• Encore une fois sur la question de l'"islamisme"


    http://lequotidienalgerie.org/2018/06/29/lislamisme-est-il-la-forme-musulmane-de-la-theologie-de-la-liberation/

    "Pendant la période de la guerre froide, les groupes et les penseurs islamiques étaient souvent en concurrence avec leur principal rival idéologique, le marxisme, avec lequel ils partageaient des positions anticapitalistes, populistes et de justice sociale. Nous l’avons vu dans les idées socialistes de Mahmoud Taha au Soudan, l’anticapitalisme de Sayyid Qutb [on pourrait encore citer le "père" fondateur des Frères Musulmans syriens, Moustapha Siba'i], la gauche islamique de Hassan Hanafi en Égypte, le marxisme économique d’Ali Shariati en Iran, ou la perspective distributionniste de Mohamed Bakr Al-Sadr en Irak. Ainsi, alors que l’islamisme des années 1980 et 1990 se caractérisait par une sorte de populisme de gauche, nous observons aujourd’hui une tendance au populisme néolibéral parmi les islamistes et les post-islamistes — par exemple, dans la pensée de figures comme Mahmoud Ahmadinejad en Iran, Kheirat Al-Shater, dirigeant des Frères musulmans égyptiens, Recep Tayyip Erdoğan en Turquie, ou les « salafistes Costa » qui ne s’intéressent ni à la redistribution ni à la protection sociale, mais à la « prospérité » par l’entrepreneuriat individuel. Cela représente un changement significatif vers ce que l’on pourrait appeler le « néo-islamisme » de notre époque néolibérale."

    C'est bien vu. C'est vrai que l'affrontement marxistes-islamistes du temps de la Guerre froide était en fait moins une question d'antagonisme total de vision du monde, que plutôt une concurrence sur le même créneau... Avec pour seul vrai clivage peut-être croyance/incroyance, voire un "indépendantisme" (des islamistes) vis à vis de l'URSS que l'on trouvait aussi chez les groupes pro-chinois.

    Les Frères Musulmans avaient ainsi commencé par être des alliés de Nasser et Néguib, on l'oublie souvent. Ils avaient soutenu leur coup d'État contre la monarchie laquais de l'Empire britannique. La rupture ne s'est pas vraiment faite sur un rapport différent à l'impérialisme occidental (les uns et les autres avaient combattu côte à côte les Anglais sur le Canal de Suez), mais plutôt sur le rapprochement à partir de 1954 avec l'URSS "athée" et (selon leur point de vue) "ennemie des musulmans".

    Ceci étant RÉCUPÉRÉ par l'impérialisme occidental dans une optique anti-soviétique, COMME c'est arrivé à des groupes 'chinois' ou 'albanais' parmi lesquels on peut citer l'UNITA en Angola, les maos afghans qui ont combattu aux côtés des islamistes d'ailleurs, ou le PCRV contre Sankara au Burkina.

    Ensuite bien sûr, eh bien il y a eu reflux général de la révolution mondiale et COMME l'immense majorité des groupes cocos, glissement vers la social-démocratie voire le social-libéralisme de 'ruissellement' qui serait la position que l'on pourrait prêter aujourd'hui aux Frères ou à Erdogan.

    Encore une fois sur la question de l'"islamisme"

    Lire aussi sur le sujet :

    Religion et révolution : un texte essentiel de 2021

    http://servirlepeupleservirlepeuple.eklablog.com/religion-et-revolution-un-excellent-texte-maoiste-arabe-a114071990

    http://servirlepeupleservirlepeuple.eklablog.com/conception-du-monde-rebondissement-discussion-fb-sur-un-texte-du-pc-ma-a182055290

    (n)PCI - La révolution démocratique anti-impérialiste dans les pays arabes et musulmans

    http://ekladata.com/aMWtD4biDmduz0KwuECvsQC_eus/2008_12_Dot.pdf

    http://ekladata.com/J3kL3EpeemlWbk5gQ_3_TkjK18M/Les-theologies-islamiques-de-la-liberation-_-arabmaoists.pdf

    http://ekladata.com/PNdZupD5SrHPLbHL_QBsIu9ibPA/La-theologie-de-la-liberation-de-Munir-Chafiq-_-arabmaoists.pdf (lire aussi ici, génial : Chafiq-nouveau-Bloc-social-historique-pour-l-unite-arabe.pdf)

    http://ekladata.com/vTYcE7fFcX4JFcMNyKEagaSs8wA/La-theologie-de-la-liberation-de-Ali-Shariati-arabmaoists.pdf

    http://servirlepeupleservirlepeuple.eklablog.com/encore-quelques-petites-reflexions-sur-les-religions-et-l-attitude-des-a114496946

    http://servirlepeupleservirlepeuple.eklablog.com/egypte-l-affrontement-entre-capitalisme-d-en-haut-bureaucratique-et-ca-a114086574

    http://servirlepeupleservirlepeuple.eklablog.com/pour-comprendre-la-tempete-arabe-avoir-une-analyse-de-classe-correcte--a114094440

    Très intéressant aussi, pour s'y "retrouver" et arrêter de tout confondre (tragédie de l'extrême-gauche occidentale en la matière...), un excellent dossier publié en 2017 sur Investig'Action : 

    http://ekladata.com/5lOBWb7wr6Au53wxq2o8UWJX6M4/Islamisme-Lalieu-Hassan.pdf

    [Et puis, trotskyste et donc avec les défauts que l'on pourra lui trouver de par cette idéologie ; mais enfin néanmoins, du bon trotskysme (comme il y a le bon et le mauvais cholestérol !) ; le fameux texte de Chris Harman (du SWP britannique) qui devrait vraiment, à notre sens, avoir toute sa place dans la conception communiste du monde de notre époque (et qui n'est, sans doute, pas pour rien honni de tous ceux - des "libertaires" aux ML voire "maoïstes" dogmatos en passant par les trotskystes de type LO - qui peinent à cacher sous un maquillage anticapitaliste leur profonde islamophobie "barbus de Saint Foooons"...) : « Chris Harman - Le prophète et le prolétariat (1994).pdf »

    Dans une veine finalement assez proche, il y a d'ailleurs le maoïste indien Ajith : resistance-islamique-la-contradiction-principale-et-la-guerre-contre-l-a136656668]

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    [Complément - discussion FB]

    [Nasser] C'est l'histoire d'une triste rupture avec les Frères alors qu'ils étaient côte à côte dans les combats de Suez avant la révolution (le pronunciamiento militaire de 1952) et ont pratiquement organisé celle-ci ensemble.

    Aux conséquences géopolitiques et intérieures peut-être peu visibles (hors la répression brutale de la Confrérie...) de son vivant, mais qui se sont tragiquement révélées ensuite.

    Une rupture entre un alignement sur l'URSS d'un côté et un "ni capitalisme croisé ni communisme athée" de l'autre ; pour qu'à l'arrivée les successeurs de Nasser deviennent... des valets modèles de l'Occident et les Frères, devant ce mouvement général des nationalismes (relativement) "laïcs", fassent finalement figure de derniers poils à gratter pour l'impérialisme (en dehors des djihadistes purs et durs).

    Avec des responsabilités, bien sûr, de part et d'autre hein... Mais bon.

    Les FM ont rompu avec Nasser sur la question de l'alignement sur l'URSS, la Yougoslavie et autres "marxismes athées", point. Ils sont donc devenus pour l'Occident des alliés objectifs ou en tout cas, un beau bâton à mettre dans les roues du régime et des régimes similaires (Syrie, Libye, voire Algérie même, encore "socialiste" des années 1980, avant la conversion au néolibéralisme fin 80s début 90s) ; à une époque où un peu tout était bon à prendre en ce sens.

    Mais un jour, la Guerre froide a pris fin, aussi.

    Les Frères Musulmans sont capitalistes. Ils prônent une économie de marché et de libre entreprise, avec "ruissellement" et redistribution des richesses (et une certaine idée de non-accaparement des positions sociales opulentes, que tout le monde puisse avoir sa chance - par l'effort et avec l'aide de Dieu - d'y parvenir, en fait ils ne sont pas si éloignés que ça, en théorie économique, d'Amartya Sen).

    Mais dans les pays dominés par l'impérialisme, ce n'est pas qu'une question d'être ou non capitaliste.

    C'est d'abord et avant tout une question de "pompe" qui "exfiltre" la richesse vers l'Occident (ou la Russie, la Chine, le Japon, dans une moindre mesure).

    Les Frères Musulmans (et les apparentés, erdoganistes etc.) sont capitalistes mais aussi et surtout les représentants d'un capitalisme très "endogène", d'une bourgeoisie foncièrement anti-"partageuse" mais néanmoins ce qu'on appellera nationale, née de la vie sociale du pays où les gens produisent et vendent, bref font du bizness, et certains deviennent riches et d'autres pas.

    Autrement dit les représentants d'un circuit économique trop national, ou arabo-arabe ou orientalo-oriental qui n'"exfiltre" pas assez la richesse vers ailleurs ; en tout cas c'est ce que l'Ailleurs en question craint.

    Il est là le problème. Pas qu'ils nationalisent tout et nous fassent des communes populaires.

    "Les 'islamistes', eux, sont l'expression politique du 'capitalisme par en bas', le capitalisme (et la bourgeoisie) qui émerge 'spontanément' des 'entrailles' de la vie sociale (où les gens produisent et vendent, bref font du bizness, et certains deviennent riches et d'autres pas...), et se heurte au capitalisme bureaucratique impulsé 'd'en haut' par les régimes. Contrairement, en effet, à ce capitalisme bureaucratique-comprador 'd'en haut', le capitalisme 'spontané' 'd'en bas' ne va pas permettre au surproduit (plus-value 'sur-accaparée') de 'remonter' correctement jusqu'aux monopoles impérialistes - qui vont donc le combattre en conséquence, dans leur perspective de domination totale des économies du 'Sud'." [analyse de classe répétée dans une dizaine au moins d'articles portant sur la question]

    Nous ne voyons pas (pas l'ombre) d'une meilleure analyse de classe du phénomène. À moins qu'on nous en propose une autre, mais laquelle ?

    Encore une fois sur la question de l'"islamisme"En général, on nous rétorque "des féodaux". Mais ça ne tient pas debout...

    Soit la féodalité est une affaire de grande propriété foncière, et ça n'a rien à voir avec le sentiment religieux. Des individus très séculiers et totalement imberbes peuvent être de très grands propriétaires.

    Et ça n'a rien à voir avec la sociologie des cadres de la Confrérie, qui est extrêmement bourgeoise et bourgeoise active et gagne-sa-croûte, pas rentière : Morsi était ingénieur ; beaucoup de professions libérales, médecins ou avocats (des métiers "altruistes", c'est pas un hasard...).

    Les militaires "laïcs" sont (aujourd'hui) beaucoup plus certainement  issus de familles de notables grands propriétaires ruraux. Après tout, ils sont les héritiers des Mamelouks qui dirigeaient le pays lorsque Napoléon tenta de le coloniser (1799-1800).

    Les "officiers libres" de 1952 étaient des petits bourgeois, des paysans moyens entrés dans l'armée pour y rechercher une ascension sociale, certes. Mais avec l'échec de ce cycle de la révolution arabe (échec consommé à la mort de Nasser), leur régime a pourri sur pieds et ils sont devenus une BOURGEOISIE BUREAUCRATIQUE, c'est à dire une caste accumulant à travers l'appareil d’État. D'abord liée à l'URSS, elle a tourné spectaculairement casaque à la fin des années 1970 pour devenir garde-chiourme local des monopoles occidentaux.

    SOIT on assimile (absurdement) "féodalité" et religion, piété religieuse ; misère du "marxisme" le plus primaire ; mais là c'est absolument tout mélanger. Le "haut clergé" (difficile à définir dans le sunnisme, mais bon, "on" se débrouille) est souvent aux ordres du pouvoir hoggraïque. Des forces sociales très différentes et en contradiction interviennent en réalité dans le "camp religieux", sans parler de jeux de puissances régionales rivales.

    "Islamisme" = "féodalité" revient ici à mettre dans un même grand sac une abbaye (sous l'Ancien Régime) seigneure de dizaines de kilomètres carrés et hostile à la remise en cause de cette propriété éminente, d'un côté... et Savonarole, ou carrément Thomas Münzer ou les Camisards, de l'autre.

    "Les Égyptiens sont sortis en masse dans les rues pour l'enterrement" de Nasser : certes mais c'était en 1970, il avait rendu une certaine fierté et dignité au pays malgré la défaite de 1967.

    Aujourd'hui, ne nous voilons pas la face, c'est aux obsèques de Morsi que la population se rendrait en masse, surtout s'il devait mourir exécuté ou en prison.

    En un sens les FM sont aujourd'hui les nouveaux nassériens ; au sens de seuls bourgeois qui font un peu passer l'intérêt du pays avant leurs comptes en Suisse (en tout cas c'est comme ça que la population les perçoit... donc cette fumée doit avoir un peu de feu au-dessous, quand même).

    [Une certaine confusion s'est peut-être installée au fil de nos multiples écrits sur ce sujet. Il est en réalité question de deux choses qu'il importe de bien distinguer :

    - Le CAPITALISME islamique, expression du "capitalisme d'en bas" (bourgeois national, des "entrailles de la société" : souk, bāzār, économie informelle des quartiers populaires) opposé au "capitalisme d'en haut" bureaucratique-compradore impulsé par et au service de l'impérialisme, qui essaye de construire son propre circuit d'accumulation national. Évidemment c'est impossible, mais du moins il le tente... Il n'est pas à mettre sur le même plan qu'une pure satrapie "extravertie" vers les Centres financiers impérialistes ; et il peut être la cible d'agressions ou du moins de déstabilisations de la part de ceux-ci (car il ne laisse pas le surproduit, la plus-value "sur-accaparée", "remonter" correctement jusqu'aux monopoles impérialistes) et doit donc alors être défendu ; tout en faisant bien évidemment preuve (comme tous les capitalistes lorsqu'on leur faut miroiter de bonnes affaires ou au contraire les menace de sanctions économiques), d'un strict point de vue anti-impérialiste, d'un grand opportunisme (comme par exemple lorsque le Soudan a livré Illitch Ramirez Sanchez alias "Carlos" à l'impérialisme français, pour prendre un exemple qu'on nous a donné... un peu comme, en fin de compte, lorsque la Bolivie "capitaliste ando-amazonienne" de Morales a livré Cesare Battisti à l'Italie, pareil).

    C'est le cas de l'Iran, ou d'un pays qui serait dirigé par les Frères Musulmans (il n'y en a plus depuis le bref passage de Morsi au pouvoir en Égypte) ou un régime lié (Turquie d'Erdogan, Qatar, Soudan jusqu'en 2019, Malaisie de Mahathir dans une certaine mesure...) ; mais ça l'était à vrai dire aussi... en version "laïciste"-"moderniste", des systèmes nassériens ou baathistes de la "grande époque" (mais en général depuis ils ont fini satrapies).

    - Le "SOCIALISME dans les principes islamiques" quant à lui, comme nom de la révolution de nouvelle démocratie dans un pays culturellement musulman (c'est à dire concrètement l'idée que "on ne peut pas intervenir dans une  société sans prendre en compte son histoire politique, sociale, culturelle, tous ces éléments enchevêtrés : l'avant-garde est l'accoucheuse de l'histoire ; mais l'histoire est là", "les conditions d'une révolution viennent de l'intérieur d'une société, de son intérieur profond, et ici, dans cet intérieur profond, que tu le veuilles ou non il y a l'islam, qui a été un courant civilisationnel historique, profond" – Mounir Chafiq ; ou encore que "mieux vaut un pas en avant avec le peuple, que 100 pas sans lui" – Thomas Sankara), n'existe pas aujourd'hui ; il n'y a pas d'exemple.

    On pourrait à la rigueur citer, par le passé, la Libye de la Révolution verte kadhafiste (avant sa liquidation néolibérale et pro-impérialiste des années 1990-2000, débouchant sur la chute du régime en 2011), ou encore l'Algérie de Boumediene, avant là aussi la liquidation des années 1980-90, notamment au travers de la terrible "Décennie noire" (et peut-être aussi le Yémen du Sud ? - apparemment c'était le cas, ainsi peut-être que le Nord qui à cette époque était anti-impérialiste et envisageait la réunification... et même, comme on peut le voir ici, la Somalie de Siad Barre qui bien que condamnant officiellement le concept de socialisme islamique avait un rapport disons "complexe" à la culture profondément musulmane de 99,99% de la population)...

    Mais le truc, c'est que ça s'est toujours dans ces cas-là conçu (explicitement) comme une fin en soi ; jamais dans une perspective ininterrompue vers le socialisme et le communisme (il est important, aussi, de comprendre qu'en réalité et en fin de compte, très peu de régimes anti-impérialistes des années 1960 ou 70 dans les pays musulmans sont réellement "rentrés dans le lard" à l'islam ultra-majoritaire comme avait pu le faire le kémalisme en Turquie, réprimant sa pratique ou son expression publique, ou même se sont payés de provocations stériles tel Bourguiba buvant un jus d'orange devant son auditoire en plein ramadan : c'est, en fait, surtout contre les mécanismes - inéluctables - d'"oligarchisation bureaucratique corrompue" de ces régimes bourgeois nationaux, traduits dans l'esprit des masses par "comportements non-islamiques" ou "mécréance", que se sont développés les mouvements islamistes des années 1980, comme - au fond - revendications d'éthique et de souci du peuple dans la gouvernance, plus que d'une liberté religieuse à laquelle il n'avait que rarement été porté atteinte).

    Lire aussi ici : http://ekladata.com/O-Carre-Pensee-politique-arabe-Proche-Orient.pdf ; en particulier le chapitre II, très intéressant sur le sujet (et intéressant, aussi, pour bien voir comment jusqu'à présent les prétentions à un "socialisme islamique" - essentiellement de la part de certains courants des Frères Musulmans - mais aussi et tout autant... à un "socialisme arabe", ont toujours été dans un rejet explicite du marxisme - même si certes, comme on peut le voir dans cet ouvrage ou encore dans les récits de Mounir Chafiq, l'attitude des Partis communistes pro-soviétiques l'a souvent en partie justifié - autrement dit, un refus de la transition ininterrompue vers le socialisme et le communisme).]


    ET DONC, s'il fallait conclure sur tout cela, nous pourrions nous contenter de répéter ce que nous avons pu dire dans l'article suivant :

    http://servirlepeupleservirlepeuple.eklablog.com/conception-du-monde-rebondissement-discussion-fb-sur-un-texte-du-pc-ma-a182055290

    "Sauf que, le gars… il commence par ATTAQUER L’ISLAM et considérer que celui-ci ne peut être QUE totalement incompatible avec la révolution et la nouvelle démocratie ; concrètement, que les gens doivent abandonner plus d’un millénaire de croyances, mais surtout de CULTURE, de CIVILISATION qui est LA LEUR pour pouvoir être communistes !

    Comme si le marxisme à la base n’était pas la rationalisation scientifique (matérialiste dialectique) de siècles et de siècles de résistance… CHRÉTIENNE (de fait : fr.wikipedia Ligue des justes... un héritage on ne peut plus direct !) ; contre les pouvoir oppresseurs ET le clergé de régime, l’Église au service du pouvoir, oui, mais au nom des valeurs chrétiennes perçues comme "vraies" : les gens pensant que Dieu n’existait pas et que la parole du Christ n’était que foutaises, même en 1793 c’était encore rarissime, même dans le premier mouvement ouvrier (chartisme anglais) c’était rarissime, et quand c’était le cas c’était souvent antisémite (Dieu et Messie "sémites orientaux" venus parasiter la "vraie culture occidentale gréco-romaine").

    Les choses ne tombent pas du ciel, toute idéologie est un produit de l’histoire des idées… et des luttes qui les sous-tendent, et de la culture de l’endroit où elle naît (c’est d’ailleurs en cela, aussi, que je verrais le sens des sauts qualitatifs marxisme -> ML -> MLM : marxisme = idéologie révolutionnaire PUR PRODUIT CULTUREL de l’histoire des luttes sociales en Europe occidentale, ML = "ensemble des premières formes", et MLM = "ensemble des formes abouties" de FUSION des apports universels du marxisme – universels parce que scientifiques, universels comme 2+2=4 – avec les cultures populaires issues de l’histoire des luttes AILLEURS, dans les autres régions du monde).

    Et l’islam lui aussi est tout autant traversé par ces luttes depuis des siècles, d’ailleurs il y a bien longtemps (peut-être un millénaire) qu’il n’a plus d’autorité centrale incontestée, que les courants, écoles etc. s’affrontent, largement sur fond de luttes sociales.

    "Lorsque la sage-femme aide l'enfant à venir au monde, elle ne fait que l'aider : ce n'est pas elle qui va changer les traits physiques de l'enfant, son poids, son code génétique... Elle peut favoriser des éléments, ou les défavoriser, c'est vrai ; mais il y a un donné qui est déjà là. Pour l'avant-garde révolutionnaire, c'est la même chose : tu peux favoriser un processus révolutionnaire, mais il y a des données qui sont là, historiques. Tu ne peux pas intervenir dans une  société sans prendre en compte son histoire politique, sociale, culturelle, tous ces éléments enchevêtrés : l'avant-garde est l'accoucheuse de l'histoire ; mais l'histoire est là. Cela signifie pour moi, avec Marx, que les conditions d'une révolution viennent de l'intérieur d'une société, de son intérieur profond, et ici, dans cet intérieur profond, que tu le veuilles ou non il y a l'islam, qui a été un courant civilisationnel historique, profond. Et qui a fait que quand il y a eu oppression au nom de l'islam, il y a eu en contrepartie une résistance se fondant et s'appuyant sur l'islam. Il y a pour moi dans cette thèse de la ligne de masse, et de l'avant-garde qui ne fait qu'accoucher d'une histoire à laquelle tu ne peux pas échapper, un caractère scientifique profond : la révolution vient du plus profond d'une société, pas d'un parachute. Et certainement pas d'un parachute occidental." – Mounir Chafiq

    Ce qui peut être injuste ou carrément inhumain (parfois) dans les sociétés musulmanes aujourd’hui peut comme absolument partout être combattu en s’appuyant sur l’islam qui est synonyme de CULTURE NATIONALE, sans besoin de se dé-nationaliser parce que c’est de ça qu’il s’agit, renoncer à soi pour devenir un Européen du 21e siècle (ou un Moscovite des années 1970-80) parce que ce serait ça être "civilisé".

    Moi j’ose le dire : on ne peut pas concevoir la nouvelle démocratie dans un pays musulman, autrement que comme un "socialisme dans les principes islamiques" de type Proclamation de la Toussaint 54.

    [Lire par exemple "L’Islam et la Révolution algérienne" de Ben Bella]

    Le souci jusqu’à présent c’est que ça n’a jamais existé comme VÉRITABLE nouvelle démocratie, c’est-à-dire sous la direction d’un Parti qui l’assure comme révolution ininterrompue vers le socialisme et le communisme – ça n’a jamais existé que sous direction nationale-bourgeoise, donc ne pouvant pas évoluer ainsi de manière ininterrompue et condamné par conséquent à dégénérer en oligarchie capitaliste bureaucratique, que l’on pense à la Révolution verte de Kadhafi en Libye, à l’Algérie, à l’Iran dautour de 1980 etc. etc. ; mais il n’empêche que C’EST la forme que doit prendre la nouvelle démocratie dans ces pays, et il y a des gens qui doivent sérieusement sortir de leur petit microcosme intellectuel occidentalisé, et l’accepter. 

    Sinon, ce sera toujours la bourgeoisie nationale islamique qui prendra la main (appelons-la par son nom, et là aussi l’analyse du PCmA est classiquement à côté de la plaque avec ses "féodauuuuux", comme si la féodalité à l’ère du capitalisme mondialisé pouvait être une force politique motrice en quoi que ce soit, bien qu’elle soit, certes, une force ALLIÉE du courant national-islamique de la bourgeoisie nationale et un relais essentiel pour elle dans les campagnes)..."

    ****************************************************************************************************

    [Au sujet des théories complotistes sur le djihadisme :

    "Je dirais que ce que font certaines (en tout cas) forces djihadistes comme Daesh n'est pas joli joli, et certainement pas un projet de société que l'on peut défendre ; maintenant, je pense qu'il y a surtout une forme... d'amertume, en fait, à voir de telles forces capables de ce dont la gauche est incapable depuis des années, dans les pays du Sud et a fortiori en Occident : prendre possession d'un vaste territoire à la face du monde entier qui leur est hostile, et y bâtir un État "en rupture" radicale avec l'ordre existant, même si cette rupture est ultra réactionnaire.

    De cela la gauche n'est depuis longtemps plus capable, ah si pardon : en Rojava... avec l'appui aérien des bombardiers de l'OTAN.

    Du coup, "verts" de voir des ultra réacs en être capables, on préfère s'inventer que tout est voulu et manigancé, qu'ils ont "en réalité" le soutien de la CIA et du Mossad..."]


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