• kurd2Après avoir évoqué la mort tragique d'Hervé Gourdel aux mains d'émules algériens du sinistre Daesh, et rappelé quel "phare" de la Révolution mondiale devait être - pour tout maoïste et même tout marxiste - la Guerre populaire en Inde, il nous faut maintenant parler de ce qui n'est peut-être pas encore un "phare" mais très certainement une lueur d'espoir dans la nuit d'horreur qui s'est abattue sur le Proche et le Moyen Orient : la résistance héroïque du Peuple kurde qui, notamment en Syrie mais aussi en "Turquie" et en Irak, combat aussi bien les régimes bureaucratiques-compradores à la solde de l'impérialisme (impérialisme occidental comme l’État turc ou bloc russo-chinois comme le régime Assad, peu importe !) que le nouveau monstre du clair-obscur du djihadisme ("État islamique"/Daesh, Front al-Nosra etc.), jailli des entrailles putrescentes de cet état de fait impérialiste.

    Telle est en effet la réalité des choses : l'impérialisme, la concurrence (entre puissances) en son sein et les monstres qu'il engendre (de fait, les expressions armées de concentrations capitalistes locales qui n'acceptent plus la tutelle du "Nord") parsèment la planète de conflits sanguinaires, mais dans tous ces conflits ou presque existent des forces positives auxquelles les communistes se doivent d'apporter leur soutien. Au Proche et Moyen Orient, la résistance et surtout (bien entendu) la résistance PROGRESSISTE des Kurdes (PKK, PYD) en fait partie.

    Nous l'avions déjà évoquée il y a quelque mois en traduisant un article maoïste états-unien qui y voyait l'embryon d'une Guerre populaire locale - en Syrie du moins, car en Irak les peshmergas luttent non moins héroïquement mais sous l'autorité d'un Kurdistan "autonome" (depuis 1992) totalement bourgeois et lié à l'impérialisme occidental (c'est même son "meilleur élève" dans la région).

    kurd820 Dans la région de l’État syrien appelée Rojava (ce qui signifie "ouest" en kurde : "Kurdistan occidental"), c'est en réalité depuis 2012 que les Unités de Protection du Peuple (YPG du PYD, lié au PKK du Kurdistan "turc") ont rejeté tant la botte du régime baasiste que celle de l'opposition pro-occidentale et djihadiste et ont conquis une autonomie de fait où sont mis en application les principes du "confédéralisme démocratique" (lire aussi ici et ici).

    C'est une lutte inégale et difficile car si l'impérialisme occidental s'oppose lui aussi (officiellement) tant au régime de Damas et à son allié iranien qu'aux djihadistes (et l'impérialisme russo-chinois tant aux forces pro-occidentales de l'ASL qu'aux mêmes djihadistes), il ne souhaite évidemment pas voir se consolider dans la région ce qui pourrait bien devenir une BASE ROUGE de la Révolution mondiale.

    Les combats font actuellement rage dans le secteur de Kobanê :
    http://www.actukurde.fr/<wbr>actualites/687/les-kurdes-<wbr>syriens-seuls-mais-determines-<wbr>a-vaincre-daesh.html
    http://www.actukurde.fr/<wbr>actualites/686/les-kurdes-<wbr>avancent-en-syrie-et-en-irak.<wbr>html
    http://www.actukurde.fr/<wbr>actualites/688/kurdistan-<wbr>syrien-la-resistance-de-<wbr>kobane-est-la-stalingrad-du-<wbr>moyen-orient.html
    http://www.dailymotion.com/<wbr>video/x26tg9l_vive-la-<wbr>resistance-de-kobane-au-<wbr>kurdistan_news

    Du côté "turc", la jeunesse prolétaire et paysanne kurde se rue à la rescousse de ses frères "syriens" pour combattre à leurs côtés, mais l’État turc (qui "combat" officiellement le Daesh au sein de la coalition occidentale) ne veut bien entendu pas entendre parler d'un tel sentiment populaire kurde transfrontalier et les réprime très brutalement :
    http://tempsreel.nouvelobs.com/monde/20141008.OBS1410/kobane-les-emeutes-kurdes-ont-fait-14-morts-en-turquie.html
    http://www.leparisien.fr/international/en-turquie-les-manifestations-kurdes-pour-kobane-font-14-morts-08-10-2014-4196665.php

    En Hexagone, les communautés kurdes ont appelé à des rassemblements en solidarité avec la lutte là-bas, comme par exemple ce samedi à Marseille/Marselha.

    À Paris, les militant-e-s d'Alternative Libertaire ont prononcé une allocution que (bien que maoïstes et non libertaires) nous partageons très largement dans les grandes lignes - et que nous reproduisons donc :


    ALLOCUTION D’ALTERNATIVE LIBERTAIRE


    kurd3 Aujourd’hui, Kobanê, au Kurdistan occidental, est assiégée par les forces barbares de l’État islamique – Daech.

    Aujourd’hui, Kobanê se bat pour la liberté, pour la démocratie et pour les droits des femmes.

    Aujourd’hui, Kobanê se bat héroïquement, malgré le double jeu du gouvernement turc, malgré les atermoiements de la coalition dirigée par Washington.

    Aujourd’hui, Kobanê est devenu le symbole de la résistance du Rojava syrien, mais pas seulement.

    Si Kobanê tombe, ce n’est pas seulement tout le Rojava qui sera menacé, c’est aussi un modèle politique et social : celui du confédéralisme démocratique et de l’autonomie démocratique, édifié depuis le 19 juillet 2012.

    C’est pourquoi, sous le drapeau des Unités de protection populaire (YPG) qui défendent Kobanê, on trouve côte à côte des miliciennes et des miliciens kurdes, arabes, turcs, qu’ils soient musulmans, yézidis, chrétiens ou athées. Toutes et tous se battent côte à côte contre les fanatiques.

    C’est pourquoi la défense de Kobanê et du Rojava syrien intéresse non seulement le peuple et la diaspora kurde, mais aussi toutes et tous les partisans de l’émancipation, les féministes, les anticolonialistes et les anticapitalistes.

    Kobanê doit pouvoir compter sur les milliers de jeunes gens, révolutionnaires, syndicalistes, anticolonialistes, libertaires qui sont venus de toute la Turquie pour défendre la ville, et qui aujourd’hui sont bloqués à la frontière par l’armée turque.

    Car Kobanê et le Kurdistan n’ont pas pour seul ennemi l’État islamique.

    Ils ont d’autres ennemis, plus sournois, qui aimeraient que Daech fasse le « sale boulot » à leur place : Bachar el-Assad et Recep Tayyip Erdoğan.

    kurd1Quant aux États-Unis, après avoir longtemps hésité, ils ont bombardé les forces de Daech qui assiègent Kobanê. Cependant, il faut savoir que s’ils ne souhaitent pas la victoire de Daech, ils ne souhaitent pas non plus la victoire du modèle politique et social que représente le Rojava.

    On parle aujourd’hui d’une possible intervention terrestre contre Daech dans la région de Kobanê. Pourtant ce serait une catastrophe si demain, au nom de la lutte contre le djihadisme, l’armée turque occupait militairement le Rojava. Ce serait la fin de l’autonomie populaire, le démantèlement des milices d’autodéfense, la prison pour les révolutionnaires.

    Le peuple kurde a besoin d’armes pour défendre Kobanê et le Rojava. Il n’a pas besoin de subir l’occupation de l’armée turque ou américaine.

    Vive Kobanê libre, vive le Kurdistan libre, vive la révolution.


    ***************************************************************

    On signalera aussi qu'à Strasbourg (Elsass), des militants kurdes ont subi l'agression de nationalistes turcs.

    Les camps de la Révolution et de la Réaction mondiale se cristallisent de manière tous les jours plus claire, même lorsqu'au niveau des "relations internationales" et de la "géopolitique" le plus grand "méli-mélo" semble régner...

    kurd6

    De fait, si les conceptions de ces héroïques combattant-e-s kurdes (voir aussi ici) peuvent sembler fort éloignées des canons du marxisme voire apparaître comme "pure hérésie (pardon) révisionnisme" à d'aucun-e-s*, elles nous semblent bien - à nous - tendre vers notre conception de la société à construire : un "État" oui, au sens d'instrument politique d'une classe (en l’occurrence le prolétariat et les autres classes populaires, laborieuses) pour défendre ses intérêts et son projet politique (en l'occurrence la vraie démocratie qui est le socialisme, l'émancipation humaine totale qui est le communisme !), mais un "État" qui par sa nature de classe différente (non-bourgeoise) ne peut être que de type radicalement nouveau ; un État par et pour le Peuple consistant en une fédération des unités de base du Pouvoir populaire que nous appelons (en référence à notre histoire occitane et "française") les Communes (mais que les Kurdes et les autres peuples peuvent tout à fait appeler autrement), fondé sur la subsidiarité et la délégation du bas vers le haut et permettant au demeurant, comme expression des Peuples qui sont frères et non des bourgeoisies qui sont par nature concurrentes, d'unifier de vastes territoires en transcendant les appartenances "ethniques" et/ou religieuses et sans reposer sur la suprématie d'un groupe sur un autre - ne serait-ce pas d'ailleurs (justement) cette rupture avec la conception bourgeoise de l’État qui aurait été insuffisante chez les marxistes-léninistes du siècle dernier, tout juste (peut-être) esquissée dans la Chine de la Révolution culturelle ou l'effervescence cubaine des années 1960 ?

    De fait et en définitive, avec leur confédéralisme qui veut faire coexister démocratiquement tous les Peuples et toutes les confessions, ils et elles sont les véritables héritier-e-s de Salah ad-Dine (kurde lui-même) À UN NIVEAU SUPÉRIEUR, n'en déplaise à tous ces sionistes musulmans djihadistes qui prétendent "restaurer le Khilafah" !

    SOLIDARITÉ INTERNATIONALISTE AVEC L'HÉROÏQUE RÉSISTANCE DU PEUPLE KURDE !


    kurd5.jpgKurds.jpg


    * D'aucuns pourront notamment souligner la ressemblance de ces thèses avec la pratique des caracoles (communautés auto-gouvernées) des zapatistes (EZLN du "sous-commandant Marcos") au Chiapas, dont il n'est d'ailleurs pas improbable qu'elles s'inspirent, ou encore (à une bien moindre échelle) avec les squats de totos en Occident, telle ou telle expérience d'autogestion en entreprise (Lip etc.) ou coopérative agricole de babas cools dans les Cévennes ou ailleurs etc. ; pour les recouvrir bien évidemment de tous les épithètes qui leur servent d'arguments politiques : "petit-bourgeois", "idéaliste" etc. etc. Mais le problème de ces caracoles mexicains ou de ces entreprises autogérées, est-il vraiment là ? Est-il de ne pas être des formes d'organisation sociale et de rapports de production tendant vers le communisme ? NON, le problème n'est pas là. Les caracoles zapatistes du Chiapas sont des modèles très intéressants pour ce que nous appelons la Commune populaire. Les entreprises autogérées et les coopératives "néo-rurales" constituent des rapports de production tout à fait conformes à ce que nous appelons le socialisme. Leur problème, c'est de penser pouvoir coexister avec un État et une économie encore totalement capitalistes. Leur problème, c'est de penser que l’État et l'ordre social bourgeois se dissoudront devant eux et non qu'ils doivent être DÉTRUITS par une Guerre du Peuple. L'EZLN du "sous-commandant Marcos" assume ouvertement son refus de combattre l’État bourgeois (semi-féodal semi-colonial) mexicain pour le détruire : elle estime que les caracoles "peuvent" exister en son sein et que petit à petit, face à cette expérience sociale, l’État "évoluera", se "démocratisera" etc. etc. (et l’État, lui, s'est accommodé de cette "épine dans le pied acceptable" du moment que la situation est sous contrôle - si tel n'était pas le cas, bien évidemment, il mettrait tout en œuvre pour écraser le zapatisme). C'est également en substance (à une bien plus petite échelle on l'a dit) la conception de l'"autonomie" et des squats dans les pays occidentaux : l’État est contesté, confronté mais pas vraiment combattu au sens d'une véritable GUERRE pour le DÉTRUIRE. On s'imagine qu'il s'"effondrera" de lui-même devant le développement de l'auto-organisation populaire. Les entreprises autogérées et autres coopératives d'esprit égalitaire et collectiviste s'imaginent de la même manière pouvoir exister au sein d'un appareil productif national totalement capitaliste, espérant peut-être faire "tache d'huile" etc. etc.
    Les Kurdes, pour le moment, luttent les armes à la main contre les États turc et syrien et la proposition étatique ("califat") des djihadistes sur le Nord de l'Irak et l'Est de la Syrie : l'idée d'une "coexistence" entre leur projet de société et celui de leurs adversaires ne semble donc pas leur effleurer l'esprit. Mais attention : les zapatistes, après tout, ont eux aussi pris les armes au début (le conflit, début 1994, a fait plusieurs centaines de victimes), nonobstant leur ligne de non-destruction de l’État... Et l'on sait que depuis l'an dernier des négociations ont pu s'amorcer entre le direction (emprisonnée) du PKK et l’État turc - de fait, le dialogue a commencé à se nouer voilà plus de 10 ans, dep uis qu'en 2002 le gouvernement AKP a mis partiellement fin à l'intransigeance kémaliste sur la question. Le "confédéralisme démocratique" kurde se trouve donc à cette croisée des chemins : s'il comprend et assume la nécessaire destruction des États qui emprisonnent les Kurdes au Proche et Moyen Orient (et le rejet radical de l'impérialisme dont ils sont la création et l'instrument), il devra nécessairement assumer la Guerre populaire et le maoïsme. S'il croit au contraire (comme l'EZLN de Marcos avant lui) pouvoir "coexister" avec eux (genre "sous la protection des Nations Unies" et autres fadaises), il dégénèrera en une nouvelle forme d'ultra-démocratisme "participatif'" petit-bourgeois...

     


    3 commentaires

  • La ligne de démarcation que constitue ce soutien apparaît désormais d'autant plus claire que les pseudo-"maoïstes" qui en rejetée la Guerre du Peuple indien (sous couvert de critique "orthodoxe" du "déviationnisme" des maoïstes là-bas) ont totalement tombé le masque avec des positions contre-révolutionnaires désormais clairement assumées (éloge de la police bourgeoise, soutien à Manuel Valls et à son Parti "socialiste", appel à un "Front populaire" digne de Thorez avec l'"antifascisme" républicain bourgeois et à la "démocratie populaire"... dans la 5e puissance impérialiste mondiale qu'est la France, défense des "Lumières" bourgeoises et de la construction absolutiste de l’État moderne au service du Capital, crachats sur les luttes LGBT, les luttes des colonisé-e-s intérieur-e-s et autres qualifiées de "post-modernes", négation de l'islamophobie première mobilisation réactionnaire de masse de notre époque, etc. etc.).

    Le lien peut paraître extrêmement lointain voire absurde et pourtant, pour les matérialistes dialectiques que nous sommes, il est évident : la Guerre populaire en Inde (avec toutes ses contradictions, ses erreurs, ses avancées et ses revers) est le "phare", le Centre d'agrégation de la Révolution mondiale et ceux qui la rejettent ne peuvent que s'éloigner, à des degrés divers, du camp de la révolution ; tomber dans la force gravitationnelle d'un Centre de la Réaction.

    Une conférence internationale de solidarité s'est tenue ce week-end en Italie. Voici la déclaration que lui a adressée l'OCML-VP, qui n'a hélas pas pu y participer :


    Message à la Conférence internationale de soutien à la Guerre populaire en Inde (Italie, 27-28 septembre 2014)


    Chers camarades,

    Nous regrettons de ne pouvoir être parmi vous à l’occasion de cette conférence, alors que nous avions participé à celle qui s’était déroulé à Hambourg l’année dernière. Nous défendons que le soutien à la Révolution indienne est une ligne de démarcation importante dans le mouvement communiste international.

    Nous réaffirmons notre soutien aux organisations révolutionnaires de l’État indien qui dirigent la Guerre populaire sur la voie de la Nouvelle démocratie et du socialisme, ainsi que plus généralement au mouvement populaire et démocratique de ce pays, et à tous ceux qui s’affrontent à l’impérialisme, au féodalisme et au capitalisme. En tant que communistes de France, nous avons la responsabilité d’êtres particulièrement vigilants aux ingérences de notre propre impérialisme.

    Nous souhaitons plein succès à cette conférence, et nous en félicitons les organisateurs.

    Vive la solidarité internationale avec la Révolution indienne !


    Organisation Communiste Marxiste-Léniniste Voie Prolétarienne

    soutien_a_la_rebolution_en_inde.jpg

    Cette conférence internationale ne se tenait pas à n'importe quelle date : en effet, cela a fait 10 ans le 21 septembre que la Guerre du Peuple indien (commencée de fait à la fin des années 1960) s'est synthétisée dans le Parti communiste d'Inde (maoïste) pour aller de l'avant vers la victoire.

    Voici la déclaration du Parti communiste maoïste de France à ce sujet :

    Vive le 10ème anniversaire du PCI (maoïste) !


    Le Parti Communiste d'Inde (maoïste), fut fondé le 21 Septembre 2004. Il résulte de la fusion du Parti Communiste d'Inde (marxiste-léniniste) People’s War et du Centre Communiste Maoïste.

    Depuis plus de 30 ans, les maoïstes d’Inde mènent la Guerre Populaire contre le système semi-colonial semi-féodal de l’Inde. Aux côtés des paysans pauvres et sans terres, des Adivasis (populations tribales), des Dalits (« intouchables »), des femmes, des travailleurs, bref, aux côtés de tous et toutes les exploités et opprimés du pays, les maoïstes développent la lutte contre le système capitaliste-impérialiste. Mettant en place des Gouvernements Populaires, ils font en sorte que les masses populaires relèvent la tête et reprennent leurs affaires en main.

    Le premier mai de cette année fut un grand jour. En effet, il représente l'aboutissement d'un processus qui a conclu à l'Unification du PCI(m) et du PCI(ml) Naxalbari dans le PCI(m). Cette grande nouvelle change la donne et ouvre de nombreuses perspectives quant au développement de la guerre populaire en Inde.

    Nous tenons à célébrer aujourd'hui le 10ème anniversaire de la formation du PCI(m). Le mouvement maoïste indien est un des fers de lance de la révolution mondiale. Si c'est un espoir pour les masses populaires en Inde, la guerre populaire en est également un pour les prolétaires du monde entier, qui voient en elle la possibilité de la reconstruction d'un véritable camp socialiste à l'échelle internationale.

    Le PCI(m) et la guerre populaire en Inde nous montrent le chemin de la révolution. En effet, la théorie de la guerre populaire n'est pas comme le pensent certains une application chinoise de la révolution, ou une stratégie militaire propre aux pays semi-coloniaux semi-féodaux. La guerre populaire est un principe universel du maoïsme, valable partout, y compris dans les pays impérialiste comme la France. En menant la guerre populaire en Inde, le PCI(m) ouvre la voie pour les révolutionnaires du monde entier.

    Pour nous, célébrer le 10ème anniversaire de la fondation du PCI(m) ne consiste pas seulement en des déclarations de principes, mais également en des engagements de solidarité.

    Aujourd'hui plus que jamais nous devons rendre vivant l'internationalisme prolétarien et soutenir la guerre populaire en Inde. Cela revient à informer la classe ouvrière de l’État français du développement de la révolution en Inde, mais également à frapper au cœur notre propre impérialisme par tous les moyens nécessaires.

    C'est dans cet esprit que nous prenons l'engagement d'un soutien accru à la révolution indienne. Cela tout d'abord en assumant les tâches qui incombent au mouvement maoïste en France, et en première ordre d'aboutir à l'unification des maoïstes dans un parti qualitativement et quantitativement supérieur.

    C'est en ce sens que nous faisons de la campagne de solidarité avec la guerre populaire en Inde un de nos axes de travail principaux à l'heure actuelle et que nous allons intensifier significativement notre campagne d'actions, d'information et de propagande.

    Nous faisons notre le combat de nos frères et sœurs de classe, des milliers de martyrs tombés pour la révolution. 


    À BAS L’IMPÉRIALISME FRANÇAIS !
    À BAS L’OPÉRATION GREEN HUNT !
    GLOIRE AU 10ème ANNIVERSAIRE DU PCI(m) !
    VIVE LA GUERRE POPULAIRE EN INDE !


    Bloc Rouge (Unification des maoïstes)


    Ci-dessous, quelques photos des dernières actions menées en soutien à la Guerre Populaire en Inde dans plusieurs villes de France :


    Vive le 10ème anniversaire du PCI (maoïste) !

            Vive le 10ème anniversaire du PCI (maoïste) !Vive le 10ème anniversaire du PCI (maoïste) !

            Vive le 10ème anniversaire du PCI (maoïste) !Vive le 10ème anniversaire du PCI (maoïste) !

            Vive le 10ème anniversaire du PCI (maoïste) !Vive le 10ème anniversaire du PCI (maoïste) !Vive le 10ème anniversaire du PCI (maoïste) !

             Vive le 10ème anniversaire du PCI (maoïste) !Vive le 10ème anniversaire du PCI (maoïste) !Vive le 10ème anniversaire du PCI (maoïste) !


    Et puis le plus important, le texte du Parti communiste d'Inde (maoïste) lui-même :

    Un appel au Peuple de l’Inde : Détruire les chaînes de l’impérialisme et du féodalisme, détruire ce système pourri ! Construisez votre futur et celui du pays avec vos propres mains !

    Vous pouvez aussi suivre quasi quotidiennement les progrès de la Guerre populaire en Inde sur le site du Secours Rouge belge : http://www.secoursrouge.org/mot/inde

     


    votre commentaire

  • La RouelleIl y aura 800 ans l'an prochain que s'ouvrait à Rome, en 1215, le IVe concile du Latran. Cette réunion "au sommet" des principaux "princes" de l’Église, qui vue d'aujourd'hui peut sembler enterrée au fin fond des âges obscurs, a été en réalité un évènement capital pour le processus alors en train de donner naissance aux États modernes qui nous asservissent encore aujourd'hui, et notamment pour l'une des expressions de ce processus à laquelle aucun pays d'Europe (sauf peut-être la Pologne-Lithuanie) n'offre de contre-exemple historique : la persécution systématique des personnes de religion juive. Car c'est au cours de ce concile, entre beaucoup d'autres choses, que sera préconisé d'imposer aux Juifs le port de la rouelle, signe distinctif et infâmant (sa forme ronde et sa couleur jaune symbolisant les 30 deniers de Judas, marque du "peuple qui a crucifié le Christ") qui sera repris 7 siècles plus tard, sous la forme d'une étoile de David, par les nazis et leurs alliés fascistes en Europe (notamment en fRance).

    C'est l'époque où, malmené par les partisans de l'Empereur germanique (son grand rival pour la primauté sur l'Occident) dans la péninsule italienne, le Saint-Siège tend à chercher l'alliance avec les monarchies en train de fonder l’État moderne (en "France", "Espagne", Grande-Bretagne), en particulier (vieille tradition depuis Clovis...) avec la monarchie capétienne franque de Paris, et à s'en faire le bras armé idéologique voire policier (avec l'Inquisition fondée en 1199) ; ce qui ne va pas sans susciter des ruptures (comme l'hérésie vaudoise, d'ailleurs condamnée à ce même concile du Latran, sans même parler des Cathares) et des dissidences internes (ordre des franciscains), qui défendent la solide alliance de classe passée deux siècles et demi plus tôt (mouvement de la Paix de Dieu, ère romane) entre l'Église et les masses populaires pauvres contre les seigneurs féodaux.

    Jewish man - worms - 16th centuryCette alliance avec la Couronne capétienne durera jusqu'à ce que Philippe le Bel (début du 14e siècle) prétende carrément subordonner l'institution religieuse à son autorité, ce que la haute aristocratie de pourpre romaine rejettera, entraînant le schisme d'Avignon (où le Bel installe "son" souverain pontife). Au 15e siècle, le Vatican se tournera alors vers les Habsbourg d'Autriche et les rois de Castille et d'Aragon bientôt fusionnés en "Espagne" (puis unis aux Habsbourg) comme nouveaux porte-glaives de la foi apostolique romaine ; tandis que le royaume capétien mettra en avant le gallicanisme (Église catholique "autonome" sous contrôle du roi, sans aller toutefois jusqu'à la rupture totale comme en Angleterre).

    Mais en attendant, au 13e siècle, la Papauté est en plein "pacte d'acier" avec la Couronne franque dont elle a fait son auxiliaire, à moins que (beaucoup plus probablement en fait) ce ne soit l'inverse... C'est l'époque où la sanglante conquête de nostra Patria d'Òc va donner naissance au Royaume de France ; conquête déjà bénie par Rome pour "extirper l’hérésie albigeoise" (parmi ses autres prises de décision, d'ailleurs, le concile du Latran est celui qui accorde à Simon de Montfort les terres du comte de Toulouse !), et dont l’Église et sa toute nouvelle Inquisition (aux mains de l'ordre dominicain, fondé en cette même année 1215 par le castillan Domingo de Guzmán) vont se faire à la fois la Gestapo et les Einsatzgruppen [quelques-unes de ces vermines grouillantes recevront malgré tout la monnaie de leur pièce par la main de quelques valeureux faidits, ces chevaliers occitans dépossédés qui avaient pris la tête de la résistance].

    La construction de l’État moderne, concept politique servant à la fois la famille royale et ses affidés (domaines = rentrées d'impôts dans la po-poche), la bourgeoisie du Bassin parisien (qui voit ainsi briser et soumettre ses redoutables rivales du Sud) et l’Église qui y trouve un bras armé pour accumuler elle aussi les domaines et les richesses, implique la liquidation impitoyable de toute "dissidence". C'est bientôt chose faite des Cathares sur le bûcher de Montségur (1244). Les Juifs, eux, représentent la communauté transnationale par excellence de cette Euro-Méditerranée de l'An Mille où le morcellement et la subsidiarité politique n'ont d'égal que l'absence totale de véritables frontières, y compris entre Peuples de religion différente (chrétiens et musulmans). Les individus mais aussi les groupes (ces gentes, familles élargies brillamment étudiées par Engels) Les Juifs du pape en Provencecirculent tout à fait librement, chaque autorité locale (seigneur ou plus généralement "conseil" de la communauté urbaine ou villageoise) décidant de leur ouvrir les portes ou pas. S'ils viennent en paix et apportent quelque chose à la communauté déjà présente, ce qui est généralement le cas, il n'y a aucun problème ; et les Juifs, vivant bien sûr dans leur nationalité de résidence (comment pourrait-il en être autrement ?) dont ils parlent la langue (tout en développant parfois leur dialecte propre à renfort de vocabulaire et de grammaire hébraïque : shuadit ou "judéo-provençal", ladino ou "judéo-espagnol", yiddish "judéo-allemand" etc.) mais reliés aussi par la religion et des traits culturels partagés aux autres communautés juives d'Europe et du Bassin méditerranéen, sont plus que tous les autres dans ce cas de figure.

    Pour les nouvelles monarchies à grande échelle, bientôt absolues, plus question de tolérer cela. Chaque individu et chaque parcelle de terre est une source de revenus (impôts) à ponctionner, et à défendre bec et ongles. Mais le projet politique étatique doit aussi être forgé dans une loyauté et une allégeance absolue au royaume et à son souverain - qui est un prince chrétien. Mieux vaut se débarrasser des mauvais sujets : de là le mouvement de balancier, contradictoire en apparence seulement, entre assignation à résidence des Juifs (accompagnée d'extorsions permanentes), massacres "spontanés" par la population chrétienne, bûchers et invitation régulière à vider les lieux presto... sous peine de mort (mais bien souvent là aussi, pour pouvoir partir sain et sauf... il faut payer !). S'ajoute à cela l'habitude vite prise, sans enfreindre le moins du monde la morale chrétienne vu qu'ils ne le sont pas, d'emprunter aux Juifs (déjà sous une forte pression de menaces) des sommes d'argents puis... de les expulser voire massacrer, sous l'accusation d'avoir pratiqué l'usure (le judaïsme n'interdit pas, en effet, le prêt à intérêt), lorsqu'il s'agit de les rembourser : de là l'ignoble assimilation, encore prégnante de nos jours, des Juifs à "l'usure" et à "l'argent".

    [Une politique, concrètement, d'extorsion de fonds en masse par les États modernes en formation à l'encontre des communautés juives, accompagnée d'expulsions et de massacres... Dans laquelle on peut voir, peut-être, un des tous premiers mécanismes de l'accumulation primitive !!]

    L’Église, quant à elle, ne prélève par définition sa dîme que sur les chrétiens : elle doit donc veiller à ne pas perdre ses fidèles au profit d'une autre religion (interdiction des mariages mixtes), à empêcher la communauté juive de s'étendre et aussi (surtout) de "gêner" économiquement les affaires des bourgeois chrétiens (desquelles provient une bonne part de la Juifs bûcher 15e siècledîme)... Ce que ces derniers, bien entendu, vont acquiescer de bonne grâce ! De plus les intellectuels juifs, 600 ans avant la Haskala, sont déjà souvent porteurs d'idées humanistes assez "subversives" pour l'époque - diffusées notamment depuis l'Andalousie musulmane, dans le contexte de la "Renaissance médiévale". Nous voyons bien là comment tous les intérêts parallèles du processus alors en cours convergent pour refermer les mâchoires du dispositif de persécution.

    C'est à partir de 1269 que "Saint" Louis IX (dont l'entité France reconnaissante célèbre aussi, cette année, les 800 ans de la naissance en 1214 : "année Saint Louis") met en œuvre l'imposition de la rouelle dans son tout-beau-tout-neuf royaume. Vraisemblablement les 3/4 des Juifs qui peuplent celui-ci vivent alors dans notre "Midi" occitan fraîchement conquis par son père (Louis VIII) et son grand-père (Philippe Auguste), et dont il achève lui-même la "pacification". Cette présence juive (et la tolérance envers elle) dans les cités du Lengadòc a précisément été l'un des motifs d'"hérésie" de notre Peuple. La mesure de persécution religieuse se double ici indissociablement d'une mesure COLONIALE, de ce premier colonialisme médiéval puis absolutiste dont ont fait les frais, on l'oublie souvent, les Peuples de ce que l'on considère aujourd'hui comme la métropole.

    Pour la brillante culture judéo-occitane shuadit commence alors un chemin de souffrance s'achevant sur les édits d'expulsion en série, locaux puis généraux (1306, 1322, 1394). La Provence, alors semi-indépendante sous la branche capétienne cadette d'Anjou, offre un relatif refuge pour deux petits siècles de plus ; mais celui-ci s'effondre avec le rattachement du comté au domaine royal (1482) : les édits d'expulsions s'abattent très vite dans la foulée (1498 et 1501). Ne reste plus alors aux Juifs occitans que le petit "réduit" papal du Comtat et d'Avignon (resté territoire pontifical après la fin du Schisme d'Occident), dans des conditions très discriminées (carrières = ghettos[1]),Plan carriere Cavaillon d'où ils ne sortiront qu'en 1791 avec le rattachement du futur Vaucluse à la France et la simultanée émancipation générale des Juifs par la bourgeoisie révolutionnaire. Cette émancipation de 1791 marque le début du long chemin des Juifs d'Europe vers ce que les "indigénistes post-modernes" (ironie ironie) appellent la "blancheur sociale", l'européité/occidentalité pleine et entière. Un chemin qui n'ira pas sans violents conflits (affaire Dreyfus), entre tentations assimilatrices ("tout leur accorder en tant qu'individus, tout leur refuser en tant que nation" dixit le député libéral Clermont-Tonnerre en décembre 1789) et excluantes ; conflits qui ne seront pas la moindre des racines de l'Holocauste des années 1940. Ce n'est en définitive qu'au 20e siècle que les Juifs deviendront pleinement des "Blancs" européens à part entière ; certains se faisant colonisateurs impérialistes au Proche-Orient avec le projet sioniste (dès les années 1910) ; et plus généralement dans le cadre de l'"expiation" impérialiste générale après la défaite de l'horreur hitlérienne. Cela parfois aux prix de quelques distorsions historiques : ainsi dans les fictions consacrées à la Shoah, la famille juive traquée est souvent moyenne-bourgeoise, laïque et éduquée afin que le spectateur occidental d'aujourd'hui puisse s'identifier à elle ; les juifs misérables, illéttrés, souvent très religieux et ne parlant que yiddish des shtetl d'Europe de l'Est ne sont pratiquement jamais montrés alors qu'ils ont représenté, en réalité, plus de 95% des victimes. Mais l'identification à eux serait, c'est certain, une autre paire de manche...

    À la fin du 16e siècle, fuyant les persécutions dans les royaumes d'"Espagne" et du Portugal où leur conversion forcée (souvent de façade) ne suffit même plus aux autorités (qui en doutent par principe : limpieza de sangre), des communautés séfarades s'installent en Gascogne, à Bordeaux et autour de Bayonne, où elles obtiennent non sans difficultés un droit de résidence spécial et dérogatoire (l'"Espagne" et le Portugal, unifiés en 1580, sont alors l'ennemi juré du Royaume de France qui est disposé à quelques dérogations pour leur nuire).

    judéo-occitanSéfarades de Gascogne et Juifs "du Pape" provençaux sont les deux grandes communautés juives historiques de nostre païs, avec les noms célèbre de Pereire ou Mendès France pour les premiers et de Crémieux (Gaston le communard marseillais et Adolphe le "citoyenniseur" des Juifs d'Algérie), Naquet ou encore Vidal-Naquet pour les seconds.

    S'y sont évidemment ajoutés depuis des Ashkénazes (des rives du Rhin jusqu'aux plaines d'Ukraine), notamment (comme dans tout l'Hexagone) des réfugiés de l'antisémitisme ambiant d'Europe de l'Est puis du nazisme dans l'Entre-deux-guerres [dont beaucoup croyant à tort, en 1940, trouver la sécurité en "zone libre" vichyste puis en zone italienne (1942-43, du Rhône aux Alpes)], des Séfarades "balkano-égéens" (des Balkans, de Grèce et de Turquie, les fameux "Juifs de Salonique" de langue judéo-espagnole) et (surtout) des Séfarades du Maghreb arrivés en masse dans la tourmente de la "décolonisation" (années 1960) - par ressentiment anti-arabe, ces derniers sont souvent en première ligne du soutien à Israël. Originaire de l'actuelle Pologne, arrivé (après un détour de sa famille par la Palestine) à Toulouse en 1931, Marcel Langer restera à jamais une figure incontournable du mouvement communiste (Brigades internationales) et de la résistance antifasciste dans la région. Il mourra guillotiné par la "justice" de Vichy en 1943, après que le procureur Lespinasse ait lancé à l'audience "Juif, étranger et communiste : voilà trois bonnes raisons pour moi de réclamer votre tête" (l'ignoble personnage sera liquidé quelques mois plus tard par les FTP-MOI, et plus aucun procureur toulousain n'osera requérir la peine de mort jusqu'à la fin de la guerre...).

    Tout cela (mis à part le dernier paragraphe) s'est déroulé il y a des siècles ; mais comme l'expliquait (de manière idéaliste certes) la philosophe marxiste "hétérodoxe" passée au christianisme progressiste Simone Weil, elle-même d'origine juive, il s'agit là de la RACINE DIRECTE de l'ordre dominant dans lequel nous vivons, que le siècle dernier a vu se déchaîner dans l'horreur et qui nous prépare encore de très sombres heures pour le siècle qui commence. Nous ne pouvons combattre et abattre ce système qu'en l'attaquant idéologiquement (puis physiquement) dans ce qu'il a de plus profond et STRUCTUREL, et en français "structurel" a pour synonyme "800 ans". Il se trouve aujourd'hui de sinistres imbéciles pour venir expliquer que les Juifs (les "sionistes") contrôlent et dirigent l’État français et même le système impérialiste mondial, et il se trouve malheureusement un nombre important de personnes pour les écouter. Mais la réalité est que dans le monde impérialiste blanc européen-chrétien d'aujourd'hui, sous des formes certes différentes des édits royaux et des décrets révolutionnaires bourgeois d'autrefois, les Juifs restent des "Blancs" par assimilation, par octroi de ce statut de "Blancs" sociaux ; ils demeurent des tolérés. Que l'on appelle à l'anéantissement militaire d'Israël au profit d'un quelconque État comprador oriental "ami" (ce qui n'arrivera jamais, mais permet de caresser les oligarques "nationalistes" de ces États dans le sens du poil) ou que l'on soit "prêt", depuis les bords de Seine, à se "battre" pour la place-forte impérialiste sioniste jusqu'au dernier "Juif patriote et enraciné" israélien Medieval manuscript-Jews identified by rouelle are being bu("Vive Israël, mort aux youpins !" en quelque sorte - voir aussi ici), c'est finalement la même pensée structurelle qui domine : lorsque le Juif n'est pas une vermine à éradiquer, il est au mieux de la chair à canon ou un "argentier" de bon cœur ("ils ont de l'argent", c'est bien connu...) pour la domination impérialiste occidentale au Proche-Orient. Jusqu'au milieu du 20e siècle, à l'exception d'une certaine bourgeoisie républicaine BBR post-affaire Dreyfus, le mot "juif" était ultra-principalement l'objet de tous les fantasmes réactionnaires ou pseudo-"socialistes" plus ou moins haineux ; depuis lors il est aussi devenu le faire-valoir de tout un "républicanisme"/"démocratisme" bourgeois et "universalisme" impérialiste ; il y avait dans les années 1920-30 un fascisme francouille qui voyait et dénonçait partout la main du "judéo-maçonno-bolchévisme" tandis qu'aujourd'hui la contre-révolution préventive capitaliste a évolué et il y a en définitive deux fascismes, celui qui crie au "sionisme partout" et celui qui crie à "l'antisémitisme partout" ; mais dans un cas comme dans l'autre (même pour de prétendus "porte-paroles" bourgeois de la communauté juive...) "les Juifs" restent une figure tout aussi abstraite, fantasmée et utilisée : cristallisant et personnifiant, pour les tenants de "l'antisémitisme partout", les "valeurs" de leur sacro-sainte "Républiiiique" bourgeoise (il n'est pourtant pas sûr qu'un militant libertaire comme Pierre Stambul, par exemple, les partage) et pour ceux du "sionisme partout" la dissolution de celles-ci ; prétextes pour les uns à une géopolitique impérialiste alignée sur les USA et pour les autres à une géopolitique "eurasiste", "pro-arabe" ou "tiers-mondiste" opposée à eux... Dans tous les cas, tout ce qui vient d'être exposé précédemment n'intéresse absolument personne voire est purement et simplement ignoré ; y compris chez ces prétendus "antifascistes" sionards qui n'ont que les mots "juif" et "antisémitisme" à la bouche pour nazifier leurs contradicteurs, à savoir les militant-e-s conséquent-e-s avec la solidarité internationaliste envers la Palestine. Mais en même temps, comme aurait dit ce bon Jésus-Christ, il faut leur pardonner : en effet, la bourgeoisie est une classe assumant la totalité du pouvoir depuis la fin du 18e siècle et déjà très influente au cours des deux siècles précédents, et qui écrit depuis lors l'Histoire à sa "sauce" et à son avantage. C'est notamment cette historiographie bourgeoise qui décrit le Moyen Âge comme un âge des ténèbres (auquel nos "régionalisme identitaires féodaux" chercheraient à revenir, "argument" ultra-récurrent) dont les "symboles" (Inquisition, bûchers, paysans révoltés massacrés et pendus, écartèlements en place publique etc.) relèvent en réalité de sa toute dernière phase (13e-15e siècles) et se prolongent bien au-delà jusqu'au 17e voire 18e siècle, autrement dit sont concomitants et indissociables de la construction de l’État moderne dans lequel elle a bâti sa prospérité, question que nous avons déjà maintes fois abordée. De cet "âge des ténèbres" émergent seulement les figures de quelques "grands rois", ceux qui ont "fait la France" autrement dit le cadre territorial et le bras politico-militaire de son accumulation capitaliste, et dont "Saint" Louis IX n'est pas des moindres ; jusqu'à la "Renaissance" qui marque sa première consécration économique et culturelle suivie du "bon Henri IV", du "Roi Soleil" Louis XIV trônant à Versailles puis des portraits plus "mitigés" de Louis XV et Louis XVI jusqu'à la "révolution" de 1789. Devenue après moult péripéties (affaire Dreyfus, régime de Vichy) majoritairement anti-antisémite depuis une soixantaine d'années, la bourgeoisie est dès lors bien obligée de gommer consciencieusement que ses "grands rois qui ont fait la France" sont aussi ceux qui ont mis en place puis maintenu des mesures d'exclusion contre les Juifs n'ayant rien à envier aux lois de Nuremberg.

    Synagogue Avignon Paul KlijnÀ vrai dire, très comparable dans sa précarité est la "blancheur" de nos Peuples "provinciaux" d'Europe, guère mieux considérés que du bétail il y a encore 300 ou 400 ans et "blanchis" par la "grâce" de l'Empire colonial au détriment des Peuples colonisés d'outre-mer, accédant ainsi aux Droits "naturels" (mais tout FORMELS) de l'Homme BLANC jusqu'à faire partie de ce que l'on peut qualifier d'"aristocratie ouvrière mondiale", "aristocratie" que le capitalisme en crise générale entraîne désormais dans sa chute. Un "blanchissage" qui n'est là encore pas allé sans accrocs ; ainsi au 19e siècle les Occitans (hormis les classes aisées/francisées) étaient-ils pour Jules Michelet "tout autre chose" que français, "peut-être espagnols ou maures", pour Hippolyte Taine "un mélange de carlin et de singe" (!), pour Joris-Karl Huysmans (parisien de père hollandais) des "gens qui ont de l'astrakan bouclé sur le crâne et des palissades d'ébène le long des joues", des "latins mâtinés d'arabes" (...) "race de mendiants et de lâches, de fanfarons et d'imbéciles" (!!), et plus tard pour l'ignoble Louis-Ferdinand Céline "la partie vinasseuse de la République, profiteuse, resquilleuse, politique, éloquente, creuse" (1938) puis carrément "peuplée de bâtards méditerranéens, narbonoïdes dégénérés, nervis, félibres gâteux, parasites arabiques que la France aurait eu tout intérêt à jeter par-dessus bord (...) rien que pourriture, fainéantise, infect métissage négrifié " (!!!).

    D'ailleurs à la "grande" époque du nationalisme antisémite francouille des Barrès, Drumont et compagnie, lorsque la moitié sud de l'Hexagone votait massivement à gauche (radical ou socialiste, incarnant ainsi "l'infâme" république parlementaire) tandis que la moitié nord penchait nettement plus à droite, et comme pour faire écho aux temps du "bon" roi "Saint"-Louis-la-rouelle, le trait d'égalité entre "Midi" et "juiverie" était pour ainsi dire omniprésent : "Dans la politique, c'est le Juif qui dirige et le Méridional qui agit. Derrière Rouvier, il y a Rothschild" écrivait ainsi Gaston Méry, journaliste d'extrême-droite et disciple d’Édouard Drumont en 1891 [ou encore si l'on regarde cette caricature de 1907, pourtant publiée dans un journal se voulant "socialo-anarchiste" (mais manifestement hostile au mouvement), les vignerons occitans affamés sont représentés gras et repus, vêtus bourgeoisement... mais aussi sous des traits rappelant fortement les caricatures antisémites de l'époque, le personnage au deuxième plan formant même une sorte de triangle (maçonnique ?) avec ses mains devant la statue de la République]. Mais s'en étonnera-t-on maintenant que nous avons vu comment le "rouleau compresseur" anti-juif du Royaume de "France" a été indissociable de la Conquista de nos Terres d'Òc et de la sanglante soumission de notre Peuple, et lorsque l'on se souvient que face à la Grande Révolte de 1907 le réactionnaire Figaro brandissait encore la figure "héroïque" de Simon de Montfort ?

    Nous avons là le parfait reflet intellectuel de la réalité matérielle : l'expansion en cercles concentriques du système "France", d'abord jusqu'aux rives de la Méditerranée et de l'Atlantique puis au-delà, à partir d'un Bassin parisien certes économiquement moins avancé au départ (12e s.) mais à qui l'exploitation féroce de ses producteurs (servage "dur") et, comme on l'a vu, la bénédiction pontificale donneront la supériorité politico-militaire. Pour les Bretons comme pour leurs cousins irlandais de l'autre côté de la Manche, celtes donc "nordiques" en principe, on ira jusqu'à imaginer que les "vrais" Celtes (après apport romain et germanique) sont les Français et les Anglais ainsi que les classes "supérieures" de Bretagne et d'Irlande, tandis que la populace descendrait d'"Ibères" venus d'Afrique à la fin de la préhistoire. L'antisémitisme, d'abord religieux puis (à partir du 19e s.) "racial" ("ce sont des Asiatiques"), n'est qu'un autre reflet de cette même réalité matérielle structurelle. Tout cela pour déboucher aujourd'hui, dans la nouvelle crise générale du capitalisme et avec les autres Peuples-"provinces", sur cette "France des périphéries" non moins systématiquement rabaissée que celle des "quartiers sensibles" par l'idéologie dominante, surtout lorsqu'elle a l'outrecuidance de "l'ouvrir"... Est-il envisageable aujourd'hui qu'au sein d'un même État européen, la bourgeoisie d'une partie dudit État voie (et propose aux masses) une "sortie" de la crise générale du capitalisme dans l'asservissement brutal, voire le massacre d'autres régions ? L'exemple de l'Ukraine semble hélas nous montrer que ce n'est pas pure politique-fiction. En parlant de l'Ukraine, les ultra-Synagogue Carpentras 3nationalistes des régions de l'Ouest y proclament ouvertement leur volonté de "purger le pays de 400.000 Juifs" ce qui n'empêche pas Washington, Londres, Paris, Berlin et Bruxelles de les soutenir tandis que la presse sioniste fait part de ses sueurs froides : en toute logique, le délire comme quoi "les Juifs/sionistes dirigent le monde" devrait être mort sur le bords du Dniepr...

    Tel est le monde dans lequel nous vivons ; le monde que nous voulons et devons changer.

    Les Juifs habitant l'Occitanie font partie intégrante du Peuple occitan en tant que communauté culturelle spécifique, dans toute leur judéité (c'est-à-dire sans injonction assimilationniste) ; comme au demeurant tous les Juifs d'Hexagone font partie intégrante de leurs Peuples respectifs ; sauf peut-être les Séfarades d'Afrique du Nord venus dans les années 1960, qui peuvent avoir certaines caractéristiques d'une colonie intérieure - bien que leur antagonisme avec la colonie intérieure maghrébine musulmane (arrivée pour l'essentiel à la même époque...) soit savamment entretenu par le système dominant.

    Le Mouvement révolutionnaire de Libération du Peuple occitan (MRLP) ne tolère pas la haine antisémite sur le sol d'Occitanie, d'où qu'elle vienne, y compris de la part de personnes colonisées-intérieures comme cela s'est produit à Tolosa (Mohamed Merah).

    À vrai dire, si l'on regarde la liste des "villages des Justes" et autres lieux de mémoire dressée par le mémorial de Yad Vashem, il est même possible de dire que le rejet de l'antisémitisme est une composante intrinsèque de la culture populaire occitane : l'histoire de l'antisémitisme en Occitanie se confond avec celle de la conquête et de la domination francouille et un "Occitan" antisémite est un francisé du cerveau[2] ; fut-il un (soi-disant) farouche "occitaniste" tel Charles Maurras ou Louis Alibert.

    Ceci ne signifiant pas pour autant (et nous avons suffisamment expliqué que cela n'a rien à voir) avoir de l'indulgence pour le projet sioniste au Machrek arabe, violemment colonisateur et ségrégateur, ce qu'un Peuple avec l'histoire qu'a le nôtre ne peut accepter.

    De fait, le Mouvement révolutionnaire de Libération du Peuple occitan combat tout aussi impitoyablement la merde idéologique sionarde (y compris camouflée sous des salmigondis d'"extrême-gauche", "ultra-marxistes" ou "libertaires") défendant les crimes colonialistes et d'apartheid israéliens, merde idéologique généralement indissociable (là encore sous tous les dehors que l'on veut) de l'idéologie républicarde bleu-blanc-rouge, à laquelle la bourgeoisie juive (qui a commencé à impulser le projet sioniste dès la fin du 19e siècle) est historiquement arrimée.

    D'ailleurs, plutôt que d'aller exproprier et martyriser un Peuple qui n'a aucune responsabilité dans les tragédies subies, il est possible d'affirmer sans crainte devant les communautés juives (européennes comme nord-africaines comme orientales) que l'Occitanie révolutionnaire pour laquelle nous luttons peut et veut être la nouvelle Andalus qui peuple leur imaginaire collectif. 

    Et que surtout, nul n'oublie jamais cette phrase d'un grand ennemi de l'oppression qui s'adresse à tous les Peuples niés, racisés, "provincialisés" ou impérialisés : "Quand vous entendez dire du mal des Juifs, dressez l'oreille, on parle de vous" (Frantz Fanon) !


    [1] Ainsi, trois siècles après avoir initié la persécution systématique des Juifs, la Papauté devenait l'un de leurs tout relatifs refuges tandis que "l'élève" État moderne avait "dépassé le maître"... On retrouvera cette même tolérance en ghettos dans d'autres parties de l'Europe n'ayant pas encore donné naissance à un véritable État moderne, notamment l'Empire polono-lithuanien des 15e-18e siècles (berceau du Yiddishland) mais aussi les multiples petits États du Saint-Empire germanique (= Allemagne, Autriche, Tchéquie actuelles), d'où le fait que l'on trouvait 10 fois plus de Juifs dans ces pays (ashkenazim, Ashkenaz étant dans la Bible l'arrière-petit-fils de Noé et l'ancêtre des peuples germaniques et slaves, servant donc à désigner cette partie de l'Europe) qu'en "France" au moment de l'émancipation de 1791. Mais un siècle et demi plus tard, le nazisme anéantira cette brillante culture (90% d'assassiné-e-s) qui survit aujourd'hui un peu dans la diaspora, principalement aux États-Unis (l'idéologie sioniste d'Israël étant quant à elle très hostile aux cultures juives d'avant l'alya).

    [2] maurras-charlesLes jacobinards "rouges" citeront évidemment l'exemple de Maurras pour "démontrer" qu'en "France", le fascisme et l'horrible antisémitisme sont forcément "régionalistes". Pourtant, Charles Maurras (né à Martigues, Provença, en 1868) était typiquement ce qu'il faut appeler un Français du cerveau. En fait, si l'on schématise (pour les besoins de la démonstration) l’État français et ses "provinces" comme un Empire colonial, alors Maurras était un bourgeois comprador souhaitant "refonder le pacte" sur une base plus favorable aux "provinces" ; en fin de compte une sorte d'Houphouët-Boigny ou de Senghor lorsqu'ils voulaient substituer à l'Empire une "Union française" ; d'ailleurs dans une démarche "nationale" purement culturaliste (Félibrige vs "négritude") assez similaire à la base. La seule différence est que pour Houphouët ou Senghor cette "refondation" impliquait une "avancée" démocratique à Paris (bien qu'au final ce sera le "coup d’État permanent" gaulliste qui la mettra en œuvre, et qu’eux-mêmes deviendront des despotes implacables de la "Françafrique"), alors que pour Maurras elle impliquait un "recul" : la république bourgeoise étant "forcément" centralisatrice, il fallait un retour à la monarchie dont l'autorité "naturelle" pouvait seule permettre de décentraliser. Mais l'esprit était finalement le même ; et à des années-lumière de celui à la fois républicain démocratique, socialisant et décentralisateur des luttes occitanes de 1848, 1851 et 1870-71. Le problème est que, Maurras étant devenu le leader de l'Action française après avoir été un "compagnon de route" du Félibrige, il offre aux jacobinards de tout poil cet argument facile : l'occitanisme comme tout "régionalisme" est forcément réactionnaire, preuve que c'est un mouvement qui veut "faire tourner la roue de l'histoire à l'envers"... Jacobinards qui "omettront" bien sûr commodément de citer d'autres noms de l'extrême-droite anti-républicaine et antisémite de l'époque : le lorrain Barrès, et a fortiori les parisiens pur jus Bernanos et surtout Drumont, que Maurras lui-même définira comme son maître à penser ("la formule nationaliste est ainsi née presque tout entière de lui, et Daudet, Barrès, nous tous avons commencé notre ouvrage dans sa lumière") et dont le disciple Gaston Méry, comme on l'a vu, faisait des Occitans le "bras armé du Juif". D'ailleurs, dans une époque littéralement baignée d'antisémitisme, Maurras n'était même pas forcément le plus virulent (Drumont étant de très loin beaucoup plus "gratiné") : il était avant tout anti-allemand, anglophobe et anti-protestant (voyant dans la franc-maçonnerie un crypto-protestantisme, ce qui n'est d'ailleurs pas entièrement faux, et dans les Juifs des alliés de cette dernière).


    Quelques réflexions au sujet du débat qui agite actuellement le mouvement antifasciste et révolutionnaire, sur le caractère "structurel" ou non de l'antisémitisme aujourd'hui alors même qu'il n'est plus assumé ouvertement par l’État :

    - "Structurel" signifie par définition quelque chose, produit d'une situation matérielle, qui imprègne profondément les représentations sociales et les agissements qui en découlent dans les masses populaires. Ainsi, par exemple, le monde capitaliste que nous connaissons repose depuis plusieurs siècles sur la suprématie mondiale des "Blancs" (Européens et euro-descendants d'Amérique du Nord) qui dominent et exploitent (la bourgeoisie exploite directement, les travailleurs récupèrent des miettes de cette exploitation) les Peuples des autres continents (et de surcroît, tendent à instaurer des hiérarchies/rapports de domination entre et au sein de ceux-ci). Le racisme est donc un phénomène structurel qui sous-tend tous les rapports sociaux des "Blancs" avec les "non-blancs" (tant au niveau mondial que dans les "pays blancs"), mais aussi des "non-blancs" entre eux et avec les "Blancs" (comme le fameux "racisme anti-blanc" - avec ses penchants plus ou moins... antisémites - qui est un produit en réaction de cette situation, mais aussi - beaucoup plus souvent - le mimétisme servile, la honte de soi et le mépris pour sa propre identité culturelle etc. etc.).

    - L'antisémitisme est né comme produit d'un des nombreux crimes fondateurs (une des "douleurs de l'accouchement") du capitalisme : la spoliation systématique des Juifs à la fin du Moyen Âge et au début de l’Époque moderne, sous l'accusation fréquente d'être des "usuriers", des "rapaces" ainsi qu'un Peuple ayant "renié le Christ", "ennemi des chrétiens" ("enlevant" par exemple des enfants chrétiens pour les assassiner rituellement, empoisonnant les puits pour répandre les épidémies etc.). Il s'est maintenu après le triomphe des "révolutions" bourgeoises et l'entrée dans l'ère industrielle comme expression du conservatisme anti-libéral... et aussi comme "anticapitalisme des imbéciles" en forme de nostalgie du "bon vieux temps" pré-industriel (une grande et grave maladie infantile du mouvement ouvrier !) ; avant d'être mis au service de la lutte contre la tendance historique à la révolution socialiste.

    - Ensuite de quoi les crimes nazis l'ont, comme disait (l'antisémite lui-même) Bernanos, "déshonoré"... Pour autant, étant (comme on l'a dit) le produit d'un des crimes fondateurs du capitalisme et intrinsèquement lié à celui-ci, la disparition véritable de la base matérielle de l'antisémitisme ne peut être que celle du capitalisme lui-même. Et même si l'on admettait que cette base aurait disparu (quelque part entre 1945 et nos jours...), l'on sait que les idées et les représentations sociales ont une certaine "autonomie" et "inertie" par rapport à la réalité matérielle qui les a engendrées, et qu'elles peuvent lui survivre pendant un temps assez long. Alors à plus forte raison à un "simple" "déshonneur" bernanosien...

    - En clair : il n'est tout simplement pas possible que quelque chose qui a structuré (signification de "structurel" !) la pensée politique européenne et occidentale pendant des siècles, depuis l'émergence du capitalisme au Moyen Âge jusqu'au triomphe des monopoles et à leur lutte contre la révolution prolétarienne au 20e siècle, ait pu cesser "du jour au lendemain" (ou en quelques décennies) après la défaite du nazisme d'imprégner le "sens commun" (= la conscience populaire aliénée/arriérée) de l'"Occident chrétien".

    - Pour autant, c'est une réalité (dans les pays impérialistes occidentaux en tout cas) que la position des États bourgeois a changé ; peut-être parce que (plus que "déshonoré par Hitler"...) si le génocide nazi a heureusement pu être arrêté dans son œuvre criminelle, la "solution finale à la question juive" a finalement été trouvée... dans le sionisme, transformant une population dispersée d'éléments "antinationaux" et "subversifs" (démocrates radicaux ou révolutionnaires) en citoyens et soldats ou (du moins) en défenseurs acharnés d'un État faisant office de "rempart de l'Occident" au Proche-Orient et (par-là) de la politique impérialiste et des "valeurs" occidentales en général ; avec comme "salaire" de ceci le "philosémitisme" affiché par (la majorité de) nos directions politiques bourgeoises. Les États bourgeois occidentaux n'assument plus et même répriment les opinions (exprimées "trop fort") et les actes antisémites (l’État français entre 1789 et 1940, par exemple, n'était pas officiellement antisémite et ne discriminait pas les Juifs mais laissait la haine la plus sordide avoir pignon sur rue)... et cela, qu'on le veuille ou non, fait une sacrée différence !

    - Cette différence peut s'observer très simplement, de manière chiffrée, dans les études d'opinion qui montrent que tant la haine ouverte que les préjugés (pourtant plus résistants) reculent constamment depuis l'après-guerre dans la population générale, et encore plus si l'on ne prend que les seuls "Blancs". En 2013, 85% de la population hexagonal n'avait pas une opinion négative des Juifs ; et même des éléments au discours extrêmement raciste les placent aujourd'hui (souvent aux côtés des "Asiatiques") en "modèle de communauté bien intégrée qui ne pose pas de problèmes". Les derniers éléments antisémites "blancs" sont des militants politiques nostalgiques des régimes fascistes des années 1930, n'ayant pas accepté la défaite de ceux-ci à l'issue de la Seconde Guerre mondiale (ou quelques intellectuels "rouges-bruns" admirateurs d'une certaine URSS "terminale" et voyant dans la Russie de Poutine sa continuation, sensibles aux théories "eurasistes" d'Alexandre Douguine etc. etc., et niant le génocide antisémite nazi comme "invention de l'Occident et prétexte au sionisme" - ceci rejoignant l'"anti-impérialisme des imbéciles" cf. ci-après). En revanche, ce que l'on observe depuis une vingtaine d'années est une montée des opinions antisémites chez les "non-blancs", principalement les personnes de culture musulmane. Il s'agit là essentiellement de deux phénomènes : 1°/ autour des personnalités "phares" de Dieudonné et Alain Soral, d'une "rencontre" entre l'antisémitisme européen résiduel (d'autant plus virulent qu'il est résiduel, et se sent cerné par un État "philosémite" !) et ce que l'on pourrait qualifier d'"anti-impérialisme des imbéciles", un sentiment spontané et "primaire" de révolte face aux crimes impérialistes perpétrés "contre les musulmans" qui se focalise sur la question palestinienne et tend à faire du gouvernement israélien (et de ses partisans les plus acharnés dans les pays occidentaux, aux États-Unis en particulier) le "maître d’œuvre" de la politique impérialiste occidentale et de tous ses crimes autour du globe ; sachant aussi que déjà à l'époque coloniale, les gros colons tricolores du Maghreb s'évertuaient à détourner vers les Juifs (qui avaient obtenu la citoyenneté française en Algérie, ce que certains supportaient mal...) la colère des indigènes qui leur était normalement destinée ; 2°/ dans la mouvance dite "salafiste/djihadiste", d'une rencontre entre cet "anti-impérialisme des imbéciles" et le projet impérial ("Califat") des oligarques aux pétro-dollars suraccumulés du Golfe, qui font du "Dôme d'Al-Aqsa (la grande mosquée de Jérusalem) aux mains des Juifs" l'un des grands points de mire de leur mobilisation réactionnaire de masse auprès de populations ayant toujours le sort tragique des Palestiniens "à fleur de peau". C'est (comme chacun-e le sait) dans cette dernière mouvance que les sentiments anti-juifs peuvent aller jusqu'à l'assassinat physique (Mohamed Merah, Mehdi Nemmouche, Amedy Coulibaly etc.).

    Cette résurgence de l'antisémitisme sous une forme "inattendue", dans des sociétés qui à l'heure de la "Fin de l'Histoire" pouvaient le croire réduit à une poignée de "nazillons dégénérés", a évidemment eu de quoi surprendre, choquer et bousculer les schémas pré-établis de tout un camp progressiste "simpliste" (qui pourra alors se réfugier dans un silence "gêné" que d'aucuns interprèteront comme "ambigu", ou alors tomber dans la force d'attraction de l'un ou l'autre des deux "pôles" réactionnaires sur la question - "philosémitisme" anti-"islamo-gauchiste", "anti-conspi", anti-anti-impérialiste et anti-antisioniste ou alors "anti-impérialisme des imbéciles" vu comme "le sentiment des opprimés").

    Mais ce qu'elle montre surtout, c'est que l'extinction de l'antisémitisme n'est possible (et encore, pas du jour au lendemain) que par l'extinction de sa base matérielle d'existence qui est le capitalisme.


    votre commentaire

  • Il s'appelait Hervé Gourdel, il avait 55 ans, il était guide alpiniste et venait des Alpes occitanes (Saint-Martin-Vésubie, Mercantour).

    Était-il de gauche ou de droite ? Se considérait-il plutôt français ou occitan ou les deux ? Nous n'en savons rien et nous ne voulons pas le savoir : ce que nous savons nous suffit.

    Ce que nous savons c'est qu'il n'était ni un militaire de métier ni un mercenaire de ces abominables sociétés privées qui sèment la mort aux quatre coins du monde, ni même un de ces "coopérants" et autres "ONGistes" qui sont les nouveaux "missionnaires" de la "civilisation occidentale" en terre "barbare". Il était simplement un montagnard venu en Kabylie pour y vivre sa passion, la montagne.

    Seulement voilà : "l'actualité internationale", cette "actualité" que nos bons Français (occitans ou autres) regardent d'un œil un peu distant, tout en dînant, au JT du soir l'a rattrapé pour lui infliger une mort atroce.

    Hervé Gourdel est tout simplement un Occitan de plus, comme des centaines de milliers d'autres avant lui (au nom du Roy, de l'Empereur ou de la République), à être mort au "champ d'honneur" d'une guerre qui n'était pas la sienne : celle que se livrent désormais (et vont sans doute se livrer pendant des années encore) l'Occident impérialiste, dont fait partie notre État-prison la France et dont les armées sanguinaires ensanglantent la planète depuis des siècles ; et ses créatures : les gros poussahs de la Péninsule arabique, gorgés depuis des décennies de pétro-dollars pour lesquels ils cherchent désormais un terrain d'investissement et qui financent le djihadisme pour se tailler, justement, cette base d'accumulation sous le nom de "Califat".

    Comme l'écrivait en 1912 (après avoir eu des positions hasardeuses sur le sujet quelques décennies auparavant) le grand socialiste de cœur occitan Joan Jaurès : "Mais si les violences du Maroc et de Tripolitaine achèvent d’exaspérer, en Turquie et dans le monde, la fibre blessée des musulmans, si l’Islam un jour répond par un fanatisme farouche et une vaste révolte à l’universelle agression, qui pourra s’étonner ? Qui aura le droit de s’indigner ?"... Un siècle plus tard, il y a eu bien des Marocs et bien des Tripolitaines et nous y sommes désormais : le "fanatisme farouche" s'est levé, il est devenu pour des milliers de personnes ici-même - au "cœur du monstre" impérialiste européen - le "phare" d'un impressionnant et aberrant "sionisme musulman", et les pétro-dollars suraccumulés du Golfe - en quête de terrains où s'investir et se valoriser - en ont fait leur soldatesque. Et nous ne pouvons, en effet, ni nous étonner ni nous indigner ; mais seulement pleurer les vies innocentes que cette déferlante de barbarie emporte.

    Elle a emporté la vie d'Hervé Gourdel dont il est à peu près certain que du haut de ses cimes, dans le parfum des génépis, il n'avait jamais voulu même la plus petite de ses causes. Comme elle a déjà emporté et emportera encore des centaines et des centaines de milliers d'autres sur peut-être un quart ou un tiers de la planète, sunnites ou chiites ou chrétiens, juifs ou yézidis ou agnostiques ou athées, Arabes ou Kurdes ou Turcs ou Somalis, "Orientaux" ou "Occidentaux", Blancs ou Noirs ou entre-les-deux, sous les bombes de la "civilisation" comme sous les balles et les couteaux de boucher de la "barbarie".

    Alors nous, ni étonnés ni indignés, nous ne nous jetterons pas plus dans les bras de cet "Occident civilisé" qui nous l'enjoint que dans ceux des "barbares" qu'il a lui-même engendré : comme les glorieux compagnons de Lénine avant nous - au plus noir de la nuit de 14-18 - nous proclamons le DÉFAITISME RÉVOLUTIONNAIRE ABSOLU vis-à-vis de ces "camps" réactionnaires et nous DÉCLARONS LA VÉRITABLE GUERRE SACRÉE, la GUERRE DU PEUPLE À LA FACE DU MONDE CAPITALISTE, père de toutes ces abominations !

    Nous déclarons et livrerons la Guerre populaire révolutionnaire, car elle est la Fraternité des Peuples contre les ennemis de toute humanité.

     

             Herve-Gourdel.jpg1MAM Aniane 3

     


    votre commentaire

  • Depuis bientôt 10 ans que l'on entend parler de ces personnages (Soral, Dieudonné, puis toute la ribambelle des "quenelliers" plus ou moins "associés", du moins jusqu'au "clash" qui arrive plus vite qu'on le pense), on a l'impression qu'il s'agit de démons jaillis des portes de l'Enfer qui justifieraient "pour la culture et la civilisation" (comme disent les autres) les alliances "antifascistes" les plus hallucinantes, comme avec le P's' bourgeois de Valls (le Parti radical de notre époque)...

    Alors que nous avons tout simplement là des PETITS CAPITALISTES plus ou moins dandys qui ont trouvé dans la mobilisation politique de masse (la "dissidence") un créneau commercial vendeur et qui disent "juif" (enfin, plutôt "sioniste" ou "talmudiste" pour éviter les condamnations, qui coûtent du fric) pour ne pas dire CAPITALISME, car dire "capitalisme" les foutrait dans la merde en tant que petits bourgeois. Qui mettent leur "dissidence" au service du Front National car même la mettre au service du NPA ou de Mélenchon exigerait des remises en cause personnelles trop importantes, une autocritique trop difficile de ce qu'ils sont. Et qui ne vont nulle part sinon au bout d'un croc de boucher car dans ce pays, pour paraphraser C.L.R. James, "le cours géné­ral de l'histoire est tel que tout mouvement fasciste d'étendue nationale (aussi déguisé soit-il) sera obligé de s'attaquer à la lutte des 'minorités visibles'/colonisé-e-s intérieur-e-s pour l'égalité"*.

    Ainsi donc, sur l'effondrement idéologique du soralisme dont nous avions déjà parlé :

    Soral avait tort et "nous" avions raison

    Réponse de l'intéressé sur les réseaux sociaux : "Je ne résiste pas au plaisir de relayer ce magnifique article de ces sous-merdes d'antifas sous sponsoring trotsko-sioniste !". Waow, on peut dire que ça, c'est de l'argument politique !

    L'on pourra également vous inviter à lire ce cinglant article d'un blog anticolonialiste basé et luttant dans l'une des dernières colonies directes tricolores (la Réunion) ; autrement dit à qui on ne fait pas prendre des vessies "antisionistes" antisémites pour des lanternes anticapitalistes et anti-impérialistes :

    Comprendre le colonialisme et le racisme : le cas d'Alain Soral

     

    * La prise de position d'Aymeric Chauprade (le "Monsieur International" du FN) en faveur d'Israël et de ses partisans, lors du dernier conflit-massacre à Gaza et des grande manifestations populaires le dénonçant, et la rupture consécutive d'Alain Soral et de sa nébuleuse avec lui - donc avec le FN (1 - 2 - 3) - sont venues confirmer cela et ce que nous disons depuis des années quant à l'INCONSISTANCE politique du soralo-dieudonnisme (ce qui ne nous empêche pas de dénoncer son fond idéologique, ses buts politiques et ses conséquences néfastes dans les classes populaires). En fin de compte, il est possible de dire que la différence entre Médine et Dieudonné (deux "idoles des quartiers" à leurs époques respectives) c'est que quand Dieudonné a rejoint Soral, cela pouvait encore passer pour une démarche "d'avant-garde" vouée à un certain succès. Cette différence se voit bien, d'ailleurs, dans la manière qu'a Médine (contrairement à Dieudonné qui est "à fond" dans son truc) d'assumer un jour à 100%, un jour à moitié, un jour presque pas etc., en mode "je prends pas parti mais un peu quand même".


    votre commentaire

  • Nous reproduisons ici un article de François Delpla, historien indiscutablement progressiste (normalien à la rue d'Ulm en 1968, il a sans doute croisé plus d'un mao voire en a carrément été, puis il a participé en 1998 au Livre noir du capitalisme - l'anti-torchon-de-Courtois - et contribue actuellement à Mediapart) qui critique de manière intéressante (bien que limitée) la thèse du fameux Zeev Sternhell, cet historien israélien porté aux nues par certains "maoïstes", comme quoi le fascisme serait d'abord et avant tout un "mouvement de rejet des Lumières".

    Rappelons - car il faut le rappeler - que bien que "de gauche" et "du camp de la paix", Sternhell est d'abord et avant tout un sioniste pour qui il est absolument fondamental de "démontrer" cette "centralité anti-Lumières" du phénomène fasciste : d'abord parce qu'elle est synonyme, pour lui, de "centralité anti-juive" et apporte donc une caution "antifasciste" à la thèse de la "haine éternelle contre le Peuple juif" qui fonde son idéologie ; ensuite parce qu'elle permet, encore une fois, de "dissocier" le fascisme du CAPITALISME dont il est pourtant le pur produit (et dont les Lumières ont été au 18e siècle l'idéologie du triomphe), autrement dit de l'exclure du centre légitime des idéologies occidentales dans lequel il s'inscrit pourtant totalement. Le fascisme doit donc À TOUT PRIX être présenté comme un phénomène extérieur qui "prend d'assaut" le système politique capitaliste "normal" (caractérisé sans autre forme de nuance comme la démocratie libérale)[1] ; et non comme quelque chose qui naît en son sein même, au plus profond de celui-ci, dans un processus de fascisation dont les régimes comme le nazisme ne sont que l'aboutissement ultime et effroyable ; processus à l’œuvre pendant des décennies comme par exemple les 40 années préparant (ici à coup de "hussards noirs" etc.) la Première Guerre mondiale, et auquel nous assistons une nouvelle fois aujourd'hui en Europe et dans la plupart des grands Centres capitalistes mondiaux (Amérique du Nord, Russie, Extrême-Orient) bien que rien de comparable au Reich allemand ni même au fascisme italien n'y ait encore vu le jour.

    frederic de prusse nazisUn bon exemple du fait que le fascisme, pris dans sa version la plus radicale c'est-à-dire le nazisme, n'était que tout relativement "anti-Lumières" est par exemple cet hommage (voir l'affiche ci-contre) rendu par le IIIe Reich en 1936 (pour les 150 ans de sa mort) à Frédéric II le Grand (1740-86), archétype du "despote éclairé", ami de... Voltaire et ayant (surtout) jeté les bases en son royaume de Prusse de l’État allemand moderne. Un État allemand moderne 1°/ produit et serviteur (comme tous les États modernes) du capitalisme dont les Lumières, on l'a dit, sont l'idéologie de la consécration et 2°/ dont le nazisme, dans un contexte bien particulier non seulement de crise capitaliste générale et de menace révolutionnaire mais aussi de bourgeoisie militairement vaincue et humiliée, n'a jamais été que l'expression particulièrement terroriste. Qu'y avait-il d'incongru, par exemple, à ce que le nazisme se revendique de Frédéric II lorsque l'on sait que le nom même de Prusse ne désigne pas la région de Berlin (celle-ci est le Brandebourg) mais des territoires actuellement situés en Pologne et en Russie (enclave de Kaliningrad) dont la population originelle, slave et balte, avait été exterminée ou asservie au Moyen Âge par les Chevaliers teutoniques jusqu'à ce que ces derniers (convertis entre temps au luthérianisme) ne les transmettent au 17e siècle à la principauté de Brandebourg - qui sera alors proclamée "Royaume de Prusse" en 1700 ? Un État , donc, d'une démarche colonialiste meurtrière que l'on ne retrouvera pas bien différemment dans le Generalplan Ost nazi, avec simplement la technologie du 20e siècle en plus ! [Le Reich exaltera donc aussi, logiquement, "l'épopée" de l'Ordre teutonique et l'URSS lui répondra en 1938 par le célèbre film d'Eisenstein Alexandre Nevski - histoire d'un prince russe victorieux des sinistres chevaliers au 13e siècle.]

    Expression terroriste ultra, donc, de l’État moderne dans un contexte de crise générale du capitalisme et de révolution prolétarienne à l'ordre du jour, le fascisme peut par conséquent difficilement être un "rejet" des Lumières qui ne sont pas la remise en cause mais la consécration de cet État - se débarrassant simplement de l'instrument politique obsolète de l'absolutisme. Les "anti-Lumières" eux-mêmes n'étaient d'ailleurs (visiblement) pas si "anti-Lumières" que cela puisque, nous dit Delpla, ils cherchaient fréquemment à opposer les "bonnes" révolutions anglaise et américaine (Burke, par exemple, avait soutenu cette dernière) à la "mauvaise", la révolution bourgeoise française (conception que l'on trouvait déjà dans les maquis chouans et vendéens, dont bon nombre de leaders avaient fait la Guerre d'Indépendance américaine aux côtés de La Fayette, et que l'on a revue au goût du jour lorsqu'en 1989 le bicentenaire de ladite révolution a coïncidé avec la "chute du communisme") ; une "mauvaise" révolution française à laquelle ils reprochaient essentiellement son "dérapage" égalitariste "totalitaire" de 1792-94 et surtout... son expansionnisme "universaliste" (qui, lui, devait survivre à Thermidor) : rappelons qu'ils appartenaient souvent à des nations envahies et/ou en guerre contre les armées "révolutionnaires" bleu-blanc-rouges (Burke anglo-irlandais, Herder[2] allemand, Joseph de Maistre savoyard)... Un "universalisme" expansionniste qui devait forcément plus tard, pour les bourgeoisies du 20e siècle, évoquer celui de l'ennemi absolu : la Révolution bolchévique russe et son Internationale communiste !

    Une autre grande référence de l'extrême-droite, ayant notamment donné son nom à un sinistre hebdomadaire, est elle aussi dans la même veine : Antoine de Rivarol. En parcourant sa biographie, l'on s'aperçoit que son œuvre la plus célèbre est un Discours sur l’universalité de la langue française (ce qui ne devrait pas déplaire à nos "maoïstes" sternhelliens !) prononcé à l'Académie de Berlin où il était l'invité de... Frédéric II ; et que dès Thermidor (chute de Robespierre et des ultra-démocrates) et a fortiori après le 18 Brumaire (coup d'État de Napoléon Bonaparte) son retour en France (qu'il avait quittée en 1792) était plus qu'une option - mais il mourra à Berlin en 1801 sans avoir pu réaliser son projet. Son attachement viscéral à l'institution monarchique et son rejet de l'égalitarisme (il était lui-même un "parvenu" de fausse noblesse...) n'en faisaient pas moins un "homme des Lumières", comme lorsque dans deux Lettres à M. Necker (en 1788) il professe un épicurisme élevé et soutient la possibilité d’une morale indépendante de toute religion, ou lorsqu'à partir de 1789 il participe aux Actes des Apôtres, une revue satirique monarchiste se réclamant de... Voltaire. Il n'était certainement pas hostile au "Progrès", au capitalisme d'ores et déjà triomphant ni (sans doute) à l'idée que l’État français d'Ancien Régime devait rapidement se réformer. Il voyait simplement dans la monarchie ou encore dans l’Église de nécessaires garantes d'ordre et de stabilité ; les "bafouer" revenant selon lui à ouvrir grandes les portes aux forces incontrôlables de la "populace" (ce à quoi, dès 1789, les faits ont pu sembler donner raison) : "quand les peuples cessent d'estimer, ils cessent d'obéir" proclamait-il. 

    L'on pourrait encore citer, comme l'évoque Delpla, l'admiration d'Hitler pour l'Antiquité romaine (référence plutôt "lumiéreuse" s'il en est) ou encore pour Napoléon (à la pierre tombale duquel il réserva sa première visite à Paris) ; cette dernière étant bien sûr partagée avec une grande partie de l'extrême-droite hexagonale (Pierre Taittinger, fondateur des "Jeunesses patriotes" en 1924, était ainsi bonapartiste et l'on trouvait également des traces évidentes de bonapartisme chez les Croix-de-Feu/Parti "social" français, qui ont été - rappelons-le - la matrice idéologique du gaullisme, mais aussi chez le fondateur de "Jeune Nation" et de l'Œuvre française Pierre Sidos, qui revendique cette référence alors qu'il est traditionnellement plutôt classé national-catholique/maurrasso-pétainiste).

    Nous avons déjà vu ici (deuxième partie de l'article : "Le fascisme entre tradition et modernité") comment le fascisme, s'il puise allègrement ses références dans le passé pour mobiliser en exaltant une communauté "organique" millénaire [et non un État simple construction politique historique, abritant parfois des nationalités (autres produits de l'histoire) différentes ("emprisonnées") et dans tous les cas des classes luttant entre elles, et voué à se transformer voire à disparaître dans cette lutte], n'est jamais "déconnecté" de son contexte historique réel aux problématiques duquel il est censé répondre. Il n'est donc, comme phénomène du 20e et maintenant du 21e siècle, JAMAIS véritablement "anti-Lumières" ; tout au plus (comme le suggère à un moment Delpla) une tentative de synthèse entre "Lumières" et "anti-Lumières" (entre gros guillemets maintenant que nous avons vu toute la relativité de ces définitions), dans un esprit d'"assumer toute l'histoire" de "l’État-nation" glorifié [l'on observe (aujourd'hui) particulièrement cette logique d'"assumer toute l'histoire" en Russie, où invalides.jpgtsarisme et capitalisme d’État soviétique sont gaiment réunis dans une même "continuité éternelle russe", mais aussi ici-même en France où convergent de plus en plus les tenants (principalement) de l’œuvre monarchique et ceux de l’œuvre bonapartiste et républicaine (clivage qui a sans doute lourdement handicapé le mouvement fasciste des années 1920-30), les uns (par exemple) acceptant la laïcité d'autant plus facilement qu'elle ne réprime plus que les "allogènes" tandis que les autres reconnaissent pour leur part les "racines chrétiennes" du pays, etc. etc.].

    Derrière tout cela se trouve en réalité une contradiction intellectuelle fondamentale du capitalisme que nous avons déjà longuement évoquée : le capitalisme sécrète en permanence de l'humanisme (car il arrache l'individu producteur aux soumissions traditionnelles de "droit divin", oppose le "libre et créatif entrepreneur" au féodal parasite et doit aussi, très tôt, gérer le caractère social de la production) mais il doit aussi, immédiatement et continuellement, PIÉTINER cet humanisme à peine sécrété car son moteur reste fondamentalement un vol (l'extorsion de la plus-value au salarié) et la condition de cela reste et demeure "l'ordre" et le respect des hiérarchies sociales établies. Une contradiction que le fascisme (comme toutes les contradictions du capitalisme) doit et veut nier et qu'il nie donc, au besoin en niant le capitalisme lui-même (le terme ne désignant plus que la spéculation irraisonnée, les fortunes édifiées trop rapidement, le mode de production laissé en "roue libre" sans intervention de l'autorité politique ou tout simplement la "rapacité" économique, associée ou pas à l'épithète "juif")[3]... Mais cela ne veut pas dire que des tentatives de synthèse/négation de cette contradiction n'ont pas existé antérieurement, dès l'époque des Lumières (celles-ci ne sont-elles pas en elles-mêmes un ensemble de telles tentatives ?) voire de la Renaissance, avec peut-être moins d'urgence en l'absence de crise systémique du mode de production et de mise à l'ordre du jour de son renversement - encore que le tour "incontrôlable" pris (un moment) par la révolution bourgeoise française ait pu faire ressentir une telle urgence.

    Ainsi, en substance, le fascisme n'est pas "anti-moderne" (ce qu'a peut-être voulu entendre Sternhell par "anti-Lumières") : il est un produit du capitalisme donc de la modernité que celui-ci induit. Ce qu'il veut c'est assumer cette modernité dans le respect de l'ordre et des "traditions" (synonymes de "valeurs d'ordre"), que "tout" ne "foute pas le camp", ce qui est finalement la problématique centrale du capitalisme en tant que tel : besoin de modernité (= développement des forces productives) mais, en même temps, conscience que cette modernité met chaque jour un peu plus son renversement à l'ordre du jour. De ce fait, si filiation du fascisme et en particulier du nazisme il y a, cela semble bien plus être avec l'aile droite des "Lumières"[4], celle-là même que Sternhell et tant d'autres qualifient à tort d'"anti-Lumières" [confusion que Delpla ne conteste pas voire... défend lorsque Sternhell lui-même en sort, au sujet de Burke], celle qui assume la nécessaire modernité mais sans vouloir rompre avec "l'héritage" et la "tradition", qui critique le "despotisme", le "cléricalisme" et vénère la "Raison" mais refuse les "excès égalitaristes" français de 1792-94 (autrement dit l'irruption des aspirations populaires sur la scène révolutionnaire bourgeoise - c'est typiquement la critique que Taine adresse à la période par exemple), qui admire l'Empire romain et ses "résurrections" temporaires (Charlemagne, Louis XIV, Napoléon), qui sanctifie la "liberté" et le "droit naturel"... pour les hommes blancs et aisés seulement et exècre les Juifs non en tant que non-chrétiens mais en tant (justement) que "pères" du christianisme... bref, bien plus avec ces "Lumières d'ordre" si bien incarnées par Frédéric II de Prusse qu'avec un supposé jésuitisme[5] qui rejetterait toute modernité postérieure au Moyen Âge (cela a-t-il seulement existé historiquement, passé le procès de Galilée en tout cas ?) ou même avec le "parti catholique" tel qu'il a pu exister en France au 19e siècle, opposé à la franc-maçonnerie (enfin surtout au Grand Orient, aile gauche la plus anticléricale de la franc-maçonnerie, beaucoup moins aux loges "écossaises" nettement plus conservatrices) : Hitler, comme le rappelle Delpla, détestait tout autant les catholiques (et à vrai dire le christianisme en général) que les francs-maçons... et autant de catholiques que de francs-maçons trouvèrent un modus vivendi tout à fait acceptable avec le régime !

    Quant aux fameux fascistes "venus de la gauche" que met tant en avant Sternhell (voyant en eux l'aspect principal et le "moteur" du phénomène), les Valois, Déat et autres Doriot, ils se réclamaient carrément et sans hésitation... de la Convention montagnarde, du Comité de Salut Public et de "l'An II" ("L’État révolutionnaire de 1793 est singulièrement proche de l’État totalitaire ; ce n'est pas du tout l'État capitaliste et libéral (...). Disons en raccourci que la Révolution française a tendu vers un national-démocratisme, et que nous tendons maintenant vers un national-socialisme. Mais le premier mouvement était aussi révolutionnaire que le second, il avait le même sens, il allait dans la même direction. Il est absolument faux de vouloir les opposer l'un à l'autre" - Déat, Pensée allemande et pensée française, 1944) : non seulement les "Lumières", mais encore l'aile GAUCHE de celles-ci !

    Pour ce qui est de l'"anticapitalisme" fasciste ("anticapitalisme romantique" comme disent les sternhelliens), il serait erroné de le réduire à une simple "démagogie pour mobiliser les travailleurs contre leurs propres intérêts" (bien que cette dimension ne soit pas à exclure, surtout aujourd'hui). Mais il faut bien comprendre que le terme de "capitalisme" émerge au milieu du 18e siècle, ne se répand réellement qu'au 19e ("révolution" industrielle)... et qu'au début du 20e encore, tout le monde ne lui donne pas le même sens strict que les marxistes : très souvent ne sont appelés "capitalisme" que les excès de celui-ci, l'inquiétude qu'il suscite dans une société bouleversée par la "révolution" industrielle (choc de modernité), voyant surgir sur la scène politique le prolétariat et ses revendications. On voit d'ailleurs bien qu'aujourd'hui, le fascisme ne se définit plus tellement comme "anticapitaliste" mais plutôt "contre le libéralisme", nouveau terme pour désigner les excès, "l'absence de régulation", la "finance mondialisée" et la "spéculation" auxquels est opposé le "bon" capitalisme "productif" et "enraciné". Eh bien, ce qui est entendu aujourd'hui par "libéralisme" équivaut peu ou prou à ce que les fascistes du 20e siècle dénonçaient comme "capitalisme". Le fascisme n'est pas "anticapitaliste", même lorsqu'il s'affirme tel : ce qu'il rejette c'est un capitalisme qui ne "gère" pas la société et permet à la révolution socialiste de se mettre à l'ordre du jour. Son modèle, en fin de compte, c'est le capitalisme des 16e-17e-18e siècles, qui s'appuyait sur les États "forts" absolutistes (ou "despotiques éclairés" comme la Prusse de Frédéric II...) mais leur devait aussi des comptes. Le fascisme est une certaine vision du capitalisme et non (comme l'affirment Sternhell et ses disciples) une autre vision du monde opposée à lui, ce qui mettrait notre époque politique dans une curieuse situation de "billard à trois bandes" : capitalisme-communisme-fascisme.

    voltaireatable.gifQuant à l'antisémitisme, nous avons déjà vu qu'il plonge ses racines aux sources médiévales mêmes de l’État moderne et qu'il en est absolument indissociable (tant en Allemagne qu'en "France", en "Espagne", au Royaume-Uni  etc.) ; et nous savons également que la place des Juifs dans la société a toujours FAIT DÉBAT, jamais l'unanimité dans le mouvement des "Lumières" - entre partisans de leur rejet, de leur acceptation en tant que tels, de leur acceptation à condition de s'intégrer/assimiler etc. etc. ; la "main tendue" pouvant d'ailleurs (assez fréquemment) être suivie d'un violent rejet lorsque les Juifs semblaient la refuser, comme déjà au 16e siècle avec Martin Luther (dont le pamphlet Des Juifs et de leurs mensonges deviendra un livre de chevet des nazis), mais on retrouve très largement la même véhémence chez Voltaire et beaucoup de ses contemporains "éclairés" (... dont Frédéric II, là encore : faire Ctrl+F et chercher "juif" ici dans son Testament politique). Les Lumières n'ont JAMAIS été synonymes de "philosémitisme" systématique, la position consistant le plus souvent (au "mieux") en une sommation de se dissoudre dans l'"État-nation" ("tout leur accorder en tant qu'individus, tout leur refuser en tant que nation" - Stanislas de Clermont-Tonnerre, député libéral, décembre 1789) et la vieille hostilité médiévale se recyclant souvent (comme envers l'islam aujourd'hui !) sous couvert d'anticléricalisme (rejet des religions révélées dont le judaïsme est la "matrice")[6].

    Ce n'est (comme nous l'avons dit) qu'après la Seconde Guerre mondiale, dans une volonté de dissocier le capitalisme des régimes fascistes vaincus qu'il avait pourtant engendrés, que s'est développée cette conception "philosémite" parant de manière complètement irrationnelle les Juifs de toutes les qualités (donc tout aussi différentialiste que l'antisémitisme...) et proclamant que "s'en prendre aux Juifs c'est s'en prendre à la démocratie [capitaliste occidentale] elle-même"... tout cela restant d'ailleurs très relatif - tout le monde a en mémoire les "Français innocent" de Raymond Barre après l'attentat de la rue Copernic (1980), la "tronche pas catholique" de Laurent Fabius dans la bouche de Georges Frêche (pourtant défenseur acharné du sionisme !) ou encore le ramdam médiatique (comme par hasard au lendemain de la catastrophe financière de 2008) autour de l'affaire Bernard Madoff, cet escroc n'ayant certainement pas provoqué la crise à lui tout seul mais brusquement érigé en "symbole" de la délinquance financière... et se trouvant être juif. 


    http://www.delpla.org/article.<wbr>php3?id_article=261

    À propos de Sternhell (Zeev), "Les anti-Lumières"

    Paris, Fayard, 2006


    Ce livre qui se lit comme un roman (si ce n’est qu’on l’apprécie plus encore à la seconde lecture !) montre l’intérêt de l’histoire des idées, même sans la moindre référence au contexte de leur élaboration, comme si elles se transmettaient d’auteur à auteur. Elles se transmettent aussi comme cela, et c’est certes, en amont, un facteur important de leur genèse, de même qu’un éclairage non négligeable, vers l’aval, sur leur portée. Une telle méthode donne au chercheur une légèreté qui lui permet de se déplacer à travers les siècles plus facilement que s’il devait traîner les impedimenta des conditions économiques, sociales et politiques -auxquelles Sternhell ne s’interdit d’ailleurs pas de faire allusion.

    Au cœur du propos, le repérage d’une double modernité : contrairement à l’idée commune suivant laquelle tout adversaire des Lumières serait un réactionnaire, ceux que présente le livre sont bien de leur temps et d’ailleurs, le plus souvent sans le reconnaître, ils profitent largement de l’apport des Lumières. Celles-ci postulent l’unité du genre humain : l’homme, animal raisonnable, vit en société sur la base d’un contrat le plus souvent implicite ; les philosophes français, inspirés par Locke et prolongés par Kant, travaillent à l’expliciter pour montrer qu’on peut l’améliorer, en diminuant la part des superstitions et en augmentant celle de la raison. « L’autre modernité », celle des anti-Lumières, ne consiste pas à ce que chaque auteur exalte les institutions de son propre pays ou demande qu’on les rétablisse dans leur état ancien si on vient de les changer : ces penseurs ne sont donc ni conservateurs ni réactionnaires. Ils sont, comme les Lumières, cosmopolites : c’est partout, d’après eux, que l’existant est préférable au changement, car il est légué par d’innombrables générations qui savaient ce qui était bon dans tel endroit pour tel peuple. Ce qu’il y a ici de moderne, c’est un relativisme moral et politique, qui tend à répudier toute norme générale.

    AVT_Zeev-Sternhell_7583.jpg Cette modernité initiée par Burke et Herder, relayée entre autres par Renan, Taine, Barrès, Sorel, Spengler et Meinecke, puis, après la seconde Guerre mondiale, par le professeur d’Oxford Isaiah Berlin et les néo-conservateurs américains, calomnie les Lumières en prétendant, par exemple, qu’elles conçoivent l’homme comme partout identique -alors qu’un Montesquieu ou un Voltaire se sont beaucoup penchés sur les différences entre les civilisations. On prétend aussi, avec beaucoup de mauvaise foi, que les Lumières sont « européocentristes » et exaltent la supériorité de la civilisation occidentale. Or Voltaire, peu indulgent pour le « fanatisme » qu’il avait sous les yeux, savait au contraire lui opposer de sympathiques manifestations de tolérance repérées sous d’autres climats. [Là on ne peut être qu'en désaccord et s'étonner d'une telle méconnaissance, chez un historien, des propos violemment racistes et antisémites de Voltaire dans son œuvre : http://www.contreculture.org/<wbr>AG%20Voltaire.html... Et dans un souci (certes) de contourner la censure monarchique et ecclésiastique, c'étaient plutôt les exemples de "fanatisme" qu'il allait chercher sous "d'autres climats" !]

    Si le livre contient de savoureux passages sur Burke et sa condamnation intéressée de l’élargissement du suffrage, lui qui devait tant au système bien nommé des « bourgs pourris », il s’attarde surtout sur Herder, dont Sternhell montre à la fois qu’il a influencé plus de gens qu’on ne croit d’ordinaire et qu’il a exprimé des idées qu’on attribue volontiers à des auteurs plus tardifs, notamment à propos des Juifs : la thématique antisémite d’un Drumont est déjà, pour l’essentiel, en place dans son œuvre.

    Il y a donc, pendant un bon siècle et demi, une accumulation d’écrits qui préparent le fascisme, en habituant les esprits à penser en termes nationaux et à ne prêter d’intérêt qu’aux entreprises qui permettent d’augmenter la puissance d’un pays, plutôt que le bonheur des hommes. Dans « fascisme », il faut entendre aussi « nazisme », et moins que jamais Sternhell ne cherche à distinguer les deux. C’est là sans doute la principale faiblesse de sa construction. S’il les mentionne à l’occasion, il n’explique en rien les formes infiniment plus nocives prises par le phénomène en Allemagne et méconnaît le caractère local et transitoire du fascisme partout ailleurs : témoin le fait que l’antisémitisme fut, en dépit de la révérence des dictateurs envers les anti-Lumières, bien peu virulent en Italie, en Espagne ou au Portugal. Pire, l’une des rares occurrences du nom de Hitler (p. 575) consiste à accuser Ernst Nolte, qui a certes de gros défauts mais non celui-là, d’exagérer son rôle :

    En faisant du nazisme un reflet du communisme et une réponse légitime au danger bolchevique, en le coupant de ses racines idéologiques et culturelles, en mettant un accent démesuré sur le rôle du Führer, le nazisme peut être quasiment évacué de l’histoire nationale.

    barbarossa2Cette impuissance même à distinguer le cas de l’Allemagne en prenant en compte la personnalité exceptionnelle de son leader, montre la voie à suivre pour tirer pleinement parti de ce maître livre et prolonger ses découvertes. D’une part, Hitler, qui était peut-être moins inculte que Sternhell ne l’imagine, avait probablement lu Herder et assimilé son antisémitisme, pour en faire, avec la logique implacable qui le caractérisait, une dimension essentielle de sa politique. D’autre part et surtout, la doctrine nazie n’était pas banalement ni entièrement « anti-Lumières ». Hitler était purement et simplement pro-allemand et d’ailleurs il réintégrait dans le panthéon intellectuel de sa patrie deux auteurs vomis par Herder et consorts, à savoir Kant et Hegel. Plus largement, il faut le considérer au moins en partie (et sans en faire un philosophe ni un intellectuel) comme un anti-anti-Lumières ou, en termes hégéliens précisément, comme l’auteur d’une synthèse qui prolonge, en les dépassant, la thèse et l’antithèse. L’idée d’un progrès l’intéresse, et non moins celle de l’unité du genre humain : c’est bien pour cela que les Juifs, ces parasites à détruire sans faiblesse, n’en font pas partie, et que les autres hommes forment des races et non des espèces.

    Une autre différence irréductible entre le nazisme et les anti-Lumières apparaît lorsqu’ils pèsent les mérites de l’Empire romain mais Sternhell, qui montre que les anti-Lumières le détestent pour son cosmopolitisme, ne paraît pas s’aviser que Hitler le porte aux nues, et omet en conséquence de se demander pourquoi. C’est que les nations n’intéressent précisément pas le dictateur allemand... si ce n’est la sienne. Il n’a donc rien contre un empire qui les étouffe et les mélange... pourvu que ses élites présentent un semblant d’unité « raciale ». Créé et dominé par des peuples indo-européens, cet empire maintient ceux qui ne le sont pas dans une double infériorité, par l’esclavage à l’intérieur et par le terme de « barbares » appliqué aux étrangers. Par ailleurs, il dégénère lorsqu’il devient chrétien, c’est-à-dire, pour parler comme Hitler, s’abandonne à l’influence juive. Effacer 2000 ans de christianisme : voilà bien l’essence du projet nazi et ce qui le distingue le plus des régimes dits fascistes, tous plus ou moins tolérants envers les Églises.

    Les anti-Lumières eux-mêmes ont pour les religions les yeux de Chimène, à condition qu’elles ne soient pas trop missionnaires, puisqu’ils révèrent partout les traditions. Ils conçoivent l’homme comme inscrit dans la nature, et les sociétés comme des arbres. Ils n’ont que faire d’un jardinier volontariste qui révère aussi, à sa façon, la nature, mais en privilégiant une de ses leçons les plus inhumaines : tout est lutte et il ne faut pas s’opposer, au nom d’une vaine sensiblerie, à l’écrasement des faibles. Chez les anti-Lumières, montre Sternhell, il n’y a pas de contrat social mais un donné qui partout s’impose à l’individu et devant lequel il doit s’incliner. Parmi les passages les plus intéressants du livre figurent ceux qui montrent ces auteurs en extase devant les préjugés de caste ou de classe. Hitler en fait plutôt table rase : l’homme fort a tous les droits, et le devoir de plier tout ce qui existe à sa volonté. Loin de respecter l’état de choses existant comme une œuvre sacrée de la nature, il entend, en quelques années, remodeler la carte du monde en même temps que la biologie ! Or ce programme ne peut s’accomplir par la seule force brutale, sinon le réel se rebifferait immédiatement. Il faut apprivoiser et chloroformer les futures victimes, les diviser, sérier les questions, avancer à pas comptés et sous un masque, bref faire triompher la folie à grand renfort d’intelligence et de raison.

    nazisme hitlerEn conséquence, il convient de dialectiser non seulement le rapport de Hitler aux Lumières, mais l’usage qu’il fait des anti-Lumières. Il flatte tant et plus leurs aspirations, lorsqu’il se présente comme un conservateur raisonnable qui met au pas ceux qui transgressent les règles admises ou menacent de le faire : homosexuels, suffragettes, marxistes, artistes modernes etc. Il séduit et neutralise d’autant plus sûrement ses précurseurs, adeptes d’une « révolution conservatrice », qu’il cultive son personnage d’autodidacte brouillon et vociférant, semblant leur dire qu’il a besoin de leurs compétences et aussi que, s’il va trop loin et commence à leur déplaire, ils pourront facilement se débarrasser de lui. La violence nazie se fait admettre à la fois parce qu’elle est beaucoup moins meurtrière qu’elle ne s’annonçait elle-même (et va jusqu’à se retourner apparemment contre elle-même lors de la nuit des Longs couteaux) et parce qu’elle semble temporaire. Elle arrive à se présenter comme un instrument, apte à rééquilibrer un pendule qui penchait trop vers la réforme ou le débraillé, et à rentrer ensuite sagement dans la boîte à outils. De ce point de vue, on peut bien dire que les anti-Lumières allemands des années 1920 (Spengler et Carl Schmitt notamment) ont fait le lit du nazisme, à condition de préciser qu’ils croyaient le faire dans la chambre d’amis et qu’ils se sont à leur grande surprise (et à leur désappointement impuissant) trouvés prestement interdits de séjour dans les pièces principales.

    Sternhell écrit là un livre de combat à l’usage de notre époque. Membre de la gauche israélienne (comme il le suggère dans une note de la p. 499), il exalte la démocratie en dénonçant ses contrefaçons et montre implicitement les États-Unis à la croisée des chemins. La Guerre froide a vu l’Occident se réclamer de la liberté plus que de la démocratie, et ce n’est pas un hasard. Sternhell montre qu’on peut aimer celle-là en détestant celle-ci, à l’instar d’I. Berlin et de son œuvre la plus connue, une conférence de 1958 sur la différence entre liberté négative et liberté positive. Il y proclame que seule la liberté négative (freedom from) est à rechercher et à défendre : celle qui consiste à ménager autour du citoyen un espace où il fait ce qu’il veut, sans limite ni contrainte légales. La liberté positive (freedom to), c’est-à-dire le droit d’aménager la cité de concert avec ses semblables, serait le germe de tous les totalitarismes. Or la liberté positive seule, rappelle Sternhell, a partie liée avec la démocratie -que ce texte de Berlin répudie donc sans le dire. Il ne va pas toujours aussi loin. Il ne se proclame pas adversaire des Lumières et il faut souvent un œil exercé pour s’en rendre compte, ainsi quand il annexe aux Lumières Burke en personne, en jetant un voile pudique sur ses anathèmes contre le peuple, assimilé tout au long de son œuvre à une populace excitée [c'est pourtant, pour le coup, tout à fait exact : Edmund Burke était un whig (libéral) qui défendra même au Parlement anglais (à ses risques et périls, donc) les Burke-Edmund-LOC.jpgindépendantistes américains et ne se détournera de la Révolution française que devant ses "excès"... et se méfier de la "populace excitée" n'a jamais été en soi antinomique des "Lumières"]. Il y a chez ces anti-Lumières tardifs beaucoup de confusion et, l’auteur n’hésite pas à l’écrire, de malhonnêteté, par exemple lorsqu’un disciple de Berlin reproduit ses articles en les réécrivant subrepticement (p. 521).

    L’époque des Lumières est marquée par trois révolutions, l’anglaise de 1688, l’américaine et la française. Sternhell insiste sur leurs points communs et montre que l’effort d’une bonne partie des anti-Lumières consiste à les opposer, comme si la Manche formait une barrière idéologique : la mauvaise révolution française, trop démocratique, jurerait avec les deux autres, réduites à des mouvements d’humeur de portée locale contre les abus du despotisme. Sternhell dit après bien d’autres, mais en décryptant comme personne les efforts des anti-Lumières, depuis deux siècles, pour masquer cette vérité, que les révolutionnaires français puisaient aux sources anglo-saxonnes, mais poussaient plus loin sur la voie des droits de l’homme. Ce faisant, il rétablit le rôle majeur de la France dans la diffusion de la démocratie, tout en y associant le nom de Kant : l’ouvrage parle d’un bout à l’autre des « lumières franco-kantiennes » et les oppose, sur la scène allemande, au Sturm und Drang qu’anime Goethe aussi bien que Herder.

    Ces rappels sont propres à doper le moral des démocrates d’aujourd’hui et le pourront d’autant mieux qu’on ne fera pas du nazisme le produit quasi-mécanique d’une accumulation d’idées obscurantistes. Le libre débat qui avait permis à la France de se doter d’une république stable en dépit de Renan et de Maurras était en passe de produire cahin caha les mêmes effets dans l’Allemagne de Weimar... si Hitler avait été un vulgaire Boulanger. Mais ce politicien à l’intelligence insoupçonnée, et encore aujourd’hui généralement sous-estimée, sut exploiter les affrontements idéologiques pour imposer ses propres thèses, d’une grossièreté radicalement inédite. Ce livre, en aidant à connaître le milieu intellectuel dans lequel a baigné sa formation et qu’il a, par la suite, manipulé, affinera la connaissance du Troisième Reich et les leçons tirées de ce moment catastrophique de l’histoire, à condition de reconnaître que le terreau n’a pas spontanément engendré son laboureur.


    À lire aussi sur l'"anti-Sternhell", Robert Soucy :

    http://servirlepeupleservirlepeuple.eklablog.com/le-fascisme-en-france-l-analyse-de-robert-soucy-a118788000


    [1] Une idéologie qui proviendrait selon lui de la "rencontre" entre la droite nationaliste "anti-Lumières" et une certaine gauche "syndicaliste révolutionnaire" et/ou "anticapitaliste romantique" ayant rejeté le marxisme - ce qui donne en fin de compte un étrange vernis d'"orthodoxie" marxiste (mais alors, comment être en même temps sioniste ?) posé sur les thèses de l'"antitotalitarisme" bourgeois (le fameux "les extrêmes se rejoignent", rappelons par exemple que Bernard-Henri Lévy partage globalement les mêmes analyses dans son ouvrage L'idéologie française)... En fait, tout ce que ceci montre c'est que Sternhell ne comprend absolument pas le concept marxiste-léniniste d'hégémonie (Gramsci). La réalité c'est qu'en situation de crise générale du capitalisme, ce que l'on qualifiera d'extrême-droite exerce petit à petit une HÉGÉMONIE intellectuelle TOTALE sur l'INTÉGRALITÉ du champ politique de la société capitaliste... ceci pouvant inclure jusqu'à des éléments de la "gauche de la gauche" [et bien sûr de la "gauche radicale d'affirmation des Peuples", comme typiquement Yann-Ber Tillenon ou Padrig Montauzier en Bretagne] - et s'ils ne sont pas ou que très superficiellement marxistes, c'est évidemment encore plus facile ! Mais ce sont des éléments de la mobilisation fasciste PARMI D'AUTRES ; il suffit de penser par exemple à la quantité de radicaux de la 3e République (qui seraient l'équivalent de notre PS d'aujourd'hui !), bien francs-maçons et "libres penseurs" comme il faut (purs produits des Lumières en quelque sorte !), qui se rallieront à la "Révolution nationale" pétainiste en 1940 ! Or Sternhell choisit de focaliser sur ce phénomène pour en faire la véritable "fécondation" de ce qui deviendra le fascisme (par exemple le "Cercle Proudhon" où peu avant la Grande Guerre "convergeaient" des militants de l'Action française - à l'initiative du truc, ce qui ne trompe pas ! - et quelques "syndicalistes révolutionnaires" comme Édouard Berth ou Georges Valois, proches de Georges Sorel - mais ce dernier était lui-même plutôt hostile à la démarche).

    [2] En parcourant la biographie Wikipédia de ce dernier, on découvre même qu'il a totalement été un homme des Lumières, ami de Goethe et même... membre des "Illuminés de Bavière", société secrète de type maçonnique ayant donné naissance au délire des "Illuminatis" qui persiste encore aujourd'hui. Il a simplement pris ses distances avec la Révolution française après les Massacres de Septembre (1792). En revanche, il était bel et bien violemment hostile aux Juifs (dans un esprit très voisin de celui de Voltaire...) ; un antisémitisme des Lumières qui a sans doute autant sinon plus nourri l'antisémitisme exterminateur du 20e siècle que le vieil antijudaïsme chrétien (qui laissait, rappelons-le, l'opportunité aux Juifs de cesser de l'être en se convertissant, alors que l'antisémitisme les voyant comme une "race abjecte" ne le permet pas). C'est donc là encore une formidable illustration du "sérieux" de l'analyse de Sternhell et (donc) des "maoïstes" qui s'en réclament.

    [3] Bien sûr, au même titre qu'avec le proudhonisme en Hexagone, l'une des composantes (loin d'être la seule...) de ce bric à brac idéologique va être l'exaltation du capitalisme naissant médiéval (généralement non désigné comme capitalisme) dépeint comme "pur", par opposition à "ensuite" - le capitalisme "en grand", triomphant, à partir du 18e siècle. C'est ainsi que le 'p''c''mlm' va nous présenter en ce moment même un certain Rudolf Jung (Allemand des Sudètes) et son "socialisme national" comme "à la base même" de l'idéologie nazie (il en a, en effet, été un contributeur important mais pas le seul) ; et va particulièrement insister sur "l'éloge de la paysannerie médiévale et du petit commerce" par celui-ci dans ce qui se veut une allusion "cryptée" et, en réalité... une compréhension complètement de travers de notre longue étude sur la société médiévale en général (occitane en particulier) publiée l'automne dernier. Toute l'activité du 'p''c''mlm' depuis 6 mois (au moins) consiste en effet à nous présenter sans jamais nous nommer comme des "anticapitalistes romantiques" et des nazis en puissance qui exaltent la société précapitaliste et rejettent le "progressisme" de sa destruction par le capitalisme et l’État moderne, "fantasment" une Occitanie conçue comme une communauté "organique" et "socialiste en soi" à laquelle le capitalisme serait "étranger" et "imposé de l'extérieur" etc. etc., tout ceci devant (bien sûr) nous conduire tôt ou tard à l'antisémitisme (à moins que ce ne soit déjà le cas, c'est en tout cas la position de certains), obligés que nous serions de pointer "le Juif" comme "seule explication possible" à ce que nous avançons. Travestissement grotesque - entre lecture en diagonale et mauvaise foi caractérisée - de ce que nous disons, mais passons.
    Nous avons en substance, dans notre étude sur le païs médiéval (communauté paysanne/villageoise), défini celui-ci comme ayant deux aspects, comme étant à la croisée des chemins en quelque sorte : la communauté ancestrale collectiviste (produisant de manière collectiviste ce qui ne veut pas dire pour le seul bénéfice de la collectivité : il y avait évidemment le seigneur des lieux qui ponctionnait sa part du produit) qui se meurt, et le capitalisme rural qui émerge en générant d'un côté (un se divise en deux) une couche de notables, gros fermiers et autres possédants et de l'autre, un prolétariat rural et une paysannerie paupérisée que le développement du capitalisme dans les villes viendra peu à peu "aspirer". Tout ce processus est bien entendu interne et intrinsèque au païs considéré (cette société paysanne et villageoise qui représente 99% de la population au Moyen Âge et encore près de 90% à la veille de la "révolution" industrielle). L’État moderne comme cadre politique adapté et nécessaire à cette affirmation du capitalisme vient se superposer à cela, il ne "l'importe" pas même si en Occitanie, en l'occurrence, il est le fruit d'une conquête militaire par le Nord capétien. L'Occitanie du 13e siècle était, de fait, bien plus capitaliste que le Bassin parisien ; mais pour passer à un niveau supérieur de développement capitaliste il lui fallait un cadre politique (l’État moderne) qu'elle n'a pas su, pu ou (simplement) eu le temps de se donner et qui lui a (donc) été apporté par son annexion meurtrière au domaine capétien, futur État français : voilà ce que nous disons. Ceci, si l'on distingue très schématiquement une masse des producteurs et des couches possédantes (possesseurs de moyens de production, au titre du droit féodal évidemment à l'époque, mais prérequis indispensable à une économie capitaliste), s'est imposé de force à la première (comme tout appareil de domination de classe) mais de gré à une partie des secondes et de force à une autre - qui aurait peut-être "préféré" un cadre politique strictement national, ceci étant déjà (tout de même) en gestation alors, mais aussi dans bien des cas sans la moindre conscience de ce qui se jouait, dans un pur cadre de concurrence entre possédants (untel et untel et encore untel se tournant vers le roi de France contre ses ennemis héréditaires, etc.). La même chose (avec ses spécificités dans chaque cas) s'est déroulée à peu près pareillement dans toutes les parties des grands États qui composent aujourd'hui l'Europe, que ces territoires aient eu (d'ailleurs) des caractéristiques nationales à l'époque ou non (dans tous les cas la subsidiarité politique médiévale a été "tuée" au profit de l’État moderne centralisé dirigeant "du haut vers le bas" et l'autosuffisance économique des communautés populaires a été liquidée, ainsi que Marx le décrit en Angleterre sous l'État... anglais).
    Ce que nous avons mis en avant dans notre étude (et d'autres documents), c'est donc surtout l'aspect collectiviste primitif résiduel du païs médiéval tout en soulignant bien le caractère inévitable du processus qui a suivi ; ainsi que la subsidiarité politique qui prévalait alors parce qu'elle rejoint notre conception de la société socialiste de demain, avec ses Communes populaires comme cellules de base et ses échelons territoriaux plus grands, indispensables mais ne devant s'occuper que de ce que la Commune ne peut pas faire toute seule. Quant au fait que l’État du Capital, là où nous vivons et le combattons (en Occitanie), soit le produit d'une conquête et d'une soumission militaire... nous le soulignons tout simplement parce que c'est la réalité et que comprendre cette réalité (et non la refuser) nous permettra seul de lutter victorieusement. Nous avons observé qu'une fois l’État constitué, le Capital... de la capitale (Paris) s'est naturellement retrouvé au sommet de la pyramide et qu'il a agencé le développement capitaliste et l'organisation sociale de la production (= l'organisation de l’État) conformément à ses intérêts, en Centres et en Périphéries où se concentrent respectivement le POUVOIR (politique, économique et culturel) et l'exploitation, l'oppression et l'aliénation... et nous avons formulé à partir de là que la Guerre révolutionnaire du Peuple devait consister en un encerclement des premiers par les secondes. Nous avons également observé que l’État français, durant 8 siècles, a consacré d'immenses efforts à briser la résistance des couches possédantes réfractaires (bien sûr) mais aussi des masses populaires ; le premier combat s'inscrivant (en dernière analyse) dans le cadre de la concurrence capitaliste tandis que le second, lui, s'inscrit dans ce que Marx a décrit comme l'accumulation primitive du capital et l'arrachement des producteurs à tout moyen de production et de subsistance autre que leur force de travail (à "vendre" quotidiennement au capitaliste) ; les deux prenant dans tous les cas un aspect culturel : l'imposition de la langue et de la culture française à l'Occitanie. Or si ce combat culturel a presque totalement réussi dans les couches aisées, il n'en a pas été de même auprès des couches populaires, travailleuses, ouvrières et paysannes ; et ceci, cette conscience occitane résiduelle, n'est pas selon nous un "vestige obscurantiste du passé" qu'il faudrait achever de balayer mais au contraire la base de la prise de conscience de tout le reste, pour pouvoir engager le combat contre ce "tout le reste"... qui n'est autre que le capitalisme et l’État français. Voilà ce que nous disons !!! Pour ce qui est du "progressisme" du capitalisme et de l'État moderne, il est vrai que nous évitons ce terme devenu au fil du temps synonyme de "bien", de "positif". Nous voyons l'imposition du capitalisme et de l'État moderne (qui va avec) comme un passage souvent douloureux, parfois positif (progrès technique et scientifique, développement de la considération humaniste pour l'individu) et dans tous les cas nécessaire et incontournable de l'espèce humaine vers le communisme... ce qui n'est ni plus ni moins que la conception de Marx (il suffit de lire le Capital). Il nous semble simplement que la confusion entre progrès objectif (l'humanité devait objectivement en passer par là) et "progressiste" au sens de "positif" (connotation morale) a pu amener par le passé à célébrer l’œuvre de l'ennemi (l’État moderne devenu "République une et indivisible" par la révolution bourgeoise)... que l'on peut alors difficilement combattre. Nous, nous COMBATTONS l’État français appareil politico-militaire de la classe dominante capitaliste. Mais nous ne sommes pas non plus pour un État occitan, un État breton, un État corse etc. etc. qui seraient autant de petits États français miniatures : nous sommes pour une organisation sociale radicalement nouvelle, l'"État" des Communes populaires fédérées !
    L'approche de Rudolf Jung, elle (puisque c'est l'exemple que veut mettre en avant le 'p''c''mlm'), nous semble bien différente... Son "éloge de la paysannerie médiévale et du petit commerce" nous semble surtout être un éloge de l'aspect capitaliste naissant de la société médiévale... tout en "déplorant" l'évolution par la suite, le capitalisme "en grand" avec ses banques, sa grande industrie (et mort de la petite), sa "spéculation" (et mort du petit commerce) etc. etc., toutes choses pourtant inévitables mais que Jung rejette et (seules) regroupe sous le vocable de "capitalisme". Et comme ce capitalisme "en grand" ne "peut pas" (dans son esprit) être le fruit naturel et inévitable... du capitalisme naissant, il ne peut donc résulter que d'une intervention extérieure et/ou d'un mal ("l'avidité") qui se serait emparé du "corps sain", et qui se trouve très vite identifié avec la "main du Juif" (identification pratiquement inévitable dans la région d'Europe où il vit). En tant que Sudète, la culture populaire de Jung est celle de ces petits villages de "défricheurs" de l'épaisse forêt médiévale, peuplée de deux "espèces nuisibles" : le loup et le Slave. Il est donc tout logiquement aux avant-postes pour célébrer cette mythologie du paysan-entrepreneur libre "défrichant" les terres sauvages et "construisant tout de ses mains", faisant "avancer la civilisation" sans l'intervention néfaste des "banques" ni de la "bureaucratie"... Un esprit que l'on retrouve, par exemple, omniprésent dans l'extrême-droite nord-américaine célébrant le "pionnier" et qui a rejailli de là (un peu) sur l'ancienne métropole britannique, elle aussi (à l'origine) nation de "défricheurs" libres (les yeomen) - sauf que dans tous ces pays le mot "socialisme" (quasiment synonyme de "marxisme" ici) est absolument tabou et il ne viendrait à l'idée de personne de s'en réclamer, c'est plutôt la "liberté" qui est mise en avant, mais l'idée de petits producteurs "libres" et "librement associés", "naturellement solidaires" sans imposition "bureaucratique" (idée que l'on retrouve ici chez Proudhon...) est en dernière analyse la même que dans le "socialisme national" de Jung.
    Quant à la conception de l’État... Jung est tout simplement un partisan de la "Grande Allemagne" englobant toutes les communautés de langue germanique, comme des millions et des millions de ses contemporains (la "Petite Allemagne" de 1871 s'était plus imposée par défaut qu'autre chose), ce qui correspond particulièrement bien (de surcroît) à sa culture de "pionnier" sudète face au monde slave (Drang nach Osten). Cet État grand-allemand aurait dû être (selon lui) l'émanation "naturelle" de la communauté médiévale capitaliste primitive qu'il encense - il a correctement saisi que l’État moderne (dont il est un partisan) procède directement de l'émergence/affirmation du capitalisme (qu'il n'appelle pas ainsi et dit rejeter) ; mais des aléas ont fait que cela n'a pas été le cas et il ne comprend pas, ou refuse carrément de comprendre ces aléas (ce que seule une grille d'analyse marxiste permettrait). Ce ne peut donc être que "la faute à" la monarchie autrichienne (Habsbourg) qui serait tombée "aux mains des Juifs" (avec lesquels elle s'est effectivement montrée libérale à partir du 18e siècle). L’État est vu par Jung comme la "destinée" d'une communauté nationale (Volk) et l’État des Volksdeutsche doit être la Grande Allemagne, un point c'est tout, seule une "force maléfique" (= les Juifs) pouvant contrarier cette "destinée". Il n'est pas vu comme un instrument de classe (il n'y a pas de classes dans la communauté nationale idéalisée de Jung) ni le fruit d'un processus complexe et aléatoire, marqué notamment par la concurrence entre Centres capitalistes pour se tailler une base fondamentale d'accumulation et n'ayant d'ailleurs jamais, en Europe ni ailleurs, vraiment engendré d’États qui correspondent exactement à ce que les marxistes définissent comme une nationalité.
    Par exemple, s'il n'y a pas d’État occitan, c'est parce qu'au moment décisif (13e siècle) les tentatives des classes dominantes occitanes (toujours partielles : Aquitaine-Gascogne, Languedoc, Provence, jamais l'Occitanie entière) ont échoué pour tout un faisceau de raisons et ont été écrasées par l'expansionnisme capétien, porté par la bourgeoisie francilienne. De même, s'il y a une Allemagne et une Autriche, c'est parce qu'au 19e siècle il y avait deux grands Centres de pouvoir (les Hohenzollern de Prusse appuyés sur la bourgeoisie brandebourgeoise et rhénane et les Habsbourg d'Autriche appuyés sur la bourgeoisie de Vienne) qui n'ont jamais réussi à s'entendre, revendiquant chacun l'unification des peuples de langue germanique sous sa seule coupe [de fait, si quelque chose marque la singularité du nazisme au sein du fascisme européen en général, c'est peut-être cet échec historique de la bourgeoisie allemande à assouvir son "grand" projet : un État allemand correspondant peu ou prou au Saint-Empire de l'An Mille et exerçant sa domination sur toute l'Europe centrale et orientale]. Tout cela est aussi aléatoire (dépend d'autant de facteurs) que le fait que dans la nature, le lion attrapera tel jour la gazelle et tel jour non ; mais Jung refuse d'admettre de tels aléas car il ne voit pas les choses en matérialiste mais en idéaliste, en termes de "peuple" comme communauté organique et d’État comme "destin" de cette communauté. Jusqu'en 1918 les Allemands des Sudètes se trouvaient dans l'Empire austro-hongrois, puis ils se retrouvèrent dans un nouvel État dénommé "Tchécoslovaquie". Ceci, effectivement, n'était pas démocratique : les Sudètes étaient niés à l'intérieur d'un État base d'accumulation pour la bourgeoisie tchèque (en réalité celle-ci était très faible et une telle chose n'était possible qu'avec le soutien impérialiste de l'Entente, les vainqueurs de la Première Guerre mondiale). Mais tout ceci n'était pas le problème de Rudolf Jung, qui avait d'ailleurs déjà commencé son militantisme pangermaniste depuis bien longtemps (sous l'Autriche-Hongrie), définitivement forgé son idéologie et mis le point final à son œuvre maîtresse (Le Socialisme national) alors que la Tchécoslovaquie voyait à peine le jour. Son problème, son objectif, c'était la Grande Allemagne qui n'avait pas réussi à se constituer au 19e siècle, projet impérialiste fort peu soucieux (d'ailleurs) de "pureté" ethnique allemande lorsqu'il s'agissait d'annexer (et d'asservir) des populations slaves.
    Tout cela, ce sont des contradictions du capitalisme que le fascisme (ce qu'était l'idéologie de Jung) et, dans un sens, l'idéologie bourgeoise en général (mais de manière moins ouvertement agressive) a pour vocation existentielle de nier et dissimuler sous des mythes pour tenter de les "surmonter" et de faire exister ce que chaque bourgeoisie perçoit comme sa "destinée", plus ou moins contrariée par l'histoire ! [Il en va exactement de même du mythe de la "Gaule" et de "l'Hexagone", ce "cristal" parfait qui "ne pouvait avoir une autre forme", correspondant exactement aux "frontières naturelles" de la base d'accumulation "idéale" visée par l'expansion parisienne "française" tout au long des 17e, 18e et 19e (voire 20e) siècles.]
    Nous, notre prétention est seulement de comprendre les processus du passé car de ceux-ci découle le présent ; afin de pouvoir transformer ce présent et construire l'avenir !!!

    [4] Dans le cas spécifiquement français, au demeurant, dès 1789 et totalement dans la seconde moitié du 19e siècle, le clivage entre droite et gauche des Lumières tendra à recouper assez nettement un clivage Nord-Sud et à se coupler, dès lors, à une hostilité aux Juifs puisque l'Occitanie avait été leur Sion médiévale et puisqu'à l'époque les Juifs de France étaient soit alsaciens ou lorrains, soit occitans (communautés de Provence-Languedoc issues du Comtat papal et communautés gasconnes)... le clivage s'ancrera rapidement et par la suite, si les exceptions sont devenues célèbres (Maurras), l'Occitanie restera relativement hermétique à la "droite révolutionnaire" dont parle Sternhell - en revanche, sous Vichy, il existera une collaboration de gauche (René Bousquet etc.).

    [5] Les Jésuites ne se caractérisaient d'ailleurs pas par un antisémitisme particulièrement virulent pour leur époque : http://fr.wikipedia.org/wiki/Relations_entre_Juifs_et_Jésuites...
    Il s'agit vraiment du seul courant de pensée (en tout cas l'avant-garde du seul courant) réellement qualifiable d'"anti-Lumières"/"anti-moderne" à l'époque considérée. Ils s'opposaient à vrai dire non seulement aux Lumières mais à toutes les "idées nouvelles" surgies depuis le 16e siècle, y compris les grandes découvertes scientifiques indiscutables comme l'héliocentrisme de Copernic (le fait que la Terre tourne autour du Soleil et non l'inverse), et non seulement à l’État bourgeois (monarchie ou même république parlementaire) voulu par les Lumières mais aussi à l’État moderne sous sa forme monarchique absolue (mouvement des monarchomaques), tel que théorisé par Jean Bodin par exemple. Ils étaient, en réalité, les derniers défenseurs de la "république populaire" et de la subsidiarité médiévale sous le "patronage" bienveillant de l’Église ; et bien qu'attachés à certaines hiérarchies sociales et à l'obéissance à ces hiérarchies, ils opposaient même à la modernité de leur époque (affirmation quotidienne de capitalisme et de son État) des conceptions très démocratiques voire sociales, qu'ils mirent notamment en pratique dans leurs missions du Paraguay [l'origine basque des deux principaux fondateurs de l'ordre, Ignace de Loyola et François Xavier, contemporains (au demeurant) de l'exécution militaire du Royaume de Navarre par le jeune État moderne espagnol, n'est sans doute pas dissociable de ce catholicisme "populaire", "foi du charbonnier" et "républicain" anti-absolutiste porté par les Jésuites, ainsi que d'un certain esprit de syncrétisme avec les croyances ancestrales pré-chrétiennes que l'on retrouvera notamment dans les missions du Paraguay, puisque tout cela était caractéristique de la très catholique mais aussi très égalitaire et "républicaine paysanne" (dénuée de conception monarchique forte) société basque de l'époque]. Ils admettaient et faisaient même (pour certains) la propagande du tyrannicide, autrement dit l'élimination par n'importe quel individu du souverain devenu 'despote'. Ceci leur vaudra, bien avant les révolutions bourgeoises qui les vouaient évidemment aux gémonies (comme incarnations de l'"obscurantisme"), des relations exécrables avec toutes les grandes monarchies absolues (y compris de religion officielle catholique : France, Autriche, Espagne, Portugal) mais aussi tumultueuses avec la Papauté qui, bien que fortement "anti-moderne" elle aussi, voulait ménager les États absolutistes et en était, au demeurant, un elle-même (en Italie centrale). Ils refusèrent toujours catégoriquement de participer à l'Inquisition qui rappelons-le, bien qu'institution de l’Église, avait été l'un des premiers instruments de terreur de masse de l’État moderne ; et leurs ouvrages furent fréquemment mis à l'Index par elle.
    Ce courant de pensée n'a pas de continuateurs directs au 20e siècle et encore moins aujourd'hui, après que les révolutions bourgeoises et la "révolution" industrielle aient tout balayé sur leur passage. On peut lui trouver un héritier très indirect dans le christianisme social, c'est à dire les éléments qui (vers le milieu ou la seconde moitié du 19e siècle) ont finalement accepté la modernité et le système politique issu des Lumières en endossant le rôle de "critique sociale humaniste et modérée" de la nouvelle société : c'est la position politique actuelle de 99% de la Compagnie de Jésus (qui existe encore bien entendu et compte 17.000 membres à travers le monde). Ceci peut parfois les conduire à droite, comme l'actuel pape Bergoglio (ex-"provincial" argentin des Jésuites) qui a milité dans sa jeunesse à l'aile droite du péronisme, mais aussi (souvent) très à gauche, vers la théologie de la libération (comme les franciscains, un peu dans le même esprit mais nés bien avant, dès 1210), ce qui vaudra à beaucoup la torture et/ou la mort sous les dictatures sud-américaines (d'où la polémique actuelle sur le rôle de Bergoglio/"François" pendant cette période). Nous avons vu comment, passées les Lumières et la "révolution" industrielle, la religion en tant qu'idéologie ne peut plus avoir aucun caractère autonome : elle "marque", certes, culturellement les différents pays du monde, mais les interprétations du corpus doctrinal peuvent aller de l'extrême-droite à l'extrême-gauche. L'hégémonie intellectuelle sur la planète appartient aux idéologies issues des Lumières (aile gauche ou aile droite), combattues par l'idéologie communiste. Les pensées religieuses se positionnent par rapport à cela et non l'inverse - définition de l'hégémonie selon Gramsci.

    Le fascisme quant à lui, surtout dans les pays catholiques, a pu s'appuyer sur les thèses "sociales" de l'encyclique Rerum novarum - qui marque le véritable ralliement de la Papauté à la modernité triomphante (ralliement de l'Église aux Lumières, donc, et non l'inverse) tout en en critiquant les "injustices", et qui prétend "associer" Capital et Travail dans un esprit paternaliste. Mais sa filiation profonde n'est pas là : véritablement, Zeev Sternhell confond "anti-Lumières" et aile droite des Lumières ("Lumières d'ordre"). Le fascisme cherche d'abord et avant tout à arracher le capitalisme à la "mauvaise pente" sur laquelle il le voit, et il fait preuve dans cela d'un grand pragmatisme. En Allemagne, pays partagé entre catholiques et protestants et dont cette division a (justement) été le principal frein à l'unité et à la "volonté de puissance", Hitler "solutionne" la question en rejetant tout simplement le christianisme ("idéologie de la faiblesse" selon lui, dans un esprit nietzschéen) et en invitant les croyants à en faire une affaire strictement privée : au-dessus de tout doit être l’État, la Grande Allemagne et son unité face aux concurrents impérialistes et à la menace communiste.

    De même, en France, Charles Maurras est profondément un homme de raison et sa démarche n'est pas celle d'un fanatique opposé à toute "idée nouvelle", mais celle d'un pragmatique. Provençal, il est attaché à sa "petite patrie" et hostile à la centralisation parisienne, mais non moins soucieux de la "Grande France" et de sa puissance internationale. La puissance nécessite l'unité et "l'ordre" contre les luttes de partis (bourgeois) et de classes ; elle nécessite un "État fort" que la IIIe République parlementaire n'est selon lui pas capable de lui donner. La lutte des classes marxiste doit s'effacer devant une "solidarité nationale" appuyée sur des "corps intermédiaires" librement organisés et non-étatiques, dont seul un État fort peut constituer la clé de voûte. Quant à la centralisation, avec ses conséquences l’étatisme et la bureaucratie (rejoignant ainsi les idées de Proudhon), elle est selon lui inhérente au régime démocratique : il estime que les républiques ne durent que par la centralisation, seules les monarchies étant assez fortes pour décentraliser. La république parlementaire libérale associe à ses yeux centralisme bureaucratique et décadence. Il faut donc un roi, appuyé sur le catholicisme comme religion ultra-majoritaire des Français (contre les "États confédérés de l'anti-France" que sont les Juifs, les protestants, les francs-maçons et les 'métèques', mais il s'agit là d'un catholicisme très gallican où l'autorité de Rome n'a pas vocation à être au-dessus de celle de l'État français) ; bien qu'il ait été lui-même (longtemps) un républicain modéré et un agnostique. Minoritaire au départ, il parviendra avec beaucoup d'habileté à imposer ce point de vue aux fondateurs de l'Action française, Henri Vaugeois et Maurice Pujo, hommes du Bassin parisien plutôt républicains (eux aussi), anticléricaux et... jacobins/bonapartistes, centralistes.

    Au sujet de Maurras et de l'Action française (car pour Sternhell le fascisme n'est pas seulement "anti-Lumières" mais aussi né en France, ce qui pour le coup - d'ailleurs - est une thèse plus qu'intéressante à contre-courant des postulats "blanchisseurs" de René Rémond & co), voici ce que nous pouvions écrire il y a une dizaine de mois : "Combien n'a-t-on pas entendu, par exemple (et pas seulement du 'p''c''mlm'), que "Maurras et l'Action française, c'est le rejet des Lumières"... ? ARCHI-FAUX : Maurras et l'Action française se revendiquaient du POSITIVISME (dont on dit souvent, en "France", que "le marxisme s'inspire" alors que dans toute son œuvre Marx consacre peut-être trois paragraphes à Auguste Comte pour dire que c'est un triple crétin...) ; autrement dit des "Lumières", de la pensée bourgeoise et du "scientisme" du 19e siècle. À l'origine RÉPUBLICAINS de tendance conservatrice, anti-socialiste et chauviniste revancharde, souvent agnostiques (comme Maurras) ou en tout cas très "séculiers", ils se tourneront par pur pragmatisme vers l'idéologie nationale-catholique (comme "ciment" du "nationalisme intégral") et le principe monarchique... mais choisiront pour monter sur le trône la branche d'Orléans, celle de Louis-Philippe (Monarchie de Juillet) et du régicide Philippe "Égalité" (qui avait voté la mort de son cousin Louis XVI à la Convention), autrement dit la branche capétienne acquise aux "idées nouvelles" et aux "Lumières". Ce que voulaient simplement les maurrassiens, c'était un État fort et même "en acier trempé" au service du Capital ; et ils pensaient qu'aucun système républicain (forcément parlementaire dans leur esprit) ne pouvait l'assurer en termes de légitimité : il fallait donc un roi (comme en avaient d'ailleurs tous les États européens à l'époque où naissait l'AF, sauf la France et la Suisse). Ils n'avaient absolument aucun projet d'"effacer" toute la pensée bourgeoise produite au long des 16e, 17e et 18e siècles (celle qu'apprécie tant le 'p''c''mlm')... De même, parmi les théoriciens racialistes du 19e siècle qui seront repris sous toutes les coutures par le fascisme au siècle suivant, Joseph Arthur de Gobineau, certes légitimiste à l'origine, était un protégé de Tocqueville, tandis que Paul Bert était profondément "libre-penseur", positiviste, républicain et anti-clérical ; il est même considéré comme l'un des "pères fondateurs" de "notre" école républicaine publique et laïque... Comme "hommes des Lumières", il est difficile de faire mieux !"

    [6] Les sternhelliens et autres postoniens (c'est un peu la même chose) nous disent que "l'antisémitisme n'est pas un racisme comme les autres" (mais quel racisme est comme les autres ? l'arabo/islamophobie est un racisme de "guerre des civilisations" depuis le Moyen Âge, la négrophobie un racisme de rabaissement infra-humain à l'état de "singe" ou de "grand enfant" idiot mais potentiellement dangereux etc.) : c'est un "anticapitalisme romantique" qui assimile les Juifs à "l'argent", l'usure, la spéculation, "l'avidité" etc. etc. Mais ceci n'est réellement "sérieux" qu'en prenant au mot... les antisémites eux-mêmes et leur définition du capitalisme !
    Loin d'être "anticapitaliste", l'assimilation des Juifs à "l'usure" et à "l'avidité" accompagne en fait TOTALEMENT le développement du capitalisme durant TOUTE sa phase historique ascendante, du 12e au 20e siècle. De fait, princes et puissants "très chrétiens" du Moyen Âge obtenaient (déjà plus ou moins sous la menace...) des "prêts" des communautés juives, puis les accusaient d'"usure" pour refuser de les rembourser... et au contraire les chasser, les spolier voire les massacrer : de là vient la "légende" [une politique, concrètement, d'extorsion de fonds en masse par les États modernes en formation à l'encontre des communautés juives, accompagnée d'expulsions et de massacres... dans laquelle on peut voir, peut-être, un des tous premiers mécanismes de l'accumulation primitive !!]. Et être contre "l'usure", la "spéculation" et "l'avidité" n'est NULLEMENT "anticapitaliste" : c'est au contraire une ABSOLUE NÉCESSITÉ du capitalisme lui-même, mode de production en lutte (en INSURRECTION) permanente contre sa propre crise (dont la spéculation est un symptôme) et qui, bien que basé sur la concurrence entre entrepreneurs, a besoin pour fonctionner de pratiques "loyales" et d'un certain nombre de "règles". Dans des pays où les Juifs sont historiquement associés à la spéculation, à l'avidité et à la déloyauté en affaires, cela peut effectivement faire "très mal" lorsque la crise capitaliste atteint un certain degré d'acuité ; et cela n'a pas attendu le 20e siècle (même si bien sûr les moyens techniques de celui-ci ont donné à la persécution une dimension jusque-là inégalée). Il y a alors (peut-être) des gens pour n'appeler "capitalisme" QUE les pratiques déloyales, l'avidité et l'accumulation "excessive", l'usure et la spéculation etc. Mais ce n'est pas la définition marxiste du capitalisme. Les gens qui définissent ainsi le capitalisme (pour ensuite, éventuellement, associer ce "capitalisme" aux Juifs et les persécuter à ce titre) ne sont pas des "anticapitalistes". Ce sont de PURS REPRÉSENTANTS d'un capitalisme en INSURRECTION CONTRE SA PROPRE CRISE. 


    votre commentaire

  • ZAD-Testet 8973Depuis quelques mois c'est un nouveau Notre-Dame-des-Landes qui a pris ses quartiers en terre occitane : le barrage de Sivens devrait en effet recouvrir quelques 48 hectares de la zone humide remarquable du Testet (pourtant classée en 2011) et de terres agricoles près de Gaillac dans le Tarn, à 60 km de Toulouse ; une région sur laquelle pèse déjà la lourde épée de Damoclès des gaz de schiste.

    Déjà des centaines, peut-être un millier de personnes ont convergé sur le site qu'elles ont proclamé "ZAD", zone à défendre.

    Cette retenue (projet qui remonterait à 25 voire 40 ans selon les sources) n'a pas pour vocation de produire de l'énergie, mais de permettre l'irrigation des exploitations agricoles alentour. La petite rivière (le Tescou) qui arrose le secteur serait en effet souvent à sec... Pourtant, il ressort d'une étude un peu plus approfondie que la capacité du barrage, de l'ordre d'un million et demi de mètres cube, est nettement surdimensionnée par rapport aux besoins réels des agriculteurs, dont les fermes ayant besoin d'eau sont en réalité peu nombreuses selon le porte-parole du collectif anti-barrage, Ben Lefetey. De fait, lorsque l'on voit l'empressement de la FDSEA à soutenir le projet, on comprend immédiatement que ce n'est pas n'importe quelle agriculture qui a besoin d'un tel réservoir mais bien l'agriculture PRODUCTIVISTE, celle qu'incarne typiquement ce syndicat agricole (il suffit de voir le CV de son président...), qui court après les subventions étatiques et européennes et qui, par cette même logique productiviste et absence de concertation (entre entrepreneurs concurrents, forcément)... assèche elle-même le Tescou par ses pompages estivaux !  [Voir ici la position opposée de la Confédération paysanne, qui "calmera" les habituelles tirades des petits réacs de tout poil sur "les pauvres paysans qui triment dur" face aux "sales bobos étudiants crasseux qui veulent même pas qu'ils aient de l'eau"...]

    Barrage de Sivens (Tarn), la ZAD occitaneLe Conseil général des caciques locaux (à majorité PS...) soutient évidemment la Fédération - véritable État dans l’État dans les territoires ruraux - et pense évidemment aux juteux marchés publics qui graisseront la patte des copains entrepreneurs du BTP. Tant pis pour les "cocus" (adhérents FDSEA et/ou électeurs PS ou pas) dont les terres se retrouveront noyées, aux côtés - on l'a dit - de l'une des dernières zones naturelles de biodiversité de la région (voir ici une vidéo montrant que le soutien au barrage est loin d'être unanime dans la paysannerie locale ; ou encore cet article). 

    Nous avons là l'illustration parfaite d'un capitalisme (en l'occurrence agraire, mais ce pourrait être n'importe quel secteur de production) qui, comme nous le disons et le répétons depuis des années, est depuis l'origine une pure machine à dégager du profit mais s'affirme de plus en plus comme tel jour après jour, se moquant tant des territoires et de leurs équilibres écologiques que de ses propres producteurs (les petits, en tout cas) et des masses populaires en général ; chaque territoire et sa population n'étant rien de plus que des rouages à la place bien attitrée dans le grand cadre productif qu'est l’État des monopoles. Le capitalisme commande aux agriculteurs de produire, produire et encore produire ceci ou cela (quoi, ce sont les subventions qui le décident...) pour le bien du commerce extérieur "national" couplé à la survie des uns (les "petits") et aux profits des autres (les "gros"), commerce extérieur qui dans le domaine agricole, on le sait, souffre grandement de la concurrence des pays de l'Est et du Sud ; pour produire il faut de l'eau alors on pompe, pompe et re-pompe (d'autant plus que l'on est "gros", bien entendu) ; et à l'arrivée tout le monde (gros et petits) se retrouve à sec et à soutenir la "solution miracle" du barrage (sauf, bien sûr, ceux dont les terres vont être expropriées et englouties). Un capitalisme incapable de concilier l'inconciliable : le caractère social de la production (même dans une p1030865production agricole à première vue individuelle) et la propriété privée des moyens/ appropriation privée du produit ; et donc de gérer de telles contradictions entre les producteurs, entre l'homme (producteur) et la nature (écosystème... de tous) etc. etc. ; l'appareil politique n'intervenant nullement (contrairement aux illusions "citoyennistes") en protecteur de l'"intérêt général" mais bien en bras armé de la classe dominante - ici la bourgeoisie rurale, locale, et ses représentants élus.

    Car une autre chose dont nous avons l'illustration ici, contrairement à Notre-Dame-des-Landes ou aux LGV qui sont des projets d'aménagement de niveau hexagonal (bien qu'impliquant les "grands décideurs" "régionaux"), c'est bien la nature putrescente de la bourgeoisie "nationale" occitane elle-même, particulièrement éclatante à l'échelle très locale du projet (et qui explique, aux côtés des gendarmes mobiles, la présence et l'extrême virulence d'un mouvement pro-barrage qui attaque les opposant-e-s). Nous voyons parfaitement là comment la négation/périphérisation de nos Peuples et la mise en coupe réglée de nos païs n'aurait jamais été possible, en 8 siècles, sans le concours de logiques locales étroitement imbriquées dans le schéma d'ensemble "français" : l'Occitanie des caciques, des notables, des coteries et des clientèles avec laquelle nous voulons EN FINIR.

    C'est en cela que notre conception et notre lutte ne sont pas "nationalistes" ni "identitaires" : l'Occitanie n'est pas un "corps" organiquement parfait et simplement "parasité" de l'extérieur. L'Occitanie est le territoire d'une nationalité (réelle) subordonnée au Centre capitaliste parisien dans le cadre politico-militaire de l’État français ; mais le MOTEUR de cette subordination est INTERNE : les contradictions INTERNES à la Nation occitane, principalement la contradiction entre bourgeois/dominants/possédants et masses populaires ouvrières et paysannes qui sont les deux 201408261140-fullcomposantes d'une nationalité. Le capitalisme occitan, qui fleurissait au début du millénaire dernier (11e-13e siècles), a engendré la Nation occitane ; mais il l'a aussi "tuée" politiquement par ses propres contradictions, ne serait-ce que parce que les capitalistes sont par définition concurrents entre eux et que certains se sont (en conséquence) tournés vers l'envahisseur français contre leurs concurrents - et sur le dos du Peuple, de la masse des producteurs.

    C'est la raison pour laquelle le Peuple travailleur d'Occitanie ne peut pas obtenir son émancipation au travers de réformes institutionnelles ("plus d'autonomie", "nouvel acte de la décentralisation") NI MÊME de la proclamation (utopique) d'un État capitaliste indépendant, mais SEULEMENT dans le cadre d'une RÉVOLUTION POPULAIRE SOCIALISTE, d'une libération DE CLASSE !

    Nous, communistes pour la libération révolutionnaire du Peuple occitan (LRP), apportons notre total soutien à la ZAD du Testet et à ses militant-e-s, dans l'héritage des grands combats du Larzac dans les années 1970 et dans l'esprit du cri de combat : Volem viure, trabalhar e decidir al Païs !


    Voici une petite revue de presse concernant la situation :

    Presse bourgeoise :
    http://www.ladepeche.fr/actu/<wbr>economie/energie-<wbr>environnement/barrage-de-<wbr>sivens/
    http://www.lepoint.fr/societe/<wbr>tarn-la-guerilla-se-poursuit-<wbr>contre-le-projet-de-barrage-<wbr>de-sivens-09-09-2014-1861657_<wbr>23.php
    http://lexpansion.lexpress.fr/<wbr>actualite-economique/sivens-<wbr>trois-questions-autour-d-un-<wbr>barrage-polemique_1574891.html
    http://www.lepoint.fr/societe/<wbr>tarn-la-guerilla-se-poursuit-<wbr>contre-le-projet-de-barrage-<wbr>de-sivens-09-09-2014-1861657_<wbr>23.php

    Presse alternative et révolutionnaire :
    http://iaata.info/Tarn-contre-<wbr>la-construction-du.html
    http://www.reporterre.net/<wbr>spip.php?article5409

    Site du collectif : http://www.collectif-testet.<wbr>org/

    Autre site d'information sur l'opposition au projet : http://<wbr>tantquilyauradesbouilles.<wbr>wordpress.com/

    Ça a déjà commencé à barder sévère, avec gazages et coups de tonfas à la clé :
    http://www.networkvisio.com/<wbr>barrage-de-sivens-tarn/tv-zad-<wbr>du-barrage-de-sivens-dans-le-<wbr>tarn-les-opposants-malmene.<wbr>html
    http://www.informaction.info/<wbr>iframe-environnement-barrage-<wbr>du-tarn-zad-du-testet-<wbr>nouvelles-echauffourees-le-<wbr>conseil-general-confirme-le-<wbr>projet
    http://paris-luttes.info/la-<wbr>zad-testet-tarn-a-besoin-de
    http://www.reporterre.net/<wbr>spip.php?article6252

    Contrairement aux affirmations des pro-barrage, ce n'est pas qu'une affaire de "bobos parisiens" et la cause mobilise largement dans la population locale, notamment la jeunesse : http://www.reporterre.net/<wbr>spip.php?article6316

    Un soutien de Breizh : http://www.bigouden-nddl.org/<wbr>actualites/item/181-soutien-a-<wbr>la-zad-du-testet-non-au-<wbr>barrage-de-sivens

    db256d2ee6d04bc2637326564dc57


    1 commentaire

  • des-partisans-de-l-independance-de-l-ecosse-Le verdict des urnes est donc tombé ce matin, assez conformément à ce que nous (comme la plupart des sondages) avions prévu : après deux ans de débats acharnés et même deux semaines de suspense "tendu" (quelques rares sondages ayant donné le "oui" vainqueur...), l'Écosse vient de "refuser" par 55,3% (2 millions de voix) de quitter le Royaume-Uni. Un résultat nettement moins serré, d'ailleurs, que ne l'annonçaient les dernières enquêtes d'opinion...

    Pour le Premier ministre indépendantiste Alex Salmond et son Scottish National Party (SNP, plutôt social-libéral voire social-démocrate), c'était quoi qu'il arrive un pari gagnant à tous les coups : si le "oui" l'emportait c'était évidemment un triomphe comme peu d'hommes peuvent en rêver dans leur vie (être le "père d'une nation")... mais même une défaite par 40% ou plus de "oui" représentait dans tous les cas un énorme succès et un rapport de force considérable dans les relations du pouvoir autonome avec Londres, pour exiger la "dévolution" de nouvelles prérogatives (des promesses de larges transferts de compétences au gouvernement écossais après le référendum avaient déjà été faites depuis des mois, et encore réitérées à la veille du scrutin). C'est ce qui explique les gesticulations de David Cameron ces derniers jours : il fallait non seulement empêcher à tout prix une victoire du "oui" (qui aurait été un coup terrible pour l'impérialisme british, même si la vengeance de celui-ci contre l’Écosse aurait ensuite été toute aussi terrible), mais aussi un score indépendantiste trop important et un Salmond en insupportable position de force dans les futurs pourparlers. Le résultat de ce matin le met finalement dans une position "raisonnablement acceptable" - il eut été beaucoup plus difficile pour Londres que les choses se soient jouées à quelques dizaines de milliers de voix.

    Quoi qu'il en soit, de ce résultat ressortent deux conclusions essentielles :

    - C'est un coup de tonnerre de plus dans le ciel européen et mondial : la crise générale du capitalisme balaie tout sur son passage et remet même en question les États produits dudit capitalisme (comme appareils politico-militaires d'un Centre capitaliste, ici Londres) ; États semi-coloniaux fantoches comme ceux dessinés au Proche-Orient après la Première Guerre mondiale mais aussi grands États impérialistes d'Europe y compris les plus anciens (l'Écosse a partagé le même souverain avec l'Angleterre dès 1603 puis été formellement réunie en 1707, donnant naissance au Royaume-Uni), qui se disloquent de toute part. Les Peuples travailleurs* niés et périphérisés par ces constructions capitalistes se réaffirment avec force ; ils comprennent et rejettent ce qu'ils sont : de simples pions, des rouages de la machine à valoriser le capital, chacun à une place bien définie qui lui a été attribuée par le Centre dans l'ensemble productif étatique. Ils se réapproprient leur histoire - celle de cette négation - et la brandissent fièrement comme un étendard de libération. Lorsque les États capitalistes (produits du développement historique du capitalisme) étaient florissants, ils pouvaient encore duper et aliéner les masses populaires dans des "citoyennetés" et des "patries" fictives : "britannique", "espagnole", "française" etc. ; mais à présent tout s'effondre et l'illusion se dissipe comme les effets de quelque drogue. scottish republican faucille marteauDans deux mois est censée voter la Catalogne... Tel est le mouvement historique bien réel qui s'est exprimé dans ce scrutin écossais : l’Écosse reste "britannique" mais quelques 44,7% (1,6 millions de personnes) ont voté pour en faire un nouvel État indépendant (vote majoritaire, même, avec 53% dans la première ville Glasgow), quelle que soit la "folle aventure" que cela représentait, voyant là la réponse aux terribles difficultés que la crise capitaliste leur inflige au quotidien (plusieurs études ont montré que c'étaient principalement les jeunes, à la situation économique toujours plus précaire, et les revenus modestes qui se prononçaient pour l'indépendance).

    Il faut dire que l'Écosse, contrairement à la Catalogne qui est plutôt (historiquement) une associée flouée du pouvoir castillan, sait plutôt bien ce qu'être une périphérie veut dire : dès son annexion définitive par Londres suite à la guerre victorieuse de Guillaume d'Orange contre les jacobites partisans de Jacques II Stuart (1688-1702), ponctuée d'affreux massacres et débouchant finalement sur l'Acte d'Union de 1707, elle a été littéralement mise en coupe réglée par le capitalisme britannique dans le rôle de productrice de matières premières (charbon et autres minerais, moutons pour la laine de l'industrie textile) à travers une expropriation brutale de la communauté productive traditionnelle qu'était le clan (processus notamment décrit par Marx dans le Capital chap. XXVII,  L'expropriation de la population campagnarde) ; expropriation souvent menée (d'ailleurs) avec la complicité des chefs de clans eux-mêmes devenant landlords ("seigneurs de la terre") et entraînant une émigration massive vers l'Angleterre ou l'Amérique du Nord... Peu d'industries de transformation y ont été développées (essentiellement dans la région de Glasgow, la Clydeside) et elles ont de toute façon été violemment démantelées sous Thatcher ; aujourd'hui encore le pays se caractérise par son sous-peuplement (5,3 millions de personnes sur 78.772 km², soit 67 habitants/km²) et l'importance de sa diaspora (plus d'un million de personnes nées en Écosse mais expatriées, principalement en Angleterre bien sûr) ainsi qu'un très important problème foncier (des milliers de kilomètres carrés sont la propriété de quelques landlords et leurs habitants de purs et simples locataires). C'est sans doute au Royaume-Uni que les territoires et les peuples périphérisés ont le plus les caractéristiques john macleande véritables colonies. La conscience de cela a toujours profondément empreint le mouvement révolutionnaire socialiste/communiste local avec notamment la figure (hélas peu connue) de John MacLean, l'un des plus grands dirigeants communistes du 20e siècle à nos yeux [même si bien sûr, comme ici avec nos jacobinards, a toujours existé un "communisme" (plutôt anglais) mettant en avant un "unionisme rouge"].

    - Mais c'est aussi, comme au Québec il y a 19 ans et comme en Catalogne dans deux mois (où là pour le coup le "oui" devrait être massif mais le référendum non reconnu par Madrid** - d'autant plus massif que le référendum ne sera pas reconnu et sans doute largement boycotté par les anti-indépendantistes...), une démonstration éclatante de l'impossibilité de la voie légaliste, institutionnelle et (surtout) à l'intérieur du capitalisme pour cette (ré)affirmation ; l'illustration parfaite qu'il n'y a de voie véritable que dans la Guerre populaire, pour la Libération révolutionnaire du Peuple (LRP qui n'est pas la "libération nationale" marxiste-léniniste "étapiste" classique, incluant la bourgeoisie***).

    Réaffirmer un Peuple comme le Peuple écossais contre l’État moderne (ici britannique) qui l'emprisonne depuis des siècles, c'est une négation au sens marxiste de cet État moderne qui est le produit du capitalisme : cela ne peut donc être qu'une négation du capitalisme lui-même ! Toute tentative qui 1°/ ne remet pas en cause le système capitaliste et 2°/ tente de passer par la voie des institutions bourgeoises, des référendums etc. et non par une mobilisation révolutionnaire de masse est en principe vouée à l'échec fut-ce "d'un cheveu" (comme au Québec en 1995) et, dans l'hypothèse où elle réussirait, à donner naissance à un État fantoche, faussement "libre" et totalement dépendant : à quelques encablures des côtes écossaises, les 26 comtés irlandais formant la "République d’Éire" en donnent un bon exemple - au demeurant, cet État n'est pas né d'un référendum mais bien d'une guerre de libération trahie par une partie de sa direction bourgeoise

    Les forces marxistes (voir ci-dessous) qui rejetaient le référendum et l'indépendance sur l'air de "cela ne changera rien pour la classe ouvrière", "c'est 'bon' capitalisme écossais contre 'mauvais' capitalisme anglais", "blanc bonnet et bonnet blanc" etc. etc. n'avaient pas tort dans l'absolu... et dans l'immédiat. Leur problème c'est de nier un mouvement historique bien réel en considérant, finalement, qu'elles détiennent la vérité et que les millions de gens qui ont voté "oui" sont des cons qui n'ont rien compris - autrement dit une posture aristocratique. Leur problème, c'est de ne pas voir les profondes aspirations populaires qui s'expriment ainsi et leurs possibilités de transformation en mobilisation révolutionnaire - autrement dit une attitude non-matérialiste.

    jacobitesQuant aux archi-classiques arguments comme quoi "le prolétariat n'a pas de patrie", les revendications nationales populaires "diviseraient le prolétariat international" etc. etc., de fait c'est bien Rosa Luxemburg dans ce qu'elle avait de pire qui semble être la référence politique de ces 'marxistes' - indifféremment qu'ils se réclament d'elle ou de Lénine-Trotsky, Lénine-Staline, Lénine-Staline-Mao, Bordiga ou qui que ce soit. Il semble nécessaire de leur opposer ce que disait Lénine lui-même en 1914 dans une controverse (justement) avec Luxemburg au sujet de la séparation (totalement pacifique d'ailleurs) entre la Suède et la Norvège, intervenue quelques années plus tôt : "Il ne peut faire le moindre doute que les sociaux-démocrates suédois auraient trahi la cause du socialisme et de la démocratie s'ils n'avaient pas combattu, par tous les moyens, tant l'idéologie et la politique des landlords suédois que celle des 'Kokoshkin' locaux [Fédor Kokoshkin était un 'constitutionnel-démocrate' ('cadet') russe de l'époque de Lénine, favorable à la 'libéralisation' de l'Empire vis-à-vis des nationalités mais fermement hostile à toute autodétermination], et s'ils avaient manqué à exiger non seulement l'égalité des nations en général (ce à quoi les Kokoshkin peuvent souscrire) mais aussi leur droit à l'autodétermination : le droit de la Norvège à faire sécession. L'alliance étroite entre les travailleurs norvégiens et suédois, leur complète et fraternelle solidarité de classe, n'a pu que gagner à la reconnaissance par les travailleurs suédois du droit des Norvégiens à l'indépendance. Ceci a convaincu les travailleurs norvégiens que les travailleurs suédois n'étaient pas infectés par le nationalisme, et qu'ils plaçaient la fraternité avec les prolétaires norvégiens au-dessus des privilèges de la bourgeoisie et de l'aristocratie suédoise. [...] Ils ont démontré qu'en dépit de toutes les vicissitudes de la politique bourgeoise - les relations bourgeoises pourraient très possiblement amener une répétition de la sujétion forcée des Norvégiens aux Suédois ! - ils seraient capables de de préserver et défendre la complète égalité et la solidarité de classe entre les travailleurs des deux nations, contre à la fois la bourgeoisie suédoise et la bourgeoisie norvégienne". CQFD... On ne peut pas dire que la Norvège indépendante soit devenue un modèle d’État socialiste prolétarien ; et pourtant telle était la position de Vladimir Illitch Oulianov !

    L'objectif du référendum (côté écossais) était certes une indépendance 100% bourgeoise et capitaliste : le modèle revendiqué du SNP d'Alex Salmond est la social-démocratie scandinave et son projet était de faire du pays une autre Norvège assise sur la rente pétrolière de la Mer du Nord, le tout en tentant (comme la "République" d'Irlande du Sud avant lui) de jouer l'UE (l'axe franco-allemand) contre l'Angleterre. La monarchie n'était pas remise en question (Élisabeth II devait rester "reine d'Écosse" comme elle "règne" symboliquement sur l'Australie, le Canada etc.) et le grave srsm1problème foncier que nous avons évoqué ne devait pas faire l'objet de plus que quelques mesurettes. La question de la véritable libération, celle du Peuple travailleur vis-à-vis de l'exploitation capitaliste, restait absolument entière.

    Mais il est tout aussi absurde et ridicule de présenter les choses comme du "nationalisme réactionnaire" ou carrément du "fascisme". Ce que les partisans de l'indépendance revendiquaient souvent dans les débats, c'était d'être les "derniers défenseurs du modèle britannique d'après-guerre", celui de l'"État-providence" et du progrès social laminé par 35 ans de thatchérisme et de blairisme - d'ailleurs la perspective d'un maintien des conservateurs au pouvoir à Londres, à l'issue des prochaines élections, influait considérablement sur les résultats des sondages. Du SNP social-démocrate jusqu'à la gauche révolutionnaire "socialiste" (= marxiste), républicaine-socialiste sur le modèle irlandais ou anarchisante comme le fameux groupe de punkcore antifasciste Oï Polloï, c'est clairement à gauche de l'échiquier politique que se trouve le camp pro-indépendance ; même si évidemment des forces de "gauche" unionistes existent aussi, à commencer par les travaillistes (qui perdraient là un de leurs derniers grands réservoirs électoraux et une quarantaine de députés à Westminster !) mais aussi, bien sûr, toutes sortes de "marxistes" tant "staliniens" que trotskystes ou apparentés pour qui l'"orthodoxie" dogmatique fait office de ligne politique [on peut voir un bon aperçu ici http://tendanceclaire.npa.free.fr/breve.php?id=9760 des positions au Royaume-Uni, ainsi que la déclaration du Parti 'communiste' 'écossais' (en fait la section écossaise de PC de Grande-Bretagne, il existe sinon un PC d’Écosse qui soutient l'autodétermination) et ici la version in french de la position du WSWS, tandis qu'en 'France' c'est bien sûr le festival jacobinard tant attendu 1 - 2 (position du PRCF ultra-partagée à la 'gauche de la gauche') et les incontournables "ça changera rien pour la classouvrièèèère" trotskystes 3 - 4]... En somme, toutes les forces de gauche n'étaient pas pour l'indépendance, mais toutes les forces pour l'indépendance étaient de gauche ! La droite conservatrice et réactionnaire était intégralement hostile à l'indépendance et farouchement pour le maintien de l'Union, des tories de David Cameron jusqu'aux souverainistes-populistes du UKIP de Nigel Farage - le FN britannique, arrivé en tête aux dernières européennes au Royaume-Uni mais obtenant (et pour cause) ses plus mauvais scores en Écosse (partagée entre SNP au nord, Labour au centre et libéraux-démocrates au sud ; l'UKIP n'étant en tête nulle part). De fait, comme en Bretagne, en Corse, au Pays Basque ouanti-independance dans certaines (nombreuses) régions d'Occitanie, la conscience et l'affirmation de Peuple nié par l'État moderne agit plutôt comme un antidote efficace à la mobilisation réactionnaire "nationaliste" étatiste qu'autre chose... Une droite réactionnaire qui a fait défiler 15.000 personnes pour le "non" à Édimbourg samedi sous la sinistre bannière "orangiste" des assassins d'Irlande du Nord : voilà de quel côté sont les fascistes là-bas !

    Quelle que soit la voie erronée (légaliste, institutionnaliste, capitaliste comme "horizon indépassable") où elle s'engage, c'est donc une aspiration profondément populaire et juste qui s'exprime là, et qui s'exprime avec des "mots" ultra-majoritairement progressistes. On voit d'ailleurs nettement, au regard des résultats électoraux, comment le thatchérisme a fait massivement glisser à gauche un électorat jusque-là - en dehors de la Clydeside - plutôt conservateur (résultats de 1979, 1992 et 1997) ; puis comment le sentiment indépendantiste est inexorablement monté avec la phase terminale de la crise générale du capitalisme jusqu'à porter le SNP au pouvoir en 2007 et le reconduire triomphalement en 2011, ce qui a conduit au présent référendum (23% pour le SNP en 2003, 33% en 2007 et 45% en 2011, score équivalent à celui du "oui" aujourd'hui).

    Bien sûr, ce projet de société indépendantiste n'est "progressiste" et idyllique que dans l'idéal car si, contrairement à Madrid pour la Catalogne, Londres a accepté la tenue du référendum et la reconnaissance de son résultat, elle tenait également prêt tout un arsenal de mesures visant à décourager le vote indépendantiste et, en cas de succès du "oui" malgré tout, à "torpiller" immédiatement l'économie du nouvel État : refus, par exemple, que l'Écosse conserve même temporairement la livre sterling, sachant que Bruxelles avait par ailleurs clairement rejeté l'intégration automatique du pays dans l'UE et donc dans l'euro (qui a pourtant cours dans de nombreux pays ex-yougoslaves non membres comme la Bosnie, le Monténégro ou encore le Kosovo... ah oui mais c'est vrai : là pour le coup ce sont des "indépendances" totalement voulues et pilotées par l'Union pour se faire des néocolonies !), etc. etc. - de fait, contrairement aux fantasmes de "complot balkanisateur" de certains, Bruxelles semble plutôt attachée à défendre bec et ongles l'"intégrité" territoriale de ses grands États membres... Ceci voulait bien sûr dire ce que cela voulait dire : aller mendier les republican socialistbonnes grâces du FMI et de la Banque mondiale pour permettre à l’Écosse indépendante d'être viable, avec les conséquences que l'on imagine. C'est sans doute ce qui a fait pencher un bon nombre d'électeurs vers le maintien du statu quo, ou en tout cas vers l'abstention (autour de 15% tout de même, même si la participation a été exceptionnelle et l'avance du "non" - nettement plus large que dans les derniers sondages - tend à montrer que c'est vers ce choix que se sont portés les "8 à 14% d'indécis" qui ressortaient de ces enquêtes).

    Voilà (et le même raisonnement vaut pour le référendum catalan prévu le 9 novembre) un bon exemple d'où se situe la différence entre une démarche institutionnelle légaliste et une démarche de lutte de libération révolutionnaire mobilisant véritablement le Peuple, "seul créateur de l'histoire universelle" comme disait Mao, pour construire une société nouvelle (par mobiliser nous n'entendons évidemment pas faire voter, mais mobiliser dans une dure lutte qui transforme au quotidien les rapports sociaux). Si en apparence "le Peuple décide souverainement de son destin", la "libération" est ici en réalité quémandée à l’État central qui va tout faire pour qu'une majorité (même courte) refuse l'"aventure" de l'indépendance, et si d'"aventure" le Peuple en question "passait en force", le lui faire payer très cher en faisant de la Grèce un paradis sur terre à côté de la situation économique et sociale du nouvel État. En d'autres termes : on va demander à des millions d'hommes et de femmes qui ne sont pas des hommes et des femmes nouveaux/velles forgé-e-s dans le feu d'une longue et dure lutte révolutionnaire, ayant appris l'autonomie populaire etc. etc., de se prononcer majoritairement pour ou contre un incroyable saut dans l'inconnu... Il est absolument évident qu'une majorité (même courte) va à tous les coups préférer la sécurité de ce qu'ils/elles ont toujours connu ! Mais ceci peut et doit, aussi, être un moyen de faire prendre conscience au Peuple de l'impasse institutionnaliste et de mobiliser sa fraction avancée dans la voie révolutionnaire - ce qui est évidemment impossible en niant, comme certains "marxistes", la réalité des aspirations exprimées dans le mouvement populaire pour l'indépendance et en n'y voyant qu'"aliénation" ou "aspirations petites-bourgeoises", en un mot "conneries contre-révolutionnaires".

    100 0745Ni panacée, ni "pure merde réactionnaire" : telle est notre position sur ces mouvements indépendantistes qui connaissent une expansion radicale en Écosse ou en Catalogne, a fortiori lorsqu'ils s'expriment dans un langage progressiste (nous avons évidemment beaucoup plus de mal avec un mouvement "de riches" et d'expression majoritairement réactionnaire comme en Flandre, même si nous ne considérons pas plus l’État belge comme une "nation" que les États français, britannique ou espagnol et même si les Flamands étaient, jusqu'au milieu du 20e siècle, une nationalité profondément méprisée et opprimée par la bourgeoisie francophone bruxelloise, avant de devenir une nation capitaliste dynamique voyant les Wallons pauvres et socialistes comme des boulets - un côté "marre des pauvres" que l'on sent aussi pointer parfois dans le discours catalan, hélas). Nous voyons là de la matière sociale en mouvement pour des raisons objectives et légitimes - historiques - et qu'il s'agit de mettre en mouvement dans un sens révolutionnaire, car elle est (actuellement et évidemment) politiquement confuse et peut aussi (bien sûr) aller dans un sens réactionnaire, qui la verra soit être écrasée soit être récupérée pour consolider l'ordre social européen et mondial - et non l'affaiblir. Nous n'avons pas dit autre chose au sujet des aspirations (en l'occurrence) autonomistes et en apparence "interclassistes" voire "réacs" qui se sont exprimées en Bretagne à l'automne 2013. Cela nous a bien sûr valu l'hostilité de tous les défenseurs de l’État moderne tel qui l'est (ou soi-disant de son "dépassement" "a-national" idéaliste et abstrait), y compris "rouges" ou "anars" (soi-disant révolutionnaires et en réalité petits bourgeois vivant de cet ordre social historiquement construit). Mais aussi, parfois (comme au sujet de la Catalogne), l'incompréhension de personnes partageant nos convictions "occitanistes" mais voyant (terrible "crise de confiance" que connaissent les personnes révolutionnaires depuis un quart de siècle) dans ce genre de démarche institutionnalo-légaliste leur référence absolue...

    saoirseNotre position concernant notre propre pays l'Occitanie, quant à elle, a déjà été exposée et expliquée plusieurs fois : nous ne sommes pas indépendantistes au sens "commun" (= "mauvais mais hélas répandu", cf. Gramsci) de créer à tout prix un État occitan, peu importe son contenu de classe. Nous sommes pour créer une BASE ROUGE de la révolution mondiale en Occitanie et si cela implique la séparation d'avec l’État français (tel qu'il est actuellement cela l'implique forcément) alors nous nous séparerons ; mais si cela peut se faire au sein d'un "Hexagone rouge" ou de tout autre cadre territorial plus grand, alors nous nous y fédérerons sans aucun problème... mais sans accepter pour autant un quelconque hégémonisme de qui que ce soit.

    Cette logique de libération révolutionnaire d'une périphérie en tant que territoire géographique permet d'ailleurs de "dés-ethniciser" la revendication et d'éviter ainsi que d'éventuelles minorités nationales (issues de l'immigration par exemple) soient inquiétées et finalement gagnées par la propagande unioniste/centraliste qui présenterait l'affirmation du Peuple nié comme "xénophobe", avant de se retrouver ensuite accusées d'avoir fait "capoter" les choses comme au Québec en 1995 (division des masses populaires au service du système dominant, mais là dans l'exemple québécois c'était inévitable vu la logique bourgeoise et "petite-blanche" qui est celle du PQ). S'il existe (en Occitanie comme ailleurs) des secteurs sociaux comme ce que nous appelons les colonies intérieures (et d'autres "indigènes"), ou encore les Rroms, qui sont dans une situation spécifique appelant une lutte autonome spécifique, c'est bien (à travers un processus que nous avons exposé en long, en large et en travers) l'Occitanie en tant que TERRITOIRE qui est une province et une périphérie de la construction capitaliste "France" avec l'ENSEMBLE des classes populaires vivant dessus, et non "les Occitans" comme communauté "organique" fantasmée et supposée descendre des paysans du Moyen Âge ou carrément des peuples antiques conquis par Rome - il est hélas probable que beaucoup de personnes trompées par l'ennemi croient que cette vision est la nôtre, et que nous ne luttons pas contre l’État français comme appareil d'oppression qui nous périphérise mais contre les "allogènes"...

    saorsaNous pensons de toute manière qu'une indépendance occitane capitaliste est impossible, car seule une fraction infinitésimale de la bourgeoisie occitane y est favorable - la grande majorité trouve son compte dans l’État français, fut-ce au prix d'une certaine "décentralisation" - et par conséquent, spontanément, seule une petite minorité des masses populaires l'est aussi. Nous ne sommes pas et ne serons certainement jamais dans le cas du Québec, de l’Écosse ou de la Catalogne, où une portion plus que conséquente de la classe dominante veut son propre État. La conscience de Peuple occitane existe, elle est beaucoup plus répandue que ne veulent bien le croire les thuriféraires de la "République une et indivisible", mais elle ne peut prendre un caractère réellement affirmatif et offensif que dans le cadre et au service d'une démarche révolutionnaire, d'une lutte pour une nouvelle société, une société socialiste puis communiste. L'Occitanie existe objectivement (territoire d'une langue et d'une culture du nord du "Massif central" aux Pyrénées et du Golfe de Gascogne aux Alpes) mais elle ne peut exister subjectivement (dans la conscience de masse) que comme PROJET RÉVOLUTIONNAIRE. Dans un sens, c'est mieux : nous ne nous trouverons jamais confrontés aux rudes débats d'une prise de position face à la perspective d'un État bourgeois indépendant, même si quelques esprits "gagne-petit" pourraient faire jouer ce rôle à une quelconque "avancée institutionnelle". Mais la tâche n'en est que plus immense, car nous devons TOUT CONSTRUIRE : nous n'avons pas la matière première d'une conscience collective léguée par la bourgeoisie, que nous pourrions "travailler" et transformer... Nous devons partir de cette conscience 100% populaire qui existe bel et bien, largement, mais diffuse, peu structurée et subissant l'hégémonie intellectuelle de la bourgeoisie dominante.

    Dans ce combat qui, répétons-le encore une fois, n'a de sens qu'inscrit dans une lutte révolutionnaire MONDIALE, nous saluons et encourageons le Peuple travailleur écossais CONSCIENT dans la poursuite de sa lutte pour la Libération !


    Saor is Sòisealach Alba !
    Free an Socialist Scootlund !

    (Écosse libre et socialiste !)


    * Ce terme (fréquemment taxé de 'révisionnisme' par les guignols pour qui le dogmatisme fait office de pensée politique) englobe le prolétariat http://servirlepeupleservirlepeuple.eklablog.com/les-classes-le-proletariat-a114084216 et les classes populaires assimilables par leur niveau de vie, autrement dit les personnes qui tirent l'essentiel pour ne pas dire la totalité de leurs ressources de leur propre force de travail (de manière salariée ou 'à leur compte'), et non de l'emploi de la force de travail d'autrui (définition de la bourgeoisie et des classes dominantes en général).

    ** Cette différence d'approche idéologique procède de la réalité matérielle. L'Angleterre peut tenir ses périphéries et donc se permettre de les reconnaître comme nations (ce qu'elle a toujours fait, dans le sport comme dans les régiments militaires), présentant le Royaume-Uni comme une "famille" de nations et non comme un "État-nation" contre toute évidence. Elle peut même se permettre de laisser se tenir un référendum pouvant déboucher sur l'indépendance d'une "nation constitutive" de la "famille", sachant qu'elle aurait de sérieux moyens de rétorsion contre la "fugitive" (elle l'a déjà montré, en 1920 et depuis, en Irlande) au cas où tous les moyens de pression préalables n'auraient pas empêché la victoire du "oui".
    La Castille ne peut pas se permettre cela car économiquement, au Nord de la péninsule en tout cas (Catalogne, Pays Basque), ce ne sont pas des périphéries mais des capitalismes bien plus dynamiques que le sien, superposés sur des classes populaires très conscientes par rapport à la moyenne européenne (cela, par contre, au Nord comme en Castille comme au Sud : partout). L'"espagnolité" d'ailleurs, pour dire les choses clairement, est "monnayée" depuis la "transition" de 1975-82 aux bourgeoisies nationales contre le maintien de l'ordre... Elle peut aussi l'être, éventuellement, sur l'argument que dans le "concert" européen et international "l'Espagne pèse ensemble 47 millions (d'habitants) et 1.300 milliards (de dollars de PIB) alors que les Catalans, les Basques etc. seuls ne pèseraient que quelques millions d'habitants et quelques centaines de milliards de PIB". Mais si une bourgeoisie (comme la catalane ou la basque) se sent réellement en mesure de se "faire la malle" et se montre manifestement capable de mobiliser en masse en ce sens, Madrid n'a pas le 1/10e des moyens de Londres pour rendre (d'abord) très improbable une victoire de l'indépendance et (le cas échéant) faire payer très cher celle-ci aux sécessionnistes. Elle est donc obligée de bloquer les choses autoritairement, en refusant par exemple - catégoriquement - que se tienne le référendum, et de reconnaître ses résultats au cas où il se tiendrait quand même.

    *** Il est clair que 100 ans ou presque après que Lénine ait théorisé la libération nationale, il faut être capables de constats de faits pour avancer. Le ridicule du nihilisme national des luxemburgistes, de certains anarchistes, certains trotskystes etc. a été amplement exposé et le fond de l'ignoble a même été atteint ces dernières années au sujet de la Palestine (cherchez sur Facebook le groupe "Révolution permanente", vous verrez). Mais la faillite des libérations nationales bourgeoises est aussi un fait établi et la perspective d’États "indépendants" que l'"ex"-métropole (qui le reste sur le plan économique...) mettrait immédiatement en faillite ne fait plus recette, même comme "premier pas", ainsi qu'on peut le voir dans les dernières colonies directes tricolores ("Dom-Tom") qui s'accrochent désespérément à Paris et même dans d'anciennes colonies, comme l'île comorienne d'Anjouan, qui voudraient... redevenir "françaises". Ce n'est pas là une position que nous trouvons particulièrement intelligente ni que nous soutenons, mais c'est une bonne illustration des limites qu'il nous faut à tout prix dépasser. Vive la Libération révolutionnaire des Peuples !

     


    votre commentaire
  • Source

    Albert Woodfox est, avec Robert King et Herman Wallace, l’un des « Trois d’Angola » : trois prisonniers politiques Noirs incarcérés en 1971 dans la prison d’Angola, prison de l’État de Louisiane aux États-Unis, après une condamnation pour vol à main armée.

    Pendant son procès, Albert Woodfox s’évade et rejoint les rangs du Black Panther Party. Une fois rattrapé et réincarcéré, il poursuit son activisme et monte avec Wallace et King une section du Black Panther Party à l’intérieur de la prison d’Angola, symbole du système industrialo-carcéral raciste nord-américain et de l’esclavage moderne, situé sur les lieux mêmes d’une ancienne plantation de coton.

    En 1972, Woodfox et Wallace furent reconnus coupables du meurtre d’un gardien blanc de la prison. King, qui n’était pas directement accusé du meurtre, fut déclaré complice et les « Trois d’Angola » furent placés à l’isolement.

    Robert King est resté en cellule d’isolement 23h sur 24h jusqu’en 2001, Herman Wallace jusqu’en octobre 2013, avant de mourir d’un cancer trois jours après sa libération.

    Albert Woodfox, lui, y croupit toujours, refusant de renier son engagement politique pour l’organisation des prisonniers Noirs, la résistance à l’esclavage moderne des prisons, la défense des droits des prisonniers, et affirmant son innocence. Les autorités pénitentiaires refusent de le libérer et de mettre fin à son isolement malgré le fait que son procès ait été déjà invalidé trois fois pour discrimination raciale.

    Reflet de l’organisation populaire portée par le Black Panther Party, la vie d’Albert Woodfox témoigne de la lutte populaire et politique pour l’auto-défense et la libération de la communauté Noire s’attaquant à toutes les réalités de l’oppression raciale et économique du peuple Noir : des quartiers à la prison, de la traite négrière à l’esclavage industriel du travail carcéral, de l’aliénation culturelle et mentale à l’écrasement institutionnel.

    Dans ce court texte publié le 23 avril 2014, Woodfox s’adresse à un psychologue envoyé par l’institution judiciaire ayant le pouvoir de légitimer un isolement de plus de quarante années.

    Il lui répond à quel point seul quelqu’un comprenant le sens de la lutte pour l’autodétermination et la résistance à l’oppression peut appréhender une telle sentence, non pas dans le sens d’une « peine », mais comme une réalité historique et politique : le point central de l’oppression du peuple Noir, de la domination capitaliste et dans le même temps le point de départ d’une prise de conscience de soi et de sa puissance d’agir.

    C’est la force politique de cette résistance et l’héritage de combattants révolutionnaires qui ont fait tenir Albert Woodfox durant ces 42 années d’isolement, et ce sont eux qui doivent alimenter la campagne de solidarité internationale pour sa libération et contre le système oppressif raciste des prisons états-uniennes.

    Pour lui apporter un soutien financier :

    www.jpay.com (#00072148)

    Texte traduit et présenté par les Éditions Premiers Matins de Novembre

    pmneditions@gmail.com

     

    Sized-Web_Hero

    Quand je me remémore certaines choses que j’ai faites étant plus jeune, lorsque j’apprenais à survivre dans le quartier de Six Ward Highsteppers à la Nouvelle-Orléans, je réalise que la société m’enseignait à être l’ennemi des pauvres, des ignorants et même celui de mon propre peuple. Je déplore certaines choses que j’ai faites à l’époque. Et parfois, je me demande ce que je serai devenu si rien de tout cela ne s’était passé de cette manière.

    Mais mon engagement au sein du Black Panther Party lorsque j’étais à New York, m’a offert une autre possibilité de survie. Cet engagement a changé la donne. Les Black Panthers étaient les premiers Noirs que je n’ai jamais vu avoir peur. En les regardant, en leur parlant et en apprenant d’eux, ma vie a changé à jamais. C’était la première fois que j’entendais une voix plus forte que celle de la rue. Et quand je retournai en Louisiane et que je fus envoyé à Angola, le programme en dix points du Black Panther Party m’accompagna.

    Le programme en dix points parlait d’autodétermination, d’assumer ses responsabilités en matière de prise de décision personnelle, s’agissant de ta vie, de ta communauté. C’est alors que j’ai commencé à réaliser que je pouvais modifier le cours des choses. Que je voulais le faire et que j’étais en colère. J’étais de toutes les radicalités et absolument convaincu que des changements sociaux majeurs en Amérique étaient à portée de main.

    Quand Brent Miller a été assassiné et qu’ils nous ont raflé [Herman Wallace] et moi, et jeté au trou, il ne m’a jamais traversé l’esprit que j’allais passer les quatre prochaines décennies suivantes enfermé 23 heures par jour dans une cellule de deux mètres sur trois. Il ne m’est pas venu à l’idée que nous serions condamnés. Nous étions innocents ! J’étais optimiste, pensant que le peuple – nos frères et sœurs à l’extérieur – se dresseraient, s’organiseraient et les empêcheraient de nous avoir.

    Puis, alors qu’ils nous emmenaient afin d’être présentés devant un tribunal, un des frères de Brent Miller nous coupa la route avec un camion. Il dérapa et s’arrêta près de la camionnette dans laquelle nous étions, et il bondit avec un fusil à pompe en hurlant : « Où sont ces négros ? Laissez-les moi ! Je vais tuer ces fils de putes ! » Soudain, tout devint sérieux. À ce moment-là, je fus submergé par la prise de conscience que nos vies étaient en jeu et que la loi ne pourrait pas nous protéger.

    Aujourd’hui, après toutes ces années, l’audience au civil concernant notre isolement prolongé approche. Si bien qu’ils ont envoyé ce psychiatre me questionner. Bien évidemment, il a essayé de me faire dire que quarante ans d’isolement n’ont en définitive pas été une si mauvaise chose. « Vous avez l’air de vous être très bien adapté » m’a-t-il dit.

    Je lui ai répondu qu’à moins de s’être retrouvé bouclé dans une cellule 23 heures par jour pendant quarante ans, il n’avait aucune idée de ce dont il parlait. Je lui ai dit : « Vous voulez savoir de quoi j’ai peur ? J’ai peur de commencer à crier et ne pas être en mesure d’arrêter. J’ai peur de me transformer en bébé, de me recroqueviller en position fœtale et de gésir ainsi tous les jours du reste de ma vie. J’ai peur de m’en prendre à mon propre corps, de peut-être me couper les couilles et les jeter à travers les barreaux comme que j’ai vu d’autres le faire quand ils n’en pouvaient plus. »

    Ni la télévision, ni aucun loisir, magazine ou quoi que ce soit d’autre que vous appelez vous-même « autorisés » ne peuvent atténuer le cauchemar de cet enfer que vous aidez à créer à et maintenir.

    J’ai été soutenu dans ma lutte par trois hommes. Nelson Mandela m’a appris que si vous poursuivez une noble cause vous pouvez porter le poids du monde sur vos épaules. Malcolm X m’a appris que l’endroit où vous commencez n’a peu d’importance, seul compte l’endroit où vous finissez. Et Georges Jackson m’a appris que si vous n’êtes pas prêt à mourir pour ce en quoi vous croyez, c’est que vous ne croyez en rien.

    Je sais que vous faites seulement votre travail, Doc. Vous avez votre travail et j’ai le mien. Je suis un professeur. Et je suis la preuve vivante que nous pouvons survivre au pire en nous changeant nous-mêmes et en changeant notre monde, peu importe où nous vivons. Je ne veux pas mourir dans cette cellule, mais si cela doit se produire pour que cette leçon soit tout à fait claire, alors je suis prêt à le faire.

    Albert Woodfox, prison d'Angola (Louisiane), 23 avril 2014

    a3mural

     


    2 commentaires
  •  

    Islamophobie et "échappatoire" salafiste

     

    La proclamation du "califat" par l’État islamique en Irak et en Syrie est en train de donner naissance à un véritable "sionisme musulman" :

     

    famille jihad


    Pourquoi des Français sont attirés par le djihad
    Jeunes hommes radicalisés, femmes mais aussi familles, près d'un millier de Français ont rejoint les rangs de l'État islamique. Explications.

    Une famille entière s'enrôle pour le djihad en Syrie

     

    La famille disparue dans l'Isère a bien pris la direction de la Syrie

     

    Une fillette de 2 ans et demi emmenée par son père a pu être récupérée et remise à sa mère : Assia, la fillette sauvée du djihad en Syrie

     

    Des adolescentes fuguent même de leur famille pour s'y rendre : http://www.ladepeche.fr/article/2014/03/27/1849563-lezignan-corbieres-soeur-sarah-ete-enrolee-syrie-reseaux-sociaux.html

     

    http://www.bladi.net/nora-marocaine-15-ans-jihad-syrie.html

     

    djihad-famille.jpgComme l'expliquent bien ces articles de la presse bourgeoise, il ne s'agit pas vraiment pour ces gens de se battre (ceux qui étaient prêts à le faire y sont déjà) mais bel et bien de participer à la construction du nouvel État et de la "nation islamiquement pure" proclamée par Abu Bakr al-Baghdadi à Mossoul au mois de juin... Nous avons donc là une logique qui, bien qu'avec des différences évidentes (que ne manqueront pas de souligner les critiqueurs professionnels sans arguments), rappelle celle du sionisme dans la première moitié du siècle dernier ou encore les projets comparables de "retour en Afrique" pour les Noirs américains et antillais, dont le plus célèbre est celui de Marcus Garvey : une logique consistant, pour une minorité ciblée par une mobilisation réactionnaire de masse, non pas à lutter concrètement là où elle se trouve pour ses droits démocratiques et son autodétermination en tant que minorité nationale, mais à chercher le "salut" dans la fuite vers une "terre promise" fantasmée (le plus souvent au détriment des populations qui s'y trouvent déjà comme on a pu le voir en Palestine, au Libéria grande "terre promise" du Back to Africa et maintenant dans les territoires du Machrek arabe sous le contrôle de l'"État islamique").

     

    Sur le site Oumma.com, un intellectuel musulman ose ouvertement le parallèle : L’État islamique d’Iraq et Syrie et le projet sioniste

     

    Cette démarche va évidemment se coupler à celle, expansionniste, du Capital arabe/musulman qui la finance et l'arme et va (dès lors) se chercher des "justifications" dans les textes sacrés pour prendre une tournure réactionnaire ultra-violente et fasciste, absente chez les quelques (rares et sympathiques) communautés rasta ayant pu s'installer en Afrique mais en revanche bien présente dans la colonisation et le "nettoyage" ethnique de la Palestine par les sionistes (bien que nous ayons Etat islamique Raqqalà un cas de "barbarie" "mentalisable" et donc finalement acceptable par les esprits occidentaux), l'idéologie puisant là aussi ses "justifications" dans l'Ancien Testament (bien que s'affichant - au début du moins - "laïque" et même "socialisante" devant des masses juives d'Europe séduites par les idées progressistes).

     

    Cette logique a été vigoureusement combattue, en ses lieux et temps, par les marxistes juifs (Bund et léninistes) pour le sionisme et par les grands dirigeants communistes noirs américains comme Harry Haywood et C.L.R. James, Robert F. Williams puis les Black Panthers pour le Back to Africa ; dans une compréhension correcte que c'est seulement l'absence de réponse révolutionnaire et rationnelle à l'oppression subie qui entraîne les masses vers des réponses réactionnaires, irrationnelles et mystiques (qui sont essentiellement l'intégrationnisme - négation de son identité d'opprimé pour tenter de nier l'oppression et d'obtenir quelques miettes de "reconnaissance" des oppresseurs, l'exemple de faillite le plus tragique étant sans doute celui des Juifs d'Allemagne et d'Autriche ; le repli "attentiste" et passif sur sa communauté ou la fuite vers l'"ailleurs" idéalisé - sionisme, garveyisme et maintenant émigration salafiste vers l'"État islamique").

     

    Les militant-e-s révolutionnaires des colonies intérieures catégorisées "musulmanes" doivent à présent prendre à bras le corps ce phénomène de recherche de réponses dans la religion et (désormais) l'émigration vers une soi-disante "Terre promise de l'Islam", afin d'apporter une RÉPONSE COMMUNISTE aux questions que se posent ces personnes (de plus en plus nombreuses) des classes populaires.

     

    trinquier.jpgDe l'autre côté et à la source de cette fuite en avant identitaire et réactionnaire (car il faut bien être clairs sur les liens de cause à effet), il y a la France de la vague bleue-et-bleue-marine du printemps dernier, la France de la haine raciste (en général) et anti-musulmane (en particulier) qui a motivé (selon leurs propres dires dans toutes les enquêtes) 99% des électeurs FN (un FN qui d'ailleurs, une fois n'est pas coutume, soutient l'intervention militaire occidentale contre l'"État islamique") et dont un "bon exemple" a été donné cet été par la petite ville de Wissous dans l’Essonne (tout près de l'aéroport d'Orly).

     

    Il est intéressant de souligner ici que le maire Richard Trinquier n'est pas "n'importe qui" : il est le fils du colonel Roger Trinquier, dont la théorie de la guerre contre-révolutionnaire moderne s'est exportée jusque dans l'Amérique du Sud des Pinochet en consorts... Autant dire qu'en matière de "lutte contre l'ennemi intérieur", il en connaît plutôt un rayon ! :

     

    Wissous, la ville où l'islam est pointé du doigt

     

    Déferlante de haine islamophobe et raciste à Wissous, le maire responsable

     

    valeurs actuelles Le battage autour de l'"islamisation" de notre bonne vieille "fille aînée de l’Église" apparaît encore une fois bel et bien (ainsi que nous le disons depuis des années) comme la grande mobilisation réactionnaire de masse de notre époque. Nous en avons déjà de nombreuses fois analysé les causes : le racisme, présent depuis qu'il existe une immigration extra-européenne significative en Hexagone, reflète la domination impérialiste européenne et française sur le "tiers-monde" et la PEUR devant la contestation croissante de cette domination par celui-ci, dont les "immigrés" sont perçus comme les "ambassadeurs" ; ce racisme s'est spécifiquement centré sur la religion musulmane depuis que ("révolution" iranienne, guerre civile algérienne et attentats de 1995 puis 11-Septembre 2001) les forces militant au nom de cette religion apparaissent comme les plus agressives ; on peut aussi évoquer dans les masses une crainte devant le "choc de modernité" (crainte d'un monde qui "change trop  vite") représenté par la "mondialisation", à laquelle l'immigration extra-européenne est associée ainsi que l'émergence d'acteurs internationaux non-européens dont (là encore) les pays musulmans sont perçus comme les plus inquiétants ; exactement comme la crainte devant le "choc de modernité" représenté par la "révolution" industrielle et la modernisation très rapide de la société entre 1800 et 1940 s'était projeté sur les Juifs, qui obtenaient au même moment l'égalité civile dans la plupart des pays d'Europe et connaissaient pour certains une vertigineuse ascension sociale - avant d'être perçus, aussi, comme l'"avant-garde" des "idées nouvelles" démocratiques, socialistes et communistes "menaçant" l'ordre social "millénaire"... Il n'est donc pas étonnant (même si c'est à combattre) que face à cela, comme face à l'antisémitisme principale mobilisation réactionnaire de masse lors de la première crise générale du capitalisme (années 1870-1940), une réaction populaire possible soit de dire "puisque nous sommes des 'merdes' ici, allons donc nous 'réaliser' loin d'ici sur une terre 'à nous', où nous serons entre gens comme nous, entre frères et sœurs, avec nos valeurs et pas celles des autres qui nous détestent" etc. etc. !

     

    extermination.jpg Parallèlement (et en illustration) à tout cela (à ce fond d'ambiance), on notera que des amendes d'un montant "exorbitant" de... 3.000 euros (même pas un mois voire un demi-mois de revenu pour ces personnes) ont été prononcées contre Christine Tasin (de "Résistance républicaine" et "Riposte laïque") pour avoir proclamé et revendiqué sa haine des musulmans ainsi que contre le maire CNIP de Cholet, Gilles Bourdouleix, pour avoir déclaré au sujet des Rroms que "Hitler aurait dû finir le travail" (!!). Voilà qui devrait suffire (si c'était nécessaire) à illustrer la MASCARADE qu'est la "lutte" bourgeoise "républicaine" contre les idées fascistes, sauf dans certaines circonstances très particulières comme une "bouseuse" FN des Ardennes qui s'en prend à une ministre guyanaise (et encore a-t-il fallu un tribunal guyanais pour cela...) ou un "comique" afro-descendant antisémite... et le RIDICULE de voir dans l’État "républicain" un allié potentiel contre le fascisme !

    L'antifascisme venu du cœur des classes populaires, lui, vient encore de donner un exemple lumineux à Calais face à quelques centaines de fascistes venus cracher leur haine des prolétaires migrants (qui s'entassent autour de cette ville dans les conditions inhumaines que l'on sait) : http://quartierslibres.wordpress.com/2014/09/10/rassemblement-de-sauvons-calais-racisme-autorise-solidarite-interdite/


      Revue de presse - mi-septembre 2014Revue de presse - mi-septembre 2014

    Revue de presse - mi-septembre 2014

     

     


    2 commentaires

  • Tout y est : liens avec le crime organisé (cette forme spécifique de capitalisme aux règles antiquo-médiévales et non "modernes", "des Lumières" comme le capitalisme principal) mais aussi avec les partis de pouvoir et en particulier la droite berlusconienne (se présentant même aux élections sur ses listes), trafics en tout genre (drogue, pierres précieuses), extraction sociale plutôt aisée des cadres et des militants, appui à des rébellions armées soutenues par l'impérialisme occidental contre ses rivaux, etc. etc. en dépit de la posture "révolutionnaire" affichée.

    L'Italie étant devenue ces dernières années le "laboratoire" de l'extrême-droite européenne, voilà qui devrait faire méditer ceux qui voient dans le FN et ses affidés une force "révolutionnaire" ou en tout cas "qui ne dit pas plus de conneries que les autres"... mais aussi ceux qui nient que le fascisme jaillisse de l’État et du Capital dans ce qu'ils ont du plus profond ! 

    Casapound : chemises noires, poudre blanche et brillants

    Casapound est une organisation d’extrême droite qui prétendait construire le « Fascisme du Troisième millénaire ». Depuis le 3 juillet dernier et le meurtre de Silvio Fanella, on sait désormais que derrière cette étiquette se cache une organisation qui a d’autres activités que la seule promotion du folklore fasciste italien. Les enquêtes qui se déroulent en ce moment, font apparaître clairement que la direction de Casapound et certains membres influents de l’extrême droite italienne sont impliqués dans des affaires criminelles de grande importance. Silvio Fanella était le « caissier » de Gennaro Mokbel, militant fasciste de longue date récemment condamné pour escroquerie et détournement de fond et trafic d’influence.


    Gennaro Mokbel assigné à résidence
    Gennaro Mokbel assigné à résidence

    Mokbel est aussi en lien avec des familles ‘ndranghetistes (mafia calabraise).

    Gennaro Mokbel et Franco Pugliese un "chefs supposés" devant un gâteau aux couleurs du PDL (parti de Silvio Berlusconi)
    Gennaro Mokbel et Franco Pugliese un "chefs supposés" devant un gâteau aux couleurs du PDL (parti de Silvio Berlusconi)

    Ce meurtre et l’enquête qui en découlent viennent briser l’image de militantisme alternatif que Casapound s’était créée en mettant en scène tout ses faits et gestes à grand renfort de communication sur le web. Gianluca Iannone, leader de Casapound, a nié que le tueur puisse avoir un lien avec son organisation, comme à chaque fois qu’un de ses militants tue quelqu’un. Et comme à chaque fois, les faits lui ont donné tort.

    Giovanni Battista Ceniti, un des trois responsables du meurtre de Silvio Fanella et responsable de Casapound Verbania jusqu'en 2012
    Giovanni Battista Ceniti, un des trois responsables du meurtre de Silvio Fanella et responsable de Casapound Verbania jusqu’en 2012

    En revanche il n’a sans doute pas d’explication quant à  la présence de diamants issus d’un trafic clandestin trouvés dans la maison de campagne de Fanella lors de l’enquête qui a suivi son meurtre. En quelques années, ce groupe est devenu l’exemple à suivre pour bon nombre de ses homologues européens et notamment français. Différentes tendances allant des « Jeunesses Nationalistes » à « Égalité & Réconciliation », en passant par les Identitaires ou la mouvance skinhead autour d’Ayoub et le MAS ont tous voulu avoir les faveurs et l’attention des militants transalpins. Durant des années, le nec plus ultra pour les militants nationalistes de toutes obédiences était d’avoir une reconnaissance publique des militants de Casapound. Même un vaniteux comme Soral disait que s’il était italien il serait membre de Casapound.

    Casapound a été fondée officiellement en 2008 à Rome et a connu un développement rapide ces dernières années. Ceci est tout dû à la politique d’équidistance pratiquée par les sociaux-libéraux qui dirigeaient la municipalité et qui ont permis à ce mouvement d’ouvrir des centres sociaux et ainsi de se structurer sur le territoire. Les « socialistes » italiens considéraient que les « extrêmes » étaient à traiter de la même manière.

    Gianni Alemanno jeune
    Gianni Alemanno jeune

    Puis Casapound a connu un essor considérable lors du dernier règne de Berlusconi et surtout à Rome lorsque Gianni Alemanno était maire : le petit mouvement a été protégé et arrosé financièrement. Il a bien grossi et semble avoir pris goût à l’argent et au pouvoir.

    Ce mouvement qui s’est donné des airs « populaire » et « canaille » est constitué majoritairement de personnes issues de classes sociales aisées (la percée du Blocco Studentesco , branche étudiante de Casa Pound, lors des élections a eu lieu dans les conseils d’écoles privées).

    Les dirigeants de Casapound aiment leur confort autant que la violence. Cette violence, ils l’ont exercée dans un premier temps sur les militants de gauche parlementaire molle et sur les immigrés.

    Cette violence fasciste a pour marque de fabrique la cocaïne et les armes. Elle s’épanouit dans les virages de supporters, dans les quartiers périphériques des villes. C’est logiquement que « les fascistes du troisième  millénaire » ont fait de l’argent sale.

    Ils sont issus des beaux quartiers et connaissent les milieux d’affaires mais ont aussi des réseaux dans la rue, les virages de stade, des connexions avec le monde politique italien, et un réseau international. Le col blanc et la chemise noire vont bien ensemble, ils permettent de faire un maximum de profits.

    Gianluca Ianonne en Birmanie
    Gianluca Ianonne en Birmanie 

    Karens avec le drapeau de Casapound
    Karens avec le drapeau de Casapound

    Parfois ils mettent des habits de brousse et prétextent faire de l’humanitaire (comme leurs collègues français) en Birmanie auprès des Karens chrétiens. On note au passage que la Birmanie est située dans le triangle d’or et qu’on y trouve des diamants. Cela n’a pas échappé, semble-t-il, aux fascistes du troisième millénaires et à leurs associés.

    Depuis trois ans, cette violence s’abat désormais aussi sur les militants d’extrême droite. Andrea Antonini, vice président du mouvement Casapound, se faisait « gambizzare », c’est à dire tirer une balle dans la jambe. Alors que Casapound se vantait en vitrine de faire le ménage dans un monde « moderne » corrompu, en coulisses les activités criminelles commençaient à se multiplier comme en attestaient les règlements de compte à caractère crapuleux.

    Andrea Antonini
    Andrea Antonini

    Des vieux militants fascistes des NAR des années de plomb comme Massimo Carminati (lui aussi impliqué dans cette affaire) ont fait le lien avec la nouvelle génération militante et les organisations mafieuses.

    Massimo Carminati
    Massimo Carminati

    Lorsque le financement par Berlusconi et ses sbires s’est tari, cela a incité cette mouvance à chercher de nouvelles formes de revenus (la peur du déclassement, sans doute).

    Casapound et l’extrême droite italienne en général ont fini par converger avec les organisations mafieuses. Les tiraillements générés par le partage de l’argent sale ont fait craquer le vernis « respectable » de Casapound.

    C’est ainsi que le 3 juillet 2014 le masque d’une alternative « fasciste » au libéralisme économique est tombé. Le meurtre de Silvio Fanella et l’arrestation d’un de ses meurtriers blessé sur le lieu de l’homicide ont permis de découvrir ce que beaucoup de gens faisaient semblant d’ignorer : les braves militants nationalistes trempent dans les activités criminelles les plus sales. Trafic de drogue, extorsion de fond, vols à main armée, blanchiment, escroquerie et même trafic de pierres précieuses.

     L’extrême droite italienne fait partie d’un réseau mafieux : le fasciste du troisième millénaire est en fait une sorte de yakuza, soit un nationaliste qui cherche un alibi moral à ses activités criminelles.

    Durant des années, les fascistes ont clamé qu’ils étaient à la fois une alternative à la démocratie parlementaire et surtout des incorruptibles face aux organisations criminelles. C’était un beau slogan publicitaire, dans les faits les relations entre militants fascistes et organisations criminelles existent de manière régulière depuis au moins les années de plomb. Ils ont été le bras armé de la « Démocratie Chrétienne » et donc des USA dans la lutte contre le communisme.

    Pour le pouvoir en place, dans un pays avec des structures étatiques faibles, les fascistes et les organisations criminelles ont été les fers de lance de la lutte contre les luttes sociales et les mouvements de gauche. L’extrême droite italienne est un hybride du squadrisme et du crime organisé : un agent de conservation de l’ordre social extrêmement agressif.

    L’esthétique et l’éthique fasciste et mafieuse se confondent : violence, ascension personnelle économique fulgurante pour ceux qui sont fidèles à l’organisation. La posture de rebelle qui ne remet pas en cause les injustices sociales mais permet, à grand renfort de prise de cocaïne et avec un couteau, de croire qu’on devient quelqu’un en s’en prenant à son prochain, s’est imposée au cours de la dernière décennie. Massimo Carminati ancienne figure du terrorisme d’extrême droite, braqueur de banque notoire a par exemple fait partie de la « Banda della Magliana » et sa vie a inspiré le personnage d’Il Nero de « Romanzo Criminale ».

    Entre passages à tabac et exécutions de militants politiques et syndicaux, actions contre les immigrés et leurs soutiens ou la mise en place d’attentat terroristes, sans parler des contacts avec les services secrets du temps de la guerre froide, les parallèles ne manquent pas entre le libéralisme économique sauvage pratiqué par les mafias et la défense des intérêts italiens à coups de couteaux ou de flingue par les fascistes.

    Il y a donc une certaine fatalité à voir aujourd’hui les chemises noires devenir un maillon de la chaîne du crime organisé qui empoisonne la vie quotidienne de millions de personnes.


    ieri-partigiani-oggi-antifascisti-copy-copie-1


    votre commentaire

  • HISTOIRE INVENTÉE DE TOUTES PIÈCES pour "faire du buzz" autour de la petite secte "postmofasciste" "Futur Rouge", sur laquelle a été publié le (long) texte de mise en garde suivant :

    http://servirlepeupleservirlepeuple.eklablog.com/une-critique-politique-de-futur-rouge-a127998920

    Nous laissons en ligne l'article suivant, en gage de notre bonne foi et preuve de nos dispositions tout à fait amicales vis-à-vis de ce groupe à l'époque des pseudo-"faits" (contre tout mensonge voulant que nous les aurions "toujours poursuivis de notre haine"...).


    N'attendons rien d'un appareil d’État bourgeois qui vient de libérer le meurtrier de Clément Méric ; COMPTONS SUR NOS PROPRES FORCES !

    Il y a un peu plus d'un an, en août 2013 (ce que bien sûr des abrutis ne manqueront pas de souligner, "pourquoi elle a attendu un an non mais franchemeeeeent", comme si les choses étaient psychologiquement faciles après un tel crime !), une militante communiste et antifasciste de l'Organisation communiste Futur Rouge était violée par un fasciste de sa ville comme le racontent aujourd'hui ses camarades de lutte :  

    "Salope de gauchiste, pute d'antifa" : c’est ce qu’a dit un militant fasciste à notre camarade Lucie pendant qu’il la violait, le 9 août 2013, dans la rue, alors qu’elle était à une soirée.
    Pour protéger notre camarade, nous protégerons son anonymat. Nous ne donnerons pas plus de précisions, ni nom, ni localité et nous vous demandons de respecter ce choix nécessaire.
    C’était clairement une attaque ciblée contre une militante antifasciste dont l’objectif était de briser le développement d’une activité antifasciste dans sa ville en la brisant elle. Ce qui a doublement échoué. C’était aussi un message adressé à l’ensemble des militant-e-s antifascistes de l’État français.
    C’est son choix de dénoncer le crime dont elle a été victime et ce choix est une autre preuve de son courage exemplaire que nous saluons. Notre camarade souffre de séquelles physiques à vie.

    Nous avons donc affaire à un crime (ce qu'est le viol) et plus particulièrement à un crime POLITIQUE, un crime DE GUERRE puisque c'est bien en guerre que nous sommes avec les fascistes, l'extrême-droite et les ultra-réactionnaires de tout poil, nos ennemis politiques et de classe les plus irréductibles - la différence étant que nous sommes le plus grand nombre qui veut se libérer de l'exploitation et de toutes les formes d'oppression et non les miliciens d'une minorité qui exploite et opprime le plus grand nombre, aussi n'avons-nous pas besoin de la barbarie comme instrument de terreur de masse dans notre combat : nous n'exerçons la violence révolutionnaire que comme autodéfense et justice du Peuple.

    La militante victime de ce crime politique refuse d'en appeler à la police et à la "justice" bourgeoise, et s'en explique avec une dignité admirable :

    ACAB


    Notre camarade Lucie, violée par un fasciste au mois d’août 2013, souhaite expliquer pourquoi elle ne portera pas plainte. Nous souscrivons bien entendu à cette déclaration et c’est avec fierté que nous la publions. Solidarité avec les victimes de violences policières, avec les prisonnier-e-s !

    Quand on me dit « police » j’ai la nausée, quand je les vois je suis énervée. Pourquoi ? Parce que, pour moi, ce sont les nervis du Capital, ce sont mes ennemis au quotidien, ce sont eux qui nous matraquent, qui nous expulsent, qui nous arrêtent, qui nous frappent, qui parfois nous violent ou nous tuent aussi. La police n’est et ne sera jamais mon alliée. Je ne cesserai jamais de les haïr. La bourgeoisie leur donne le pouvoir de s’adonner à leur pulsion barbare.

    • Jeudi 21 Août 2014, des policiers traînent de force un algérien de 51 ans sous le coup d’un arrêt d’expulsion qui meurt « d’asphyxie » selon le parquet… Qui considère cette mort comme a priori accidentelle…
    • Le 21 avril 2014 les militant-e-s de la CREA (Campagne de Réquisition, d’Entraide et d’Autogestion) de Tolosa sont réprimés pendant l’ouverture de deux maisons dans le quartier de la Roseraie. Encerclé-e-s par une centaine de flics, les occupant-e-s décident de partir en évitant les arrestations. Pourtant les militant-e-s désigné-e-s comme CREA sont violenté-e-s par les flics : matraques, lacrymo, grenades de désencerclement… un militant prend une balle de LBD 40 dans la tête, plus de la moitié des os du visage explosent. Quatre personne ont été mises en garde à vue, puis relâchées.
    • Le 31 Octobre 2013, un couple arrêté après la violente répression de l’émotion déclenchée par un verdict au tribunal de Cergy, un couple est victime de violences policières et ISMAHENE est menacée de viol par les policiers. C’est le couple qui est accusé d’outrage.
    • Le 6 février 2013, à Strasbourg un métallurgiste d’Arcelor Mittal venu manifester perd l’usage de son œil suite à un tir de flashball.
    • Le 31 décembre 2011, la police clermontoise s’acharne sur WISSAM EL-YAMNI qui tombe dans le coma puis meurt. Aucune justice n’a été rendue à sa famille.
    • En 2010, la police suisse abat au fusil mitrailleur UMUT, un jeune kurde, pour vol de voiture, blanchit les assassins et réprime son frère jumeau et l’un de ses amis.
    • Le 9 mai 2008 à Grasse, ABDELHAKIM AJIMI meurt lors d’une interpellation. Pourtant condamnés à des peines de 18 et 24 mois de prison, les policiers sont toujours en poste.
    • Ce même mois JOSPEPH GUERDENER est assassiné de trois balles dans le dos par un gendarme alors qu’il tentait de s’échapper de la gendarmerie de Draguignan. La Cour d’assises de Draguignan a jugé qu’il avait accompli « un acte prescrit ou autorisé par les dispositions législatives ou réglementaires ». Détail ayant son importance : Joseph était gitan.

    Les flics, c’est un danger pour les personnes prostitué-e-s, ils profitent de leur situation précaire pour en faire leurs victimes, en sachant très bien combien ce sera compliqué pour elles et eux de réclamer justice.

    En tant que victime, je pourrais me dire que porter plainte est un bon choix. Après tout, la justice est censée faire son travail sans discrimination. Mais la réalité est tout autre... LIRE LA SUITE >>


    Mais bien sûr, il ne s'agit absolument pas de "garder le silence" sur ce crime abominable. Il s'agit au contraire de le faire absolument connaître, de construire la solidarité la plus large dans les classes populaires et que cette solidarité devienne haine implacable pour son auteur, ses comparses et le fascisme dont ils sont des militants (en plus, évidemment, de la haine générale pour le viol comme crime sexiste) ; un fascisme dont la montée n'est plus un secret pour personne (et il faut considérer que quelque part, chaque fois qu'il fait X% aux élections, il est en quelque sorte "X% au pouvoir") et dont il faut dévoiler au grand jour et le plus largement possible le vrai visage, celui de la pire barbarie comme instrument "normal" de domination :
    Solidarité avec notre camarade Lucie, violée par un fasciste !

    (en anglais) Solidarity with our comrade Lucie, raped by a fascist !
    Rassemblement pour Lucie à Tours

     

    On notera "pour archives" (comme ils disent) que le 'p''c''mlm' en a encore "profité" pour prendre une position ignoble : L'inacceptable position du groupe «futur rouge» au sujet d'un viol commis par un fasciste ; position qui ne mérite même pas l'effort intellectuel d'une réponse point par point tant le texte parle de lui-même, surtout quand on le met en parallèle avec la dignité de la camarade victime. Étalage à tous les niveaux de leur complaisance (pour ne pas dire servilité) envers les institutions "républicaines" bourgeoises (soi-disant "antifascistes"), où l'on découvre stupéfait que la police et la justice du Capital peuvent être des... "alliés" dans une affaire de crime POLITIQUE contre une militante révolutionnaire (rien que le texte de celle-ci égrène pourtant les contre-exemples) ; incapacité du RESPECT le plus élémentaire envers la victime d'un tel acte quand bien même on ne partagerait pas sa position ; transformation des révolutionnaires victimes des fascistes (contrairement à eux qui ne "militent" que devant un ordinateur) en... "cinquième colonne" de celui-ci ; et même occasion d'un énième vomi islamophobe alors que les agressions de femmes musulmanes portant le voile se sont multipliées ces derniers temps et que tout le monde sait très bien que le prochain cap franchi sera un viol, car parmi les choses que les fascistes ne supportent pas dans le voile musulman, il y a le fait que ces femmes les privent de la vue et de la jouissance de leurs corps.

    C'est que les évidences et les faits intangibles rappelés par Lucie sont un cinglant démenti à leurs positions fondamentales : NON la République bourgeoise ne fait pas "face" à un fascisme qui l'assaillirait "de l'extérieur" (et contre lequel il faudrait la "défendre" comme "moindre mal") ; NON sa flicaille (dont un certain Alain S. aime d'ailleurs tant revêtir l'uniforme) n'est pas l'"alliée" - même "potentielle", même "à l'occaze" ! - des classes populaires contre ce prétendu "assaut" ; le VRAI fascisme vient du cœur même de la République bourgeoise et de son idéologie pourrissante ! L’État bourgeois "républicain" est "antifasciste" lorsque des dieudonnistes ou des islamistes (positions politiques dont nous ne répèterons pas pour la 100e fois notre rejet) défendent des positions géopolitiques ouvertement antagoniques avec celles de la fraction bourgeoise au pouvoir (positions qui conduisent généralement à l'antisémitisme, mais ce n'est même pas cela qui est déterminant) ; à la rigueur lorsqu'une ministre afro-descendante est attaquée de manière extrêmement primaire par une candidate locale FN (et encore faut-il pour cela un tribunal de Guyane, pays majoritairement peuplé d'afro-descendants... à voir si un tribunal de "métropole" aurait pris la même décision !) ; mais lorsque des fascistes/racistes BLANCS agressent, violent ou même TUENT des "minoritaires visibles" ou des "gauchistes" IL S'EN FOUT COMPLÉTEMENT, sans même parler de quand il s'agit de ses propres flics... et quoi de plus "normal" lorsque l'hégémonie intellectuelle qui sous-tend ces actes, à coup de Zemmour et de Rioufol, de Finkielkraut et de Xavier Raufer, de "Riposte laïque" et de Valeurs Actuelles, a pignon sur rue au quotidien !

    Décidément, il n'y a que deux côtés à la barricade et celui où se trouve le 'p''c''mlm' ne fait désormais plus aucun doute pour la moindre personne progressiste.



            ocfr-1.jpgautoc1v5.jpg 

     


    5 commentaires

  • Alors que l'Europe bourgeoise se "recueille" dans le souvenir du centenaire de la Première Guerre mondiale, on en oublierait presque qu'il y a 75 ans exactement débutait... la Seconde, dont on célèbre au demeurant les 70 ans du dénouement victorieux (débarquements de Normandie et de Provence, libération du territoire "français"). Il faut reconnaître "à décharge" que les débuts, comparés au dit dénouement, furent beaucoup moins glorieux...

    En septembre 1939 donc, l'Allemagne nazie envahissait et soumettait en quelques semaines la Pologne. La République bourgeoise française et le Royaume-Uni lui déclaraient alors instantanément la guerre... mais sans engager le moindre combat avant la grande offensive allemande de mai 1940, aux conséquences que l'on connaît. Au même moment, parallèlement... l'URSS "envahissait" elle aussi le territoire polonais [en réalité, ce que l'on ne dit pas, c'est qu'elle récupérait essentiellement des territoires devenus polonais suite à une première guerre en 1920 mais qui ne devaient pas faire partie de la Pologne au départ, n'étaient d'ailleurs pas majoritairement peuplés de Polonais et n'en font plus partie aujourd'hui] ; ceci au nom du fameux, du célébrissime, du kolossal argument de toute la propagande "communisme=nazisme=totalitarisme" depuis lors : le PACTE GERMANO-SOVIÉTIQUE, scellé le 23 août de la même année à Moscou par les chefs respectifs de la diplomatie, Molotov et Ribbentrop.

    91391Contrairement à l'auteure des textes ci-dessous, Annie LACROIX-RIZ (encartée au PRCF, dans la mouvance Michel Collon, Le Grand Soir etc. etc., voir une bonne critique de ses positions ici), nous ne sommes pas des "fans" inconditionnels du "pacte" en particulier ni de la politique soviétique de l'époque (emmenée par Staline) en général ; nous l'avons déjà exprimé à de nombreuses reprises et cet anniversaire sera l'occasion de clarifier notre position une fois pour toute. URSS acculée et sans autre choix, peut-être ; gain considérable et vital de temps (22 mois) et de terrain (des centaines de kilomètres à parcourir en plus pour la Wehrmacht) en prévision de la grande offensive que le nazisme allait déchaîner tôt ou tard, sans doute ; mais le "pacte" s'est aussi accompagné de beaucoup de choses inacceptables comme la "livraison" de réfugiés antifascistes au Reich ou à ses alliés (Italie, Roumanie, Hongrie etc.) ce qui revenait à les condamner à mort, les échanges commerciaux (pétrole, charbon, acier, denrées alimentaires) au service de l'économie de guerre allemande sans même parler des pratiques de certains PC localement et notamment dans notre bonne vieille France : Duclos négociant la reparution de L'Humanité avec les autorités d'occupation, l'appel du 10 juillet 1940 de Maurice Thorez qui ne parle pas une seule seconde de résistance mais au contraire de "remettre la France au travail" etc. etc. - il faut dire aussi que dans les États à la tête de grands empires coloniaux, dans la logique de "front" avec la "bourgeoisie antifasciste" qui avait prévalu entre 1934 et 1939, les compromissions avec l'indéfendable ne dataient pas de la veille pour bon nombre de dirigeants. Ces attitudes (il faut le souligner) n'ont cependant pas empêché la base populaire communiste de s'opposer très tôt et courageusement à Vichy et au nazisme, comme y avait appelé clairement (lui) Charles Tillon dès le 17 juin 1940 : c'est ainsi en octobre 1940 (et non en juin 1941 ni après) qu'a été arrêté - pour distribution de tracts - le célèbre Guy Môquet.

    Si nous reproduisons ces textes, c'est parce qu'ils ont le grand intérêt de lever le voile sur les tenants et les aboutissants de ce "pacte" et, ce faisant, sur les contorsions et les entourloupes géopoliticiennes des "démocraties occidentales" et en premier lieu de la France, leur complaisance envers Hitler (non contentes de l'avoir "fait" par les conditions - en réaction aux conditions - imposées à l'Allemagne après la Première Guerre mondiale), motivée - inutile de le dire - par l'anticommunisme et l'espoir que ce dernier se tournerait en premier lieu contre l'URSS ; alors même qu'il s'apprêtait en réalité à les envahir (pour se débarrasser d'abord de l'adversaire le plus "facile" à ses yeux). Dans le "meilleur" des cas (suivant un clivage gauche/droite sans doute, on va dire), le "plan" des "démocraties" était de laisser le Reich nazi et l'Union soviétique s'affronter et se saigner à mort mutuellement pendant qu'elles dormiraient sur leurs deux oreilles (ce qui n'est pas sans rappeler, à une échelle beaucoup plus réduite, la stratégie occidentale actuelle au Proche-Orient vis-à-vis des islamistes sunnites et du "bloc iranien"). Une politique qui devait conduire au désastre que l'on sait ; un désastre dont seul le mouvement communiste avec l'URSS à sa tête sauvera par la suite l'humanité - les "démocraties" impérialistes occidentales n'assumant qu'une part mineure de l'effort de guerre et (surtout) du prix du sang.

    Voilà qui devrait faire réfléchir aujourd'hui encore devant les guerres et (surtout) les appels à l'"union sacrée" de la bourgeoisie impérialiste (qui les accompagnent systématiquement) contre les "monstres" qu'elle a elle-même engendré, par ses crimes et la (compréhensible) réaction qu'ils suscitent (comme le traitement de l'Allemagne après 1918 ou le colonialisme en Asie ouvrant un boulevard à l'impérialisme japonais), ou par complaisance/calcul ou les deux, de Khomeyni ou Saddam ou Milosevic hier à Daesh aujourd'hui en passant par Al-Qaïda ou les Talibans. On peut penser ce que l'on veut d'Assad aujourd'hui comme de Saddam hier (et nous en pensons beaucoup plus de mal que de bien), mais le fait est que la volonté occidentale de liquider ces États arabes "forts" a directement créé les conditions du triomphe actuel de Daesh (qui est aussi à bien des égards, il faut le souligner, un "saddamisme" ressuscité sous une forme religieuse)... Et il faudrait aujourd'hui nous enrôler dans une nouvelle "croisade" pour la "démocratie" et la "civilisation" contre celui-ci, et par-dessus le marché exiger des personnes de culture musulmane qu'elles se "désolidarisent" de ce groupe fanatique (comme si l'on demandait aux personnes juives de se "désolidariser" des bombardements israéliens de cet été sur Gaza, sans même parler des "désolidarités" que l'on pourrait demander aux personnes de culture européenne-chrétienne) !

    Leçon n°1 donc : la crapulerie, la fourberie et l'hypocrisie des "démocraties" capitalistes-impérialistes sont sans limites ; elles sont (en réalité) dans la nature même de leur mode de production et de la crise de celui-ci ; la "démocratie" bourgeoise est donc très mal placée pour se la jouer grande dénonciatrice des "extrémismes" ; nous savons ce que vaut son "antifascisme" et sa "démocratie contre la barbarie" et nous n'avons que faire de ses sermons envers les "extrémistes de gauche" que nous sommes. C'est le Capital impérialiste qui précipite l'humanité dans la catastrophe ; ce n'est certainement pas de lui qu'elle doit attendre son salut.

    C'est peut-être ce raisonnement - en somme : "Qu'ils aillent se faire foutre" ! - qui a guidé la direction soviétique en 1939 et on peut le comprendre ; même si son aboutissement (le "pacte") peut et doit être critiqué. On pourrait par exemple rappeler (car c'est totalement tombé dans l'oubli de nos jours) qu'en août 1939 l'URSS n'était même pas encore tout à fait sortie d'une courte mais sanglante guerre contre le Japon en Mongolie - une victoire qui devait lui donner la paix en Extrême-Orient jusqu'en 1945 (et aux Occidentaux, sans doute, jusqu'en décembre 1941). Il lui était donc extrêmement difficile d'ouvrir seule un deuxième front en Pologne contre l'Allemagne, comme semblaient le lui "suggérer" les "démocraties" occidentales. Ou encore rappeler que si l'Union soviétique ne s'emparait pas des Pays baltes et du Sud-Est de la Finlande (ce qu'elle fit en 1940), c'était l'Allemagne qui le faisait... et Leningrad était perdue en quelques jours (de fait, la ville devra subir pendant la guerre un siège de deux ans et demi qui fera plus d'un million de mort-e-s).

    Mais nous vivons malheureusement dans un monde où il est devenu, pour ainsi dire, intellectuellement impossible d'admettre (pour certains milieux-militants-révolutionnaires peut-être plus que pour quiconque) que comprendre n'est pas justifier, excuser ni défendre. On n'a que les mots "injustifiable", "inqualifiable" ou "innommable" à la bouche sur tous les sujets (fascisme et "stalinisme" d'hier et d'aujourd'hui, "islamisme", antisémitisme de certains secteurs populaires etc.). On ne peut pas justifier l'injustifiable et puisque comprendre = justifier, on s'interdit donc de le comprendre... et donc de le combattre - ou de ne pas recommettre les mêmes erreurs, retomber dans les mêmes dérives ce qui revient au même.

    Pourtant, si l'on est communiste, la principale préoccupation devrait être de COMPRENDRE les erreurs et les dérives du siècle dernier pour ne pas retomber dedans à nouveau, vu qu'elles ont conduit les expériences révolutionnaires à l'échec et à la contre-révolution. La réalité c'est que le gouvernement soviétique de Staline n'était pas un gouvernement bourgeois, c'était un gouvernement ouvrier et paysan, mais il ne s'était pas suffisamment extrait de la compréhension bourgeoise du monde qui nous entoure. Face à beaucoup de problèmes, il ne voyait de solution que ce que la pensée bourgeoise présentait comme "évident" depuis des siècles. Et dans la "communauté internationale" de brigands qui prévalait à la fin des années 1930 (ce n'est guère différent aujourd'hui, si ce n'est pas pire...), il n'a vu d'autre solution que de se faire brigand lui-même - "bandit d'honneur" dira-t-on à la rigueur. C'est ce qui a conduit l'URSS, d'État révolutionnaire des ouvriers et des paysans, à devenir intérieurement un capitalisme d’État au bénéfice d'une nomenklatura et extérieurement un social-impérialisme - "socialiste en paroles et impérialiste dans les faits" ; tendance achevée au milieu des années 1950 mais déjà bien à l’œuvre en 1939.

    C'est la leçon n°2 : on ne peut pas se contenter d'une condamnation/dénonciation abstraite et morale des choses si l'on veut dépasser les limites (= ne pas reproduire les erreurs) des expériences révolutionnaires passées. Le "pacte" germano-soviétique s'inscrivait, comme on vient de le voir, dans le CONTEXTE d'une époque : celle de la crise générale du capitalisme et de la guerre impérialiste pour le repartage du monde. Un contexte dont le seul et unique responsable était le Capital impérialiste ouest-européen et nord-américain, et en vérité le mode de production capitaliste lui-même - arrivé à ses limites historiques et "ne reculant plus devant aucun crime". Bien loin de la "preuve que les totalitarismes sont jumeaux" que les anticommunistes de tout poil (y compris voire surtout "de gauche") voudraient nous y faire voir...

    Critiquer les erreurs et les dérives du "stalinisme", c'est BIEN et c'est même salutaire pour le mouvement communiste international d'aujourd'hui et de demain. Mais À LA CONDITION de bien remettre CHAQUE CHOSE À SA PLACE, et chacun face à ses responsabilités !

    13186139-0.jpg

    http://www.gauchemip.org/spip.php?article16437

    Seconde Guerre mondiale : l’Union soviétique par pertes et profits (par Annie Lacroix-Riz)


    samedi 17 décembre 2011.
    Source : http://www.monde-diplomatique.fr/2005/05/LACROIX_RIZ/12194

    Il y a soixante ans, 57 % des Français considéraient l’URSS comme le principal vainqueur de la guerre. En 2004, ils n’étaient plus que 20 %. Amplifié par les médias, cet oubli progressif du rôle de Moscou tient aussi aux polémiques sur la politique de Staline entre 1939 et juin 1941, que des travaux historiques récents éclairent d’un jour nouveau. Mais, quoi qu’on pense du pacte germano-soviétique, comment nier que, trois ans durant, les Russes ont porté une grande partie de la résistance, puis de la contre-offensive face à la Wehrmacht ? Au prix de 20 millions de morts.

    Deux ans après sa victoire sur le nazisme, l’Armée rouge devint, pour les peuples de l’Ouest, pour cause de guerre froide, une menace (1). Six décennies plus tard, l’historiographie française, sa mutation pro-américaine achevée, voue l’Union soviétique aux gémonies tant pour la phase du pacte germano-soviétique que, désormais, pour celle de sa « grande guerre patriotique ». Nos manuels, assimilant nazisme et communisme, surenchérissent sur les historiens d’Europe orientale (2). Mais les recherches originales qui nourrissent cette mise au point dressent un tout autre tableau de l’URSS dans la Seconde Guerre mondiale.

    Le principal acte d’accusation contre Moscou concerne le pacte germano-soviétique du 23 août 1939 et, surtout, ses protocoles secrets : de fait, la victoire fulgurante et écrasante remportée sur la Pologne par la Wehrmacht donna le signal de l’occupation par l’URSS de la Galicie orientale (est de la Pologne) comme des pays baltes (3). Volonté d’expansion, Realpolitik ou stratégie défensive ?

    Reprenant la thèse des prestigieux historiens Lewis B. Namier et Alan John Percivale Taylor, ainsi que du journaliste Alexander Werth, les nouveaux travaux d’historiens anglophones éclairent les conditions dans lesquelles l’URSS en est arrivée à cette décision. Ils montrent comment, encouragé par les États-Unis, l’entêtement de la France et de la Grande-Bretagne dans leur politique d’« apaisement » – autrement dit de capitulation face aux puissances fascistes – a ruiné le projet soviétique de « sécurité collective » des pays menacés par le Reich. D’où les accords de Munich (29 septembre 1938), par lesquels Paris, Londres, et Rome permirent à Berlin d’annexer, dès le surlendemain, les Sudètes. Isolée face à un IIIe Reich ayant désormais les mains libres à l’Est, Moscou signa avec Berlin le pacte de non-agression qui l’épargnait provisoirement.

    image019Ainsi s’achevait la mission franco-britannique envoyée à Moscou (du 11 au 24 août) pour calmer des opinions réclamant – après l’annexion allemande de la Bohême-Moravie et la satellisation de la Slovaquie – un front commun avec l’URSS. Moscou exigeait l’alliance automatique et réciproque de 1914, qui devrait associer la Pologne et la Roumanie, fiefs du « cordon sanitaire » anti-bolchévique de 1919, et les pays baltes, vitaux pour la « Russie d’Europe (4) ». L’amiral britannique Drax et le général français Doumenc devaient faire porter à Moscou seule le chapeau du fiasco : il fallait simplement « laisser l’Allemagne sous la menace d’un pacte militaire anglo-franco-soviétique et gagner ainsi l’automne ou l’hiver en retardant la guerre ».

    Quand le chef de l’Armée rouge Klement Vorochilov, « précis, direct », leur proposa, le 12 août, « l’“examen concret” des plans d’opérations contre le bloc des États agresseurs », ils s’avouèrent sans pouvoirs. Paris et Londres, résolus à ne fournir aucune aide à leurs alliés de l’Est, avaient délégué la tâche à l’URSS tout en la lui rendant impossible : Varsovie (surtout) et Bucarest avaient toujours refusé un droit de passage à l’Armée rouge. Ayant « garanti » la Pologne sans la consulter, Paris et Londres se dirent ligotés par le veto (encouragé en sous-main) du germanophile colonel Josef Beck, qui invoquait le « testament » de son prédécesseur Josef Pilsudski : « Avec les Allemands nous risquons de perdre notre liberté, avec les Russes, nous perdons notre âme. »

    L’affaire était plus simple. La Pologne avait arraché aux Soviets, en 1920-1921, avec l’aide militaire française, la Galicie orientale (5). Aveugle depuis 1934 aux appétits allemands, elle tremblait que l’Armée rouge ne s’emparât aisément de ces territoires. La Roumanie, elle, redoutait de perdre la Bessarabie prise aux Russes en 1918 et gardée grâce à la France. L’URSS n’obtint pas non plus de garantie des pays baltes, dont l’indépendance de 1919-1920 et le maintien de l’influence allemande devaient tout au « cordon sanitaire ».

    Depuis mars et surtout mai 1939, Moscou était courtisée par Berlin, qui, préférant – d’expérience – une guerre sur un seul front, lui promit, avant de se jeter sur la Pologne, de respecter sa sphère d’influence en Galicie orientale, en Baltique et Bessarabie. Elle céda, au dernier moment, mais pas à un fantasme de révolution mondiale ou de « Drang nach Westen » (cette poussée vers l’Ouest chère au publiciste allemand d’extrême droite Ernst Nolte) : elle refusa, Londres et Paris cajolant toujours Berlin, d’« être impliquée toute seule dans un conflit avec l’Allemagne » – selon les termes du secrétaire au Foreign Office, Charles Lindsley Halifax, le 6 mai 1939. L’Occident mima la stupeur devant « la sinistre nouvelle explosant sur le monde comme une bombe (6) » et dénonça une trahison. En réalité, Français et Britanniques en poste à Moscou jouaient les Cassandre depuis 1933 : faute de Triple Entente, l’URSS devrait composer avec Berlin pour gagner le répit nécessaire à la mise sur pied de guerre de son économie et de son armée.

    Le 29 août 1939, le lieutenant-colonel Luguet, attaché aérien français à Moscou (et futur héros gaulliste de l’escadrille Normandie-Niémen), certifia la bonne foi de Vorochilov et posa Staline en « glorieux successeur (...) d’Alexandre Nevsky et de Pierre Ier » : « Le traité publié est complété par une convention secrète, définissant, à distance des frontières soviétiques, une ligne que les troupes allemandes ne devront pas dépasser et qui serait considérée par l’URSS en quelque sorte comme sa position de couverture (7). »

    L’Allemagne ouvrit le conflit général, le 1er septembre 1939, en l’absence de l’Entente qui avait, en septembre 1914, sauvé la France de l’invasion. L’historien Michael Carley incrimine la politique d’apaisement née de « la peur de la victoire contre le fascisme » des gouvernements britanniques et français, effrayés que le rôle dirigeant promis à l’URSS dans une guerre contre l’Allemagne n’étendît son système à tous les belligérants : l’« anticommunisme », décisif à chaque phase-clé depuis 1934-1935, fut donc « une cause importante de la Seconde Guerre mondiale (8) ».

    Le 17 septembre, l’URSS, inquiète de l’avance allemande en Pologne, proclama sa neutralité dans le conflit, non sans occuper la Galicie orientale. Elle exigea en septembre-octobre des « garanties » des pays baltes, « occupation “déguisée”, accueillie avec résignation (9) » par Londres, que le Reich inquiétait désormais autant que « la poussée russe en Europe ». Et, ayant demandé – en vain – à Helsinki, alliée de Berlin, une rectification de frontière (contre compensation), elle entra en guerre contre la Finlande et fit face à une sérieuse résistance. La propagande occidentale plaignit la petite victime et exalta sa vaillance. Weygand et Daladier planifièrent – « rêve », puis « délire », selon l’historien Jean-Baptiste Duroselle – une guerre contre l’URSS dans le Grand Nord, puis dans le Caucase. Mais Londres applaudit le compromis finno-soviétique du 12 mars 1940, ainsi que la nouvelle avance de l’Armée rouge qui suivit l’effondrement français (occupation à la mi-juin 1940 des pays baltes, fin juin de la Bessarabie-Bucovine du Nord). Après quoi elle envoya à Moscou Stafford Cripps, seul soviétophile de l’establishment : Londres préférait désormais une avance soviétique en Baltique à une allemande.

    imagesAprès des décennies de polémiques, les archives soviétiques ont confirmé qu’environ 5.000 officiers polonais, dont les cadavres furent découverts par les Allemands en 1943 à Katyn (près de Smolensk), avaient bien été exécutés en avril 1940 sur ordre de Moscou. Féroces avec les Polonais, les Soviétiques sauvèrent plus d’un million de juifs des zones réannexées et en organisèrent l’évacuation prioritaire en juin 1941 (10).

    Cette période, qui va du 23 août 1939 au 22 juin 1941, fait l’objet d’un autre débat, qui concerne la mise en œuvre par Staline du pacte germano-soviétique. Certains spécialistes soulignent, par exemple, la fourniture de matières premières soviétiques à l’Allemagne nazie, le changement de stratégie imposé à l’été 1940 au Komintern et aux partis communistes invités à dénoncer la « guerre impérialiste », etc. Les historiens cités ici minorent, voire contestent cette interprétation (11). Notons que les États-Unis – même après leur entrée en guerre contre Hitler en décembre 1941 – et la France, officiellement belligérante depuis le 3 septembre 1939, assurèrent au Reich d’abondantes livraisons industrielles (12).

    En crise depuis juin 1940, les rapports germano-soviétiques frôlèrent la rupture en novembre. « Entre 1939 et 1941, l’URSS avait considérablement développé ses armements terrestres et aériens et massé de 100 à 300 divisions (soit de 2 à 5 millions d’hommes) le long ou près de ses frontières occidentales (13). » Le 22 juin 1941, le Reich lança l’assaut annoncé par l’entassement de ses troupes en Roumanie. Alexander Werth parle d’un « effondrement militaire de 1941 », auquel aurait succédé (en 1942-1943) « un sursaut du régime et de la société ».

    Mais, le 16 juillet, le général Doyen annonçait à Pétain, à Vichy, la mort du « Blitzkrieg » : « Si le IIIe Reich remporte en Russie des succès stratégiques certains, le tour pris par les opérations ne répond pas néanmoins à l’idée que s’étaient faite ses dirigeants. Ceux-ci n’avaient pas prévu une résistance aussi farouche du soldat russe, un fanatisme aussi passionné de la population, une guérilla aussi épuisante sur les arrières, des pertes aussi sérieuses, un vide aussi complet devant l’envahisseur, des difficultés aussi considérables de ravitaillement et de communications. (...) Sans souci de sa nourriture de demain, le Russe incendie au lance-flammes ses récoltes, fait sauter ses villages, détruit son matériel roulant, sabote ses exploitations (14). »

    Le Vatican, meilleur réseau de renseignement mondial, s’alarma d’ailleurs, début septembre 1941, des difficultés « des Allemands » et d’une issue « telle que Staline serait appelé à organiser la paix de concert avec Churchill et Roosevelt » : il situa donc « le tournant de la guerre » avant l’arrêt de la Wehrmacht devant Moscou (fin octobre) et bien avant Stalingrad. Fut ainsi confirmé dès l’invasion le jugement que portait l’attaché militaire français à Moscou Auguste-Antoine Palasse depuis 1938 sur la puissance militaire soviétique inentamée, selon lui, par les purges qui avaient suivi le procès et l’exécution du maréchal Mikhaïl Toukhatchevski et du haut état-major de l’Armée rouge, en juin 1937 (15).

    L’Armée rouge, écrivait-il, se renforçait et développait un « patriotisme » inouï : le statut de l’armée, la formation militaire et une propagande efficace « mainten[aient] tendues les énergies du pays, et lui donne[aient] l’orgueil des exploits accomplis par les siens (...) et la confiance inébranlable dans [s]a force défensive ». Palasse avait relevé, depuis août 1938, les défaites nippones dans les affrontements à la frontière URSS-Chine-Corée. La qualité de l’Armée rouge ainsi attestée servit de leçon : à la fureur de Hitler, le Japon signa à Moscou, le 13 avril 1941, un « pacte de neutralité » libérant l’URSS de son obsession – depuis l’attaque contre la Mandchourie (1931) puis toute la Chine (1937) – d’une guerre sur deux fronts. Après avoir plié, pendant de longs mois, sous l’assaut de la formidable machine de guerre nazie, l’Armée rouge allait à nouveau pouvoir passer à l’offensive.

    Si, en 1917-1918, le Reich fut défait à l’Ouest, et surtout par l’armée française, de 1943 à 1945, il le fut à l’Est et par l’Armée rouge. Pour soulager celle-ci, Staline réclamait, depuis août-septembre 1941, un « second front » (envoi de divisions alliées en URSS ou débarquement sur les côtes françaises). Il dut se contenter des louanges du premier ministre britannique Winston Churchill, bientôt suivi du président américain Franklin D. Roosevelt, sur « l’héroïsme des forces combattantes soviétiques » et d’un « prêt-bail » américain (remboursable après-guerre), qu’un historien soviétique a évalué à 5 milliards de roubles, soit 4 % du revenu national en 1941-1945. Le refus de ce second front et la mise à l’écart de l’URSS des relations interalliées (malgré sa présence au sommet de Téhéran, en novembre 1943) ravivèrent sa hantise du retour au « cordon sanitaire » et aux « mains libres à l’Est ».

    La question des rapports de forces en Europe s’aiguisa quand la capitulation du général Friedrich von Paulus à Stalingrad, le 2 février 1943, mit à l’ordre du jour la paix future. Washington comptant sur son hégémonie financière pour échapper aux normes militaires du règlement des conflits, Franklin D. Roosevelt refusait de négocier sur les « buts de guerre » présentés à Winston Churchill par Joseph Staline en juillet 1941 (retour aux frontières européennes de l’ancien empire atteintes en 1939-1940) : une sphère d’influence soviétique limiterait l’américaine ; le financier Averell Harriman, ambassadeur à Moscou, pensait en 1944 que l’appât d’une aide économique à l’URSS ruinée « éviterait le développement d’une sphère d’influence (...) soviétique sur l’Europe orientale et les Balkans ».

    Mais il fallut compter avec Stalingrad, où s’étaient affrontés depuis juillet 1942 « deux armées de plus d’un million d’hommes ». La soviétique gagna cette « bataille acharnée » – suivie au jour le jour par l’Europe occupée – « dépassa[n]t en violence toutes celles de la première guerre mondiale (...) pour chaque maison, chaque château d’eau, chaque cave, chaque morceau de ruine ». Sa victoire « mit l’URSS sur la voie de la puissance mondiale », comme celle « de Poltava en 1709 [contre la Suède] avait transformé la Russie en puissance européenne ».

    Pacte-germanosoviet-HumaLa véritable ouverture du « second front » traîna jusqu’en juin 1944, période à laquelle l’avance de l’Armée rouge – au-delà des frontières soviétiques de juillet 1940 – exigea la répartition des sphères d’influence. La conférence de Yalta, en février 1945, sommet des acquis de l’URSS, belligérant décisif, ne résulta pas de la ruse de Staline spoliant la Pologne martyre contre un Churchill impuissant et un Roosevelt mourant, mais d’un rapport de forces militaires.

    Ce dernier bascula alors dans la course-poursuite négociée de reddition de la Wehrmacht « aux armées anglo-américaines et de report des forces à l’Est » : fin mars, « 26 divisions allemandes demeuraient sur le front occidental (...) contre 170 divisions sur le front de l’Est (16) », où les combats firent rage jusqu’au bout. En mars-avril 1945, l’opération Sunrise ulcéra Moscou : le chef de l’Office of Strategic Services (ancêtre de la CIA) à Berne, le financier Allen Dulles, y négocia avec le général SS Karl Wolff, chef de l’état-major personnel de Himmler, responsable de l’assassinat de 300 000 juifs, la capitulation de l’armée Kesselring en Italie. Mais il était politiquement exclu que Berlin revînt aux Occidentaux : du 25 avril au 3 mai, cette bataille tua encore 300 000 soldats soviétiques. Soit l’équivalent des pertes américaines totales (292 000), « militaires uniquement », des fronts européen et japonais de décembre 1941 à août 1945 (17).

    Selon Jean-Jacques Becker, « mis à part qu’elle s’est déployée sur des espaces bien plus vastes, mis à part le coût extravagant des méthodes de combat surannées de l’armée soviétique, sur un plan strictement militaire, la Seconde Guerre a été plutôt moins violente que la première (18) ». C’est oublier que la seule URSS a perdu la moitié des victimes de l’ensemble du conflit de 1939-1945, du fait notamment de la guerre d’extermination que le IIIe Reich avait planifiée pour y liquider, outre la totalité des juifs, de 30 à 50 millions de Slaves (19). La Wehrmacht, fief pangermaniste aisément nazifié, tenant « les Russes [pour] des « asiates » dignes du mépris le plus absolu », en fut l’artisan essentiel : sa sauvagerie antislave, antisémite et anti-bolchévique, décrite au procès de Nuremberg (1945-1946), mais longtemps tue à l’Ouest et récemment rappelée en Allemagne par des expositions itinérantes (20), priva l’URSS des lois de la guerre (conventions de La Haye de 1907).

    En témoignent ses ordres : décret dit « du commissaire » du 8 juin 1941 prescrivant l’exécution des commissaires politiques communistes intégrés à l’Armée rouge ; ordre de « ne pas faire de prisonniers » qui causa l’exécution sur le champ de bataille, combats terminés, de 600 000 prisonniers de guerre, étendu en juillet aux « civils ennemis » ; ordre Reichenau d’« extermination définitive du système judéo-bolchévique », etc. (21). Ainsi 3,3 millions de prisonniers de guerre, soit plus des deux tiers du total, subirent en 1941-1942 la « mort programmée » par la famine et la soif (80 %), le typhus, le travail-esclave. Des prisonniers « communistes fanatiques » livrés à la SS furent les cobayes du premier gazage au Zyklon B d’Auschwitz, en décembre 1941.

    La Wehrmacht fut avec les SS et la police allemande un agent actif de la destruction des civils, juifs et non-juifs. Elle aida les Einsatzgruppen SS chargés des « opérations mobiles de tueries » (Raul Hilberg), comme celle perpétrée par le groupe C dans le ravin de Babi Yar, fin septembre 1941, dix jours après l’entrée de ses troupes à Kiev (près de 34 000 morts) : un des innombrables massacres perpétrés, avec des « auxiliaires » polonais, baltes (lettons et lituaniens) et ukrainiens, décrits par le poignant Livre noir d’Ilya Ehrenburg et Vassili Grossman (22).

    Slaves et juifs (1,1 million sur 3,3) périrent dans des milliers d’Oradour-sur-Glane ainsi que dans les camps. Les neuf cents jours de siège de Leningrad (juillet 1941-janvier 1943) tuèrent 1 million d’habitants sur 2,5, dont « plus de 600 000 » durant la famine de l’hiver 1941-1942. Au total, « 1 700 villes, 70 000 villages et 32 000 entreprises industrielles furent rasés ». Un million d’Ostarbeiter (travailleurs de l’Est) déportés vers l’Ouest furent épuisés ou anéantis par le travail et les sévices des SS et des kapos dans les kommandos des camps de concentration, mines et usines des Konzerne et des filiales de groupes étrangers, tel Ford, fabricant des camions 3 tonnes du front de l’Est.

    Le 8 mai 1945, l’URSS exsangue avait déjà perdu le bénéfice de la « Grande Alliance » qu’avait imposée aux Anglo-Américains l’énorme contribution de son peuple, sous les armes ou non, à leur victoire. Le containment de la guerre froide, sous l’égide de Washington, pouvait renouer avec le cordon sanitaire, première guerre froide que Londres et Paris avaient dirigée de 1919 à 1939.

    Annie Lacroix-Riz.

    Professeur d’histoire contemporaine, université Paris-VII, auteure des essais Le Vatican, l’Europe et le Reich 1914-1944 et Le Choix de la défaite : les élites françaises dans les années 1930, Armand Colin, Paris, 1996 et 2006.

    NOTES

    (1) « 1947-1948. Du Kominform au “coup de Prague”, l’Occident eut-il peur des Soviets et du communisme ? », Historiens et géographes (HG) n° 324, août-septembre 1989, pp. 219-243.

    (2) Diana Pinto, « L’Amérique dans les livres d’histoire et de géographie des classes terminales françaises », HG, n° 303, mars 1985, pp. 611-620 ; Geoffrey Roberts, The Soviet Union and the Origins of the Second World War, 1933-1941, Saint Martin’s Press, New York, 1995, introduction.

    (3) Lire aussi Geoffrey Roberts, op. cit., p. 95-105, et Gabriel Gorodetsky, « Les dessous du pacte germano-soviétique », Le Monde diplomatique, juillet 1997.

    (4) Sauf indication, les sources citées ici se trouvent dans les archives du ministère français des affaires étrangères ou de l’armée de terre (SHAT) et les archives publiées allemandes, britanniques et américaines. Quant aux nombreux livres, souvent peu connus en France, sur lesquels s’appuie cet article, le lecteur en trouvera une large bibliographie sur le site.

    (5) NDLR : Comme de nombreuses « marches », la Galicie est passée, à travers l’histoire, entre les mains russes, mongoles, polonaises, lituaniennes, autrichiennes et, à nouveau, russes et polonaises. En 1919, lord Curzon avait attribué la Galicie orientale à la Russie (ligne Curzon).

    (6) Winston Churchill, Mémoires, vol. I, The Gathering Storm, Houghton Mifflin Company, Boston, 1948, p. 346.

    (7) Lettre à Guy de la Chambre, ministre de l’air, Moscou, 29 août 1939 (SHAT).

    (8) Michael J. Carley, 1939, The Alliance That Never Was and the Coming of World War 2, Ivan R. Dee, Chicago, 2000, pp. 256-257.

    (9) Lettre 771 de Charles Corbin, Londres, 28 octobre 1939, archives du Quai d’Orsay (MAE).

    (10) Dov Levin, The lesser of two evils : Eastern European Jewry under Soviet rule, 1939-1941, The Jewish Publications Society, Philadelphia-Jérusalem, 1995.

    (11) Lire notamment les ouvrages déjà cités de Geoffrey Roberts et Gabriel Gorodetsky mais aussi Bernhard H. Bayerlin et al., Moscou-Paris-Berlin, 1939-1941, Taillandier, Paris, 2003. La communiste libertaire Margarete Buber-Neumann a accusé, dans ses Mémoires, le régime soviétique d’avoir livré des antifascistes allemands à la Gestapo.

    (12) Charles Higham, Trading With the Enemy 1933-1949, Delacorte Press, New York, 1983 et Industriels et banquiers français sous l’Occupation, Armand Colin, Paris, 1999.

    (13) Geoffrey Roberts, op. cit., pp. 122-134 et 139.

    (14) La Délégation française auprès de la commission allemande d’armistice de Wiesbaden, 1940-1941, Imprimerie nationale, Paris, vol. 4, pp. 648-649.

    (15) NDLR. Ces purges sont considérées comme ayant considérablement affaibli l’Armée rouge.

    (16) Gabriel Kolko, The Politics of War, Random House, New York, 1969, chap. 13-14.

    (17) Pieter Lagrou, dans Stéphane Audoin-Rouzeau et al., dir., La Violence de guerre 1914-1945, Complexe, Bruxelles, 2002, p. 322.

    (18) Ibid., p. 333.

    (19) Götz Aly et Susanne Heim, Vordenker der Vernichtung, Hoffmann und Campe, Hambourg, 1991, résumé par Dominique Vidal, Les historiens allemands relisent la Shoah, Complexe, Bruxelles, 2002, pp. 63-100.

    (20) Edouard Husson, Comprendre Hitler et la Shoah, PUF, Paris, 2000, p. 239-253.

    (21) Omer Bartov, German Troops, MacMillan, Londres, 1985, L’Armée d’Hitler, Hachette Pluriel, Paris, 1999 et Tom Bower, Blind Eye to Murder, André Deutsch, Londres, 1981.

    (22) Actes Sud, Arles, 1995.

    LT-24-8-1939-axe-3

    Lire aussi (de la même auteure) :


    La Pologne dans la stratégie extérieure de la France (octobre 1938 - août 1939)


    Annie LACROIX-RIZ - communication au colloque de Varsovie sur la campagne de Pologne, 16-17 octobre 2009.

    Dans l’année précédant la Deuxième Guerre mondiale, la France dirigeante, civile et militaire, dressa une fois de plus la Pologne en pivot d’une « alliance de revers » constituée depuis 1921 des petits États d’Europe orientale qui devaient tout ou partie de leurs frontières à sa victoire de 1918. Ce dispositif contre les tentations de revanche du Reich, complété d’une Petite Entente tchéco-roumano-yougoslave officiellement dressée contre l’ancien empire austro-hongrois, avait été fragilisé d’emblée par l’exclusion de la Russie, seul pays décisif dans une guerre sur deux fronts : « La France n’aurait pas eu la moindre chance de survie en 1914, s’il n’y avait pas eu de front oriental », rappela le sous-secrétaire d’État permanent du Foreign Office, Robert Vansittart, en mars 1939 (1) ; la question se posait encore en ces termes, à l’heure où la quasi-totalité des obstacles à l’expansion allemande étaient tombés.

    Le « front oriental » complet, incluant l’URSS, avait été esquissé en 1934 par Louis Barthou, que Varsovie détesta, pour ce motif, aussi cordialement que Berlin. Il fut enterré avec lui, le 9 octobre de la même année, malgré la fallacieuse signature par Laval, successeur de Barthou, du pacte franco-soviétique le 2 mai 1935. La France, dont le secrétaire général du Quai d’Orsay, Alexis Léger, avait rédigé ce « chef d’œuvre du galimatias », l’avait ensuite soigneusement laissé dans cet état. (2) Elle avait depuis « l’assassinat de Marseille » définitivement contraint la Petite Entente, déjà très mal en point avant 1933, à se taire sur tout ce qui fâchait, surtout les plans de conquête allemands à l’Ouest et à l’Est. Les États orientaux avaient définitivement compris le 7 mars 1936 à quel sort leur alliée française promettait leurs frontières en laissant tranquillement le Reich remilitariser la Rhénanie qui menaçait directement les siennes. L’« alliance » fut réduite en cendres par le démantèlement à la conférence de Munich, le 29 septembre 1938, de la Tchécoslovaquie (prélude à sa liquidation du 15 mars 1939) comme en prit aussitôt acte un des principaux artisans français de l’assassinat, André François-Poncet, ambassadeur à Berlin choisi (en septembre 1931) par le Comité des Forges : « La Tchécoslovaquie [,…] morte au point de vue militaire [,…] ne présente plus pour nous que la valeur d’un Luxembourg oriental qui risque de devenir un satellite allemand ». (3)

    Munich 1938De ces décombres les dirigeants français, militaires en tête, firent surgir, ad usum populi Gallici, la Pologne comme protectrice suprême contre un adversaire d’ailleurs peu alarmant puisqu’ils faisaient mine de croire à ses excellentes intentions à l’Ouest. Ils reprirent l’argument polonais, puissante arme tactique initiale contre le pacte franco-soviétique, quand ils s’employèrent, aux côtés de Londres, à ruiner les chances ultimes du renouvellement de la Triple Entente. Les rapports étayés du Deuxième Bureau établissaient l’extrême faiblesse, en tous domaines, militaire inclus, de la Pologne et son alignement définitif sur Berlin depuis l’automne 1933, mais le haut État-major ne tarissait pas d’éloges. Il n’avait depuis 1935, comme le colonel Gauché, chef du Deuxième Bureau, qui adorait transformer le sens des rapports de ses services en leur strict contraire, cessé de tirer de la comparaison entre deux appuis militaires éventuels cette « conclusion » : « pour la France, l’alliance polonaise est incompatible avec l’alliance russe, il faut choisir ». (4)

    Cette image publique flatteuse sera confrontée à la réalité de la politique extérieure polonaise et des rapports franco-polonais à la fin des années 1930. L’écran de fumée des « garanties » françaises (et anglaises) du territoire polonais sera opposé aux pratiques des Apaiseurs français entre la liquidation initiale de la Tchécoslovaquie et l’assaut allemand contre un État né de la victoire française.

    I. PARIS ET L’ORIENTATION GERMANOPHILE ET SLAVOPHOBE DE VARSOVIE

    La France avait minutieusement observé l’orientation germanophile, slavophobe et francophobe qu’incarnait le trio maître de Varsovie : le maréchal Pilsudski, que Paris n’avait érigé en immense héros qu’en raison de son rôle de champion du « cordon sanitaire », n’avait jamais « pardonn[é] à la France républicaine son alliance avec le Tsarisme » : « il n’a donc jamais aimé et il n’aime pas la France (5) ; le « prince Janusch Radziwill, un des propriétaires fonciers les plus importants non seulement de Pologne, mais de l’Europe entière », organiquement lié au Reich par sa famille et ses intérêts agraires et industriels, soutien décisif du coup d’État de Pilsudski, (6) « président de la Commission des affaires étrangères de la diète, est franchement francophobe et ne fait aucun effort pour le cacher » ; Josef Beck, ministre des Affaires étrangères de Pilsudski depuis 1932, son âme damnée « depuis le coup d’État de mai 1926 », « encore plus francophobe que le maréchal », (7) était indéboulonnable, pour des raisons tant allemandes qu’intérieures. Déjà « à la solde de l’Allemagne » avant de succéder au « maréchal » décédé en mai 1935 (le Deuxième Bureau français l’accusait en mars d’avoir « amassé dans les banques suisses une fortune dépassant 2 millions de francs suisses ») (8), il servait d’auxiliaire à ses basses œuvres « orientales ». Son action au sein de la SDN, que le Reich avait quittée avec fracas en octobre 1933, était irremplaçable : Beck n’allait donc jamais aux sessions de Genève sans due mission puis compte rendu d’exécution de mandat, à l’étape berlinoise de son retour à Varsovie, habitude connue du Deuxième Bureau. (9) À l’intérieur, l’inamovible président Ignacy Moscicki, de l’avis du Quai d’Orsay « une nullité absolue, une marionnette choisie par Pilsudski [après le coup d’État de 1926] pour lui servir de paravent », (10) n’avait rien à lui refuser : Beck le « tenait » en prélevant sur « les fonds secrets du ministère des Affaires étrangères » de quoi régler les énormes « dettes de jeu » de son fils, ministre de Pologne à Tokyo. (11) Le trio infernal était représenté par deux germanophiles aussi notoires, Josef Lipski à Berlin depuis juin 1933 et Lukasiewicz à Paris depuis juin 1936 après avoir quitté Moscou, qu’il haïssait au moins autant que ses chefs. (12)

    Varsovie avait fait grand cas des deux prétextes à son tournant extérieur : 1° la déclaration Hitler-Lipski » du 15 novembre 1933, « instrument diplomatique dont les services de la Wilhelmstrasse [avaient] rédig[é] le projet » (13) : c’est « “une petite chose” […,] un simple communiqué relatant une conversation », avait, pour une fois sincère, clamé l’espion allemand Friedrich Sieburg, un de ses truchements, devant l’ambassadeur de France à Varsovie Jules Laroche (14) ; 2° la « déclaration de non-agression et d’amitié », prétendu « traité germano-polonais » conclu pour dix ans par Neurath et Lipski et renouvelable, œuvre de Friedrich Gaus, directeur du département juridique de l’Auswärtiges Amt, qui en avait soigneusement éliminé tout ce qui eût pu ressembler à « une renonciation de la révision de Versailles ». (15) Dotée d’un chiffon de papier sur lequel convergent toutes les archives diplomatiques et militaires, la Pologne, en toute connaissance de cause, se targua d’avoir gagné le statut d’alliée du Reich et de grande puissance que lui contestait (indubitablement) son « alliée » française.

    Dès l’été 1933, Pilsudski glosa sur la non-priorité de « la révision des frontières de l’Est […] dans les préoccupations personnelles du Führer (16), avant de postuler l’indifférence au Drang nach Osten d’un Hitler plus autrichien que « prussien ». (17) Ce gros mensonge couvrait sa disposition à céder sur le corridor de Dantzig (18) et son ralliement à l’Anschluss, avéré dès 1932, quasi officiel en novembre 1933 (19) : soutien d’autant plus allègre que, les chancelleries le répétaient depuis les préparatifs des traités sanctionnant la défaite des empires centraux, le « rattachement » interdit aurait « inévitablement pour conséquence l’Anschluss des Allemands de Bohême » (20), première étape de la liquidation de la Tchécoslovaquie. Enfin, la Pologne s’associa au Reich dans l’action subversive quotidienne, dimension terroriste incluse, contre l’Ukraine soviétique que les deux pays avaient jusqu’alors conduite chacun pour soi. Cette collaboration n’empêcha pas Berlin de poursuivre en compagnie du Vatican naguère auxiliaire de Vienne dans cette mission, via le clergé et les groupes séparatistes uniates, son œuvre anti-polonaise en Galicie orientale : c’est à dire dans la partie de l’Ukraine que la France avait en 1920 remise aux chefs polonais du « cordon sanitaire ». (21)

    Ainsi Varsovie avait-elle dû affecter, entre autres multiples épisodes du feuilleton de l’aveuglement volontaire, d’ignorer que Berlin avait armé et financé les terroristes ukrainiens qui, sous la houlette de Bandera et Lebed, chefs de l’OUN, avaient assassiné le 15 juin 1934 son ministre de l’intérieur Bronisław Pieracki (22) : provocation et test de grande envergure, l’événement s’étant produit deux jours après que le ministre eut accueilli avec faste Göbbels dans la capitale, où Barthou l’avait précédé sans être « salué par aucun ministre polonais ». (23) Paris, aussi informé de la maîtrise allemande de « l’assassinat de Marseille », auquel celui de juin avait servi de répétition avec la complicité respective de Laval et de Beck, fit au moins aussi bien que Varsovie dans l’ignorance feinte. (24)

    La Pologne de Beck avait reçu du Reich, de l’avis de François-Poncet, symbole de la ligne française d’abdication baptisée Apaisement, l’ample mission de « disloquer, démembrer la Petite Entente, en exerçant une pesée principalement sur la Yougoslavie, arracher ces États à l’influence française, les écarter de la France, écarter par là même la France de l’Europe centrale, gagner enfin ceux-ci ou certains d’entre eux à l’idée qu’il f[allai]t dénoncer le principe de la sécurité collective et bouleverser la Société des Nations ». (25) Je ne retiendrai ici de cet ample programme, réalisé au-delà de toute espérance, que sa partie russe et tchécoslovaque, fort utile, malgré le mépris de Paris pour Varsovie, à une ligne française identique. La Pologne secondait d’autant mieux l’Allemagne que ses dirigeants haïssaient la Russie, à l’égard de laquelle « Pilsudski ne cachait jamais son aversion […], qu’elle fût rouge ou blanche, bolchévique ou tsariste ». (26) Cette haine à laquelle l’anti-bolchévisme avait donné de plaisants atours, non seulement ne gênait pas les dirigeants français, mais leur plaisait.

    photo3Ils avaient pour délégués à Varsovie des anticommunistes et antisoviétiques obsessionnels, détestant au surplus « les juifs de l’Est » toujours érigés en bolchéviques, Laroche et, depuis la fin mai 1935, Léon Noël, ancien directeur de la Sûreté générale de Laval et bientôt membre du conseil d’administration du Comité France-Allemagne. (27) Ils écoutaient donc avec complaisance les litanies anti-bolchéviques de leurs homologues polonais, des jeunes fascistes « à la section orientale du ministère des Affaires étrangères, […] très anti-russe », en passant par « la presse officieuse polonaise et […] la camarilla qui entour[ait] M. Beck ». Lequel « racont[ait] à qui [voulait] l’entendre que l’hitlérisme, constituant la meilleure barrière à opposer au potentiel révolutionnaire que constitu[ait] la Russie, [était] le meilleur garant de l’existence de la Pologne. » Léon Noël appréciait en 1936 le thème, riche en variations et appelé à resservir, des deux ennemis de la Pologne, l’allemand, plutôt salvateur, et le russe, le seul vrai : “L’Allemagne […] peut nous prendre une ou deux provinces, la Russie, elle, a le pouvoir de nous prendre tout, le territoire, les corps, les âmes.” ». (28)

    II. DE L’« ALLIANCE POLONAISE » DE MUNICH AUX PRÉPARATIFS DU « SECOND MUNICH »

    En octobre 1938, l’icône de l’anti-bolchévisme parisien Lukasiewicz, hôte des salons pronazis flagorné par les principaux ministres, s’émerveilla devant un agent du Quai d’Orsay de l’opération munichoise, qui avait épargné au Reich la guerre qu’il n’avait pas encore le pouvoir d’engager et valu à son pays une (brève) gratification. Il cogna sur sa cible favorite, sans oublier Barthou, voué aux gémonies jusque dans la tombe. Jamais la Pologne n’aurait souffert de s’unir à « la Russie, qu’elle soit blanche ou rouge. […] ce n’est que la débâcle de la Russie qui nous a permis de conquérir notre indépendance. […] Avec les bolchéviks, nous avons dû mener une guerre, et les dirigeants de Moscou n’ont jamais abandonné le rêve d’instaurer chez nous les Soviets. Vous voyez d’ici la parution (sic) en Russie blanche, en Ukraine, en Galicie orientale et même dans certaines villes industrielles polonaises, comme Lodz, avec ses 200 000 juifs, des soldats rouges en qualité de nos alliés ? Mais, le lendemain de leur arrivée, nous aurions eu des Soviets dans la moitié de la Pologne, et au lieu de combattre les Allemands, il nous aurait fallu combattre les bolchéviks, ou appeler les Allemands à notre aide. Pour la Pologne, les bolchéviks sont beaucoup plus dangereux que les Allemands, et Moscou que Berlin. Et quant à la valeur de l’Armée rouge, nous l’apprécions mieux que les Français. Elle est bonne pour faire de la propagande ou aider un soulèvement communiste, mais au premier choc avec une armée européenne elle sera brisée comme verre. Alors, pourquoi voulait-on nous embarquer à tout prix dans la galère communiste ? Si M. Barthou avait mieux connu l’histoire des relations polono-russes au cours des siècles et, en particulier, depuis le partage de la Pologne, il ne nous aurait jamais proposé de conclure un pacte d’assistance mutuelle avec les Soviets ; de même, ses successeurs ne nous auraient jamais demandé de laisser passer les troupes bolchéviques à travers notre territoire. Aucun gouvernement polonais ne consentirait à se prêter à une telle expérience qui menacerait notre pays d’une révolution communiste ». (29)

    Lukasiewicz triomphait d’autant plus que Berlin venait rétrocéder à Varsovie le territoire de Teschen, morceau silésien du gros territoire sudète remis à la conférence de Munich aux Allemands par les Franco-Anglais, qui s’étaient pour ce faire passés de l’avis des « Soviets ». Sur l’échelle des haines polonaises, Prague, sans répit maudite pour avoir « volé » Teschen (sur les instances du sidérurgiste français Eugène Schneider (30)), avait en effet grimpé aussi haut que Moscou. En août 1934, le nonce apostolique à Vienne Enrico Sibilia certifia connaître « un accord secret laissant les mains libres à l’Allemagne, non seulement contre l’Autriche, mais aussi contre la Tchécoslovaquie ; en échange de quoi l’Allemagne reconnaissait les revendications de la Pologne sur la Silésie tchécoslovaque et des parties de la Moravie septentrionale ». (31) Paris était, à l’été 1935, informé de l’« accord militaire […] en préparation entre l’Allemagne, la Pologne et la Hongrie » en vue d’« attaquer et se partager » la Tchécoslovaquie. (32) Depuis le printemps 1938, toutes les capitales, Paris, Londres et Berlin en tête, surenchérissaient dans le mépris, qualifiant Varsovie de « hyène » ou de « vautour attendant le morceau ». (33)

    La duplicité confinait au grandiose puisque, outre que ni Paris ni Londres n’avaient consulté Varsovie pour assassiner Prague, certains « Munichois » insistaient pour que « la hyène » tirât pourboire du forfait. L’attaché militaire français Félix Musse, aussi antirusse et anti-tchèque que Noël et l’équipe Beck, s’y employa le 21 septembre au motif de gagner la gratitude d’un pays si important : « après avoir tant cédé à l’Allemagne, nous refusons à la Pologne une satisfaction bien modeste » ; on ne saurait s’opposer aux « revendications polonaises » alors que « la Pologne […] peut être demain, un élément des plus importants pour la reconstruction de notre politique européenne. C’est une carte que nous ne devons pas laisser échapper ». (34) L’un des « quatre charcutiers de Munich » (35), Daladier, masqua le 26 septembre devant l’ambassadeur américain Bullitt sa contribution au dépècement imminent en accablant Varsovie : « il espérait vivre assez pour faire payer à la Pologne son attitude de rapace en proposant à la Tchécoslovaquie un nouveau partage de la Pologne » (36) (ce n’est pas à Prague qu’il le proposerait bientôt mais à Berlin). Londres, dont la participation à la crucifixion de la victime avait été aussi éminente, stigmatisa juste après « une puissance que son passé devrait rendre moins ardente à goûter les partages, et qui parai[ssai]t rechercher les champs de bataille surtout pour y achever les blessés ». (37)

    Pologne1939.jpgLe sursis polonais n’attendit même pas la mort de la Tchécoslovaquie. Outre que la fugace saisie de Teschen allait aggraver la surproduction minière et métallurgique et le déficit abyssal du commerce extérieur polonais (38), le Reich reprit, les Sudètes à peine avalées, son expansion ukrainienne dans la Ruthénie subcarpathique proclamée « autonome » et ailleurs, menaçant directement les frontières orientales de l’alliée prétendue. L’apparente « détente polono-soviétique » qui s’ensuivit n’imprima aucun « revirement [à] la politique polonaise ». (39) Ce n’était, affirma Léon Noël, qu’une astuce tactique de Beck et le « présage […d’] une prochaine tentative de rapprochement du côté de Berlin » sur des « questions » à négocier : « frontière de la Russie subcarpathique, questions dantzicoises, transit à travers le Corridor, juifs polonais du Reich, questions économiques et minoritaires ». (40)

    Bien qu’il n’y eût plus rien à négocier après le 15 mars 1939, la Pologne en ligne de mire directe du Reich présenta encore durant quelques mois pour les dirigeants français le même intérêt tactique que naguère. Moscou, qui était vouée au néant diplomatique depuis Munich, demanda en effet au lendemain de l’invasion de la Bohême-Moravie qu’eût enfin lieu la concertation entre toutes les cibles du Reich, tant à l’Ouest qu’à l’Est. Paris relança donc le mythe public de la magnifique alliée militaire polonaise, si supérieure à l’Armée rouge inepte, tout en se répandant en privé sur l’épave que la Wehrmacht balaierait en quelques jours. Représentatif de cette ligne inavouable, Pierre Taittinger, champion d’origine du « cordon sanitaire » (« un des promoteurs du groupe franco-polonais de la Chambre en 1920 »), ressortit le paravent. Le 20 avril, retour d’un séjour polonais (de mars), il déclara à un banquet parisien du « Cercle républicain national » : « l’appui de la Pologne, dont les avions peuvent atteindre Berlin en moins d’une heure, nous serait autrement précieux que celui de l’URSS en cas de conflit avec l’Allemagne ». (41) Le 6 septembre, Pologne déjà écrasée, offrant à Daladier ses services politiques, Taittinger lui rapporta que « le chef d’état-major de l’armée polonaise » [Waclaw Stachiewicz] lui avait en mars « déclaré qu’en dépit de la supériorité considérable de moyens de l’Allemagne, il pensait pouvoir tenir, le cas échéant, plus d’un mois. […] Les autorités françaises que j’ai consultées à l’époque, tant au ministère des Affaires étrangères à Paris (M. Bressy) que nos autorités diplomatiques à Varsovie, déclaraient que huit jours, ce serait déjà beau ». (42)

    La Pologne rejoignit donc à nouveau, de mars à août 1939, l’Angleterre comme leurre contre l’alliance de revers : l’alliance militaire anglaise, imaginaire, avait toujours été présentée à l’opinion publique comme le recours suprême, supérieur à tout autre, le soviétique surtout. Après avoir « garanti » en mars-avril 1939 les frontières de la Pologne, qui ne leur avait rien demandé, Français et Anglais admirent lors des préparatifs de la mission Drax-Doumenc des 11-24 août 1939 à Moscou (exclusivement destinée à faire endosser aux « Russes » la responsabilité du fiasco) qu’ils ne consentiraient à Varsovie aucun secours, ni militaire ni économique. Moscou, traitée en « valet de ferme » selon la formule de Jdanov dans La Pravda du 29 juin (43), devrait, privée d’alliance défensive avec Paris et Londres, tout assurer aux Polonais : aide économique et militaire, avec maintien du veto contre l’entrée de son armée en terre polonaise, que les Occidentaux imputeraient aux seuls Polonais souverains.

    Le rideau de l’alliance militaire anglo-polonaise fut déchiré le 17 août devant les hôtes soviétiques de haut rang des obscurs délégués militaires français (Doumenc) et anglais (Drax), Vorochilov, commissaire du Peuple à la Guerre, et Chapochnikov, chef d’état-major général. Le général Heywood avoua « des effectifs […] dérisoires » tout en les multipliant par trois : il annonça que les Anglais mettraient six divisions sur pied en France « dans les premiers mois de guerre » alors qu’ils n’en avaient jamais promis plus d’un maximum de deux depuis 1936. Après quoi, devant Vorochilov interloqué de cet aveu partiel, « Drax, après avoir longuement toussoté, finit par présenter un argument qu’il avait déjà soumis à la délégation française pendant la [longue] traversée et qu’on l’avait supplié de ne jamais utiliser : “N’oubliez pas, dit-il, que la Pologne, si elle est seule, peut être écrasée en deux semaines…” ». « Cela voulait dire, commenta l’honnête Doumenc, que la Russie ne pourrait jamais venir à temps à l’aide de la Pologne et qu’elle se trouverait seule en face d’une armée victorieuse. »

    Londres et Paris non seulement se gardèrent de le raconter à leurs opinions respectives, mais se retranchèrent derrière le veto polonais renouvelé contre l’aide de l’Armée rouge : Wehrmacht à ses portes, Varsovie entonnait à nouveau (ainsi, le 19 août) le grand refrain de Pilsudski « Avec les Allemands nous risquons de perdre notre liberté, avec les Russes, nous perdons notre âme ». Du veto de la Pologne, incontestable, ses nouveaux « alliés » se moquaient autant que, un an plus tôt, de l’avis de la Tchécoslovaquie sur son droit à l’existence, État-major français au premier chef. Quand celui-ci avait, au printemps 1935, fait semblant d’envisager une alliance avec l’URSS et esquissé en conséquence des plans de guerre (denrée disparue en 1939), il avait retenu trois hypothèses : Pologne 1° « alliée de la France contre l’Allemagne », 2° « neutre », 3° « alliée de l’Allemagne ». Seule, avait-il conclu, la troisième hypothèse avait valeur militaire, car c’est d’une Pologne ennemie, dont on n’aurait pas à requérir l’avis, qu’on utiliserait au mieux la totalité du territoire. (44)

    En août 1939, le trio Daladier-Bonnet-Alexis Léger, efficacement relayé à Varsovie par le tandem Léon Noël-Félix Musse, alla même dans le sabotage de « l’alliance de la dernière chance » (Michael Carley) plus loin que les Anglais. Quand le capitaine Beaufre, envoyé là-bas en (fausse) mission le 19 pour quérir l’adhésion polonaise à une demande d’aide de l’Armée rouge, rappela à celui-ci que « les évaluations britanniques relatives à la résistance polonaise donnaient à celle-ci un délai de 15 jours au maximum avant l’effondrement complet », il provoqua l’indignation du « général Musse et [de] ses adjoints » : ceux-ci « s’élevèrent violemment contre cette appréciation portée sur la résistance polonaise, disant qu’il était absurde de sous-estimer une armée excellente, bien équipée, et dont les conceptions tactiques avaient fait de grands progrès ». La noirceur des intrigues, sur ce point et sur bien d’autres, de l’ambassadeur et de l’attaché militaire contre l’alliance tripartite ulcéra le général Doumenc, honteux du rôle que ses chefs civils et militaires lui avaient depuis juillet fait jouer à Paris puis à Moscou. (45)

    big-garde strasbourgLe 23 août permit, comme prévu, d’imputer aux Soviets l’échec final, stigmate qui résiste à toutes les ouvertures d’archives et à la production scientifique consécutive. (46) Varsovie porta sa part d’un crime aussi franco-anglais que polonais, et Daladier, un de ses maîtres d’œuvre, mima devant Bullitt la fureur contre « les Polonais coupables de folie criminelle pour n’avoir pas répondu à la proposition des Russes d’une assistance active à la Pologne ». (47) Ce tapage couvrit une autre duperie de « l’opinion française dindonnée par les campagnes “idéologiques” » inépuisables de l’ère munichoise. (48) Les dirigeants français, au moment même où ils avaient ranimé la momie de l’« alliée » polonaise, avaient soutenu la tentative de « second Munich » : ils avaient en avril-mai 1939 brûlé d’enthousiasme pour la « conférence de la paix […] inspirée par Mussolini » et lancée par Pie XII via son nonce à Paris, Valerio Valeri, visant à arracher à Varsovie l’abandon de Dantzig et du corridor. L’affaire, marquée par le célèbre article de Marcel Déat Mourir pour Dantzig ? dans L’Œuvre du 4 mai, s’était enlisée vu la réticence britannique à répéter l’opération de septembre 1938. (49)

    Les hérauts français des mains libres du Reich à l’Est ne renoncèrent pas pour autant à obtenir de Varsovie, comme naguère de Prague, le consentement à son propre dépècement. Lukasiewicz, roi de la germanophilie mondaine, avait été brusquement détrôné par la nouvelle étape du Drang nach Osten : il fut pendant l’été abandonné de tous, notamment par le ministre des Affaires étrangères Georges Bonnet, qui le priva de ses visites quotidiennes. (50) Les mêmes « pacifistes » recommencèrent après le 23 août, avec le surcroît d’audace qu’autorisait un paravent antisoviétique et anticommuniste inoxydable. Bonnet prit avec son imposante cohorte « pacifiste » l’initiative de « négociations » avec l’Axe sur la Pologne dont le Reich n’avait plus aucun besoin : incapable d’attaquer avec succès la Tchécoslovaquie en 1938, l’armée allemande était au 1er septembre 1939 en mesure de conquérir la Pologne sans quitus des Apaiseurs. La méthode des tractations alors repoussée par Berlin serait en revanche pratiquée pour préparer une débâcle aussi rapide et spectaculaire que celle de la Pologne, « grand port paralysé […] en 48 heures » (51), celle de la France. Les dirigeants polonais avaient certes activement œuvré à la destruction de la Pologne ; leurs anciens tuteurs, si méprisants qu’ils fussent pour « la camarilla » de Beck, feraient mieux encore au service de la Défaite française de mai (officiellement juin) 1940.

    Annie Lacroix-Riz

    J’explicite toutes les allusions de cette communication dans Le choix de la défaite : les élites françaises dans les années 1930, Paris, Armand Colin, nouvelle édition 2010, De Munich à Vichy, l’assassinat de la 3e République, 1938-1940, même éditeur, 2008, et Le Vatican, l’Europe et le Reich de la Première Guerre mondiale à la Guerre froide (1914-1955), même éditeur, édition 2007 (1996). Sauf exception, elles ne sont pas paginées, vu les contraintes éditoriales.

    (1) Michael Carley, 1939, the alliance that never was and the coming of World War 2, Chicago, Ivan R. Dee, 1999, p. 4, souligné dans le texte.

    (2) Citation, Jean-Baptiste Duroselle, Politique étrangère de la France, la décadence 1932-1939, Paris, Le Seuil, 1983, p. 142.

    (3) Renseignement cité, 12 avril, et « note sur l’évolution du problème tchécoslovaque », 10 octobre 1938, 7 N 3097, Service historique de l’armée de terre (SHAT).

    (4) Renseignement EMA 2e Bureau (DB), 6 février 1936, 7 N 3186, SHAT.

    (5) EMA DB Depas 177, H/19.1/8, 10 janvier 1934, 7 N 3024, SHAT.

    (6) EMA DB, Depas 866, 17 juin 1935, 7 N 3024, SHAT.

    (7) Note Europe, 8 mai 1935, URSS 1918-1940, 982, MAE et EMA Depas 177, H/19.1/8, 10 janvier 1934, 7 N 3024, SHAT.

    (8) EMA Depas 282, 4 mars 1935, 7 N 3024, SHAT.

    (9) Archives allemandes et françaises, Lacroix-Riz, Choix, p. 196-199, 225-227.

    (10) Note Europe centrale de la sous-direction SDN, 30 novembre 1937, SDN 1918-1940, 2171, MAE.

    (11) Les « nouvelles dettes de jeu » du fils Moscicki s’élevaient à « 200-250 000 zlotys », dépêche 12 de Léon Noël, Varsovie, 4 janvier 1936, SDN 1918-1940, 2168, MAE ; EMA DB, P/a 23863, 18 février 1936, 7 N 3024, SHAT.

    (12) Dépêche 32 de Laroche, Varsovie, 30 mai 1933, et télégramme 441-442 de Léon Noël, Varsovie, 8 juin 1936, SDN 1918-1940, 2163 et 2169, MAE.

    (13) Télégramme François-Poncet 2063-2065, Berlin, 18 novembre 1933, SDN 1918-1940, 2164, MAE.

    (14) Télégramme Laroche 728-36, Varsovie, 18 novembre 1933, SDN 1918-1940, 2164, MAE. Sur le « journaliste » Sieburg, index Choix et Munich.

    (15) « Déclaration », 26 janvier, mémorandums Gaus, Berlin, 16 et 22 janvier 1934, Documents on German Foreign Policy (DGFP), C, II, p. 364-367, 394-395 et 421-422.

    (16) Dépêche 252 de Laroche, Varsovie, 28 juin 1933, SDN 1918-1940, 2163, MAE.

    (17) « Il n’est pas prussien. Il n’en a pas la raideur. Il sort du peuple. “Il veut l’alliance (sic) [(sic) dans le texte] avec l’Autriche” », déclara-t-il le 24 novembre 1933 au général d’Arbonneau, l’attaché militaire français, télégramme 750-755 Laroche, Varsovie, même date, SDN 1918-1940, 2164, MAE.

    (18) SDN 1918-1940, à partir du vol. 2163, Pologne, dossier général, février-octobre 1933, MAE.

    (19) Télégramme 927 François-Poncet, Berlin, 16 mai 1933, SDN 1918-1940, 2163, et depuis les télégrammes 2053 du même, 16 novembre, et 746 de Laroche, Varsovie, 23 novembre 1933, SDN 1918-1940, 2164, MAE.

    (20) Dépêche Beaumarchais 397, Vienne, 25 novembre 1926, Autriche 1918-1940, 77, MAE.

    (21) Lacroix-Riz, Vatican, passim et index : Szepticky.

    (22) Sources inépuisables depuis le télégramme Laroche 556-7, Varsovie, 16 juin 1934, SDN, 2166, MAE (tous volumes Pologne jusqu’à 2169, février-juillet 1936), et surtout lettre 575 Léon Noël à Laval, Varsovie, 13 novembre 1935, Yougoslavie 1918-1940, 138, assassinat d’Alexandre Ier, 1934-30 décembre 1935, 19 décembre 1936, MAE ; EMA DB, renseignement Depas 882 « d’un informateur compétent et généralement bien renseigné », H/25.7/9, 23 juillet 1934, 7 N 3024, rapport des attachés militaires, 1928-1929, et 1933-1939, SHAT. Marian Wojciechowski, Die Polnisch-Deutschen Beziehungen 1933-1938, Leiden, Brill-Verlag, 1971, p. 241-242.

    (23) Berliner Börsenzeitung du 14 juin, « Bulletin périodique de la presse allemande » n° 438 du Quai d’Orsay (4 juin-1er juillet), 6-7 juillet 1934, F 7 13433, Allemagne 1934, Archives nationales (AN).

    (24) Laval, Choix, p. 207-208 ; Beck, EMA DB, Depas 116, 19 décembre 1934, 7 N 3024, SHAT.

    (25) Dépêche 937 François-Poncet, Berlin, 4 juin 1936, SDN 1918-1940, 2169, MAE.

    (26) Note Europe centrale de la sous-direction SDN, 30 novembre 1937, SDN 1918-1940, 2171, MAE.

    (27) Rapport Legat sur le CFA, 2 mai 1945, PJ 42, Brinon, archives de la Préfecture de police (APP).

    (28) Dépêche 179 de Léon Noël, Varsovie, 8 avril 1936, SDN 1918-1940, 2169, MAE.

    (29) Rapport Nac, Paris, 11 octobre 1938, SDN 1918-1940, vol. 2174, MAE.

    (30) Souhaitant l’unité du bassin charbonnier et métallurgique, le futur roi industriel et financier de la Tchécoslovaquie préférait le confier à Prague, plus sûre, Segal Paul H., The French State and French private investment in Czechoslovakia, 1918-1938 : a study of economic diplomacy, New York, Garland, 1987, p. 55-67.

    (31) Rapport Z1.110/Pol. d’Hoffinger, 27 août 1934, souligné dans le texte, traduction, 7 N 3024, SHAT. Sibilia, Vatican, index.

    (32) EMA DB, P/a, 22124, 22141, 8, 9 juillet, et Depas 1095, 29 septembre 1935, 7 N 3024, SHAT.

    (33) DGFP, D, II, p. 770-771, 849-850, 861-863, 915-918, etc.

    (34) Rapport Musse 98/S, 21 septembre 1938, 7 N 3107, SHAT.

    (35) Hénaff, 25e Congrès confédéral CGT, novembre 1938, p. 274.

    (36) Tél. 1124 Bullitt, Paris, 26 septembre 1938, Foreign Relations of the United States (FRUS) 1938, I, p. 668-669.

    (37) Dépêche 891 de l’ambassadeur Corbin, Londres, 10 octobre 1938, SDN 1918-1940, 2174, MAE.

    (38) Dépêche 131 de Triat, consul de France à Poznan, 21 octobre 1938, SDN 1918-1940, 2174, MAE.

    (39) Dépêche 942 d’Adrien Thierry, Bucarest, 7 décembre 1938, SDN 1918-1940, 2174, MAE.

    (40) Télégramme 1282 de Léon Noël, Varsovie, 8 décembre 1938, SDN 1918-1940, 2174, MAE.

    (41) RG, 17 mars, BA 1951, PRNS, 20 avril 1939, GA, T6, archives de la Préfecture de police (APP).

    (42) Lettre confidentielle et personnelle à Daladier, Saint André de Mareuil sur Lay (Vendée), 6 septembre 1939, 5 N 581, SHAT.

    (43) Dépêche 2309 de Palasse, Moscou, 5 juillet 1939, et article traduit, 7 N 3123, SHAT.

    (44) « Note sur l’appui qui pourrait éventuellement être demandé à l’URSS » jointe à la lettre 485 2/RMA de Maurin à Laval, 8 avril 1935, URSS 1930-1940, 928, MAE.

    (45) Rapport Doumenc (citations comprises), 7 N 3185, SHAT. Détails, Choix, p. 495-503, et Munich, p. 159-168 (archives françaises et britanniques).

    (46) Geoffrey Roberts, The unholy alliance : Stalin’s pact with Hitler, Londres, Tauris, 1989 ; The Soviet Union and the origins of the Second World War. Russo-German relations and the road to war, 1933-1941, New York, Saint Martin’s Press, 1995 ; Michael Carley, 1939 ; Lacroix-Riz, Choix et Munich.

    (47) Entretien avec Daladier et Léger, tél. 1543 Bullitt, Paris, 22 août, FRUS, 1939, I, p. 301-304.

    (48) Note État-major, anonyme, 15 septembre 1938, N 579, SHAT.

    (49) Tél. 897 Bullitt, Paris, 28 avril, FRUS, 1939, I, p. 179-182, depuis le 4 mai 1939, DBFP, 3, 5, p. 411 sq., Vatican, p. 382-384 (et Choix et Munich).

    (50) Rapport Guariglia, Paris, 12 juillet 1939, Documenti Diplomatici italiani, 8e série, XII, p. 413-414.

    (51) Stachiewicz à Musse, 2 ou 3 septembre 1939, cité au procès Pétain, 31 juillet 1945, F1 a 3310, AN.

    Lire aussi ici, TRÈS INTÉRESSANT : Un-autre-recit-des-accords-de-Munich.pdf

    ***************************************

    Pour lever le voile de calomnie jeté par l'historiographie bourgeoise sur cette période de l'histoire du mouvement communiste hexagonal, vous pouvez consulter ces petits articles très bien documentés de la Fondation Gabriel Péri :

    - Sur la période entre le Pacte et la défaite française : https://gabrielperi.fr/centenaire/les-mesures-contre-les-communistes-a-la-fin-de-la-iiie-republique/

    - Sur la période entre le début de l'Occupation et de la collaboration, et le lancement de l'offensive Barbarossa contre l'URSS : https://gabrielperi.fr/centenaire/le-pcf-de-lautomne-1940-au-printemps-1941/

    ... où l'on découvre un Parti certes pas engagé dans la lutte armée mais, en plus d'être actif sur les conditions de vie (alors effroyables, on s'en doute) des classes populaires, CLAIREMENT et DÈS LE DÉBUT anti-Vichy ("le gouvernement de Pétain-Laval s’appuyant sur les baïonnettes étrangères donne le répugnant spectacle d’un gouvernement de valets", novembre-décembre 1940) et opposé à l'occupation nazie ("notre pays est mis en coupe réglée, domestiqué pour le rendre soi-disant apte à prendre une toute petite place dans le 'Nouvel Ordre européen' qui serait l’expression de la victoire impérialiste de l’Allemagne", mêmes tracts), dénonçant l'antisémitisme "invention réactionnaire pour empêcher les travailleurs de s'unir contre leurs ennemis de classe" ; renvoyant, certes, dos à dos les kollabos comme "Doriot et Gitton, qui veulent que les Français mettent sac au dos pour faire la guerre à l'Angleterre au profit de l'Allemagne" et... "les agents de De Gaulle voulant faire tuer des Français pour aider l'Angleterre contre l'Allemagne", oui, ok mais bon, il faut voir qu'à l'époque De Gaulle c'était aussi un représentant de cette caste d'officiers réactionnaires et anticommunistes qui alors que les hordes nazies s'apprêtaient à déferler sur le pays, s'occupaient de réfléchir à... comment aider la Finlande fasciste contre l'URSS, à travers la fameuse expédition de Narvik ; bref.

    Et puis et puis : "Un changement radical de ligne politique est opéré à la mi-mai 1941, non sans difficultés, à la suite d’un télégramme de l’Internationale daté du 26 avril 1941 qui proclame que « la tâche essentielle actuelle est la lutte pour la libération nationale ». Le PCF publie un appel « Pour la formation d’un Front national de l’indépendance de la France ». La problématique frontiste, encouragée par l’Internationale dès janvier 1941, est élargie, mais surtout la libération nationale n’est plus subordonnée à la libération sociale et devient l’objectif premier"...

    La mi-mai soit plus d'un mois, le 26 avril soit presque deux mois... avant que "le 22 juin 1941, les Allemands envahissent l’Union soviétique, mettant fin à la situation née du pacte d’août 1939" : ici s'effondre donc complètement le mythe de communistes entrés en résistance armée (dans toute l'Europe) "seulement" et "en catastrophe" après une invasion nazie de l'URSS qui aurait "pris tout le monde par surprise" jusqu'à la haute direction soviétique et Staline lui-même.

    Au contraire, on voit bien que la "montée en puissance" de la tension pré-Barbarossa se faisait depuis de longs mois (au moins) et des deux côtés, aussi bien nazi-fasciste que de l'URSS puisque celle-ci, visiblement plus que totalement au courant, préparait elle-même ses "troupes" communistes dans tous les pays à lancer des luttes armées sur les arrières de la Wehrmacht.

    À se demander, presque, si cette directive du 26 avril 1941 de l'Internationale n'a pas poussé les Allemands à accélérer les préparatifs et le lancement de leur offensive !

    Tous les mythes bourgeois et petits-bourgeois gauchistes sont radicalement pulvérisés !


    4 commentaires



    Suivre le flux RSS des articles
    Suivre le flux RSS des commentaires