• La "démocratie réelle", ça existe ? (sur le mouvement des "Indignad@s", 2011)

     

    Cela dépend d'où l'on se trouve. Dans les pays dominés par l'impérialisme (semi-colonies, néo-colonies...), la réponse va de soi. La "démocratie" qu'il est de bon ton d'arborer depuis les années 1980 (Fin de l'Histoire) n'y est qu'une pure mascarade, même pour le plus bourgeois des démocrates bourgeois de chez nous (type lecteur de Libé). Le suffrage "universel" se limite à la collecte des bulletins de vote par les potentats locaux, à coup de largesses matérielles, de promesses mais également, si nécessaire, à coups de bâtons. Ceux qui se dressent contre l'ordre établi son jetés au cachot sous un prétexte quelconque, ou disparaissent un jour au coin de la rue pour ne jamais reparaître... D'une manière générale, la préoccupation des masses est la survie, pas la politique.

    Allez au Guatemala, au Congo ou au Bangladesh, vous retrouverez partout cette même réalité. Cette damnation terrestre, qui pousse chaque année des centaines de milliers de personnes vers le Rio Grande, Gibraltar ou Lampedusa, est la condition, la base sur laquelle reposent NOS sociétés "démocratiques", de "droit" et de "confort" capitaliste. Europe, Amérique du Nord ou Japon : nous sommes finalement (au terme d'un processus que pouvait déjà entrevoir Lénine en 1916...) des cités grecques, avec leurs citoyens, entourées de hilotes affamés et exploités. De temps à autres, comme au bon vieux temps de Sparte, une chasse aux hilotes est ouverte : Grenade, Panama, Irak, Afghanistan, Tchad, Côte d'Ivoire, Libye...

    Dans ces pays, donc, la lutte pour la démocratie telle que nous l'entendons est déjà, en tant que telle, subversive. Accomplir les tâches de la révolution démocratique bourgeoise est la première étape de la Révolution populaire vers le socialisme.

    La simple victoire d'un candidat hors-système (Chavez, Evo Morales) est déjà une grande subversion, souvent l'aboutissement de grandes luttes populaires, même si ensuite le "système", l'oligarchie, se reforme au sein de la bourgeoisie nationale réformiste (qui se vend à nouveau à l'impérialisme : c'est le "mouvement naturel" du réformisme national-bourgeois, que seule la Guerre populaire peut enrayer pour amener la vraie révolution).

    Mais qu'en est-il sous nos latitudes, dans nos métropoles impérialistes ?

    Et bien, dans un sens, on peut dire aussi que la démocratie idéale telle que nous la définissent, depuis l'école, nos curés de campagne de la "gauche" républicaine bourgeoise, reste un vain mot. Ses idéaux d'égalité de tou-te-s devant la loi et les institutions, de possibilité de tou-te-s de s'exprimer et de décider dans la vie collective, sont en contradiction permanente avec la propriété privée capitaliste des moyens de production et l'appropriation privée de la plus-value du travail, bref, avec les intérêts et l'instinct de survie d'une classe : la bourgeoisie, et avec son Etat (ensemble d'institutions, de rapports juridiques, sociaux et territoriaux).

    De plus, à mesure que le capitalisme s'enfonce dans la crise générale :

    - il exige de la force de travail (les masses travailleuses) une productivité maximale, et cherche donc à modeler la société à son image ; ainsi qu'à reprendre les conquêtes démocratiques et sociales accordées aux masses, entraves à la productivité ;

    - il redoute l'aiguisement de la lutte des classes et les actes de résistance populaire, même individuels, spontanés, non-conscients et non-organisés : plus marxiste que bien des "marxistes", la bourgeoisie sait parfaitement que chaque crise met à l'ordre du jour son renversement.

    DONC, la démocratie telle qu'idéalisée par les radicaux du 19e siècle et les social-démocrates du 20e siècle (les partis de la petite-bourgeoisie, en somme...) tend à céder le pas à un État policier, de contrôle permanent, de contre-révolution préventive.

    La "démocratie réelle" est donc une revendication légitime des masses populaires, et particulièrement du prolétariat et des couches les plus pauvres, exploitées et fliquées du Peuple, pour qui la démocratie bourgeoise est particulièrement fictive.

    MAIS cette démocratie "véritable" ne peut avoir de sens et de matérialité que dans le renversement du capitalisme...

    C'est ainsi qu'il faut aborder le mouvement populaire spontané qui s'est développé ces derniers jours dans l'Etat espagnol (essentiellement contre les 20% de chômage, dont 40% chez les jeunes, alors que l'arrogance des bourgeois et la corruption des politiciens est proverbiale dans ce pays) ; et qui fait "tâche d'huile", à l'ère internet, dans toute l'Europe.

    Soyons clairs : de tous temps, en 160 ans de mouvement socialiste puis communiste, les organisations révolutionnaires ont été débordées et surprises par le mouvement réel et spontané des masses. En février 1917, personne (ni les "socialistes-révolutionnaires", ni les mencheviks, ni les bolcheviks) ne s'attendait à ce qu'une énième émeute de la faim, totalement spontanée, ne renverse le Tsar et ne donne lieu à la première révolution prolétarienne de l'Histoire et à au moins 5 ans d'agitation révolutionnaire intense dans le monde entier. En Mai 68, cela faisait au moins depuis la rentrée 1966 qu'il y avait de l'agitation dans les facs. Personne, pas même les marxistes-léninistes (PCMLF, UJCML, UCF-MLetc.), ne s'attendait à l'ampleur que prendrait cette fronde étudiante, avec 10 millions de grévistes, le quasi renversement de De Gaulle et 5 ans (là encore) de grande effervescence révolutionnaire... En 1974, au Portugal, toutes les organisations communistes prirent le train en marche, en voyant les masses populaires se rallier au "coup de poker" d'une poignée de jeunes officiers progressistes. Les exemples seraient légion... Plus près de nous, qui aurait prévu le niveau d'affrontement de classe, contre l'Etat policier, que prendrait le mouvement lycéen contre la "réforme" des retraites ? Aucune organisation n'était derrière les affrontements. Ceux-ci étaient une réaction spontanée à la répression aveugle qui s'était déchaînée contre la jeunesse populaire (à coup de flash-balls etc.).

    La "démocratie réelle" revendiquée par les jeunes de la Puerta del Sol est un mouvement spontané, exprimant une aspiration de masse parfaitement légitime. Bien sûr, il a plus que ses défauts : il se réclame des soulèvements arabes alors que les conditions concrètes (en Europe) n'ont rien à voir, ses mots d'ordre sont généralement "réformistes radicaux", etc. Mais le rôle des organisations communistes est d'être à ses côtés, pour porter le mot d'ordre qu'il n'y a de démocratie réelle que dans le renversement du capitalisme. Il est légitime de critiquer les aspects inter-classistes et ultra-démocrates, petits-bourgeois, du mouvement, mais le rejeter d'emblée ou l'ignorer (ne pas prendre position) c'est se condamner lourdement devant l'Histoire.

    Ailleurs, il faudra voir. Beaucoup de rassemblements se font avant tout en solidarité. D'autres, la fameuse "tâche d'huile" de l'ère internet, pourraient rester de pâles copies, essentiellement bobo (classes moyennes urbaines réformistes). Le rapport des libertaires de Rebellyon est assez clair : "l'assemblée est pour l'instant très largement blanche", ce qui dans une métropole capitaliste comme Lyon, veut dire que pour l'instant le prolétariat n'adhère pas. Pire : les "social-républicains" du PG et (encore pire) de l'AJR (POI) tentent d'y refourguer leur camelote de "Constituante", autrement dit, de rénovation de la République bourgeoise.

    Mais si le mouvement prend de l'ampleur et dépasse son caractère petit-bourgeois actuel, les communistes devront, là encore, se positionner et prendre place aux côtés des masses avec des mots d'ordres communistes...

    http://www.globalproject.info/public/resources/images/max/arton14844-0dc6c.jpg

    republica socialista

    PS : Il faut être absolument clairs : le mouvement réel spontané des masses sera TOUJOURS ultra-démocratique et économiste. A fortiori dans nos sociétés occidentales couvées dans l'illusion démocratique et le conso-confort capitaliste. Pour poser la question du pouvoir, il faut une direction communiste ; mais pour pouvoir prétendre (de manière crédible) à cette direction, il faut une masse critique de militant-e-s et sympathisant-e-s qu'il n'est possible d'atteindre... qu'en se liant aux masses, notamment lors de mouvements comme celui-ci.

    Il est absolument délirant de rejeter un mouvement comme celui-ci, comme représentant la "petite-bourgeoisie en déclassement". Au moins aussi délirant que de cracher (comme on l'a vu en 2005) sur les insurrections des quartiers-ghettos prolétaires. Ces deux forces sont, tout au contraire, les forces essentielles de la révolution dans les métropoles impérialistes, le combustible, la plaine à enflammer d'une étincelle ! Depuis les années 1950, le Capital monopoliste a créé, dans les métropoles impérialistes, une classe moyenne, une "petite-bourgeoisie artificielle" vouée à consommer ; car, à ce stade de son développement, le capitalisme ne peut fonctionner qu'en élargissant au maximum la consommation (consommation au delà des stricts besoins primaires, s'entend). Cette "petite-bourgeoisie artificielle" est entretenue, bien sûr, par les surprofits dégagés par l'exploitation impérialiste de la planète. Mais en période de crise, quand le taux de profit chute considérablement, les surprofits chutent exponentiellement ! La "petite-bourgeoisie artificielle" se trouve alors re-prolétarisée : c'est la fameuse "première génération qui vivra moins bien que ses parents"... Ceci est un ferment révolutionnaire considérable !

     


     Lénine : La révolution socialiste en Europe... ("Democracia Real Ya" & Cie)

    « La révolution socialiste en Europe ne peut pas être autre chose que l'explosion de la lutte de masse des opprimés et mécontents de toute espèce. Des éléments de la petite bourgeoisie et des ouvriers arriérés y participeront inévitablement - sans cette participation, la lutte de masse n'est pas possible, aucune révolution n'est possible - et, tout aussi inévitablement, ils apporteront au mouvement leurs préjugés, leurs fantaisies réactionnaires, leurs faiblesses et leurs erreurs. Mais, objectivement, ils s'attaqueront au capital, et l'avant-garde consciente de la révolution, le prolétariat avancé, qui exprimera cette vérité objective d'une lutte de masse disparate, discordante, bigarrée, à première vue sans unité, pourra l'unir et l'orienter, conquérir le pouvoir, s'emparer des banques, exproprier les trusts haïs de tous (bien que pour des raisons différentes !) et réaliser d'autres mesures dictatoriales dont l'ensemble aura pour résultat le renversement de la bourgeoisie et la victoire du socialisme, laquelle ne "s'épurera" pas d'emblée, tant s'en faut, des scories petites-bourgeoises »

    V. I. Lénine, Bilan d’une discussion sur le droit des nations à disposer d’elles-mêmes (1916), Œuvres vol. 22.

    À bon entendeur...

    lenine


     Mouvement des "indignés" : mener la guerre idéologique sur 2 fronts !

     

    - CONTRE les limites réformistes petites-bourgeoises du mouvement lui-même, et la démagogie crapuleuse des "rénovateurs" populistes du capitalisme qui lui tournent autour !  

    - CONTRE l'ultra-gauchisme réactionnaire donneur de leçons, et son mépris aristocratique du mouvement réel des masses !   UN SEUL MOT D'ORDRE : la démocratie authentique est une aspiration légitime des masses populaires ; sa seule réalisation possible est le SOCIALISME, l'expropriation du Capital et le Pouvoir Populaire sous la direction politique du prolétariat... (sujet-verbe-complément : pas besoin d'une dissertation !)

    http://sp1.fotolog.com/photo/49/24/97/absolut_lau/1305989434782_f.jpg

    De la révolte...                                  
                                            ... à la Révolution !

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