• 8 mai 1945 : Jour de Gloire pour l'humanité devenu jour de honte en Algérie...

    Le 8 mai 1945 devait être un jour de joie et de célébration à travers le monde entier. Sous la bannière des Armées populaires partisanes mais aussi (c’est ainsi…) sous celle des Armées nationales capitalistes, les Peuples, les travailleurs du monde entier venaient de jeter à terre le plus grand projet d’oppression, d’exploitation et de barbarie impérialiste ayant existé alors : le nazifascisme.

    Mais dans l’Est de l’Algérie, une tâche indélébile a été jetée sur cette date, pour toujours.

    Les faits sont tristement connus, rappelons les brièvement : défilant pour célébrer, comme dans le monde entier, la défaite du nazisme, des Algérien-ne-s lèvent le drapeau vert et blanc de la libération nationale. Ne leur avait-on pas promis que, pour leur engagement aux côtés de la « France libre », leurs droits nationaux allaient être rapidement reconnus ? Un membre de la Police coloniale surgit et abat un manifestant. L’émeute éclate aussitôt, et plusieurs dizaines d’Européens sont tués par la foule en colère. Mais le sang n’a fait que commencer à couler…  Alors que la colère se propage dans toute la région, le Constantinois, celui-ci est bouclé par l’Armée sur ordre du Gouvernement général d’Alger et du Gouvernement de De Gaulle à Paris, et le massacre commence. Dans les 2 semaines qui suivent, des dizaines de milliers, peut-être 45.000 Algérien-ne-s sont assassiné-e-s, dans une barbarie qui préfigure celle de la guerre d’Indépendance (1954-62)… et rappelle celle de l’occupation nazifasciste en Europe, qui vient de se terminer ! Villages rasés, exécutions de masse après que les victimes aient creusé leur propre fosse commune, prisonniers écrasés par les tanks, femmes violées et éventrées, bébés écrasés contre les murs, etc. etc.

    La Bête nazifasciste à peine écrasée, le jour même, l’impérialisme « normal » reprenait son cours, et montrait qu’avec la barbarie nazie la différence est de degré, pas de nature : le nazisme n’a été que la barbarie impérialiste poussée à son extrême par les conditions de l’époque (crise de 1929 et ses conséquences pour l’impérialisme allemand), mais PARTOUT et TOUJOURS l’impérialisme n’est que massacre, pillage, écrasement des Peuples !

    HONTE, HONTE à ceux qui ont ainsi sali ce Jour de Gloire et de Libération pour tous les Peuples !

    Mais voilà : si la Victoire antifasciste fut dans une grande partie du monde une victoire révolutionnaire des Armées rouges, elle fut aussi dans une autre grande partie la victoire des impérialistes ennemis d’Hitler, entendant bien rétablir « l’ordre naturel des choses ».

    Une victoire permise, dans bien des cas, par l’opportunisme des Partis communistes dirigeant le prolétariat et les masses travailleuses. 1945 est même clairement, en Europe de l’Ouest, l’enterrement de tout espoir sérieux de révolution pour le reste du 20e siècle : jamais plus (même en 1968) de telles conditions ne se présenteront, et elles furent délibérément ignorées.

    Ainsi, parmi les responsabilités des massacres d’Algérie, la plus violemment mise en cause est celle du Parti communiste français. Dirigé par Maurice Thorez, celui-ci prônait alors « l’union sacrée » avec toutes les forces « patriotiques » de la « France libre », y compris celles du plus Grand Capital… Il compte plusieurs ministres dans le gouvernement De Gaulle, dont Charles Tillon, représentant plutôt la ligne de gauche du Parti.

    Servir le Peuple vous propose donc une très intéressante étude historique d'Alain Ruscio, sur la base des colonnes du journal L’Humanité, permettant de cerner la position du Parti de Thorez au cours de ces évènements sanguinaires. Reposant sur des sources d’époque, malgré le problème de la censure qui frappait le journal comme tous les journaux (on était encore en état de guerre), faisant disparaître des colonnes entières, elle permet d’y voir plus clair.

    On y découvre une position PCF complexe, pour ne pas dire tordue, empêtrée dans la « nécessité » d’alors de participation au Gouvernement de la Libération ; empêtrée, aussi, dans la ligne « gauche coloniale », de « colonialisme éclairé », « à visage humain », adoptée au milieu des années 30 au profit du rapprochement avec la « gauche » républicaine bourgeoise (SFIO, radicaux) contre le fascisme et la droite fascisante (une interprétation très droitière de la politique de Front populaire de l’Internationale communiste). Alors que le PC avait été, dans les années 20, d’une solidarité irréprochable avec le Peuple marocain victime de la guerre du Rif (conduite par un certain Philippe Pétain…). Une position, aussi, imprégnée de préjugés sur « l’hitlérisme » des leaders nationalistes, comme Ferhat Abbas ou Habib Bourguiba (qui aurait été « tout juste rentré d’Allemagne », ce qui est FAUX).

    La position, au final, du PCF de mai 1945, est qu’un système colonial réduit aux « cent seigneurs » (les plus gros colons), avec la complicité des nationalistes « hitlériens », a provoqué les troubles et la violente répression qui a suivi (qui est dénoncée, notamment par les sources sur place comme Henri Alleg) pour « briser l’unité des masses algériennes avec le Peuple de France »…

    Une position totalement social-patriotarde, droitiste, erronée sur l’analyse scientifique du fait colonial, et en contradiction complète avec la 8e des 21 conditions fixées par l’Internationale communiste en 1920 : Dans la question des colonies et des nationalités opprimées, les Partis des pays dont la bourgeoisie possède des colonies ou opprime des nations, doivent avoir une ligne de conduite particulièrement claire et nette. Tout Parti appartenant à la IIIe Internationale a pour devoir de dévoiler impitoyablement les prouesses de « ses » impérialistes aux colonies, de soutenir, non en paroles mais en fait, tout mouvement d'émancipation dans les colonies, d'exiger l'expulsion des colonies des impérialistes de la métropole, de nourrir au cœur des travailleurs du pays des sentiments véritablement fraternels vis-à-vis de la population laborieuse des colonies et des nationalités opprimés et d'entretenir parmi les troupes de la métropole une agitation continue contre toute oppression des peuples coloniaux.

    Cette ligne et cette ligne seule explique la position du PCF à l'époque, et non le manque d'information (bien que celle-ci circulait en effet très mal) ou autres... Comme le fait que Tillon, ministre de l'Armée de l'Air, aurait été complètement "court-circuité" par l'état-major : possible et même probable, mais le Parti aurait pu alors menacer de quitter le gouvernement. Il était largement en position de force pour le faire ; et donc faire, peut-être, cesser les massacres. Au moins ça !

    Cependant, on n’est pas non plus sur une position « Tuez tous ces sauvages jusqu’au dernier ». Il faut tordre le cou impitoyablement à la propagande anticommuniste, qui mettrait les communistes en pointe de la répression meurtrière, d’une certaine bourgeoisie communautaire et de ses commanditaires monopolistes bleu-blanc-rouges, qui cherchent ainsi à répandre l’anticommunisme (et non la seule critique du PCF de Thorez) dans les masses des colonies intérieures de l’Hexagone (principalement la colonie intérieure maghrébine), afin de les détourner de la science marxiste, autrement dit du seul véritable outil de libération ! La voie suivie par le BLACK PANTHERS PARTY, l'American Indian Movement et les Brown Berets latinos aux USA, la plupart des organisations de combat anti-appartheid en Azanie, Amilcar Cabral en Guinée-Bissau et au Cap-Vert, Pierre Mulele au Congo-Kinshasa, Eduardo Mondlane au Mozambique...

    http://media.paperblog.fr/i/178/1788774/massacres-setif-guelma-kheratta-debut-guerre--L-1.jpeg


  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :