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  • - Au stade de l’impérialisme, de façon totale ; mais même dans un sens dès le début, puisque la Modernité capitaliste n’est pas simplement "l’économie de marché" (qui a toujours existé dans toutes les sociétés depuis l’entrée dans l’Histoire), mais un Marché financiarisé et surtout intrinsèquement (dès le début) expansionniste impérial/colonial à partir de Centres d’accumulation controverse-de-definitions… eh ben forcément, le patriotisme est lui aussi (en miroir) intrinsèquement le préalable à la libération sociale de classe (de l’exploitation des patrons). C’est ainsi.

    - À partir de là, ça ne peut pas être "n’importe quoi" comme patriotisme non plus certes. J’aime bien, en fait, mobiliser à ce titre un auteur non-marxiste et sur lequel il y a beaucoup de choses à dire par ailleurs, mais dont je trouve cette phrase précise brillante : Jaurès, "un peu d’internationalisme éloigne de la patrie, beaucoup y ramène" (citation-88516.php) ; et inversement : un peu de patriotisme, médiocre en quelque sorte, éloigne de l’internationalisme (n’est que chauvinisme, et pourrait être finalement la définition du nationalisme fasciste lorsqu’il se met au service du pouvoir financier qu’il prétend dénoncer) ; mais beaucoup y ramène, c’est-à-dire qu’un vrai patriotisme non-médiocre au sens d’attachement profondément à son Peuple travailleur et de refus de son oppression, de sa dépossession du pouvoir sur sa vie, rapproche de tous les autres peuples de la Terre dans la même situation, dans ce qu’on appelle l’interNATIONalisme…

    [Concrètement : "Si on est VRAIMENT patriote au sens d'attachement au pays où on vit et travaille (où VOLEM - on veut - vivre, travailler dignement et DÉCIDER) et à son Peuple travailleur qui nous y entoure ; alors on est plus qu'à un poil d'être internationaliste, par compréhension, respect et finalement soutien au patriotisme DES AUTRES, face au même Grand Capital qui nous la met sur toute la planète, certes avec des hiérarchies bien sûr (un Provençal, un Corse même, n'est pas opprimé "comme" un Palestinien ou un Africain).

    C'est si on est MÉDIOCREMENT patriote qu'on est chauvin, suprématiste : "mon peuple est supérieur aux autres".

    Pareillement, un vrai internationalisme comprend cela.

    Tandis qu'un internationalisme médiocre ramène toujours en dernière analyse à un UNIVERSALISME, c'est à dire une idée de Lumières apportées mondialement par son pays à l'humanité entière - "on doit tous être égaux, mais à ma manière" !"]

    - C’est ici que surgissent plusieurs "difficultés" :

    1°/ Qu’est-ce qui est une patrie et qu’est-ce qui n’en est pas une, déjà. Tous les États (pratiquement) de plus de 100.000 km² dans le monde ne sont pas des "nations" au sens scientifique léniniste de ce mot ; mais… des États, qui sont à la base des "empires" de Centres capitalistiques et qui en regroupent, ou plutôt en ont au cours de l’histoire annexé, soumis, opprimé plusieurs. La France est bien entendu dans ce cas, construction séculaire par la conquête autour de Paris, et même parmi les derniers États au monde à s’étendre en administration directe "sur les 5 continents", c’est-à-dire à posséder des colonies outre-mer.

    2°/ Aujourd’hui (enfin, depuis quelques décennies) on peut effectivement considérer être dans une tendance à une nouvelle concentration du pouvoir capitalistique, au-delà de celle qui a donné ces grands États : concentration européenne autour de l’axe rhénan, concentration mondiale (la "mondialisation", avec ses instruments comme le FMI, l’OMC, la Banque mondiale etc.) autour de l’"Anglo-Saxonie" planétaire, principalement la superpuissance hégémonique unique US. Tout cela est une réalité ; mais c’est aussi une réalité que les contestations "souverainistes" de cela partent en général sur la base des constructions États, elles-mêmes Prisons de Peuples, qui ne sont pas remises en cause.

    3°/ La construction-concentration Europe, ce n’est pas juste l’Allemagne et l’Allemagne... La France aussi y a sa part et ses intérêts ; sauf une fraction de la bourgeoisie qui n’y trouve pas son compte et qui est précisément celle qui impulse les discours souverainistes et anti-"mondialisme" quand-un-referendum-chez-la-perfide-albion-provoque-des-fretillements. Que la Grèce, le Portugal, voire l’État espagnol voire l’Italie se sentent des provinces reléguées de cette construction, ça peut se comprendre, mais la France c’est quand même autre chose. Ou alors, il faut affiner un peu les choses dans leur complexité : le Centre financier parisien (+ ses quelques "métropoles connectées" "relais" régionales) s’est "greffé" à l’axe rhénan et y trouve son compte (cette métropole, ce Centre de la construction européenne apparaît même sur les cartes... des émissions de gaz polluants) ; le reste, qui était sa "province" violemment entubée, se retrouve encore plus "provincial" (mais enfin, quand même pas comme la Grèce ou le Portugal ou la Roumanie) dans ce nouvel édifice. À la limite on peut voir les choses comme ça.

    4°/ La contestation souverainiste de l’UE et de la "mondialisation" par une fraction bourgeoise qui n’y trouve pas son compte, n’est tout de même pas la seule chose en ligne de compte. On ne peut pas réduire qu’à pure aliénation (à cette fraction bourgeoise) le refus des classes populaires d’aller, dans ces nouveaux édifices continentaux ou planétaires, vers encore plus de dépossession de tout pouvoir sur leurs vies que celle déjà infligée depuis des siècles par le capitalisme et l’appareil technocratique d’État (parisien en France).

    5°/ Le souci c’est que ce sentiment légitime reste largement dans les griffes de la fraction bourgeoise souverainiste, et de ce fait ne remet pas en cause la construction séculaire étatique et impériale bleu-blanc-rouge, qu’au contraire il va souvent sacraliser. Il ne va pas remettre en cause, en fait, cette dépossession séculaire des peuples par l’appareil d’État parisien, ni (voire encore moins) celle infligée depuis le "camp de base" hexagonal à des dizaines de peuples sur la planète, et qui l’est toujours d’ailleurs (sous une forme néocoloniale départementalisée ou pseudo-indépendante). Tout ça n’est évidemment pas contesté par la bourgeoisie souverainiste, c’est au contraire ce qu’elle veut préserver (car elle le sent menacé, la hantise du dépeçage territorial et de la perte de colonies est pour ainsi dire consubstantielle à l’idéologie bourgeoise française…) ; et les classes populaires dans leur grande majorité marchent dedans.

    6°/ La France n’est pas une nation si on prend la définition léniniste de celle-ci (même si ni Illitch ni l’Oncle Jo ni Kaypakkaya ne se sont trop penchés sur son cas), c’est un fait incontestable. Pour autant, elle peut exister dans les masses populaires comme signifiant pas forcément uniquement réactionnaire ; car cet ensemble de peuples, dans le même bateau depuis des siècles, a déjà pu vivre dans ce même bateau des expériences qu’on peut considérer positives (la Révolution de 1789 du moins avant que ça parte en couille avec le retour en force du centralisme, 1848 ou encore décembre 1851, la Défense nationale de 1870 débouchant sur le moment révolutionnaire de 1871, les luttes sociales de 36 et la lutte et la victoire antifasciste de 1940-45, bref, "Ma France" de Ferrat quoi).

    [Voir ici quelques réflexions à ce sujet et une "rectification" récente : les-francais-selon-nous-ne-sont-pas-les-gens-du-bassin-parisien]

    C’est ce que tu as su percevoir face aux drapeaux tricolores et aux Marseillaises des Gilets Jaunes, et je me suis largement rangé à ton analyse : des références conçues dans ce contexte précis comme révolutionnaires, 1789, Bastille et compagnie, raccourcir la tête au roi ; à une époque, la nôtre, où le fait est que les références drapeau rouge et Internationale ne rallieraient pas 10% de ce monde (il n’est même pas sûr qu’elles en ralliaient autant au plus fort de 36 ou de 68, en fait…), donc ne feraient pas bouger un cil au pouvoir macronien.

    "La France" avec ses grands symboles a peut-être été, globalement, depuis 800 ans, 90% du temps une armée plus ou moins volontaire au service d’un cartel de bourgeoisies sous la conduite de Paris, dans ses projets impériaux ; mais elle a pu AUSSI parfois "faire France" dans le sens d’une libération démocratique et sociale (repossession de souveraineté sur leurs vies) au moins de ceux et celles qui l’habitent (mais c’est déjà ça…). Il existe, bel et bien, cette possibilité de "faire France" comme ensemble de Peuples travailleurs (et cette conscience-là aussi se manifeste chez les GJ par une floraison de drapeaux régionaux - voir lien ci-après) ralliés autour d’un projet politique qui ne soit pas exclusivement réactionnaire (pas être les petits soldats du cartel bourgeois).

    Voire même, peut-être, la possibilité… de renouer avec l’esprit originel tout sauf centralisateur parisien d’une Révolution née à Grenoble contre une manœuvre (justement) centralisatrice royale, avant le retour de bâton de 1794 ; esprit de République "une et indivisible" certes, mais sur la base d’une démocratie participative locale vivante et permanente ? Pourquoi pas…

    Mais évidemment, et malheureusement, l’ambigüité autour du signifiant France-BBR-Marseillaise permet toujours (et assez facilement) le retournement de la chose en son contraire.

    Bref, question compliquée et qu’on est à mon avis loin d’avoir tranchée.


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  • "Face à une répression policière et judiciaire féroce, en l’absence de résultats tangibles au bout de six mois de lutte, le soulèvement des Gilets jaunes connaît aujourd’hui un passage à vide tout à fait normal. Ce dernier demeurera sans conséquences… à condition que les GJ sachent renouveler leur stratégie et se concentrer sur leur seul véritable objectif à atteindre.

    Les chiffres de participation aux derniers actes hebdo (je parle de ceux sérieusement établis par le Nombre jaune) en attestent : celle-ci s’effrite au fil des semaines, même si elle est loin d’être aussi négligeable que tentent de s’en rassurer le ministère de l’Intérieur et les éditocrates affolés de la presse de propagande.

    Avouons-le, les thèmes des derniers « actes » hebdomadaires laissaient plutôt à désirer. Manifester « contre » ceci ou « contre » cela, c’est se placer sur la défensive quand il faudrait aller résolument à l’offensive « pour » arracher quelque chose. Et il ne suffit pas, semaine après semaine, de chanter sur l’air des lampions qu’on va aller chercher Macron chez lui, si on n’y va pas vraiment une bonne fois pour toutes.

    Privilégier une stratégie de guérilla à des démonstrations de masse épuisantes et stériles

    « Si on nous laisse faire c’est qu’on ne dérange pas, et si on ne dérange pas on n’aura rien. »

    Même s’il le dit de façon un peu abrupte et maladroite, Éric Drouet a perçu le danger : les manifs bon enfant du samedi ne font plus peur à personne dans le camp d’en face (au point que les forces de l’ordre se sont à peine senties contraintes d’intervenir lors de l’acte 29 du 1er juin). Or l’expérience montre que les actes les plus efficaces ont été ceux qui ont vraiment fichu la trouille au pouvoir et à son camp retranché.

    Voilà pourquoi une stratégie de guérilla est désormais bien préférable à des démonstrations de masse épuisantes et stériles :

    - frapper là où ça fait mal : la multiplication des blocages de dépôts pétroliers ou de plateformes de grande distribution, la neutralisation de radars ou de péages, même de très courte durée, est bien plus usante pour le système qu’une « grève illimitée » qu’on ne peut pas tenir ou qu’une centaine de défilés en chansons bonnardes ;

    - frapper là où ça leur fait peur : les comités « d’accueil » qui marquent désormais à la culotte tout déplacement du président de la République, l’intervention à mains nues d’un boxeur décidé, l’invasion impromptue du ministère Griveaux à coups de tractopelle ou la dernière intervention coup de gueule devant le domicile de la ministre Schiappa, sont beaucoup plus déstabilisants pour les acteurs du régime que les démonstrations planplan répétitives du samedi.

    [On notera que j’écarte ici la possibilité d’une grève générale illimitée : trop difficile à mobiliser et à pérenniser dans un contexte social précarisé, illusoire dans un contexte économique où une bonne partie des outils de production a été délocalisée en dehors du territoire, de toute façon toujours torpillée par les centrales syndicales. Depuis 1968, une seule grande grève a obtenu gain de cause : la grève contre le CPE (Contrat première embauche) en 2006 et elle n’était qu’étudiante.]

    Un seul objectif : démanteler définitivement la 5ème République et neutraliser ses responsables corrompus

    Égrener de semaine en semaine la litanie des revendications en matière de justice sociale et d’exigence politique (le RIC), c’est laisser supposer que ces revendications peuvent être satisfaites par le pouvoir en place. Sauf à être le dernier des naïfs ou une autruche incorrigible, on sait très bien que Macron et sa bande n’en ont nullement l’intention, ni même d’ailleurs la latitude, tant ils sont tenus par leurs commanditaires.

    Dès lors, le seul véritable objectif du soulèvement des Gilets jaunes tombe sous le sens : le démantèlement total du régime, c’est-à-dire de la 5ème République, et la neutralisation de ses responsables corrompus.

    Tant qu’il n’aura pas pris conscience de la nécessité de renouveler sa stratégie et de se fixer l’objectif très clair de s’emparer du pouvoir politique (tout en se structurant politiquement pour préparer la relève), le mouvement des Gilets jaunes est condamné à stagner pour une très longue et très pénible période. Gageons cependant que celui-ci saura réagir puisque la précarisation insupportable des classes dites inférieures qui a motivé le soulèvement des GJ – et qui lui vaut toujours le soutien des classes moyennes elles-mêmes menacées – ne peut aller qu’en s’aggravant .

    => Photo : blocage du dépôt pétrolier de La Pallice à La Rochelle le vendredi 31 mai, en marge de l’acte 29 des Gilets jaunes"

    https://yetiblog.org/archives/17820

    #GiletsJaunes - article intéressant


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