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Conception du monde - Extraits de discussion sur la guerre en Syrie, en digressant sur la question des Centres et Périphéries, etc.
"A priori l'idée d'un socialisme islamique n'a pas grand sens autre qu'idéologique. L'islam concentre un très grand nombre de contradictions et de tendances (féodales/tributaires, bourgeoisies, socialistes) du fait du développement inégal et combiné des formations sociales islamiques médiévales. Avec notamment un État califal puissant et tributaire, mais aussi une place importante du secteur marchand, du prolétariat, de la paysannerie pauvre, c'est ce qui a fait la richesse intellectuelle, culturelle, philosophique et scientifique des sociétés islamiques médiévales"Pour moi, un système "démocratique et social dans les principes islamiques" (comme indiqué dans la Déclaration de la Toussaint) [lire par exemple "L’Islam et la Révolution algérienne" de Ben Bella] est la forme obligatoire de l'étape nationale-démocratique dans les pays musulmans, point.
C'est juste que sous direction bourgeoise cette étape ne peut pas être dépassée vers autre chose.
On reproche beaucoup aux FM leur défense de la propriété, de la libre entreprise etc., mais quelque part, sous une "féodalité d'État" un peu comme sous l'Ancien Régime ici (et de surcroît, existant totalement par et pour l'extraction impérialiste de surprofits), c'est un discours révolutionnaire bourgeois...
"Mais les FM défendent la libre propriété dans un contexte bourgeois. Le seul intérêt des FM (et généralement de l'islamisme) c'est l'idée de l'unité islamique, qui recèle l'idée d'une renaissance panarabe anticoloniale. Mais en général la forme proposée va à l'encontre des aspects progressistes de la tradition islamique elle même (rationalisme, mystique, chiismes, etc.)"
Lis ça c'est hyper intéressant :
http://ekladata.com/5lOBWb7wr6Au53wxq2o8UWJX6M4/Islamisme-Lalieu-Hassan.pdf
En gros le reproche qu'on peut faire aux FM c'est d'être des possibilistes ultra pragmatiques. En gros, des socedems de l'anticolonialisme sur la branche d'inspiration religieuse de celui-ci.
Mais bon en même temps, ceux qui sont "volontaristes" et veulent forcer, les qutbistes-djihadistes, ça donne pas forcément des merveilles non plus, donc bon...
[Quoi qu'il en soit] Tout régime bourgeois national au départ, peut réaliser des tâches nationales-démocratiques importantes mais finit toujours par dévier en oligarchie bureaucratique néo-compradore faute d'assurer une révolution ininterrompue vers le socialisme et le communisme.
Non seulement ceci est également valable pour les nationalistes dits 'laïcs'... mais ça s'est vu, le spectacle est sous nos yeux (alors que les FM on a jamais trop vu, ils sont jamais restés longtemps au pouvoir nulle part). Et en Iran (que tu défends) aussi, d'ailleurs.
"Ils sont surtout manipulés depuis des décennies par les impérialistes, du fait justement que leur idéologie est incapable de réaliser ce qu'elle proclame : indépendance nationale et unité arabo musulmane. On ne peut pas réaliser ces objectifs quand on rejette la modernité, quand on est anticommuniste et sectaire. Ça donne au mieux des régimes archi compradores (libéraux et financiarisés), hostiles aux populations non sunnites et à la traîne sur le plan scientifique et intellectuel. Tout pour être un jouet de l'Occident quoi..."
Parce que la Modernité c'est bien maintenant ? Lol...
Par rapport aux politiques dites modernistes dans ces pays, tu peux lire ça pour voir un peu les problématiques que ça pose :
http://ekladata.com/LaXzPDRdZzz-n3H7TONW1Y85jOU/reforme-agraire-Iran-effets-pervers.pdf
Ce que je pense en effet et on peut être d'accord, c'est que si tu veux être trop charia-charia tu clives et tu n'es pas assez rassembleur pour une politique d'indépendance nationale. Et il en va de même pour une politique trop moderniste-séculariste...
On le voit en Tunisie : Ben Ali était honni, Ennahdha s'est grillée en quelques années. Saïed, lui, représente la position capable de mettre 75% ou presque sur son nom - à voir maintenant ce qu'il en fera.
[Une certaine confusion s'est peut-être installée au fil de nos multiples écrits sur ce sujet. Il est en réalité question de deux choses qu'il importe de bien distinguer :
- Le CAPITALISME islamique, expression du "capitalisme d'en bas" (bourgeois national, des "entrailles de la société" : souk, bāzār, économie informelle des quartiers populaires) opposé au "capitalisme d'en haut" bureaucratique-compradore impulsé par et au service de l'impérialisme, qui essaye de construire son propre circuit d'accumulation national. Évidemment c'est impossible, mais du moins il le tente... Il n'est pas à mettre sur le même plan qu'une pure satrapie "extravertie" vers les Centres financiers impérialistes ; et il peut être la cible d'agressions ou du moins de déstabilisations de la part de ceux-ci (car il ne laisse pas le surproduit, la plus-value "sur-accaparée", "remonter" correctement jusqu'aux monopoles impérialistes) et doit donc alors être défendu ; tout en faisant bien évidemment preuve (comme tous les capitalistes lorsqu'on leur faut miroiter de bonnes affaires ou au contraire les menace de sanctions économiques), d'un strict point de vue anti-impérialiste, d'un grand opportunisme (comme par exemple lorsque le Soudan a livré Illitch Ramirez Sanchez alias "Carlos" à l'impérialisme français, pour prendre un exemple qu'on nous a donné... un peu comme, en fin de compte, lorsque la Bolivie "capitaliste ando-amazonienne" de Morales a livré Cesare Battisti à l'Italie, pareil).
C'est le cas de l'Iran, ou d'un pays qui serait dirigé par les Frères Musulmans (il n'y en a plus depuis le bref passage de Morsi au pouvoir en Égypte) ou un régime lié (Turquie d'Erdogan, Qatar, Soudan jusqu'en 2019, Malaisie de Mahathir dans une certaine mesure...) ; mais ça l'était à vrai dire aussi... en version "laïciste"-"moderniste", des systèmes nassériens ou baathistes de la "grande époque" (mais en général depuis ils ont fini satrapies).
- Le "SOCIALISME dans les principes islamiques" quant à lui, comme nom de la révolution de nouvelle démocratie dans un pays culturellement musulman (c'est à dire concrètement l'idée que "on ne peut pas intervenir dans une société sans prendre en compte son histoire politique, sociale, culturelle, tous ces éléments enchevêtrés : l'avant-garde est l'accoucheuse de l'histoire ; mais l'histoire est là", "les conditions d'une révolution viennent de l'intérieur d'une société, de son intérieur profond, et ici, dans cet intérieur profond, que tu le veuilles ou non il y a l'islam, qui a été un courant civilisationnel historique, profond" – Mounir Chafiq ; ou encore que "mieux vaut un pas en avant avec le peuple, que 100 pas sans lui" – Thomas Sankara), n'existe pas aujourd'hui ; il n'y a pas d'exemple.
On pourrait à la rigueur citer, par le passé, la Libye de la Révolution verte kadhafiste (avant sa liquidation néolibérale et pro-impérialiste des années 1990-2000, débouchant sur la chute du régime en 2011), ou encore l'Algérie de Boumediene, avant là aussi la liquidation des années 1980-90, notamment au travers de la terrible "Décennie noire" (et peut-être aussi le Yémen du Sud ? - apparemment c'était le cas, ainsi peut-être que le Nord qui à cette époque était anti-impérialiste et envisageait la réunification... et même, comme on peut le voir ici, la Somalie de Siad Barre qui bien que condamnant officiellement le concept de socialisme islamique avait un rapport disons "complexe" à la culture profondément musulmane de 99,99% de la population)...
Mais le truc, c'est que ça s'est toujours dans ces cas-là conçu (explicitement) comme une fin en soi ; jamais dans une perspective ininterrompue vers le socialisme et le communisme (il est important, aussi, de comprendre qu'en réalité et en fin de compte, très peu de régimes anti-impérialistes des années 1960 ou 70 dans les pays musulmans sont réellement "rentrés dans le lard" à l'islam ultra-majoritaire comme avait pu le faire le kémalisme en Turquie, réprimant sa pratique ou son expression publique, ou même se sont payés de provocations stériles tel Bourguiba buvant un jus d'orange devant son auditoire en plein ramadan : c'est, en fait, surtout contre les mécanismes - inéluctables - d'"oligarchisation bureaucratique corrompue" de ces régimes bourgeois nationaux, traduits dans l'esprit des masses par "comportements non-islamiques" ou "mécréance", que se sont développés les mouvements islamistes des années 1980, comme - au fond - revendications d'éthique et de souci du peuple dans la gouvernance, plus que d'une liberté religieuse à laquelle il n'avait que rarement été porté atteinte).
Lire aussi ici : http://ekladata.com/O-Carre-Pensee-politique-arabe-Proche-Orient.pdf ; en particulier le chapitre II, très intéressant sur le sujet (et intéressant, aussi, pour bien voir comment jusqu'à présent les prétentions à un "socialisme islamique" - essentiellement de la part de certains courants des Frères Musulmans - mais aussi et tout autant... à un "socialisme arabe", ont toujours été dans un rejet explicite du marxisme - même si certes, comme on peut le voir dans cet ouvrage ou encore dans les récits de Mounir Chafiq, l'attitude des Partis communistes pro-soviétiques l'a souvent en partie justifié - autrement dit, un refus de la transition ininterrompue vers le socialisme et le communisme).]
[En Syrie] "C'est surtout que, évidemment, la révolte naît de la poursuite de la libéralisation et de liquidation du "socialisme" baathiste déjà commencé par Assad père.Dans son long article sur la crise syrienne, Ali Kadri insiste bien sur la tendance "compradore" du régime Assad, comme source du conflit. Mais il en tire la conséquence inverse de celle attendue : là encore, ce n'est pas l'élite corrompue et misérable de Damas qui est le "prime mover" de la guerre en Syrie, mais l'hégémonie néolibérale US qui a poussé tous les États relativement autocentrés et socialisants à se libéraliser et se financiariser. Kadri soutient in fine le fait que la Syrie se défende contre l'agression étrangère, dans la mesure où la victoire des milices contre le régime irait plus encore à l'encontre des intérêts des masses exploitées et opprimées qu'un maintien d'Assad."
"Ça, on est d'accord que toute la tragédie du peuple syrien et de sa si légitime révolte, ça a été de ne pas avoir de projet politique alternatif crédible et viable (contrairement aux fantasmes de "communes" des totos de Lundi Matin et compagnie).
À la rigueur, il y aurait eu Morsi en Égypte, ils auraient pu nous refaire la RAU version frériste (avec la Turquie et le Qatar en arrière plan).
Mais comme il s'est fait gicler au bout d'un an... la seule perspective viable (je ne dis pas idéale, je dis viable !) s'est évaporée.
Maintenant, ce que dit ce Kadri c'est bien beau sur le papier d'une théorie anti-impérialiste que n'aurait pas reniée Amin... Mais LES FAITS, rien que les faits, nous dirait Lénine : qu'a fait Assad, concrètement ? Il a purgé le pays... tout simplement.
Car le conflit (je parle de la fitna de départ qui a fourni le terreau à des groupes, on va dire, peu recommandables, à moins que tu me prétendes que la rébellion n'avait aucune base sociale...) était fondamentalement une crise de clientélisation, le régime en 2010 n'arrivait plus à clientéliser des pans entiers de la population, à absorber des masses de migrants ruraux comme typiquement à la Ghouta ou Alep Est (les Russes et les Iraniens auraient d'ailleurs dû le pousser à calmer le jeu et priver les fanatiques de cette base sociale... mais c'est sûr que l'aider à pouvoir le faire aurait coûté des ronds : ils ont donc préféré la doctrine tchétchène !).
Entre ceux qui sont morts et ceux qui sont partis (et sont officiellement interdits de retour par une loi selon laquelle pour pouvoir revenir et retrouver son domicile, avec aides à la reconstruction, et non être définitivement exproprié par un nouveau projet immobilier, il faut pouvoir faire valoir son titre de propriété... ce qui exclut les implantations "sauvages", les "favelas" quoi, bases sociales de la révolte), il s'est débarrassé d'une bonne partie de ces masses populaires qu'il n'arrivait plus à clientéliser. Tu parles d'une solution...
À partir de là, Nicolas Bay a beau jeu d'aller se pavaner à Damas "libérée"... Enfin un pays bougnoule bien propre comme il faut !!"
"Il ne me semble pas hors de propos de dire qu'Assad a été l'aryen d'honneur de la droite et d'une certaine gauche laïcarde dans ce conflit, comme les Kurdes l'ont été d'un certain gauchisme antifa.
Pour ma part, quand il n'y a pas de perspective communiste, je me fous de ce que pensent les gens. Ils pourraient être raéliens, ce serait pareil. Je regarde la nature de classe des forces, des directions ET des bases...
Pas pour espérer le socialisme de forces qui ne le veulent explicitement pas, par la seule magie de la "nature de classe".
Mais pour l'avoir à l'esprit quand je parle du sujet, c'est tout."
"Il faut aussi arrêter avec cette histoire que les Occidentaux veulent "le chaos".Non : ils veulent la stabilité... à leurs ordres. L'Égypte de Moubarak, ou la Jordanie, étant les modèles. L'insécurité généralisée n'est pas bonne pour les investissements.
Quand ils prennent la main sur une rébellion contre un régime pas aux ordres (comme avec Jibril et Abdel Jalil en Libye par exemple), c'est aussi dans la perspective que ça débouche sur un tel ordre un minimum stable.
Simplement, ils n'y arrivent plus (mais persistent à tenter encore et encore). C'est l'autonomie relative de l'idéologie (ici, l'idéologie BHL) par rapport au principe de réalité, que défendent pour leur part la droite dure, le FN ou Mélenchon.
Enfin bon, en Syrie ils ont quand même fini par comprendre et c'est là qu'ils se sont tournés vers Rojava, se disant qu'avec les zones kurdes + celles reconquises sur Daesh, formant un cadre stable, ce serait toujours ça de gagné (c'est là qu'il y a l'essentiel du pétrole !).
C'est aussi pour ça que si l'instabilité d'un côté n'est pas souhaitable pour les populations, de l'autre elle n'est pas à considérer comme une victoire, mais comme une défaite de l'impérialisme.
L'instabilité chronique qui règne en Irak, ou en Libye, est bel et bien une défaite pour les plans qui visaient à faire main basse sur ces pays.
En Libye, ils tentent de jouer maintenant Haftar, un vieux collaborateur de la CIA et déclinaison locale de Sissi.
En Irak... c'est mort car toute stabilisation du pays signifie un triomphe de l'Iran, et ils ne peuvent pas non plus jouer la sécession du Centre-Nord sunnite car ça deviendrait automatiquement un Djihadistan (donc là peut-être que oui, ils se contentent du chaos actuel pour rester sur un DEMI-échec, et non une déroute totale).
Quant à la Syrie, elle s'est restabilisée... mais plus que jamais dans les circuits d'accumulation de Moscou, Pékin et Téhéran. Donc échec là aussi, en effet. Et quelque part, une forme de victoire posthume et involontaire pour... Daesh, qui a largement permis cela en détournant l'effort de guerre occidental du renversement d'Assad vers lui.
La crise générale du capitalisme est fondamentalement une crise du surproduction absolue de capital (incluant forces productives, force de travail etc.), et donc, la destruction de forces productives fait effectivement partie de la "solution" impérialiste à la crise...
Mais ensuite, la reconstruction et la stabilité sont nécessaires pour relancer le marché.
Anéantir l'Allemagne et le Japon en 1944-45, oui... Mais ensuite, reconstruire la RFA et le nouveau Japon "démocratique", "impérialismes vassaux" fermement soumis et inclus dans les circuits d'accumulation manhattano-centrés.
La préférence absolue va bien évidemment à la stabilité parfaitement alignée type Égypte de Moubarak, Jordanie hachémite, ou Turquie de 1950 à 2003.
Le chaos est la demi-défaite, "préférable" dans une certaine mesure à la stabilité au bénéfice d'un autre circuit d'accumulation. "Dans la certaine mesure"... où ça ne déstabilise pas toute la région (c'est à dire y compris les stables-alignés alentour), voire produise des attentats meurtriers dans les métropoles impérialistes mêmes, intenables devant l'opinion dans la perspective des échéances électorales.
D'ailleurs les "opinions" sont aussi un paramètre à prendre en compte, faut arrêter.
Je suis par exemple persuadé qu'Erdogan, depuis la tentative de coup d’État de 2016, n'a qu'un rêve : rejoindre le circuit d'accumulation "de Shanghai" (Russie, Chine, Iran, Asie centrale, "nouvelles routes de la soie" etc.). Et pour ça, devrait évacuer la Syrie et se réconcilier avec Assad.
Mais il est "tenu" par son opinion, sa base électorale, qui ne veut pas entendre parler 1°/ d'un PKKistan dans le Nord de la Syrie, 2°/ d'un massacre de coreligionnaires sunnites "regardé sans rien faire", et 3°/ d'un nouvel afflux de réfugiés.
C'est pour ça qu'il maintient sa présence militaire, et la confrontation avec Damas, alors que son intérêt à s'allier avec Poutine et Téhéran apparaît chaque jour plus évident.
Et ce sont pareillement les "opinions" qui, avant même le triomphe de Daesh en 2014, ont enterré dès 2013 la perspective de renversement d'Assad pour les Occidentaux (à mesure que des "cartes" comme Manas Tlass perdaient leur crédibilité, qu'ils voyaient bien que les hommes sûrs du CNT libyen, souvent anciens piliers du régime de Kadhafi, étaient incapables de stabiliser quoi que ce soit dans ce pays etc.).
Fin 2012 (je crois), le "bon boulot d'Al Nosra" de Fabius, ressorti par Le Pen en 2016, était en réalité un constat horrifié : la fameuse "ASL" était une coquille vide, qui s'était complètement vidée avec armes et bagages au profit des groupes radicaux (comme, la même année d'ailleurs, le MNLA au profit d'Ansar Dine au Mali).
Vers septembre-octobre 2013, c'est la fameuse menace de frappes pour forcer Assad au départ, qui se déballonne et tourne en eau de boudin.
Juin 2014 : Daesh prend Mossoul en Irak et proclame son califat.
À partir de là, ça a été le basculement clair et net sur la carte kurde (PKK-YPG/J), pour pouvoir au moins se tailler un protectorat sur un gros quart ou tiers nord de Syrie, au nom d'une "lutte contre le terrorisme" largement soutenue (elle) par les opinions (mais accroissant, par contre, les tensions avec Erdogan)."
"Il y a un centre, une semi périphérie et une périphérie. Pour maintenir l'échange inégal, il faut déstructurer constamment la périphérie. Avec les chaînes globales de valeur pas besoin de lourds investissements partout. Dans la périphérie tu peux avoir des processus très peu intenses en capital mais très peu coûteux du fait de bas salaires, du semi esclavage, d'un petit capital travaillant en dessous du taux de profit moyen. Tout cela permet aux firmes intenses en capital, au centre, de faire des surprofits.""C’est marrant comme d’un côté tu es anti-stal, et de l’autre tu es finalement proche de la vision de Bruno Drweski (que j’apprécie beaucoup par ailleurs)…
Je veux bien qu’on parle de semi-périphérie pour l’Eurasie depuis l’Oder et les Alpes (car j’y mettrais volontiers aussi l’Italie, et la péninsule ibérique au sud des Pyrénées) jusqu’à Vladivostok ; mais à condition d’admettre qu’elle contient des "petits centres" (Moscou, Téhéran, ou encore Istanbul et ses 15 millions d’habitants, sans parler bien sûr des mégalopoles chinoises) qui bagarrent pour se créer leurs propres circuits d’accumulation autonomes.
Sans ce paramètre, on ne peut pas plus comprendre le monde de notre époque qu’avec le chimérique "bloc France-Allemagne-Russie" quasiment ennemi principal mondial du ‘p’’c’’mlm’ (tout en considérant que la Chine n’est pas impérialiste...).
Sans bien sûr verser (d’ailleurs les analyses du ‘p’’c’’mlm’ y versaient un peu…) dans la géopolitique zhou-dengiste des années 70 en faisant de Poutine (comme de Brejnev à l’époque) un véritable "nouvel Hitler" justifiant pratiquement l’alliance mondiale "antifasciste" avec l’Occident. Il faut savoir raison garder.
Les Centres semi-périphériques "shanghaïens" d’aujourd’hui, comme l’URSS de Brejnev hier, ne sont pas les ennemis principaux des peuples de la planète ; mais ils peuvent être l’ennemi principal dans certains cas précis comme les peuples d’Afghanistan ou d’Éthiopie-Érythrée hier (… ou les Palestiniens et progressistes du Liban lors de l’intervention syrienne pro-phalangiste en 1976 !), ou en Tchétchénie et maintenant en Syrie (ou au Xinjiang) depuis la Chute de 1991. À l'extrême rigueur, on louera "l'intention" anti-impérialiste mais on reconnaîtra (sauf mauvaise foi caractérisée) que la méthode, hégémonique et brutale, ne va pas du tout ; zéro ligne de masse et grosses limites de conception du monde (évidemment pour des États redevenus pleinement capitalistes, mais au sujet de l'URSS brejnévienne...).
Sans qu’il ne soit pour autant question, le moins du monde, de nier leur rôle positif aux côtés par exemple des gauches sud-américaines, comme l’URSS en Amérique centrale ou en Afrique australe à l’époque.
Je dirais même plutôt : ennemi principal "ex aequo" avec l’Occident dans ces cas précis ; par opposition aux cas majoritaires où l’Occident est indiscutablement l’ennemi principal ; et sans qu’il soit jamais question d’un Occident "ennemi secondaire" au point que l’on puisse s’allier avec lui (même si certains le font, mais c’est alors un suicide politique).Je suis même d’avis que par exemple, lorsque Gbagbo en Côte d’Ivoire avait un certain soutien de W Bush pour faire chier Chirac et Villepin, il fallait néanmoins fermement considérer la Françafrique comme l’ennemi principal en Afrique de l’Ouest, en tout cas concentrer nos efforts contre son intervention et ses massacres de civils à Abidjan.
Et d’ailleurs je me demande : pourquoi à ce moment-là tu rejettes (enfin, j’imagine) l’expérience Salvini-M5S en Italie, alors qu’elle visait clairement à "libérer" un peu les Centres financiers semi-périphériques de Milan et Rome de la tutelle des Centres parisien et rhénan… certes au prix d’une chasse ignoble aux migrants et d’une multiplication des violences racistes ?
C’est peut-être que "libérer" un peu une semi-périphérie des grands Centres ne justifie pas tout. Et c’est également le cas avec Poutine et l’Iran en Syrie."
["Ton concept de semi-périphéries est un peu fourre-tout."
Je suis de plus en plus porter à penser que Samir Amin avec son développement inégal et ses Centres et Périphéries est un penseur FONDAMENTAL de l'économie politique et du matérialisme historique du stade maoïste de la pensée marxiste.
On ne peut tout simplement PAS se dire marxiste-léniniste-maoïste en balayant son œuvre d'un revers d'un revers de main ; quels qu'aient été ses errements tardifs (soutien à la Chine après 1976, obsession des "islamiiiistes" le conduisant à des positions pro impérialistes).
Ceci étant, je pars d'Amin mais je choisis aussi délibérément de ne pas y coller.
Pour moi les Centres, semi-périphéries et périphéries sont des réalités à la fois territoriales et sociales ; sur la base du concept d'introversion/extraversion d'Amin.
Les Centres sont les populations, sises dans des territoires, qui "pompent" (comme des Shadoks lol) ; les périphéries celles qui sont pompées ; et les semi-périphéries celles qui sont d'un côté pompées mais bénéficient aussi d'un pompage.
Sont les Centre mondiaux les "métropoles mondialisées" d'Europe de l'Ouest, d'Amérique du Nord et d'Asie du Nord Est, ainsi bien sûr que d'Australie et Nouvelle-Zélande (mais toutes contenant, cependant, en leur sein des populations déshéritées qui sont à classer semi-périphériques).
Sont des semi-périphéries l'Europe du Sud et de l'Est, la Russie, la plus grande partie de l'Asie du Nord Est (avec leurs "petits centres" qui peuvent chercher à s'autonomiser des grands) ; mais aussi les populations "reléguées"/"périphériques" d'Europe de l'Ouest et d'Amérique du Nord, les "Indigènes du Nord" (colonies intérieures, soit "d'origine" comme les Nations indigènes ou les descendants d'esclaves africains en Amérique du Nord, soit issues de l'immigration du Tiers-Monde), etc. ; et les populations aisées du Sud global, dans les territoires où elles vivent (métropoles du Tiers Monde qui abritent aussi en masse leurs déshérités, ultra-périphériques eux ; et qui par ailleurs, peuvent aussi chercher à se comporter en "puissances régionales" et parfois "challenger" l'Occident).
Enfin, les populations exploitées du Sud global sont la périphérie mondiale.]
[Dans notre article précisément consacré aux thèses de Samir Amin, nous avons pu écrire de manière plus détaillée que :
- Les Centres, ce sont les "métropoles mondialisées-connectées" petites bourgeoises occidentales (et japonaises, + quelques centres hors Occident, en Russie, en Chine, à la limite les oligarchies de chez oligarchie du Sud comme "centres relais"...).
- La "semi-périphérie centrale", ce sont les masses populaires blanches ; c'est à dire effectivement presque tout le monde en Europe de l'Est et du Sud, mais aussi les masses les plus reléguées d'Europe de l'Ouest et d'Amérique du Nord. Ceci inclut la plus grande partie des peuples à question nationale d'Europe. On peut aussi y adjoindre, sans doute, une grande partie du Nord-Est asiatique.
- La "semi-périphérie périphérique", ce sont les masses "indigènes" non-blanches du Nord global.
- Enfin, la périphérie proprement dite c'est tout le reste : les 3/4 de l'humanité qui vivent en régime "semi-colonial semi-féodal".]
[Autre discussion sur le même sujet]"Un aspect me gênait dans ta rhétorique de se placer comme si Assad était l'ennemi principal nonobstant tout contexte et que les "rebelles" étaient donc de base légitimes et qu'ils se seraient délégitimés par leurs alliances mais qu'il faudrait en somme "d'autres rebelles" alors que je pense qu'au contraire ce qu'il faudrait c'est l'alliance et la réconciliation de l'aile gauche anti-impérialiste qui peut exister à la base des camps pro comme anti Assad (voire chez les nationalistes kurdes) contre les ailes droites chauvines, sectaires, prêtes à se vendre à n'importe qui pour du pouvoir (clairement Assad lui-même, Cemil Bayik, les chefs de l'ASL...)"
"Ça ce serait l'idéal.
Un idéal presque chafiquien... Mais le reproche qu'on peut faire à Chafiq, c'est d'avoir peut-être des idées très belles sur le papier mais pour y arriver concrètement il faudra du temps.
Mais oui c'est sûr que ce serait l'idéal. Espérons qu'on y arrivera, surtout que dans la région les réconciliations guidées par le bon sens peuvent être aussi spectaculaires que les fitna absurdes et suicidaires.
Le ni-ni systématique est une caractéristique du trotskysme, du gauchisme en général, des nanars-totos.
Mais le "ni-ni des fois" fait partie intégrante du matérialisme communiste.
La grille d'analyse est simple : l'intérêt des peuples ; qu'est-ce qui fait avancer (même un peu) cet intérêt.
Personnellement, je n'arrive toujours pas à me laisser convaincre par les arguments (même élaborés) en faveur de la victoire en cours d'Assad, dans les conditions où elle se réalise (concrètement : foutre dehors et interdire de retour ceux qui ont trop fait chier), au regard de ce seul et unique critère fondamental.
J'ai infiniment plus de mal à y déceler l'intérêt populaire, que dans (même) une mobilisation des "chemises rouges" pro-Shinawatra en Thaïlande...
Donc sur la Syrie, je dirais que la position juste s'apparente à un ni-ni vis à vis des camps en présence.
Et je suis en effet, d'accord avec ton commentaire, convaincu que hormis quelques bandes de branquignoles qui ont été jusqu'à accepter du soutien sioniste (pour aujourd'hui se sentir "trahis", lol !) nous avons assisté à une effroyable fitna entre gens avant tout (tous) PATRIOTES, parfois sur un clivage panarabiste/panislamiste, "socialisme arabe"/"socialisme islamique", ou parfois même simplement entre patriotes arabes.
Et que l'idéal serait, en effet, que rejetant de part et d'autre (y compris chez les Kurdes et les Assyriens) les opportunistes vendus aux Croisés de l'Est comme de l'Ouest, parviennent à s'unir à nouveau les forces saines ; car avec la situation devant nous ("deal du siècle" en Palestine, Irak bientôt champ de bataille entre US et Iran...), le moins qu'on puisse dire est que l'heure est grave.
Mais comme tu le reconnais toi-même, Assad victorieux ne fait pas partie de ces forces saines et de la solution."
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[Autre commentaire dans une toute autre discussion, en réponse à une énième attaque contre toute critique de Rojava sur le sempiternel air connu de "pseudo révolutionnaires maoïstes en chambre", "lâchez vos ordinateurs" etc. etc.]
C'est tout au contraire l'engouement pour "Rojava" qui est un pur produit de l'ère cyber-militante, du règne de la plus belle photo, et de tout le "progressisme intersectionnel" ainsi charrié.
Une organisation autrefois un tant soit peu marxiste-léniniste et anti-impérialiste (même si déjà très ethnocratique dans le fond) a subi un lourd revers militaire par l'arrestation de son chef en 1999, et a dès lors jeté aux orties cette idéologie soi-disant "périmée" pour un concept inspiré d'un anarchiste américain (plus que complaisant envers l'Entité sioniste par ailleurs) et beaucoup plus "vendeur" vis-à-vis des extrême-gauches occidentales... et même des social-démocraties et gauches libérales (Hollande, Obama), ce qui s'avèrera effectivement vital le moment venu, et certes personne ne "regrette" que Kobané n'ait pas été réduite à néant par Daesh, mais voilà.
Et sur la base de cette alliance, loin de simplement préserver les zones kurdes des djihadistes, ils se sont emparés d'un tiers de la Syrie arabe au bénéfice de leurs alliés occidentaux (car tout autant que sous le marxisme-léninisme des années 80, sous le confdem se cachait l'ETHNOCRATISME et le projet d'Empire régional kurde !)...
Avant d'être lâchés, enfin, oui mais non : Erdogan s'est vu autorisé à s'emparer... des seules zones en Syrie qui sont vraiment kurdes (en fait) ; laissant aux rojavistes des zones ultra-majoritairement arabes (et, en 2012-2013, massivement rebelles) qu'ils se sont empressés de... livrer au régime fasciste marionnette de Moscou ; tandis que les forces occidentales, prétextant une dernière possible présence "résiduelle" de Daesh, se sont confortablement repliées... sur les zones pétrolières.
J'ajouterai qu'à leur place je craindrais moins d'Erdogan, qui n'ira que jusque là où Trump et Poutine le laisseront aller (et qui lui-même d'ailleurs s'en fout, c'est volontiers qu'il aurait évacué vers la Syrie son "problème PKK", c'était même ouvertement dans l'esprit des discussions qu'il pouvait y avoir encore en 2012-2013 voire 14, si il fait ça aujourd'hui c'est surtout pour son opinion publique, surtout les anciens électeurs MHP qui lui sont vitaux) ; que de la perte et de la révolte qui monte des anciens alliés arabes au sein des FDS, comme la Brigade des Révolutionnaires (Liwa al-Thouwar) de Raqqa, entre autres...
Je ne vois pas en quoi dire cela, et avoir en outre eu la bienséance d'attendre la chute du Reich daeshien à Raqqa pour le dire, serait être un "pseudo" révolutionnaire "cyber" ou "en chambre" ; et aurait quoi que ce soit à voir avec le dogmatisme borné des mao-gonzalistes du Sud (qui rejettent par principe toute lutte non dirigée par des marxistes-léninistes-maoïstes en tant que guerre populaire), et encore moins avec l'opportunisme pitoyable de ceux du Nord qui ont encensé, vénéré, louangé et alléluïé "Rojava" quand c'était à la mode pour ensuite le rejeter sur ordre de leurs Partis grands frères du Sud, sans bien sûr le moindre texte d'autocritique.
Bref...
Aussi minoritaires soient-ils face à la peste takfiriste et aux vénéneuses ingérences occidentales, ottomanes, saoudites et du Golfe, et bien sûr russes et perses, une minorité peut toujours être le siège de la raison : il y a toujours des milliers de fils et de filles héroïques de Bilad al-Sham qui sont des patriotes révolutionnaires, prêt-e-s à donner leur vie contre tous les gangsters à la solde des Croisés de l'Ouest comme de l'Est, contre l'Entité sioniste criminelle et démoniaque ; pour une révolution démocratique et sociale dans son contenu, arabe et islamique dans sa forme.
Victoire au Machrek arabe, bientôt débarrassé de ses parasites sectaires diviseurs, de ses régimes oligarchiques laquais et de tous les sionismes ; et enfin libéré !
Thawra, Thawra hatta el-Nasr !
[C'est sûr que c'est toujours plus facile de ne pas répondre, et de biaiser, quand on ne peut rien face aux arguments puisque ceux-ci ne sont pas des opinions mais des faits.
Les parasites diviseurs, en l'occurrence je pensais plutôt aux sectarismes sunnites et chiites mais bon... C'est vrai que le sionisme kurdo-assyrien hier en Irak et maintenant en Syrie, c'est guère mieux.
Je suis effectivement un partisan de la Révolution démocratique arabe. Pour ce qui est du Baas, on peut dire que je l'emmerde puisque désormais on peut considérer que tant son aile irakienne que syrienne ont définitivement trahi cette révolution, et muté en oligarchies bureaucratiques opportunistes (l'aile irakienne finissant carrément à ce jeu là par perdre le pouvoir... et voir le pays livré à l'occupation).
En dehors de cette pâle copie arabe du kémalisme turc, autrement dit indirectement du jacobinisme français, il existe tout un nationalisme arabe (Mounir Chafiq etc.) qui repose non pas sur un "ethnos" ou quelque conception racialiste importée d'Europe, mais plutôt sur une "unité de civilisation" indépendante de la confession (bien que la composante islamique de l'identité régionale soit jugée à sa juste place, c'est à dire centrale), voire même du fait d'avoir l'arabe pour langue maternelle et première ("est arabe celui qui parle arabe", mais rien ne dit que ça ne peut pas être sa langue véhiculaire, à côté d'une langue vernaculaire autre !).
Il est aussi possible (peut-être) d'élargir les choses en allant vers une idée d'Union du Machrek pas uniquement arabe (mais incluant les Turcs et Turkmènes, les Kurdes, les Perses...). À voir.
Quoi qu'il en soit, c'est plutôt du côté du PKK que le marxisme-léninisme d'hier, le confdem d'aujourd'hui apparaissent furieusement entre les lignes comme les masques d'un projet réel de Grand Kurdistan... qui n'a, au fond, pas grand chose à envier en virulence à la volonté d'effacement des Kurdes des nationalistes ethnocratiques arabes ou turcs.
Le confdem... oui, c'est peut-être "pas trop mal" pris comme ça sur le papier ; à condition (si on parle de l'ouvrage d'Öcalan en tant que tel) d'arriver à digérer les petits passages suintant le chauvinisme vis à vis des autres peuples de la région. Mais quand on sait ce qui se cache en réalité derrière (et que les Arabes ou Turkmènes du Nord de la Syrie ont pu expérimenter), c'est déjà une autre affaire.
Pour le reste... Je me contenterai de rester d'une fidélité indéfectible aux conceptions de Lénine, de loin les meilleures à avoir jamais existé et à être dignes d'intérêt sur la question nationale.
Conceptions de Lénine qui n'ont jamais consisté à avoir la moindre indulgence envers les Dachnak arméniens ou les menchéviks géorgiens de Noé Jordania, nationalistes bourgeois "progressistes" et agents du dépeçage impérialiste du Caucase qui n'avaient au fond pas grand chose à envier au "progressisme" d'Öcalan.
Conceptions qui ont toujours prôné la plus totale liberté démocratique nationale, le respect le plus absolu des peuples et de leurs cultures etc., OUI ; mais avec toujours en perspective la FÉDÉRATION, l’État (fédératif bien sûr) continent dont l'URSS fut un radieux exemple et le COMECON une prolongation. Pas les petits fiefs tribalistes visant (de surcroît) au "petit empire" régional (comme l'étaient tant le Baas tikriti irakien que le Baas alaouite syrien, puisque vous avez cités ces exemples).
Et conceptions qui n'ont, par ailleurs, jamais mis "avec des œillères" sur le même plan les peuples opprimés dans des CENTRES IMPÉRIALISTES comme par exemple l'Europe de l'Ouest, dont la lutte en tant que telle affaiblit ces Centres ; et ceux opprimés par des nations ELLES-MÊMES DOMINÉES par l'impérialisme, ce qui ne leur retire certes pas le droit à la liberté démocratique nationale, mais impose une certaine vigilance pour que ces luttes ne deviennent pas des instruments de renforcement de la domination impérialiste sur les nations "oppresseuses".
L'Europe doit devenir une Union soviétique des peuples libérés des Centres financiers que sont les capitales des États actuels. Tout simplement.
Pas une juxtaposition de petits nationalismes bourgeois. Même si on peut à la rigueur (comme actuellement en Catalogne, demain peut-être en Corse) les soutenir comme une première étape, mais toujours avec cet objectif en ligne de mire.
Et si ça partait en mode complètement fasciste (comme ça pourrait être le cas en Flandre par exemple), on soutiendrait ? Évidemment non. Déjà.
Mais même, même si c'était "progressiste" mais en même temps ramener et installer genre la plus grosse base US du continent, parce que eux ils voudraient bien soutenir... Bah non plus, en fait. En tout cas on critiquerait, et ce serait bien normal. Et c'est valable partout pareil. Je veux bien ne pas être un gros mao dogmatique, mais il y a quand même des lignes rouges.
Et si, encore ensuite de ça, la base US pliait bagages et (imaginons que ce soit la Catalogne) les blindés espagnolistes venaient reprendre possession du territoire... Ben ce serait triste, c'est sûr, mais voilà. Misère de l'opportunisme...
Donc non, je ne fais pas vraiment de deux poids deux mesures entre l'Europe et le reste du monde, non plus.
Et ce n'est pas non plus une question de considérer Erdogan comme un "moindre mal" ; mais une question de :
- Comprendre, pour pouvoir comprendre correctement les enjeux régionaux, que la Turquie n'est plus l’État larbin totalement aligné sur l'impérialisme occidental qu'elle pouvait être dans les années 70-80-90.
- Partir non pas de ses petites mythologies militantes, mais de constats de réalité.
Il est ainsi acté, par quiconque ayant un peu "fouillé" les dossiers et même par des militants maoïstes anatoliens attachés à la vérité, qu'Erdogan a TOUJOURS été partisan d'une solution négociée plus ou moins autonomiste au Bakur (Kurdistan du Nord, "turc") ; rejoignant en cela le PKK nouvelle mouture, puisque celui-ci ne prônait plus l'indépendance comme but.
Lorsqu'il a eu enfin, vers 2010-2011, écarté les lourdes menaces de coup d’État de la vieille garde militaire kémaliste qui pesaient sur lui depuis son arrivée au pouvoir, il s'est effectivement engagé dans ces négociations.
C'est même pour ainsi dire DE LÀ qu'est né "Rojava" : l'autorisation de profiter de l'effondrement de l’État syrien pour monter cette entité, d'aller se battre là-bas pour la fougueuse jeunesse militante brûlant d'en découdre avec quelqu'un, était de fait un "cadeau" de l’État turc au PKK sur la table des négociations...
C'EST LE PKK d'Öcalan & co (à moins que ce ne soit, plutôt, la tendance "faucon" de Cemil Bayik) qui, se sentant "pousser des ailes" avec justement "Rojava" et le soutien que celui-ci commençait à recevoir des Occidentaux contre les djihadistes, a renversé cette table et tout jeté par les fenêtres, pour revenir vers une logique de confrontation et ses vieux objectifs séparatistes.
C'est là qu'il y a eu retour à la confrontation ; notamment après l'attentat de Suruç qui était de toute évidence une représaille de Daesh face à la résistance de Kobané, mais que la direction militaire du PKK a immédiatement et délibérément prêté au régime AKP, abattant dans la foulée deux flics, on connaît la suite ; dans un contexte marqué aussi par le succès de la "vitrine légale" HDP ; conduisant Erdogan à un durcissement spectaculaire et à se rapprocher... de la vieille extrême-droite ultra-nationaliste MHP-"Loups Gris" (des gens qui appelaient... à l'assassiner quelques années auparavant).
À un moment donné, il faut regarder les choses en face : derrière les beaux discours de confédération démocratique anti-toute-oppression-ethnique-ou-confessionnelle, la politique du PKK est une véritable course à l'abîme non seulement pour le Peuple kurde, mais aussi et surtout pour la nécessaire unité anti-impérialiste de tous les peuples de la région. On peut d'ailleurs même dire à présent, entre le Bakur sous état d'exception et "Rojava" abandonné par Trump et liquidé, partagé entre Erdogan et Assad, que cette course a atteint son point de chute en fait. Si les Yézidis du Sinjar, désormais bien équipés et entraînés, sont en sécurité, on pourra dire que c'est la seule chose positive qu'il en reste.]
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