• maocVoici un texte polémique/critique d’un militant progressiste/marxiste marocain – Abdellatif Zeroual [nom d'un martyr du mouvement ML des années 1970, peut-être un pseudo...] est membre du Secrétariat national de la Voie démocratique, organisation ‘marxiste-léniniste’ assez fortement critiquée (comme révisio/opportuniste) par les camarades MLM de là-bas, et désormais assez proche de la 'gauche radicale' hexagonale (PCF/FdG, NPA surtout, LO etc.). Cependant, bien que bourré de références 'curieuses' voire... trotskystes [‘stalinisme’/’staliniens’ pour parler aussi bien des limites du marxisme-léninisme ‘kominternien’ que des dogmatiques qui n’ont toujours rien compris 70 ans après, ou du révisionnisme postérieur ‘à la Brejnev’ ; références idéologiques comme Poulantzas, Löwy, Daniel Bensaïd bien sûr, etc. ; mais enfin, de 'bonnes' références aussi comme l’organisation marxiste-léniniste Ilal Amam, Mariátegui, Gramsci…] et d'affirmations 'surprenantes' avec lesquelles nous ne pouvons être qu'en désaccord total ["En fait, le socialisme n’est nullement une nécessité historique mais un possible parmi d’autres"... !!!], ce texte est néanmoins d’un grand intérêt par rapport à la théorie des Centres et des Périphéries qui est la nôtre. Servir le Peuple a toujours affirmé, en effet, que l’universalité de la Guerre populaire consistait, dans le monde entier comme sur chaque km² de celui-ci, en un encerclement (politique, militaire, idéologique/culturel) du/des Centre(s) par la/les Périphérie(s), entendu non pas comme ‘substitut’ à la lutte des classes, mais comme sens de déploiement de celle-ci.

    Le capitalisme s’est déployé, depuis le Moyen-Âge jusqu’au siècle dernier, tout à fait logiquement depuis les ‘centres’, là où la concentration du Capital était la plus importante et avancée, en direction des territoires plus arriérés où les autres modes de production, en particulier l’’ennemi principal’ féodal, avaient leur siège. Il s’est déployé depuis villes vers les campagnes dans chaque province d’Europe et de la planète ; en Europe il s’est déployé (après la ‘fusion’ des pouvoirs politique -monarchique- et économique grand-bourgeois, entre le 13e et le 16e siècle) depuis le Nord-Ouest du continent vers le Sud et l’Est (la Russie par exemple, ou encore les Balkans et la Grèce, ou de très nombreuses régions d’Italie ou de la péninsule ibérique, étaient encore très arriérées et peu touchées par le capitalisme au moment de la Révolution d’Octobre 1917) ; et dans le monde, il s’est déployé depuis l’Europe occidentale, puis une ‘Triade’ Europe occidentale/côte Est de l’Amérique du Nord/Japon, vers le reste… Ainsi s’est déroulé le processus de négation de la féodalité (et des autres modes de production/organisations sociales archaïques) par le capitalisme.

    maoist naxal 20091026-eMais à présent, le processus de négation du capitalisme par le communisme va, selon tous les constats matériels, se déployer depuis les territoires, les régions, les pays touchés en dernier par le développement capitaliste, vers les Centres où, depuis des siècles, le pouvoir capitaliste (géo)politique, économique et culturel s’est concentré [1]. Cela est tout à fait logique si l’on prend, par exemple (‘au hasard’), la théorie de l’hégémonie de Gramsci : c’est bel et bien, forcément, dans les territoires et les populations touchés le plus récemment et (donc) superficiellement par le capitalisme, que l’hégémonie bourgeoise capitaliste, ‘coercitive’ (politico-militaire) comme intellectuelle/culturelle, va être la moins forte ; et donc, que le NIVEAU D’ANTAGONISME de la lutte de classe des exploité-e-s contre l’exploitation capitaliste (et, ici où là, ses ‘béquilles’ féodales, cléricales etc.) va être le plus élevé… Cela se constate aujourd’hui, chaque jour, en Inde, aux Philippines, dans les pays arabes et en Anatolie ‘turque’, en Amérique latine et même dans certaines régions d’Afrique,redblock italia et en Europe même lorsque l’on voit le niveau de conscience, de mobilisation et de lutte en Grèce, en Italie, en ‘Espagne’ et au Portugal, en Irlande et même dans les ‘pays de l’Est’ : telle est la valeur universelle de l’’encerclement des villes par les campagnes’ prôné par Mao.

    Cela est valable dans les pays de ce que l’on appelle communément le ‘tiers-monde’ (comme le Maroc), mais aussi à l’intérieur même des grands États impérialistes, dans les ‘campagnes’ de la Guerre populaire que sont essentiellement, en Europe, les NATIONS absorbées et niées par la construction de ces grands États, et les populations ‘ambassadrices’ du ‘tiers-monde’ dans les grands ghettos métropolitains (les ‘immigrés’ et leurs descendants) – en Amérique du Nord, ‘continent volé’, ce sont évidemment, d’abord et avant tout, les communautés ‘noires’ (afro-descendants), hispaniques et bien sûr primo-habitantes (‘Indiens’) qui forment les ‘périphéries intérieures’ où l’on trouve le plus haut degré de conscience, de mobilisation et de lutte révolutionnaire.

    big provence flagMais ATTENTION : comme nous l’avons dit, l’encerclement des Centres par les Périphéries ne ‘remplace’ pas la lutte des classes, il ne se ‘substitue’ pas aux termes de la grande contradiction motrice de notre époque qui sont le caractère (de plus en plus) social et international de la production (tendance au communisme) et l’appropriation privée et (de plus en plus) inégalitaire des moyens de production et du produit (capitalisme). Et le capitalisme (monopoliste, impérialiste, ‘mondialisé’) ne peut être nié que par un mode de production et une organisation sociale supérieure : le COMMUNISME. Il n’est pas question, en niant le capitalisme, de revenir à un ‘avant’ idéalisé, que serait la société califale au Maroc ou l’époque des comtes de Toulouse et des ducs d’Aquitaine pour nous Occitans ; il n’y a pas des Centres (ou un ‘Occident’) qui seraient organiquement mauvais, pures entreprises de domination, d’exploitation et de crime (aucune classe dominante n’a jamais pu régner par la seule contrainte, sans ‘contrepartie’ aux nuisances de sa domination), et des ‘Périphéries’ qui auraient été (avant leurs soumission et leur ‘corruption’) organiquement bonnes : elles ont pu être soumises précisément en raison de leurs défauts, des ARCHAÏSMES de leur organisation sociale. Il y a un mode de production (le capitalisme) qui, se déployant de ses Centres (de concentration du Capital et – donc – du pouvoir) vers les Périphéries, non sans casser des breizh gwenhadu komunourœufs, tout en étant et restant un système inégalitaire et d’exploitation du travail (donc en infligeant d’innombrables sévices à l’humanité), a été pour le processus historique humain une nécessaire et incontournable étape d’incontestables progrès ; mais qui a aujourd’hui épuisé son rôle positif historique et, pour permettre à l’humanité de ‘poursuivre son chemin’, doit maintenant disparaître, être renversé par un mouvement révolutionnaire se déployant depuis les Périphéries vers les Centres.

    Vouloir ‘revenir’ à une organisation sociale passée idéalisée comme ‘pure’, et ‘salie’ par la ‘modernité’ capitaliste, est de l’OBSCURANTISME, et l’obscurantisme finit TOUJOURS au service du fascisme et de la réaction la plus noire – comme l’on peut le voir en ce moment même, dans les pays arabes, avec le rôle des ‘salafistes’ idéalisant l’époque des ‘4 premiers califes’ successeurs du prophète Mohamed, au 7e siècle… Cela est d’une grande importance, aussi, pour nous qui faisons partie du Mouvement révolutionnaire de libération occitan, car combien de fois n’avons-nous pas entendu l’accusation de vouloir 'faire tourner la roue de l'Histoire à l'envers', de vouloir ‘revenir au Moyen-Âge’, aux ‘duchés féodaux’ etc. ? Tel est l’objet et l’intérêt de cet article (bien que d’idéologie ‘trotskysante’, donc ‘pas la nôtre’), que nous vous laissons maintenant lire...

    Source

    L’eurocentrisme inversé ou les pièges du culturalisme. Réponse à   إبن إدريس


    par Abdellatif Zeroual

     

    Je suis heureux de constater que le débat sur le mouvement du 20 février continue, enrichi qu’il est par d’autres contributions. Ainsi après deux points de vue réformiste puis radical, nous avons eu l’heureuse chance de connaître un autre point de vue aux relents culturalistes [1]. Pour résumer la critique de l’auteur envers moi et Benmoumen : la gauche a comme socle commun un eurocentrisme viscéral dont elle ne peut se détacher, conduisant en fait à un élitisme méprisant envers le peuple. En plus que ce constat est faux pour moi au moins (premier point), cette critique porte un projet obscurantiste (deuxième point) et une vision essentialiste du monde (troisième point) n’apportant aucune alternative réelle (quatrième point) au mouvement de lutte pour la démocratie au Maroc.

    Une vision caricaturale du marxisme

    Ibn Driss nous présente une version appauvrie du marxisme pour ensuite nous convaincre de son eurocentrisme congénital et consubstantiel. Pour cela, il nous présente d’abord un Marx viscéralement eurocentrique qui aurait légué ses tares à des marxistes dogmatiques [2]. Or il paraît que notre cher Ibn Driss n’a qu’une connaissance superficielle de son objet de critique. Nous essaierons d’y remédier en deux points :

    1- La compréhension de Marx des sociétés « non occidentales » n’a pas été figée [3]. Elle a évolué d’une croyance eurocentrique (largement partagée dans son siècle d’ailleurs, le 19ème siècle) dans le progrès à une vision non linéaire et anti-évolutionniste de l’histoire [4]. Ainsi, dans une lettre écrite en 1881 à une révolutionnaire russe (Vera Zassoulitch) [5] [NDLR : ici le texte original en français], Marx reconnaissait la possibilité du passage de la commune rurale russe au communisme sans passer par les « crises », les « conflits » et les « désastres » du développement du capitalisme en « Occident ». La commune russe serait donc le point de départ d’ « une évolution communiste ». Il exprime ainsi l’avis que son « esquisse historique de la genèse du capitalisme dans l’Europe occidentale » (dans le chapitre sur « L’Accumulation primitive » au premier livre du Capital) ne saurait être changée en « une théorie Che guevara dans une manifestation a Khenifrahistorico-philosophique de la marche générale, fatalement imposée à tous les peuples, quelles que soient les circonstances historiques où ils se trouvent placés » [6]. Il critiqua d’ailleurs justement l’application de concepts liés au contexte européen (comme féodalisme) pour appréhender la réalité dans des sociétés non européennes (critique de Kovaleski sur l’Inde).

    2- « Être marxiste c’est faire de Marx le point de départ et non d’arrivée », comme disait Samir Amin. C’est ainsi que de nombreux marxistes ont articulé à la fois une critique des aspects datés de l’œuvre de Marx et d’Engels, une vision non linéaire et non eurocentrique de l’histoire et du projet communiste et une lutte virulente et sans répit contre la domination coloniale et l’assujettissement des peuples. Il est ainsi de la théorie de l’impérialisme chez Rosa et Lénine, de l’appel d’un marxiste péruvien Mariatégui (à la fin des années 20) à faire « des communautés indigènes le point de départ d’une voie socialiste propre aux pays indo-américains » [7] en s’appuyant sur les survivances des pratiques collectivistes du « communisme inca », de la critique qu’a faite Walter Benjamin dans les années 40 de la philosophie linéaire de l’histoire [8], de la critique de l’économisme chez Gramsci, de la vision téléologique de l’histoire chez Althusser et Balibar, du colonialisme chez Fanon, de l’idéologie du progrès chez Wallerstein [9] et de l’eurocentrisme chez Samir Amin, jusqu’aux écrits de Michel Löwy, Daniel Bensaïd... Samir Amin n’a-t-il pas avancé (à l’encontre du schéma canonisé par le stalinisme des 5 modes de production) l’idée que le monde d'avant le capitalisme était organisé selon un mode de production tributaire dont l’Europe n’était que la périphérie, ce qui y a facilité l’émergence du capitalisme, et qu’ainsi le socialisme pourrait naitre des périphéries « non européennes » du système-monde capitaliste ?

    [Lire par exemple ici un de ces textes d'Amin, absolument passionnant pour remettre en cause certaines lectures marxistes trop "schématiques" et "simplistes" de l'histoire : Samir-Amin-developpement-inegal-et-question-nationale.pdf]

    N’est-ce pas une « provincialisation » de l’Europe ? En fait, le socialisme n’est nullement une nécessité historique mais un possible parmi d’autres. Seule la lutte tranche. Or notre cher Ibn Driss méconnait cette tradition communiste hérétique prônant une voie « non linéaire » et « non eurocentrée » au socialisme conçu comme un projet d’émancipation de toutes les formes de domination. Il méconnait aussi les apports politiques importants (inspirés des travaux de Paul Pascon et de Magali Morsy) de la gauche marxiste marocaine (qu’il fustige) et surtout d’Ilal Amam dans les années 70-80 [10] : appui à la lutte pour la reconnaissance de la langue et la culture amazighe, critique du nationalisme jacobin et ethnocentré bourgeois (représenté intellectuellement par Laroui), articulation de l’émancipation démocratique et sociale et de l’épanouissement culturel des communautés marginalisées ... Il ne connaît peut-être que le « marxisme » des manuels « soviétiques » des Éditions du Progrès et des Partis staliniens.

    L’anti-lumière : une dérive obscurantiste ?

    1537958_3_88d4_manifestation-organisee-par-le-mouvement-du-.jpgLa critique du marxisme « imaginaire » qui m’est attribué et du « libéralisme colonial » a comme socle commun une référence aux anti-lumières commune aux post-modernistes, aux obscurantistes de tout genre et aux conservateurs nostalgiques de la noble chevalerie féodale... Comment notre cher Ibn Driss conçoit-il la modernité ? Elle se réduit pour lui aux boucheries du colonialisme, au racisme et à la guerre. C’est une vision unilatérale et a-historique [11]. La modernité est un projet contradictoire où la régression (guerre, colonialisme, exploitation, misère...) côtoie le progrès (surtout technique). Ce progrès régressif (ou plutôt régression progressive), selon l’expression de Michael Löwy, illustre la conception dialectique du mouvement de l’histoire contemporaine. La modernité comporte des avancées sociales et politiques indéniables pour l’humanité (droits humains, lutte pour la libération des femmes, libertés indivduelles...). Les méconnaitre conduit inévitablement à l’obscurantisme surtout que ces avancées ont souvent été arrachées par le combat des opprimés eux-mêmes et qu’elles sont continuellement menacées par la bourgeoisie. En effet, ces avancées ne lui appartiennent pas mais bien à l’humanité tout entière. Tout l’enjeu est donc de les conserver, de les approfondir, et de les dépasser tout en extirpant de la racine les aspects régressifs (misère, colonialisme...). Bien évidemment, le progrès n’est pas inéluctable mais un possible parmi d’autres [12]. Il s’agit de développer une « vision de la modernité comme étant un processus toujours inachevé, qui ne pourra franchir l’étape de sa crise mortelle en cours qu’en allant de l’avant, par la réinvention de valeurs universelles porteuses d’une reconstruction économique, sociale et politique de toutes les sociétés de la planète. » [13] C’est çelà, en fait, l’essence du projet communiste : un projet d’émancipation de tous les opprimés. Pour paraphraser Poulantzas, le socialisme sera démocratique, féministe, écologiste et pour l’émancipation culturelle et nationale ou ne sera pas.

    Le relativisme culturel ou comment essentialiser l’autre

    Que nous propose notre cher Ibn Driss comme alternative à l’universalisme des lumières ? La réponse n’est pas assez loin : le culturalisme. Le culturalisme est une « théorie constituée quelconque, d’apparence cohérente et de portée qui se voudrait holistique, fondée sur l’hypothèse d’invariants qualifiés de « culturels », lesquels auraient le pouvoir de persister au-delà des transformations que les systèmes économiques, sociaux et politiques peuvent avoir apporté. La spécificité culturelle devient alors le moteur principal de parcours historiques forcément différents. » [14] L’hypothèse culturaliste nie l’existence d’universels. Pour elle, l’universalisme n’est qu’un produit de la domination. Elle ne peut concevoir un universalisme des dominés. Elle essentialise l’autre, n’y voit que le porteur d’un ADN culturel incompatible. Cette essence culturelle a-historique est la base de son « schème de vision et de division » du monde (pour reprendre Bourdieu). Ainsi le monde est constitué autour d’une seule opposition (selon notre cher Ibn Driss), l’Occident/le reste du monde. C’est le clash de « projets civilisationnels ». L’Occident est pour notre cher Ibn Driss un ensemble homogène dénué de contradictions. Ni classes, ni nationalités opprimées ni rien. Un ensemble simple non complexe constitué pour exploiter et opprimer le reste du monde. Cette position escamote les contradictions au sein de chaque « ensemble » et sert plutôt à relégitimer le système capitaliste en crise. La critique de l’eurocentrisme conduit à un eurocentrisme inversé. « L’idéologie 7101322215230.jpgbourgeoise, qui nourrissait à l’origine une ambition universaliste, y a renoncé pour lui substituer le discours post-moderniste des « spécificités culturelles » irréductibles (et, dans sa forme vulgaire, le choc inévitable des cultures). » [15] Elle sert, en fait, à l’embrigadement des peuples derrière les classes dirigeantes pour les soutenir dans la concurrence mondiale effrénée. Elle ne nous apporte aucune alternative réelle à l’oppression et à l’exploitation que nous vivons.

    Le degré zéro de la politique

    Quelle alternative politique apporte notre cher Ibn Driss pour faire avancer le mouvement par rapport à la voie réformiste et radicale ? Rien si ce n’est une apologie plus que douteuse de ce que Ibn Driss appelle « la politique informelle » [16] calquée sur l’économie informelle dont Hassan Zaoual (l’une des « références » de l’auteur) a aussi fait l’apologie avant de louer ensuite les vertus de la « grandiose INDH » en la présentant comme une rupture avec le « développement » tel qu’il était pratiqué avant. N’est-ce pas Hassan Zaoual qui a dit que « l’orientation théorique du paradigme des sites est convergente avec la perspective opérationnelle de l’INDH. En effet, ce projet de portée nationale donne sens et direction à un ensemble de mesures concrètes visant à réhabiliter sur une échelle la participation des acteurs à leur devenir. » [17] ? C’est dire le bien piètre sort qu’a réservé le regretté Hassan Zaoual à sa « salvatrice » critique du marxisme. En fait, embourbé qu’il est dans le piège culturaliste, Ibn Driss ne peut concevoir une politique profane (pour reprendre les mots de Daniel Bansaid), une politique par et pour les opprimés et non une quelconque élite éclairée, une politique délivrée des fatalismes religieux, culturalistes et économistes [18], une politique qui chez nous ne peut faire l’économie d’une double critique (de la « tradition » et de la « modernité ») pour nous frayer notre propre chemin vers l’émancipation politique, économique, sociale et culturelle, vers une modernité socialiste qui s’appuierait premièrement sur les pratiques collectivistes de la Jmaa marocaine et les acquis les plus lumineux de notre histoire particulière tout en contribuant à la construction d’une nouvelle civilisation humaine.


    [1] http://eplume.wordpress.com/2011/09/01/le-temps-mort-propos-sur-l’obscurantisme-de-gauche/#note01

    [2] Sans parler de la reprise de dogme stalinien et les présenter comme du marxisme. Je renvoie ici à son évocation du matérialisme dialectique comme système clos de lois éternelles. Marx emploie le terme de méthode dialectique.

    [3] Pour comprendre cette évolution voir LINDNER K., « L’eurocentrisme de Marx : pour un dialogue du débat marxien avec les études postcoloniales », Actuel Marx, 2010/2 n° 48, p. 106-128

    [4] BALIBAR E., La philosophie de Marx, 3ème édition la Découverte, coll. Repères, Paris, 2010 p : 105

    [5] http://www.marxists.org/archive/marx/works/1881/03/zasulich1.htm

    [6] LINDNER K., « L’eurocentrisme de Marx : pour un dialogue du débat marxien avec les études postcoloniales », op. cit. p : 122

    [7] DUMENIL G, LÖWY M, RENAULT E., Lire Marx. Presses universitaires de France, Paris, 2009 p : 90

    [8] Voir le texte de Benjamin « sur le concept de l’histoire ».

    [9] WALLERSTEIN I., Le capitalisme historique, La Découverte, Paris, 1985

    [10]MAJDI M, Les luttes de classes au Maroc depuis l’indépendance, Hiwar, Amsterdam, 1987 et SERFATY A., Dans les Prisons du Roi - Écrits de Kénitra sur le Maroc, Éditions Messidor, Paris, 1992

    [11] Il est d’ailleurs anecdotique de voir notre cher Ibn Driss critiquer la modernité en utilisant ses acquis (les acquis des sciences sociales).

    [12] WALLERSTEIN I., Le capitalisme historique op.cit.

    [13] AMIN S., modernité, religion et démocratie, critique de l’eurocentrisme, critiques des culturalismes, éditions Parangon, Lyon, 2008

    [14] Ibid

    [15] Ibid

    [16] En fait une sacralisation du sens commun populaire

    [17] ZAOUAL H., Management situé et développement local, Collection Horizon Pluriel, Rabat, 2006 p : 13-14

    [18] Il n’y a pas d’alternatives aux marchés.

     


    [1] Il est très difficile de faire la révolution et de construire le socialisme dans les pays occidentaux, car dans ces pays l'influence pernicieuse de la bourgeoisie est très profonde et s'est déjà infiltrée partout. En Chine, la bourgeoisie n'existe que depuis trois générations tandis que dans les pays comme l'Angleterre ou la France, elle existe depuis des dizaines de générations. Dans ces pays la bourgeoisie a une histoire vieille de 250 à 260 ans, voire de plus de 300 ans ; l'idéologie et le style de travail bourgeois ont des influences partout et dans toutes les couches sociales. C'est pourquoi la classe ouvrière anglaise ne suit pas le Parti communiste, mais le Parti travailliste.
    Lénine a dit : "Plus un pays est arriéré, plus difficile est son passage du capitalisme au socialisme". Vue d'aujourd'hui, cette thèse n'est pas correcte. En réalité, plus un pays est arriéré économiquement plus son passage du capitalisme au socialisme est facile, et non difficile. Plus un homme est pauvre, plus il veut la révolution. Dans les pays capitalistes occidentaux, le niveau de l'emploi et les salaires sont plus élevés et l'influence de la bourgeoisie sur les travailleurs est plus profonde. Dans ces pays, la transformation socialiste est moins facile qu'on ne le croit.
    Mao Zedong, "Notes de lecture sur le Manuel d'économie politique de l'Union soviétique" (1960). Le même raisonnement peut évidemment s'appliquer entre les différentes régions - les Centres et les Périphéries - d'un même État...

     


    votre commentaire
  •  

    Voici un article publié il y a un peu moins d'un an sur la page Facebook de Servir le Peuple :

    Face aux ravages du capitalisme, les masses du Peuple SE MOBILISENT ; TOUJOURS. Il n'y a pas d'oppression, d'exploitation, qui ne suscite pas de résistance ; de même qu'il n'y a pas de coup sur la rotule qui ne suscite pas de réflexe d'extension de la jambe.

    Toute la question, est de savoir QUELLE IDÉOLOGIE et donc, derrière l'idéologie, QUELLE CLASSE va capter et canaliser cette mobilisation dans les buts qui sont les siens. partisansGlobalement, en période de crise capitaliste, il n'existe que 3 options ; et même, en réalité, seulement deux :  

    - la mobilisation dans l'idéologie révolutionnaire du prolétariat, le COMMUNISME, derrière la classe ouvrière, pour mener la GUERRE POPULAIRE et accomplir la Révolution prolétarienne ; 

    - la mobilisation RÉACTIONNAIRE derrière la frange la plus agressive, contre-révolutionnaire, antipopulaire et impérialiste de la classe dominante ; pour ÉCRASER la résistance des 1043515.jpgmasses à la crise, et résoudre celle-ci par la guerre de repartage impérialiste : le FASCISME.

    - la mobilisation derrière la social-démocratie, le réformisme plus ou moins "radical", c'est à dire derrière les "couches moyennes du salariat" (inférieures et supérieures) et, derrière elles, la frange "humaniste-réformiste-modernisatrice" de la classe dominante. Mais c'est là l'option perdante en période de crise : elle n'est réellement viable que lorsque la valorisation du capital reprend (ou a une réelle possibilité de reprendre). Durant la précédente crise générale du capitalisme, le "phare" de cette option était l'Amérique de Roosevelt, agrégeant à elle toutes les forces social-démocrates et travaillistes, et les "conservateurs antinazis" (De Gaulle, Churchill) de la planète ; mais elle dut elle aussi recourir à la GUERRE pour Photo-Tous-ensemble-21.pngsortir les pays concernés de la crise ; avec tous les crimes, n'ayant rien à envier au fascisme, que cela implique : camps de concentration pour les ressortissants japonais, bombardements incendiaires de Dresde et Tokyo, puis atomiques d'Hiroshima et Nagasaki, etc. Elle dut s'appuyer sur les forces réactionnaires de la société : beaucoup de "Français libres" venaient de la droite et de l'extrême-droite (De Gaulle lui-même, Leclerc, etc.) ; les généraux Eisenhower et Mac Arthur étaient (pour ne pas dire plus) "très à droite", et le général LeMay (du bombardement de Tokyo) sera candidat d'extrême-droite à la vice-présidence en 1968...

    TOUTE AUTRE OPTION N'EST QUE VAINE RÊVASSERIE. La question est donc de savoir dans laquelle de ces options va principalement se mobiliser la résistance des masses. Au premier tour de l'élection présidentielle 2012, si l'on regarde le vote "ouvrier" (cette catégorie statistique inclut l'ARISTOCRATIE ouvrière), c'est la mobilisation réactionnaire qui l'emporte (30% pour Marine Le Pen, 18% pour Sarkozy), suivie de la mobilisation social-démocrate (27% pour Hollande, 12% pour Mélenchon, les candidats NPA et LO étant sans doute légèrement sur-représentés). Il n'y avait pas de véritable candidature communiste révolutionnaire, et les candidatures (Poutou et Arthaud) pouvant passer pour telles donnent une idée de la faiblesse de la mobilisation dans ce sens. 

    De là, toute l'importance de construire le CENTRE D’AGRÉGATION qui fédérera, en direction de la Révolution prolétarienne, toutes les résistances des masses populaires à l'oppression capitaliste : le PARTI. Le Parti révolutionnaire agit en quelque sorte comme un noyau dur qui, en mouvement, exerce une FORCE D'ATTRACTION autour de lui, constituant ce que l'on appelle un FRONT UNI. Mais "le mouvement n'est pas tout" : il faut que ce Parti soit en mouvement DANS LE BON SENS, sans quoi, il exerce au contraire une force CENTRIFUGE (il fait le vide autour de lui !). Cela a été le cas, au cours du dernier demi-siècle, de dizaines et de dizaines de petites organisations "marxistes révolutionnaires" trotskystes, marxistes-léninistes et même maoïstes. C'est encore le cas aujourd'hui (mais là n'est pas le lieu pour nommer quiconque).

    nouveaux_partisans.JPGDurant la situation révolutionnaire en développement de 1965-75, seules deux organisations, dans l'entité "France", ont "tourné dans le bon sens" et réussi à agréger autour d'elles certains des éléments les plus progressistes, combattifs et généreux des masses en résistance : la GAUCHE PROLÉTARIENNE (maoïste) et la Ligue communiste ("trotsko-guévariste"). Malheureusement, la première a explosé en vol (trahie par sa direction bourgeoise intellectuelle) en 1973, tandis que l'autre s'est repliée sur les "fondamentaux" du trotskysme, c'est à dire une social-démocratie radicale, pour conduire au NPA actuel. Ces organisations n'ont pas su dépasser les limites de leur CONCEPTION DU MONDE, et n'ont donc pas réussi à contrer la mobilisation réactionnaire de masse (illustrée par le "triomphe" de la droite aux élections législatives de 1968 et aux présidentielles l'année suivante, suivi des "années Marcellin"), ni la mobilisation social-démocrate réformiste, qui débouchera sur le 10 Mai 1981.

    Ceci nous enseigne l'importance de la CONCEPTION COMMUNISTE DU MONDE, qui seule garantit que le Parti, centre d'agrégation des résistances au capitalisme, "tourne dans le bon sens" et puisse un jour prochain passer de la résistance à l'offensive. D'elle et d'elle seule découle la STRATÉGIE RÉVOLUTIONNAIRE du Parti, dont découlent les tactiques et les méthodes de travail adaptées à l'analyse concrète de la situation concrète, et la correction efficace des tactiques et des méthodes qui se révèlent erronées.

    La conception communiste du monde se construit dans une DIALECTIQUE entre la théorie (lorsque le Parti se crée, il part de l'expérience passée du mouvement communiste dans son pays) et la PRATIQUE. La théorie se forge et s'enrichit dans la pratique, elle se développe et revient sur le terrain, dans la pratique, pour se forger et s'enrichir à nouveau, et ainsi de suite. Le dialectique théorie/pratique est comme une roue à aubes plongée dans un cours d'eau ; l'eau représentant la pratique, le mouvement réel de la résistance des masses au capitalisme, tandis que l'air libre représente l'analyse, la réflexion théorique, le synthèse de l'expérience. Ainsi, dans tous les cas, la pratique dans le mouvement réel est L’ÉLÉMENT MOTEUR de cette dialectique qui développe la conception communiste du monde.


    communisme


    votre commentaire
  • 1. Depuis désormais plusieurs mois, la grande ‘question de société’ (démocratique) du mariage pour les couples homosexuels secoue la société (les masses populaires) d’Hexagone, et permet le développement de GRANDES MOBILISATIONS RÉACTIONNAIRES DE MASSE – mais ce pourrait être, à vrai dire, n’importe quelle autre question (comme la peine de mort ou l’école privée au début des années 1980), l’’important’, l’aspect déterminant, étant que la ‘gauche’ de la bourgeoisie ait ‘atterri’ par accident au pouvoir et que cette ‘parenthèse politique’ ouvre, comme toujours dans l’histoire, à une recomposition, une/de ‘nouvelle(s) synthèse(s)’ idéologique(s) et une remobilisation de la réaction la plus noire.

    Printemps-Francais-LOLLa droite bourgeoise, dans toutes ses composantes depuis la libéral-démocratie ou la démocratie-chrétienne jusqu’aux semi-fascistes en passant par les ‘reagano-thatchériens’, a en effet dirigé l’État pendant 10 ans (2002-2012), et largement hégémonisé intellectuellement la ‘société civile’ hexagonale pendant cette période. Mais, face à la crise mondiale terminale du capitalisme, la tentative de ‘synthèse’ sarkozyste, la tentative de rassemblement ‘grand écart’ entre la chèvre semi-lepéniste ‘Droite populaire’ et le chou ‘républicain, humaniste et social’ à la Borloo, s’est avérée trop fragile et n’a pas résisté, tandis que de son côté, le ‘peuple militant’ d’extrême-droite, fascisant, déployait des stratégies (toutes) fort fructueuses, mais contradictoires entre elles : infiltration ‘classique’ de la droite ‘républicaine’ ‘dure’ (le plus éminent étant Patrick Buisson, conseiller de campagne de Sarkozy en 2006-2007 et 2011-12, passé depuis au service de... Copé) ; ‘réseautage métapolitique’ à base de ‘coups d’éclat’ médiatiques, de ‘maillage associatif’, d’élections locales et de ‘touchage’ de notables (Identitaires, UDN, national-catholiques) ; ‘dépassement’ de la traditionnelle haine anti-‘pas-blancs’ par la recherche de ‘valeurs communes’ avec les masses colonisées-intérieures les plus arriérées (Soral avec Dieudonné, Thomas Werlet avec Kemi Seba) ; ‘monolithisme oppositionnel’ FN sur une ligne souverainiste anti-‘Bruxelles’, ‘républicaine’ et social-populiste anti-‘système’, anti-‘UMPS’ etc. ; tout cela sans parler des contradictions dans la recherche d’alignement géopolitique de l’impérialisme BBR (ancrage occidentaliste ‘sans être les toutous des Américains’, ou anti-américanisme pro-russe quitte à se faire ‘tiers-mondiste’). Tout cela a donc finalement ouvert la voie à un retour aux ‘affaires’ de l’aile ‘libérale-démocrate de gauche’, ‘social-libérale’ de la bourgeoisie monopoliste, le PS ; mais avec une emprise idéologique de masse ridicule par rapport à 1981 ou même 1997 ; et, on l’a dit, à une profonde réorganisation et remobilisation du ‘peuple de droite’ le plus dur, à la préparation d’une CONTRE-OFFENSIVE qui, soyons-en sûrs, si la droite revient au pouvoir (ce qui est à peu près acquis) en 2017 avec un FN à 20 ou 25%, sera TERRIBLE.

    Dans le contexte, donc, du débat autour du ‘mariage pour tous’, a émergé par exemple la mouvance informelle du ‘Printemps français’, dont ont parlé récemment les camarades d’Alternative libertaire Montpellier : reprenant l’appellation médiatico-bourgeoise du ‘Printemps arabe’ (les grands révoltes populaires qui ont secoué le Maghreb et le Proche-Orient depuis 2011), ce mouvement dans lequel convergent aussi bien des éléments FN, villiéristes, national-catholiques ou identitaires que des ‘radicaux’ de l’UMP, prône une action ‘non-violente, mais pas forcément légale’, et ne fait finalement que reprendre un classique de l’hégémonie intellectuelle de droite depuis plus de 20 ans (depuis, en gros, les ‘années Mitterrand’) : nous vivrions en ‘dictature’, une dictature imposée par la ‘bien-pensance de gauche’, les ‘lobbys communautaires’ (LGBT, musulmans, afro-descendants et ‘immigrés’ en général, parfois juif), la ‘racaille raciste anti-blancs’ que la ‘bien-pensance’ et les ‘lobbys’ font prospérer, sans oublier les ‘syndicats de fonctionnaires et autres payés-à-rien-foutre qui nous prennent en otage’ ; et il faudrait ‘organiser la résistance’… Mais tout cela n’est encore pas grand-chose par rapport à une mouvance qui a émergé récemment parmi les plus réactionnaires des décérébrés-francisés d’Occitanie, là où l’idéologie OAS importée par les ‘rats-pas-triés’ colonialistes d’Algérie est la plus fortement implantée : le Front de Défense des Français (ce qui, en Occitanie, ne manque pas de sel…), des ‘déçus’ du virage ‘respectable’ de Marine Le Pen (qui a, notamment, refusé de se joindre aux ‘manifs pour tous’ et serait ‘prisonnière d’un lobby gay’ au FN) qui appellent (et se préparent) d’ores et déjà à la GUERRE CIVILE, vers laquelle la crise terminale du capitalisme nous conduit inexorablement. L'on notera ici l'aspect 'nébuleux', protéiforme de cette mobilisation ultra-réactionnaire de masse, CARACTÉRISTIQUE du fascisme 'français' qui est historiquement plus une affaire de squadrisme musclé et (surtout) de 'chaudron d'idées' et de 'lobbying' en faveur d'un 'pouvoir fort', d'un 'homme providentiel' qui surgira tôt ou tard pour 'remettre les choses en ordre' (comme Pétain en 1940), que d'un parti structuré autour d'un chef en vue de la prise directe du pouvoir (ceci n'a guère connu que trois exemples : le PSF du colonel La Rocque ; le RPF de De Gaulle - qui a finalement pris le pouvoir, mais n'a pas mis en place un véritable fascisme, et a 'trahi' dans une large mesure sa base sur la question de l'Algérie ; et le FN sous la direction de Marine Le Pen - son père ne voulait pas réellement accéder au pouvoir).

    Du côté de la ‘gauche radicale’, il ne faut pas oublier que la question démocratique des personnes homosexuelles et transgenre (et, à vrai dire, les questions démocratiques ‘de société’ en général) a longtemps été plus qu’un gros problème : pour le PCF de Thorez et Duclos, ‘la classe ouvrière (était) saine’, l’homosexualité (ou même simplement la liberté sexuelle) était un ‘vice petit-bourgeois’, et les homosexuel-le-s des ‘malades’ auxquel-le-s ‘le Parti ne veut pas de mal : nous allons les soigner’, car ‘les communistes sont de vrais hommes qui aiment de vraies femmes’… et du côté trotskyste, le PCI de Lambert (largement hégémonique jusqu’en Mai 68), ou même son clone de Frank et Raptis ne raisonnaient guère autrement (aujourd’hui, cela va se traduire, chez beaucoup d’organisations, non par une homophobie affirmée mais par – effectivement – un silence gêné sur la question, ou par l’affirmation qu’il y a là une ‘diversion’ par rapport aux 'vrais problèmes', un ‘débat de société indifférent à la classe ouvrière’, qu'il y a 'd'autres priorités', etc.).

    printemps-françaisIl y a là une conséquence directe de l’IDÉOLOGIE RÉPUBLICAINE ‘française’, directement ‘décalquée’ sur le mouvement ouvrier : ‘staliniens’ comme trotskystes recherchaient une ‘identité républicaine et socialiste organique’ du peuple ‘français’, identité de laquelle ‘rien ne (devait) dépasser’. Et il faut dire que ni le marxisme-léninisme ‘kominternien’ (y compris le PC chinois de Mao et, plus tard, le PC cubain du Che…), ni le vieux barbichu depuis son exil mexicain, ne poussaient spécialement dans une autre sens (au milieu des années 1930, l’URSS rétablissait pratiquement toutes les conceptions les plus bourgeoises des relations sociales à caractère sentimental et sexuel : pénalisation de l’homosexualité, interdiction du divorce et de l’avortement qu’avaient autorisés la Révolution d’Octobre, etc.). Seul le mouvement libertaire mettait en avant ces ‘droits’, dans une conception idéaliste petite-bourgeoise ‘radicale’ de la ‘liberté individuelle’. Selon le marxisme, ‘l’humanité ne peut répondre qu’à des questions qui se posent à elle’, mais cela n’est pas un argument ici, puisque l’homosexualité existe (et ‘pose question’) depuis aussi longtemps qu’existe l’espèce humaine elle-même : répandue et socialement acceptée dans l’Antiquité esclavagiste, mais sous une forme élitiste et violemment patriarcale (mode de domination des hommes mûrs sur les jeunes), elle s’est ainsi trouvée rejetée (comme la libre sexualité en général) par les ‘religions révélées’ du Ier millénaire (christianisme, islam, judaïsme talmudique), idéologies 'révolutionnaires' du passage à la féodalité, car associée à la ‘dépravation institutionnalisée’ et à l’esclavagisme sexuel qui prévalait dans l’esclavagisme en crise générale de l’Empire romain ; puis, le processus (parallèle à l’émergence du capitalisme) de construction de l’État moderne, à partir des 12e-13e siècles, a ouvert une ère de répression institutionnalisée et atroce (personnes brûlées vives, etc.), tout comme elle a donné naissance à l’antisémitisme et à la xénophobie ‘existentiels’, au suprématisme ‘blanc’ et chrétien etc., dans une logique où tout ce qui était ‘différent’ du modèle défini comme dominant (la famille bourgeoise ou laboureuse européenne-chrétienne) était potentiellement ‘subversif’ (pour le compte des exploité-e-s, ou pour le compte d’un pouvoir capitaliste concurrent), et devait donc être soit soumis, soit éliminé. L’accusation de ‘sodomie’ (qui pouvait désigner l’homosexualité en particulier, ou le libertinage sexuel en général) était ainsi fréquemment employée contre les ‘dissidents’, par exemple les Templiers ou encore les Cathares, et le terme de ‘bougre’/’bougrerie’, longtemps synonyme avant de perdre sa signification, vient d’ailleurs de ‘bulgare’ qui désignait les Bogomiles, parents balkaniques des Cathares. Il n’y a donc, pour le mouvement marxiste (‘stalinien’ ou trotskyste) du 20e siècle, pas vraiment d’’excuse matérialiste historique’ quant à ses positions sur cette question, mais plutôt un dégagement insuffisant de l’idéologie bourgeoise, elle-même pas encore tout à fait dégagée des conceptions féodales dans lesquelles a ‘baigné’ l’accumulation primitive du capital...

    C’est dans le contexte de Mai 68 qu’enfin, des forces marxistes (comme la Gauche prolétarienne et, plus encore, les ‘maoïstes libertaires’ de ‘Vive la Révolution’ (VLR), ou des courants trotskystes notamment dans et autour de la LCR) ont mis en avant cette question démocratique, et LES questionS démocratiqueS en général, rappelant au mouvement prolétarien qu’il n’avait pas vocation à n’émanciper que le prolétariat lui-même, mais aussi les masses populaires humaines dans leur totalité. Cependant, avec le grand recul connu par le mouvement communiste international depuis cette époque, ces conceptions ont tendu en effet à ‘régresser’ vers un ‘libéralisme-libertaire’ idéaliste et à s’aligner sur la gauche bourgeoise ‘moderniste’, perdant la capacité de compréhension du lien entre le modèle de société bourgeois (rejetant l’homosexualité, la liberté sentimentale et sexuelle etc.) et le mode de production lui-même (cf. ci-dessus). Aujourd’hui, cette hégémonie petite voire moyenne-bourgeoise (couches sociales urbaines, éduquées et aisées), ‘social-libérale-libertaire’, sur les mouvements d’émancipation féminine et homosexuelle, est une problématique réelle sur laquelle le mouvement communiste renaissant doit se pencher, problématique traduite notamment par la réaction des Indigènes au débat sur le ‘mariage pour tous’, réaction plus que critiquable, mais révélant bien l’état d’esprit ‘moyen’ du colonisé intérieur (et même du prolétaire ‘blanc’) des ‘quartiers’. Reste aussi en suspens, depuis longtemps, la question d’un mouvement d’affirmation lesbien autonome ; car, la ‘nature humaine’ léguée par des millénaires de société de classe étant ce qu’elle est, les ‘bonnes intentions’ ne suffisent pas et, souvent, les mouvements féministes sont ‘trustés’ par les femmes hétérosexuelles, et les mouvements homosexuels, par les homosexuels masculins… Les militantes lesbiennes se ‘réfugient’ alors, souvent, dans un ‘féminisme ultra-radical’ violemment gauchiste, anti-constructif et repoussoir pour les masses ‘lambda’ (tous sexes et genres confondus).

    559022 585350928150121 179315633 n

    2. Cette question permet aussi, encore une fois, de démasquer la pratique au service éternel de la réaction des ultra-gauchistes. Car, une fois constaté ce que tout le monde est tout à fait capable de constater (qu’un nombre considérable de personnes réactionnaires sont capables de se mobiliser en masse contre les droits démocratiques des personnes homosexuelles), le ‘p’’c’’mlm’ concentre encore une fois, comme à son habitude, ses attaques sur l’’extrême-gauche’ (le mouvement révolutionnaire ou ‘radical’ – potentiellement révolutionnaire – d’Hexagone), et en particulier sur ce qui a vocation à devenir sa ‘locomotive’, les véritables maoïstes qu’ils qualifient (dans un grand sac avec les pires débris du révisionnisme thorézien) de ‘marxistes-léninistes’. Ceux-ci seraient coupables de ‘ne jamais parler’ de la question ; tandis que de son côté le mouvement trotskyste, ‘main dans la main’ avec la social-démocratie, mettrait en avant un discours ‘libéral-libertaire’, avec des éléments ‘dissidents’ (comme l’électron libre Ilan Simon, ex d’ARS Combat) qui rejoindraient la mobilisation homophobe (cela, par contre, est vrai et plonge ses racines dans le lourd passif du mouvement ouvrier hexagonal, cf. ci-dessus).

    arton982-715ebSauf que cette affirmation est tout d’abord FAUSSE, puisqu’ont défendu les droits des personnes homosexuelles et combattu les mobilisations réactionnaires des organisations aussi variées que l’OCML-VP, l’Organisation communiste ‘Futur Rouge’ (ici et ici) – qui a précisément rompu avec le ROCML sur la question de ces ‘débats sociétaux qui n’intéressent pas le mouvement ouvrier’ ou le média communiste ‘Front pour la Libération de Classe’ (mais pas, en effet, le PCmF, sans doute très pris par son implication dans les luttes ouvrières concrètes de région parisienne) ; et ensuite, si position est prise, elle est de toute manière qualifiée de ‘libérale-libertaire’, ‘rejetant la social-démocratie mais ne la critiquant pas’ (???), etc. etc.

    D’une manière générale, le ‘p’’c’’mlm’ pourfend le ‘silence’ (totalement imaginaire) de l’’extrême-gauche’ sur cette question, mais, lorsqu’une organisation ou un média, ou même un individu isolé, prend position, si ce n’est pas homophobe (en tout cas, refusant l’égalité des droits) comme l’électron libre Ilan Simon, c’est alors ‘libéral-libertaire’… Nous avons là une méthode très subtile d’argumentation et de ‘démolition’ de l’’extrême-gauche’ au service de la réaction, méthode dont le ‘p’’c’’mlm’ est vraiment devenu un spécialiste émérite.

    Enfin, n’ayons pas peur de le dire, il y a tout de même du GRAND COMIQUE à s’ériger en donneurs de leçons absolus sur cette question, lorsque l’on se réclame de (et vénère à grandes prosternations) l’URSS de Staline et ‘le PCF des années 1930-40’, et que l’on connaît les positions de ces forces politiques sur l’homosexualité et les ‘questions morales’ à cette époque… (de même que lorsque l’on se pose en grands donneurs de leçons sur l’antisémitisme, et que l’on connaît les discours et pratiques de la direction ‘stalinienne’ sur cette question à la fin des années 1940/ début 1950). D’une manière générale, leur position vis-à-vis des personnes homosexuelles ou ‘transgenre’ est profondément ‘professorale’ et imprégnée de paternalisme.

    anti-homophobie3. La position réellement communiste révolutionnaire, sur la question démocratique LGBTI, est que la bourgeoisie capitaliste ‘de gauche’, par sa nature même de classe, est incapable d’assumer jusqu’au bout son propre libéralisme démocratique [1] : à ce stade du processus révolutionnaire et DONC de la conception communiste du monde, il n’y a fondamentalement pas grand-chose à redire à la conception bourgeoise libérale sur ces questions (l’État et les lois n’ont rien à faire dans les chambres à coucher des masses populaires) ; les arguments basés sur le prétendu ‘équilibre de l’enfant’ sont des fumisteries obscurantistes sans aucun fondement scientifique (si les couples homosexuels devaient élever ‘automatiquement’ des enfants homosexuels ou ‘perturbés’, alors ‘automatiquement’ les couples hétérosexuels devraient élever des enfants hétérosexuels et/ou ‘équilibrés’ : cette seule affirmation suffit à démontrer le ridicule de l’argument) ; en revanche, refusant que le marché capitaliste subsume (absorbe) une autre activité humaine, les communistes s’opposent au marché de la procréation pour autrui.

    En instaurant le ‘mariage pour tous’, la bourgeoisie capitaliste libérale ‘de gauche’ joue un rôle positif en faveur de l’égalité démocratique des personnes homosexuelles ; mais, dans le même temps, outre de valoriser et renforcer l’institution bourgeoise du mariage (au demeurant, tant les sociaux-démocrates que les ‘staliniens’ et les trotskystes n’ont jamais été très ‘avant-gardistes’ sur ce point au siècle dernier…) et de chercher (nature de classe oblige !), à chaque reconnaissance d’une liberté démocratique, à créer un marché pour le capital (comme cela s’est fait avec l’émancipation féminine dans les années 1960-80, la reconnaissance de ‘l’enfant/adolescent comme personne’, la ‘tolérance antiraciste’ des minorités etc. etc.), elle est incapable d’assumer de manière conséquente, à travers une véritable mobilisation progressiste de masse, ce petit bout de révolution démocratique véritable… pour la bonne et simple raison qu’aujourd’hui, au stade de l’impérialisme, seul le prolétariat révolutionnaire à la tête des masses populaires le peut !

    Les droits démocratiques LGBTI et la mobilisation réactionnaire de masse


    [1] Si l’on voulait résumer 800 ou 900 ans d’histoire du capitalisme en quelques mots, l’on pourrait dire les choses, présenter sa contradiction ‘existentielle’, ainsi : d’un côté il est un ‘centre d’impulsion’ d’humanisme, puisqu’il met en avant l’individu dans son individualité, contre l’individu ‘simple petit rouage’ de la société, ou simple chose que l’on peut s’approprier, utiliser et même détruire à volonté (conception esclavagiste qu’avaient déjà commencé à contester les grandes religions comme le christianisme, l’islam ou le bouddhisme) ; mais de l’autre, par ses contradictions mêmes et l’obligation de ‘gérer’ celles-ci, et même pour ‘forcer’ le développement de ses forces productives, il est obligé de s’appuyer sur un appareil politico-militaire et idéologique qui reprend, ‘rénovées’, les conceptions les plus barbares des temps médiévaux et antiques. Le capitalisme est apparu, aux 11e-12e siècles, dans des sociétés aux forces productives avancées où il a impulsé des modèles de société relativement ‘libéraux’ et humanistes (Italie, régions rhénanes, Espagne ‘maure’, Occitanie…) ; mais il n’a pu prendre réellement son essor qu’à partir du moment où il s’est/a été ‘recouvert’ de l’appareil politico-militaire et idéologique (d’encadrement des masses) qu’est l’État moderne, qui, lui, provient des terres les plus ‘moyennâgeuses’, aux forces productives les moins avancées : Nord de l’Hexagone ‘française’, Nord de la Meseta ibérique, Angleterre, Autriche des Habsbourg puis Prusse en Allemagne, etc. Pour réaliser sa véritable grande accumulation primitive, il a dû rétablir, pour les pays d’Europe de l’Est, un servage digne d’avant l’An 1000 qui avait pratiquement disparu et, dans les colonies des pays d’Europe de l’Ouest, l’institution antique de l’esclavage, qui le christianisme avait beaucoup fait reculer depuis la fin de l’Empire romain, mais en la limitant aux ‘nègres’ africains et aux indigènes d’Amérique, en arguant que ceux-ci n’étaient ‘pas tout à fait humains’ (ou en tout cas ‘païens’, ce qui peut justifier l’esclavage selon certains textes ‘sacrés’)… etc. etc. Là est, au niveau de la superstructure idéologique, la contradiction qui traverse toute l’histoire du capitalisme depuis la ‘renaissance médiévale’.

     


    votre commentaire
  • C’est le printemps et, comme chacun et chacune le sait et le vit au quotidien, après des mois de grisaille hivernale, les sens s’éveillent : les températures clémentes favorisent la production, par l’organisme, de phérormones, l’’hormone du désir’ ; l’on met plus volontiers ‘le nez dehors’ et c’est le moment des rencontres… Mais les révolutionnaires ont-ils une position sur ce qu’il est convenu d’appeler le ‘désir’ et le ‘sentiment amoureux’ ? Ces pensées sont-elles ‘détachables’ de la réalité matérielle, de la vie sociale et de ses rapports/contradictions de classe ? Voyons les choses de plus près.

    Voici un article de Zones subversives [proche des (bons) camarades ‘marxistes libertaires’ d’AL Montpellier et repris sur leur site] sur l'amour. A-t-il toujours existé? Comment fonctionne-t-il sous le capitalisme?

    Cet article, pour ne pas être strictement de notre 'chapelle' politique (et se baser au demeurant, comme le souligne l'auteur, sur les travaux d'une sociologue petite-bourgeoise 'de gauche'), n'en expose pas moins bon nombre de vérités... pas toujours 'bonnes à dire' !

     

    eros-erosion--miss-ticLe thème de la souffrance amoureuse traverse la littérature. Pourtant, la réflexion politique et sociale sur ce problème de la vie quotidienne semble inexistante. La sociologue Eva Illouz se penche sur les mutations des relations amoureuses et sexuelles à l’ère de la modernité marchande. Elle insiste sur les aspects les plus récents. En revanche elle a tendance à éluder la répression sexuelle ainsi que les contraintes sociales qui perdurent malgré l’émergence de nouvelles formes d’aliénations. Les manuels de développement personnel ne sont pas plus émancipateurs que la morale religieuse.

     Une sociologie de l’amour moderne

    Eva Illouz évoque les différentes formes de souffrances. Trouver l’amour et les difficultés pour rencontrer une nouvelle personne alimente la souffrance, surtout avec la multiplication d’échecs. Lorsque la relation s’instaure, la souffrance prend « la forme de l’ennui, de l’angoisse ou de la colère, de disputes et de conflits douloureux, et aboutissent à la déconfiture, au doute sur soi-même, à la dépression engendrée par les ruptures ou les divorces », constate Eva Illouz. La psychologie insiste sur la responsabilité personnelle de chacun dans l’échec amoureux, considéré comme inévitable. Au contraire, « les vicissitudes et les malheurs de nos vies amoureuses sont le produit de nos institutions », souligne Eva Illouz. Les féministes estiment que la conception romantique de l’amour permet d’imposer une oppression patriarcale. Mais le féminisme postmoderne estime que le pouvoir devient le socle des relations humaines et amoureuses. Pourtant, l’amour renvoie également au désir et au plaisir, et pas uniquement au pouvoir. 

    La réflexion critique ne doit pas se limiter à la sphère économique et sociale. Les problèmes de la vie quotidienne doivent également faire l’objet d’une analyse. « Mon but est de traiter l’amour comme Marx traita des marchandises: il s’agira de montrer que l’amour est produit par des rapports sociaux concrets ; que l’amour circule sur un marché fait d’acteurs en situation de concurrence, et inégaux ; et de soutenir que certaines personnes disposent d’une plus grande capacité à définir les conditions dans lesquelles elles sont aimés que d’autres », présente Eva Illouz. 

    La sociologue montre bien l’analogie entre l’amour et la logique marchande dans la modernité néolibérale. L’émotionnel s’articule avec l’économique. En revanche, l’auteur occulte les normes morales qui évoluent mais perdurent. 

    Progressivement, le mariage avec une personne n’est plus une décision imposée, mais devient un choix individuel. Pourtant « cette forme culturelle occidentale de modernité a provoqué des formes de misère affective, de destructions sans précédents des univers de vie traditionnel », souligne Eva Illouz. 

    L’individu moderne semble tiraillé entre des injonctions contradictoires. L’institution du couple et du mariage s’opposent à l’amour romantique et passionné pourtant présenté comme un idéal. La colère, la frustration et la désillusion proviennent des ses contradictions sociales. Les expériences et les souffrances individuelles semblent en réalité collectives car liées aux normes et aux contraintes sociales.            

    L’évolution historique de la morale et de l’amour  

    L’amour n’est pas uniquement un sentiment désintéressé, irrépressible et passionné. Dans l’époque moderne, l’amour apparaît surtout comme un choix. Le partenaire est évalué et choisit selon des critères rationnels. Mais ce choix semble surtout déterminé par un environnement culturel et par les représentations dominantes. Les romans de Jane Austen permettent d’observer les déterminants du choix amoureux dans les sociétés du XIXème siècle. La conformité du partenaire avec ses propres valeurs morales prime sur le désir sexuel. La femme doit se soumettre à un code moral et à un contrôle patriarcal. L’amour semble alors lié à l’attachement et à l’habitude, et non pas à l’attirance instantanée. « L’amour n’est pas ici vécu comme une rupture ou un bouleversement dans la vie quotidienne. Il se développe plutôt avec le temps, l’intimité, la connaissance progressive et l’étroite fréquentation des familles de chacun, au quotidien », précise Eva Illouz. La dimension morale organise la vie affective. La séduction provient de la capacité à se conformer à des codes et à des normes. Cet aspect moral se traduit par l’intériorisation de valeurs mais surtout par des pratiques sociales. Le processus de séduction s’inscrit dans le cadre précis de la famille et du voisinage. Le jugement des proches et le contrôle de l’environnement social semblent déterminant. Des règles et des rituels sociaux encadrent la séduction. Les sentiments amoureux se conforment aux intérêts économiques et l’endogamie sociale doit être préservée. Le respect des promesses et l’engagement semblent déterminants. 

    Dans la modernité, le marché des rencontres devient dérégulé. L’amour est désencastré des codes sociaux pour devenir un choix individuel. Le sex-appeal codifie l’attractivité sexuelle. La séduction s’apparente alors à l’intériorisation d’un « ensemble de codes corporels, linguistiques et vestimentaires très consciemment manipulés et adaptés dans le but de susciter le désir sexuel de l’autre », résume Eva Illouz. L’amour se conforme à la logique consumériste. Le cinéma, les magazines, la publicité diffusent des normes érotiques. La jeunesse et la beauté façonnent l’imaginaire érotique de la société de consommation. En revanche, Eva Illouz exagère fortement la rupture de la modernité. La sociologue estime que le plaisir sexuel devient central. Mais, dans le monde réel, les valeurs morales et les contraintes sociales évoluent sans pour autant disparaître. Peu de femmes osent affirmer qu’elles aiment le plaisir sexuel. En revanche, la sociologue souligne à juste titre l’importance croissante de l’attrait physique dans le sentiment amoureux. Une standardisation du look caractérise la séduction. Le marché de la rencontre amoureuse semble désormais régi par la compétition. Mais la sociologue considère que la valorisation du plaisir sexuel dans les médias organise désormais la vie sociale. En réalité, ses représentations médiatiques alimentent la frustration. La misère sexuelle prime sur la jouissance dans la vie quotidienne. Mais l’amour s’apparente désormais à un grand marché rythmé par la concurrence. « La rencontre avec des partenaires potentiels est donc structurées dans et par un marché ouvert au sein duquel les gens se rencontrent et s’unissent en fonction de leur « goût », et rivalisent les uns avec les autres pour accéder aux partenaires les plus désirables », résume Eva Illouz. Une hiérarchie sexuelle se construit à partir de l’attrait physique et du capital érotique des individus. Des « capitalistes sexuels » tirent une fierté du grand nombre de leurs conquêtes. Le capital sexuel peut ensuite être réinvestit dans le champ professionnel puisqu’il révèle la bonne présentation de soi et la capacité à se mettre en valeur.    

    Le patriarcat et le marché amoureux  

    La liberté amoureuse se développe mais reste dans le cadre du patriarcat. La morale traditionnelle impose l’abstinence et le contrôle sexuel. L’engagement et le mariage déterminent la vie sociale. Les obligations familiales doivent être respectées. 

    Dans les sociétés traditionnelles, le nombre de conquêtes féminines reflète le statut social de l’homme. Dans la modernité, la multiplication des partenaires est une condition pour accéder à un statut social élevé. Ils expriment leur capacité à triompher de la concurrence sur le marché sexuel. « Les hommes affirment leur pouvoir social sur les femmes et sur d’autres hommes en exerçant une domination sexuelle sur de nombreuses femmes », explique Eva Illouz. 

    Les femmes restent attachées à une relation exclusive et monogame, conforme à la famille patriarcale. Les femmes subissent la contrainte normative et biologique de la grossesse. Les femmes doivent choisir des hommes plus âgés, plus cultivés et plus aisés pour se conformer à l’ordre social. Le marché de l’amour se rétrécit pour les femmes qui, de leur côté, deviennent plus cultivées et autonomes financièrement. Le choix d’hommes semble alors très limité. La phobie de l’engagement semble alors liée aux limites dans le choix amoureux. 

    Le désir sexuel se conforme à la logique marchande. La rareté devient plus attirante. Une femme distante et désintéressée devient alors plus attirante qu’une femme amoureuse. 

    Dans le choix amoureux, la rationalisation, l’évaluation, le calcul prime sur les sentiments et l’émotion. La  décision de l’engagement amoureux n’est plus intuitive mais repose sur un calcul rationnel. Cette évaluation diminue alors le désir de l’engagement par rapport au choix intuitif. 

    Pourtant, l’analyse d’Eva Illouz repose sur un postulat largement erroné. Pour la sociologue, les difficultés de l’engagement proviennent d’une abondance de partenaires amoureux. En réalité, la misère affective et sexuelle semble plus largement répandue que l’abondance. Les choix amoureux, pour la plupart des gens, ne sont pas aussi importants que le prétend la sociologue. Surtout, la phobie de l’engagement peut provenir d’une crainte légitime face à l’embrigadement du couple. Cette conception de l’amour semble sclérosée dans ce carcan de la monogamie. Mais l’attachement des hommes à une « sexualité de rencontres » n’est pas tant lié au désir et au plaisir. Au contraire, les hommes acceptent plus facilement les relations sexuelles car elles renforcent leur statut social de séducteur. Mais la phobie de l’engagement devient alors plus importante chez les hommes qui peuvent ainsi bénéficier d’une domination affective sur les femmes.                

    L’amour et la reconnaissance sociale  

    L’amour participe à une demande de reconnaissance. « L’amour romantique rehausse l’image de soi à travers le regard de l’autre », décrit Eva Illouz. L’amour permet d’affirmer sa singularité et sa propre valeur. Cette demande de reconnaissance fonde l’identité personnelle.

    Le désir de rencontre repose sur l’affirmation du moi. « Le fait de « se sentir bien avec soi-même » est devenu à la fois la cause et l’objectif de la rencontre amoureuse », explique Eva Illouz. L’assurance devient indispensable à la rencontre, et la rencontre renforce l’assurance. Les compliments ne correspondent pas à l’intensité de l’amour mais à une évaluation de la valeur sociale. Les femmes aiment les compliments pour obtenir une reconnaissance sociale. Selon le philosophe Axel Honneth, « l’image de soi […] dépend de la possibilité d’être continuellement validée par les autres ». La valeur sociale d’un individu s’établit à travers ses relations avec les autres. 
    Le désir « est évalué à l’aune de critères multiples et fluctuants, tels que l’attrait physique, l’alchimie émotionnelle, la « compatibilité » des goûts et le caractère », décrit Eva Illouz. Le choix amoureux ne correspond plus à des codes sociaux. La « désirabilité » dépende de choix subjectifs et individuels. L’amour devient plus incertain. « La conséquence est que les hommes et les femmes peuvent difficilement prédire s’ils attireront un partenaire potentiel et/ou entretiendront son désir », souligne Eva Illouz. La reconnaissance en amour n’est jamais acquise. Les différents signaux envoyés pour renforcer la valeur du moi sont souvent contradictoires. La « peur du rejet » explique souvent la timidité et menace l’édifice de la valeur personnelle. Contrairement au contexte des sociétés traditionnelles, la souffrance amoureuse ne renforce pas la valeur individuelle, mais affaiblit l’estime de soi. 

    Le modèle du couple et de l’engagement, valorisé par Eva Illouz, impose l’amour comme une relation de pouvoir. Un équilibre affectif doit être trouvé et la femme qui déclare son amour devient inférieure. Dans le cadre de la propriété sexuelle, les relations amoureuses sont régies par la logique du calcul économique. 

    L’amour de soi remplace prime sur l’amour des autres pour se conformer à la norme de l’autonomie. Le besoin de reconnaissance, notamment chez les femmes, est considéré comme lié à cet amour de soi. Les échecs amoureux ne sont pas considérés comme le résultat de logiques sociales, mais de défaillances psychologiques. 

    La sécurité, l’engagement et la ritualisation de la recherche du partenaire disparaissent dans la modernité. 

    L’amour face à la rationalité marchande  

    Le sociologue Max Weber oppose la rationalité moderne aux émotions. Pourtant, les deux ne s’opposent pas. Au contraire, la rationalité restructure nos émotions. Le désir amoureux n’est alors plus porté par la passion et l’érotisme.

    L’amour enchanté fait irruption dans le quotidien pour le bouleverser. Il est inexplicable, irrationnel et se produit dès la première rencontre. La spontanéité du désir prime sur le calcul et le savoir rationnel. Le désenchantement amoureux est détruit par l’action rationnelle, routinière et méthodique, qui prédomine dans la modernité. Toute forme d’intensité émotionnelle disparaît. L’abandon de soi et le ravissement sont remplacés par la science, le contractualisme et la technologie.

    La science et la psychologie contribuent à une rationalisation de l’amour. Le désir devient alors un sentiment excessif. « Le modèle de santé mentale qui pénétra massivement les relations intimes exigeait que l’amour soit aligné sur des définitions du bien être et du bonheur qui rejetaient en définitive la souffrance, et commandaient que l’on maximise ses intérêts », résume Eva Illouz. Ses intérêts personnels priment sur le désir de l’autre. La souffrance ne correspond plus à la norme émotionnelle. Les scientifiques vont même jusqu’à réduire l’amour à une chimie cérébrale. Selon Max Weber les explications scientifiques ne permettent pas de mieux comprendre le réel, La science semble même éloigner de l’expérience directement vécue. 

    Le féminisme impose une conception contractuelle et libérale de l’amour. « Parce que le féminisme, aux côtés de la psychologie clinique et de la culture de consommation, a été l’agent culturel le plus puissant de la formation et du changement des relations hommes/femmes, il peut et doit être analysé comme ses deux autres formations culturelles », explique Eva Illouz. Pour des féministes, le désir érotique doit être encadré par des règles procédurales neutres et par des normes dans le discours et la conduite. La symétrie doit primer sur la liberté de sentiment au nom des nouvelles normes d’un équilibre du pouvoir. Les féministes s’attachent à encadrer et réguler le désir sexuel selon ses nouvelles normes. Dans les règlements des universités et des entreprises, « le lieu de travail prévaut sur les relations érotiques » observe Eva Illouz. Le consentement est exigé à chaque étape, pour la moindre caresse. Les rencontres érotiques sont codifiées comme une décision politique. La spontanéité et le désir sont alors éradiqués. Les sentiments sont évalués, quantifiés et comparés. « La norme d’équité introduit de nouvelles manières d’évaluer, de mesurer et de comparer les actes de chaque membre du couple dans la vie quotidienne », souligne Eva Illouz. Même les émotions font l’objet de calculs mesquins. Cette logique rationnelle et contractuelle transforme alors la nature du désir.

    Internet impose une technologie du choix inspirée par la logique du marché. Les critères de sélection du partenaire se multiplient. La rationalisation prime sur l’émotion. « De tels critères ne sont pas seulement liés au statut social et à l’éducation, mais aussi à l’apparence physique, à la sexualité et, peut-être avant tout, au style émotionnel de l’autre », observe Eva Illouz. La psychologie impose que les deux personnes du couple partagent les mêmes goûts et le même mode de vie. Les sites de rencontres promettent des émotions amoureuses, mais à travers des méthodes rationnelles dans la sélection du partenaire. Un profil précis doit être définit. Le flux de rencontre doit être géré, car il est beaucoup plus important que dans la « vrai vie ». Les utilisateurs peuvent voir l’ensemble de leurs partenaires potentiels. Ses sites permettent donc de visualiser précisément l’offre et la demande. Une comparaison consciente est régie par des règles précises. Les partenaires potentiels deviennent mesurables, comparables, quantifiables. La compétition prime sur l’instinct. Le consumérisme permet de développer l’esprit de calcul et la maximisation des résultats devient un objectif. « Internet s’est de plus en plus organisé comme un marché, où il est possible de comparer les "valeurs" attachées aux personnes et d’opter pour la "meilleure affaire" » », résume Eva Illouz.

    Cette rationalisation de l’amour détruit l’érotisme, le désir sexuel et la passion amoureuse. Des normes comme « le procéduralisme, la réflexivité scientifique, le contractualisme et la rationalité consumériste ont interférés avec les modalités traditionnelles d’érotisation des relations hétérosexuelles », souligne Eva Illouz. L’expérience érotique et sexuelle devrait au contraire apparaitre comme une activité épanouissante avec des sensations très agréables. Le désir, le plaisir et la jouissance s’opposent à la froide logique rationnelle. L’amour, plutôt qu’un contrôle permanent, suppose un abandon au plaisir et à la sensualité.                       

    Un imaginaire amoureux atrophié

    2999666579 1 3 tizLkbLfAdorno observe que l’imagination devient un moteur du capitalisme, mais demeure cantonnée à une sphère délimitée. « La diffamation, ou plutôt la relégation de l’imagination dans un domaine spécialisé délimité par la division du travail, est un phénomène originaire de la régression de l’esprit bourgeois », souligne Adorno. Les imaginaires fabriqués par la culture de masse déterminent le désir amoureux.

    Dans le domaine de l’amour, l’imagination et la créativité peuvent permettre d’intensifier l’expérience vécue. Les médias diffusent une certaine conception de la vie et du bonheur personnel. La société de consommation impose des émotions et des fantasmes. Le capitalisme contrôle et oriente les désirs. Dans ce contexte, un nouvel imaginaire amoureux émerge. « L’imagination est donc une pratique sociale et culturelle qui constitue une partie significative de ce que nous appelons la subjectivité - le désir et l’acte de volonté. Elle façonne la vie émotionnelle et a un impact sur la perception qu’a le sujet de la vie quotidienne », souligne Eva Illouz. 

    Les médias et la fiction diffusent un imaginaire et des émotions auxquelles s’identifier. Cet imaginaire impose une certaine conception de l’amour. Selon Eva Illouz, « la forme narrative de nos émotions, et notamment de nos émotions amoureuses, est fournie par les histoires que diffusent les médias et la société de consommation ». L’amour, dans la modernité, se caractérise par une distance très forte entre la réalité et des attentes. L’imagination et les fantasmes alimentent alors la désillusion. 

    Cette déception provient de l’échec dans la vie quotidienne. Dans le couple la sécurité prime sur l’aventure et la passion. Le couple repose sur la rationalisation et sur la routinisation de la vie quotidienne. « Les vies familiales modernes sont prévisibles à l’extrême, et leur prévisibilité est agencée par un vaste ensemble d’institutions organisant la vie quotidienne : les livraisons à domiciles (nourriture, journaux, shopping sur catalogue) ; la télévision et ses programmes à heures fixes ; la sociabilité, pour l’essentiel planifiée à l’avance ; le loisir standardisé et les heures de repos », décrit Eva Illouz. 

    Les sites de rencontres sur internet diffusent un nouvel imaginaire. L’amour est associé au tchat et à la webcam. La relation affective se construit à distance, par écran interposé. « L’intimité n’est pas fondée sur l’expérience ou centrée sur le corps, mais découle d’un savoir psychologique et des modalités de la mise en relation avec l’autre », analyse Eva Illouz. L’intuition et les gestes du corps ne sont plus le moteur du désir. L’évaluation d’autrui repose sur une accumulation d’attributs. 

    Eva Illouz se contente d’une analyse, d’un constat certes éclairant, mais sans dessiner la moindre perspective révolutionnaire. Loin d’une libération sexuelle, la sociologue apparaît comme une social-démocrate de l’amour. Les relations affectives doivent être encadrées, régulées, pour éviter le moindre débordement affectif et sexuel. « L’une des principales thèses de ce livre est d’une grande simplicité : les hommes disposent aujourd’hui d’un choix sexuel et émotionnel bien plus grand que les femmes, et c’est-ce déséquilibre qui crée une domination affective », affirme Eva Illouz. Évidemment, dans la réalité, c’est le constat d’une généralisation de la misère affective et sexuelle qui s’impose. 

    La sociologue décrit bien les nouvelles règles de la séduction et la généralisation de l’évaluation marchande dans la sphère amoureuse. Elle souligne également le triomphe de la rationalité qui détruit toute forme de passion. Mais Eva Illouz s’enferme dans la défense de l’engagement amoureux et du couple bourgeois étriqué. Elle ne remet surtout pas en cause la répression sexuelle et la cause fondamentale du désastre amoureux : la propriété sexuelle à travers le couple.  Contre la grisaille marchande et la morale sexuelle, son constat devrait au contraire plaider en faveur d’une révolution poétique et orgastique.

    L'article nous montre bien, en substance, que ce que l'on peut appeler les 'relations sociales de séduction' sont en réalité un vaste MARCHÉ, régi par une LOI DE LA VALEUR, valeur dont les 'référentiels' varient, bien évidemment, selon les sociétés (époque, mode de production et 'stade' de celui-ci, culture sous-tendue) et, aussi... selon les classes sociales. L''Amour' comme notion abstraite, détachée de la réalité matérielle et du temps, n'a aucun début de commencement d'existence.

    L'on sait par exemple que la minceur féminine n'est un 'culte' que depuis quelques décennies, que le bronzage n'est devenu à la mode, dans les classes 'supérieures', que dans l'entre-deux-guerres (avant, c'était une marque des 'culs-terreux'), qu'un homme 'costaud' était il y a encore un siècle un critère dans le monde ouvrier et paysan, mais pas nécessairement dans le monde bourgeois où c'était l''élégance' vestimentaire qui primait (aujourd'hui, les deux critères ont tendance à être devenus interclassistes, mais sans la moindre 'logique' puisque le travail - condition de reproduction de l'existence - dans les sociétés occidentales est de moins en moins physique et le vestimentaire perd quant à lui, du coup, sa symbolique de classe) ; quant à ce qui est des critères 'non-physiques' (activités, talents, culture et 'conversation', etc.), ils ont, évidemment, énormément varié à travers les époques et varient, à une même époque, d'un pays à l'autre...

    Ce qui est certain, c'est que dans la société capitaliste pourrissante qui nous entoure, les relations humaines en général (pas seulement 'de séduction') tendent à devenir de plus en plus 'superficielles', 'intéressées', 'comptables' ; et que le processus révolutionnaire de négation du capitalisme par le communisme débouchera sur des rapports sociaux, y compris ceux-là, radicalement différents de ceux que nous connaissons aujourd'hui.

     


    votre commentaire

  • Le 5 mai prochain (anniversaire de l’élection du social-démocrate Hollande), face au scandale de l’affaire Cahuzac, Jean-Luc Mélenchon appelle à manifester en masse pour un ‘grand coup de balai’, une ‘révolution citoyenne’ et une ‘VIe République’ (appel rallié par Eva Joly d'EELV, représentante typique du courant 'girondin idéaliste' de l'idéologie républicaine, mais ce ralliement est contesté dans son parti).

    Mais qu’y a-t-il donc derrière ces slogans ? Quelle doit être la position des communistes révolutionnaires authentiques face à cet appel, quand bien même (comme cela est probable) il ne serait pas massivement suivi ? Voyons cela de plus près avec quelques citations du ‘tribun du peuple’ :

    1821740 3 e074 jean-luc-melenchon-en-meeting-a-metz-mercred"Un impôt n'est pas destiné à punir, il est destiné à partager. Il ne s'agit pas d'humilier les gens qui ont de l'argent, il s'agit de leur dire 'les amis ça va mal, la société toute entière doit participer à l'effort commun'." [Récemment, au sujet de la taxe à 75% sur les hauts revenus : les grands bourgeois sont donc les 'amis' du ‘camarade’ Méluche et il ne s'agit 'pas (de les) humilier' (les pauvres choux !), encore moins (on suppose) de les exproprier de leurs privilèges... au moins cela a le mérite d'être clair !]

    sardou temps-béni"La France, la France de la VIe République que nous voulons construire, la France n'est pas une nation occidentale, elle ne l'est ni du fait de son peuple bigarré, ni du fait qu'elle est présente dans tous les océans du monde, du fait qu'elle existe, vit et rayonne à proximité des cinq continents, de la Nouvelle Calédonie, la Polynésie, la Réunion, Mayotte, les Caraïbes, la Guyanesardou musulmanes française qui a la plus longue frontière de France, 800 kilomètres avec le Brésil." (Discours de campagne place du Capitole à Tolosa, 5 avril 2012)

    Sur l'interdiction du foulard aux élèves musulmanes dans les 'écoles de la République' (2004) : "On ne porte pas le foulard à l'école, parce que c'est comme ça chez les Français !"

            temps-des-colonies

    "Non, ce n'est pas la jeunesse qui est en cause ! Ce sont quelques personnes. Et je vais dire à ceux qui foutent le feu à un gymnase ou à une bibliothèque : ce sont des crétins. (...) Nous les rejetons, ils n'ont rien à voir avec la contestation de la société capitaliste. C'est le contraire ! Ils en sont les larbins, les fourriers, les bouffons, ils nous jettent la honte à tous" [au sujet des émeutiers d'Amiens, août 2012]


    Débat au Sénat sur la Charte européenne des langues régionales, 13 mai 2008 : 

    (L’association Diwan) "C'est une secte !"

    "Je suis persuadé que tous ici vous vous sentez aussi patriotes que moi, aussi attaché que moi à l'unité et l'indivisibilité de la République française, et dignes continuateurs de l'ordonnance de Villers-Cotterêts, qui a établi le français comme langue du royaume, permettant à chacun de se défendre, de témoigner et d'attaquer en justice en étant entendu par les autres. Pour moi, fier d'être jacobin, ne parlant que la langue française - et l'espagnol, langue de mes grands-parents - et qui, si je devais apprendre une nouvelle langue, choisirais l'arabe, langue minoritaire la plus parlée dans ma région, il ne s'agit pas de savoir si l'on est pour ou contre les langues régionales, pour ou contre la diversité culturelle, mais si le cadre légal existant est adapté et si la France a besoin de ratifier la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires."

    400px-SpeakFrenchBeClean"Si le nombre de locuteurs diminue et que leur âge moyen s'élève, il faut en chercher la cause ailleurs que du côté de la République et de la loi."

    "Je ne dis pas que les langues et les cultures régionales conduisent nécessairement à la sécession et au communautarisme, mais le risque existe. On ne crée pas de droits particuliers pour une catégorie particulière de citoyens du fait d'une situation particulière. Le fait de parler une langue différente ne peut pas instituer des droits particuliers pour ses locuteurs."

    "La langue bretonne est celle qui résulte du dictionnaire dit unifié de 1942, qui se substitue aux cinq langues bretonnes existantes. Je n'évoquerai pas son auteur, collaborateur qui fut condamné à mort par contumace, ni les conditions dans lesquelles ce dictionnaire fut rédigé et financé à l'époque..." [réponse cinglante de l'historien Philippe Martel ici]

    "La France américanisée..."


              mélenchon 6e répsuper dupont 


    ‘Espoir du peuple de gauche’ pour un nombre conséquent (dans les 10%...) d’esprits… désespérés, Jean-Luc Mélenchon nous offre en réalité, dans ses discours et dans sa conception de la ‘VIe République’ qu’il appelle de ses vœux, une ILLUSTRATION PARFAITE de l’idéologie ‘française’ dans sa version ‘social-républicaine’ au service du Grand Capital impérialiste !

    Son intention de ne pas toucher à la bourgeoisie en tant que classe (ni même de l’’humilier’, comme le ferait la taxe à 75% sur les hauts revenus de Hollande), mais simplement de l’appeler à plus de ‘solidarité nationale’, est affirmée noir sur blanc.

    Les autres propos illustrent parfaitement la manière dont l’État français, instrument politico-militaire de la grande bourgeoisie (devenue depuis monopoliste), s’est déployé depuis le Moyen-Âge jusqu’au 20e siècle en conquérant d’abord au fil de l'épée nos Peuples ‘hexagonaux’ (notre Peuple occitan, le Peuple breton, le Peuple basque etc.) puis, par la poudre à canon et les rafles négrières, les Peuples d’outre-mer (Caraïbes, Guyane, Corse, Kanaky, Polynésie sans compter les peuples du Maghreb et d’Afrique, aujourd’hui pseudo-‘indépendants’) ‘grâce’ auxquels, selon notre Méluche ‘national’, il ‘rayonne sur les cinq continents’… un déploiement politico-militaire et idéologique qu’il s’agit maintenant précisément, pour les révolutionnaires, de nier, dans le sens inverse, au moyen de la Guerre populaire !

    Voilà la CONCEPTION DU MONDE que propose, aux masses indignées par l’affaire Cahuzac, l'appel mélenchoniste à la mobilisation du 5 mai prochain !

    NOUS, COMMUNISTES RÉVOLUTIONNAIRES POUR LA LIBÉRATION DU PEUPLE OCCITAN, DISONS CLAIREMENT :

    Il n’y a pas de porte de sortie à la crise terminale du capitalisme dans une ‘refonte’ de l’État des monopoles !

    Le Pouvoir aux travailleur-euse-s, aux exploité-e-s, aux opprimé-e-s !

    Que mille Communes révolutionnaires (re)fleurissent d’un bout à l’autre de l’Hexagone, des corons ch’tis aux montagnes basques, catalanes ou corses, en passant par les ‘quartiers’ du 9-3, de Lyon, de Marselha et Tolosa !

    big provence flag


    votre commentaire

  • Nous nous contenterons d'une rapide réponse à la thèse, soutenue par le 'p''c''mlm', d'une (curieuse) "Nation autrichienne" qui aurait commencé à apparaître vers le début du 20e siècle (!) et encore été "en formation" à l'époque du communiste autrichien Alfred Klahr (années 1930).

    En réalité, ceci n'est pas faux ; mais mal formulé (y compris peut-être chez Klahr lui-même ; n'étant pas germanophones, nous n'avons pas suffisamment étudié ses thèses pour pouvoir nous prononcer).

    Car en réalité, ce qu'il y a ce sont DES PeupleS allemandS, comme nous pouvons le voir sur cette carte des dialectes (l'allemand dit "standard" étant une création récente et, de fait, pas vraiment la langue en famille et entre amis de la majorité de la population) :

    Elle en recense au total pas moins de 32 ; mais enfin il y a tout de même des grands groupes d'intercompréhension à peu près totale, qui sont au nombre de 7.

    Et l'on voit donc bien qu'il y a effectivement, à l'exception notable du Voralberg qui parle un dialecte alémanique plutôt proche de ceux de Suisse, une Autriche ; ou plutôt, pour être absolument exacts, un groupe austro-bavarois... aux côtés de 6 autres, comme par exemple le groupe alémanique qui englobe l'Alsace, le Bade-Wurtemberg et la Suisse germanophone, ou encore celui englobant les Pays-Bas et la Flandre belge.

    Ce qu'il s'est passé en réalité, c'est que dans le processus national-démocratique (bourgeois) qui court de l'occupation napoléonienne jusqu'en 1871, soit la majeure partie du 19e siècle, ces Peuples ou plutôt les bourgeoisies de ces Peuples (classe qui faisait l'histoire à l'époque) ont appelé à l'unité entre eux (généralement et sauf une petite minorité, sous une forme confédérale...) ; afin de permettre d'une part le développement du capitalisme industriel (intérêt de classe suprême des bourgeoisies des différents centres urbains) en faisant "sauter" les barrières douanières, différences de législation etc. ; et d'autre part d'être plus forts (l'union fait la force) face aux tentatives d'hégémonie et de grignotage territorial des grands voisins, en particulier... d'une certaine France (le souvenir de l'occupation et de la vassalisation par l'Empire français de Napoléon a été pour ainsi dire le fil conducteur de tout le processus).

    Ce processus a finalement abouti, en 1871, sous la direction de la Prusse et dans la solution de la "Petite Allemagne", c'est à dire sans les populations germaniques qui étaient sous l'autorité de l'Empire austro-hongrois, ainsi que sans (bien sûr) la Suisse alémanique, le Luxembourg, et le groupe hollando-flamand... Et les choses, malgré l'éclatement de l'Empire austro-hongrois en 1918-19, sont globalement restées ainsi depuis ; à l'exception des territoires les plus orientaux, la "Prusse historique" où les germanophones étaient (concrètement) des propriétaires terriens et des colons installés depuis le Moyen Âge et opprimant les Slaves, territoires rattachés à la Pologne ou directement à la Russie soviétique (Königsberg/Kaliningrad) en 1945* ; et des deux retours (novembre 1918 et fin 1944) de l'Alsace-Moselle à l’État français.

    L'Empire allemand de 1871-1918 était une confédération de royaumes, principautés et autres duchés (avec simplement annexion par la Prusse, en 1866, de quelques États confettis qui avaient choisi le camp de l'Autriche et dont les sociétés civiles n'avaient globalement plus grand-chose à foutre), et la République de 1918-33 d'"États libres" (Freistaaten) ; et après la tentative centraliste du régime nazi (Reichsgaue) a vu le jour une République fédérale de 10 puis (réunification de 1990) 16 Länder conçus pour être plus "rationnels" dans leur géographie ; tandis que l'Autriche était elle aussi organisée sur un modèle similaire (9 Länder). L'organisation économique en centres et périphéries est (au diapason) polycentrique : Munich, Stuttgart, Francfort, Cologne non loin de la Ruhr, Hambourg et Brême au Nord, et bien sûr Berlin capitale fédérale depuis la réunification de 1990 ; aucune de ces villes jouissant d'une réelle prééminence sur les autres (en Autriche en revanche, Vienne écrase de loin le reste avec plus de 20% de la population et un bon tiers du PIB).

    En termes nationaux réels (langue mais aussi culture, "ciment historique" etc.) il y a donc bel et bien effectivement, et certainement pas que depuis le début du siècle dernier, une Autriche ou plutôt une "Austro-Bavière" (expliquant entre autres la capacité qu'a eue le natif autrichien Hitler de devenir bavarois et donc allemand...), distincte non pas de "l'Allemagne" mais de 6 autres groupes dialectaux et culturels répartis sur... 8 États (République fédérale d'Allemagne, Autriche, État français avec l'Alsace-Moselle et la Flandre dunkerquoise, Suisse, Luxembourg de langue francique, Pays-Bas, Belgique, Italie avec le Sud-Tyrol et les Wälser du Val d'Aoste, et une petite minorité au Danemark).

    Ce qu'il n'y a pas, c'est de QUESTION NATIONALE à ce niveau ; suivant notre conception marxiste et léniniste que l'on pourrait résumer par "séparatisme avec ce qui est réactionnaire et opprime, fédération avec ce qui est progressiste/révolutionnaire et émancipe".

    Clairement pas, déjà, en et entre Allemagne et Autriche : personne dans ces deux États, sinon une minorité très réactionnaire pour ne pas dire d'inspiration nazie, ne vit comme une "oppression nationale" leur non-unité (l'existence de la République démocratique allemande, de 1949 à 1990, faisait l'objet d'un consensus hostile plus large du fait de l'anticommunisme, avec notamment en Allemagne de l'Ouest plusieurs millions de "Pieds Noirs" allemands chassés d'Europe de l'Est par l'Armée rouge* ; et donc en 1990, la réunification aussi) ; ni celle avec les autres populations germanophones en dehors ; et il n'y avait déjà pas grand-monde de progressiste dans ce cas au début du 20e siècle ou dans l'entre-deux-guerre, sauf peut-être les socedems "austro-marxistes" autrichiens contre lesquels polémiquait justement Klahr et qui auraient voulu rejoindre la République de Weimar (et se seraient ainsi retrouvés sous la botte nazie avec 5 ans d'avance, en 1933 au lieu de 1938).

    Et d'autre part, "dans l'autre sens", du fait de la structure politique fédérale, même en Autriche très hégémonisée économiquement par Vienne, il n'existe là encore pas vraiment d'aspiration à la séparation d'avec ces États en dehors de quelques courants globalement bourgeois et réactionnaires (en Bavière notamment). Une petite minorité slave (sorabe) en Allemagne (ex-RDA), et slovène en Autriche (Carinthie), lutte pour ses droits culturels et fait éventuellement face à l'hostilité de fascistes locaux.

    Ne pas être allemands n'est évidemment pas plus vécu comme une "oppression" aux Pays-Bas, en Flandre belge ou au Luxembourg. Les autres populations de langue germanique défendent leurs droits culturels nationaux et l'autonomie politique qu'elles peuvent, parfois contre un centralisme étouffant comme en Alsace "française", mais personne ou presque en leur sein ne souhaite le rattachement à l'Allemagne ou à l'Autriche ou à un grand État germanique commun ; surtout pas en Alsace au vu des deux expériences historiques (1871-1918 et 1940-44) en ce sens (certains courants bourgeois prônant à la rigueur de rejoindre... la Suisse).

    Presque personne... et clairement personne de progressiste, dans la mesure où les seuls qui pourraient le souhaiter de l'autre côté, dans l'Allemagne ou l'Autriche "d'accueil", sont des réactionnaires finis : séparation avec ce qui est réactionnaire, fédération avec ce qui est révolutionnaire/progressiste ; donc des gens et y compris (contrairement aux idées reçues) des gens aux idées progressistes et même révolutionnaires combattent le centralisme parisien en Alsace, mais ces personnes ne souhaitent évidemment pas le rattachement à une Allemagne toute aussi bourgeoise et qui ne vaut pas mieux, et où les seuls qui pourraient le souhaiter (car il faut aussi ce souhait) sont carrément des fascistes. Il en va (très certainement) de même au Sud-Tyrol "italien", dans le Benelux... et en Autriche (les Suisses ne se posent même pas la question, dans aucune classe ni aucun courant politique de la société).

    C'est-à-dire que, concrètement, il y a eu au 19e siècle un processus de fédération-unification BOURGEOIS, des bourgeoisies au service de leurs intérêts ; qui (rencontrant à un moment donné les intérêts de la monarchie et de l'aristocratie prussienne) a donné ce qu'il a donné, et qui n'a pas été la fédération intégrale des 32 aires dialectales germanique dans un même État ; mais aujourd'hui, dans un contexte bourgeois capitaliste et à l'ère de la révolution prolétarienne à l'ordre du jour, cette aspiration ne fait plus aucun sens. Le "cœur" des nations (nées historiquement, en Europe, à "l'aube du capitalisme" au Moyen Âge), le moteur de leur devenir historique, est aujourd'hui les masses populaires travailleuses ; qui ont de tout autres objectifs politiques que de construire pour le Capital la plus large base d'accumulation possible.

    Tel est ce que disait peut-être, mais exprimait sûrement (même inconsciemment) la position d'Alfred Klahr.

    Cela dit, bien entendu, toujours dans la même perspective de fédération avec ce qui est révolutionnaire, une situation révolutionnaire en développement pourrait changer la donne. C'est à vrai dire déjà arrivé : en novembre 1918, les ouvriers, paysans et soldats révolutionnaires d'Alsace et Moselle, qui avaient combattu (et leurs parents avant eux) durant quatre décennies l'autorité réactionnaire de Berlin, proclamaient la République des Conseils et souhaitaient rester... "allemands", dans la mesure où le reste de l'Allemagne était engagé dans un processus similaire (bien sûr, lorsque quelques mois plus tard la Révolution allemande était complètement écrasée, la même chose n'aurait plus eu de sens) ; et c'est ainsi que la "libération" de l'Alsace, c'est-à-dire l'entrée des troupes françaises et son rattachement à la France, a en réalité été une contre-révolution (farouchement appelée par la bourgeoisie et les sociaux-traîtres locaux). La même chose aujourd'hui serait tout à fait compréhensible, et défendue par nous.

    Il va également de soi que si l'Allemagne (ou une grande partie de celle-ci) entrait en révolution tandis que l'Autriche restait fermement un État bourgeois conservateur, le sentiment de vouloir rejoindre (sous une forme fédérative, très probablement) l'Allemagne révolutionnaire pourrait prendre sens (et de même en Alsace, au Luxembourg, en Suisse même, etc.), et peut-être même que des bases rouges autrichiennes relativement frontalières le feraient. Tandis que "dans l'autre sens", la minorité slovène, confrontée aux attaques d'éléments fascistes, pourrait entrer dans une démarche séparatiste d'autodéfense et peut-être constituer une autre base rouge, de même que les zones urbaines de concentration immigrée.

    Il y a fort à parier que, rencontrant une telle situation à son époque, Klahr aurait été du même avis ; mais à son époque les choses n'étaient pas ainsi et la volonté d'unifier les deux pays s'inscrivait dans un monstrueux projet bourgeois réactionnaire ; tandis que les "austro-marxistes" voulaient rejoindre la République de Weimar, c'est-à-dire des sociaux-démocrates égorgeurs de la Révolution de 1918-19...

    Pour que des questions nationales se posent de manière brûlante en Europe germanique, il faudrait que nous ayons... la Grande Allemagne d'Hitler justement ; que ce monstrueux projet réactionnaire ait finalement réussi à voir le jour : centraliste napoléonien et non fédéraliste, et surtout incluant (donc) l'Autriche et la Tchéquie, l'Alsace-Moselle et le Benelux, la majeure partie de la Pologne voire des Pays baltes, le Nord de la Yougoslavie voire des parties du Nord-Est de l'Italie, et peut-être une partie ou la totalité de la Scandinavie (sans compter la colonisation de toute l'Europe slave jusqu'à l'Oural). Là oui, en l'occurrence dans le sens de la séparation avec ce qui est réactionnaire et opprime, de telles questions se poseraient sans aucun doute. Mais voilà : ce monstrueux projet, contrairement à l'Empire parisien "France", a été un grand vaincu de l'histoire ; et de ses décombres a jailli une situation actuelle dans laquelle les choses ne sont pas ainsi (bien qu'il ait un peu repris du poil de la bête depuis 1990, avec une forme de néocolonialisme sur l'Europe de l'Est et une hégémonie croissante dans le cadre de l'UE).

    Il y a dans ces pays de multiples contradictions, de classe avec le développement d'un modèle de "faible chômage" passant par une exploitation féroce des travailleurs, coloniales intérieures avec des millions de travailleurs immigrés exclus de la citoyenneté par le droit du sang, une société démographiquement vieillissante etc. ; contradictions qui trouveront comme ailleurs leur solution dans la révolution ; mais les questions nationales n'y jouent qu'un rôle très accessoire.

     

    [* Il y a des gens, il faut vraiment qu'ils arrêtent avec les 14 millions d'Allemands expulsés d'Europe de l'Est en 1945 expulsion-allemands-europe-est. On peut sans doute reprocher bien des choses à l'URSS de Staline, mais pas ça. Ces gens étaient des COLONS et voir des libertaires parler de "châtiment collectif de prolétaires pacifiques sans défenses" est proprement à mourir de rire. Autant dire la même chose des sionistes de Cisjordanie ou des Pieds Noirs d'Algérie ! D'ailleurs l'un des nanars en question estime ouvertement qu'il faudrait (concrètement) autant tuer les "staliniens" et les maoïstes comme les camarades de Kansas City que les hordes du Ku Klux Klan et autres agitateurs de drapeaux confédérés...

    1945 a en réalité été l'épilogue apocalyptique d'un affrontement titanesque et d'un monde pluri-séculaire : celui de la colonisation allemande de l'Europe de l'Est. Un monde qui avait déjà commencé à vaciller à partir de 1918 avec la fin de l'Empire autrichien, la perte (déjà) de beaucoup de territoires polonais par l'Allemagne, la Révolution russe et l'indépendance des Pays baltes.

    Une situation qui avait fait de ces communautés de Volksdeutsche vksdth.png vksdth2.png de véritables BASTIONS du nazisme (en fait, c'est même là qu'il est né...) ; qui dans le même temps, en conditions d'élections libres ou même pas tout à fait libres comme en mars 1933, peinait à atteindre 30% dans la Ruhr ouvrière par exemple NSDAP-1933.png.

    Une histoire, celle du Drang nach Osten ("Poussée vers l'Est"), qui remonte au Moyen Âge, aux 13e-14e siècles avec les Chevaliers teutoniques s'emparant de vastes territoires du Nord de l'actuelle Pologne et des Pays Baltes État-chevaliers-teutoniques en y évangélisant-exterminant les populations alors païennes qui y vivaient. L'une d'entre elles portait le nom de Borusses... qui sera contracté en Prusse ; territoire qui (les colons allemands devenus luthériens) reviendra finalement à l'Électorat de Brandebourg (capitale Berlin) lequel, devenant royaume, prendra son nom et réalisera finalement au 19e siècle l'unité allemande sous sa coupe. La Prusse n'est donc pas la région de Berlin, mais le nom d'une COLONIE allemande aujourd'hui partagée entre Pologne et Russie (enclave de Kaliningrad), donné à l'État qui réalisera l'Unité... C'est dire combien cette histoire est absolument motrice pour celle de l'État moderne, du capitalisme et de l'impérialisme allemands.

    Les Pays Baltes seront, à partir de la même époque, sous la coupe de la propriété foncière de barons germaniques ; que par la suite les souverainetés suédoise puis russe maintiendront jusqu'en 1918.

    Au 18e siècle, la Prusse et l'Autriche participent au partage de la Pologne (Silésie, Posnanie etc.). L'Autriche est un Empire qui s'étend jusqu'aux Carpates, du Sud de la Pologne au Nord de la Yougoslavie, et implante dans tous ces territoires de colons autrichiens, bavarois ou saxons.

    La Russie de la même époque est entrée dans un processus de conquête de la steppe sur les populations tatares, et aussi d'"auto-colonisation" : pour "tenir son rang" face à l'Europe de l'Ouest colonialiste, une aristocratie européanisée, mariée à du sang bleu européen et écrivant son histoire comme descendante des Vikings, réduit plus de la moitié de la population à une condition de serfs proche de l'esclavage servage-russie. Catherine II, princesse allemande devenue tsarine, fait venir des compatriotes pour "mettre en valeur" les nouvelles terres, notamment dans la région de la Volga.

    Dans tous ces pays tous ces gens étaient soit des landlords, des grands propriétaires fonciers, soit des koulaks (paysans riches exploitant les pauvres) ou des bourgeois ; dans tous et même le "pire" des cas une population INTÉGRALEMENT SUPÉRIEURE aux autochtones : s'il y avait par exemple, sur un territoire, 80% d'Allemands et 20% de Slaves, Baltes ou autres, ces 20% se recoupaient quasi systématiquement avec les couches les plus pauvres et exploitées de la société. Et fermement, viscéralement attachés au culte de cette supériorité sur les "barbares".

    Comme on l'a dit, lorsque leur monde commença à s'effondrer en 1918 ils adoptèrent massivement les idéologies pangermanistes et notamment le nazisme, dont la politique expansionniste Generalplan-Ost sera totalement sous-tendue par faire la "jonction" avec ces Volksdeutsche... et en amener d'autres.

    Il est peut-être possible, dans un esprit démocratique "idéal", de préférer que les choses se soient terminées autrement ; mais il n'est pas possible de pleurer sur le sort de ces populations en effaçant de l'Histoire tout ce contexte, et en perdant de vue l'immense LIBÉRATION de siècles d'oppression qu'ont été les choses en 1945, que les populations concernées soient par ailleurs très enthousiastes à l'arrivée de l'Armée Rouge ou beaucoup moins...

    Et rappelons que depuis la chute des "socialismes réels" révisionnistes, la Réunification et la fin de l'occupation militaire quadripartite, l'impérialisme allemand, certes pas sous une forme coloniale de peuplement et militaire, mais bien sous celle de la domination des monopoles, est redevenu une réalité en Europe de l'Est.]


    1 commentaire



    Suivre le flux RSS des articles
    Suivre le flux RSS des commentaires