus loin, Sarkozy (a fortiori avec sa volonté d’ouverture à gauche, de 'modernité' dans le style etc.) se retrouve trop à gauche pour ceux qui avaient voté (et fait voter) pour lui en 2007…

    Le « peuple de droite » se tourne à nouveau vers le FN, dans des proportions doubles ou triples de ce que Sarkozy avait pu « siphonner » en 2007. Et cela tombe bien : le programme du FN, rénové, est de plus en plus proche des attentes de la bourgeoisie monopoliste la plus réactionnaire sur tous les plans (en politique intérieure comme internationale).

    Le « peuple de gauche », lui, est constitué des classes moyennes plus urbaines et diplômées, nettement plus en moyenne que le « peuple de droite » (cela dit, avec un CAP recherché, à 25 ans on peut avoir son pavillon et sa voiture perso, bref son confort petit-bourgeois, ce qui n’est pas le cas d’un étudiant du même âge). En 2007, ce « peuple de gauche » s’était réparti entre une « socialiste » qui voulait parquer les « jeunes à problèmes » dans des camps militaires et… un démocrate-chrétien repeint en orange comme une révolution ukrainienne, et finalement peut-être plus à « gauche » que la précédente. En 2012, il s’apprête à voter massivement pour l’actuel directeur du FMI. Certains s’éparpillant peut-être, au premier tour, du côté des écolos ou du NPA…

    La frange restée progressiste de l’aristocratie ouvrière et des autres classes laborieuses (employés etc.), quant à elle, se retrouve plutôt dans le Front de Gauche, et l’extrémité la plus radicale dans LO.

    À la crise de l’UMP, les résultats des cantonales ont encore rajouté une couche, et pas des moindres : la question de la position à adopter en cas de 2e tour PS-FN. Et, là encore, le tournant est d’une grande importance. Sarkozy et Copé n’ont pas donné de consigne claire de vote « républicain » (pour le PS) au 2e tour. Les positions divergentes (Fillon, Borloo, Pécresse, les centristes etc.) ont afflué depuis, mais l’événement est là, aussi important pour l’avenir que le score du FN lui-même.

    Depuis la fin des années 80, il y avait deux principes chiraquiens intangibles dans la droite dite « républicaine » : jamais d’alliance avec le Front National (principe enfreint en 1998, mais par des présidents de région UDF) ; et, en cas de duel gauche-FN au second tour, front républicain c’est à dire appel clair à voter pour la gauche contre l’extrême-droite (la gauche en faisant autant dans l’hypothèse inverse). Voire, parfois, en cas de triangulaire, désistement pour le candidat le mieux placé entre la droite et la gauche…

    Sarkozy et Copé ont ouvert une première brèche dans un de ces principes, celui du « front républicain ». Autant dire que celui-ci sera mort et enterré pour 2012, aussi bien à la présidentielle (en cas de 2e tour DSK / Le Pen) qu’aux législatives qui suivront. Quant au principe de jamais d’alliance, il n’en a plus que pour quelques années… il sera peut-être définitivement enterré en 2017.

    Les choses risquent fort de se passer de la manière suivante : en 2012, le FN sera encore trop faible et surtout, trop isolé pour gagner s’il arrive au 2e tour. L’hypothèse d’une victoire de la gauche bourgeoise avec DSK se précise. Il est probable, on l’a dit, que la droite UMP n’appelle pas, ou alors avec des hésitations flagrantes, à voter pour le candidat de la « gauche ». En revanche, il est certain que toute la gauche « radicale », Front de Gauche, NPA et LO, y appelleront sans hésiter… et y gagneront quelques strapontins, qu’ils présenteront comme des « aiguillons » pour la politique de l’ancien directeur du FMI. Mais ils n’aiguillonneront rien car, comme tout marxiste le sait, ce n’est pas à l’intérieur des institutions de la bourgeoisie que l’on apporte le moindre début de solution à une crise économique telle que celle que nous traversons. Durant tout ce temps, le FN (porte-parole de la réaction absolue) sera l’épicentre du débat politique bourgeois, son chef d’orchestre, dans une véritable hégémonie intellectuelle. Et en 2017… c’est une social-démocratie complètement discréditée (partant déjà avec peu d’illusions au départ…) qui affrontera un peuple de droite grossi de nouveaux déçus, et une UMP et un FN… où l’idée d’alliance aura fait son chemin. Après tout, cette alliance est déjà la norme dans la plupart des « démocraties » européennes ! Le FN sait qu’il n’arrivera jamais au pouvoir tout seul, sans alliance, sans (au moins) un appel de la droite « républicaine » (au moins d’une partie) à voter pour lui... Et l’UMP saura peut-être, à ce moment-là, qu’elle ne battra plus jamais la "gauche" sans l’appui du FN. « Chacun aura fait la moitié du chemin vers l’autre », comme l’a fort bien dit un social-démocrate d’Europe Ecologie…

    Cela, c’est dans 6 ans. Nous avons 6 ans pour nous préparer, pour construire le Parti, le Front et l’Armée du Peuple qui mènera la résistance à la dictature terroriste ouverte des éléments les plus réactionnaires, les plus chauvins, les plus impérialistes de la bourgeoisie des monopoles.

    Où sont nos forces ? Elles sont d’abord en dehors du « peuple citoyen », de ces masses populaires culturellement petites-bourgeoises, qui croient encore aux institutions républicaines bourgeoises. Autrement dit dans l’abstention, qui grandit à chaque échéance électorale… mais attention ! Un abstentionniste n’égale pas un révolutionnaire : il y a une abstention de désespoir, d’amertume, de résignation. Il y a une abstention qui sert de « transit » entre la social-démocratie et la droite, ou entre la droite (ou directement la social-démocratie !) et l’extrême-droite fasciste. C’est le rôle des communistes, si peu nombreux soient-ils, de mener la bataille idéologique et militante, pour détourner ces gens de l’apathie et/ou du désespoir réactionnaires, pour transformer le ras-le-bol et la défiance envers la « démocratie » bourgeoise en conscience et en énergie révolutionnaire.

    Ensuite, il y a ceux et celles qui, considérant l’abstention comme du défaitisme, votent pour la gauche « radicale » (FdG, NPA, LO, candidatures « alternatives ») comme le « plus à gauche », mais sans se faire beaucoup d’illusions. Ils/elles sont très nombreux-ses ! Rien n’est plus profondément débile que le mépris de l’électorat réformiste radical… Les réformistes conscients, assumés, idéologiques ne sont pas majoritaires, d’autant moins que l’on s’éloigne des bobos pour aller vers le prolétariat. Dans certains quartiers prolétaires, il y a mêmes des personnes qui votent PS dès le premier tour, pour « faire barrage à la droite et aux fachos », sans se faire la moindre illusion, mais comme un « moindre mal ». Là encore, les communistes doivent tourner vers eux/elles leur travail politique, pour les arracher au raisonnement du « moindre mal » et du « plus à gauche », et les guider vers la transformation révolutionnaire de la société. Ils doivent, en particulier, se tenir à la réception des désillusions vis-à-vis de la politique réformiste bourgeoise qui s’annonce (très probablement) pour 2012-2017.

    Avec les plus avancé-e-s, éventuellement après formation, se construira le Parti. Avec les autres, dès lors qu’ils sont antifascistes, anticapitalistes, internationalistes, antisexistes, antiracistes etc., pourra se construire le Front (qui pourra ensuite, en « traînant » les directions et les couches socialement plus « moyennes », amener des alliances tactiques d’organisations ; mais il se construit d’abord à la base). Partout où se trouvent des communistes, ils doivent mener ce travail. Il est évident que là où existe un terreau progressiste (comme ce canton du Limousin à 33% FdG-NPA), ce travail sera plus facile que sur un terreau réactionnaire travaillé depuis 30 ans par le FN et la droite « républicaine » ; mais les progressistes (révolutionnaires potentiels) de ces secteurs ne doivent pas être abandonnés à leur sort, déjà d’un point de vue défensif (on pense notamment au travail antifasciste des camarades JCML dans la région viennoise).

    Quelles que soient les épreuves qui s’annoncent, il ne faut pas oublier que le capitalisme creuse sa propre tombe. L’avenir, la VICTOIRE nous appartiennent ! Il suffit d’être tous entiers tournés vers ce but. Et non (par exemple…) vers des petites satisfactions d’ego, mères du sectarisme, du dogmatisme livresque et des controverses stériles : avant d’excommunier, il faut déjà être capables de convaincre.


    VICTOIRE AU PEUPLE !

    LE CAMP DU PEUPLE EST NOTRE CAMP !

    VIVE LA REVOLUTION PROLETARIENNE ET POPULAIRE !

    partisans


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