• En ce mois de mai, nous "célébrons" le 50e anniversaire de l'un des derniers grands massacres colonialistes de l'Empire français : la répression de Mé 67 en Gwadloup.

    Gwadloup : Cinquantenaire du massacre de Mé 1967 ! (PCM)

     

    Et à ce sujet, voici un article TRÈS INTÉRESSANT à lire par rapport à la continuité entre cette répression et la gestion coloniale actuelle des quartiers populaires (et des colonies intérieures) en Hexagone :

    Des massacres oubliés de mai 1967 en Guadeloupe aux prémices de l’ordre sécuritaire moderne dans les quartiers

     

    par Mathieu Rigouste 29 mai 2017

    #SonjéMé67

    C’est une commémoration méconnue : il y a 50 ans, les 26 et 27 mai 1967, la police et l’armée françaises réprimaient brutalement des manifestations ouvrières et lycéennes en Guadeloupe. Alors que Pointe-à-Pitre se révolte, les forces de l’ordre se livrent à un massacre qui fait au moins 8 morts selon les sources officielles. Des recherches approfondies démontrent qu’un modèle de contre-insurrection a été expérimenté sous l’autorité d’un préfet, Pierre Bolotte. Formé en Indochine puis en Algérie, il deviendra le premier préfet de la Seine-Saint-Denis et l’architecte d’une nouvelle forme de police, inspirée de ce modèle colonial et militaire. Enquête aux sources de l’ère sécuritaire.

    Les 26 et 27 mai 1967, l’État français encadrait le massacre de révoltes populaires en Guadeloupe. Structuré par le racisme et la colonialité du pouvoir, ce crime découle aussi de l’application d’une doctrine de guerre policière. Des archives inédites du préfet de la Guadeloupe Pierre Bolotte montrent qu’un modèle de contre-insurrection a été expérimenté. Formé pendant la guerre d’Indochine puis sous-préfet en Algérie, ce professionnel de ce que l’armée appelle « la pacification » deviendra le premier préfet de la Seine-Saint-Denis où il supervisera la création et le déploiement de la Brigade anti-criminalité (BAC). Le parcours du préfet Pierre Bolotte retrace à lui seul la généalogie coloniale et militaire de l’ordre sécuritaire contemporain.

    Une guerre anti-subversive forgée en Indochine

    Entré dans le corps préfectoral en 1944, sous l’occupation nazie, Pierre Bolotte est reconduit à son poste après la Libération. Sa carrière de pacificateur colonial commence au début des années 1950. Secrétaire général de la Guadeloupe en 1951-1952, il rejoint en avril 1952 le cabinet du ministre d’État pour l’Indochine. Il y fait le lien entre la colonie et la métropole.

    Bolotte fait alors partie des cadres civils qui participent à la réflexion et à l’expérimentation de formes militaro-policières de répression et de gouvernement qui donnent naissance à la doctrine de la « guerre contre-révolutionnaire ». Ce modèle de contre-insurrection programme la destruction de l’« organisation ennemie » en brisant toute forme de résistance dans la population [1].

    Une méthode systématisée en Algérie

    Après l’Indochine, Bolotte est affecté à sa demande en Algérie. Sous-préfet de Miliana de mai 1955 à août 1956, il a « la possibilité de mettre en action ce que m’avaient appris les affaires d’Indochine », écrit-il dans ses mémoires [2]. Bolotte transfère alors et réagence des « hiérarchies parallèles », structures d’encadrement et de surveillance de la population. Il établit un « bureau militaire » et met en place des unités mixtes militaires et policières. Selon lui, il faut quadriller le territoire, fournir du travail aux populations et taper fort dès les prémisses de résistances collectives.

    Dans une lettre confidentielle qu’il envoie au premier ministre le 28 février 1956, il propose pour l’Algérie « un pouvoir fort – peut-être même dictatorial – [qui] comporterait [...] le retour à l’ordre et le véritable progrès économique et social [3]. » Il est promu directeur de cabinet du préfet d’Alger en août. Il y renforce la police et établit des échanges entre les préfectures d’Alger et de Paris.

    Appliquée à Alger

    À Alger, Bolotte crée et répartit des patrouilles de huit à dix hommes dans les « quatre quartiers sensibles ». Il étend ensuite leur « mission de surveillance » puis développe « de nouvelles méthodes » en composant ces patrouilles de militaires ou de CRS « livrées à elles-mêmes ». Il expérimente ainsi des prototypes de commandos de police autonomisés. Cette expérience est fondatrice de son savoir-faire en matière de répression.

    Bolotte forge à Alger un modèle d’encadrement militaro-policier, racialisé et sexualisé des quartiers colonisés, depuis le répertoire contre-insurrectionnel indochinois. Il participe aussi à la conception de la bataille d’Alger, première grande application de cette guerre moderne en ville par la militarisation de la Casbah en 1957 [4]. Menacé par la montée en puissance de la connexion entre militaires et colons “ultras”, Bolotte maintient l’idée que « toute guerre anti-terroriste est une "sale guerre’’ » et qu’« il faut en passer par là si l’on veut ramener l’ordre et la paix ».

    Comme tous les partisans d’un déploiement et d’une exportation de cette doctrine, il considère que la bataille d’Alger a réussi à soumettre le mouvement de libération algérien. Il omet et cache ainsi les soulèvements populaires de décembre 1960, qui ont ruiné ce mythe [5].

    Adaptée à la Guadeloupe

    En septembre 1958, Pierre Bolotte est muté à la Réunion. Il y développe une politique de “pacification” néocoloniale « pour éviter le développement d’une tendance plus ou moins autonomiste ». Depuis cette grille de lecture, il dirige des programmes de contraception forcée et de déportation en métropole.

    En juin 1965, il obtient le titre de préfet et est nommé en Guadeloupe. Après un tour des notables et des administrations, il se dit « informé et convaincu de l’existence de plusieurs petits organismes qui militaient pour l’autonomisme, et même pour l’indépendance ». Il met alors en alerte les cabinets ministériels, Matignon et l’Élysée. « Je fus entendu, et je revins persuadé qu’il y avait là […] une menace directe contre les départements français de la Caraïbe », écrit-il, confirmant déjà l’application de la grille de lecture anti-subversive à la Guadeloupe.

    L’État se focalise alors sur le Groupe d’organisation nationale de la Guadeloupe (GONG). Fondé à Paris en 1963, celui-ci compte une dizaine de membres qui revendiquent l’autodétermination, écrivent des slogans indépendantistes sur les murs et diffusent des tracts dans les luttes sociales.

    « À traiter sans ménagement aucun »

    En 1966, l’île est dévastée par un cyclone. Les inégalités structurelles amplifient la dégradation des conditions de vie et la colère sociale se renforce. Le 20 mars 1967, à Basse-Terre, un riche marchand blanc lance son chien contre un cordonnier noir handicapé. Une révolte éclate et le magasin est mis à sac. « Des jeunes gens, plus ou moins organisés [...] arrivèrent et il y avait parmi eux des adhérents bien repérés du GONG, l’organisme leader de l’autonomisme », affirme Bolotte. « Redoutant le pire de la part des autonomistes », il envoie la police et des renforts de gendarmerie pour « disperser ». Il interdit toute réunion et menace « les agitateurs irresponsables ». Le gouvernement lui assure sa « pleine confiance » et lui affirme que « cette organisation séparatiste est à traiter sans ménagement aucun ».

    Fin mai, les ouvriers du bâtiment entament une grève pour des augmentations de salaire. Le 26 mai, devant le siège où les négociations sont bloquées par le patronat et le préfet, des insultes fusent contre les CRS. L’ordre est donné de disperser et des manifestants contre-attaquent. Les forces de l’ordre reçoivent des projectiles et comptent des blessés. Bolotte décrit le centre de Pointe-à-Pitre « proie d’une véritable flambée de violence ».

    Jacques Nestor, un militant du GONG ciblé par les renseignements depuis mars 1967 est abattu. Comme l’a confirme une commission d’information et de recherches mise en place en 2014, il a « sans doute été visé intentionnellement » par un policier [6]. Deux autres manifestants s’effondrent une balle dans le front. « Il a fallu dégager la place avec une certaine violence », écrira Jacques Foccart, secrétaire général de l’Élysée aux affaires africaines et malgaches [7]. La nouvelle se répand et Pointe-à-Pitre se soulève. Des Blancs sont attaqués et deux armureries pillées. Des jeunes des bidonvilles accourent vers le centre ville pour défier l’ordre colonial comme en décembre 1960 en Algérie.

    Bolotte déploie des gardes-mobiles formés dans et par la guerre Algérie, comme une grande part des troupes et des cadres dirigeant les états-majors policiers, militaires et politiques à l’époque. Le préfet est dès lors couvert par Foccart auprès de De Gaulle. L’armée est autorisée à tirer pour maintenir une forme de couvre-feu. Des témoins décrivent plusieurs personnes abattues dans la rue, des tabassages et des corps à la sous-préfecture, des tortures lors d’interrogatoires et des disparitions forcées. L’aspect technique et systématisé de ces violences militaro-policières est caractéristique de l’appareillage “anti-subversif”.

    Le lendemain, 27 mai, un millier de lycéens défilent dans les rues pour soutenir les ouvriers et dénoncer la répression. Bolotte assure que « des meneurs du GONG incitaient les élèves [ …] à manifester ». Il fait alors procéder au « quadrillage des carrefours de la ville et de ses accès ». Les lycéens sont dispersés sans ménagement. Les affrontements reprennent et les gendarmes tirent. L’État reconnaîtra officiellement huit morts mais des témoignages suggèrent un chiffre bien supérieur. Le procès intenté en 1968 contre différents militants, notamment du GONG, prouvera par ailleurs son absence d’implication et le caractère spontané de la révolte de Mé 67 [8].

    Des colonies à la Seine-Saint-Denis

    Fin juin 1967, Pierre Bolotte est envoyé à Paris et devient en 1969 le premier préfet d’un nouveau département expérimental, la Seine-Saint-Denis. Le ministre de l’Intérieur Raymond Marcellin, passionné de contre-insurrection, le charge de concevoir une nouvelle architecture de police. Sous l’autorité de Bolotte, l’officier Claude Durant conçoit une police “anticriminalité” pour chasser les nouvelles figures de l’ennemi intérieur dans les quartiers populaires. La première Brigade anti-criminalité (BAC) est fondée le 1er  octobre 1971 à Saint-Denis, en adaptant pour la ségrégation néolibérale les techniques de police élaborées par Bolotte à Alger.

    Ces unités sont généralisées en avril  1973. Le préfet s’implique pour qu’on développe ces « îlotages » dans tous les quartiers des « banlieues à forte population immigrée »« tous ces actes criminels de plus en plus nombreux, insensibles et agressifs, sont allés se développant. Tout cela représente le retour d’une barbarie primitive, et c’est un pas en arrière de nos civilisations », résume-t-il au tournant des années 2000.

    La carrière du préfet Bolotte montre comment l’ordre sécuritaire émerge au croisement de la restructuration néolibérale et de la contre-révolution coloniale. On y voit l’industrie de la guerre policière se développer face à la recomposition constante des résistances populaires.


    Mathieu Rigouste est chercheur indépendant en sciences sociales. Il est l’auteur, notamment, de La domination policière, une violence industrielle, La Fabrique, 2013 et État d’urgence et business de la sécurité, Niet Editions, 2016. )

    Notes

    [1Voir Mathieu Rigouste, L’Ennemi intérieur. La généalogie coloniale et militaire de l’ordre sécuritaire dans la France contemporaine, La Découverte, 2009.

    [2Pierre Bolotte, Souvenirs et témoignages d’un préfet de la République (1944-2001), non publié, Fonds P.Bolotte Archives de la Fondation nationale des sciences politiques, FNSP.

    [3FNSP, Centre d’histoire de Science-Po, fonds Pierre Bolotte, PB9, Ministère des relations avec les états associés, Instruction sur la conduite de l’action politique dans le cadre de la pacification au Vietnam, PV/CB/6.

    [4Le 7 janvier 1957, le gouvernement français confie au général Jacques Massu les pleins pouvoirs de police sur le Grand Alger pour mettre fin au terrorisme dans l’agglomération.

    [5Recherche en cours, cf Mathieu Rigouste, Un seul héros le peuple. La contre-insurrection mise en échec par le peuple algérien en décembre 1960, unseulheroslepeuple.outrenet.com.

    [6Commission d’information et de recherche historique sur les évènements survenus entre les 20 et 23 décembre 1959 en Martinique ; les évènements relatifs aux conditions de l’accident d’avion survenu le 22 juin 1962 en Guadeloupe et en Guyane, et les évènements survenus entre les 26 et 28 mai 1967 en Guadeloupe, mandatée en 2014 par le ministère de l’Outre-mer, dirigée par Benjamin Stora. Voir le rapport de la commission de novembre 2016.

    [7Jacques Foccart, Tous les soirs avec De Gaulle, Fayard, 1997.

    [8Voir le dossier réalisé par le collectif Cases Rebelles

     


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  • ... l'"anticapitalisme romantique" fasciste c'est la poursuite d'un capitalisme "non-financier", autrement dit antérieur à la fusion (entre le milieu et la fin du 19e siècle) des capitaux industriels et bancaires en Capital financier monopoliste ; ce qui signifie quelque part antérieur à la révolution industrielle elle-même, et à la révolution politique bourgeoise qui en a été le préalable nécessaire ; DONC un retour au petit capitalisme artisanal et corporatiste d'Ancien Régime.

    Comme cela n'est (évidemment) pas possible, ce corporatisme est en réalité mis au service... des monopoles, du capitalisme financier (pourtant dénoncé) lui-même, sous la forme d'une "association Capital-Travail".

    Et d'ailleurs, dans l’État français, après la brève expérience de Vichy, ce sont les régimes... des Trente Glorieuses, la IVe et la Ve République, qui ont essentiellement mis en place un tel système.

    Mais alors du coup, un régime fasciste, entendu comme rupture radicale par rapport à l'antérieurement existant... POURQUOI FAIRE ?

    Il semble bien, en 2017 après Jésus-Christ, qu'il faille voir la fascisation rampante de l'ordre bourgeois comme un durcissement et un perfectionnement de la contre-révolution préventive. Comme "rupture" violente et radicale pour faire entrer un État bourgeois archaïque (comme l'Allemagne et encore plus l'Italie, l’État espagnol, l'Autriche, le Japon etc.) dans l'ère pleine et entière des monopoles triomphants et de la contre-révolution préventive, un tel régime n'est plus nécessaire.


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  • Il y a 146 ans jour pour jour expirait, dans les fleuves de sang de la répression ordonnée par l'homme de centre-gauche Adolphe Thiers, la Commune de Paris : la plus mondialement connue des Communes de cette "année terrible" (les autres se situant pour la plupart dans la moitié méridionale de l'Hexagone, en Occitanie et Arpitanie : Marseille, Narbonne, Toulouse, Limoges, Lyon, Saint-Étienne, sans compter une nombre incalculable de petits patelins), qui furent les PREMIÈRES EXPÉRIENCES DE POUVOIR RÉVOLUTIONNAIRE DU PROLÉTARIAT de l'Histoire.

    Si vous n'avez pas cliqué "retour" dès votre arrivée sur ce site communiste, c'est qu'il est à peu près inutile de s'étendre sur cet épisode historique que vous connaissez certainement par cœur.

    Mais une chose sur laquelle on attire usuellement peu, pour ne pas dire pas du tout l'attention, est la suivante.

    À l'avènement de Napoléon Bonaparte et du 19e siècle, vers 1800, Paris comptait quelque part entre 550.000 et 600.000 habitant.e.s, intégralement compris à l'intérieur de l'enceinte dite "des Fermiers généraux". L'agglomération s'étendra progressivement au-delà jusqu'à de nouvelles fortifications édifiées (déjà par Thiers...) sous la Monarchie de Juillet (1841-44) et qui deviendront en 1860 (Haussmann) les nouvelles limites de la Ville de Paris telle que nous la connaissons ; puis encore au-delà...

    Le graphique ci-dessous montre bien la population de l'unité urbaine (agglomération) qui "décroche" de celle de la ville autour de 1835, puis est rattrapée par elle avec l'agrandissement de 1860, mais en décroche à nouveau presque instantanément, etc.

    Commune de Paris, Commune d'immigrés !

    Bref, lorsqu'est proclamée la Commune en mars 1871, ce sont quelque chose comme 2,2 ou 2,3 millions d'habitant.e.s qui peuplent le Grand Paris avec sa naissante banlieue ; soit pratiquement le QUADRUPLE (+300%) de la population du début du siècle.

    Il est bien évident que ceci n'est pas le résultat du seul accroissement naturel : durant la même période, la population générale de l’Hexagone n'a augmenté que de 28%.

    Du fait du développement et de la CONCENTRATION de l'activité capitaliste, de son "aspiration" (en quelque sorte) de la richesse et des ressources naturelles et HUMAINES, la capitale de l’État moderne français s'était tout simplement, durant ces 70 années et encore par la suite jusqu'à nos jours (pour dépasser actuellement les 10 millions d'habitant.e.s...), peuplée de ce que l'on appelle communément des IMMIGRÉ.E.S.

    Un grand nombre de ces personnes venaient, déjà, de l'extérieur de l’État français ; et beaucoup plus encore, surtout, des provinces de celui-ci qui en 1789 étaient encore "réputées étrangères" et où de fait moins de la moitié de la population parlait, encore sous le Second Empire, un français à-peu-près correct [voir par exemple cet ouvrage : https://books.google.fr/books?id=66e9DAAAQBAJ&pg].

    Des gens, exactement comme aujourd'hui, quittant leur chez-eux attirés par l'espoir d'une vie économiquement meilleure là où la richesse pompée de toute part se concentre. S'entassant, arrivés sur place, dans les taudis misérables et lugubres que les lecteurs du colonialiste bien-pensant Hugo et de l'anti-communard Zola connaissent bien ; fournissant dans les usines la dose de SUREXPLOITATION dont le capitalisme a besoin pour permettre l'exploitation "simple" des "déjà-là" (leur permettre d'être "plus égaux que les autres" en quelque sorte), exactement comme par la suite avec l'immigration essentiellement européenne (des marges périphériques de l'Europe) de la première moitié du 20e siècle puis avec l'immigration coloniale de la seconde moitié ; et confrontés à toutes sortes de vexations xénophobes : ainsi le terme "baragouin", désignant un "sabir" étranger incompréhensible, vient-il des mots bretons bara et gwin (pain et vin) que prononçaient les nouveaux arrivants en quête d'une auberge dans la capitale ; le terme de "bougnats" pour désigner les Occitans auvergnats viendrait de "du boùn y a", littéral équivalent de "y'a bon", etc. etc.

    Et ce sont donc ces gens qui, écrasés de misère, feront en 1871 la Commune ; première grande expérience révolutionnaire du prolétariat dans l'histoire de l'humanité.

    Voilà qui serait toujours bon à rappeler face à un certain nombre de choses : une certaine tendance au PARISIANISME DE GAUCHE qui exalte et appelle à son renfort l'expérience communarde en effaçant littéralement les dizaines d'autres situées en province et en l'opposant (justement) à une province soi-disant "réactionnaire", tout d'abord ; les tentatives de récupération par une certaine extrême-droite, mais aussi par la France Insoumise de Mélenchon, au service du patriotisme étatique français ensuite (il est certes vrai qu'aux côtés du drapeau rouge les drapeaux tricolores pouvaient être présents, la Commune étant tout de même née de la défense militaire de la ville contre le siège prussien, mais bon...) ; sans parler des discours de certains "communistes" "maoïstes" sur une immigration qui "abîme(rait) le tissu prolétarien national" et "divise(rait) les masses en faisant s'installer des centaines de milliers de personnes issues des campagnes et pétries d'idéologie semi-féodale"...

    Il y a bel et bien un roman national de gauche qui fait de Paris, et éventuellement de quelques grandes villes comme Lyon, les "phares" de la lutte révolutionnaire ; et des campagnes un ramassis de "bouseux" arriérés, cléricaux et conservateurs. Et puis il y a les FAITS qui sont que les "classes dangereuses" du 19e siècle, couches les plus pauvres et opprimées du prolétariat qui faisaient trembler l'ordre bourgeois et sur lesquelles la maréchaussée ne relâchait pas la pression, étaient massivement constituées de cette immigration de la "province" vers Paris ou de ces campagnes "patoisantes", soi-disant arriérées et réactionnaires, vers les grandes villes à la bourgeoisie francisée et "moderne" de longue date (mais ce n'était pas elle qui était sur les barricades !)... Et que, c'est une certitude mathématique, peut-être la moitié ou pas loin de la moitié des Communards (Parisiens de classe populaire en âge de tenir une arme) n'étaient pas nés à Paris ; et sans doute une majorité était soit dans ce cas, soit du moins de parents dans ce cas.

    Faits soigneusement occultés par le "roman national de gauche", ce qui conduit inéluctablement à des raisonnements comme celui des "matérialistes.com" ('p''c'F'mlm') que nous venons de citer ; raisonnements selon lesquels les récents arrivants dans un territoire industrialisé seraient un "danger" de "décomposition du tissu prolétarien" et de "contamination" (en quelque sorte) par des "idéologies semi-féodales réactionnaires" (ceci s'adresse aujourd'hui, évidemment, aux migrants venant du "Tiers Monde" impérialisé).

    Nous RÉAPPROPRIER cette formidable page de gloire révolutionnaire comme étant AUSSI LA NÔTRE, au-delà de seulement rappeler que nous avons nous aussi eu nos Communes en Occitanie, est donc une nécessité de notre combat de réaffirmation en tant que Peuple dans le cadre de notre lutte de classe ; et plus largement, du combat contre toutes les négations des Peuples au profit d'une pseudo-identité "révolutionnaire française" constitutive du "roman national de gauche" au service de la bourgeoisie.


    Òsca la Comuna !

    Commune de Paris, Commune d'immigrés !


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  • Il y a un demi-siècle, au printemps 1967, débutait autour de cette petite ville du Nord-Est de l'Union indienne (État du Bengale Occidental), non loin de Darjeeling mondialement connue pour ses plantations de thé, la Guerre populaire d'Inde qui d'avancées en détours et reculs se poursuit héroïquement de nos jours (désormais sous la conduite du Parti communiste d'Inde maoïste).

    Publié sur Inde Rouge

     

     

    Un tonnerre printanier en Inde (Quotidien de Pékin, 1967)

     

    Publié dans le Renmin Ribao (Le Quotidien du peuple, organe de presse du Comité central du Parti communiste de Chine), le 5 juillet 1967


    Un violent tonnerre printanier ébranle la terre indienne. Les paysans révolutionnaires de la région de Darjeeling se dressent dans la révolte.

    Ainsi est née en Inde une région rurale rouge de la lutte armée révolutionnaire sous la direction des révolutionnaires du Parti communiste indien ! C’est là un important développement de la lutte révolutionnaire du peuple indien.

    Ces derniers mois, sous la direction des révolutionnaires du Parti communiste indien, les masses paysannes de la région de Darjeeling ont brisé le joug du révisionnisme moderne et toutes leurs chaînes.

    Elles ont arraché aux propriétaires fonciers et aux planteurs des céréales, des terres, des armes, puni les despotes locaux et les mauvais hobereaux, pris en embuscade les soldats et policiers réactionnaires qui cherchaient à les anéantir, manifestant ainsi la grande puissance de la lutte armée révolutionnaire des paysans.

    Au mépris total de l’impérialisme, du révisionnisme, des fonctionnaires corrompus et concussionnaires, des despotes locaux et des mauvais hobereaux, des soldats et policiers réactionnaires, les paysans révolutionnaires osent les renverser et les abattre.

    Cet acte des révolutionnaires du PCI est juste et excellent. Le peuple chinois salue chaleureusement la tempête révolutionnaire des paysans de la région indienne de Darjeeling.

    Les marxistes-léninistes et les peuples révolutionnaires du monde entier la saluent avec enthousiasme.

    La révolte des paysans indiens et la révolution du peuple indien sont inévitables, car elles sont fonction de la domination réactionnaire du Congrès national indien. Sous sa domination, l’Inde, indépendante pour la forme, reste toujours une société semi-coloniale et semi-féodale.

    Représentant les intérêts des princes féodaux, des grands propriétaires terriens et des bourgeois bureaucratiques et compradores sur le plan intérieur, le gouvernement du Congrès national opprime et exploite cruellement le peuple, et sur le plan extérieur, tout en continuant à dépendre de l’impérialisme britannique, ancien suzerain de l’Inde, il s’est jeté maintenant dans les bras de ses nouveaux maîtres, l’impérialisme américain et son complice numéro un, la clique révisionniste soviétique, trahissant on ne peut plus perfidement les intérêts de la nation.

    Telles de hautes montagnes, l’impérialisme, le révisionnisme soviétique, le féodalisme et le capitalisme bureaucratique et compradore pèsent lourdement sur le peuple indien, notamment sur les grandes masses ouvrières et paysannes qui peinent et qui souffrent.

    Ces dernières années, du fait que le gouvernement du Congrès national a opprimé et exploité de plus belle le peuple indien et a appliqué avec un zèle accru la politique de trahison à la nation, les famines se sont succédées en Inde d’année en année, les morts de faim gisant un peu partout.

    Le peuple indien, et particulièrement la grande masse des paysans, est réduit à la dernière extrémité. A présent, les paysans révolutionnaires de la région de Darjeeling se dressent enfin dans la révolte, ils se dressent pour une révolution violente.

    C’est le signe précurseur d’une révolution violente dans laquelle s’engageront des centaines de millions d’Indiens du pays tout entier.

    Le peuple indien finira par renverser ces hautes montagnes et s’émanciper complètement. C’est la tendance générale, irrésistible, de l’histoire indienne.

    Quelle voie doit prendre la révolution indienne ? C’est une question fondamentale dont dépendent l’issue de la révolution indienne et le sort des 500 millions d’Indiens. La révolution indienne doit suivre la voie consistant à s’appuyer sur les paysans, à créer des bases d’appui rurales, à persévérer dans une lutte armée prolongée et à encercler les villes à partir de la campagne pour remporter finalement la victoire dans les villes.

    C’est la voie de Mao Zedong, (c’est la voie victorieuse que la révolution chinoise a parcourue), c’est la voie que tous les peuples et nations opprimés doivent nécessairement emprunter pour remporter la victoire dans la révolution.

    Notre grand guide, le président Mao, a indiqué il y a quarante ans déjà : « On verra dans les provinces du centre, du sud et du nord de la Chine des centaines de millions de paysans se dresser, impétueux, invincibles, tel l’ouragan, et aucune force ne pourra les retenir. Ils briseront toutes leurs chaînes et s’élanceront sur la voie de la libération. Ils creuseront le tombeau de tous les impérialistes, seigneurs de guerre, fonctionnaires corrompus et concussionnaires, despotes locaux et mauvais hobereaux. »

    Le président Mao a explicitement indiqué depuis longtemps que le problème paysan occupe une place extrêmement importante dans la révolution populaire. Les paysans sont la force principale de la révolution démocratique et nationale contre l’impérialisme et ses laquais, ils sont les alliés les plus sûrs et les plus nombreux du prolétariat.

    L’Inde est un grand pays semi-colonial et semi-féodal ayant 500 millions d’habitants dont la majorité écrasante sont des paysans. Une fois mobilisés, des centaines de millions de paysans indiens deviendront une puissante et invincible force de la révolution indienne.

    Pourvu que le prolétariat indien s’allie avec des centaines de millions de paysans, les vastes régions rurales indiennes pourront connaître un bouleversement extraordinaire, et tout ennemi, quelle que soit sa puissance, pourra être vaincu par une guerre populaire épique.

    Notre grand guide, le président Mao nous enseigne : « La tâche centrale et la forme suprême de la révolution, c’est la conquête du pouvoir par la lutte armée, c’est résoudre le problème par la guerre. Ce principe révolutionnaire du marxisme-léninisme est valable partout, en Chine comme dans les autres pays ».

    Comme la révolution chinoise, la révolution indienne est caractérisée par l’opposition de la révolution armée à la contre-révolution armée.

    La lutte armée est la seule voie correcte pour la révolution indienne ; il n’y a pas d’autre voie en dehors de celle-là.

    Les camelotes telles que « gandhisme », « la voie parlementaire » et autres sont l’opium employé par les classes dominantes indiennes pour endormir le peuple indien.

    C’est seulement en s’appuyant sur la révolution violente et en empruntant la voie de la lutte armée que l’Inde pourra être sauvée et que le peuple indien se libérera totalement.

    Pour parler concrètement, il faut mobiliser sans réserve les masses paysannes, établir et renforcer les forces armées révolutionnaires, utiliser la série de stratégies et de tactiques souples et dynamiques de la guerre populaire élaborées par le président Mao pour faire face à la répression des impérialistes et des réactionnaires temporairement plus puissants que les forces révolutionnaires, persister dans la lutte armée prolongée et arracher pas à pas la victoire de la révolution.

    Partant des particularités de la révolution chinoise, notre grand guide, le président Mao, a indiqué l’importance de l’établissement dans les régions rurales des bases révolutionnaires.

    Le président Mao nous enseigne : pour persévérer dans la lutte armée prolongée et triompher de l’impérialisme et de ses laquais, il faut « transformer les régions rurales arriérées en fortes bases d’avant-garde, en grandes forteresses révolutionnaires, tant au point de vue militaire, politique, économique que culturel, afin de pouvoir lutter contre les ennemis acharnés qui attaquent les régions rurales en s’appuyant sur les villes, et faire triompher pas à pas, dans une lutte prolongée, la révolution dans toute la Chine ».

    L’Inde a un vaste territoire, les régions rurales immenses sont le point faible de la domination réactionnaire, fournissant ainsi un vaste champ d’action pour les révolutionnaires.

    Tant que les révolutionnaires prolétariens indiens persisteront dans l’application de la ligne révolutionnaire du marxisme-léninisme, de la pensée de Mao Zedong, s’appuieront sur les paysans, ce grand allié, les conditions seront toutes prêtes pour créer l’une après l’autre, dans les vastes campagnes arriérées, des bases révolutionnaires rurales avancées, pour édifier une armée populaire de type nouveau.

    Quelles que soient les difficultés et les sinuosités à venir, pareilles bases révolutionnaires finiront par se développer par vagues, formant tache d’huile.

    Ainsi, la révolution indienne pourra créer graduellement une situation où l’on verra l’encerclement des villes par les campagnes, et frayer la voie à la prise des villes et à la victoire dans tout le pays.

    Les réactionnaires indiens sont affolés par le développement de la lutte armée dans la région rurale de Darjeeling. Ils sentent la catastrophe proche et crient que la révolte des paysans de Darjeeling pourra « devenir un désastre national ». Les impérialistes et les réactionnaires indiens cherchent par mille et un moyens à réprimer la lutte armée des paysans de Darjeeling afin de l’étouffer dans l’oeuf.

    La clique traîtresse de Dange et la poignée de chefs révisionnistes du Parti communiste indien calomnient et attaquent vigoureusement les révolutionnaires de Darjeeling pour leurs grands exploits.

    Le soit-disant « gouvernement indépendant du Congrès » au Bengale Occidental se place ouvertement aux côtés des réactionnaires indiens dans sa répression sanglante des paysans révolutionnaires de Darjeeling.

    C’est là une nouvelle preuve que ces renégats et ces révisionnistes sont des chiens courants de l’impérialisme américain et du révisionnisme soviétique et des laquais des grands propriétaires fonciers et de la grande bourgeoisie de l’Inde.

    Ce qu’ils appellent « gouvernement indépendant du Congrès » n’est qu’un instrument de ces propriétaires fonciers et de cette grande bourgeoisie.

    Mais, en dépit de la collusion des impérialistes, des réactionnaires indiens et des révisionnistes modernes, de leurs sabotages et de leur répression, les flambeaux de la lutte armée allumés par les révolutionnaires du Parti communiste indien et les paysans révolutionnaires de Darjeeling ne peuvent être éteints.

    « Une étincelle peut mettre le feu à toute la plaine ».

    L’étincelle de Darjeeling finira par mettre le feu à toute la plaine. La grande tempête de la lutte armée révolutionnaire qui s’étend à toute l’Inde va faire rage !

    Bien que la voie de la lutte révolutionnaire indienne soit longue et tortueuse, la révolution indienne, à la lumière du grand marxisme-léninisme, de la brillante pensée de Mao Zedong, remportera la victoire finale.


    Lire aussi :

    Un appel au peuple de l’Inde – Détruire les chaines de l’impérialisme et du féodalisme, détruire ce système pourri ! Construisez votre futur et celui du pays avec vos propres mains !



    Il y a 50 ans : Naxalbari Zindabad !Il y a 50 ans : Naxalbari Zindabad !

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    4 commentaires

  • Les résultats du 7 mai m'ont donc re-conforté dans mon idée de base que l’État français est et doit rester une dictature bourgeoise du "juste milieu" (que les méthodes de gouvernement soient plus ou moins "libérales"-"laxistes" ou autoritaires-répressives est un autre sujet), et que la bourgeoisie ne veut pas du FN au pouvoir.

    La bourgeoisie en veut bien, du FN, mais comme réceptacle où macèreront stérilement 10 millions de mécontents (et 7 millions d'autres dans la France Insoumise de Mélenchon).

    Retour à la 3e République en quelque sorte, avec son "juste milieu" et puis ses socialistes de régime d'un côté, ses ligues de droite dure de l'autre. Sachant que la 5e, à la base, c'était simplement censé être une 3e République présidentialisée, à exécutif fort (modernisation de l’État que préconisaient entre autres les Croix-de-Feu dans les années 1930... et qui aura donc fini par être mise en œuvre, au même titre que le planisme, la construction européenne etc. etc.). Le "juste milieu" là aussi...

    Ben oui : au début des années 60, le parti dominant s'appelait l'UNR-UDT et l'UDT (Union Démocratique du Travail) c'était des gaullistes "de gauche" (des gens de centre-gauche, de type rad-soc, qui soutenaient De Gaulle).

    La gauche de gouvernement n'était pas censée exister : l'opposition de gauche c'était le PC, voué à l’opposition éternelle comme "extrême" et "inféodé à une puissance étrangère". Plus quelques grognons comme Mitterrand hostiles au régime présidentiel, flanquant ceux de centre-droit comme Lecanuet.

    Et de l'autre côté il y avait les Algérie-française, les résidus du poujadisme ou encore les nostalgiques de Vichy (Tixier-Vignancour fait 5% en 1965 mais Mitterrand-la-francisque, soutenu par le PC, l'était également par toute cette opposition de droite-là, comme candidat le mieux placé pour virer De Gaulle).

    Le truc n'était pas du tout conçu, en fait, pour le bipartisme dans lequel il s'est progressivement installé à partir des années 1970 (avec pour point de départ le score surprise de Mitterrand en 65).

    Il était conçu pour être un renforcement du pouvoir exécutif, du dirigisme d’État et des moyens liberticides de faire face à une situation d'urgence (eu égard au contexte de l'époque) ; mais toujours DANS LE CADRE du système français qui consiste en un camp républicain bourgeois du "juste milieu" flanqué de deux "extrêmes" de confort à droite et à gauche.

    Absolument pas pour l'alternance gauche-droite qu'il a connu à partir de 1981.

    Et donc là, on serait en quelque sorte en train de revenir aux fondamentaux.

    Mais attention, pour ce qui est de la montée du fascisme, si on entend celui-ci comme "dictature brutale, s'affranchissant des principes libéraux, de la bourgeoisie" : dans ce système, la matraque c'est comme le nez de Pinocchio quand il ment ; elle S'ALLONGE quand le besoin s'en fait sentir.

    Le "juste milieu" du début des années 60, avec ses "gaullistes de gauche", c'est 300 Algériens massacrés le 17 octobre 1961 (et 8 communistes blancs quelques mois plus tard à Charonne)... par un ancien préfet de Vichy, un certain Maurice Papon. L'opposant n°1 Mitterrand-la-francisque, lui, était l'ancien Ministre de la Justice du socialiste "juste milieu" Guy Mollet, l'homme des pouvoirs spéciaux, autrement dit de la dictature militaire à la Pinochet (torture systématique, assassinats, "disparitions") dans les "départements" d'Algérie.

    Le fameux article 16 et les tribunaux militaires d'exception ne seront finalement utilisés que contre l'opposition de droite (putschistes de 1961 puis OAS), mais la Cour de Sûreté de l’État verra aussi un bon paquet d'indépendantistes bretons ou corses passer sur ses bancs.

    Et en Mai 68, trois morts officiels mais aucune baisse significative des accidents de la route malgré la pénurie d'essence... donc probablement des dizaines de victimes camouflées comme cela. De Gaulle était allé à Baden-Baden voir Massu (autre boucher d’Algérie) pour évoquer une intervention de l'armée. Et le SAC de (notamment) un certain Pasqua avait des plans d'internement des gauchistes dans les stades. Tout cela sera finalement écarté au profit d'une mobilisation de la "majorité silencieuse" gaulliste, mais en juin débutera l'ère Marcellin ("vichysto-gaulliste" comme Papon ; un autre, Couve de Murville, emménageant à Matignon).

    En fait, ce n'est que le reflux des luttes à partir de la fin des années 70 (et leur domestication, en partie, par le mitterrandisme) qui a entraîné un certain raccourcissement de la matraque.

    Et à partir des années 2000, même si les forces révolutionnaires organisées restent très faibles, un certain regain d'instabilité, de "menace intérieure", notamment dans les fameux "quartiers" (comme on parle en Palestine des "territoires"), qui l'a vue commencer à se rallonger…

    Aujourd'hui, il ne faut donc pas se bercer d'illusions sur la "démocratie sauvée". L'extrême-droite de confort a encore montré aux élections sa vocation d'éternelle opposante, mais elle monte bel et bien, se fait de plus en plus active, voit la majorité des forces armées de la bourgeoisie (les détenteurs de la "violence légitime"...) voter pour elle, ses thèmes et discours repris, un peu comme dans les années 30 à la fin desquelles... qui, déjà, a mis les républicains espagnols et les antifascistes de toute l'Europe dans des camps où les nazis n'auront ensuite plus qu'à les cueillir ? Ah oui, Daladier. Parti radical. Quelque part entre centre-gauche et centre-droite. "Juste milieu" quoi.

    CQFD...

    Papiers réseaux sociaux - mai 2017

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    Disons qu'il faut voir les résultats électoraux comme des aboutissements, et non comme des points de départ.

    Si les sondages avaient annoncé Le Pen entre 48 et 51%, victoire ultra possible donc, cela aurait été l'aboutissement de tout un processus, un fond d'ambiance, concordant par exemple avec le quasi permis de tuer accordé aux flics il y a quelques mois, et signifiant que la bourgeoisie voulait désormais majoritairement la voir au pouvoir.

    À ce moment-là aurait pu être envisagée la stratégie du coup de frein électoral, c'est à dire de l'échec populaire progressiste au plan bourgeois ; pas sur la base de nos maigrichonnes forces révolutionnaires bien sûr, mais sur la base du ''bug'' du truc, qui a été qu'une candidature unique à gauche de Macron serait en fait arrivée... nettement en tête au 1er tour (de l'ordre de 26-27%). D'ailleurs, qu'une telle configuration (Le Pen aux portes de la victoire) soit possible aurait sans doute signifié qu'elle soit opposée à une telle candidature, et non à un centriste face à qui ce serait très peu probable.

    Ceci valant ce que ça vaut (sionards de l'aile gauche du PS à la Hamon, républicards islamophobes à la Mélenchon), mais au-delà de ces forces il faut voir l'expression populaire, le vote contre, la recherche d'une sortie au néolibéralisme en crise qui ne soit pas le fascisme pur et simple.

    Après, c'est sûr qu'il ne faut pas se faire d'illusions : cela resterait dans tous les cas un coup de frein.

    Le Front populaire de 1936 n'a jamais été que cela : un PETIT coup de frein. Au bout de 2 ans, on est revenu avec Daladier à ce qui aurait normalement "dû" être : un gouvernement centriste aux méthodes semi-fascistes (camps d'internement pour les étrangers), la veulerie face aux puissances fascistes (accords de Munich, reconnaissance immédiate de Franco dès sa victoire finale sur les républicains), l'anticommunisme contre toute alliance avec l'URSS (poussant celle-ci à sceller le pacte de non-agression avec l’Allemagne, qu’on a beau jeu de lui reprocher aujourd’hui), etc.

    Les conquêtes sociales de 1936 ont été le fruit des grèves de masse, pas de l'activité parlementaire ; elles n'ont jamais été vraiment mises en application (sauf les congés payés), ont été abrogées par Vichy et ne sont donc finalement devenues réalité... qu'à la Libération. Après une lutte armée donc, une victoire antifasciste les armes à la main...

    Dans l'Empire colonial, comme on le sait, aucun changement : la capitulation du PC sur ce point avait été une condition du Front.

    Mais ce coup de frein à la montée des ligues et à la droitisation-fascisation de la République bourgeoise aura tout de même eu une utilité tactique.

    Dire cela se situe, néanmoins, à des années lumières de dire (‘p’‘c’F‘mlm’) qu'il faut voter quelles que soient les prévisions pour QUICONQUE (même Fillon !!) se trouve opposé au Front National dans une élection ; que le KPD de Thälmann a eu tort de se maintenir au second tour de l'élection allemande de 1932 (alors qu'il n'a nullement empêché la large victoire d’Hindenburg ; Hitler ne serait de toute façon JAMAIS arrivé au pouvoir en gagnant simplement une élection, il n'y est en réalité parvenu que sous la pression des grands capitalistes et... appelé à la Chancellerie par ce même Hindenburg !) ; et j’en passe et des meilleures.

    Et à encore plus d'années lumières, bien sûr, de le faire en se cachant derrière des étrangers privés de droit de vote à qui l’on ''offre'' soi-disant le sien, tout en prônant officiellement l'abstention (‘futur’ ‘rouge’)…

    Papiers réseaux sociaux - mai 2017

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    La fRance est structurellement raciste, car impérialiste et coloniale ; structurellement haineuse ou au "mieux" méprisante des minorités ; c'est une construction politique au service du capitalisme (qui n'a jamais servi à autre chose : même dans sa phase robespierriste, la Révolution restait bourgeoise), et l’on sait la place que celui-ci réserve historiquement au patriarcat en son sein.

    Mais le Front National n'est pas pour autant "comme le reste" : c'est la conception "extrême", décomplexée de tout cela. C'est une force politique qui s'appuie sur toutes ces pensées structurelles pour mettre en place un régime qui ne reculera devant rien.

    En fait c'est comme un mélangeur avec un robinet d'eau chaude et un robinet d'eau froide. L'eau froide c'est toute cette idéologie française structurelle, historique. Et l'eau chaude c'est NOUS, le camp révolutionnaire, à condition d'être conséquents. Si on n'envoie pas ou pas assez d'eau chaude, il ne sort que de l'eau froide ce qui signifie le FN au pouvoir, ou une droite voire pourquoi pas une "gauche responsable" ayant repris l'essentiel de ses idées, ce qui revient au même. Voilà de manière imagée comment ça fonctionne.

    La bourgeoisie humaniste, progressiste, toujours minoritaire en réalité, et avec toutes ses limites (paternalisme dans l'antiracisme par exemple), a cessé d'exister au milieu du 19e siècle. Depuis lors, le robinet d'eau chaude c'est UNIQUEMENT le camp révolutionnaire, lui aussi avec toutes ses limites de départ, engoncé dans la pensée bourgeoise dont il n'a toujours pas fini de s'extraire.

    Il n'y a pas de robinet d'eau chaude bourgeois, inutile de le chercher, même chez Mélenchon comme certains, ou du côté d'une certaine aile gauche du PS comme les matérialistes.com (avec leurs trips sur Filipetti, Amirshahi etc.).

    Tout ce qu'il y a c'est un RAPPORT DE FORCE : si des bourgeois sont "moins" capitalistes, "moins" racistes, "moins" patriarcaux, font du social redistributif, de l'antiracisme moral, de la promotion de l'égalité hommes-femmes ou des minorités LGBT, et s'opposent au FN et à la droite dure là-dessus, c'est sous la pression de luttes.

    Donc quoi que l'on fasse devant une échéance électorale, en fonction de son niveau de tendax, c'est-à-dire UN jour bien particulier, la tâche PERMANENTE reste de fortifier et développer notre camp et de l'extraire des dernières scories de pensée bourgeoise qui le recouvraient à sa naissance (eurocentrisme et social-impérialisme notamment).

    Papiers réseaux sociaux - mai 2017

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    L'idée que les immigrés font baisser les salaires des "déjà-là" est absurde, et contredite par la réalité.

    Ce à quoi l'immigration (même quand elle était principalement européenne) a toujours servi, c'est au contraire à fournir au capitalisme la dose de SUREXPLOITATION nécessaire pour permettre l'exploitation "simple" des autres travailleurs. En clair, on fait venir des gens qui auront une vie économiquement un peu meilleure que chez eux (sinon, pourquoi viendraient-ils ?) mais qui seront tout de même férocement exploités, afin d'adoucir l'exploitation des "déjà-là" et de leur permettre de vivre nettement mieux que les immigrés ET que ne vivaient leurs propres aïeux (parfois immigrés eux-mêmes, d'ailleurs, ou migrants intérieurs à l’État), réduisant ainsi leur potentiel de révolte (du moins c'est ce que les dominants espèrent, et notamment SURTOUT que la jonction entre immigrés et "déjà-là" ne se fasse jamais, du fait justement du "petit privilège" que les premiers confèrent aux seconds).

    Quant à ce qui est de parler (en substance) d'"invasion" qui viendrait "abîmer le tissu prolétarien en recomposition", "désorganiser encore plus les classes populaires, les diviser, les fragmenter, anéantir leur identité populaire et toutes leurs traditions", "écraser la classe ouvrière, diviser les masses en faisant s'installer des centaines de milliers de personnes issues des campagnes et pétries d'idéologie semi-féodale", "affaiblissement d'une nation par le pillage ou les migrations" qui serait "anti-populaire" (lesmaterialistes.com), c'est purement et simplement avoir versé dans une idéologie fasciste...

    Ce qui est vrai en revanche, c'est que l'EXTRACTION DE MAIN D’ŒUVRE que cela représente dans les pays d'origine des immigrés est AUSSI une forme d'exploitation, de pillage, au même titre que l’extraction des ressources naturelles, et donc un problème pour ces pays. Ça l'était de manière évidente (et aucun historien sérieux n'ose le nier) à l'époque des déportations esclavagistes, quand on ne demandait rien à personne et prélevait la main d’œuvre par capture comme du bétail ; mais ça le reste même avec des bureaux de recrutement où les gens se présentent plus ou moins "librement" (comme dans les années 1950-60-70).

    Certes, actuellement et depuis une trentaine d'années, il y a en Occident une politique anti-immigration parce que l'activité capitaliste s'est de plus en plus délocalisée directement vers les pays du "Tiers Monde" (pour le capitalisme yankee, parfois JUSTE derrière le "rideau de fer" qui le sépare du Mexique...) où il n'y a pas toutes ces "histoires" de droit du travail, de salaire minimum, de "charges" (salaire différé pour la protection sociale) etc. etc. ; et c'est donc là-bas, et non ici qu'il "faut" la main d’œuvre.

    Mais cela n'a pas forcément changé grand-chose car que ce soit en Afrique, en Asie ou en Amérique latine et caraïbe, cela signifie toujours EXTRAIRE de la main d’œuvre de régions entières pour l'emmener vers d'autres, où se concentre l'activité délocalisée, et où les travailleurs font également souvent face à une xénophobie très violente.

    Par ailleurs, cette politique occidentale est à relativiser pour certains secteurs en tension de main d’œuvre (secteurs qui se heurtent par conséquent aux politiques "générales" de refoulement) et SURTOUT pour certains pays en déclin démographique comme l'Allemagne, l'Italie ou encore l'Espagne avant la grande crise qui l'a frappée à la fin des années 2000 (la première très ostensiblement dans la récente crise des migrants proche-orientaux, qui pourvoient désormais ses "mini jobs" à 1€50 de l'heure ; la seconde avec ses exploitations agricoles, souvent entre des mains mafieuses, qui ressemblent de plus en plus en haute saison aux champs de coton de l'Alabama... vivement que ce grand peuple, qui fait parfois localement preuve d'une solidarité et d'une générosité envers les migrants à nous faire pâlir de honte, éradique cette vermine criminelle comme tel est son plus grand souhait, en en finissant avec l’État de domination implacable du Sud par le Nord qui l'a engendrée).

    Quoi qu'il en soit, il y a là des questions qui doivent sérieusement être posées.

    La liberté de circulation, qu'il nous faut opposer impitoyablement à la xénophobie réactionnaire et au racisme tout en les dé-moralisant (en les arrachant à une lecture purement morale pour en exposer les ressorts économiques, comme nous venons de le faire dans les premiers paragraphes), ne peut peut-être réellement faire sens qu'en posant la question de la liberté... de RESTER dans son pays ; liberté dont l'émigration n'exprime en général pas autre chose que la privation.

    Encore une fois, il semble qu'on ne puisse conséquemment être antiraciste et anti-xénophobe qu'en étant ANTI-IMPÉRIALISTE.

    Papiers réseaux sociaux - mai 2017

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    Et si toutes ces idpols qui prolifèrent, n'étaient pas en fait le résultat de l'idpol... ouvriériste qui a dominé le 20e siècle ?

    Ben oui... La classe ouvrière au sens puriste ouvriériste, c'est aujourd'hui moins de 25% de la population active (aristocratie ouvrière incluse).

    Ce qu'on a l'habitude de fourrer dans ''petit bourgeois'', c'était peut-être 20% en 1950, aujourd'hui c'est le double ou plus ; peut-être la moitié de la population peut être considérée comme telle, les déciles 5 à 9 inclus de revenus, soit 50% de la population exactement, peuvent être considérés comme des ''petits bourgeois'', le travail intellectuel domine même largement dans les déciles 1 à 4 d'ailleurs... À l'échelle mondiale, ce sont même les 3 voire 2 à 9 qui peuvent être considérés comme des petits voire moyens bourgeois du monde !

    Donc il faut trouver autre chose, d'autres ''puretés'' sociologiques ''révolutionnaires''… Tant que l'on n’a pas compris que le Sujet révolutionnaire en soi n'existe pas.

    Car la vérité est là. Cela n'a pas fonctionné avec la classe ouvrière, dont Lénine a fini par dire qu'elle était ''spontanément trade unioniste''. Alors on est allé (en Italie) chercher le ''sous-prolétaire extra légal'' : non plus… Et ce sera PAREIL, idem avec l'indigène, la nation opprimée, les femmes, les queers, les trans. Parce que le Sujet révolutionnaire en soi n'existe pas, c'est tout !

    Parce qu'en réalité la contradiction est entre deux pôles, la production de plus en plus sociale d’un côté et l'extorsion de la valeur créée (qui peut prendre la forme d'une oppression nationale ou coloniale-raciste ou de la surexploitation patriarcale des femmes) de l’autre ; ces pôles générant respectivement les idées justes (menant au communisme) et les idées fausses (empêchant d'y aller). Et c'est cela qui (transformé en force matérielle et vérifié dans la pratique) fait l'histoire : les idées justes, et l'écrasement des idées fausses. Justesse et fausseté qui ne peuvent jamais être établies sur la seule base de l'identité de celui ou celle qui les émet.

    Attention : il ne s’agit pas ici de nier la CENTRALITÉ POPULAIRE des luttes d'émancipation, sur tous les fronts – de classe bien sûr par définition-pléonasme, de genre, antiraciste, anticolonialiste, de libération nationale etc. – ni d’affirmer en quelque sorte qu'il y aurait ''de la plèbe dans toutes les classes'' (big up les appellistes ! lol).

    Là on parle de FÉTICHISATION. La centralité populaire synonyme de caractère social de la production est le pôle, le centre de production des idées justes qui mises en pratique, devenant force matérielle, font la révolution. 

    Mais il y a eu FÉTICHISME d'une certaine classe ouvrière idéalisée : blanche, masculine, de grand complexe industriel, se caractérisant aussi (comme typiquement dans les grands ports bretons) par l'abandon des langues et cultures populaires nationales pour devenir de "bons français".

    Ce fétiche ayant disparu tel qu’il était fétichisé, des gens ont commencé à en chercher d'autres

    On ajoutera que les idpols d'aujourd'hui, en synthèse et pour regarder les choses en face, ont essentiellement pour vocation d'instaurer autour de leurs auteur-e-s un centralité petite-bourgeoise (ce qui advient automatiquement lorsque l'on parle de "condition féminine", "condition indigène", "condition LGBTQI" ou "condition" ceci ou cela sans considération pour la position de classe à l'intérieur de ces "conditions") ; tandis que de son côté, l'ouvriérisme était essentiellement au service de l'aristocratie ouvrière et des bureaucraties partidaires et syndicales (en leur permettant d'invoquer, par exemple, leur extraction ouvrière d'origine, leurs éventuels "15 ans au charbon" contre la critique des "blancs-becs" et autres "étudiants gauchistes petits-bourgeois" – sans même parler de ces immigrés venus "faire baisser les salaires pour le compte du patronat" et mener des "grèves saintes agitées par des groupes religieux intégristes à rechercher du côté de Téhéran"...).

    Exemple d'idpol ouvriériste : http://humaniterouge.alloforum.com/blog-komunouriezh... 

    "La Bretagne ça n'existe pas, c'est un délire de petits bourgeois, la preuve c'est un camarade ouvrier breton qui me l'a dit, et pis t’façon j'ai raison parce que j’suis ouvrier, j'ai pas à écouter vos leçons de petits profs petits bourgeois. Je ne me laisserai pas silencier et tone policer, gna !!" LOL…

    Cette réflexion rejoint en partie celle développée par les maoïstes états-uniens de Red Guards Austin :

    "Dans le contexte historique récent aux États-Unis, le mouvement marxiste-léniniste a très largement souffert d'une politique ouvriériste... qui est en réalité elle-même une identity politics axée autour de la vision eurocentrique du travailleur comme homme blanc travaillant à l'usine ; échouant par conséquent à prendre au sérieux et analyser correctement des modes d'oppression tels que la suprématie blanche ou le patriarcat. Ce sont les erreurs de l'eurocentrisme, du sexisme, du colonialisme et de la suprématie blanche qui ont conduit par le passé beaucoup d'autoproclamés marxistes à littéralement effacer les groupes opprimés de leurs analyses. Il n'y a guère pire en la matière que les trotskystes, la "gauche communiste" et autres marxistes "orthodoxes" qui regardent dogmatiquement vers le passé et tirent leur soi-disant "science" d'un petit panel soigneusement choisi de "classiques"-prophètes. 

    Les maoïstes se sont employés à corriger ces erreurs, analysant le colonialisme et l'histoire des États-Unis, et prêtant toute l'attention requise à une compréhension correcte des colonies intérieures, des genres et autres groupes sociaux opprimés. 

    Cette nuance s'adresse immédiatement à celles et ceux que l'on peut qualifier de postmodernes : ils et elles gravitent autour du maoïsme mais ne l'ont toujours pas compris comme ce qu'il est, une méthode d'analyse et un guide pour l'action ; et au lieu de cela le voient de la manière dont ce libéralisme idéaliste et anti-dialectique les encourage à le voir - un catalogue de positions auxquelles, si vous adhérez globalement, vous pouvez vous qualifier vous-mêmes de maoïstes. Nous rejetons catégoriquement ce principe et rappelons qu'être maoïste n'est pas seulement concevoir le maoïsme comme une méthode d'analyse MAIS AUSSI le mettre en pratique de manière organisée, et que seulement ainsi l'on peut se qualifier de maoïste. 

    Nous ne devons pas, comme le font certains révisionnistes, rejeter mécaniquement l'identity politics sans discussion. Si le postmodernisme a acquis sa popularité dans le sillage de la défaite temporaire du communisme, alors nous devons nous confronter à cet échec tout en tentant simultanément de comprendre à la fois les limites de l'identity politics et les raisons de son succès. Pour cela, ne devons rechercher le fond d'idées justes, de bonnes questions cachées au fond de l'identity politics postmoderne."


    Papiers réseaux sociaux - mai 2017


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  • Raaa-ah ! Anti ! Anti-imperialista !!

     


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  • Au premier tour, sur 47,5 millions d'électeurs inscrits, il y a eu 37 millions de votants, 36 millions de suffrages exprimés.

    - Près de 10 millions de voix se sont portées sur ce qu'on appellera "la gauche" (Mélenchon principalement, + Hamon, Poutou, Arthaud).

    - Plus de 9 millions se sont portées sur ce qu'on appellera la "droite modérée" (les 8,6 millions de Macron, aujourd'hui Président de la République, arrivé en tête, et les 400.000 et quelques voix de Jean Lassalle, proche de François Bayrou).

    - Enfin le reste, près de 17 millions de suffrages, se sont portés sur la droite réactionnaire, souverainiste et fascisante (Fillon, Le Pen, Dupont-Aignan, Asselineau). Les 65.000 voix de Jacques Cheminade sont difficilement classables, mais de toute façon insignifiantes.

    L'abstention et les bulletins blancs et nuls dès le 1er tour (11,5 millions) sont difficiles à évaluer politiquement : il y avait les campagnes de boycott lancées par les diverses organisations révolutionnaires, mais il n'est pas sûr qu'elles aient touché plus de quelques milliers de personnes ; un certain nombre de ces abstentionnistes ont sans doute un potentiel révolutionnaire mais il est difficile de dire combien, et considérer que "tous" serait absurde ; il y a sans doute aussi du désintérêt voire du rejet de la politique mais en mode individualiste, voire des gens attirés par Le Pen mais n'osant pas encore sauter le pas (encore qu'il ne doive plus y en avoir énormément aujourd'hui).

    Parallèlement, et malgré les critiques sur le personnage que nous avons nous-mêmes suffisamment exprimées ici et sur lesquelles il n'est pas besoin de revenir, un certain nombre de personnes de conscience progressiste et de classe populaire ont choisi de jouer tactiquement la présence au 2e tour de Jean-Luc Mélenchon, tandis que d'autres encore ont sans doute choisi de voter directement pour Macron afin de lui donner le meilleur score et la meilleure dynamique possible (et il est clair que les sondages auparavant ne le donnaient pas beaucoup en tête, ou alors de manière très serrée), d'éviter l'horreur absolue d'un duel Le Pen - Fillon, etc.

    Au total, les deux candidats qualifiés pour le 2e tour ont totalisé 16,3 millions de voix (8,65 pour Macron et pas loin de 7,7 pour Le Pen, score déjà absolument historique sans même parler de celui du 7 mai...), et donc quelques 19,7 millions n'ont voté ni pour l'un ni pour l'autre (droite réactionnaire autre que Le Pen : 9,3 millions).

    AU 2e TOUR, plus de 12 de ces 19,7 millions se sont reportés sur Macron et un peu moins de 3 millions sur Le Pen.

    Le delta d'abstention (personnes ayant voté au 1er tour donc, mais refusant l'affiche du 2e) s'élève à +1,5 millions, et surtout, celui de bulletins blancs ou nuls à plus de 3 millions (de 950.000 à plus de 4 millions, "score" là aussi absolument historique pour cette démarche plus "militante" que la simple "pêche à la ligne"). Mais là aussi, ces nouveaux abstentionnistes et votants blanc ou nul peuvent provenir tout autant de la gauche que de la droite située entre Le Pen et Macron... C'est d'autant plus difficile à dire que si l'on se base sur les enquêtes demandant aux différents électorats du 1er tour ce qu'ils ont fait au 2e, on ne retrouve tout simplement pas la quantité de reports, en particulier sur Macron ! Autrement dit, il est probable que des gens disent s'être abstenus ou avoir voté blanc, mais aient en réalité voté Macron (ou chargé quelqu'un par procuration de le faire)...

    À l'arrivée donc, ce sont plus de 66% pour Emmanuel Macron et pas tout à fait 34% pour Marine Le Pen ; presque 2/3 - 1/3. C'est à dire, nous allons le voir, une affaire de "verre à moitié plein ou à moitié vide".

    Le Pen sort en effet des urnes, comme déjà au 1er tour, nettement au-dessous de ce que lui promettaient les sondages. Il est possible, et on peut presque l'espérer tactiquement, que ce "verre à moitié vide" suscite des tensions dans son propre mouvement, contre la "ligne Philippot" et son "programme à la Mélenchon", avec Marion Maréchal et d'autres en embuscade... Au regard par exemple de la bonne résistance de Fillon ("droite décomplexée") malgré ses affaires et des mauvais reports de son électorat au 2e tour, ou encore de la grande faiblesse des reports de l'électorat Mélenchon (que visait, a priori, la "ligne Philippot"). Autrement dit qu'un certain nombre de cadres appellent au retour aux fondamentaux de "droite nationale" contre le "ni droite ni gauche" de Philippot, et que cela (vu la protection de la "patronne" dont celui-ci bénéficie) puisse conduire à un éclatement et donc (comme à l'époque de Bruno Mégret) un affaiblissement du Front, que (rappelons-le) son fondateur historique lui-même a déjà quitté.

    Mais il faut voir aussi le "verre à moitié vide"... pour nous : malgré le score respectable de ce-qu'on-peut-appeler-la-gauche (un retrait de la candidature Hamon, par exemple, aurait même pu donner un 2e tour Mélenchon-Macron...), qui n'est de toute façon pas extérieure au dit consensus, c'est une nouvelle victoire du consensus républicain du "juste milieu" qui est la forme en quelque sorte "normale" de la dictature bourgeoise et de la contre-révolution préventive dans l’État français, où l'on ne rappellera jamais assez que les figures les plus réactionnaires et ennemies du peuple vues d'aujourd'hui (Napoléon, Adolphe Thiers, Jules Ferry, et même De Gaulle qui après tout a surtout usé de ses pouvoirs d'exception... contre l'extrême-droite, l'OAS !) étaient des hommes du centre (du "juste milieu") en leur temps, et que l'extrême-droite proprement dite n'est arrivée au pouvoir que dans des circonstances très exceptionnelles d'invasion du territoire par une puissance étrangère (et encore : le Ministre de l'Intérieur de Vichy, Pierre Pucheu, disait par exemple combattre "le terrorisme d'extrême-gauche" - la résistance communiste - "ET D'EXTRÊME-DROITE" - les gaullistes ! ; le régime essayait concrètement de reconstituer un multipartisme à partir des courants germanophiles, pacifistes ou anti-antifascistes des partis d'avant-guerre - "socialistes" de Déat, ex-communistes du PPF de Doriot ou du Parti ouvrier et paysan, etc. ; les anciens centristes radicaux ou libéraux étaient - du moins dans un premier temps - ses plus solides soutiens alors que la droite dure s'était tout de suite divisée entre patriotes gaullistes et collabos ; bref dans un sens Vichy se voulait aussi du "juste milieu" !).

    Notre position depuis toujours est que l'extrême-droite, même "relookée" et "dédiabolisée", n'a pas réellement "vocation" à arriver au pouvoir en Hexagone [voir annexe 1] ; mais plutôt à jouer un rôle d'outsider de confort, "gardienne" des classes populaires paupérisées par la crise, et beaucoup plus confortable que ne l'était le PCF dans les années 1960-70 (insusceptible, par exemple, de mettre des millions de travailleurs en grève). Un outsider que le système, l'idéologie dominante républicaine capitaliste-impérialiste-raciste, nourrit et utilise en même temps comme épouvantail pour se renforcer et assurer sa continuité (en gros : c'est nous ou pire que nous, choisissez mes braves gens !). De temps à autre, comme déjà avec Sarkozy (déjà à l'Intérieur puis durant sa campagne présidentielle), la droite opère une sorte de "big bang" en reprenant à son compte les thèses anti-démocratiques du FN, repoussant celui-ci vers son "noyau dur" de 10% de l'électorat (c'est ce qui pourrait encore arriver, surtout en cas de tensions et d'explosion du mouvement lepéniste face au "verre à moitié vide", avec par exemple un Wauquiez comme nouveau Sarkozy) ; la "gauche" suit le mouvement en mode "répondre aux bonnes questions" pour maintenir son existence ; bref le champ politique bourgeois se lepénise, et voilà.

    La manœuvre semble cette fois encore avoir fonctionné, au-delà des prévisions qui étaient légèrement plus "tendax". Mais pour continuer dans le verre à moitié vide pour nous, et à moitié plein pour le FN, c'est tout de même un score absolument historique qui a été réalisé là. Déjà au 1er tour, avec près de 900.000 voix de plus qu'au 2e tour des régionales qui était, rappelons-le, son premier dépassement du score de Marine Le Pen à la présidentielle 2012 ; et ne parlons même pas du 2e où la barre symbolique des 10 millions a été franchie, doublant quasiment le score de son père en 2002 (où il n'avait bénéficié de reports que de Bruno Mégret, concrètement). Près de 3 millions de voix supplémentaires alors que son allié de dernière minute Nicolas Dupont-Aignan ne pouvait lui en fournir au maximum que 1,6 (mais cette décision a en réalité poussé son parti au bord de l'explosion et plus d'un quart de ses électeurs ont indiqué qu'ils s'abstiendraient...) ; autrement dit des digues fondamentales ont cédé, des électeurs de Fillon (pourtant économiquement libéral et européiste) ont préféré Le Pen à Macron, tout comme sans doute aussi un bon demi-million ou plus d'électeurs... de gauche (contre l'"ultra-libéral" "candidat des banques" Macron, en réalité social-libéral "théorie du ruissellement" tout ce qu'il y a de plus classique, montrant le niveau d'irrationnel politique atteint dans ce pays).

    Et avec ce score, comme nous l'avons également toujours dit, le FN peut déjà être considéré comme "en partie", si ce n'est pas désormais "à moitié" au pouvoir... Marine Le Pen peut pratiquement être considérée comme la "directrice générale" de fait de la police et de la gendarmerie, qui ont voté majoritairement pour elle et dont le déchaînement contre les manifs au soir du 1er tour montre bien quel score historique les "décomplexait" de la sorte (en l'occurrence, sans doute pas celui du candidat ayant fondé son mouvement il y a un an...).

    Ceci rend fondamentalement ridicules ceux qui s'essayent à célébrer la victoire de Macron comme un véritable "triomphe de l'antifascisme", pratiquement de la "démocratie populaire" ; qui tentent de nous faire croire que l'islamophobie et le fond d'ambiance "ennemi intérieur" anti-terroriste post-Charlie, qui ont nourri le FN (ont été déterminants pour 90% de ses électeurs en tout cas, selon toutes les enquêtes), auraient en réalité "amorcé son reflux" ; etc. etc.

    L'entre-deux-tours a suscité de très vifs débats quant à l'attitude à adopter face à ce scrutin. Il faut dire, pour parler clairement, que la configuration était passablement merdique. Si avait été promise à Macron une victoire "à la Chirac", 80-20, pouvant à la rigueur se resserrer à 70-30, il aurait été clair qu'il fallait absolument refuser le "front républicain" bourgeois, le renforcement du consensus "juste milieu" néolibéral par la peur de l'épouvantail "extrême". Si par contre les sondages s'étaient montrés très serrés, autour de 50%, en-dessous de 55-45 en tout cas... il aurait alors fallu réfléchir sérieusement. Sans qu'il s'agisse ici, bien sûr, de présenter de manière ridicule les choses comme une "défaite de Le Pen face à l'antifascisme", mais bien comme un pur choix tactique (encore que... une telle situation présumerait d'une faiblesse du candidat "républicain" qui pourrait conduire à un soutien "comme la corde soutient le pendu", à condition que les choses soient bien pensées et organisées comme cela et non un mouvement éperdu de panique ; une extrême-droite à un tel niveau pourrait par ailleurs signifier une autre configuration de second tour, en rappelant que cette année une candidature UNIQUE de la "gauche de gauche" aurait très probablement été devant Le Pen et peut-être même devant Macron ; mais bon...).

    Car si nous avons toujours dit que l'extrême-droite avait vocation à rester cantonnée dans un rôle  d'opposition de confort et d'épouvantail, nous avons également toujours dit que selon les circonstances (et ces circonstances, sans s'apparenter à une invasion étrangère comme en 1940, ont été assez lourdes ces deux dernière années) cet épouvantail pouvait devenir créature de Frankenstein, échapper à ses créateurs... et alors, bien entendu, ce ne serait plus du tout la même chose ! Il n'y a rien d'anti-maoïste, mais au contraire les principes "militaires" de base du maoïsme, à choisir le terrain sur lequel on se bat ; le moins défavorable et/ou le mieux connu. Macron représente la continuité du hollandisme, terrain difficile avec le virage ultra-répressif pris sous l'égide de Valls (qui jouera certainement un grand rôle dans la future majorité présidentielle), mais que nous commençons à connaître ; et si l'on ne peut présumer d'aucun évènement, d'aucune évolution, du moins sait-on d'où l'on part (de ce que nous avons actuellement) ; alors qu'avec Le Pen, nous ne savons PAS d'où nous partons et encore moins où les choses peuvent aller, sinon qu'il y a d'excellentes raisons d'envisager le pire, même si la référence au gaullisme période Papon (préfet de Paris) a remplacé celle à Vichy et aux ultras de l'Algérie française... Nous savons pertinemment que son programme "social" made in Philippot est du vent, que le FN est économiquement tout aussi social-libéral que Macron, "ruissellement" mais "ruissellement"... pour les seuls "bons Français" et non pour tout le monde ; voire plus thatchérien encore que cela selon la réalité économique (c'était la ligne économique claire et nette dans les années 1980, et difficile de ne pas l'envisager en voyant la gueule d'un Nicolas Bay par exemple) ; sauf que dans les manifs, les balles réelles pourraient bien remplacer les flashballs creveurs d'yeux, et dans les quartiers où ces balles sont déjà tirées régulièrement, le nombre de victimes décupler ou vingtupler... Et qui, à l'heure actuelle, 1°/ déjà, pourrait souhaiter et 2°/ peut sérieusement s'estimer PRÊT à cela ?

    Nous n'avons à peu près rien lu de plus ridicule entre les deux tours que les déclarations du style "nous descendrons dans la rue", "ça se règlera par des manifestations de masse", comme si l'on partait du postulat absolu que "la rue" resterait strictement la même sous Le Pen qu'aujourd'hui, alors que le virage répressif pris depuis quelques années avec Valls, l'état d'urgence et compagnie a déjà mis les mouvements sociaux dans une grande difficulté (moins de monde dans la rue, par exemple, contre la Loi Travail que contre la réforme des retraites sous Sarkozy !). Historiquement, un "bond en avant" considérable dans la répression anti-populaire ne s'est jamais "réglé dans la rue" !!

    Mais bon, là, donc, la situation était dans une sorte d'"entre deux" merdique, avec des sondages autour de 60-40. D'où la multiplication et la grande diversité des positions : ceux et celles restant sur la ligne de boycott (arguant parfois, non sans raisons, que de toute façon ce que feraient ou pas quelques milliers de révolutionnaires ne changerait pas la donne, donc autant rester droit dans ses bottes) ; les nouveaux abstentionnistes (de l'électorat Mélenchon essentiellement) ; les partisans du vote barrage, aimablement surnommés "castors" par les autres ; l'idée que Le Pen allait de toute façon perdre mais que par 30% ou 45% ce ne serait pas la même chose, etc. etc.

    Ce débat aura eu le mérite incontestable d'être intéressant et créatif, même si comme il est coutume dans ce pays, les attitudes anti-constructives ont hélas pullulé. On dédiera une mention spéciale au noyau dur militant de la France Insoumise (Mélenchon) qui, alors qu'au 1er tour il fallait littéralement fusiller les abstentionnistes (celles et ceux qui "empêchaient" leur champion d'être possiblement au 2e tour), voulaient au 2e fusiller les NON-abstentionnistes, celles et ceux qui par réflexe de survie, non-Blancs ou se sachant fichés (par exemple), ou refusant simplement le saut dans un sombre inconnu, souhaitaient voter Macron pour faire barrage... Sans parler des quelques-uns carrément prêts à voter Le Pen pour "tout faire péter" (et près de 500.000, selon toute vraisemblance, l'auraient finalement fait).

    Dans les secteurs les plus opprimés des masses (opprimé-e-s de race ou de genre notamment), on a pu observer les deux positions, l'une consistant à dire que "l'oppression n'a pas attendu Le Pen" (certes... mais elle pourrait décupler ou pourquoi pas centupler !), l'autre qu'il fallait faire barrage pour la survie ; avec parfois des argumentaires idpol un peu stériles et désolants en la si grave circonstance, comme quoi l'une ou l'autre position serait une position de "privilégiés" (soit "s'en foutant" que Le Pen passe car "pas concerné-e-s par la violence de son programme", absurde si l'on pense à des militant-e-s fiché-e-s par exemple, soit "allant faire les castors pour sauver l'image de leur France des Droits de l'Homme qui n'existe pas"), alors qu'il était évident que ces catégories opprimées elles-mêmes étaient très divisées sur la question et que personne, aussi "concerné" soit-il, ne pouvait prétendre par sa parole les représenter intégralement. Il est cependant vrai qu'en l'hypothèse d'une forte probabilité de victoire de Le Pen, de sondages à 50-50 ou presque, une attitude "rien à battre" pourrait clairement présenter des caractéristiques de "privilège blanc" se sachant (plus ou moins consciemment) en 2e ou 3e ligne et non en première. Ou du moins d'irresponsabilité politique certaine. Mais les sondages, sans annoncer une victoire à la Chirac, n'étaient pas aussi serrés et laissaient un champ des possibles beaucoup plus large et ouvert au débat sans excommunication, à notre humble avis, même si un doute désagréable n'a jamais vraiment cessé de planer.

    L'argument (anti-"castors") comme quoi Macron à moins ou à plus de 60% n'aurait pas la même légitimité et ne mènerait pas la même politique était relativement absurde : la plupart des Présidents de la Ve République ont été élus par un peu plus de 50% (sans parler de leurs scores au 1er tour, parfois inférieurs à 25%) et n'en ont pas moins mené la politique qu'ils voulaient, sans aucune considération pour cela.

    L'argument (anti-abstentionnistes) comme quoi Le Pen devait faire le score le plus bas possible n'était pas idiot dans l'absolu, et l'on peut évidemment se réjouir qu'elle soit finalement sortie si bas par rapport aux prévisions, mais il se heurtait à la réalité d'un FN qui quoi que l'on fasse, surtout si l'on regarde les millions de voix et non les %, est déjà ce qu'il est et devrait le rester voire augmenter, avec des digues autour de lui qui ont sauté, bref les considérations sur le "verre à moitié plein" pour lui et "à moitié vide" pour nous que nous avons précédemment évoquées. Espérer un score autour de 80%, ou même 75% pour Macron était absolument illusoire de toute façon. Une situation dont la priorité aujourd'hui comme demain, comme nous le faisons depuis maintenant plus de 7 ans, est de dénoncer et combattre implacablement les ressorts et non de les nier, quand ce n'est pas carrément prétendre qu'ils sont l'"esprit" ("Charlie" ou autre) qui ferait "barrage au fascisme"...

    NOTRE POSITION, en tout cas, s'est rapidement organisée comme suit :

    1°/ Pas de campagne pour on-ne-sait-quel "vote antifasciste" Macron (ça va pas la tête ?), ne pas cautionner la mascarade du "front républicain" ;

    2°/ Non-agression, pas d'attaques, pas de crachats contre les personnes ayant fermement décidé de faire barrage à Le Pen en votant Macron, a fortiori si cela était perçu comme une question de survie, et à plus forte raison si les prévisions devenaient serrées ;

    3°/ Lutte sans merci contre l'imbécilité absolue du report de gauche sur Le Pen, partant du mot d'ordre que "si Le Pen gagne ou fait de bons scores, c'est d'abord parce que des gens votent Le Pen" (sur les reports de droite, nous n'avons évidemment aucune prise et comme nous l'avons dit ils s'inscrivent malheureusement dans l'air du temps ; finalement Macron s'en est plutôt bien sorti, surtout après le débat où il a fait éclater l'irréalisme du programme économique du FN, irréalisme dénoncé même par des intellectuels d'extrême-droite comme Guillaume Faye)... mais bon, ces éléments-là se sont rapidement faits assez silencieux ;

    4°/ Critique des postures comme quoi "on se battra dans la rue contre Le Pen comme contre n'importe qui" : que le FN au pouvoir ne soit pas à l'ordre du jour, qu'on le comprenne et refuse par conséquent de céder au "front républicain", c'est une chose ; que Le Pen = Macron en termes de capacité à "se battre dans la rue" comme si de rien n'était, c'en est une autre et c'est un raisonnement irresponsable à dissiper préventivement, pour le jour où sa victoire serait beaucoup plus probable ;

    5°/ Suivi attentif des enquêtes d'opinion et de leurs dynamiques, surtout après le débat, pour prendre la mesure la plus exacte possible de la situation et de son éventuelle dangerosité.

    6°/ À l'issue la plus probable du scrutin (victoire de Macron), pas de "ouf" de soulagement idiot, certainement pas de "victoire de l'antifascisme", mais poursuivre la dénonciation implacable (que nous menons depuis des années) de ce qui nous a conduit dans cette situation, et DEMANDER DES COMPTES [voire annexe 2].

     

    À l'arrivée, les résultats donc, ont été ce qu'ils ont été : une continuité, comme nous l'avons dit, du "consensus républicain" social-libéral et de contre-révolution préventive avec le FN en opposition de confort épouvantail ; mais néanmoins, peut-être, la moins mauvaise configuration qui pouvait sortir de cette époque merdique que nous vivons. Un succès suffisamment relatif du Front National, une victoire de Macron plus large que prévue mais sans être non plus triomphale, et des signaux, des messages très clairs, tant dans les abstentions-blancs-nuls que dans le vote barrage sans l'ombre d'une adhésion, qu'il n'y a (comme il a lui-même dû le reconnaître) aucun blanc-seing pour une politique néolibérale et que celle-ci sera combattue sans relâche par une grande partie de la population.

    Oui, c'est clair, depuis près de 30 ans le régime bourgeois de contre-révolution préventive se droitise et fascise, la "gauche" évoluant elle-même toujours plus vers une "droite modérée", mais il y a dans les masses de la résistance contre cela, de la "révolte" comme on dit au rugby, ainsi qu'on a pu le voir par exemple contre Sarkozy en 2007, avec l'assez bon score de Royal malgré sa nullité caractérisée (parfois près de 90% dans les bureaux de vote des quartiers "sensibles") et même dans une certaine mesure, tactiquement, le vote pour Bayrou au 1er tour ; et aussi contre la "droitisation de la gauche" avec les bons scores des candidats à gauche de Jospin en 2002 (19% au total), de Mélenchon en 2012 (11%) et plus que tout cette année (19,5%), avec un total à gauche de Macron avoisinant les 28%...

    Cela ne veut cependant nullement dire que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes, mais qu'il faut CONTINUER LE COMBAT et qu'il y a des perspectives et des potentialités pour cela. Il y a une résistance, transformons-la en lutte pour la révolution !


    En complément et conclusion de ces quelques réflexions post-période électorale, quelques annexes :


    - Cette bonne pièce de l'écrivain révolutionnaire marseillais Alessio Mascalzone, au sujet de la non-vocation de l'extrême-droite à arriver au pouvoir en Hexagone :

    "Le sommet fut atteint avec le psychodrame électoral de 2002. Il était interdit, entre les deux tours de l'élection présidentielle, d'ouvrir la bouche pour autre chose qu'appeller à voter Chirac pour faire barrage à Le Pen. Toute velléité de débattre (et notamment de mettre le nez dans leur caca aux pontifes de la gauche) se heurtait invariablement à cette unique consigne, répétée jusqu'à la nausée. Et quiconque essayait d'ouvrir un véritable débat se trouvait accusé de complicité objective avec le fascisme. Autrement dit, il n'était nul besoin que Le Pen soit élu pour que la liberté d'expression disparaisse : c'était déjà fait, sous les auspices de la bonne conscience républicaine et au nom d'une sorte d'"état d'urgence électoral".

    En réalité l'extrême-droite n'a jamais eu en France vocation à prendre le pouvoir. Chaque fois qu'elle a eu l'occasion de le faire elle s'est déballonnée. Ce fut le cas du général Boulanger en 1889, renonçant au dernier moment à marcher sur l'Assemblée nationale alors que ses partisans tenaient la rue. Ce fut de nouveau le cas en 1934, où le leader des Croix-de-Feu, le colonel De La Rocque refusa d'investir l'Assemblée, les leaders de l'Action Française brillant quant à eux par leur absence dans la rue pourtant tenue par leurs militants. Et même le putsch d'Alger, en 1961, échoua parce que le gros de l'armée, resté fidèle à la figure tutélaire du général De Gaule, refusa de s'y engager. 

    La raison pour laquelle l'extrême-droite n'a jamais eu ses chances en France est simple : partout en Europe, les régimes autoritaires sont arrivés au pouvoir là où l'État-nation tardait à s'affirmer. Il s'agissait de réactiver violemment le processus, interrompu ou ralenti, de constitution de l'État-nation : pour l'Allemagne, par la défaite de 1918 et la crise des années 1920 ; pour l'Italie, par le sentiment d'avoir été frustré des fruits de la victoire de 1918 et par la menace insurrectionnelle de 1919-1920 ; pour l'Espagne, par l'agitation sociale et l'autonomie basque et catalane. Or, en France, la tradition ininterrompue de centralisation politique et la force de l'idéologie nationale, notamment activée par le colonialisme, a permis la constitution d'un appareil d'État puissant, relayé au sein de la société par un dispositif disciplinaire omniprésent. La seule fois que ce dispositif a vacillé, et que l'extrême-droite put accéder au pouvoir, ce fut sous la forme du fantomatique régime de Vichy : par la grâce de l'invasion allemande, qui avait provoqué la chute de la IIIe République, et non par la résultat d'une stratégie mûrement réfléchie de prise du pouvoir. Le maréchal Pétain s'étant contenté d'accepter un pouvoir dont une Assemblée nationale aux abois cherchait à se débarrasser à n'importe quel prix. 

    Tout cela pour dire que le FN a joué un rôle très simple : quand le doigt montre la lune, l'idiot regarde le doigt. Et l'idiotie politique est la chose du monde la mieux partagée en France. En d'autres termes, la France a évité le fascisme non parce qu'elle serait le pays de la liberté mais parce qu'elle est le pays de l'autorité..." 

    "C'est de la racaille eh bien j'en suis", édition L'Échappée 2006, réédition augmentée Agone en 2009 sous le titre "La rage et la révolte", pp.100/102.


    - Sur le mot d'ordre "demander des comptes" :

    "Si c'est pour "du social", "contre la dictature de la finance" et l'Union européenne qui en serait "l'instrument" (quelles que soient, inutile de le préciser, les critiques que d'authentiques communistes révolutionnaires peuvent avoir envers ces concepts), si c'est pour chercher une porte de sortie à la crise généralisée du capitalisme, on peut voter Mélenchon... 

    Si c'est Le Pen qui est au 2e tour et pas lui, s'il est même légèrement derrière Fillon, c'est parce que pour un nombre trop important de gens ces "contre"-là existent mais sont SECONDAIRES, et c'est "contre les Arabes", "contre l'invasion islamiste" qui est le déterminant PRINCIPAL. 

    Et pourquoi cela ? Ces idées-là tombent-elles du ciel ? On sait bien que non.  

    On sait bien de quel héritage impérialiste et colonial non-soldé et de quel FOND D'AMBIANCE idéologique, depuis 50 ans qu'il y a des "colonies importées" en métropole hexagonale et en même temps la télé dans tous les foyers, et encore plus depuis une quinzaine d'années (depuis le 11 Septembre et compagnie), leur hégémonie est le résultat. 

    DEMANDONS DES COMPTES. 

    Cessons de parler de Le Pen "le plus bas possible", "à 25%" : on sait très bien que nous n'en sommes plus là, qu'il n'y a ni le réservoir d'abstentionnistes (faible par rapport à 2002, ridicule par rapport aux dernières régionales), ni surtout les digues avec l'électorat Fillon (voire une partie de l'électorat Mélenchon !) pour la maintenir dans un score aussi faible.  

    Contentons-nous d'un ouf de soulagement qu'elle ne soit pas élue (synonyme d'article 16 et autres joyeusetés entre ses mains) ; estimons-nous presque heureux que ça ait été Macron et pas Fillon en face, parce qu'en plus des "digues" disparues entre LR et FN, on pourrait aussi parler des potentiels de report d'électeurs progressistes sur la droite d'aujourd'hui (post-SarkoBuisson) par rapport à ce brave Jacquot en 2002, et la chose se comprend aisément... 

    Et dès lundi prochain, DEMANDONS DES COMPTES pour la situation dans laquelle nous nous sommes retrouvés. Pas de "youpiiii la démocratie est sauvéééée !!!" : oui, youpi, ok ; la lutte c'est aussi préférer tel terrain à tel autre, Macron c'est le terrain du hollandisme en place depuis 5 ans et qu'on commence à connaître, Le Pen c'est un terrain inconnu sur lequel il y a des éléments pour présager le pire, donc "ouf", ok ; mais DEMANDONS DES COMPTES car ce chaud aux fesses ne vient pas de nulle part. 

    Demandons des comptes :

    - Pour le TERREAU de la situation actuelle qui a germé, à savoir le marasme économique et social dans lequel sont plongées les classes populaires et moyennes-inférieures ;

    - Pour les GRAINES idéologiques réactionnaires semées sur ce terreau. 

    La combinaison de ces deux facteurs n'ayant jamais, dans l'Histoire, donné d'autre résultat que la situation que nous connaissons actuellement. 

    DEMANDONS DES COMPTES et comprenons, faisons comprendre autour de nous inexorablement qu'en "remontant la filière" comme dans un polar, ce procès ne peut être au bout du compte que celui du CAPITALISME EN CRISE GÉNÉRALISÉE. 

    Voilà la ligne politique pour les années qui viennent." 


    - Cette critique d'une position RIDICULE D'HYPOCRISIE, bien à l'image de l'organisation pseudo-"communiste" opportuniste identitaire et postmofasciste qui la porte :

    "Est ridicule, pitoyable et indigne pour une organisation communiste, prétendument avant-garde de la révolution qui vient, la position qui consiste à dire que Macron et Le Pen c'est la même chose, du pareil au même, donc ni-ni, gros révolutionnaires de la streer zher t'as vu, MAIS... attention attention, on va OFFRIR SON DROIT DE VOTE à des étrangers qui en sont privés et n'ont donc pas ce ''privilège du choix de l'abstention''. Donc voter Macron (pour qui voulez-vous que vote un étranger inquiet de la situation actuelle ?). Vraiment ridicule et pitoyable.

    SI L'ON CONSIDÈRE que les étrangers, et les colonisé-e-s intérieur-e-s en général, ont de BONNES RAISONS de craindre l'élection de Marine Le Pen (donc que ce n'est pas ''du pareil au même'' que Macron), et qu'on veut être solidaires, et c'est une position qui fait plus que se défendre... eh ben on ASSUME de lui faire barrage en votant pour Macron, pour empêcher ce saut dans l'horreur pour eux, et aussi un certain saut dans l'inconnu pour nous gauchistes (l'art de la guerre c'est aussi le choix du champ de bataille, et notamment d'un terrain connu, pourrait-on dire). Non ? Vous croyez pas ? 

    Si par contre on considère que c'est vraiment kif kif bourricot, qu'en substance l'État antipopulaire, policier, colonial-raciste, impérialiste assassin à l'extérieur, est déjà là peu importe le ou la locataire de l'Élysée pour 5 ans (simple tête de gondole) ; position également défendable et en tout cas défendue elle aussi y compris par des premier.e.s concerné.e.s, eh ben c'est ni-ni, boycott militant et point. Non ? 

    On peut aussi penser que ce n'est pas tout à fait la même chose mais qu'il ne faut pas oublier la responsabilité de l'un dans l'autre, qu'on ne peut pas, quoi qu'on fasse et quoi qu'il arrive le 7 mai, ne pas demander des comptes à ceux qui nous ont plongés dans cette merde (en fabriquant du sentiment d'abandon et en banalisant certaines idées), et surtout que Macron est le casse du siècle, la reconduction masquée de Hollande et Valls ayant tout fait (investiture de Hamon, affaires de Fillon) pour lui dégager un boulevard au centre et qu'il se retrouve face à Le Pen et soit élu à coup sûr ; et être énervé par cela et ne pas vouloir le cautionner ; mais que non ce n'est pas la même chose, que Le Pen est un saut dans un inconnu qu'on préfère ne pas connaître, et que si on sent qu'il y a le feu, que le petit jeu est en train de se retourner contre ses initiateurs, on fera ce qu'il y a à faire en conséquence... C'est encore une autre position possible. 

    Mais franchement... Aller dire que POUR SOI c'est du pareil au même et les renvoyer dos à dos, avec des arguments risibles comme quoi Le Pen serait ''idéologiquement fasciste'' mais ''ne mettrait pas en place un régime fasciste'' (ouais c'est sûr, un régime fasciste dans les habits des années 30 j'ai toujours dit que si on l'attendait on pouvait l'attendre longtemps, mais un considérable saut en avant dans la violence répressive antipopulaire... on l'a déjà vu avec Sarko en 2007 et même dès 2002, alors Le Pen...), MAIS EN FAIT voter Macron (et sauver son cul au cas où, quand même, ce serait pas tout à fait la même chose...) en se PLANQUANT derrière des étrangers opprimés par privation de droits civiques et qui n'auraient pas notre ''privilège'' de pouvoir s'abstenir (en fait tu prends une position pour dire deux lignes plus loin que c'est un ''privilège'' de la prendre, quoi).... Pathétique. Pour ne pas dire minable." 

    La présidentielle en quelques chiffres

    - Enfin, cette carte qui remet encore une fois en cause (comme nous le faisons depuis des années) la sociologie électorale à la petite semaine qui voudrait que le Front National soit le vote des "petits", des "périphéries", de la "France d'en bas" contre celle "d'en haut", les centres, les aisés-éduqués, les "gagnants de la mondialisation" ; ou alors qu'on nous explique en quoi, comment, d'où, depuis quand, au fin fond de l'Ariège ou des Landes, du Trégor ou du Poher, dans le 93 ou le sud-est du Grand Lyon, au Havre ou à Tourcoing les gens sont des CSP+ bac+5 et des ''gagnants de la mondialisation''... Encore une fois, le vote FN semble bien représenter plutôt les masses populaires (ultra-majoritairement blanches) "coincées" entre centres et périphéries tandis que les "vraies" périphéries, "cambrousses" profondes, Peuples travailleurs nationaux niés et conscients d'eux-mêmes et bien sûr banlieues-ghettos où sont concentrées les colonies intérieures non-blanches, manifestent électoralement leur rejet de cette "extrême-France" (car c'est de cela qu'il s'agit) et donnent même des scores tout à fait honorables à la "gauche de gauche" (souvent comme "moindre mal", cela dit) – et c'est non sans un plaisir certain que l'on y voit se dessiner clairement notre Occitanie hors (hélas) "grands axes", ainsi que notre sœur Bretagne :

    La présidentielle en quelques chiffres

    [Ici une autre illustration, cartes à l'appui, de la non-correspondance absolue entre "bassins de vie hyper-ruraux" (où effectivement si on n'a pas 2 000 € par mois de revenus, et c'est rare dans ces coins, bonjour la galère, bonjour quand l'essence augmente, aussi, etc.) et vote Front National ; faisant un peu tomber à plat l'analyse de Guilluy (et autres idées reçues courantes qui ne se réduisent pas à lui : "ce sont les vieux", ou "les paysans", "les gens qui n'ont jamais vu un immigré ailleurs qu'à la télé" etc. etc. qui votent Le Pen), et son lancinant et gênant sous-entendu qu'il faudrait au fond, quelque part, "comprendre" ce vote d'"appel au secours" : http://ekladata.com/Z6kscYc-SpjWSyH-2J5t0YTKqQMc.png]


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